Le Marquis de Baroncelli et Buffalo Bill
Spectacles du sauvage et fêtes tauromachiques en Camargue et en Amérique du Nord1
p. 192-204
Texte intégral
1En 1992, la dimension patrimoniale de la tradition tauromachique camarguaise – la Bouvino, « l’espèce bovine » en oc, une appellation qui signifie le haut degré d’identification des fervents à l’animal – a été pour la première fois officiellement reconnue par les autorités administratives françaises, grâce à l’inscription sur l’Inventaire Supplémentaire des Sites de sept arènes de villages situés dans la plaine du Languedoc oriental1. C’est dans cette micro région située autour de la Petite Camargue, entre les portes de Montpellier et Beaucaire, que l’on observe le plus grand nombre de courses et de fêtes taurines par habitant, réparties entre quelque soixante-dix communes, loin devant la partie provençale de la Bouvino, qui se limite à une trentaine de communes situées entre Châteaurenard au nord-ouest, Mallemort au nord-est et les Saintes-Maries-de-la-Mer au sud. C’est également dans la partie languedocienne de la Bouvino que l’on trouve les arènes de village dont la disposition témoigne avec le plus de force de l’enracinement de la culture taurine au cœur des sociétés locales. Ainsi à Marsillargues (Hérault) et à Saint-Laurent d’Aigouze (Gard), en dépit de leur esthétique discutable selon les critères de l’architecture classique, puisqu’elles sont essentiellement faites de tubulures et de planches, les arènes ont-elles été intégrées dans la mesure de protection parce qu’elles sont installées en permanence sur la place centrale de ces villages, cristallisant ainsi dans l’urbanisme l’étroite association des réseaux locaux de sociabilité à la figure emblématique du taureau2.
2On pourrait trouver paradoxal que la tradition taurine camarguaise, couramment assimilée au folklore provençal, soit plutôt enracinée dans la vie collective des populations bas-languedociennes. C’est que très tôt, le marquis de Baroncelli-Javon et ses émules, manadiers camarguais liés au Félibrige et à l’entreprise mistralienne de restauration des usages provençaux, trouvèrent dans ces plaines occidentales une ferveur particulière pour le jeu taurin dont ils étaient les promoteurs. La Prouvenço que canta e lou Lengadoc que coumba, disait l’éleveur poète Joseph d’Arbaud, tandis qu’une soixantaine d’années plus tard, l’un de ses plus passionnés lecteurs qui était aussi l’un de mes informateurs privilégiés, le grand manadier Marcel Mailhan, dont les origines étaient languedociennes mais dont l’élevage, le domicile et les réseaux sociaux étaient plutôt provençaux, me disait que toujours, qu’il se trouvât à cheval ou en voiture, il avait été irrésistiblement attiré par « l’Ouest, l’Ouest, encore l’Ouest… ». Cet Ouest fascinant vers lequel se dirigeaient régulièrement, au début de l’été, les gardians et le bétail qui transhumaient depuis les marais desséchés de l’île de Camargue. Les troupeaux affamés, enrobés par la poussière et les nuées de moustiques, traversaient le Petit-Rhône pour gagner les prairies encore herbeuses du village languedocien du Cailar et les champs moissonnés de la plaine du Vidourle, déboulant vers ces confins de l’Ouest que la verve félibréenne, jamais en reste pour colorer de mythe et de religiosité les tâches de l’élevage du taureau « sauvage » du pays, baptisa « La Mecque de la tauromachie camarguaise ».
3L’aura nébuleuse de la tradition taurine s’est transmise dans la sèche luminosité d’un spectacle d’arènes camarguais où, contrairement à la corrida, c’est le taureau, jamais mis à mort, qui est le protagoniste ; c’est lui dont le nom est clamé en grosses lettres par les affiches ; c’est pour lui que le public se passionne lorsque sa combativité, manifestée tout au long de sa carrière, est devenue légendaire dans le pays de Bouvino. Cette exaltation de l’animal par le jeu résulte de la volonté des manadiers-félibres de créer autour du delta de Rhône un espace sauvage idéalisé, une sorte de réserve de la pureté originelle de l’esprit d’Oc dont la race camarguaise du bovin de terroir serait le défenseur ultime. Une telle construction identitaire s’est affirmée dans le processus de codification de la course libre, ou course camarguaise, entre la fin du xviiie siècle et le début du xxe, la touche finale du spectacle et de la représentation festive qu’il diffuse ayant été apportée par Baroncelli et ses émules au moment même où la corrida importée d’Espagne devenait le référent dominant en matière de tauromachie3. Prenant cette influence à revers, la course camarguaise est devenue un modèle régional alternatif où le taureau, aussi curieusement que cela paraisse, est érigé à un rang héroïque homologue à celui du matador espagnol. Sélectionné au sein d’une race dite « pure Camargue » – dont le type zootechnique avait été établi par Baroncelli lui-même – le taureau de course résulte en réalité de l’orientation particulière d’un élevage inéluctablement marqué par les croisements avec du bétail espagnol de corrida, une pratique qui se généralisa en Camargue au cours de la seconde moitié du xixe siècle. Toutefois, au début du xxe siècle Baroncelli et certains de ses confrères languedociens décidèrent de revenir à la production d’un animal de « pure race camarguaise », ce qui était en réalité une gageure mais qui portait une lourde signification idéologique : affirmer l’identité régionale contre les influences étrangères, espagnoles ici.
4Parce que cette construction du taureau de pays reposait sur la nécessité de retourner le modèle de la corrida, elle a débouché sur un saisissant anthropomorphisme tauromachique. Ainsi, de nos jours encore, le taureau camarguais célèbre peut-il faire l’objet de véritables rites d’immortalisation : érection d’une statue sur la place publique ou bien, après qu’il est mort de sa belle mort à l’issue d’une longue carrière dans les arènes, inhumation en position debout sous une stèle commémorative. Un tel paradoxe repose sur une forme de jeu où, un quart d’heure durant, le taureau « cocardier » est chargé de défendre contre ses adversaires raseteurs des « attributs primés » (cocarde, glands, frontal, ficelles), préalablement attachés sur son frontal. La valeur numéraire initiale de ces attributs fait pendant la course l’objet d’une enchère à laquelle participent les politiques et commerçants locaux. Ces notables cherchent à entretenir leur prestige aux yeux du public en associant leur munificence à la puissance de l’animal qui sait inspirer la crainte et mettre en fuite des opposants humains animés d’intentions vénales. C’est ainsi que le cocardier représente les valeurs dominantes de la société régionale, dont le manadier, propriétaire foncier et homme à cheval, est le parangon ; il travaille contre la menace déstabilisatrice des raseteurs, hommes à pied qui étaient à l’origine issus des franges les plus marginales de la population et qui sont aujourd’hui souvent issus de l’immigration maghrébine, ou tout au moins des catégories néorurales ou périurbaines de Nîmes et Montpellier, c’est-à-dire d’origine extérieure à la Bouvino4.
5Dans une région où la corrida espagnole est également pratiquée et appréciée, la représentation bouvinesque du taureau dominateur est le vecteur d’une conception défensive du terroir dont l’un des signes les plus forts, désormais patrimoniaux, est l’installation permanente des arènes sur la place des villages bas-languedociens où l’on observe une passion collective maximale pour la course de taureaux et la fête qui l’encadre. Si certains auteurs ont pu écrire que la culture taurine camarguaise est le seul domaine dans lequel l’entreprise de « restauration » des usages provençaux (en fait de création de traditions) s’est traduite par un réel engouement populaire5, il est indéniable que sur ce plan, la mythomanie (au sens strict du terme) d’un Baroncelli a suscité dans le « pays réel » de la Bouvino un écho qui s’est prolongé et même amplifié jusqu’à nos jours, suivant les vicissitudes du temps.
De Lou Biòu à Jacob White Eyes, d’est en ouest : la fondation baroncellienne d’une cosmologie bouvinesque
6La société contemporaine de Bouvino exprime régulièrement son idéologie défensive en opposant le signe du taureau aux menaces qu’elle perçoit dans le monde extérieur. Ces menaces sont en premier lieu l’État central jacobin et, au-delà, l’univers désincarné de la bureaucratie de la Communauté européenne. Cette dernière est toujours suspectée d’introduire subrepticement des règlements inspirés, bien sûr, par les cultures des pays du Nord du continent, qui tendent à rendre problématique, voire à prohiber purement et simplement, l’organisation des jeux taurins. Quant à l’État central, malgré la récente bienveillance d’un Ministère de la Culture porté par les vagues patrimoniales de la mondialisation, il a gardé depuis l’Ancien Régime une réputation répressive, ne tolérant les courses que dans la mesure où elles n’occasionnent pas de troubles sur la voie publique. Parmi les jeux de la fête votive bouvinesque codifiés par Baroncelli, celui de l’abrivado-bandido (conduite matinale d’un petit troupeau de taureaux par des gardians à cheval depuis les pâturages jusqu’aux arènes, puis trajet-retour le soir après la course) pose problème parce qu’il se déroule sur la voie publique, avec la libre participation du public, et peut ainsi entraîner des accidents graves. Ainsi en 1995 ce jeu avait-il été menacé d’interdiction par les préfectures du Gard et des Bouches-du-Rhône, suite au décès accidentel de personnes au cours des fêtes d’Aigues-Mortes et de Saint-Rémy-de-Provence. La réaction collective des gens de Bouvino ne se fit pas attendre : une manifestation de soutien à la tradition taurine réunit entre les villes voisines de Beaucaire et Tarascon 30 000 personnes, avec en tête du cortège un bon nombre d’élus locaux, la poitrine ceinte de l’écharpe tricolore. Devant la pression populaire, les préfets ne décrétèrent pas l’interdiction des abrivados-bandidos, même s’ils les soumirent à un cahier des charges très strict pour les municipalités organisatrices des fêtes : information préalable sur le parcours, barrières de sécurité etc.
7Depuis les origines de la codification baroncellienne de la course camarguaise, l’esprit revendicatif des « gens de Bouvino » a maintes fois trouvé l’occasion de s’exprimer, en particulier contre les attaques des groupes de protecteurs des animaux, de la SPDA dont le neveu de Mistral disait qu’elle était « anglo-saxonne d’origine et d’essence6 », et plus généralement contre les influences étrangères. Cela ne manque évidemment pas de surprendre dans une région soumise à de multiples influences et traversée par d’innombrables vagues migratoires depuis la plus haute Antiquité, Baroncelli étant lui-même issu de la petite aristocratie foncière avignonnaise d’origine florentine. Cependant, la représentation tauromachique que ce dernier avait contribué à mettre en forme, qui oppose la prétendue pureté raciale d’un taureau de pays survalorisé à des adversaires humains marginalisés et en partie recrutés dans les milieux immigrés, est bel et bien porteuse d’une structure exclusive et d’une conception défensive du terroir et des libertés locales, dont nous avons montré ailleurs qu’elle constituait l’un des facteurs pouvant expliquer les habituelles performances électorales du Front national au sein de la Bouvino7.
8Naguère, Baroncelli et ses amis félibres, membres de l’aristocratie et de la bourgeoisie foncières régionales, idéologiquement proches de l’Action française et de Maurras, étaient persuadés que l’amour de la patrie passait d’abord par celui du clocher et surtout de la nature sauvage de la Camargue, dont le taureau était l’incarnation et son gardien à cheval le héraut :
Raço d’O, tant que ta jouvenço
Au Tau gardara sa cresènço
Iéu proumete, serai toun breu e toun blouquié.
Race d’oc tant que tes jeunes hommes
Garderont leur croyance au Taureau
Je te le promets, je serai ton talisman et ton bouclier8.
9Ainsi parlaient, dans un poème devenu emblématique au sein des milieux de Bouvino, Lou Biòu et le gardian baroncellien, fondus dans une même statuaire mi-animale, mi-humaine, les défenseurs d’un « pays réel » menacé par les invasions du « pays légal », et dont le combat romantique se rapprochait idéalement de celui que les Indiens d’Amérique du Nord venaient de perdre contre les conquérants de la modernité capitaliste. On le sait, le marquis de Baroncelli-Javon était passionné par les Indiens des Plaines, probablement influencé par une mode qui eut cours dans les milieux lettrés de l’aristocratie antirépublicaine de la seconde moitié du xixe siècle, suivant laquelle l’expérience du contact avec la sauvagerie de l’Ouest américain promettait une voie de salut individuel contre la « décadence » de la vieille Europe9.
10En 1905, notre marquis « monta » à Paris assister au Wild West Show de Buffalo Bill, alors en tournée européenne, et fit la connaissance de plusieurs chefs sioux, Jacob White Eyes, avec qui il maintint par la suite une correspondance épistolaire, Iron Tail et Lone Bull. Il invita ces deux derniers au Cailar, sur ses pâturages d’été de « La Mecque », à assister au triage d’une abrivado. Au comble de sa fertile imagination, il crut alors voir entre ces Indiens et les gardians un « rapport caché qui nous lie à leur destinée, eux qui sont les derniers représentants d’une race superbe et mystérieuse que les Blancs sont en train d’exterminer au nom de ce qu’ils croient être la civilisation » ; tous ces cavaliers du monde sauvage réunis sablèrent le champagne « à la santé des races qui luttent10 ». Comme les Gitans, qui auraient été, selon Baroncelli, les cousins des Indiens autrefois réunis dans la même population de l’Atlantide, les gardians avaient le « cœur rouge ». Ainsi le manadier poète prit-il comme un insigne honneur le fait de recevoir de ses amis sioux un nom indien, Zinktala Waste (« L’oiseau fidèle ») ; il alla jusqu’à établir un lexique oglala-provençal et à donner un nom oglala à ses gardians11.
11Cependant, la manie de Baroncelli pour les Indiens des Plaines lui demeura essentiellement fantasmatique puisque, comme le dit plaisamment Zaretsky, elle ne le conduisit pas plus loin à l’ouest que Toulouse… voire, pour forcer le trait, que les prairies du Cailar, l’Ouest camarguais. Mais le manadier-félibre y trouva un important relais imaginaire pour fonder une cosmologie basée sur la nature sauvage idéalisée de la « terre de sel » du delta rhodanien, réserve de la « race d’oc » : à l’ouest, les Amérindiens, à l’est, les Gitans, et au centre, réceptacles de ces influences « authentiques », Lou Biòu et son gardian. Ce curieux rousseauisme identitaire et aristocratique constituait le mythe de fondation d’une nation régionale – la Naciòun gardiano – qui tirait sa force de la reconnaissance de la supériorité immanente du sauvage sur ce que les « hommes blancs » – ici comme dans les prairies du Dakota, du Montana ou de l’Indiana – les Anglo-Saxons appellent « civilisation ».
Buffalo Bill et le mythe de l’Ouest sauvage
12Baroncelli n’était certes pas à une contradiction ni à un amalgame près : outre la corrida, qui lui servit à la fois de modèle et de repoussoir, il fut extrêmement impressionné par le Wild West Show de Buffalo Bill, un spectacle où, comme dans la corrida, il s’agissait de représenter la domination du sauvage par la civilisation sur la frontière des immenses plaines de l’Ouest, mais où le sauvage apparaissait si magnifié qu’il suscitait l’identification du spectateur. Ce n’est pas tout : il s’agissait d’un spectacle où les acteurs jouaient leur propre rôle et dont l’histoire relevait d’une véritable épopée moderne. En 1869 William Cody, un éclaireur de l’armée américaine engagé dans les guerres indiennes et la Conquête de l’Ouest, rencontra l’écrivain Edward Judson, un aventurier bigame qui tua un homme en duel à Nashville et n’échappa à la mort par pendaison que parce que la corde prévue à cet effet céda sous son poids12. De cet explosif cocktail intellectuel sortit un roman à trois sous intitulé Buffalo Bill, the King of the Border Men publié en feuilleton dans le New York Weekly fin 1869. Devant le succès éditorial de l’intrigue et de ses personnages, qui associaient la sauvagerie de l’Ouest encore insoumis, les pionniers blancs et le bétail, les Indiens nomades et le bison, Cody fut sollicité pour jouer son propre rôle sur la scène des villes de l’Est, où les populations natives avaient depuis longtemps été exterminées et où les influences anglo-européennes étaient plus marquées qu’ailleurs aux États-Unis. Ce genre de performance était assez courant à cette époque ; ainsi retrouva-t-on sur les planches, dans leur propre rôle, aussi bien Calamity Jane que Robert Ford, ce dernier étant voué à rejouer indéfiniment, faisant de sa propre félonie une source de revenus et de célébrité, l’assassinat de son protecteur Jesse James qu’il liquida d’une balle dans la nuque.
13La société américaine du spectacle, le show business, confondait personnage et acteur, loisir et travail sérieux, héros et vilain, mettant en œuvre autour de sa propre histoire en train de se faire une entreprise originale dont furent issues les mythologies modernes les plus caractéristiques : le genre western et, au-delà, tout le folklore rénové des sociétés occidentales engagées sur la voie de la mondialisation. À l’origine de ce phénomène massif, William Cody se tenait lui-même à la marge de la vie réelle et de sa représentation, de l’ethnographie et de la fiction. Sa carrière de showman s’initiait sous les doubles auspices des programmes de théâtres new-yorkais et de la vie sociale des Indiens des Plaines. Suivant le rythme des variations saisonnières des deux pôles de son existence, il guerroyait dans l’Ouest avec l’armée et chassait le bison en été, lorsque les tribus indigènes se regroupaient à ces fins ; en hiver, lorsque la neige recouvrait la prairie et que les Indiens se dispersaient en petites bandes le long des rivières pour survivre, il regagnait la grande métropole de l’Est où, sous les feux de la rampe, il jouait son propre rôle13.
14Au cœur de cette articulation spatio-temporelle de la cosmologie américaine, entre les extrêmes de la civilisation et du monde sauvage, Buffalo Bill représentait la geste qui signifiait à la fois la fin des peuples amérindiens et leur survalorisation dans le spectacle. Son numéro qui rencontra le plus grand succès à New York était l’exécution du chef cheyenne Yellow Hand, que Cody avait réellement tué et scalpé lors de la campagne d’été précédant la première du spectacle. L’image de l’éclaireur brandissant le scalp au milieu du champ de bataille et au grand dam des peaux-rouges fut l’une des figurations de Buffalo Bill les plus largement diffusées, par voie de presse, par la littérature populaire et la réclame commerciale14. Autrement dit, le héros n’était jamais tant applaudi que lorsqu’il démontrait à quel point il s’identifiait avec les Indiens et leurs manières…
15En 1883 Cody, devenu la première grande célébrité médiatique américaine, donna naissance à son œuvre majeure, le Wild West Show, qui gagna un tel succès qu’il devint America’s National Entertainment. Fondé sur les traditions anglo-américaines du cirque ambulant, le Wild West Show profita de l’association de Cody avec le génial entrepreneur de spectacles théâtraux Nate Salsbury, qui eut l’idée de reproduire sur la piste les techniques équestres des Plaines de l’Ouest. Ces techniques étaient issues d’un processus de diffusion et de transformation des modes hispaniques de l’élevage extensif du cheval et du bœuf, introduits en Amérique à partir de la colonisation du Mexique, au xvie siècle.
16Nous avons montré ailleurs que, dans le contexte des immensités américaines, ce type d’élevage et la tauromachie qui en est directement issue s’étaient différenciés du modèle espagnol originel grâce à l’apport des populations métisses et indigènes15. Parmi ces dernières, il y avait bien sûr les employés des haciendas coloniales du centre agricole du Mexique, mais aussi les Indiens chasseurs collecteurs insoumis de l’Ouest et du Nord, indios bravos, « Indiens sauvages », ainsi que les appelait l’administration coloniale. Vivant sur les frontières de l’empire espagnol, sur les terres de mission qui, à la fin du xviiie siècle, remontaient jusqu’à la Californie, l’Arizona, le Nouveau Mexique et le Texas, les Indiens libres mettaient à profit leur rapide assimilation (et recréation) de l’équitation, pour développer une économie du raiding, attaquant les troupeaux des colons, capturant les chevaux et les bovins marrons (retournés à l’état sauvage). À cet effet, ils adaptaient aux animaux d’origine européenne certaines techniques de chasse (battue, encerclement, piégeage au collet, enfermement en enclos) qu’ils appliquaient traditionnellement au gros gibier, cervidés notamment. Plus au nord, dans les Plaines, le bison fit les frais de ce développement original de la technologie indigène, devenant la ressource principale d’une civilisation dont l’essor aura été déterminé par sa capacité à tirer profit de l’invasion du cheval européen16. Le Mexique et le Sud-Ouest des actuels États-Unis devinrent ainsi le creuset d’un processus de transformation de l’élevage européen d’où émergèrent deux techniques américaines fondamentales, l’une à la fois ludique et utilitaire, l’autre essentiellement ludique : le piégeage au lasso et la monte du taureau, dont nous avons vu dans quelle mesure elles découlaient de l’apport indigène au sein du métissage américain17.
17Ainsi très rapidement, le Wild West Show présenta-t-il comme un spectacle extraordinaire les chevauchées de vrais Indiens des Plaines à cheval et les exercices de steer roping, piégeage au lasso des bouvillons18. Parallèlement, il dramatisait les scènes de l’histoire récente de l’Ouest. Certes, il s’agissait toujours de faire valoir la capacité des vaillants pionniers et soldats blancs à dominer la nature sauvage et les Indiens qui en étaient les produits, mais la raison spectaculaire du thrilling imposait que ces derniers apparussent comme des protagonistes, toujours susceptibles de remettre en cause la Manifest destiny, cet appel d’ordre divin qui entraînait irrésistiblement les colons de l’Est vers l’Ouest. Paradoxe significatif, le triomphe majeur du Wild West Show fut la reconstitution, avec trois de ses participants réels, Plenty Horses, Painted Horse et Rocky Bear, de la bataille de Little Big Horn qui se termina par la cuisante déroute des « Tuniques Bleues ». La note fantaisiste était apportée par Cody lui-même : absent en réalité de la bataille, on le voyait dans le show voler au secours du Général Custer, sans parvenir à sauver celui-ci du martyre dont la légende illumina la fin19. Ainsi le spectacle américain exaltait-il, dans une dramatique simultanéité, les valeurs patriotiques chrétiennes et les forces qui menaçaient ces valeurs sur les confins de la nature sauvage. Plus étrangement, annonçant ainsi une veine récurrente qui déboucha sur certaines des plus grandes réussites du cinéma hollywoodien, au-delà du genre western, telles que Delivrance ou Apocalypse Now, il faisait du catastrophique échec de l’entreprise de civilisation et de la sourde puissance de son envers le plus radical les motifs par excellence de l’entertainment.
Le sauvage américain et le retour de la tauromachie dans le show de l’Ouest
18Avant de devenir une exhibition internationale présentant toutes sortes de « peuples cavaliers », cosaques et arabes notamment, le Wild West Show se limitait à faire valoir les altérités frontalières de la société nord-américaine. Outre les Indiens des Plaines, des cavaliers mexicains participaient au spectacle, qui brillaient par leur talent au lasso et leur génialité dans l’exercice de monte du taureau. Ce dernier mode d’inversion parodique de l’équitation et de la tauromachie espagnole, qui allait devenir partie du folklore des cow-boys de l’Ouest20, avait frappé Cody à tel point que lors de la première saison de tournées du Wild West Show, pris de boisson comme à l’accoutumée, il se mit en tête de monter un bison sauvage21. Même s’il ne renouvela pas l’expérience, il est bien possible que sa tentative eût fait école parmi les Indiens, à moins que lui-même n’eût été influencé par les audaces auxquelles ceux-ci l’avaient habitué. Quoi qu’il en soit, en 1882 l’exercice du piégeage au lasso et de la monte des « bisons sauvages des Plaines » figurait au programme du Wild West Show22, et plus tard, lors des compétitions de rodéo, on pouvait voir à l’occasion un Indien tenter cet exploit, à l’image du Crow Sampson Bird in Ground qui, en 1915 au cours du Roundup de Miles City (Montana), aurait été le premier à le réussir23.
19Monteurs de taureaux et manieurs de lasso experts, les Mexicains apportaient avec eux la culture tauromachique des Espagnols, que les habitants anglo-saxons du Sud-Ouest des États-Unis connaissaient bien puisque si le Mexique y perdit la souveraineté entre 1836 et 1846, on pouvait encore assister à des corridas (annoncées comme « Bullfight ») à Monterey (Californie) vers 189024. En 1884 à Dodge City (Kansas), au cœur des Grandes Plaines de l’Ouest, eurent lieu une fête et une corrida avec mise à mort, laquelle suscita une très vive polémique de la part des ligues puritaines et des sociétés protectrices des animaux25. Certes, hormis ce cas particulier, ces dernières eurent généralement gain de cause pour faire reculer l’influence mexicaine – assimilée à la « barbarie », à la corruption métisse, plutôt qu’à une « sauvagerie » dont les Indiens faisaient figure de parangons. Ainsi progressait l’éthique civilisatrice anglo-saxonne sur les marges méridionales et occidentales des États-Unis : la corrida avec mise à mort fut interdite dans tous les États de la république fédérale, et les combats de coqs ne subsistèrent au xxe siècle que dans certains États du sud jusqu’à ce qu’ils furent finalement prohibés à leur tour.
20Considérant la progression de la sensibilité « animalitaire », on comprend que le spectacle de Buffalo Bill fît l’objet d’une vigilance particulière de la part des gardiens des bonnes mœurs. Lors de la World’s Columbian Exposition qui se déroula à Chicago en 1893, Cody, qui avait eu maille à partir avec la Society for the Prevention of Cruelty to Animals (SPCA) parce qu’il avait annoncé une course de chevaux d’endurance à travers la nature arrivant à Chicago dans l’arène du Wild West, décréta par voie de presse qu’il était membre à vie de la Humane Society et qu’il était lui-même très soucieux de ne pas infliger de mauvais traitements aux animaux26. Il arrangea l’affaire en proposant à la SPCA de superviser officiellement une course dont la publicité disait qu’il s’agissait d’une :
Equine Race Humanely Run
Humanely Won
Under Supervision of the Society for the Prevention of Cruelty to Animals
21Ce souci typiquement anglo-saxon allait par la suite imprégner l’organisation des rodéos, laquelle est de nos jours surveillée de près par les associations de protection animale qui imposent des aménagements dans les spectacles afin de diminuer les risques de blessure pour les chevaux et les taureaux présentés dans l’arène. Toutes les associations de rodéo s’honorent d’ailleurs à mettre en avant leurs Animal Welfare Rules27.
22Mais les origines ont la peau dure, et plus encore la fascination étasunienne pour son altérité frontalière, dont William Cody aura donné la première représentation spectaculaire. Ainsi l’indique l’adoption du terme espagnol rodeo pour qualifier le jeu d’arènes nord-américain, à la suite du spectacle de Buffalo Bill, alors même qu’au début du xxe siècle, les compétitions sportives entre cow-boys étaient présentées, sur les affiches et les comptes rendus de presse, comme des spectacles « Wild West28 », un genre qui est finalement tombé en désuétude (si ce n’est aujourd’hui, à titre de patrimoine forain, dans les parcs Disney World). Parfois, comme s’il s’agissait de préserver leurs racines anglo-saxonnes, les spectacles sont annoncés sur les affiches comme « round-up », traduction littérale du terme rodeo ; mais ce n’est là qu’une coquetterie anecdotique qui ne saurait remettre en cause la primauté sémantique du vocable espagnol dans le jeu d’arènes américain. Parallèlement, le bull riding, la monte du taureau d’origine mexicaine qui n’était qu’une séquence marginale à l’époque du Wild West Show, est devenu aujourd’hui le clou tauromachique du spectacle de rodéo. C’est ce numéro qui génère les plus gros profits, aussi bien dans l’entreprise du spectacle et de sa diffusion télévisée que dans celle d’un élevage spécialisé qui a tout de tauromachique. En effet, de même que dans les ganaderías de toros bravos ou dans les manades camarguaises, la sélection des bucking bulls de rodéo est déterminée par le degré d’agressivité, de « sauvagerie » idéale, des reproducteurs. Par ailleurs, ces taureaux champions ne sont pas castrés, ce qui tranche avec la pratique commune de l’élevage à viande nord-américain.
23Ce dernier point nous oblige à une petite discussion nécessaire à la bonne compréhension des choses. Dans l’histoire de l’élevage bovin nord-américain, la castration est un procédé d’origine anglo-normande, introduit dans les colonies de l’Est dès le début du xviie siècle, qui vise à favoriser l’engraissement des mâles en les gardant au plus près dans des enclos, les femelles étant traites quotidiennement29. Par contraste, les colons hispaniques, suivant le modèle andalou de l’élevage extensif qui fut à la source de la tauromachie, conservaient le bétail mâle entier, ainsi qu’il est toujours de coutume au Mexique. Élevés en semi-liberté en champ ouvert, les troupeaux vivaient dans l’espace sauvage loin des hommes qu’ils ne voyaient qu’à deux occasions dans l’année, au printemps et en automne pour la ferrade et pour l’abattage. En Amérique, ce mode de traitement d’un bétail au caractère aussi farouche qu’on peut l’imaginer, et qui inspirait par là même les jeux des vachers et autres individus qui étaient à l’occasion en contact avec lui, avait pour seuls débouchés l’exploitation des peaux et du suif, la viande étant le plus souvent abandonnée aux charognards et les vaches n’étant évidemment jamais traites.
24À partir du milieu du xixe siècle, l’envahissement des prairies par les colons de l’Est eut pour conséquence une transformation du modèle hispano-mexicain d’élevage, jusqu’alors dominant dans les Plaines et dans le Sud-Ouest, sous la pression de l’éthique productiviste anglo-américaine. Progressivement, on s’éloignait du sauvage originel. Ainsi en Californie, avec la colonisation par les fermiers qui suivit la Ruée vers l’Or, le système des clôtures s’imposa et limita fortement, avec les législations sur les Parcs nationaux et les zones protégées de wilderness, la portée de l’élevage extensif du bovin. Ce dernier avait dans un premier temps bénéficié de l’envahissement de la Californie par les chercheurs d’or, mais ayant subi une grave crise avec les sécheresses des années 1864- 1865, il dut s’adapter en se subdivisant en trois grands volets de spécialisation : les deux premiers tendant vers l’exploitation industrielle (élevage laitier et d’engraissement), le troisième restant un élevage extensif sur des terres pauvres (foothills, chaparral, marais etc.), mais limité par les clôtures et orienté vers la vente pour l’engraissement d’un bétail dont les mâles sont castrés, exceptés les taureaux reproducteurs. Il s’agit là d’un modèle hybride d’élevage, de type anglo-texan, dit « western », qui reprend, sous la contrainte de l’étendue et du caractère accidenté, ou difficile d’accès, des espaces d’exploitation, certaines méthodes hispano-métisses de l’élevage extensif (l’usage du lasso et les modes cynégétiques de conduite du bétail à cheval, à la base du rodéo) tout en mettant en exergue la raison productiviste anglo-saxonne30.
25Ce point d’histoire des techniques étant établi, on reconnaîtra que la spécificité remarquable de l’élevage du taureau de rodéo, apparu dans les années 1930, qui ne produit que des taureaux entiers sélectionnés en fonction de leurs aptitudes au jeu d’arènes, marque un retour de la conception hispano-mexicaine au cœur du système anglo-texan de l’élevage et donc de la culture western. Mais ce n’est pas tout. Dans le jeu du bull riding, le cow-boy bullrider s’efforce de tenir huit secondes monté sur le dos du taureau furieux. Pour l’assister dans sa tâche scabreuse, des subalternes aux atours de clowns sont chargés d’attirer et de feinter l’animal lorsque celui-ci a démonté son adversaire et menace de l’encorner ou de le piétiner au sol. Or, ces personnages sont appelés bullfighters, « toreros ». Très respectés par les cow-boys de rodéo, du fait de l’importance cruciale de leur rôle de protecteurs, ils ont atteint un tel niveau de compétence technique que certains d’entre eux se livrent désormais à des compétitions spécifiques où ils affrontent des taureaux de corrida d’origine mexicaine, réhabilitant ainsi une tauromachie proprement dite – freestyle bullfighting, évidemment sans mise à mort – sur le sol des États-Unis et avec la participation quasi exclusive de toreros, d’origine nord-européenne. Ce n’est pas la moindre des surprises que de constater la similitude entre ce nouveau genre de spectacle et les formes landaise et camarguaise de jeu d’arènes31.
26Si ce qui précède indique bien que la représentation américaine par excellence qu’est le rodéo tend à retourner à ses origines tauromachiques, on remarque aussi que ce jeu-spectacle fait l’objet d’un fort investissement dans les réserves indiennes où l’on pratique l’élevage extensif du bœuf, en particulier parmi les Indiens du Sud-Ouest et les Indiens des Plaines, qui organisent leurs propres championnats et célèbrent leurs propres champions. En fait, dès l’époque du Wild West Show, les Indiens qui y participaient comprirent que jouer leur propre rôle de chasseurs guerriers tout en pratiquant au quotidien un élevage extensif qui les laissait en contact avec les territoires sauvages leur permettait de maintenir dans la mesure du possible certains aspects de leur culture traditionnelle tout en s’intégrant dans l’univers moderne du show business.
De l’Ouest américain à l’Ouest camarguais, des cultes du taureau en raison inverse
27Ainsi donc, Buffalo Bill fut-il le pionnier d’une étrange société de migrants qui s’est fondée sur la Conquête pour se laisser subjuguer par l’objet de sa conquête : la sauvagerie au-delà de la frontière, thème spectaculaire le plus suggestif qui soit dans une civilisation marquée à la fois par l’hyper-modernité de ses villes et par l’immensité de ses espaces de wilderness. À cet égard, son lointain émule, Folco de Baroncelli-Javon, projetait le sauvage sur un territoire désespérément borné par les bras du Rhône, et menacé de toutes parts par l’« invasion » des éléments d’extériorité, colonisation, capitalisation, immigration, soit les facteurs mêmes qui firent l’Amérique moderne. C’est pourquoi il se passionna tellement pour le sort des Indiens. Mais de ce point de vue, le manadier-félibre est resté comme un rêveur romantique, déconnecté du « peuple réel » de la Bouvino. Celui-ci, en effet, s’identifie au taureau cocardier dont il fait un animal hyper-social, humanisé et même immortalisé par le rite. C’est tout le paradoxe d’une représentation du sauvage idéal par la médiation d’un animal, Lou Biòu, le « taureau-bœuf », un taureau qui – par contraste avec le toro bravo et le bucking bull – est systématiquement castré dans ses jeunes années pour qu’il soit, suivant le concept régional de la course camarguaise, apte à réaliser la longue carrière dans les arènes qui fait de lui le héros du pays de Bouvino32.
28Parallèlement, de l’autre côté de l’Océan, le rodéo a évolué du spectacle à dominante équestre qu’était le Wild West Show à une véritable forme de tauromachie dont la très dangereuse épreuve du bullriding est le moment principal. Ici, on observe une mise en valeur de l’animal champion, the unvicted bull, le taureau invaincu qui ne s’est jamais laissé monter jusqu’aux huit secondes réglementaires par un bullrider, rappelant par certains égards l’admiration des Camarguais à l’égard du cocardier dominateur (et de fait, dans les élevages spécialisés de l’Ouest américain comme en Camargue, il n’est pas rare que l’on inhume sous une pierre tombale les plus fameux taureaux). Or aux États-Unis, cette image du taureau « sauvage » triomphant repose sur une exploitation marginaliste du bétail bovin qui réhabilite, contre le mainstream de l’élevage à viande et de l’élevage laitier qui ont constitué la base de l’agriculture capitaliste de l’Ouest, les forces que cette Conquête était censée avoir vaincues : celles des Hispano-mexicains et de leur tauromachie, celles des Indiens, qui assimilèrent le taureau et le cheval à leurs grands animaux de chasse, cerf, élan, bison, et l’activité d’élevage à un processus de prédation au cœur de la nature vierge. En somme, si le cocardier camarguais est le signe défensif d’une identité locale exaltée par une idéologie raciale, le bucking bull du rodéo, en transformant le fier cow-boy blanc en pantin désarticulé sur un animal entier et indomptable, en ramenant sur le devant de la scène la tauromachie et ses personnages – le bullfighter –, en représentant le taureau d’élevage sous les traits d’un animal associé au sauvage et aux Indiens, revendique l’identité anglo-américaine sous la menace des forces qui se sont opposées, et continuent de s’opposer, à son hégémonie historique.
Notes de bas de page
1 En 2011, le Ministère de la Culture a inscrit la course camarguaise sur la liste de l’Inventaire du patrimoine immatériel. Le dossier, coordonné par Caroline Jauffret-Redon, a été déposé à l’UNESCO par Rama Yade en vue d’une candidature à l’inscription sur la liste du Patrimoine Culturel Immatériel de l’humanité. Finalement, cette démarche a été rejetée par l’UNESCO en 2013.
2 Christian Jacquelin, Frédéric Saumade, « La protection des arènes et lieux de Bouvino en Languedoc », Terrain, no 20, 1993, p. 158-162.
3 Pour une ethnographie détaillée et une anthropologie historique des traditions taurines camarguaise et andalouse, voir Frédéric Saumade, Des sauvages en Occident. Les cultures tauromachiques en Camargue et en Andalousie, Paris, MSH, 1994.
4 Frédéric Saumade, Des sauvages en Occident…, op. cit. ; F. Saumade, « Race régionale, identité nationale : pour une ethnologie des comportements électoraux », Terrain, no 27, 1996, p. 101-114.
5 Philippe Martel, « Le félibrige », dans Pierre Nora éd., Les lieux de mémoire, t. III, vol. 2, Paris, Gallimard, 1992, p. 607.
6 F. Saumade, « Race régionale, identité nationale… », op. cit., p. 107.
7 F. Saumade, « Race régionale, identité nationale… »
8 Folco de Baroncelli-Javon, « Lou Biòu », dans Flourilege de la Nacioun Gardiano, Montpellier, Ediciòun de la Naciòun Gardiano, 1932, p. 134-135.
9 Voir l’excellente thèse de Tangi Villerbu, La Conquête de l’Ouest. Le récit français de la nation américaine au xixe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2007, p. 234 sq.
10 Cité par Robert Zaretsky, Le Coq et le Taureau. Comment le marquis de Baroncelli a inventé la Camargue, Marseille, Gaussen, 2008, p. 94.
11 Robert Zaretsky, Le Coq et le Taureau..., p. 116-117.
12 Joy S. Kasson, Buffalo Bill’s Wild West : celebrity, memory and popular history, New York, Hill and Wang, 2000, p. 20-21.
13 Joy S. Kasson, Buffalo Bill’s Wild West..., p. 35.
14 Id., p. 36-41.
15 Frédéric Saumade, Maçatl. Les transformations des jeux taurins au Mexique, Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux, 2008.
16 Clark Wissler, « The influence of the horse in the development of Plains culture », American Anthropologist, 16, 1914 (The Bobbs-Merrill reprint series in the social sciences).
17 F. Saumade, Maçatl…, op. cit.
18 Joy S. Kasson, Buffalo Bill’s Wild West..., p. 43.
19 Ibid., p. 113.
20 Ainsi que l’ont déjà montré les historiens spécialisés, l’origine du rodéo et de la culture western se trouve au Mexique. Voir par exemple Mary Lou LeCompte, « The Hispanic Influence on the History of Rodeo, 1823-1922 », Journal of Sport History, 12, 1985, p. 21-38.
21 Joy S. Kasson, Buffalo Bill’s Wild West..., p. 152.
22 Kristine Fredriksson, American Rodeo. From Buffalo Bill to Big Business, Texas A & M, University Press, College Station, 1993, p. 140.
23 Allison Fuss Mellis, Riding Buffaloes and Broncos : Rodeo and Native Traditions in the Northern Great Plains, University of Oklahoma Press, 2003, p. 42-43.
24 Voir Eric J. Abrahamson, Historic Monterey : California’s forgotten first capital, California Dept.
of Parks and Recreation, 1989, p. 36, sur une photographie datée circa 1890 on peut voir une affiche de corrida dans la ville de Monterey, Californie.
25 Voir l’extraordinaire article relatant cet épisode baroque digne d’un western de Sam Peckinpah ou de Sergio Leone : Kirke Mecham, « The Bullfight at Dodge », Kansas Historical Quarterly, vol. 2, no 3, 1933, p. 294-308.
26 Joy S. Kasson, Buffalo Bill’s Wild West..., p. 103-104. Comme son nom ne l’indique pas forcément, la Humane Society étasunienne est une association chrétienne qui s’est donné pour mission d’empêcher les humains de maltraiter les animaux.
27 Je remercie Jean-Baptiste Maudet d’avoir attiré mon attention sur ce point. Sur l’histoire des relations complexes entre protecteurs des animaux, promoteurs et acteurs du spectacle de rodéo, voir Kr. Fredriksson, American Rodeo…, p. 134 sq.
28 Ibid., p. 6.
29 Terry G. Jordan, North American Cattle-Ranching Frontiers. Origins, diffusion, and transformation, Albuquerque, University of New Mexico Press, 1993 ; Virginia de John Anderson, Creatures of Empire. How Domestic Animals Transformed Early America, Oxford-New York, Oxford University Press, 2003.
30 T. G. Jordan, North American...
31 Frédéric Saumade, « Le rodéo américain sur la frontière du sport et de la tauromachie, ou de la diffusion considérée comme un système de transformations », Ethnologie française, 2011/4, p. 655-665.
32 Sur ce paradoxe de la tauromachie camarguaise, voir F. Saumade, op. cit.
Notes de fin
1 Cette contribution résulte en partie d’une enquête de terrain menée dans le Sud-Ouest des États-Unis, programme ANR Torobullmexamerica (2008-2011).
Auteur
Aix Marseille Université - CNRS, UMR IDEMEC
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