La fête au village dans l’ancienne Provence selon Claude-François Achard
p. 52-67
Texte intégral
1J’ai proposé cette description de « la fête au village dans l’ancienne Provence selon Claude-François Achard » parce que je venais de terminer une réédition partielle de l’ouvrage de cet auteur, Description Historique, Géographique et Topographique des Villes, Bourgs, Villages & Hameaux de la Provence ancienne et moderne1… Mais ce sujet est loin d’être neuf. Je rappellerai d’emblée qu’il a été traité magistralement par Michel Vovelle dans Les métamorphoses de la fête en Provence de 1750 à 18202 et que, pour ma part, je l’avais également abordé dans un ouvrage consacré aux pèlerinages de l’ancienne Provence3. Cette communication se borne donc à un rappel des caractères des fêtes sous l’Ancien Régime, avant les transformations ou les recréations des siècles ultérieurs qui sont, à proprement parler, l’objet de ce colloque.
2Car ces fêtes de l’Ancien Régime, appelées romérages, Claude-François Achard en parle abondamment dans sa Description de la Provence. De ce point de vue, Achard est sans nul doute la référence incontestée pour tous ceux qui, après lui et jusqu’à nos jours, ont cherché à connaître les fêtes de l’ancienne Provence. Il est en effet l’un des premiers auteurs à avoir porté son regard, de manière systématique, sur les mœurs et les coutumes des Provençaux. En cela, il fait partie de ceux que Michel Vovelle a définis comme les primitifs de l’ethnographie provençale4. D’ailleurs, son ouvrage est classé par le préfet Villeneuve, peut-être avec un peu de condescendance, parmi les « recueils bons à consulter5 ».
3Je ne m’attarderai pas sur la biographie de Claude-François Achard, médecin de Marseille, comme il se présente lui-même dans le titre de sa Description de la Provence. Je l’ai esquissée dans la réédition partielle dont je viens de parler6. J’en rappellerai simplement les aspects essentiels qui rendent compte en partie de son œuvre. Claude-François Achard est né le 23 mai 1751 à Marseille. Il a reçu une première formation auprès de son oncle paternel, curé en Dauphiné, puis au séminaire de Viviers. Mais il a ensuite abandonné la carrière ecclésiastique pour la médecine qu’il étudie à Avignon auprès d’Esprit Calvet. Il sera médecin à Aubagne d’abord, puis à Marseille où il vivra jusqu’à sa mort, survenue en 1809. Il est élu à l’académie de cette ville en 1786. Dans son discours de réception, il fait l’éloge des belles-lettres qui embellissent l’étude des sciences.
4Amateur de sciences et arts donc, Achard est médecin et chimiste (il donnera des cours de chimie de 1796 à 1798), bibliophile et lettré. Bibliophile, il travaillera sans relâche à la création de la bibliothèque de Marseille à partir des livres provenant des maisons religieuses supprimées et il publiera le catalogue de la bibliothèque de l’abbé Rive en 17937. Parallèlement, il écrira un cours élémentaire de bibliographie8. Polygraphe, il publie de 1785 à 1787, un Dictionnaire de la Provence composé de 4 volumes, les deux premiers étudient la langue de ce pays, le vocabulaire françois-provençal et le vocabulaire provençal-françois ; les deux derniers abordent l’histoire des hommes illustres de la Provence9. À cet ensemble, s’ajoutent, en 1787 et 1788, les deux volumes de la Description de la Provence dont il est question ici.
Achard précurseur ?
5Achard est-il vraiment un précurseur dans cette Description ? Cela ne fait aucun doute lorsqu’on compare les larges développements qu’il accorde aux fêtes villageoises, à ceux, guère différents somme toute, que rassemble, commune par commune, la Statistique de Villeneuve pour le département des Bouches-du-Rhône10.
6On pourrait aussi le penser lorsqu’on se reporte aux tableaux ou enquêtes qui ont précédé cette Description. Je prendrai ici deux exemples : d’une part, les enquêtes de réaffouagement mises au point par les procureurs du pays de Provence pour modifier l’impôt dû par les communautés d’habitants et, d’autre part, les questionnaires qui sont à la base des mémoires fournis par les intendants.
7L’enquête de réaffouagement de 1728 répondait, sans surprise, à un questionnaire administratif qui s’intéressait au nombre de chefs de famille du village, au cadastre et aux impositions, aux biens privilégiés de l’Église et des seigneurs, aux droits féodaux, aux dîmes, au type de justice, aux foires et marchés, à la situation du village par rapport aux routes et aux rivières11. Quelques années auparavant, à la fin du xviie siècle, les plus célèbres des mémoires des intendants répondaient à des enquêtes analogues. Rédigés en réponse au questionnaire adressé à tous les intendants par M. Le duc de Beauvillier pour y répondre article par article et servir d’instruction à Monseigneur le duc de Bourgogne, alors l’héritier présomptif du trône12, ils avaient pour but de faire connaître au prince l’état du royaume, de lui permettre d’acquérir un savoir qui serait la base d’un « bon gouvernement13 ».
8Un point de vue strictement administratif prévaut à travers ces deux types d’enquête. Dans le questionnaire envoyé aux intendants, un seul article invite à la description des hommes « leur naturel vif ou pesant, laborieux ou paresseux, leurs inclinations : leurs coutumes ». C’est dire combien le sujet était mineur aux yeux du pouvoir14. Ce que confirment les réponses stéréotypées des intendants à ce sujet. En ce qui concerne les Provençaux, l’intendant Lebret les estimait inconstants et arrogants, « trop grands parleurs, se plaisant à faire des contes », belliqueux et prompts à la révolte, « grands faiseurs de chansons, ce qui leur sert souvent à passer leur mauvaise humeur quand il arrive quelques troubles15 ».
9Finalement, au xviie siècle, les seuls véritables précurseurs d’Achard en ce qui concerne les mœurs des Provençaux sont les membres du clergé. Certains, comme Marchetti, cherchent à les justifier16. Mais la plupart les condamnent. Les sévères évêques de la Réforme catholique sont particulièrement attentifs, dans les véritables inspections des paroisses que sont leurs visites pastorales, à lutter contre des dévotions curieuses qui leur paraissent contraires à la vraie foi et entachées de « superstitions ». Toutefois, ces « descriptions » des enquêtes ecclésiastiques ne touchent que des pratiques marginales. Elles peuvent offrir, ici ou là, quelques percées sur la religion vécue par le peuple17. Mais elles ne constituent en aucune manière un tableau des mœurs des habitants.
10Au cours du xviiie siècle, une évolution se fait jour. L’intérêt encyclopédique pour toute connaissance conduit à de multiples descriptions qui cherchent à enfermer le monde dans des inventaires ou des dictionnaires dont l’Encyclopédie de Diderot-d’Alembert est le modèle le plus achevé18. Pour ces travaux, le personnel administratif de la province ne suffit plus. Le relais est assuré, pour dresser ces multiples inventaires, par les élites savantes, voyageurs, médecins, astronomes, hommes de lettres et polygraphes, qui se retrouvent dans les académies. Toutes proportions gardées, l’entreprise d’Achard se place dans cette perspective. Elle est le fruit de la même passion investigatrice dont l’auteur définit le vaste projet dans son avant-propos :
Pour rendre cette Description intéressante & utile, nous avons rassemblé dans chaque article les noms latin, françois & provençal des Villes, Bourgs & Villages ; leur origine, l’étymologie de leur nom, le climat, la qualité du sol & ses productions ; la population, le caractère, le génie particulier des habitans ; leur genre de commerce ; les Fêtes ou Roumavagis, les Foires & les Marchés ; les Ruisseaux, Étangs, Lacs et Rivières : la forme de l’Administration, les Concessions et Privilèges ; les Usages particuliers ; les Armes du Lieu ; le Patron et le Titulaire des Paroisses ; le nom des Collateurs des Bénéfices & c ; l’Histoire Naturelle & Politique, les Antiquités y trouvent aussi leur place.
11Cette énumération, à n’en pas douter, reflète l’essentiel du contenu du questionnaire qu’Achard a envoyé à ses correspondants. On y retrouve les préoccupations traditionnelles des administrations précédentes, mais il y ajoute deux questions nouvelles : le caractère des habitants de chaque localité et, surtout, les fêtes ou Roumavagis propres à chaque lieu. Sur ce dernier sujet, Achard précise :
Les Fêtes connues sous le nom de Roumavagis, ou Roumeiragis, Trins ou Vots, méritoient une description détaillée. Nous prions nos Lecteurs de lire l’article Velaux, où ils trouveront de quoi satisfaire leur curiosité sur cet objet. Les prix que l’on distribue dans ces sortes de Fêtes datent de bien loin, & c’est peut-être là tout ce que nous avons conservé de nos Ancêtres19.
12Il avoue ainsi combien lui tient à cœur la description de manifestations qui sont pour lui des vestiges du passé.
13Achard est-il nostalgique de ce passé ? L’analyse des notices de sa Description permettra peut-être de répondre à cette question. Mais en même temps, il semble exprimer dans cet avant-propos, le remords de ne pas avoir exigé de ses correspondants plus de détails au sujet de ces fêtes, de ne pas les avoir suffisamment étudiées. Car l’article concernant Velaux auquel il renvoie, qui est tout à fait exceptionnel par l’ampleur des descriptions, constitue la dernière notice du second volume qui n’est publiée qu’en partie. Le renvoi à un article exemplaire résonne comme un remords pour tout ce qui n’a pas été évoqué ailleurs.
14C’est que, malgré le projet ambitieux de l’auteur, l’hétérogénéité des notices reste de règle. Chacune d’entre elles est tributaire de la réponse donnée par le correspondant. Si certains informateurs ont cherché à répondre, quelquefois longuement, aux préoccupations du questionnaire, d’autres, au contraire, plus ignorants ou plus indifférents, se sont contentés de quelques courtes indications. Les fêtes sont alors « oubliées » ou simplement évoquées.
Fêtes et romérages
15Cependant, malgré ses imperfections, le dictionnaire d’Achard reste le témoin privilégié des fêtes de l’ancienne Provence. C’est ce qui permet à Michel Vovelle de recenser 427 fêtes pour 477 villes, bourgs ou villages soit, en moyenne, une fête par commune, malgré des différences selon les régions20. Notre sondage mené dans la zone intermédiaire de Provence orientale (les pays de Grasse et de Draguignan) permet de préciser que la fête évite les lieux de très faible population, les villages désertés, les hameaux et les fiefs. En somme, et c’est un premier aspect, elle est absente de tout ce qui ne constitue pas une véritable « communauté d’habitants ».
16Pour désigner cette fête, Achard utilise, dans les différentes notices de sa Description, comme dans son avant-propos, plusieurs termes : trains, vots, vogues ou romérages. Ces différences appellations reflètent sans doute quelques différences régionales. le train semble caractéristique de l’arrière-pays de Marseille, on rencontre la vogue en allant vers le Dauphiné. Mais ce sont des nuances qui ne semblent pas fondamentales aux yeux du médecin de Marseille. En revanche, le terme qui revient le plus souvent sous sa plume est celui de romérage ou roumavagi ou roumeiragis (250 cas sur 427, soit 58 %)21, lequel accompagne presque toujours celui de Fête. Fête et romérage semblent interchangeables. En voici quelques exemples.
17Au Bourguet (viguerie de Castellane), « la Fête ou Roumavagi du lieu se célèbre le Dimanche après le 26 juillet avec danses et jeux ».
18À Brenon (viguerie de Castellane) :
Le Roumeiragi ou fête du lieu se fait le 8 de septembre. On l’appelait autrefois lou Roumeiragi deis cops de batoun, parce que les jeunes gens du voisinage venaient armés de bâtons & se disputaient l’honneur d’enlever les instrumens au milieu du bal : cette dispute occasionnait souvent des meurtres.
19À La Cadière (viguerie d’Aix) :
On célèbre […] deux fêtes ou Roumavagis. S. André Patron, le 30 novembre, & S.Cyr le second jour de Mai… À l’un & l’autre de ces deux jours, il y a foire [...] qui dure trois jours, la veille, le jour de la fête & le lendemain & donne le privilège à ceux qui les fréquentent de ne pouvoir être saisis durant lesdits trois jours pour dette civile. Il y a une grande dévotion à S André, à qui l’on se croit redevable d’avoir été préservé de la peste, dans les temps où cette contagion affligea si cruellement les lieux voisins.
20Le dictionnaire d’Achard donne ici ou là des descriptions complètes. Voici, ce qu’il rapporte d’un des romérages de Saint-Raphaël (viguerie de Draguignan) :
On célèbre dans ce Village deux fêtes ou Roumeragis, la première a lieu le 20 janvier, jour de S. Sebastien. Il y a, ce jour-là, grand’Messe, procession dans le Village, à laquelle on porte le buste du Saint. La fête est annoncée la veille par le son des instrumens qui se font entendre bien avant dans la nuit & tout le lendemain ; il y vient quelques Marchands qui font une petite foire à la place ; mais il y a sur-tout grande affluence des peuples voisins & principalement de Fréjus, qui viènent se divertir, danser & boire du vin blanc, qui est en réputation en ce pays, & dont il se fait une grande communication ce jour-là.
21De ces quelques exemples, on peut extraire les différents aspects de ces fêtes et romérages. Ce sont des fêtes religieuses dans lesquelles peut se manifester une grande dévotion, comme à La Cadière où l’on vénère saint André, protecteur de la peste. Elles débutent par la procession dans laquelle on porte les reliques du saint, le buste que l’on honore par des décharges de mousqueterie qui constituent la bravade. À l’issue de la procession, on entend la messe. Mais à côté de la fête liturgique, de la procession et de la bravade, il y a les danses et les jeux, la foire et les luttes entre jeunes gens qui peuvent dégénérer et aboutir, comme à Brenon, à des meurtres. Tous ces aspects étant absolument indissociables.
22On comprend désormais pourquoi, dans la Description d’Achard, le terme provençal de romérage reste accolé à celui de fête et pourquoi aussi l’auteur ne le traduit jamais. C’est que le terme incarne la singularité de la fête provençale, où sacré et profane sont indissolublement liés. C’est ce romérage que je chercherai à définir plus précisément à travers quatre aspects :
- le romérage, comme ancien pèlerinage ;
- le romérage, comme fête du saint patron ;
- le romérage, comme fête de la communauté d’habitants ;
- le romérage, comme temps sacré.
Le romérage, ancien pèlerinage
23Avant toute chose, il faut préciser le sens du terme de romérage et son évolution. D’un point de vue étymologique, ce terme est formé de deux mots roumieu – pèlerin allant à Rome – et viaggi, voyage. Il est donc lié au grand pèlerinage, le pèlerinage au tombeau des apôtres Pierre et Paul. Au xvie siècle, le terme est synonyme de pèlerinage.
24De ce pèlerinage à Rome, le romérage provençal est en quelque sorte, comme le pardon breton, une forme de substitution, une transposition en mineur des grands sanctuaires de la chrétienté. La Provence prend ainsi sa place dans l’histoire du pèlerinage occidental que retraçait Alphonse Dupront : « Tout se passe comme si […] un immense transfert de sacralités chrétiennes s’était opéré depuis le Moyen Âge des croisades jusqu’à aujourd’hui pour rendre l’Occident chrétien plus rapproché de ses sources de sacralisation ou plus libre des sources traditionnelles de la naissance chrétienne22 ».
25Mais le sens de pèlerinage semble abandonné à la fin du xviiie siècle ou au xixe siècle puisque Achard utilise indifféremment les termes de romérage et de fête, puisqu’il en est de même de Villeneuve bien que ce dernier évoque encore, au sujet du romérage, le souvenir des anciens pèlerinages :
Roumevage… s’applique à toutes les fêtes patronales auxquelles on accourt par un sentiment de dévotion comparable, dans son origine, à celui qui faisait entreprendre aux fidèles le voyage de Rome. C’est ce que signifie à la lettre le mot Roumevage23.
26Cet abandon est le résultat d’une évolution.
27Il faut rappeler que le pèlerinage a mauvaise presse au xviiie siècle, même si les foules pèlerines continuent à fréquenter les grands sanctuaires24.
28Les pratiques de pèlerinage, qui mélangent dévotion et fêtes, prières et danses, communions et libations profanes sont taxées de « superstitions » par un clergé de plus en plus rigoriste qui prône plutôt le pèlerinage spirituel. À cela s’ajoute, dans la société du xviiie siècle, la critique du pèlerin, qualifié de fainéant, d’oisif qui cache son libertinage sous des apparences de dévotion. Le pèlerin, assimilé au vagabond, fait l’objet d’une législation répressive depuis Louis XIV au moins (déclaration royale de janvier 1686) et constamment renouvelée25.
29En Provence, plusieurs ordonnances épiscopales interdisent aux fidèles de sortir des limites de leur paroisse pour se rendre à tel sanctuaire trop éloigné. Par exemple, dans sa visite pastorale de Châteaudouble, en 1769, Emmanuel de Beausset, évêque de Fréjus, s’inquiète de ce qu’on fait :
Tous les ans dans cette paroisse une procession la seconde feste de la pentecoste, laquelle part de Châteaudouble à six heures du matin et n’en revient que le lendemain à huit heures du soir, les fidèles par conséquent passent la nuit dans le bois de notre dame de Grace, laquelle église… éloignée de cinq lieues est le terme de la procession26.
30« Voulant pourvoir aux inconvénients que peut produire un pareil usage », le prélat ordonne « qu’à l’avenir la même procession se fera à l’intérieur du village de Châteaudouble » et défend « que l’on fasse désormais aucune procession hors dudit village ».
31En conséquence de ces lois ou ordonnances, le pèlerinage lointain est abandonné pour se réduire à la fête locale, celle du romérage qui, cependant, garde quelquefois les aspects des longs parcours et des grandes « processions » du passé. Tel est le cas « du second Roumeragi » de Saint-Raphaël, qui se déroule le 1er mai :
C’est une anciène dévotion établie dans le pays. L’on va ce jour-là en procession à la Chapelle du Caproux27, dite la Ste. Baume, située dans le territoire au milieu d’une montagne très-élevée sur le bord de la mer éloignée du Village de deux lieues à l’E. La tradition du pays porte que S. Honorat, Evêque d’Arles, a habité ce désert avec S. Caprais & d’autres solitaires, […] La Chapelle est bâtie dans la cellule de S. Honorat. Le lieu est escarpé & de difficile accès. On y voit les restes d’une vieille Tour qui dominoit sur tout le quartier, & qui servoit de défense contre les incursions des Sarrasins ou autres pirates qui couroient le long des côtes de la mer. L’on passe dans cette tour pour aller à la Chapelle.
32Notons toutefois que cette longue procession du premier mai se déroule à l’intérieur du vaste territoire de Saint-Raphaël.
Le romérage, fête du saint patron
33Réduit au cadre villageois, le romérage se déroule le jour du saint patron de l’église.
34Pourquoi ce choix ? L’église a, en général, un saint titulaire et un saint patron qui se confondent quelquefois, mais se distinguent souvent. Le saint titulaire lui donne son nom, tandis que le rôle du saint patron, jamais clairement défini, peut être celui du protecteur de la communauté d’habitants plutôt que celui de l’église.
35On le suggère ici ou là. À Saint-Paul de Vence, « S. George est le Patron de la Ville & S. Paul… le Titulaire de la Paroisse ». À Cassis (viguerie d’Aix) : « La paroisse… reconnaît pour titulaire S. Michel ; pour second titulaire, S. Henri ; le Patron du lieu est S. Pierre apôtre que les pécheurs invoquent sur toute la côte maritime de Provence ». À Lorgues, cas plus complexe, Achard laisse deviner trois strates de dénomination : « Le Titulaire de la nouvelle Collégiale est S. Martin & N. D. de Bellovedere. Le Patron étoit S. Pierre ou S. Paul, suivant notre manuscrit. Cependant l’on nous écrit de Lorgues que c’est aujourd’hui S. Ferréol, Martyr de Vienne en Dauphiné28. »
36Ainsi, le saint patron paraît toujours second, hissé au niveau paroissial par une élection populaire. On peut encore analyser ce processus au xixe siècle dans l’ancien comté de Nice mais il semble oublié en Provence à la fin du xviiie siècle29. Peut-être, justement, en garde-t-on la trace dans le romérage qui, parmi les saints de l’église, rend hommage à celui qui est perçu par les habitants comme le plus proche, le plus protecteur.
37Car la fête est diverse. Si elle se déroule le jour du saint patron, il lui arrive d’adopter d’autres saints protecteurs. À Trans (viguerie de Draguignan), on célèbre deux fêtes : « Celle de S. Victor, Patron du lieu & celle de S. Roch, établie par un vœu de la Communauté à l’époque de la peste. Il y a ce jour-là ce qu’on appelle Roumeiragi, mais sans aucune cérémonie particulière ». À Flayosc (viguerie de Draguignan), dont l’église est dédiée à saint Laurent martyr, « la Fête ou Roumeiragi se fait le deuxième Lundi d’Octobre. Elle fut établie en 1782 à l’occasion d’une Relique de S. Marcoul que l’on conserve avec vénération dans la Chapelle des Pénitens blancs ». Qu’il s’agisse d’un saint protecteur de la peste, d’un saint patron de confrérie ou de saintes reliques, retenons de ces choix que le saint du romérage est le saint protecteur de la communauté.
38Une autre constatation vient à l’appui de cette hypothèse : le saint du romérage est celui d’une chapelle rurale où l’on se rend en procession le jour de la fête. Ici, on rend hommage, non plus à de nouvelles dévotions devenues populaires par telle protection récente mais, au contraire, au protecteur « immémorial » du lieu. Car la chapelle rurale en question occupe des sites que la tradition fait remonter à l’époque pré-chrétienne ou à la première christianisation du pays. En ce cas, l’origine de la fête se perd « dans la nuit des temps » comme il est dit pour la Saint-Cyr de Lançon (viguerie d’Aix) : « L’on va ce jour-là en procession à la Chapelle dédiée à ce Saint, dont le Sanctuaire annonce l’ancienneté. On croit que cette Chapelle étoit autrefois la Paroisse, puisque les curés y prènent possession ».
39Comme ce texte le suggère, la chapelle du romérage est le lieu d’une paroisse originelle qui existait avant la construction du village fortifié des xie ou xiie siècles et de sa nouvelle église. Les visites pastorales des évêques d’Ancien Régime en témoignent souvent30. Le dictionnaire d’Achard s’en fait aussi l’écho dont voici deux exemples :
À Bézaudun (viguerie de Saint-Paul) : « La Fête est célébrée le 8 septembre, jour auquel l’on va en procession à une Chapelle rurale, qui étoit l’anciène Paroisse. Le soir on distribue les prix, qui sont fournis par le Prieur, dont la piété répugne à cet usage ancien & singulier ».
40Le 3 septembre, jour de la Nativité de la Ste. Vierge, l’on fait à Fayence (viguerie de Draguignan) : « Un second Roumeiragi à la Chapelle de N.D. du Cyprès, Vaste & anciène Église, qui étoit l’anciène Paroisse, si l’on en croit la tradition du Pays. Ce jour-là, le Clergé & le peuple dîne auprès de cette Chapelle, & ne retourne à Faïence que vers le soir ».
41Fêtes d’un saint patron aux multiples visages, les romérages sont liés à l’histoire de l’église et à l’histoire du village. C’est pourquoi, ils ne peuvent exister que là où se trouve une communauté d’habitants structurée. La fête du saint protecteur est aussi celle des habitants.
Le romérage, fête de la communauté d’habitants
42Le romérage est en effet, autant que la fête du saint patron, celle de la communauté d’habitants.
43La procession, apothéose du saint porté par la foule et salué par la bravade, représente la communauté d’habitants et les différents groupes qui la composent. C’est le cas à Aups, chef-lieu de viguerie, qui « célèbre avec pompe » Notre-Dame d’août (c’est-à-dire la fête de l’Assomption) :
La veille on fait le guet & le jour de la fête la Bravade. Les habitans sous les armes font le tour de la ville, passent dans la Paroisse et se rendent aux Augustins Réformés. Le premier Consul de l’année précédente est capitaine du Guet & chef de la première Compagnie. La seconde est commandée par un jeune homme qui a le titre d’Abbé de la jeunesse. L’Enseigne ou porte-drapeau est à la tête des Artisans qui composent la troisième compagnie ; & la quatrième qui est composée des paysans ou Cultivateurs est dirigée par le Sous-Enseigne qui est choisi dans cette classe d’habitans. Les Officiers sortant de charge nomment ceux qui doivent les remplacer. Le Corps de la jeunesse les approuve en présence du Conseil municipal. Chaque officier donne à dîner à sa Compagnie le jour de la Fête.
44L’énumération de ces différents dignitaires suit l’ordre hiérarchique de la société villageoise. On peut le vérifier pour l’année 1761, dans un procès-verbal de désignation de ces officiers, où nous trouvons comme élus :
- capitaine du guet, un noble, ancien premier consul de la ville ;
- abbé de la jeunesse, un jeune homme fils de bourgeois ;
- enseigne, un jeune homme « maître broquier » ;
- sous-enseigne, un jeune homme, fils de ménager31.
45Dirigées par le premier consul sorti de charge, ces « compagnies » sont des vestiges d’une époque révolue où les communautés d’habitants organisaient elles-mêmes leur défense. Les parades des bravades et leur vocabulaire désuet – guet, capitaine, enseigne ou porte-drapeau – sont des survivances de cette organisation militaire. Elles en gardent quelquefois un souvenir précis. À Aups :
Une tradition, dont on trouve quelques preuves dans les Archives de l’Hôtel-de-Ville, porte que les Huguenots massacrèrent en 1574 les habitans d’Aups, qui furent toujours attachés au parti catholique… C’est de là que l’on tire l’origine des quatre Compagnies qui se rassemblent pour la Fête du mois d’Août. On dit communément que le Capitaine du Guet a la police le jour & la veille de cette Fête.
46À Castellane, le romérage du 31 janvier, « appelé le jour du Pétard ou de la levée du siège par les huguenots », on chante « au devant de la procession une chanson qui contient l’histoire de cette délivrance ».
47À Saint-Tropez (viguerie de Draguignan) différentes compagnies sous les armes gardent probablement aussi le souvenir d’anciennes incursions d’ennemis venus de la mer. Incursions que le buste du saint, placé sur le port, est chargé d’arrêter symboliquement. On y voit :
La Compagnie de Mousquetaires composée en grande partie de gens de mer sous les armes en uniforme bleu de Roi & paremens rouges, sous les ordres du Capitaine de Ville, de quatre Capitaines de quartier & d’un Enseigne portant un drapeau blanc aux armes de la Ville qui représentent S. Tropez habillé à la Romaine avec un bateau, sur lequel il y a un Coq & un Chien. Ils marchent à la tête de la procession, précédés de tambours & de fifres ; ces Mousquetaires sont suivis d’une Compagnie de Dragons à cheval, composée d’Artisans en habit uniforme vert, paremens & revers rouges, ayant aussi des tambours & des trompettes portant le même uniforme, la procession est arrêtée à chaque moment par les décharges de la Mousqueterie & par les coups de pistolets, que ces Milices bourgeoises tirent d’abord devant la Paroisse, ensuite à chaque Place, sur le Port où le buste du Saint est salué par le Canon de tous les Bâtimens qui se trouvent armés, & devant les maisons des principaux habitans.
La procession retourne après les Vêpres dans le même ordre, avec le même cortège & le même bruit. Cette cérémonie se répète le lendemain, jour de la Fête, avant & après la grande Messe, qui est célébrée dans la même Église des Capucins, & l’après-midi aussi aux secondes Vêpres.
48À travers l’ordonnancement de la procession, et les différentes compagnies de la bravade qui l’escortent et la magnifient, la communauté d’habitants se donne d’elle-même une image idéale. Mais, en même temps, elle revit son histoire.
49Accompagnant le saint dans son parcours circulaire, allant par les rues de la ville ou à la chapelle du saint et en revenant, s’arrêtant à chaque place, elle prend possession du territoire communal qu’elle transforme en un espace sacré et qu’elle offre à son protecteur. Dans ce parcours, l’espace et le temps des habitants sont symboliquement projetés au-delà de leur quotidienneté, pour un moment d’éternité. C’est par ce dernier aspect que le romérage devient un temps sacré.
Le romérage, temps sacré
50Le temps du romérage est un temps sacré, non seulement parce qu’il se déroule le jour de la fête du saint protecteur, mais parce qu’il est l’occasion, en ce jour à part, du ressourcement de la communauté d’habitants à travers un terroir et une histoire sacralisés.
51C’est dans ce moment exceptionnel qu’éclatent les barrières, que l’on franchit les frontières des jours ordinaires. Ce franchissement des frontières s’exprime dans les danses et les jeux. Il éclate dans la violence des rencontres et des luttes. Dans ce temps privilégié, le bruit des salves de la jeunesse en armes « réveille » ce que l’on pourrait appeler un sacré « sauvage » que la grand’messe au sanctuaire ou l’arrêt de la bravade à la porte de l’église paroissiale ne peuvent complètement endiguer32.
52Certes, il est difficile de voir, dans les réjouissances populaires telles qu’elles sont décrites par Achard, l’expression du sacré. Au contraire, les notices de sa Description séparent nettement quelquefois la fête de dévotion d’un côté et, d’un autre côté, la fête bruyante du romérage et ses réjouissances populaires qualifiées, au mieux, de divertissement ou d’amusement. Mais on ne doit pas oublier que ces notices sont rédigées par des notables, curés ou notaires, qui manifestent quelquefois, tel le curé de Bézaudun, le désir de se séparer du peuple qu’ils décrivent, ou qui paraissent ne plus comprendre les coutumes des fêtes qui se déroulent sous leurs yeux.
53Rien n’est aussi palpable que lorsque les notices abordent la violence des fêtes.
54Certaines de ces luttes ne sont que des simulacres de combats. Il y a celles qui, comme à Riez (viguerie de Moustiers), rappellent les conflits d’autrefois : le jour du romérage de saint Maxime, des soldats se partagent en deux camps : ceux qui attaquent « une sorte de forteresse en bois » que l’on « dresse dans un pré fort vaste » et ceux qui s’y retranchent : « Ce n’est que le soir que les assiégés se rendent après une longue & glorieuse résistance, & le vainqueur, après s’être fait ouvrir les portes, est conduit en triomphe au bruit des fanfares & au son bruyant des mousquets, dans les rues de la Ville ».
55Mais il y a aussi de véritables guerres entre villages comme on le suggérait à Brenon. La notice consacrée à l’un des romérages de Seillans (viguerie de Draguignan), « lou romeiragi deis pesseguis durs, la fête des pêches dures, c’est-à-dire la fête qui se termine par un combat à coups de pierre », qui se déroule auprès de la chapelle Saint-Arnoux, offre de ces combats un tableau saisissant :
Les habitans de Seillans s’y rendent en foule. On en voit de tous les Villages voisins & sur-tout de Bargemon. II y vient des tambours conduits par les Paysans & les Artisans de Seillans qui s’y rendent en faisant des mauresques ou farandoules. La paix & la joie président & embellissent cette fête le matin & une partie de l’après midi : la sérénité & la gaité animent tous les visages. On forme des bals nombreux, tous sautent & dansent pêle-mêle. Ces tremoussemens, ces sauts, ces danses ont quelque chose de ravissant pour le spectateur. Mais bientôt la scène va changer ; une dispute s’est élevée entre un habitant de Seillans & un de Bargemon. Les esprits déjà échauffés par la chaleur de la saison, par les danses & souvent par le vin, s’enflamment & le théâtre des plaisirs devient celui d’un combat à coups de pierres dont on trouve de gros tas. Ces gens là se poursuivent ainsi pendant plus d’une demi lieue. Lorsque les habitans de Bargemon ne sont pas assez nombreux pour se battre, la querelle s’élève entre les Paysans & les Artisans de Seillans. Ils se battent & se poursuivent à coups de pierre, souvent même jusques dans le Bourg [...] Il nous est impossible de donner la raison de cette phrénésie [...] Les blessures qui s’y font, les procédures auxquelles elles ont donné lieu, les défenses les plus sévères n’ont rien changé à cet usage singulier ; rien n’a pu l’abolir.
56Bien qu’il soit incompris de l’informateur, on devine que ce genre de combat n’est jamais fortuit. Il doit avoir lieu, car lorsque les gens de Bargemon ne sont pas assez nombreux, la lutte se déplace entre les différents groupes de la population de Seillans. La lutte est organisée, nécessaire. Elle se déroule en un lieu et un moment précis, avec des adversaires connus. Elle a donc des règles, un rituel. La violence qui éclate est en quelque sorte permise et régulée à la fois par la fête.
57La violence permet de franchir les barrières qui sont habituellement imposées par la sociabilité commune des jours ordinaires. Et cette transgression de la loi est un hommage et un sacrifice au saint. On danse « en action de grâces » comme l’avouent les paysans portugais qui participaient, en 1973 encore, à des « romarias » peu différentes des romérages provençaux33. Ainsi, la séparation du sacré et du profane dans le temps de la fête n’est peut-être établie que par le regard extérieur de l’observateur. Dans les textes réunis par Achard, on ne danse et on ne lutte que pour se divertir, même si l’informateur constate, comme à Velaux, que « ce n’est plus un amusement, c’est une passion, une fureur ».
58Dans ces « débordements » qui caractérisent tout romérage, on retrouve les traits bien connus des pèlerinages. Tout d’abord, le franchissement de frontière s’inscrit physiquement dans les processions. Elles vont vers d’autres villages pour la rencontre, toujours périlleuse, de l’autre. Quelques textes expriment pourtant l’allégresse du départ. Un hymne à la nature des beaux jours revenus éclate au sujet des romérages de l’Arche (Larche diocèse d’Embrun), qui « se font le 18 juillet & le jour de la Magdeleine le 22 du même mois ». Les voisins, c’est-à-dire les habitants des paroisses voisines, « parcourent avec la plus grande satisfaction les prairies émaillées des plus belles fleurs ; les lys, les violettes, les renoncules, les anémones & la couronne impériale étalent à leurs yeux ce que la nature a de plus beau et enchantent la vue par la variété & le brillant des couleurs ». Le ton adopté est bien celui du début d’une fête qui se terminera par des jeux.
59Certaines chapelles rassemblent alors des populations venues de plusieurs vallées, de toute une région. Quelques notations éparses montrent que l’on a affaire, dans ce cas, à de véritables pèlerinages. Tel est le cas de la chapelle Saint-Ours à Meyronnes (diocèse d’Embrun, vallée de Barcelonnette) où, « le jour de la Fête, qui tombe le 17 juin, il y a un grand concours de peuple. On y vient de la Val de la Maité, de la Val de Siure, de la Val de Peyre, du Gapençois, de l’Embrunois, du Briançonnois & de la Vallée ».
60Le romérage réduit au territoire communal se place dans la continuité de ces petits pèlerinages. Comme à la chapelle Saint-Arnoux de Seillans, qui se trouve à la limite des terroirs de Seillans et de Bargemon, il se déroule sur le lieu d’une rencontre ritualisée entre deux communautés voisines. Mais ce romérage-pèlerinage se fait de plus en plus rare.
Conclusion
61C’est ce que je voudrais souligner en conclusion. La Description d’Achard est bien le miroir d’un monde en train de disparaître. La réduction des parcours à l’espace villageois supprime l’aspect de pèlerinage qui ne subsiste que dans quelques cas. Dans cette évolution, les luttes et les prix perdent leur sens. Le romérage se dissout en fête patronale.
62D’ailleurs, bien des textes de cette Description sont rédigés au passé. La fête bruyante n’est plus qu’un souvenir et l’on met l’accent sur la « fête de dévotion » qui subsiste. Voici, parmi tant d’autres, l’exemple d’Amirat (viguerie de Grasse) :
À un quart de lieue de la Paroisse, est une Chapelle dédiée à S. Jean & à S. Paul, Martyrs, où l’on chante la grand’messe le jour de leur Fête. Autrefois il y avoit un Roumavagi bruyant ; on y avoit compté jusques à sept tambours. Le brillant de cette fête a disparu ; la dévotion seule conduit aujourd’hui les habitans du lieu à cette Chapelle.
63On constate aussi l’évolution inverse, dans laquelle l’informateur ne veut retenir de la fête disparue que son côté profane. Cela nous vaut, comme à Reillanne, (viguerie de Forcalquier), quelques descriptions mélancoliques :
Qu’on se représente des prairies émaillées de fleurs, couvertes d’arbres, coupées en mille sens différents par de petits ruisseaux, où se rendent au mois de mai ou juin les habitants de vingt ou trente lieues voisins, & où, parmi leurs bandes divisées, les uns dansent, font l’amour34, chantent ou boivent lorsque les autres observent, négocient ou se promènent, & on aura une juste idée du tableau que formoit ce jour-là (seconde fête de la Pentecôte) l’affluence qui animoit le Roumavagi champêtre de S. Mitre.
64À travers de tels textes dans lesquels l’unanimisme du romérage a disparu, dans lesquels sacré et profane sont séparés, percent, dans la nostalgie, les aspects d’une évolution ultérieure.
Notes de bas de page
1 Claude-François Achard, Description Historique, Géographique et Topographique des Villes, Bourgs, Villages et Hameaux de la Provence ancienne et moderne, du Comté-Venaissin, de la Principauté d’Orange, du Comté de Nice, etc., pour servir de suite au Dictionnaire de la Provence. Par M. Achard, Médecin de Marseille, Membre de plusieurs Académies. Précédée d’un Discours sur l’état actuel de la Provence, par M. Bouche, Avocat au Parlement d’Aix, associé à l’Académie de Marseille, de celle des Arcades de Rome, & c., Aix-en-Provence, P.-J. Calmen, 1787-1788, 2 vol. imprimés in-4o (VIII-648 p. et 578 p.) et un volume resté manuscrit. Le faux titre porte : « Géographie de la Provence, du Comté-Venaissin, de la Principauté d’Orange, du Comté de Nice, & c. ». Nous désignerons toujours cet ouvrage par le premier terme du titre : la Description de la Provence ou la Description d’Achard.
2 Michel Vovelle, Les métamorphoses de la fête en Provence de 1750 à 1820, Paris, Flammarion, 1976.
3 Marie-Hélène Froeschlé-Chopard, Itinéraires pèlerins de l’ancienne Provence, Marseille, La Thune, 2002, particulièrement le chapitre : « La Provence, terre des romérages », p. 35-63.
4 Michel Vovelle, « La découverte de la Provence ou les primitifs de l’ethnographie provençale », dans M. Vovelle, De la cave au grenier, un itinéraire en Provence au xviiie siècle. De l’histoire sociale à l’histoire des mentalités, Québec, Fleury, 1980, p. 407-435.
5 Cité par Régis Bertrand, « Les Bouches-du-Rhône en fêtes au début du xixe siècle : un chapitre de la Statistique départementale et sa genèse », dans François Gasnault, Pierre Gombert, Félix Laffé et Jacqueline Ursch, dir., Récits de fête en Provence au xixe siècle. Le préfet statisticien et les maires ethnographes, Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône/Milan, Silvana Editoriale, 2010, p. 13-21.
6 Marie-Hélène Froeschlé-Chopard, avec la collaboration de Simon Guérin, Images de l’ancienne Provence. Description Historique, Géographique et Topographique des villes, Bourgs, Villages et Hameaux de la Provence… par M. Achard, Nice, Serre, 2010. Préface de Michel Vovelle.
7 Catalogue de la bibliothèque des livres de feu l’abbé Rive, acquise par les citoyens Chauffard et Colomby, mis en ordre par C.-F. Achard, M. D. M., Marseille, Rochebrun et Mazet, 1793.
8 Cours élémentaire de bibliographie, ou la Science du bibliothécaire… par C.-F. Achard, ... Marseille, Joseph Achard fils et compagnie, 1806-1807, 3 vol.
9 Dictionnaire de la Provence et du Comté-Venaissin… par une société de gens de lettres (par C.-F. Achard), Marseille, Jean Mossy, 1785-1787.
10 Comte [Christophe] de Villeneuve[-Bargemont], Statistique du département des Bouches-du-Rhône, Marseille, A. Ricard, 1821, t. II, ch. IX « Statistiques communales », p. 765-1175.
11 L’enquête de 1728 a été étudiée, pour la Basse Provence orientale, par Michel Derlange, « Les procès-verbaux de réaffouagement de 1728. Aperçus sur la Basse Provence orientale », Provence historique, t. 24, fasc. 95, 1974, p. 3-28.
12 Mémoire adressé à tous les intendants par M. Le duc de Beauvillier pour y répondre article par article et servir d’instruction à Monseigneur le duc de Bourgogne, 1697.
13 Bertrand Gille, Les sources statistiques de l’histoire de France, Genève, Droz, 2e édition, 1980, donne le contenu de ce questionnaire p. 29-30.
14 Voir Marie-Noëlle Bourguet, Déchiffrer la France. La statistique départementale à l’époque napoléonienne, Paris, éd. de l’EHESS, 1989 et rééd. 2007.
15 Cité par Louis Trénard, « Un regard ethnologique sur les provinces. L’enquête des intendants en 1698 », La découverte de la France au xviie siècle, éditions du CNRS, 1980, p. 233-245.
16 François Marchetti, Explication des usages et coutumes des Marseillois, Marseille, Charles Brébion, 1683. Cet ouvrage a été étudié par Michel Vovelle, « Du regard inquisiteur au regard ethnographique : le prêtre Marchetti, les confrères du Saint-Sacrement et les bonnes femmes marseillaises », dans M. Vovelle, De la cave au grenier…, op. cit., p. 437-457.
17 C’est sur ces descriptions que se base en partie notre ouvrage sur La religion populaire en Provence orientale au xviiie siècle, Paris, Beauchesne, 1980.
18 L’on pourrait tout aussi bien citer ici une réalisation que les historiens passent généralement sous silence, mais qui relève de la même démarche, celle des ingénieurs de Cassini qui, pour établir la première carte générale de la France, ont rassemblé les données astronomiques d’une part et, d’autre part, l’enquête sur le terrain auprès des curés et des autorités locales.
19 C.-F. Achard, Description…, op. cit., t. I, p. VI-VII.
20 M. Vovelle, Les métamorphoses de la fête en Provence…, op. cit., p. 31-33.
21 Ibid., p. 38.
22 Alphonse Dupront, « Anthropologie du sacré et cultes populaires. Histoire et vie du pèlerinage en Europe occidentale », dans Miscellanea historiae ecclesiasticae, t. v, Louvain, 1974, p. 235-258.
23 Comte de Villeneuve, Mœurs, usages, coutumes et langage des Provençaux, Nyons, Chantemerle, 1972 (réédition partielle de la Statistique du département des Bouches-du-Rhône, Marseille, A. Ricard, t. III, 1826), p. 82.
24 Voir Dominique Julia, « Pour une géographie européenne du pèlerinage à l’époque moderne et contemporaine », Pèlerins et pèlerinages dans l’époque moderne, Rome, col. de l’École française de Rome, 2001, p. 3-126.
25 Ibid., p. 26-37.
26 Archives départementales du Var, 1 G 72, visite pastorale d’Emmanuel-François de Bausset, le 15 août 1769.
27 Jacques-Félix de Girardin, Notice ou description historique du diocèse de Fréjus, éditée par l’abbé J.-B. Disdier, Draguignan, C. et A. Latil, s. d. [1871], p. 30, nomme cet endroit « Cauroux » et énumère tous les saints qui, selon la tradition, ont vécu dans ce « désert ». Pour cet auteur, « les ecclésiastiques, les citoyens de Fréjus, les religieux de Lérins, les villes et les bourgs des environs aiment et révèrent encore ce saint lieu. On y voit les vestiges de quelques cellules à coté de la chapelle, qui n’est autre elle-même qu’une caverne vers le milieu de la plus haute montagne ».
28 Achard, qui ne fournit pas la liste des fêtes de Lorgues, n’énumère que les foires, au nombre de trois. La première d’entre elles, celle de la Saint-Ferréol, pourrait bien correspondre à un romérage du lieu.
29 Voir Marie-Hélène Froeschlé-Chopard, Espace et Sacré en Provence (xvie-xxe siècle). Cultes, Images, Confréries, Paris, Cerf, 1994, p. 116-118.
30 Marie-Hélène Froeschlé-Chopard, Espace et Sacré..., op. cit., p. 76-87 et 116-118.
31 Maurice Agulhon, Pénitents et Francs-Maçons de l’ancienne Provence, Paris, Fayard, 1968, p. 44.
32 Sans doute est-ce pour cette raison que les évêques, tel Martin du Bellay en 1756, interdisent les tambours aux processions. Voir Paul-Albert Février, « Fêtes religieuses de l’ancien diocèse de Fréjus », Provence Historique, t. 11, fasc. 44, 1961, p. 163-189.
33 Pierre Sanchis, Arraial, la fête d’un peuple, les pèlerinages populaires au Portugal, Paris, éd. de l’EHESS, 1997, p. 267.
34 Antoine Furetière, Dictionnaire universel, La Haye, A. et R. Leers, 1690. « Amour. On dit qu’un jeune homme fait l’amour à une fille quand il la recherche en mariage. On le dit aussi quand odieusement il tasche de la suborner… On dit aussi qu’une femme fait l’amour quand elle se laisse aller à quelque galanterie illicite » ; « Faire. Faire l’amour, c’est tâcher de plaire à quelque dame et de s’en faire aimer. »
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