Jeanne-Anne princesse de Savoie et impératrice de Byzance
p. 85-118
Résumés
En 1326 à Constantinople arrive de Savoie Jeanne, la jeune fiancée impériale d’Andronic III coempereur de son grand-père Andronic II, veuf et sans enfant. Pourquoi une telle union ? Quels en étaient les atouts ? Quelle fut la vie de cette impératrice étrangère à la cour de Byzance ? Comment cette petite princesse devenue l’impératrice de Byzance a-t-elle suscité tant d’inimitiés ? Analyser les enjeux d’un tel mariage à l’époque où Byzance est secouée par des guerres civiles, étudier le règne de celle qui désormais est appelée Anna Palaiologina, considérer son influence occidentale à la cour, surprendre le rôle de cette impératrice aux côtés de son époux, puis comprendre ce que furent son réel pouvoir après la mort d’Andronic III, sa lutte implacable contre l’usurpateur Jean Cantacuzène, la force de sa légitimité, mais aussi sa faiblesse au sein d’un conseil déchiré par les ambitions politiques de son entourage, telle est l’ambition de cet article.
Jeanne/Anna Princess of Savoy and Byzantine Empress
In 1326 Jeanne of Savoy, the young fiancée of the widowed and childless Andronikos III, co-emperor with his grandfather, Andronikos II, arrived in Constantinople. What circumstances gave rise to this marriage, and what were its benefits? What kind of life did this decidedly foreign empress lead in the Byzantine court? And why did she provoke so much hatred on becoming empress of Byzantium? This article considers numerous questions associated with Jeanne of Savoy: the issues underlying her marriage during a period when Byzantium was wracked by civil wars; the reign of Anna Palaiologina (her Byzantine name and title); her influence as a Westerner in the court; her role as consort and her real power after Andronikos III’s death; her relentless struggle against the usurpation of John Kantakouzenos; the power of her legitimacy as well as her weaknesses within a council divided by the political ambitions of her entourage.
Texte intégral
1Comment et dans quelles circonstances une petite princesse de Savoie se vit hissée au trône impérial de Byzance, quelle fut sa vie d’impératrice aux côtés d’Andronic III, puis de régente au nom de son fils Jean V, c’est ce destin que nous allons tenter de retracer à une époque où l’empire se trouve tout à la fois fragilisé par les guerres civiles, menacé par la puissance grandissante des Serbes et réduit par la conquête progressive de l’Asie Mineure par les Turcs1.
Le choix de Jeanne de Savoie et son arrivée à constantinople
Préparatifs à la cour de Savoie
2C’est en septembre 1325 que s’inscrit la destinée byzantine de Jeanne de Savoie quand les ambassadeurs byzantins arrivèrent à Chambéry pour conclure le contrat de mariage de l’empereur Andronic III avec la jeune princesse2. Lesdits ambassadeurs n’avaient pas été choisis au hasard : il s’agissait d’Andronic Comnène Doukas Paléologue Tornikès qui avait le titre élevé de parakoimomène et de Jean de Gibelet, un membre de la classe nobiliaire syro-chypriote au service de Byzance3. L’un appartenait à l’aristocratie de cour et était lié à la famille impériale, l’autre avait le titre de chef d’armée et des accointances avec les Génois4. Andronic III venait de perdre sa première épouse, Irène de Brunswick, et on avait recherché pour l’héritier du trône, qui avait été couronné peu auparavant (février 1325), une épouse occidentale qui fût du parti gibelin. On peut supposer que son oncle maternel Théodore, marquis de de Montferrat, lié lui-même à la famille de Savoie par Marguerite, demi-sœur de Jeanne et veuve du défunt marquis Jean de Montferrat, joua un rôle essentiel dans les tractations5. Il savait que le comte Édouard qui venait de succéder à son père Amédée V avait une sœur à marier et qu’elle venait d’être pressentie par le roi de France, Charles le Bel, en 1322 et par Robert d’Anjou pour son fils Charles, duc de Calabre. La Savoie pouvait être un pion intéressant pour Byzance dans l’alliance gibeline et l’on constate que Jean Cantacuzène est remarquablement informé de la cour savoyarde et de la succession princière6. Quant aux Montferrat, il était de leur intérêt de ne pas laisser sous l’aire d’influence angevine cette principauté qui désormais s’étendait de la Savoie jusqu’à la Maurienne et la vallée de la Suze, ayant annexé récemment la Bresse et plusieurs zones du Piémont, et contrôlait la route vers la France7. Quant à Édouard de Savoie, il visait des alliances matrimoniales internationales qui rehausseraient le blason du comté et en imposeraient aux seigneuries voisines. On n’oubliera pas que Byzance à cette époque avait encore le prestige d’un grand empire millénaire. Les ambassadeurs arrivèrent à Chambéry, la capitale de la Savoie, vers la mi-septembre 1325. Les y rejoignirent successivement le comte Édouard qui résidait à Bourg-en-Bresse à cette date et Jeanne qui venait de passer des vacances au Bourget avec sa belle-sœur Blanche de Bourgogne. Le contrat de mariage fut rédigé le 22 septembre et validé au grand bonheur d’Édouard : « selon la volonté de Dieu désormais sa sœur a un rang et une gloire supérieurs et impératrice des Romains elle devenait sa souveraine » et, ajoute Cantacuzène, « ce ne sont pas seulement les barbares, mais encore les Italiens et tous les autres souverains qui estiment que la majesté des Romains leur est supérieure et plus éclatante »8. Jeanne quitta Chambéry peu de temps après pour rejoindre Savone où elle devait embarquer pour Constantinople. La route passait par Montmélian, La Chambre, Saint-Jean-de-Maurienne, Saint-Michel-de-Maurienne, Les Fournaux, Lanslebourg, Susa, Rivoli, Turin, Pinerolo, Vigone, Villafranca, Saviggliano, Fossano, pour se diriger à travers l’Appenin vers la côte ligure9. Et ce n’est que le 18 octobre que Jeanne parvint à Savone.
3Qui était cette jeune princesse ? Née en 1306 du second mariage d’Amédée V avec Marie de Brabant, Jeanne était donc la jeune demi-sœur du comte Édouard de Savoie. Nous ne connaissons pas grand chose de son enfance et de son adolescence, ni de son éducation, si ce n’est une vie itinérante de château en château comme il était d’usage à la cour de Savoie de l’époque et un entourage franciscain qui devait veiller à l’éducation et à la morale des jeunes filles10. Un mode de vie aristocratique raffiné régnait dans tous ces châteaux où la table était abondante et garnie de nombreuses épices, clous de girofle, cannelle, gingembre, cardamone, noix de muscade et poivre à côté du sucre, des figues et du riz11. Pour témoigner à la fois de l’honneur fait à sa sœur et de sa propre munificence, les préparatifs du voyage avaient été somptueusement organisés par le comte Édouard dont le trésorier Bonuschristianus a noté le détail des frais dans les livres des comptes de l’Hôtel de Savoie12. Il avait fallu d’abord veiller au trousseau de Jeanne et avant de partir, on s’affairait à le compléter avec une série de coupons de toile, d’étoffes, de soieries comme le cendal, et encore de garnitures de brunette de Louvain pour les chausses. On avait fourni des harnais pour les chevaux, de l’écarlate de Châlon pour la selle de l’impératrice et des coussins remplis de plumes et recouverts de taffetas vert. Les ultimes achats consistèrent en ceintures, boucles, coiffes, fourrures de veau et d’agneau. De Lyon provenait le costume réservé à l’impératrice. Il y avait de plus les malles neuves et les selles de l’impératrice et enfin le cadeau du comte aux empereurs, un cheval de grand prix gardé par un valet. On avait également pensé aux objets de culte, calices, draps dorés et nappes d’autel. On avait même fait envoyer de Gênes un missel et un bréviaire de la meilleure facture13. Outre le trousseau de la princesse et son équipement pour le voyage, le comte Édouard se préoccupa de vêtir le plus somptueusement possible l’escorte de sa sœur, surtout ceux qui allaient l’accompagner à Constantinople, car ils devaient faire grande impression à leur arrivée. La suite de l’impératrice était en effet composée de sept valeureux chevaliers, quatre dames nobles dont les sœurs de la Rochette, quatre demoiselles, vingt-trois écuyers, son chapelain et trois autres frères mineurs, quinze valets de chambre et neuf préposés à la table et la cave. Ses frères Édouard et Aymone l’accompagnèrent jusqu’à Villafranca. À Rivoli, Marguerite de Montferrat, venue tout spécialement de Pinerolo pour la saluer, l’accueillit dans le château qu’elle avait mis à sa disposition. C’est alors que la rejoignit son cousin Philippe de Savoie-Acaja, chef de la ligue gibeline qui l’accompagna jusqu’à Savone. Les ambassadeurs byzantins étaient magnifiquement reçus dans toutes les demeures où ils séjournaient et les comptes de l’Hôtel de Savoie témoignent des grands frais que l’on fit en leur honneur14. Quand Jeanne arriva à Savone, une grande fête de réception fut offerte par le podestat, les magistrats de la cité, le capitaine de la Commune et du Peuple et le prieur du Conseil. Il faut dire que Jean de Gibelet était arrivé plusieurs jours auparavant pour mettre les autorités à contribution et que de son côté le comte Édouard avait lui aussi donné l’ordre à son trésorier de dépenser ce qui convenait à celle qui désormais était impératrice des Grecs15.
La réception de la fiancée impériale à la cour de Byzance
4Ce n’est qu’à la fin du mois de novembre ou au début de décembre que Jeanne embarqua dans la galée qui de Péra avait amené les envoyés byzantins. C’est donc pendant la mauvaise saison que Jeanne fit la traversée et elle arriva à Constantinople en février 1326, malade et épuisée. Selon le Pseudo-Codinos, la fiancée impériale venue par mer de l’étranger débarquait habituellement « près de l’église des Blachernes en dehors de la ville »16, c’est-à-dire au milieu de la Corne d’Or, juste au delà des murailles. Venaient à sa rencontre l’empereur son fiancé et l’empereur le père de ce dernier, s’il était toujours vivant. Puis ils la laissaient en compagnie des femmes de la cour pour être revêtue des fameuses chaussures rouges et des vêtements impériaux. La fiancée se rendait alors au palais à cheval et ensuite avait lieu la cérémonie du mariage. Cantacuzène mentionne que Jeanne de Savoie fut reçue en grande pompe ainsi que tous ceux de sa suite, chevaliers, écuyers et autres nobles et que les fastes de la réception dépassaient tous ceux qu’avaient pu connaître jusque là les impératrices venues de l’étranger. Elle fut accueillie par l’empereur son beau-père Andronic II avec munificence comme il convenait à l’épouse de l’empereur et fils17. Mais, contrairement à l’habitude, le mariage ne se conclut pas immédiatement, car Jeanne était alitée et Andronic III partit en campagne en Thrace. À son retour à Constantinople en octobre, le mariage fut célébré selon le cérémonial byzantin : l’empereur son époux couronna impératrice celle qui porta désormais le nom d’Anna Palaiologina18. La question est de savoir si la nouvelle impératrice avait dû lors de cette double cérémonie du mariage et du couronnement, qui à cette époque se déroulait à Sainte-Sophie, se convertir à l’orthodoxie comme l’indiquerait son changement de nom. Le canoniste Mathieu Vlastarès prescrivait pour le commun la résiliation du mariage en cas contraire. Le pape Jean XXII de son côté, qui n’avait été prévenu que tardivement du mariage par le comte Édouard avait envoyé une lettre assez sèche à ce dernier lui rappelant qu’une princesse catholique devait éviter tout mariage avec un infidèle, comprenant par là aussi bien une union avec un souverain orthodoxe. Et si jamais cela devait être, il fallait souhaiter que la princesse catholique amène son époux à la foi droite et il serait très nocif qu’il advienne le contraire. De la même façon que les canonistes byzantins considéraient les mariages entre familles royales différemment des autres pour raisons diplomatiques, l’attitude du pape reflétait davantage une réaction d’humeur de n’avoir pas été consulté qu’une réelle opposition19.
Anne de Savoie épouse d’Andronic III (1326-1341)
La cour de l’impératrice à Didymoteichon
5Après les fêtes du mariage nombre de ceux qui avaient accompagné Anne depuis la Savoie, hommes et femmes, repartirent dans leur foyer. Quelques-uns néanmoins restèrent auprès d’elle comme Isabelle de la Rochette et ses fils. Selon Cantacuzène, Isabelle de la Rochette, appelée Zampia par les Grecs, l’emportait sur les autres femmes par son esprit ; de plus, son éducation ainsi que son mode de vie la désignaient tout exprès pour vivre au palais impérial. D’ailleurs, les nobles de Savoie étaient heureux de vivre dans l’entourage de l’empereur qui les gratifiait de sa bienveillance. Il appréciait en eux leur virilité, leur audace au combat et leur disposition à partager ses divertissements : ils participaient aux chasses impériales et ils furent les premiers à enseigner aux Byzantins l’art de la joute et les tournois pratiquement inconnus jusque-là20. Quant ceux-là repartaient chez eux, d’autres venaient se mettre au service de l’empereur. Ainsi il y avait de façon permanente à la cour de l’empereur un noyau de Savoyards. Les Byzantins s’exercèrent à ces jeux et, en premier lieu, l’empereur qui finit par l’emporter non seulement sur ses maîtres, mais aussi sur les Français, les Allemands et les Bourguignons, qui tous s’extasiaient devant l’adresse de l’empereur21.
6Quelque temps après les noces, le jeune empereur partit avec son épouse s’établir à Didymoteichon. Il fallait d’abord débarrasser la région de bandits turcs, anciens mercenaires de l’armée byzantine, qui ravageaient les villages de Thrace. Ensuite, les relations entre les deux Andronic, grand-père et petit-fils, qui avaient connu une accalmie depuis 1325 s’envenimèrent à nouveau et Didymoteichon redevint le centre de l’opposition au vieil empereur. Les voisins, Serbes et Bulgares, profitèrent de cette nouvelle division au sein de la famille impériale pour s’immiscer dans la guerre civile et faire rejaillir leur propre inimitié. Tandis qu’Andronic III recherchait une alliance avec le Bulgare Michel Šišman, Andronic II envoyait une ambassade à la cour serbe pour persuader le kralj Dečanski de lui prêter main-forte dans la défense de la Macédoine contre les armées de son petit-fils (avril 1327)22. Au début du mois d’octobre 1327 Andronic III se déplaça à Sélymbria avec un grand nombre de ses proches et de ses amis23. Mais rien n’est dit sur l’impératrice et tout porte à croire qu’elle était restée à Didymoteichon. D’ailleurs, elle n’était pas aux côtés de son époux, quand maître de la Macédoine, il entra à Constantinople la nuit du 23 au 24 mai 1328 sûr de l’emporter sur son aïeul et fut à nouveau proclamé empereur24.
7Pendant quelques années Anne de Savoie préféra rester à Didymoteichon, cité-forteresse dominant la Maritsa, où elle jouissait d’un palais et d’une cour et, paraît-il, d’un air bienfaisant pour la santé plutôt que rentrer dans une capitale où flottaient encore les relents de la guerre civile25. Par ailleurs, Didymoteichon continuait à être la base de rassemblement des troupes quand Andronic III partait en campagne. Aussi le jeune empereur se trouvait-il à la fin du mois de juin 1328 auprès de l’impératrice quand il apprit l’attaque des Bulgares sur Andrinople26. En automne 1329 l’empereur se rendit spécialement avec son grand domestique à Didymoteichon où résidait également la mère de ce dernier, Théodora, qui ayant appris d’un noble de Chios, un certain Kalothètos, la rébellion du peuple de l’île contre les Génois, avait envoyé un courrier dans la capitale demandant à l’empereur et à son fils de venir immédiatement pour les entretenir de cette affaire27. Plusieurs constatations s’imposent : Didymoteichon était la résidence de la cour d’Anne de Savoie ; à ses côtés se trouvait la mère du grand domestique Jean Cantacuzène et nous voyons que celle-ci avait un rôle politique non négligeable. Par ailleurs, Didymoteichon était assez proche de la capitale pour que l’empereur vienne visiter souvent son épouse ou même s’y rende pour telle affaire urgente à débattre. Il devait même y séjourner parfois un temps assez long comme en témoigne le sauf-conduit qu’il procura à Henri II de Brunswick son beau-frère signé le 6 janvier 133028.
Le serment juré de Jean Cantacuzène envers Anne de Savoie
8Au cours de cet hiver, où il se trouvait à Didymoteichon, l’empereur tomba gravement malade : selon Grégoras, il avait pris froid à la suite d’un bain au sortir duquel il ne se serait pas couvert suffisamment. Il était atteint d’un syndome méningé et les médecins portaient un sombre pronostic29. L’empereur n’avait alors aucun héritier, mais l’on savait que l’impératrice attendait un enfant et l’on espérait que ce fût un fils30. Ce jour de janvier 1330, alors que toute la cour était persuadée qu’Andronic III terrassé par la maladie n’en avait que pour quelques heures, ce dernier prit des dispositions testamentaires. Il projeta dans un premier temps d’élever le grand domestique coempereur (symbasileus) et de le revêtir des insignes impériaux31, ce que Jean Cantacuzène aurait refusé. Alors l’empereur convoqua les membres du Sénat, le reste des bien-nés et même les autres Romains présents. Il manda également l’impératrice. Au cours de cette séance solennelle, il transmit l’archè, c’est-à-dire l’empire, à Anne de Savoie et le gouvernement des affaires publiques à Jean Cantacuzène, qui serait le seigneur absolu auquel tous obéiraient. En même temps, il mit les mains de Cantacuzène « autour » de celles de l’impératrice – les deux mains d’Anne sont serrées par celles de Cantacuzène – et par serment juré devant l’icône de la Mère de Dieu, il en fit le protecteur d’Anne et des habitants de l’empire en prononçant ces mots : « à toi je te la confie avec tous les Romains. Prends-en soin32 ». Cette hiérarchie des statuts est confirmée par Nicéphore Grégoras : Anne recevait le respect (sebas) qui revient à la couronne, ainsi que son enfant, comme basileus, si c’était un garçon, et Jean Cantacuzène était désigné régent (épitropos)33. Comme le mal empirait, sa tante Théodora Palaiologina Kantakouzènè34 demanda à l’empereur s’il fallait prendre des dispositions concernant l’impératrice, Xénè, sa mère35. Comme il répondait « aucune », elle pensa qu’il ne comprenait pas ce qu’elle lui demandait du fait de sa maladie et elle l’interrogea à trois reprises. La troisième fois, il répondit qu’il ne pouvait y avoir deux femmes à la tête des affaires36. L’inimitié qui régnait entre Andronic III et sa mère depuis le temps où elle complotait contre son fils à Thessalonique était loin d’être apaisée, y compris au seuil de la mort. Par ailleurs, Andronic III livrait un sentiment partagé par les Byzantins sur l’incapacité des femmes à gouverner ensemble. Enfin, comme on le verra ensuite, il éprouvait vis-à-vis de son épouse une grande estime et l’avait choisie aux dépens de sa mère, ce qui à coup sûr incita cette dernière à comploter à Thessalonique où elle résidait alors et à soutenir l’ambition du révolté Syrgiannès37. Après le départ du grand domestique, il fit prêter serment à tous ceux qui étaient présents, « comme il était d’usage à la mort du souverain38 », de s’attacher à Anne comme kyria et maîtresse de toute chose et de conserver envers elle une foi pure et sans ruse, mais d’obéir au grand domestique et de ne contester aucun de ses ordres39. On discerne sans peine les difficultés qui auraient surgi de cette répartition des pouvoirs.
9Cela fut épargné à l’empire, car l’empereur recouvra miraculeusement la santé et donc ces dispositions devinrent caduques, d’autant qu’aucun document officiel ne les avait scellées40. La naissance attendue d’un fils, Jean, le 18 juillet 1332, après celle de deux filles, conforta la légitimité dynastique et le statut d’Anne, mère de l’héritier du trône. Andronic III se trouvait aux obsèques de son grand-père le vieil Andronic quand il apprit la nouvelle, et il eut juste le temps de quitter sa tenue de deuil pour revêtir des habits étincelants et foncer à bride abattue à Didymoteichon : en cette occasion il paraît que la cour s’adonna aux jeux de joute des Latins41.
Le rôle politique d’Anne de Savoie aux côtés de son époux
10Il est certain que le rôle de l’impératrice fut loin d’être négligeable dans les relations de Constantinople avec l’Occident et notamment avec la papauté42. Déjà initié à la fin du règne d’Andronic II, le rapprochement s’accéléra devant l’évidence d’une menace grandissante des Turcs contre Byzance, mais aussi les intérêts vénitiens. Il était à nouveau question de croisade et d’union des Églises. La cour de Savoie fut un intermédiaire naturel et c’est ainsi qu’entre 1330 et 1333 de nombreuses ambassades se déployèrent entre les cours de Constantinople et de Savoie43. Les frères des ordres mendiants, Dominicains de Péra, mais surtout les Franciscains, qui avaient suivi Anne à la cour byzantine où ils étaient toujours bien accueillis, furent actifs dans ces processus de dialogues, d’échanges théologiques et de négociations. Constantinople représentait d’ailleurs une étape dans leurs longues pérégrinations en Orient44. Il faut se garder néanmoins d’une historiographie franciscaine si favorable à l’impératrice qu’elle n’hésita pas à broder sur la lettre du pape adressée à Anne en 1334 lui rappelant son devoir d’amener son époux à la foi romaine, sur la conversion supposée d’Andronic III ou même sur la volonté d’Anne d’être inhumée en terre catholique et le transfert présumé de sa dépouille en Italie45. La propagande optimiste des Franciscains contredisait les critiques du Dominicain Guillaume Adam qui se plaignait des mauvais traitements endurés par les frères mendiants à Constantinople du fait d’une impératrice pervertie par les Grecs46. L’invention du côté dominicain était à la mesure de leur dépit de voir les Franciscains, l’ordre rival, bien en cour. Néanmoins l’ensemble de ces sources laisse deviner la personnalité contestée d’Anne de Savoie sur laquelle nous reviendrons.
11En tout cas, c’est grâce à l’envoyé de l’impératrice, Guichard de Balam, prieur de Ravistelle, auprès d’Edmond de Savoie, en mai 1336, que l’empereur prit connaissance grâce aux lettres de son beau-frère des préparatifs d’une nouvelle croisade et qu’il envoya à la curie avignonaise Étienne Dandolo pour l’assurer de sa bonne volonté concernant l’union des Églises. Les liens de l’impératrice avec son époux nous paraissent étroits. L’empereur faisait confiance à Anne de Savoie en lui laissant une certaine initiative diplomatique dans les relations avec la cour de Savoie. De plus, le pape avait l’habitude d’impliquer l’impératrice et son frère dans les négociations avec l’empereur puisqu’il leur envoyait des lettres séparées, comme il le fit lors de l’ambassade d’Étienne Dandolo. Dans la lettre adressée à « Jeanne de Savoie », épouse d’Andronic, impératrice des Grecs, le pape l’enjoint d’élever ses enfants dans la foi catholique qu’ils doivent partager avec elle, d’amener Andronic à la réunion et à la réconciliation des Églises et d’envoyer des ambassadeurs à cette fin auprès du Saint-Siège47.
12C’est à Anne enfin, qu’Andronic confia la protection de Constantinople en mai 1335, quand il partit à la tête de sa flotte contrecarrer le plan fomenté en secret par les Hospitaliers de Rhodes, les Génois de Phocée et les Vénitiens des Cyclades d’attaquer les îles byzantines et les forces navales de l’empereur. Nicéphore Grégoras raconte que pendant l’expédition de l’empereur pour reprendre l’île de Mitylène, il régnait un grand relâchement au palais et que de jeunes aristocrates tentèrent un coup d’État avec l’aide des Génois de Galata dans le but affiché de s’emparer de l’empire48. Ils étaient donc convenus d’assassiner l’impératrice et son fils et tous ceux qui s’opposeraient à eux. Les préparatifs de ce complot n’échappèrent pas à Théodora Kantakouzènè, la mère du grand domestique que l’empereur, en partant en expédition, avait laissée au palais pour assister son épouse. Il avait estimé que cette femme avisée, de mœurs vénérables et d’une grande intelligence, serait capable de faire face à une situation critique. Cette grande dame et l’impératrice parvinrent à limiter les débordements en faisant montre d’une grande prudence. Ainsi, selon la volonté impériale, deux femmes gouvernaient l’empire, comme quoi les raisons invoquées par Andronic III quelques années plus tôt lors de sa grave maladie pour refuser le retour de sa mère à Constantinople n’étaient pas entièrement sincères, puisqu’il prit une option inverse en 1335. Certes la situation était différente, car il n’y avait qu’une seule souveraine et Théodora avait le statut de « proèdre », c’est-à-dire de « premier ministre », alors que Xénè aurait pu revendiquer le statut de « co-impératrice ». L’empereur, à la nouvelle des troubles dans la capitale, revint avec sa flotte. Il appréhenda les séditieux et leurs associés, ainsi que tous les témoins du complot, et les produisit devant une cour réunissant le sénat, les évêques qui résidaient dans la capitale, le patriarche et l’élite du peuple. Nous savons que l’impératrice Anne était présente ainsi que d’autres dames de la noblesse. Il faut dire que les conjurés comptaient parmi eux des parents de l’empereur, en particulier l’oncle d’Andronic, le despote Démétrius. Néanmoins la présence de la cour féminine à cette cour de justice improvisée témoigne de leur rôle politique et de la plus grande d’entre elles, l’impératrice.
13Anne était consciente des intérêts de la dynastie et elle réagit à la douloureuse séparation d’avec sa fille exactement comme le fit quarante ans plus tôt Andronic II quand il dut envoyer sa fille Simonide âgée de moins de six ans à la cour serbe. C’est ainsi qu’en 1337 elle dut se séparer de sa fille âgée de neuf ans pour la marier au fils du tsar bulgare Ivan Alexandre. Le jeune garçon, Michel Asen, était âgé de quinze ans. L’impératrice accompagna son époux à Andrinople où devait se conclure le contrat de mariage négocié dès 1331. Cantacuzène mentionne que l’empereur s’y résolut à contre-cœur, car il aurait préféré que sa fille restât dans son pays. Il savait qu’élevée dans les mœurs et les lois grecques, elle ne serait pas heureuse chez les Barbares, mais ce mariage servait l’intérêt de l’empire et, effectivement, il scella la paix entre les Byzantins et les Bulgares. Le mariage fut donc célébré à Andrinople : après les rites religieux qui se déroulèrent à l’intérieur de la ville, la noce se poursuivit par des banquets, des libations et tout ce qui s’accordait aux plaisirs de la fête dans les prairies dites de « la Comnène », situées non loin de la ville, près du fleuve Tounza. Les festivités durèrent huit jours et le neuvième, à l’aube, le tsar Alexandre et les Bulgares s’en allèrent dans leur pays avec la fille de l’empereur, désormais leur tsarine Irène (ou Marie)49. Il restait à Anne son autre fille, Marie, née vers 1335 et ses deux fils, Jean et Michel.
Mort d’Andronic III
14Anne accompagnait souvent son mari avec ses enfants. Et c’est ainsi qu’au printemps 1340 toute la famille se trouvait à Thessalonique. Ils y restèrent douze jours, puis allèrent à Didymoteichon où ils séjournèrent encore plusieurs jours. Vers la fin du printemps, toute la famille était revenue à Constantinople, quand Andronic fut terrassé par la maladie. Les médecins s’affairèrent aussi bien byzantins qu’arabes. Au bout de vingt jours l’empereur pensa qu’une visite dans le sanctuaire de la Mère de Dieu, dit des Hodègôn, lui procurerait la guérison. Cantacuzène précise qu’il avait attendu la clôture du synode qu’il présidait pour s’y rendre malgré la maladie qui le tenaillait. Mais ce fut peine vaine : d’abord il fut entièrement envahi par la fièvre, puis il fut victime de violents maux de tête et le troisième jour il n’y eut plus d’espoir : certains ambitieux- comme le parakoimomène Alexis Apokaukos – anticipaient déjà la transmission du pouvoir et encourageaient le grand domestique à revêtir les insignes impériaux. À de telles exhortations le grand domestique répondait qu’il ferait toujours passer les intérêts des enfants et de la femme de l’empereur avant ses propres intérêts, que l’empereur fût vivant ou mort. Devant l’imminence de la mort de l’empereur et comprenant le danger qui menaçait les enfants et l’empire, Cantacuzène se rendit auprès de l’impératrice éplorée, lui enjoignant de se ressaisir. L’impératrice admira le sang-froid de Cantacuzène, son souci de préserver les enfants et de sauvegarder l’empire, et lui donna toute latitude pour faire ce qui convenait au bien de l’État. Aussitôt, Cantacuzène ramena les enfants dans le palais. Et il ordonna, pour assurer leur sécurité, une protection rapprochée de l’armée, choisissant les éléments les plus dévoués à l’empereur, et les plus fidèles de ses proches au nombre de cinq cents environ, ainsi que tous les Varanges porteurs de hâche. Le 15 juin 1341 l’empereur mourut dans le monastère des Hodègôn. Il était alors âgé de 45 ans. Anne resta à se lamenter auprès de son lit mortuaire pendant trois jours, puis elle retourna au palais où elle fit un deuil de neuf jours50.
Anne de Savoie régente à Constantinople (1341-1347)
15C’était toujours à Byzance le point fragile de la succession à l’empire lorsqu’à la mort de l’empereur l’héritier au trône était encore mineur, ce qui était le cas dans la situation présente, puisque Jean, l’aîné des fils, n’avait que neuf ans. Jean Cantacuzène qui avait été le plus proche collaborateur d’Andronic III, pensait être le mieux placé pour assumer alors le pouvoir, et il prit, comme nous l’avons vu les dispositions nécessaires avant même la mort de l’empereur. Apokaukos, d’abord favorable à Cantacuzène auquel il devait toute sa fortune, adopta très vite la position inverse : il excitait, dit Grégoras, l’impératrice et les nobles contre lui en affirmant que le grand domestique ne pensait qu’à une chose : les assassiner tous et s’établir basileus autocrator, à tel point que l’impératrice en fut persuadée et ne resta pas le temps complet du deuil aux côtés de son époux, mais rentra précipitamment au palais51. Cette interprétation du retour de l’impératrice au palais est exactement à l’opposé de celle donnée par Cantacuzène. Au fond, elle pose le problème crucial du statut d’Anne et de ses relations avec Jean Cantacuzène. Il convient de se demander, en effet, à quel titre Anne a alors assumé le pouvoir. Fut-elle régente au nom de son fils mineur Jean V ou bien régna-t-elle avec un statut de co-empereur ? Cette question a déjà été soulevée par Catherine Christophilopoulou en 197052, mais la réflexion n’en a pas englobé tous les aspects et surtout n’a pas élucidé les raisons de la guerre civile entre Anne de Savoie et Cantacuzène, grand domestique et second personnage de l’État53. L’historiographie byzantine est tendancieuse du fait de l’origine et du parcours politique de ses auteurs. La première et fondamentale source, l’histoire de Jean Cantacuzène, que l’on a pris l’habitude de qualifier de Mémoires54, rédigée quelques décennies après les événements, révèle un souci aigu de respecter la légitimité de l’impératrice et l’exonère de toute responsabilité d’autant qu’il s’agit d’une femme noble, veuve avec des enfants orphelins, qui met en avant sa bonne naissance et sa condition indigne et malheureuse. Ce serait, en effet, l’argument avancé par l’impératrice elle-même lors de la mort d’Andronic pour convaincre Cantacuzène de prendre soin (pronoia) d’elle et de ses enfants au nom de sa renommée et de la justice55. Anne n’aurait cessé de rappeler l’amitié unissant autrefois l’empereur à son grand domestique, amitié indéfectible et surpassant tous les liens d’affection et autres biens, que n’avait pu dissoudre la mort de son époux56. Paradoxalement, le principal ennemi de Cantacuzène pendant la guerre civile est innocenté aux dépens de ses ministres que furent le patriarche Jean Kalékas57 et le grand-duc Alexis Apokaukos58. La seconde source littéraire d’importance est l’Histoire de Nicéphore Grégoras, plus concise, moins documentée, mais dont les termes doivent être examinés avec attention, car l’auteur contemporain lui aussi des événements n’est pas partie prenante dans le conflit, même s’il est plutôt un partisan de Jean Cantacuzène à cette époque. Il conviendra donc d’examiner successivement la crise du pouvoir à la mort d’Andronic III, la mise en accusation de Jean Cantacuzène, et, enfin, la régence d’Anne de Savoie après le couronnement de Jean V Paléologue.
La crise du pouvoir à la mort d’Andronic III
16La grande faiblesse d’Anne de Savoie est de se retrouver impératrice veuve avec un héritier au trône mineur sans qu’Andronic n’ait pris aucune disposition testamentaire59. Aussi, les jours qui suivirent la mort d’Andronic III, il régna au palais une grande confusion sur le partage des tâches et une ambiguïté des rôles sur le devant de la scène politique byzantine. Le 15 juin 1341, le gouvernement était assuré par Jean Cantacuzène comme grand domestique. Mais la situation était différente de celle de janvier 1330 où l’on avait cru l’empereur mourant : non seulement du fait de la nouvelle composition de la famille impériale avec les deux fils d’Andronic, Jean et Michel âgés respectivement de neuf et quatre ans, mais aussi parce que le patriarche Jean Kalékas, intronisé en 1334, avait joué les dernières années un rôle important pendant les absences de l’empereur et de son domestique. Andronic III à deux reprises l’avait institué comme protecteur de sa femme, de ses enfants et de l’empire, le qualifiant de gardien (phylax) et épitropos. Selon Grégoras, le patriarche put en attester en produisant à la surprise de tous un document de l’empereur qui, avant de partir en expédition en Thessalie, lui avait confié la protection de sa femme et de ses enfants ainsi que le gouvernement des affaires publiques60. Gravitaient autour du pouvoir d’autres personnages influents et ambitieux et, en premier lieu, Apokaukos, l’ex-duc de la flotte, destitué par Andronic, qui tentait maintenant de se rétablir au sommet de l’État.
17Quelques jours plus tard une ambassade bulgare arrivait à Constantinople pour demander l’extradition de l’ex-tsar Šišman réfugié à Byzance61. C’est à cette occasion qu’apparurent les premiers signes de crise. Le prétexte en était la réponse à donner à la requête des ambassadeurs, le fond en était la rivalité entre le patriarche et Cantacuzène. Le premier avait des porte-parole au sénat. L’un d’eux, un certain Georges Choumnos, qui avait la fonction de préposé à la table impériale, remit en question le statut de Cantacuzène comme « premier de l’empire62 ». Des rumeurs se répandirent sur l’ambition qu’avait le grand domestique de revêtir l’habit impérial. Grégoras rapporte que le patriarche et Apokaukos se coalisèrent pour aller trouver l’impératrice à l’insu de Cantacuzène et lui conseiller d’écarter le grand domestique : « sa présence n’était d’aucune nécessité, l’impératrice pouvait être en charge des affaires avec son fils, ayant à ses côtés comme gouvernant et défenseur le patriarche selon l’épitropeia qui lui avait été conférée jadis par l’empereur63 ». Cantacuzène offrit alors sa démission et rentra chez lui. Ses partisans s’agitèrent. La décision revint naturellement à l’impératrice. D’après Cantacuzène, elle fondit en larmes, lui demanda de revenir et, finalement, devant tant de détresse Cantacuzène accepta, mais lui fit prêter serment avec lui devant le patriarche. La teneur de ces serments mutuels n’est pas entièrement connue, mais on sait qu’elle reposait sur la fidélité et l’obligation d’en appeler à la justice au cas où la probité de Cantacuzène serait mise en doute64. Néanmoins, les termes employés par Cantacuzène et Grégoras sont assez différents. Cantacuzène affirme avoir dit à l’impératrice qu’il se réjouissait de recevoir l’empire (archè), tandis que selon Grégoras, il disait se tenir prêt à accepter la requête de l’impératrice, comme le défunt empereur l’avait stipulé, au sujet de l’épitropè et de la dioikèsis des affaires publiques65 : il ne s’agit nullement ici du pouvoir impérial, mais de l’administration et de la gestion des affaires de l’État en tant que régent. Toute l’ambiguïté des rôles de l’impératrice et de Cantacuzène tient à cette définition de leur statut respectif. Selon Grégoras, à la suite du retrait de Cantacuzène, une partie de l’armée s’était révoltée, brandissant l’évangile et demandant que « tous jurent assistance et fidélité aux empereurs et aussi à l’épitropos de la basileia Cantacuzène », confirmant que même par ses soldats il n’était nullement considéré comme un coempereur, mais comme le protecteur du pouvoir impérial. Ils menaçaient d’entrer dans le palais et c’est alors que l’impératrice et les nobles supplièrent Cantacuzène de calmer les séditieux66.
18Cantacuzène quitta Constantinople dès le mois de juillet 1341 pour la Thrace sous le prétexte d’une expédition contre les ennemis de l’empire. Il n’est pas exclu néanmoins qu’il faille voir dans ce brusque départ la préparation de son coup d’État avec le projet de rassembler l’armée67. Dans la capitale les intrigues se multiplièrent notamment avec le coup de force d’Apokaukos, qui avait décidé d’œuvrer pour son propre compte. Il profita de la maladie réelle ou feinte de l’impératrice pour prendre en otage l’héritier Jean V et l’amener à Épibatai, à quelques kilomètres de la capitale68. On ne sait pas exactement quelles étaient ses intentions, sans doute marier sa fille à l’héritier. En tout cas, il échoua. Quand Jean Cantacuzène revint précipitamment à Constantinople, le complot avait été éventé et Apokaukos restait prisonnier à Épibatai, destitué de ses fonctions. Pendant ce séjour se produisit un nouvel incident. Alors que Cantacuzène s’entretenait avec l’impératrice des affaires de l’empire, son attention fut attirée par un tumulte dans la cour du palais. Il s’agissait d’affrontements verbaux assez violents entre le patriarche et un groupe de nobles, qui s’offusquaient de la façon dont s’était déroulée l’entrée de Cantacuzène dans le palais : en effet, il était entré à pied et non à cheval comme il aurait dû selon son rang69. Or, disaient-ils, il dirigeait désormais les affaires de l’empire, lui qui du vivant de l’empereur, avait de fait exercé le pouvoir avec lui (paradynasteuôn) et, plus encore, avait partagé le pouvoir impérial (koinônia tès basileias). Ils accusaient le patriarche de ne pas être intervenu auprès de l’impératrice. Cette histoire rapportée par Cantacuzène est loin d’être anecdotique et donne une interprétation bien différente de celle de Grégoras pour un incident similaire que nous avons examiné précédemment. Les nobles de son parti rappellent le « privilège impérial » qui lui a été jadis octroyé. Cantacuzène dit être offusqué par la hardiesse de ces trublions, mais sa version des faits témoigne de ses prétentions au pouvoir impérial.
19De nombreuses fois Cantacuzène revient dans ses Mémoires sur l’amitié indissoluble qui liait autrefois l’empereur à son domestique et la proposition souvent renouvelée qu’Andronic lui aurait faite de revêtir les insignes impériaux et de prendre place sur le trône à ses côtés, même avant la maladie de l’empereur en janvier 133070. Anne de Savoie en était elle-même informée, car elle était souvent présente quand l’empereur disait à son grand domestique ne rien voir de mal à révéler publiquement la réalité du quotidien : la gestion des affaires publiques lui était entièrement subordonnée, puisqu’il signait les ordonnances à l’encre rouge à l’égal de l’empereur et que ses ordres avaient la même force que s’ils étaient de la bouche de l’empereur. Quand il partait en expédition et que ses valets ne l’avaient pas accompagné, il lui arrivait d’user du lit impérial, ce que le fils de l’empereur et empereur lui-même n’avait pas l’autorisation de faire, que l’empereur fût présent ou absent, et même empruntait-il les chaussons impériaux quand ils passaient la nuit ensemble71. Et pourtant Cantacuzène affirme avoir toujours refusé de revêtir publiquement les insignes impériaux alors même que l’empereur le pressait de le faire. Ce qu’il ne dit pas, en revanche, c’est l’étendue des pouvoirs qu’il détenait sous le règne d’Andronic III. Si l’on s’en tient à la déclaration de l’impératrice au début de la guerre civile, quand Jean Cantacuzène fut proclamé empereur à Didymoteichon, le sens est clair. Apprenant la nouvelle, elle aurait dit à son entourage : « Du vivant de l’empereur, alors qu’il ne portait pas d’habits impériaux, il [Cantacuzène] avait la puissance d’un empereur. En quoi est-il étonnant, maintenant qu’il a les insignes impériaux, qu’il fasse ce qu’il faisait sous l’habit d’un particulier72 ? », confirmant par là les propos de l’empereur sur la délégation de ses droits régaliens à son domestique. Ce n’était certes pas la première fois qu’un ministre tout puissant détenait le réel pouvoir, mais il semble qu’Andronic III, longtemps sans héritier, ait réellement pensé à faire de son plus fidèle compagnon de route un coempereur, aussi la situation complexe où l’empire fut plongé après sa mort fit-elle ressurgir toutes les ambitions.
Les droits régaliens d’Anne de Savoie
20À la mort de son époux, alors que le jeune basileus proclamé Jean V n’est pas couronné73, Anne est la seule détentrice de la basileia qui ne peut revenir dans sa plénitude qu’à celui ou celle qui a été couronné. En tant que détentrice absolue du pouvoir impérial, Anne de Savoie possède un certain nombre de droits régaliens dont nous avons conservé quelques témoignages.
21C’est Anne qui, selon le cérémonial habituel réservé à l’empereur autocrator, reçut les ambassades, comme en témoigne en juin 1341 la réception de l’ambassade bulgare. C’est encore Anne qui à la suite des requêtes présentées par les ambassadeurs, réunit son conseil composé des sénateurs, du patriarche et du grand domestique. Anne le dirigea et prit l’initiative de demander à chacun des participants son avis sur la décision à prendre concernant la requête du tsar Ivan Alexandre : devait-on livrer le réfugié comme le demandait le tsar ou risquer la guerre avec les Bulgares74 ? Le patriarche Jean Kalékas proposa de donner asile au réfugié à Sainte-Sophie. Quand Cantacuzène prétexta un mal d’estomac pour ne pas donner son avis, l’impératrice n’hésita pas à l’apostropher et à le contraindre à répondre, ce qu’il finit par faire en arguant qu’Ivan Alexandre n’était pas soumis aux lois romaines d’hospitalité et que protéger le réfugié ne pouvait aboutir qu’à la dévastation des villes et des villages de l’empire. Quelles que fussent alors les rivalités perceptibles entre le patriarche et le grand domestique pour assumer le premier rang de serviteur de l’empire, Anne détenait manifestement la plénitude du pouvoir impérial. En témoigne son refus, qu’évidemment Cantacuzène attribua à son entourage, de couronner immédiatement son fils sous prétexte que le temps du deuil n’avait pas été respecté75. Anne n’était pas si pressée de partager la plénitude de la basileia d’autant que son fils n’avait que neuf ans : il n’était que l’empereur potentiel.
22La Convencio avec Gênes du 5 septembre 1341 mentionne que le traité négocié par le défunt empereur Andronic III avec les envoyés du doge Simone Boccanegra, Oberto Gattilusi et Enrico Guasco, fut finalement conclu par la « domina Anne in Christo Deo fidelis imperatrix et moderatrix Romeorum » et son fils « excellentisimus dominus Iohannes Dei gratia imperator Romeorum76 ». La titulature de l’impératrice est celle d’une impératrice « moderatrix », soit « autokratorissa », alors que son fils est simplement « imperator ». Quand, peu de temps après, les Génois de Galata occupèrent Chios transgressant par là les traités et les serments passés, il est précisé que l’impératrice en était la dépositaire du côté byzantin77. Or la politique extérieure et, en particulier, la signature des traités et des chrysobulles était le privilège de l’empereur autocrator.
23Ce titre d’autokratorissa est authentifié par trois sceaux de plomb d’Anne portant les qualificatifs de « eusebestatè augousta autokratorissa Rômeôn78 ».
24La monnaie était autant un instrument de propagande qu’économique, aussi la signification de l’icône impériale doit-elle être mesurée dans toutes ses composantes : l’impératrice figurait-elle seule ou bien était-elle toujours représentée avec son fils et quelle était des deux la figure la plus prestigieuse ? Si un doute est permis concernant la datation des monnaies où sont représentés l’empereur Andronic III agenouillé devant le Christ au recto et l’impératrice et Jean V au revers79, en revanche certaines émissions datent sûrement de la régence d’Anne, tout d’abord le type émis pour le couronnement de Jean V et connu en un unique exemplaire, celui d’une monnaie d’argent de Thrace orientale où au recto est représenté Jean V couronné par le Christ et au verso Anne couronnée par la Vierge. Une autre monnaie d’argent représente au recto à gauche Anne, à droite Jean V, avec l’impératrice en position de plus grand prestige80.
25À cette époque où Anne jouissait pleinement de la basileia, il semble bien que Cantacuzène empiétait sur les droits régaliens qu’étaient les promotions des fonctionnaires et des dignitaires. En effet, comme nous l’avons dit, l’autocrator pouvait déléguer à son ministre tout-puissant le droit de promotion, ce qui devait être assez courant du temps d’Andronic III. Pourtant il ne faut pas s’y méprendre, ce droit était intégrant à la basileia comme en témoigne le détracteur de Cantacuzène, Alexis Apokaukos. En effet, alors que Cantacuzène séjournait encore dans la capitale (début septembre 1341), Apokaukos lui réclama deux charges, l’une de mésazôn, l’autre de trésorier, requête qui amène l’historien à rappeler que ledit Apokaukos en avait été auparavant déchu par Andronic III ainsi que de son titre de grand-duc pour cause de forfaiture et qu’il profitait par conséquent du changement de règne pour améliorer son statut81. Comme Cantacuzène ne voulait lui accorder qu’une seule des deux charges, Apokaukos décida de manifester publiquement son mécontentement. Il se précipita auprès de l’impératrice, pensant qu’elle avait été dissuadée par le grand domestique de lui confier les deux charges, et en la présence de ce dernier il l’interpella : « Je pense que non seulement cette charge qui me revient, mais encore toutes les charges des Romains, ce n’est pas au grand domestique, mais à toi de les conférer82. » Le sens de cette déclaration est clair : c’était Anne, en tant qu’impératrice, qui aurait dû conférer ses charges à Apokaukos et non Cantacuzène. Et Apokaukos de poursuivre à l’adresse de l’impératrice : « c’est toi qui dois répandre les grâces de la bienfaisance83 », entendant par là que le rôle d’évergète ne devait pas revenir au domestique, car c’était une vertu impériale. Anne lui aurait répondu être très étonnée de ses propos et lui aurait fait remarquer que le grand domestique détenait les mêmes pouvoirs qu’auparavant et qu’elle s’en remettait à lui. Elle aurait ajouté qu’Apokaukos agissait donc soit par effronterie soit par démence et comme il devait sa charge au grand domestique, c’était par conséquent le grand domestique qu’il devait remercier de sa générosité84. Cantacuzène accusa ensuite Apokaukos d’ingratitude et enfonça le clou : « cette fonction que je t’ai conférée, eh bien je te l’enlève et à partir de maintenant ne te mêle plus d’aucune affaire publique ». Sur quoi, Apokaukos demanda à l’impératrice si elle était du même avis. Et comme elle aquiesçait, il fut temporairement démis de toute charge. Ce récit de Cantacuzène correspond-il réellement à l’état d’esprit d’Anne de Savoie ? On peut en douter et penser que l’impératrice fut au contraire offensée d’avoir été privée de ses droits régaliens et de devoir publiquement reconnaître que seul le grand domestique en usait. Une telle interprétation permet de comprendre les raisons qui progressivement éloignèrent l’impératrice de son grand domestique. Cantacuzène ne sentit pas le danger qui pesait alors sur lui et repartit immédiatement en expédition (23 septembre 1341), non sans avoir refusé la proposition d’Anne de marier son fils Jean à sa fille Hélène85. De son côté l’imprératrice avait refusé la proposition de Cantacuzène de couronner son fils Jean, sans doute par crainte justifiée de perdre une part du pouvoir impérial, comme nous le verrons.
La mise en accusation de Jean Cantacuzène
26Une fois le grand domestique hors de Constantinople, l’entourage d’Anne a certes vite compris le parti qu’il pourrait tirer de cette absence, mais il se peut tout simplement que les ambitions se soient rejointes, celles du patriarche et d’Apokaukos d’un côté et celle de l’impératrice de l’autre.
27À Constantinople, l’atmosphère devint rapidement délétère. Si l’on en croit Cantacuzène, Apokaukos, qui avait retrouvé sa haute position de gouverneur de Constantinople et de grand duc de la flotte et était désormais tout-puissant à la cour, tentait d’effrayer les nobles savoyards proches de l’impératrice en colportant le bruit qu’ils seraient renvoyés dans leurs foyers par Cantacuzène et il n’hésitait pas d’ailleurs à les circonvenir par d’importantes sommes d’argent86. Dans le même temps, il attisait la colère du peuple contre les nobles partisans de Cantacuzène qui commençaient à fuir la capitale et pointait leurs biens à sa vindicte87. S’il fallait s’interroger sur la complicité de l’impératrice, il suffit de voir comment elle récompensa en octobre 1341 Gabalas, envoyé par Cantacuzène en médiateur des nobles spoliés, quand il retourna sa veste et accusa Cantacuzène d’infidélité. Comme « prix de son combat », il gagna la bienveillance de l’impératrice et obtint la dignité de protosébaste et quelque temps après celle de grand logothète88. Ainsi, au moment où la situation à Constantinople est en train de passer à l’affrontement avec Cantacuzène, l’impératrice retrouvait ses droits régaliens.
28Plus tard, elle reçut une seconde ambassade de Cantacuzène qui demandait la convocation d’un tribunal pour tirer au clair les diffamations portées contre lui et éloigner le spectre de la guerre civile. Non seulement les ambassadeurs repartirent sans avoir obtenu gain de cause, mais ils furent arrêtés à Selymbria par les gens d’Apokaukos contrairement au droit des gens (jus gentium), dépouillés de leurs chevaux et bagages et jetés en prison89. La nouvelle étant parvenue à l’impératrice, elle se mit en colère et ordonna de ramener les ambassadeurs dans la capitale et de leur restituer leurs biens. Elle réunit le Sénat et le patriarche et reçut les ambassadeurs. Ceux-ci ne firent aucun reproche des préjudices qu’ils avaient subis, exposèrent l’objet de leur ambassade, réclamèrent justice et prièrent l’impératrice de convoquer le grand domestique par lettres90. C’est alors qu’Apokaukos craignant que l’impératrice considérât le bien-fondé de la requête, se leva brutalement et du signe de la main demanda le silence : il déclara alors le grand domestique ennemi public et infidèle aux empereurs, le traita de parjure et de menteur et réclama qu’il fût condamné aux pires châtiments. On railla les ambassadeurs et finalement on les jeta en prison. L’impératrice resta muette. L’historien tente d’esquisser une explication : soit l’impératrice était déjà ralliée aux accusateurs, soit elle n’avait pas les moyens de s’y opposer91.
29Tout le processus décrit lors de cette seconde ambassade de Cantacuzène témoigne néanmoins de l’autorité absolue de l’impératrice : elle recevait et congédiait les ambassadeurs à son gré. Elle pouvait tout autant émettre des lettres impériales ayant valeur d’ordonnance. C’est ainsi que Cantacuzène fut déclaré « ennemi public » sans même être jugé avec l’accord tacite de l’impératrice. Des lettres impériales furent envoyées dans toutes les villes de l’empire, grandes et petites, ordonnant de ne pas recevoir le grand domestique, mais par tous les moyens de lui faire la guerre et de l’anéantir. Quelques jours plus tard arriva à Didymoteichon un des proches de l’impératrice, un certain Tsyrakis, avec ordre que le grand domestique fût déchu des affaires et restât chez lui sans sortir de Didymoteichon jusqu’à ce que l’on ait statué sur son sort92. Grégoras mentionne des « lettres impériales scellées93. »
30C’est à la suite de la proclamation du grand domestique comme empereur à Didymoteichon le 26 octobre 1341 que l’on se dépêcha à Constantinople de couronner Jean V94. Le fait que la plénitude du pouvoir impérial fût incarnée par une femme était une faiblesse et les prétentions de Jean Kalékas à assumer la régence n’en faisaient pas pour autant un détenteur légitime de la basileia95. Le couronnement fut une décision prise par Anne et le sénat96 : Jean fut couronné le 19 novembre 1341. On constate désormais que tous les chrysobulles, traités et ordres écrits impériaux sont signés du nom du jeune empereur qui jouissait de la qualité d’autocrator97. Cela signifie-t-il qu’Anne acquit après cette date un statut différent de celui qu’elle avait précédemment ? Elle était maintenant co-impératrice, ce qui veut dire qu’elle partageait la basileia avec Jean V, son fils, et, comme il était mineur, elle exerçait la réalité du pouvoir. L’éloge que prononça à cette occasion le patriarche Jean Kalékas à l’adresse de l’impératrice qu’il qualifie de la meilleure et la plus divine despoina, illustre parfaitement le statut d’Anne : elle a orné la basileia de sa vertu. Elle s’est attachée à la justice et a paré le trône impérial de la philanthropie, et c’est ainsi qu’elle conduit l’empire avec bonté. La pourpre ne l’a pas exaltée, l’asservissement des peuples ne l’a pas troublée et la violence ne l’a pas aveuglée98. Pour les contemporains qui connaissaient Anne de Savoie, ce panégyrique ne devait pas manquer d’être savoureux ! Mais le patriarche ne fait rien d’autre que de décrire le souverain idéal, respectueux des lois établies, évergète et dont la vertu cardinale est la tempérance. Anne est également louée pour sa piété envers Dieu, qui plus que les remparts, l’argent, les navires ou les chevaux lui permet de sauver l’empire. Et c’est Dieu seul qu’elle a établi comme gouvernail de l’empire. À lui seul elle a confié les stratèges, les sièges des villes, les trières et les armées. Il est le gardien et le sauveur de l’empire. Elle ne mange pas, elle ne dort pas, et elle s’adonne continûment aux prières pour le peuple des Romains, auquel elle a su donner un basileus (s.e. Jean V), qui remplacera son père, certainement l’argument principal qui justifie le pouvoir de la régente face à la menace que représente désormais Cantacuzène pour la dynastie. Le patriarche maudit l’usurpateur et sa faction et il espère voir « leur sang rougir la terre99. »
Le nouveau statut de la régente
31Que Cantacuzène pût désormais porter le titre de basileus entraînait néanmoins de graves conséquences, même si le statut d’empereur proclamé ne lui donnait pas la préséance sur les empereurs couronnés, comme en témoigne le formulaire du cérémonial adopté par Jean VI lors de son couronnement : « d’abord fut proclamée Anna la basilis et après elle Jean le basileus et en troisième Jean Cantacuzène le basileus avec Irène la basilis100 ». Grégoras rappelle qu’en 1342, au cœur de la guerre civile, Cantacuzène continuait lors de la liturgie de faire d’abord mention d’Anne, puis de son fils et enfin de lui-même et de son épouse alors même qu’il se trouvait en terre étrangère101. C’est ainsi que le chrysobulle émis par Jean VI Cantacuzène pendant cette période (printemps 1342) en faveur de Jean Ange képhalè de Vlachie, qui, selon la coutume établie, exigeait le serment de fidélité au nom des deux empereurs couronnés (Cantacuzène et Jean V Paléologue), lui ordonnait de commémorer l’impératrice et le basileus son fils102. Il n’en reste pas moins vrai que le pouvoir impérial était désormais divisé et, si Cantacuzène n’appartenait pas à la lignée Paléologue qui transmettait la basileia à la naissance des héritiers, il utilisait des liens de parenté fictive pour s’y rattacher, désignant Andronic, le défunt empereur, son frère et Anne « l’impératrice des Romains, la sœur de ma majesté impériale103 ».
32Après le couronnement de Jean V, les ambitions de son entourage tendirent à réduire le pouvoir d’Anne en la flanquant d’un Conseil et en lui faisant prêter serment de ne prendre aucune décision sans en référer au patriarche et audit Conseil que dominait Apokaukos104. Les droits régaliens de l’impératrice s’émoussèrent et on constate que les promotions étaient aussi bien octroyées par le patriarche et le Conseil105. Anne, sans doute contrariée par la tournure des évènements, fut alors tentée de pactiser avec Cantacuzène qui ne cessait de lui envoyer des ambassades en tant que basilis, ce qui dut la flatter. C’est à cette époque qu’elle s’entretint avec ses conseillers du mariage projeté entre Jean V et la fille de Cantacuzène106. Le jeu de ce dernier était clair : s’il détachait l’impératrice de son entourage, il pouvait la convaincre de faire la paix. Cela signifie qu’elle en avait encore le pouvoir et c’est la raison pour laquelle le patriarche et Apokaukos tentaient de limiter ses initiatives par toute une série de contraintes. Ainsi, quand, à la fin de l’année 1341, des moines de l’Athos furent envoyés par Cantacuzène en ambassade à la basilis, ils trouvèrent à ses côtés le patriarche et ses partisans. Ils exposèrent leurs propositions de paix. L’impératrice aurait, selon Cantacuzène, volontiers établi des traités de paix, mais elle ne le pouvait pas, car elle était liée par les serments auxquels l’avait contraint le Patriarche et elle devait suivre l’avis du Conseil107. Il est évidemment difficile de clarifier complètement la situation à Constantinople, d’abord parce que notre informateur principal, Cantacuzène, veut dédouaner l’impératrice de toute responsabilité dans la politique menée contre les cantacuzénistes et, ensuite, parce qu’Anne de Savoie, elle-même, est une personnalité complexe, jalouse de ses prérogratives et assez peu fiable pour l’un et l’autre parti. En même temps, si l’on considère les choses autrement, c’est une femme investie de la basileia qui doit diriger la politique de l’empire, situation très difficile à Byzance. Les historiens suivant les Mémoires de Cantacuzène ont tendance à toujours mettre au premier plan le grand-duc Apokaukos et le patriarche pendant ces années de guerre civile. Il est vrai que le patriarche s’était installé au palais pour « surveiller au plus près » la basilis. Il aurait persuadé le synode de jeter l’anathème sur l’impératrice si elle transgressait les serments qu’elle avait prêtés108.
33Pourtant, au fil du temps, et dans la mesure où Apokaukos partait souvent en expédition, c’est à Anne que revint l’administration de l’empire et au cours de l’année 1342, elle durcit sa politique anticantacuzéniste. Au mois de janvier elle laissa mourir Théodora, la mère de Cantacuzène, dans un cachot à la suite de privations et de mauvais trairements, même si un remords tardif lui fit dépêcher un médecin auquel « les autres » auraient interdit de prodiguer les soins à la malade. La conduite de l’impératrice ne trompa pas en tout cas la sœur d’Andronic III, la nonne Anastasia, qui lui en fit reproche109. En août 1342, quand Anne apprit que Cantacuzène, jouissant des bonnes dispositions du kralj Dušan, s’apprêtait à rejoindre Didymoteichon avec l’armée, elle envoya Georges Loukas et Makarios, métropolite de Thessalonique, en ambassade au kralj pour l’assurer qu’on lui remettrait toutes les villes qu’il voudrait, s’il livrait Cantacuzène. Le kralj aurait refusé au nom de l’amitié qui le liait à Cantacuzène, même après l’envoi d’une seconde ambassade lui promettant la livraison de toutes les villes de l’Occident, excepté Thessalonique110. Il n’y a pas à douter dans ces conditions de l’intervention directe de l’impératrice dans la visite de Makarios auprès de Cantacuzène pour lui conseiller d’envoyer une ambassade à Constantinople avec mission de supplier la basilis, le patriarche et le sénat de lui accorder leur pardon et veiller à ce qu’il ne meure pas en exil (à Didymoteichon)111. De même il est assuré que c’est sur l’ordre de l’impératrice Anne que les troupes impériales assiègeaient Didymoteichon, lorsque Irène, l’épouse de Cantacuzène, avait la garde de la ville avec son frère Michel Asen et qu’elle dut en appeler aux Bulgares pour les délivrer112.
Les soutiens extérieurs d’Anne de Savoie dans la guerre contre Cantacuzène
34Il est certain qu’Anne de Savoie a bénéficié de ses liens avec les cours d’Occident et la papauté, notamment en cette année 1343 où Constantinople cherchait des alliances pour contrecarrer Jean Cantacuzène et ses alliés turcs qui menaçaient la capitale. Par ailleurs, l’empire était aux abois, car il manquait d’argent. N’oublions pas que Cantacuzène avait une fortune personnelle très importante, fondée sur ses propriétés en Thrace et Macédoine comme d’ailleurs l’ensemble de ses soutiens. En revanche, à Constantinople, de plus en plus coupée de ses bases arrières, la régence s’engouffrait dans la pénurie. Sous la directive d’Anne de Savoie, la diplomatie byzantine se tourna résolument vers l’Occident.
35Au lendemain de la mort d’Andronic III, Venise s’était empressée d’envoyer l’ambassadeur Pietro da Canale à Constantinople pour présenter publiquement ses condoléances et tenter officieusement de renouveler le traité. Anne reprit les négociations avec la République le 25 mars 1342 et un traité fut signé pour sept ans113. Au début de l’année 1343 une ambassade byzantine conduite par le chevalier savoyard Jean d’Arlay était envoyée à Venise avec une double mission : solliciter la République pour une intervention auprès du roi de Serbie, que Cantacuzène cherchait toujours à entraîner dans son parti, et pour un secours contre les Turcs114. Le Sénat de Venise se contenta de répondre qu’une ligue navale se préparait sous les auspices du pape, à laquelle la République avait adhéré, et que les négociations engagées à cet effet avec le roi de Chypre, les Hospitaliers et le roi de Naples, n’allaient pas tarder à aboutir. La pénurie du trésor impérial obligea la cour byzantine à s’adresser à nouveau aux Vénitiens pour un emprunt de guerre. Au printemps 1343, l’impératrice sollicita un prêt de 30 000 ducats par l’intermédiaire de Pietro da Canale. Le 5 avril, le Sénat autorisa le prêt avec un remboursement de 10 000 ducats par an au taux de 5 %. Les gages étaient les revenus des douanes. Le doge doutait fort que l’impératrice parviendrait à rembourser de telles sommes. Finalement, le 21 août 1343 le baile vénitien de Constantinople et les représentants de la commune avancèrent au jeune basileus une somme de 30 000 ducats. Il s’ensuivit la mise en gage des joyaux de la couronne avec l’autorisation pour Venise de les aliéner en cas de retard de paiement115. L’affaire des bijoux de la couronne d’Anne de Savoie est presque aussi célèbre que celle des ferrets d’Anne d’Autriche116. Anne a donc été amenée à vendre les bijoux de famille pour financer la guerre civile.
36En ce même été 1343 une lettre de l’impératrice était envoyée avec celle de Jean V au pape Clément VI à Avignon. Et c’est vers la fin de l’automne 1343, au moment où le pape venait de donner aux chefs de la flotte latine en partance pour l’Orient ses dernières instructions, qu’il reçut l’ambassade byzantine conduite par Philippe de Saint-Germain, l’un de ces gentilhommes savoyards qui avaient accompagné à Byzance la sœur du comte de Savoie, lors de son mariage avec Andronic III. Le choix de l’ambassadeur témoigne du rôle important joué alors par la colonie de Savoie à la cour byzantine. Si l’ambassadeur apportait au pape plusieurs lettres, il devait aussi lui livrer de « vive voix » certaines informations importantes, soit au nom d’Anne, soit au nom de son principal ministre, le grand-duc Alexis Apokaukos. En rapprochant les réponses de Clément VI, expédiées à Byzance, le 21 et le 27 octobre 1343, du texte de Cantacuzène relatant l’événement, on peut déterminer, d’une manière assez précise, l’objet de l’ambassade et le contenu des lettres impériales remises au Saint-Siège117. Le jeune basileus, Jean Paléologue, manifestait une grande dévotion pour le pape et demandait l’alliance des Latins par l’envoi d’une flotte et d’une armée. À cette missive officielle, signée du basileus, était donc jointe une lettre de l’impératrice. Cantacuzène, qui prétend nous en donner le résumé, la déclare dictée par son rival, le grand-duc Apokaukos. Anne rappelait au Saint-Siège qu’elle avait été élevée dans les lois et les mœurs des Latins ; elle reconnaissait, au fond de son cœur, les dogmes de l’Église romaine et l’autorité du pape ; ce n’était que par contrainte qu’elle avait dû professer la foi du basileus. Si le pape voulait lui porter secours contre ses ennemis, sous-entendu les cantacuzénistes, elle pourrait, une fois victorieuse, convertir son peuple à la foi romaine. Au dire de Cantacuzène, c’est Apokaukos, qui aurait dicté cette lettre à l’impératrice pour la compromettre. Armé de la réponse du pape, il pourrait sans peine exciter contre Anne et ses enfants la fureur du peuple de Byzance, si elle menaçait de se débarrasser de lui et il aurait ainsi toute l’archè de Byzance et des îles. L’alliance demandée se trouva, en fait, ajournée à une époque indéterminée, puisqu’on la subordonnait à une condition impossible à réaliser, surtout en pleine guerre civile : l’union des Églises que, du point de vue byzantin, seul un concile œcuménique pouvait réaliser. Néanmoins, le rôle de la régente fut, en réalité, moins passif que ne le laisse entendre Cantacuzène : la preuve en est qu’après la mort d’Apokaukos, Anne continua de négocier activement avec les Latins pour l’union et le pape Clément VI étonna les envoyés de Cantacuzène en 1347 quand il leur confia avoir été scrupuleusement tenu au courant de toute la situation de l’empire grâce à Isabelle de la Rochette, la confidente et amie d’enfance d’Anne de Savoie118.
37Anne, à cette époque, menait une intense activité diplomatique. Tout d’abord après l’échec de Cantacuzène à reprendre Thessalonique dont le régime zélote restait fidèle à Constantinople, Cantacuzène fit une nouvelle fois des propositions de paix adressées à l’impératrice où il se fait également le porte-parole de son fidèle ami Umur Pasha Aydinoglu119. La réponse d’Anne fut de tenter de concurrencer la diplomatie orientale de Cantacuzène en ralliant l’émir d’Aydin comme en témoigne la chronique turque du xve siècle appelée le Destan d’Umur Pasha où est mentionnée comme venant de Constantinople une ambassade (printemps 1344) envoyée par l’impératrice Anne auprès d’Umur d’Aydin qui se trouvait alors en Thrace. L’impératrice lui reprochait de ravager l’empire et le priait de dire « à Domestikos » (s.e. Cantacuzène) de ne plus dévaster le pays120. Donc, l’émir d’Aydin devait servir d’intermédiaire entre l’impératrice et celui qu’elle appelle toujours le Domestique sans lui reconnaître le titre impérial.
38La prise de Smyrne en octobre 1344 par les Latins fut certainement un atout dans le jeu d’Anne, car elle entraîna un affaiblissement des soutiens de Cantacuzène121. Le prestige latin rehaussa sans aucun doute celui d’Anne et du parti constantinopolitain pour lesquels l’année 1344 n’avait pas été couronnée de succès, notamment avec les vaines expéditions d’Apokaukos pour réduire Didymoteichon (mai-juillet 1344). Pendant l’absence d’Apokaukos, une fois de plus Cantacuzène avait trouvé des appuis à Constantinople jusqu’au Premier ministre, le grand logothète Gabalas, pour tenter d’amener l’impératrice à traiter122. Au retour du grand-duc, la volte-face fut complète. Apokaukos aurait persuadé l’impératrice qu’un destin des plus funestes les attendait, elle et ses enfants, si la paix était conclue avec Cantacuzène. Aussi prit-elle le parti de la guerre, n’ayant aucun autre avis qui pût la persuader du contraire, car les cantacuzénistes étaient en prison ou enfermés dans leurs maisons123.
L’implication croissante d’Anne de Savoie dans la guerre civile
39On vit l’impératrice Anne rechercher de nouvelles forces contre Cantacuzène. En 1344 son choix se porta sur Momčil, un bandit bulgare qui avait profité des troubles pour se tailler une principauté aux confins de l’empire, de la Serbie et de la Bulgarie. Après avoir été au service de Cantacuzène, il mit son armée à sa disposition et, ayant remporté la victoire sur les cantacuzénistes, envoya une ambassade réclamer à l’impératrice le prix de son concours. C’est ainsi qu’elle l’éleva à la dignité de « despote124 », la dignité que l’on réserve habituellement aux membres de la famille impériale, mais aussi à des étrangers que l’on intègre à la hiérarchie impériale. Dans ce cas précis, la collation d’une dignité si prestigieuse était inattendue. Peu de temps après, Momčil revint vers Cantacuzène qui, ayant appris sa promotion de despote par Anne, le promut sébastocrator. Ces deux nominations sont le fait d’empereurs, mais seule l’impératrice couronnée pouvait conférer à un étranger la dignité la plus élevée, celle de despote. Nous constatons donc une rivalité certaine entre les deux empereurs dispensateurs de dignités. L’impératrice ne veut rien céder de la basileia à Cantacuzène : elle confère les dignités les plus hautes ; elle est le chef suprême des armées auquel obéissent tous les commandants des villes de province restés fidèles aux Paléologues, en témoigne le récit que fait Cantacuzène de la reddition des villes de Thrace lors de ses conquêtes :
Réunissant les archontes de toutes les villes [de Thrace] qui avaient reçu leurs commandements de l’impératrice, il montra envers eux une très grande douceur et affabilité et il ordonna de ne rien leur confisquer de leurs biens. Il distribua un pécule à certains et des chevaux à tous ceux qui n’en avaient pas et il les envoya à Byzance pour demander à nouveau la paix non seulement à l’impératrice, mais au patriarche et aux autres archontes, s’attachant par là à faire tout le contraire des archontes qui avaient maltraité les partisans de Cantacuzène. Donc à tous ceux qui des rangs de la basilis avaient été faits prisonniers, il offrait des cadeaux. Mais il montrait une grande sévérité envers ceux qui offensaient le patriarche, le grand-duc ou même un autre archonte, leur ordonnant d’acclamer la basilis et le basileus son fils, comme s’ils ne combattaient pas contre eux, mais qu’ils leur étaient soumis125.
40Anne a cru pendant toutes ces années qu’Apokaukos arriverait – comme il le prétendait – à traiter avec Cantacuzène qui accepterait de renoncer au titre impérial pourvu qu’il eût des avantages : la sécurité pour lui et sa famille, une aisance financière etc. C’est ainsi que fut envoyée en février 1345 une ambassade double, impériale et patriarcale, auprès de Cantacuzène pour lui demander de renoncer au pouvoir impérial (basileia) et d’accepter la condition d’un simple particulier. L’une et l’autre délégation portaient des lettres distinctes. Cette double démarche n’était pas exceptionnelle à cette époque, l’ambassade ecclésiastique devant ici se porter garante de la sécurité de Cantacuzène au cas où il accepterait les propositions de l’impératrice. Pour mieux montrer leur détermination, les autorités constantinopolitaines avaient interdit aux ambassadeurs d’appeler Cantacuzène « basileus » et de quitter les lieux au cas où ce dernier les y contraindrait ! Évidemment cette ambassade fut un échec, mais elle permit une fois de plus à Cantacuzène de se justifier dans une longue apologie et de rappeler les étapes qui avaient ponctué sa carrière et engagé ses choix : le temps où il avait eu la pleine confiance d’Andronic III, la proposition qu’il avait faite après la mort de ce dernier de quitter le gouvernement, son revirement quand il avait compris qu’il pouvait être le guide de la veuve et des orphelins, sa proposition de passer en justice si quelque rumeur l’accusait de malfaisance, les serments qu’il avait échangés avec l’impératrice en présence du patriarche, l’assurance qu’il avait reçu de ce dernier de le défendre contre tous les sycophantes, le rôle néfaste d’Apokaukos qui incitait les Byzantins à prendre les armes et toutes les tentatives vaines qu’il avait faites pour conclure la paix en envoyant à Constantinople de multiples ambassades qui avaient été maltraitées126. Puis, au bout de six jours, Cantacuzène congédia les ambassadeurs avec des lettres adressées au patriarche, mais envoya à l’impératrice son ambassadeur, Jean Chrysobergès, pour lui communiquer un message oral en privé, ce qui ne manqua pas de provoquer l’ire du patriarche et de ses acolytes127. L’ambassadeur devait demander à l’impératrice si elle avait toute latitude de faire la politique qu’elle désirait ou si les « archontes », l’élite de l’État, l’en empêchaient.
41L’assassinat d’Apokaukos dans une prison de Constantinople le 11 juin 1345 par les partisans de Cantacuzène entraîna une terrible répression entièrement dictée par l’impératrice128. Devant ces faits, on ne peut pas – comme le fait systématiquement Cantacuzène – une fois de plus masquer la réalité : l’impératrice a été le point fort de la guerre contre Cantacuzène. Libérée désormais de toute tutelle, elle mène une politique forte et autoritaire, sans doute parce qu’elle croit désormais sa vie et celle de ses enfants en danger après l’assassinat des cantacuzénistes. Son objectif reste celui d’encercler Cantacuzène par un réseau d’alliances qui finiraient par l’étrangler. Elle frappe souvent d’ailleurs aux mêmes portes que Cantacuzène. Et elle est responsable au même titre que son rival de la pénétration des Turcs dans la partie européenne de l’empire. Elle projeta d’abord de détacher Orchan, l’émir de Bithynie, de Cantacuzène129. Ce fut peine perdue grâce surtout à la réactivité de ce dernier qui pour s’attacher Orchan lui donna sa fille Théodora à marier130. Même si Cantacuzène n’était pas le maître de Constantinople, il était basileus et Orchan fut bien évidemment flatté de désormais compter comme gendre de l’empereur. Après ce coup dur porté aux Constantinopolitains, Anne se tourna vers les émirats d’Asie Mineure et envoya des ambassadeurs avec des cadeaux aux émirs de Menteche, Aydin et Saruchan (dits de Carie, Lydie et d’Ionie) pour les amener à combattre Cantacuzène131. Un peu plus tard elle sollicita l’aide d’un certain Malik, archonte bulgare de Karbuna132, frère du fameux Dobrotić de Midia présumé avoir joui des faveurs de l’impératrice, et, enfin, de l’émir de Saruchan dit de Lydie133. Les uns et les autres lui fournirent de l’aide, mais l’étau se resserra. De plus, les troupes turques s’avérèrent peu fiables. Ainsi, le grand statopédarque Georges Tagaris envoyé en ambassade auprès de Saruchan dont il était un familier, obtint certes des troupes pour combattre Cantacuzène, mais elles ne tardèrent pas à être noyautées par d’autres troupes turques favorables à Cantacuzène.
42Il est intéressant d’examiner le point de vue de Nicéphore Grégoras sur les événements de cette période et l’atmosphère qui régnait à Constantinople. En fait, Cantacuzène continuait d’entretenir des relations avec la capitale en envoyant des lettres impériales à l’encre rouge au patriarche lui proposant de faire la paix. Et Grégoras lui reproche justement de ne jamais mettre en cause la jalousie et l’envie sans mesure d’Anne ni sa haine implacable134. Il produit ainsi une des lettres de Cantacuzène au patriarche, lui proposant la paix tout en l’accusant d’avoir précipité l’empire dans de si grands malheurs et se justifiant lui-même d’avoir été acculé par ses soldats « à l’honneur impérial135 ». Toujours, selon Grégoras, le patriarche tentait au contraire de persuader l’impératrice de faire la paix136, l’assurant qu’il valait mieux la proposer alors qu’il était encore temps plutôt que de la subir du fait des armes. Et l’impératrice Anne, furieuse de l’entendre lui prodiguer ces conseils, qualifiait son conseiller (symboulos) de traître (épiboulos). C’est alors qu’elle commença à manigancer la chute du patriarche et à donner son soutien à Grégoire Palamas, ce qui déplut fort à Grégoras137. En fait, toujours d’après Grégoras, la jalousie d’Anne s’était exacerbée et il n’était pas question de lui parler de « pactiser ». Il paraît qu’elle prenait un plaisir étrange à se répandre en injures et blasphèmes contre Cantacuzène et son épouse. Grégoras souligne bien qu’elle était la racine du mal qui avait plongé les Byzantins dans la guerre civile. Il rejoint d’une certaine manière ce que nous avons dit sur le refus d’Anne d’accepter le partage de la basileia. Les étapes successives qui avaient marqué l’ascension de Cantacuzène, d’abord le temps où le grand domestique accaparait l’exercice du pouvoir, puis le temps où il était proclamé empereur le 26 octobre 1341, et enfin celui où il fut couronné empereur le 21 mai 1346 à Didymoteichon, avaient chaque fois éloigné un peu plus Anne de son but de récupérer l’intégralité de la basileia pour elle et son fils.
43Anne profita dès le printemps 1346 des déboires du patriarche avec les Palamites pour acculer ce dernier à la démission et gagner l’opinion. Ébranlée par le meurtre d’Apokaukos et la chute de la coupole de Sainte-Sophie en mai 1346, elle se cramponnait au pouvoir impérial. Elle en avait la légitimité comme on le voit dans ses rapports avec l’Église. En septembre 1346, certains membres du synode, dont Mathieu d’Édesse, s’adressent à la Suprême et Sainte Souveraine et impératrice en lui remettant un rapport dénonçant les actions du patriarche Jean Kalékas et lui demandant de réunir un synode qui condamnerait le patriarche138. C’est bien l’impératrice qui devait réunir un synode, raison pour laquelle elle fut le pivot de l’affaire. Pour Anne, il fallait agir vite, car le parti de l’opposition au patriarche mettait en avant sa déposition le 21 mai 1346 à Andrinople, le jour même du couronnement de Jean Cantacuzène par le patriarche Lazare139. L’impératrice procéda à la garde à vue du patriarche dans sa résidence, puis elle louvoya, prétextant une indisposition pendant trois jours, et, enfin, le 2 février 1347 elle finit par réunir le synode qui excommunia et déposa le patriarche, au moment même où Cantacuzène se trouvait dans les murs de la capitale140.
44Conclusion
45La nuit du 2 au 3 février 1347 Cantacuzène pénétra dans Constantinople141. Anne commença par refuser toute délégation proposant la paix et la sécurité pour elle et ses enfants et se retrancha dans une partie fortifiée du palais des Blachernes142. Puis, à force de persuasion des envoyés de Cantacuzène, son beau-frère Andronic Asen et Grégoire Palamas, et sous la pression de son fils empereur âgé maintenant de quinze ans et après les serments d’amnistie pour Anne, son fils et ses proches, Anne finit par se rendre143. Cantacuzène respecta ses engagements envers la famille Paléologue. Non seulement le jeune empereur Jean V ne fut pas démis, mais les nobles partisans de Cantacuzène durent eux aussi prêter serment de fidélité aux deux empereurs Jean Cantacuzène et Jean Paléologue144. L’ambassadeur de Vienne, Bartholomée de Rome, qui avait été envoyé à Constantinople auprès de l’impératrice Anne, arriva juste au changement de règne et fut reçu par l’empereur Jean Cantacuzène. Il envoya aussitôt des lettres au pape et au dauphin pour annoncer la nouvelle145.
46Est-ce pour autant qu’Anne ne conservait pas une parcelle du pouvoir impérial, celle qui lui revenait en tant qu’impératrice qui avait transmis à son fils la légitimité de la lignée palélogue ? C’est ce que l’on peut se demander en considérant les événements ultérieurs. En effet, lors des fiançailles d’Hélène, la fille de Jean Cantacuzène, avec Jean V et la proclamation de celle-ci comme impératrice, on put voir sortir de l’église de la Théotokos de la Source, Anne en premier avec les empereurs et tous les plus illustres dignitaires pour se diriger vers le palais où se déroulèrent les noces146. Quelque quatre ans plus tard, en août 1351, Anne de Savoie était envoyée comme ambassadrice à Thessalonique où l’empereur Jean V complotait avec le serbe Dušan et était prêt à lui remettre la ville : Anne remit de l’ordre et, après un court règne commun avec son fils, elle fut seule impératrice à Thessalonique avec tous les pouvoirs régaliens jusqu’en 1365147.
Fig. 1. Miniature du xive siècle d’Anne de Savoie : Stuttgart, Wurttembergische Landesbibliothek.

Fig. 2. Frontispice pour l’édition Poussines de Georges Pachymère en 1669. Reproduction (original disparu).

Notes de bas de page
1 Voir l’étude de Sandra Origone, Giovanna di Savoia alias Anna Paleologina Latina a Bizanzio (c. 1306-1365), Milan, Jaca Book, 1999 ; cf. Prosopographisches Lexikon der Palaiologenzeit, Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, Vienne 2001 [ci-dessous PLP], 21347. Voir aussi Charles Diehl, Figures byzantines, 2e série, Paris, 1908, p. 245-270 et Donald M. Nicol, Anna of Savoy regent and empress, 1341-1356, dans id., The Byzantine Lady : Ten Portraits, 1250-1500, Cambridge 1996, p. 82-95. Nous avons consacré une nouvelle étude à Jeanne de Savoie/Anna Palaiologina, car il nous semblait important de revisiter l’histoire de cette impératrice de l’intérieur, c’est-à-dire avec le regard des Byzantins de l’époque, y compris de cette impératrice qui, bien qu’étrangère, avait bien compris les relations entre les pouvoirs et le jeu des institutions dans l’empire.
2 Pour cette première partie que l’on peut qualifier de volet occidental de l’histoire de Jeanne, nous avons à notre disposition les Chroniques de Savoie : cf. Jean Servion, Chroniques de Savoie, dans Historiae Patriae Monumenta III, Scriptorum I, Turin, 1840, p. 5-382 ; Chronica latina Sabaudiae, ibid, col. 593-670. L’étude pionnière sur laquelle nous nous fondons demeure celle de D. Muratore, Una principessa sabauda sul trono di Bisanzio : Giovanna di Savoia imperatrice Anna Paleologina, Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles lettres et arts de Savoie, ive série, t. XI, Chambéry 1906, p. 221-475. Les deux sources byzantines fondamentales restent les Mémoires de l’ex-empereur Jean VI Cantacuzène rédigés bien après les évènements mais dont il fut partie prenante : Ioannis Cantacuzeni Eximperatoris Historiarum Libri 4 : graece et latine, Ludovic Schopen (éd.), 3 vol., Bonn Weber, coll. « CSHB », 1828-1832. Pour Jean Cantacuzène, PLP, no 10973 et l’Histoire de Nicéphore Grégoras : Nicephori Gregorae Byzantina Historia : graece et latine Ludovic Schopen (éd.), 2 vol., Bonn Weber, coll. « CSHB », 1829-1830.
3 Ioannis Cantacuzeni, op. cit., I, p. 195 ; Franz Dölger, Regesten der Kaiserurkunden des oströmischen Reiches, t. IV, Regesten von 1282-1341, Munich-Berlin, 1960, no 2533. PLP, no 29122.
4 PLP, no 29122 ; 6588.
5 Théodore avait succédé à Jean de Montferrat son oncle maternel.
6 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 194-195.
7 Bernard Demotz, « La politique internationale du Comté de Savoie durant deux siècles d’expansion (début xiiie-début xve siècles », Cahiers d’Histoire, no 19, 1974, p. 29-64.
8 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 196.
9 D. Muratore, Una principessa sabauda…, op. cit., p. 258.
10 Sandra Origone, Giovanna…, op. cit., p. 22 ; D. Muratore, Una principessa sabauda…, op. cit., p. 229.
11 Sandra Origone, Giovanna…, op. cit., p. 24-25.
12 D. Muratore, Una principessa sabauda…, op. cit., p. 258.
13 Ibid., p. 271.
14 Ibid., p. 261-270.
15 Ibid., p. 271.
16 Pseudo-Codinos, Traité des offices, Verpeaux J. éd., Paris, coll. « Le Monde Byzantin », éd. du CNRS, 1996, p. 286-287.
17 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, 204. Andronic III, petit-fils d’Andronic II, est ici considéré comme le fils du vieil empereur, puisque Michel IX est mort.
18 Sa notoriété outre-monts a donné à cette impératrice le nom d’« Anne de Savoie » pour la postérité, empruntant le prénom grec sous sa forme francisée tout en rappelant ses origines. De fait, cette princesse s’appelait « Jeanne » jusqu’à son mariage avec Andronic III où elle prit le prénom d’Anna et le nom du lignage auquel elle s’était alliée : Anna Palaiologina est la dénomination byzantine de l’impératrice.
19 Mathieu Vlastarès, Syntagma alphabeticum : Patrologia Graeca (Migne), 144, col. 1175-1180 ; lettre du pape Jean XXII datée du 31 décembre 1325, cf. Lettres secrètes et curiales du pape Jean XXII (1316-1334) relatives à la France, t. III, 6, Paris 1961, n. 2676. Voir D. Muratore, Una principessa sabauda…, op. cit., p. 253-254 et Sandra Origone, Giovanna…, op. cit., p. 48.
20 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 205. Il semble en effet qu’auparavant les Byzantins pratiquaient la joute sous une forme distincte : les participants brisaient des perches sur une quintaine fixe, c’est-à-dire un poteau fiché en terre.
21 Ibid.
22 Ibid., p. 207 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., p. 390-392. Pour l’ambassade de Nicéphore Grégoras, cf. Peter Schreiner, « Die Gesandtschaftsreise des Nikephoros Gregoras nach Serbien (1326- 1327) », ZRVI, no 38, 1999-2000, p. 331-341. Voir aussi Angeliki E. Laiou, Constantinople and the Latins. The Foreign Policy of Andronicus II 1282-1328, Cambridge Massachussetts, Harvard University Press, 1972, p. 295 ; Ursula V. Bosch, Kaiser Andronikos III Palaiologos. Versuch einer Darstellung der byzantinischen Geschichte in den Jahren 1321-1341, Amsterdam, 1965, p. 42.
23 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., I, p. 258-259.
24 Ibid, p. 302-306 ; Nicephori Gregorae..., op. cit., I, p. 419-423. Voir Ursula V. Bosch, Kaiser Andronikos III, op. cit., p. 48-52 ; Angeliki E. Laiou, Constantinople and the Latins…, op. cit., p. 297.
25 Le vieil empereur écarté du pouvoir continua à résider au palais entouré de ses partisans et ce n’est qu’en janvier 1330 que plus ou moins contraint il prit l’habit de moine, mettant ainsi un point final à toute velléité de pouvoir.
26 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 324 ; Nicephori Gregorae, op. cit., t. I, p. 430.
27 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 372-373. Voir à ce sujet Paul Lemerle, L’émirat d’Aydin. Byzance et l’Occident. Recherches sur « La Geste d’Umur Pacha », Paris, PUF, 1957, p. 56.
28 Il s’agit de Henri II, le frère de la première épouse d’Andronic III dont le voyage dans les parties occidentales de l’empire lui valut le surnom de « Graecia », cf. Franz Dölger, Regesten…, op. cit., t. IV, no 2756.
29 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 439.
30 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 440. En fait, Anne attendait une fille, Marie, qui serait mariée au tsar bulgare Michel, cf. Ioannis Cantacuzeni, op. cit., t. I, p. 394.
31 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 392 : l’empereur demanda à Cantacuzène de chausser ses chaussons et de se coiffer du pilon, qui étaient les « symbola » de la « basileia ».
32 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 393-394, t. II, p. 91. Nous avons ici un exemple rare dans la littérature byzantine de la description du geste précis qui accompagne le serment oral, voir, en effet, les dernières publications à ce sujet dans Marie-France Auzépy, Guillaume Saint-Guillain, Oralité et lien social au Moyen Âge (Occident, Byzance, Islam) : parole donnée, foi jurée, serment, ACHCByz, coll. « Monographies », 29, 2008. Il semble que ce serment par immixtio manuum remonte à Michel VIII Paléologue qui aurait emprunté ce rituel de recommandation aux usages féodaux de l’Occident, cf. Dimiter Angelov, Imperial Ideology and Political Thought in Byzantium, 1204-1330, Cambridge University Press, 2007, p. 138.
33 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 439-440.
34 Il s’agit de la susdite Théodora Cantacuzène, la mère du grand domestique, qui était appelée la « tante » d’Andronic III, comme son fils était appelé « le frère » de l’empereur ; PLP, no 10942.
35 Il s’agit de l’épouse et veuve de Michel IX, la princesse arménienne, fille de Héthum II de Cilicie, Rita-Maria, qui prit le nom monastique de Xénè (littéralement « étrangère »).
36 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 395.
37 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 439-440 ; Ursula V. Bosch, Kaiser Andronikos III…, op. cit., p. 179-180 et Sandra Origone, Giovanna…, p. 56.
38 Cette expression renvoie très certainement à l’usage, à la mort de l’empereur, des dignitaires de prêter serment de fidélité à l’empereur « qui restait » (voir Renaud Rochette, « Empereurs et serments sous les Paléologues » dans Marie-France Auzépy, Guillaume Saint-Guillain, op. cit., p. 158) : notre cas est particulier en ce sens qu’il s’agissait de prêter serment de fidélité à l’impératrice puisqu’il n’y avait pas encore d’héritier et au grand domestique Jean Cantacuzène.
39 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 396.
40 Néanmoins Grégoras affirme qu’il s’agissait d’un serment oral prêté par l’ensemble des Romains et que transmises par écrit les paroles prononcées par l’empereur ont eu ensuite la vigueur d’un testament, cf. Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 439-440.
41 Ibid., p. 482-483.
42 Sur l’importance des rapports du comté de Savoie avec la papauté à partir du milieu du xiiie siècle et sur le rôle d’Anne de Savoie, voir Bernard Demotz, La politique internationale…, op. cit., p. 47.
43 D. Muratore, Una principessa sabauda…, op.cit, p. 294-303. Edmond succéda à son frère Édouard en 1329.
44 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 501-520.
45 Lettre émise le 22 février 1334 par le pape Jean XXII contenant le passage tiré de l’Écriture sainte : « salvabitur vir infidelis per mulierem fidelem », cf. Acta Ioannis XXII (1317-1334), éd. A. L. Tautu, Rome, Typis Polyglottis Vaticanis, 1952, doc. 141a, p. 263-264. La reprise des relations de l’empereur avec le pape était en grande partie due à la menace désormais visible des Turcs et notamment d’Orhan juste au delà du Bosphore avec les prises successives de Bursa en 1326, Nicée en 1330 et Nicomédie en 1332. Voir sur l’ensemble de cette question, Sandra Origone, Giovanna… ., op. cit., p. 62-63.
46 Pseudo-Brocardus, Directorium ad passagium faciendum, dans RHC, Documents Arméniens, II, Documents latins et français relatifs à l’Arménie, éd. C. Kohler, Paris 1906, p. 423-424.
47 D. Muratore, Una principessa sabauda…, op. cit, p. 309. Pour l’ambassade auprès du pape, voir les réponses du pape adressées au basileus, à l’impératrice et à son frère Edmond, dans Benoît XII (1334-1342), Lettres closes et patentes intéressant les pays autres que la France, éd. J. M. Vidal, G. Mollat, Paris, 1950, no 1199, 1200, 1201 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., IV, no 2830. Cette initiative tourna court.
48 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 523-532 ; voir aussi Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 476-482 ; D. Muratore, Una principessa sabauda…, op. cit., p. 311-312.
49 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 504-509 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 546. L’identité de la jeune fille a été mise en question, de même son nom, s’appelait-elle Irène ou Marie ? Voir Ivan Božilov, Familijata na Asenevci (1186-1460), genealogija i prosopografija, Sofia, 1994, no 39.
50 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 559-560 ; t. II, p. 14 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 559-560 ; Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 72.
51 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 578-579.
52 Catherine Christophilopoulou, « La régence à Byzance », Symmeikta, t. 2, Athènes, Fondation Nationale de Recherches, Centre d’Études Byzantines, 1970, p. 1-144 [en particulier, p. 91-127].
53 Malgré l’ouvrage excellent de Sandra Origone, Giovanna.., op. cit. Pour Jean Cantacuzène, cf. PLP, no 10973 ; Donald. M. Nicol, The Reluctant Emperor. A biography of John Cantacuzene. Byzantine emperor and monk, c. 1295-1383, Cambrige, 1996.
54 Voir ci-dessus n. 2.
55 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 34-35.
56 Ibid., p. 32-33.
57 PLP, no 10288.
58 Ibid., no 1180.
59 D’où le questionnement des historiens sur le statut du jeune empereur, de Jean Cantacuzène et d’autres personnages importants qui constituaient l’entourage de la régente à la mort d’Andronic III, cf. Catherine Christophilopoulou, La régence…, op. cit., p. 91-92.
60 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. I, p. 496 ; II, p. 579-584 : le document est appelé « synthèkè » (convention, traité).
61 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 19-25 ; Catherine Christophilopoulou, La régence…, op. cit., p. 95.
62 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 20, citant l’Épître de Saint-Paul aux Corinthiens (Cor. 14. 30) « Que se taise le premier si le dernier a eu la révélation ». Valentin Parisot (Cantacuzène, Homme d’État et historien, Paris, 1845, p. 66) soupçonne ce Choumnos d’avoir agi pour le compte d’Apokaukos, dont la seconde femme était issue de cette grande famille aristocratique.
63 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 584 ; Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 83.
64 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 31-47, 67 ?.
65 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 593.
66 Ibid., p. 584, 586-587. Cette manifestation armée eut lieu le 20 juin. Pour la date voir Jan Louis Van Dieten dans sa traduction : Nikephoros Gregoras, Rhomäische Geschichte (Historia rhomaïke), coll. « Bibliothek der griechischen Literatur », Stuttgart, A. Hiersemann, , vol. III, Stuttgart, 1988, p. 230.
67 Voir à ce sujet Eva de Vries-Van der Velden, L’élite byzantine devant l’avance turque à l’époque de la guerre civile de 1341 à 1354, Amsterdam 1989, p. 63.
68 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 70-71 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 599-600 ; Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 89. Apokaukos n’était alors que parakoimômène, ayant été déchu de sa fonction de grand-duc à la fin du règne d’Andronic III, voir ci-dessous.
69 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 83-85 ; Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 90.
70 Pour un point de vue différent concernant les attributions de Cantacuzène pendant le règne d’Andronic III, voir Eva de Vries-Van der Velden, L’élite byzantine, op. cit., p. 84.
71 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 369-370.
72 Ibid., t. II, p. 203. Le terme idiôtès, simple particulier, s’oppose aux empereurs nés dans la pourpre.
73 Sous les Paléologues, en effet, la coutume était de proclamer l’héritier basileus à sa naissance ou dans sa petite enfance, le couronnement désormais avec onction n’intervenait que beaucoup plus tard, soit lors de son mariage, soit à la mort de son père, le basileus autocrator. Pour le rituel du couronnement au milieu du xive siècle, voir Pseudo-Codinos, Traité des offices…, op. cit., ch. VII, p. 253-273.
74 L’ambassade bulgare est adressée à l’impératrice : Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 19 ; l’impératrice préside le conseil en présence du grand domestique, du patriarche et de l’ensemble du sénat, ibid., p. 20-24. Voir ci-dessus les rivalités dans l’entourage impérial.
75 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 64.
76 Franz Dölger, Regesten der Kaiserurkunden des oströmischen Reiches t. V, Regesten von 1341-1453 unter verantwortlicher mitarbeit von Peter Wirth, Munich-Berlin, 1965, no 2864.
77 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. III, p. 68 ; trad. anglaise : Timothy S. Miller, The History of John Cantacuzenus (Book IV) : Text, Translation and Commentary, Washington, D.C., The Catholic University of America, 1975, p. 166 : « orkoi kai synthèkai pros Annan tèn basilida » et p. 202.
78 Catherine Christophilopoulou, Symmeikta…, op. cit., p. 115. Au milieu du xive siècle le sceau de plomb était utilisé pour la correspondance de l’empereur avec les despotes, les patriarches et autres archontes de haut rang, cf. Pseudo-Codinos, Traité des offices…, op. cit., p. 175-176 ; Tommaso Bertelè, Monete e sigilli di Anna di Savoia, imperatrice di Bisanzio, Rome, 1937, p. 65- 69 et pl. XI : sur ses sceaux Anne tient un sceptre. Franz Dölger, « Zum Kaisertum der Anna von Savoyen », Byzantinische Zeitschrift, no 38, 1938, p. 193-196.
79 Tommaso Bertelè, Monete e sigilli…, op. cit., p. 59-60 ; Vitalien Laurent, CR dans Échos d’Orient, no 37, 1938, p. 461-464 ; P. Protonotarios, « Le monnayage d’or et d’argent d’Andronic III avec Jean V et Anne de Savoie », Revue numismatique, no 19, 1977, p. 77-86. Pour une mise au point, voir Tommaso Bertelè, Numismatique Byzantine suivie de deux études inédites sur les monnaies des Paléologues. Édition française mise à jour et augmentée de planches par Cécile Morrissson, Wetteren 1978, p. 21 et n. 2. Il est vrai que la question non complètement résolue de savoir si ces monnaies datent du règne d’Andronic III ou de la régence concerne le plus gros lot des « basilika », cf. Tommaso Bertelè, Monete e sigilli…, op. cit., no 26-247.
80 Donald Nicol, Simon Bendall, « Anna of Savoy in Thessalonica : the numismatic evidence », Revue Numismatique, no 19, 1977, p. 87-102 (p. 95).
81 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. I, p. 535-541, t. II, p. 98-99.
82 Ibid., p. 99-100.
83 Ibid., p. 100.
84 Ibid., p. 101.
85 Ibid., p. (III, chap. 16) : ce refus que Cantacuzène justifie par le refus de ses partisans ne laisse pas de rendre perplexe sur les réelles intentions de Cantacuzène, voir Valentin Parisot, Cantacuzène…, op. cit., p. 170. La date du départ de Jean Cantacuzène est donnée par Jan Louis van Dieten, op. cit., p. 246-248.
86 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 123-124.
87 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 607.
88 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 138-139. Pour les dignités mentionnées, voir Pseudo-Kodinos..., op. cit., p. 137.
89 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., p. 141. C’était une grave entorse au code dipomatique de l’époque.
90 Ibid., p. 142.
91 Ibid., p. 143.
92 Ibid., t. II, p. 144-145.
93 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 609.
94 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 218.
95 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 616 : « Le patriarche qui s’imaginait être de droit le mieux placé pour assurer la régence impériale, couronne en toute hâte Jean, le fils de l’empereur, sans attendre, tant il était avide d’agir, qu’il ait un âge convenable, que ce fût un jour de fête ».
96 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 218.
97 À titre d’exemple voir sa titulature dans les chrysobulles de janvier 1342 : « Jean basileus fidèle en Christ Dieu et autocrator des Romains Palaiologos », cf. Actes de Zographou, Regel W., Kurtz E., Korablev B. (éd.), Saint-Petersbourg, 1907, no 563-565 ; Franz Dölger, Regesten…, no 2872a, 2873, 2874 ; de même en mai 1343, cf. Actes de Docheiariou, Oikonomidès Nicolas (éd.), Paris 1984, no 21 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2889.
98 P. Joannou, « Joannes XIV. Kalekas Patriarch von Konstantinopel, unrdierte Rede zur Krönung Joannes’V », Orientalia Christiana Periodica, no 27, 1961, p. 48-55.
99 Ibid., p. 45.
100 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 166 ; voir aussi Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 611 : « Il prescrit que lui et son épouse reçoivent l’acclamation impériale en dernier, après l’acclamation de la basilis Anne et de son fils, le basileus Jean ».
101 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 643.
102 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 321 : « est acclamée et commémorée dans tout le pays de Vlachie la despoina Anna Palaiologina ainsi que le basileus son fils selon la coutume en vigueur dans le palais de ma majesté gardé par Dieu et dans ce pays ».
103 « è despoina tôn Rômaiôn è adelphè tès basileias mou », cf. Jean Darrouzès, « Lettre inédite de Jean Cantacuzène, relative à la controverse palamite », Revue des Études Byzantines, no 17, 1959, p. 16.
104 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 208.
105 Ainsi, lors du couronnement « « En ce jour de fête presque tous les sénateurs reçurent des promotions au gré de l’impératrice, du patriarche et du Conseil », cf. Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 218.
106 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 203-204.
107 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 210-211. Sur la composition de l’ambassade, voir Donald M. Nicol, The reluctant…, op. cit., p. 61.
108 Ibid., p. 208.
109 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 221-223 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 617-619 ; Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 182.
110 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 305-306 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2879, 2880 ; Donald M. Nicol, The reluctant…, op. cit., p. 65.
111 Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 307.
112 Ibid., p. 337 (automne 1342).
113 Instructions du Sénat à Pietro da Canale : Freddy Thiriet, Regestes des délibérations du sénat de Venise concernant la Romanie, t. I, Paris, 1958, no 152 (juillet 1341). Pour le traité avec ménologe de Jean V à l’encre rouge : cf. Diplomatarium Veneto-Levantinum, sive Acta et Diplomata res Venetas, Graecas atque Levantis illustrantia a 1300-1454, 2 vol., éd. Thomas M. G., Predelli R., Monumenti storici publicati dalla Reale Deputazione Veneta di Storia Patria, serie prima documenti, Venise 1880, t. I (1300-1350), no 132, p. 257-259 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2876.
114 Freddy Thiriet, Regestes…, op. cit., no 155 ; Franz Dölger, Regestes…, op. cit., no 2888.
115 Symbolaion : Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2791 ; Donald M. Nicol, Byzantium and Venice. A study in diplomatic and cultural relations, Cambridge, Cambridge University Press, 1988, p. 259-260.
116 P. Hetherington, « The Jewels from the Crown : Symbol and Substance in the Later Byzantine Imperial Regalia », Byzantinische Zeitschrift, no 96, 2003, p. 157-168. Il ne s’agissait vraisemblablement pas des joyaux de la couronne impériale (stemma).
117 Clément VI (1342-1352), Lettres closes, patentes et curiales se rapportant à la France publiées ou analysées d’après les registres du Vatican, Déprez E. (éd), fasc. 1, Paris, 1901, col. 207, 228 ; Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 539-540 : « grammata de la basilis au pape » ; Dölger, Regesten…, op. cit., no 2890. Voir à ce sujet Élisabeth Malamut, « Ambassades byzantines en Occident (xive-xve siècles) : nouvelles perspectives sur les processus diplomatiques et leurs acteurs », dans Les relations diplomatiques au Moyen Âge. Formes et enjeux, XLI Congrès de la SHMESP (Lyon 3-6 juin 2010), Paris, Publications de la Sorbonne, 2011, p. 239-241.
118 Élisabeth Malamut, Ambassades byzantines en Occident…, op. cit., p. 242.
119 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 395-398. Voir à ce sujet Eva de Vries-Van der Velden, L’élite byzantine…, p. 102-103.
120 Le Destan d’Umur Pacha, Melikoff-Sahar Irène (éd.), Paris, PUF, 1954, v. 1830 sq. ; Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 405-419 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 693-694 ; Franz Dölger, Regesten…, no 2895 ; voir Paul Lemerle, L’émirat d’Aydin…, op. cit., p. 176. Cette ambassade s’accompagnait de l’envoi par Jean V de bateaux pour permettre à Umur de rentrer chez lui.
121 Pour la prise de Smyrne par les Latins, voir Paul Lemerle, L’émirat d’Aydin…, op. cit. p. 186 sq.
122 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 437.
123 Ibid., p. 440-443 : il ne faut néanmoins pas perdre de vue que notre information repose sur les Mémoires de Cantacuzène qui, comme nous l’avons dit au début de cette étude, cherche à charger Apokaukos pour mieux innocenter l’impératrice.
124 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 432 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 704.
125 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 483-484.
126 Ibid., t. II, p. 445-473 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2901.
127 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 472-474. Jean Chrysobergès affirma n’avoir rien à dire sur l’ambassade commune de plus que ce qu’il y avait dans les lettres, mais qu’en particulier il avait quelques mots à dire à l’impératrice : ce sont les instructions orales données à l’ambassadeur par son souverain qui sont assez communes dans les relations diplomatiques. Voir aussi Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 110.
128 Sandra Origone, Giovanna di Savoia…, op. cit., p. 112-113.
129 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 498 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 762 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2904.
130 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 587 ; Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 762 (été 1346).
131 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 763 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2906 (juillet-août 1346).
132 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 584 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2911 (automne 1346).
133 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 591 ; Franz Dölger, Regesten…, op. cit., no 2912 (automne 1346).
134 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 753.
135 Ibid., p. 756. Pour la lettre de Cantacuzène au patriarche, voir Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 467-468. Voir Eva de Vries-Van der Velden, L’élite byzantine, op. cit., p. 127.
136 Nicéphore Grégoras fait état d’une lettre du patriarche à Cantacuzène au printemps 1345, mentionnant que le grand duc et lui-même avaient envoyé une délégation proposant la paix, qui fut un échec (voir-ci dessus) et que la proposition de Cantacuzène de se faire moine à l’Athos quelque temps plus tard n’a pas abouti, cf. Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 758- 760 ; Jean Darrouzès, Les regestes des actes du patriarcat de Constantinople, vol. I, Les actes des patriarches. Fasc. 5, Les regestes de 1310 à 1376, Paris, Institut français d’Études byzantines, 1977, no 2258.
137 Nicephori Gregorae…, op. cit., t. II, p. 761.
138 Jean Darrouzès, Les regestes…, op. cit., no 2263 ; Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 604.
139 Ibid., no 2264.
140 Ibid., no 2266. Voir Donald M. Nicol, The reluctant…, op. cit., p. 79-81.
141 Historiae Ioannis Cantacuzeni…, op. cit., t. II, p. 605-606.
142 Ibid., p. 611-612 (le Kastelion).
143 Ibid., p. 614.
144 Timothy S. Miller, The History…, op. cit., p. 42, 148.
145 Ibid., p. 45, 151.
146 Ibid., p. 44, 150 : les fiançailles furent célébrées entre le 8 février et le 29 mai 1347.
147 Ce fut l’objet de ma communication « Les reines de Thessalonique : Irène de Montferrat, Rita-Marie-Xénè et Anne de Savoie » au XXe Congrès International des Études byzantines à Sofia (22-27 août 2011), à paraître.
Auteur
Aix Marseille Université, CNRS, LA3M UMR 7298, 13094, Aix-en Provence, France
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