Justice, pouvoirs et rites en Terre Ferme au début du XVIe siècle
Piovene-Schio-Pievebelvicino, août 15101
p. 97-114
Texte intégral
1L’objectif de cette étude consiste à appréhender, par le biais du procès instruit en 1510 contre Francesco Busa, originaire de la localité de Piovene, située en Terre Ferme vénitienne, le rapport existant entre les formes de la justice et le pouvoir politique créé dès 1509, lors de l’occupation du Haut-Vicentin par les troupes impériales, au cours de la guerre de la Ligue de Cambrai. Désireuse de s’émanciper de la tutelle de la ville de Vicence, la « terre » (terra) de Schio a formé ainsi un « laboratoire » original, dans lequel des éléments nouveaux, qui proviennent de Trente – et, donc, d’un État « différent » de la République de Venise – se sont juxtaposés à la justice traditionnelle garantie jusqu’alors par les Statuts vicentins, fondés sur des formes et des rites spécifiques.
Le contexte
2Ce fut la guerre qui fit apparaître dans toute sa complexité ce qui pourrait être défini comme étant la « question de Schio ». Une guerre combattue par Venise contre les coalisés de la Ligue de Cambrai1, dans le cadre de laquelle le territoire vicentin dut supporter les incursions et les violences répétées des troupes allemandes, au point d’inciter de nombreuses personnes à chercher refuge « à Cogolo, à Vello, [à] Coltran, à Lugo, à Calvene, des villages vicentins situés aux pieds des Alpes2. » Et tandis que ceux-ci se cachent dans « ces sommets et ces forêts [...], il y avait des Vicentins qui en profitaient, peut-être pour n’avoir rien à perdre de cette misère et de leur fuite, parce qu’ils volaient les biens laissés et violaient violemment les femmes des pauvres fuyards3. »
3À la restauration de son autorité sur ces terres, la Sérénissime se trouve amenée à gérer une situation aussi compromise sur le plan de la justice que sur celui des équilibres sociaux patiemment maintenus au cours du xve siècle. C’est pour cette raison que, à la fin du conflit, en 1517, le patriciat vénitien opte pour la prudence face aux classes dirigeantes de la Terre Ferme, en leur permettant de reprendre le contrôle des institutions citadines et, ainsi, les positions de pouvoir précédemment occupées avant la défaite d’Agnadel subie en mai 15094.
4La position de Venise avait marqué de cette façon la défaite de ces habitants de Schio qui ne voulaient plus rester sous la domination des Vicentins, comme n’avait pas manqué de le noter le chroniqueur et patricien vénitien, Marin Sanudo, en décembre 15095 et qui, grâce aux sollicitations de quelques sages du Collège (alcuni savii di Colegio), étaient parvenus à présenter leurs propres demandes devant le doge. Sanudo rappelle du reste le grand débat (gran disputation) qui suivit la présentation de ces délégués, parmi quelques membres du Collège, qui voulaient que les habitants de Schio se séparent de la juridiction vicentine – voleano che [les habitants de Schio] fossero separati. Dans la discussion étaient intervenus les patriciens Pietro Duodo, Antonio Grimani et le doge (sier Piero Duodo, sier Antonio Grimani, sier Zorzi Emo et ultimo il doxe). C’était le doge Leonardo Loredan qui fit valoir le principe selon lequel il ne convenait pas de traiter un tel sujet (non era tempo de tratar tal materia6) : un comportement dilatoire qui renvoyait toute décision et sauvegardait ainsi l’apport des Vicentins et des représentants de Schio aux forces vénitiennes engagées dans le conflit7. Au nom de ce pragmatisme, il était possible d’oublier les épisodes qui avaient précédé la première occupation de la terre de Schio, où le 3 juin 1509, face à des troupes vénitiennes en fuite, le syndic, le degano et d’autres hommes avaient pris possession du château de Pievebelvicino au cri de « Marc, nous ferons en sorte que tu ailles pêcher et prendre des anguilles et des crevettes, et que nous soyons créés citoyens de Schio aux dépens des Vénitiens et de ceux de Vicence, et toujours en criant “Empire, Empire”8. » Ce furent eux, également, le 8 juin, qui écrivirent au noble vicentin Leonardo Trissino9, émissaire en terre vénitienne de l’empereur Maximilien Ier, dans l’intention d’obtenir son placet à l’élection – réalisée en violation déclarée des statuts de la ville de Vicence – d’un de leurs vicaires. Quoique ses attributions aient été limitées au seul secteur civil et à celui des affaires mineures, l’importance dont profite le détenteur de cette charge est toutefois considérable, car le vicaire a un droit de regard sur tous les actes de l’administration ordinaire tels que le séquestre des biens ou la récupération des dots restées impayées. Il lui incombe, en outre, de présider les assemblées des communautés qui dépendent de sa juridiction, ce qui lui permet parfois d’influencer le comportement des ruraux et d’orienter les décisions dans un sens favorable aux intérêts de la classe dirigeante, dont il est lui-même la directe émanation10. Ce n’est pas un hasard si la ville de Vicence a toujours exercé un contrôle important sur cette charge, en se réservant l’élection par l’oligarchique Petit Conseil (Minor Consiglio), où seuls peuvent accéder les citoyens les plus importants et les plus riches11.
5Quoique l’initiative de la communauté de Schio figure comme un acte qui efface, de fait, tout contrôle de l’aristocratie vicentine sur le territoire du vicariat, Leonardo Trissino donne tout de suite son approbation, en la faisant accompagner de l’invitation à élire « un Capitaine ou Podestat comme il semblera à vous [les habitants de Schio] soumis à l’Impériale Majesté12. » C’est ainsi que se réalise par ce moyen l’aspiration à l’autonomie avancée à maintes reprises par Schio depuis le milieu du xve siècle, alors que ce bourg du Val Leogra avait en vain sollicité l’envoi d’un recteur vénitien qui soit doté d’une autonomie judiciaire civile et criminelle, et d’une autorité administrative sur les communes dépendant de son vicariat13. Deux jours plus tard, les députés de Schio se réunissent en assemblée (convicinia) pour élire un vicaire qui juge au criminel (un vicario che iudiche in criminale) et, comme pour souligner la distance qui sépare désormais Schio des anciens seigneurs vénitiens et vicentins, le choix se porte sur Alberto, fils de feu Arcangelo Redicis, docteur en loi et citoyen de Trente14. Les protestations de la ville de Vicence ne comptent pas beaucoup, alors que, le 7 août 1509, l’empereur Maximilien Ier s’occupe de nommer un nouveau podestat et le charge de mettre tout en œuvre pour la levée de l’impôt et l’administration de la justice (circa l’exatione della tansa della subiectione per me imposta come circa l’occorrentie pertinenti la aministration della Giustizia15).
6Qu’il s’agisse d’une dévotion « intéressée », dictée par la volonté de se soustraire aux ingérences vicentines16, les réactions le prouvent sans l’ombre d’un doute, des réactions qui, durant le mois de mai 1510, avec les Vénitiens redevenus les maîtres du territoire, avaient accompagné l’arrivée d’une missive du capitaine de Vicence, le patricien vénitien Francesco Falier17. Celui-ci – selon les prérogatives de nature militaire qui, avec la collecte des taxes et des impôts publics, représentaient traditionnellement les fonctions propres (uffizii propri) de sa charge18 – avait conduit en fait les habitants de Schio à donner leur contribution en hommes et en armes pour la défense du territoire. Aussi, selon Marin Sanudo, les habitants de Schio avaient affirmé de ne pas vouloir être soumis à Vicence (non voler altro comandamento, che non sono sotoposti a Vicenza), en faisant comprendre qu’ils chevaucheraient toujours (sempre cavalcheranno19) avec le provéditeur Girolamo Pesaro, envoyé sur place par Venise pour guider et coordonner les interventions militaires. Cette distinction entre une autorité qui ordonnait aussi, seulement de façon nominale, aux Vicentins, desquels on ne voulait pas dépendre, et les Vénitiens que l’on était en revanche prêt à obéir, en dit long sur les objectifs poursuivis par les représentants de Schio au cours de la guerre de Cambrai et ses motifs de fond sur la « question de Schio » que le conflit a contribué à faire apparaître.
L’importance d’être une ville
7Schio incarne le « pain, [les] mines et [le] siège » (è pani, miniere e sede), tels sont les termes utilisés par Marin Sanudo dans son journal20, résumant ainsi l’importance économique détenue par cette petite ville située dans le nord du territoire de Vicence. En fait, c’était lors des années successives à l’éclatement du conflit de Cambrai que le secteur minier – qui, près des montagnes de Torrebelvicino et du Tretto, se dressait face à Schio, où résidait un officier préposé à l’encaissement de la décime – avait vécu ses meilleurs moments, avec une production en argent et d’autres métaux estimée à environ 100 kg par année21. Une capacité d’extraction inférieure à celle de Schwaz, dans le Tyrol – qui, durant la période 1526-1535, atteignit en moyenne les 10 000 kg annuels – mais qui plaçait toutefois la zone de Schio dans une position qui n’est pas secondaire au sein des petits centres miniers d’Europe22. Le secteur de la soie et celui de la laine détiennent une plus grande importance, secteurs qui, jusqu’au début du xve siècle, avaient connu un développement considérable, en pouvant compter sur l’importante disponibilité sur place de matières premières, de l’énergie hydraulique et du bois23.
8C’était au fond les draps, les mines et les sièges (pani, miniere e sede) qui faisaient de Schio le plus riche et le plus recherché des onze vicariats que comptait la province de Vicence24, et c’était au fond pour son importance économique que Vicence, à l’époque de sa propre deditio à la Sérénissime, avait demandé et obtenu que le gouvernement vénitien s’engage à lui conserver les « honneurs et les prééminences » (honores et preminentiae) sur les autres vicariats du territoire, et « maxime de Vicariatibus Scledi et Arcignani », quoique la petite ville de Schio se trouve alors sous la seigneurie du Véronais Giorgio Cavalli25. À sa chute, au mois de mai 1406, Schio avait ainsi perdu tous les privilèges qui lui permettaient d’être un centre politique grâce à la seigneurie qui l’avait maintenue, à l’époque, dans une position particulière par rapport à d’autres villes de la province de Vicence. Ce furent en fait les habitants de Schio eux-mêmes, à l’occasion de la présentation de leur deditio à la République, qui demandèrent « quod per Comune Vincentiae deputetur et postea quolibet anno usus Vicarius qui residentiam facere debeat in terra Scledi »26. Toutefois, déjà vers le milieu du xve siècle, se diffusait parmi les habitants de Schio une vive opposition au protectionnisme économique mis en place par la ville de Vicence dans un secteur, celui du travail de la laine, qui représentait le véritable fleuron de l’économie de Schio. C’étaient en fait les interdictions sévères de la ville, liées aux nombreuses coercitions que les travailleurs de la laine (lanarii) du district avaient été contraints de subir, qui empêchèrent ceux de Schio d’entreprendre le travail des draps de laine27 : une marchandise de valeur qui permettait des gains importants et qui, dans le Vicentin, se localisait uniquement dans les villes forteresses de Longio et de Marostica, sièges de podestats dans lesquels Venise envoyait un de ses représentants doté de marges de manœuvre amples face à la ville de Vicence28. Pour les habitants de Schio, la présence d’un podestat vénitien sur place signifiait ainsi l’obtention d’un statut privilégié qui, à l’abri des interférences vicentines, tendait à maintenir les habitants du district dans une position subalterne et de soumission, et aurait été favorable à cette amélioration économique que Schio, en raison de ses spécificités, pouvait facilement réaliser.
9La rivalité entre les deux centres ne s’épuise pas, du reste, dans la querelle pour la production des draps, mais elle concernait aussi un champ extrêmement délicat comme celui du prélèvement fiscal, alors que Vicence cherchait à faire retarder le renouvellement des estimes à ceux de Schio, afin d’agir en faveur des habitants des districts (distrettuali) qui, d’ici peu, se réuniraient en Corps Territorial29. À l’origine de cette institution – qui, dès 1550-1551, devait représenter les instances de cette classe dirigeante du district qui vivait dans les grands centres productifs de la zone du piémont du Vicentin et qui, pour cette raison, tentait de gagner un nouvel espace dans la dynamique entre le centre et la périphérie30 – reposaient les récriminations que les centres avançaient en matière fiscale, avant tout celle sur l’estime. À l’évaluation était en fait liée la taxation directe de Venise : non seulement le principal nerf de l’économie31, qui se fondait sur les taxes, avant tout celle du sel, mais aussi le secteur d’où provenait près d’un tiers des disponibilités financières de la Sérénissime32. Liée aux quotes-parts (les carati) provenant de l’évaluation de toutes les propriétés réparties entre les groupes de contribuables locaux (ville, clergé et territoire), le plus ancien des impôts, par exemple, institué par Venise sur ses domaines de la Terre Ferme était la dadia delle lance ou colta ducale, comme elle était communément appelée au-delà du Mincio. Il s’agissait d’une contribution destinée au maintien de l’armée qui tirait son origine du contingent de 100 lances offertes en 1411 par Padoue à la Sérénissime pour la guerre contre le roi de Hongrie et qui, déjà en 1417, avait été rendue obligatoire et commuée en argent33. De Padoue, le système avait été ainsi peu à peu étendu aux contribuables de Brescia, Trévise, Vérone et Vicence, auxquels revenait une quote-part de 14 000 ducats environ. Un chiffre particulièrement élevé, étant donné que la subdivision en quote-part assignait 8 322 ducats à charge du territoire contre à peine 4 166 ducats à la ville, et une quote-part résiduelle de 1 539 ducats au clergé, sans que cela ne puisse correspondre à une possession correspondante de propriété immobilière et, donc, à une capacité contributive équivalente. Seules les remontrances du territoire et l’appui reçu à cette occasion par le Sénat permirent, en 1518, de revoir les quotes-parts de la dadia, en augmentant les quotes-parts (carati) de la ville de plus de 30 % et en réduisant ceux des habitants du district à 25 %34.
10L’impôt de la dadia delle lance était du reste le seul qui soit détenu par la ville de Vicence : une condition fiscale privilégiée, liée au status de ville35, qui devait représenter un sujet de discussion et de réflexion important pour tous ceux qui cherchaient à se rendre indépendants de la tutelle des Vicentins, de leurs Statuts et des vicaires que la noblesse citadine envoyait périodiquement sur place. Aussi les habitants de Schio avaient-ils essayé par tous les moyens de revendiquer leur propre droit à l’autonomie, que celle-ci provienne des Vénitiens ou de l’empereur, jusqu’à se gagner, aux yeux du patriciat vénitien, la réputation de bons impériaux (boni cesarei36). Une qualification amplement utilisée par les Vicentins pour discréditer les tentatives des habitants de Schio auprès de Venise, en les qualifiant de « rebelles de ce très excellent État » (ribelli di questo excellentissimo stato) et en soulignant devant le doge leur clair refus à obéir aux lettres du provéditeur de Vicence (obedir le letere del proveditor di Vicenza37). Et si les Vénitiens continuaient néanmoins à décrire les habitants de Schio comme de « vrais et très fidèles sujets » (veri e fedelissimi sudditi38) dans chacune de leurs communications, les orateurs vicentins envoyés à Venise en 1512 pour demander que Schio reste sous Vicence comme par le passé (di aver soto Vicenza Schio, come era prima), eurent beau jeu d’obtenir ce qu’ils avaient demandé39. C’était la fin des espoirs des habitants de Schio qui, dans les événements successifs de la guerre, avaient nourri l’illusion de pouvoir devenir enfin une ville.
La part de la Justice
11Lorsque, au terme du conflit de Cambrai, la Sérénissime avait accepté que la noblesse vicentine reprenne le contrôle des organes de représentation de la ville et leur avait garanti leur pouvoir traditionnel sur le contado, elle avait délibérément choisi de perpétuer cette « séparation juridique » (separatezza giuridica, C. Povolo40) exprimée lors des pactes et des déditions (deditiones) dès le xve siècle41, une séparation juridique par laquelle « la procédure qui scandait la ritualité du procès civil et pénal était le fruit d’une élaboration technique et idéologique, dont la légitimité reposait sur une conception de la justice profondément ancrée dans les valeurs et les prérogatives des groupes dirigeants aristocratiques42. » Au lieu de la community law, une caractéristique de la communauté, encline à résoudre les conflits de façon informelle, s’imposait une state law par laquelle l’institution judiciaire – et avec elle le groupe dirigeant citadin qui la composait – étendait toujours plus son autorité, en orientant les comportements sociaux et en veillant à la stabilité des équilibres politiques existants43.
12Intéressée à réaffirmer son propre contrôle sur le Haut-Vicentin – où, après Agnadel, les tentatives de s’affranchir de la sujétion à la ville de Vicence n’avaient pas manqué44 – l’aristocratie vicentine semble avoir recouru tout de suite, de façon perceptible et délibérée, à ses anciennes prérogatives dans le champ judiciaire. Le Consulat vicentin – tribunal citadin caractérisé par une logique de justice compensatoire qui « mettait en lumière dans la peine surtout un dédommagement à la partie lésée et au moyen duquel le contrôle de la faida était garanti à l’intérieur des groupes de pouvoir locaux » – est, à cet égard, extrêmement significatif du pouvoir retrouvé des élites urbaines traditionnelles45.
13À l’issue de la guerre de la Ligue de Cambrai, l’intérêt spécifique de la classe dirigeante de Vicence a été ainsi de réaffirmer son pouvoir sur le territoire, là où les événements belliqueux ayant suivi Agnadel avaient favorisé l’immixtion des rapports de force et de ritualités juridiques46 « différentes » par rapport aux formes traditionnelles de contrôle exercées par l’aristocratie urbaine sur le territoire (contado). Cette opération est aussi essentielle dans les localités du Haut-Vicentin – et, en particulier, à Schio où, au cours de l’occupation impériale, s’étaient établis les vicaires et les podestats, originaires de Trente, lesquels, tout en continuant à opérer formellement à l’intérieur de normes codifiées par les statuts vicentins, tendaient, dans les faits, à exercer leurs propres prérogatives dans le champ judiciaire, selon des formes et des modes empruntés à l’espace germanique.
14Il est peut-être possible de saisir le procès dans cette optique de « contamination » entre les systèmes juridiques, qui ont été réalisés entre le 16 et le 19 août 1510 dans le château de Pievebelvicino, contre le voleur (furem ac latronem publicum) Francesco Busa, de la localité de Piovene47. Écrit en latin, ce qui autorise à souligner à la fois la sacralité et le caractère solennel de la démarche judiciaire48, le procès est instruit sur la plainte présentée le 15 août par Toldo de Piovene, le degano de la communauté homonyme, au nom de la commune (pro debito et honore sui comunis). C’est pour défendre l’honneur de sa communauté – et aussi dans le respect des obligations sanctionnées ab antiquo par les statuts vicentins – que le decano a convaincu les autorités de la nécessité de procéder à l’arrestation de Francesco Busa et de son immédiate remise à Schio, quoiqu’il soit ici formellement fait référence à l’officier de Vicence (in manibus Vicentinii Officiis). Soustrait aux possibilités de médiation extrajudiciaire garantie par la justice communautaire49, le prisonnier est ainsi jugé exclusivement selon la « forme du droit » (secundum formam juris) et tenu de répondre de ses actes au citoyen de Trente, Nicolò dal Sale, alors détenteur de la charge de Capitaine de la terre de Schio50. Après avoir écouté les chefs d’accusation qui pèsent sur le prévenu, qualifié d’homme de mauvaise condition et réputation, de voleur notoire et d’assassin (hominem male conditionis et fama, furem publicum, et assassinum51), Nicolò dal Sale demande son transfert dans les geôles du château de Pievebelvicino, où il incombe au châtelain, Bonin de Ceris, de garder le prisonnier (custodiri anima52).
15Situé sur la montagne Castello – le relief à cône qui surplombe Pievebelvicino n’est pas éloigné de Schio –, le château constitue, en ces temps-là, le principal point d’appui des troupes impériales dans le Haut-Vicentin. Il avait été construit au xe siècle et, peu à peu, passa entre les mains des évêques de Vicence, feudataires de la rive droite du torrent Leogra, des Maltraversi, des Da Vivaro et des Visconti, jusqu’à son entrée dans l’orbite de la Sérénissime en 1406. Des mesures prises par le capitaine de Vicence entre 1455 et 1508 pour le château – une fois démantelé en 1514 par les troupes du général vénitien Bartolomeo d’Aviano –, il est possible de cerner qu’il a été pourvu de créneaux et de deux tours, la plus petite (torresina) étant orientée vers le rempart. L’intérieur se compose de différentes pièces, disposées sur deux étages et dotées de cheminées, la principale étant appelée la sala magna. Le château possède également une stalle avec une grange contiguë, un moulin, un four et une pièce qui sert de prison53. C’est dans ce dernier local, que le précédent podestat impérial avait tenu à fortifier (fortifichare), muni aussi d’une chaîne à mettre aux pieds (cepo da meter li pedi54), que le prisonnier Francesco Busa est conduit. Soumis, par l’incarcération, à un temps non linéaire, extraordinaire55, l’habitant de Piovene est d’abord interrogé par le Capitaine de Schio le 16, notamment sur les chefs d’accusation qui expliquent l’arrestation, auxquels Busa répond par la négative, car l’action réprouvée n’était pas liée à un épisode survenu en novembre, en temps de guerre (de mense Novembri proximi preteriti tempore belli), alors que ses compagnons et lui-même s’étaient trouvés apud Rochetam versus Meam, dans l’attente de quelques personnes ; là, rapporte-t-il au juge, ils sont rejoints par un certain Carli Mulattieri, qu’ils contraignent par la force de leur céder les trois chevaux et le vin que celui-ci portait avec lui. Après le partage du butin effectué, Francesco Busa révèle qu’il avait reçu un ducat et, aux exhortations de Nicolò dal Sale à dire la vérité, il répond qu’il l’a déjà fait et qu’il ne sait rien d’autre. Le prévenu une fois reconduit dans sa cellule, le Capitaine de Schio, en quête de la vérité (intendens habere veritatem a predicto Franciscum), exige le transfert de Francesco ad locum Torture.
16Le recours à la torture est habituel dans la pratique judiciaire d’alors. Et s’il s’agit, dans l’espace vénitien, d’une appréhension subtile en matière de preuves ou de torture – laquelle est codifiée dans les traités criminels (prattiche criminali) rédigés au cours du xvie siècle56 –, l’attitude adoptée par les cours de justice de Trente est en revanche différente, après la publication, en 1499, du Malefitzordnung à Innsbruck. Là, en fait, « le recours à la torture était souvent adopté à la discrétion de la cour, avec l’unique contrainte de la présence de deux jurés durant l’audition des témoins ; les procureurs ou les avocats de l’inculpé étaient exclus de l’audience, le passage du rite judiciaire était laissé aux choix de l’officier57. » Torture et confession contribuent à croiser plus fortement les actions pénales et les souhaits du pouvoir politique, tandis que le supplice lui-même finit par représenter, de façon visible, « un signe de merum imperium [qui avec] le corps exposé aux tourments exprimaient la sujétion à un pouvoir supérieur »58, en mesure de donner des significations ultérieures et puissantes à la ritualité processuelle et à la légitimation recherchée par les autorités impériales face à leurs nouveaux sujets.
17Conduit dans la salle des tortures, Francesco Busa est, une fois encore, invité à dire la vérité. Face à son obstiné « je l’ai déjà dit », Nicolò dal Sale le fait attacher, et c’est seulement alors que, interrogé, il affirme vouloir dire la vérité (interrogatus de veritate dicenda dixit : io la dirò). Il avait été nécessaire de lui administrer une secousse violente de corde avant que Busa ne se décida enfin à se rapporter à un fait survenu deux mois auparavant, lorsque – des soldats du Capitaine de Schio ayant rejoint de nuit Piovene et l’inculpé craignant qu’il ne soit recherché et arrêté – il s’enfuit du village et se cache dans une ferme entourée de vignes. Là se trouve, sur le pâturage, un jeune veau à la robe blanche que le prévenu – sans doute à court d’argent pour avoir fui de façon si inattendue – n’hésite pas à voler et à vendre à un boucher de la localité de Chiuppano, veau dont il a pu tirer la somme de neuf trônes. Incité à poursuivre dans sa confession, Francesco Busa nie avoir dû référer autre chose, mais le Capitaine donne l’ordre de suspendre une pierre à ses pieds et de le soulever, jusqu’à ce qu’il proteste de vouloir enfin dire la vérité. Nicolò dal Sale le fait alors descendre lentement (plane) et le prisonnier reprend ainsi le fil de son récit : il raconte comment, au cours de l’hiver à peine écoulé, il s’est introduit durant la nuit avec quelques compagnons dans la maison d’un certain Pietro Chinia de Piovene, où ils ont dérobé des cadeaux de noces, divisés ensuite entre eux. Et puisque, après ce vol, le prêtre menaça d’excommunier tous ceux qui s’étaient approprié ces biens, il se décida à restituer la part qu’il avait volée. L’absolution ne pouvait pas, en réalité, occulter l’acte réparateur de la restitution, mais permettre seulement la réadmission du pénitent au sein de la communauté59. Un tel acte, qui est de nature anthropologique, est caractérisé par des interrelations sociales et familiales qui établissent un lien organique, au fondement de la communauté elle-même. L’inégalité économique et sociale n’est pas en mesure de créer des distinctions de status ou de préséance en mesure de permettre à la communauté de conserver un caractère égalitaire60, comme le prouve l’existence de nombreux biens communs61. La restitution – et la réconciliation – ne signifient pas un abandon des hostilités, mais le rétablissement des rapports sociaux préalablement enfreints au sein de la communauté et, par l’intervention du prêtre, entre celle-ci et l’ordre voulu par Dieu.
18Encouragé à tout confesser, il répond qu’il l’a dit (io l’ho detto), ce qui incite le Capitaine, loin d’être convaincu, à le soulever à nouveau avec la corde, mais, une fois soulevé, il déclare vouloir dire la vérité tant attendue (quo elevato dixit : lasseme zoso, che dirò la verità). Il déclare ainsi que, environ quinze jours s’étaient écoulés, lorsque, en compagnie d’un certain Marc’Antonio d’Arcangelo Piovene, il se trouva dans les environs de la Commune de Meda, dans le lieu dit alli Linari. Pendant ce temps étaient passés par la rue
trois faquins, ou Allemands, qui venaient du campement62, et lui Francesco et Marc’Antonio prirent d’assaut les susdits faquins, et ils leur prirent ducats six, trônes 23 : 18 et quelques biens que les trois hommes avaient dans leurs sacs, lesquels biens furent portés [par eux] dans une forêt, et après j’ai entendu que Sartorello de Chiuppan, habitant de [la localité de] Mason a trouvé ces biens.
19Ce sont ses derniers mots, pour cette journée, car Nicolò dal Sale, après s’être rendu compte qu’il était impossible d’obtenir quoi que ce soit du prisonnier, ordonne de le délier et de le faire ainsi conduire à sa cellule. Il y reste trois jours, un temps sacré – celui du samedi et du dimanche, durant lequel l’accusé a eu peut-être l’occasion de se recueillir, de penser à ce qu’il avait commis et de trouver, enfin, dans la solitude, la volonté de se défendre sans simulation, en toute vérité63.
Avant et après la sentence
20Lorsque, le lundi suivant, il comparaît, encore une fois, devant Nicolò dal Sale, qui l’exhorte rituellement à parler avec l’âme « sincère » et à confesser ses fautes, Francesco Busa n’hésite plus. Il raconte ainsi comment, environ huit jours auparavant – il devait être quatre heures de la nuit –, il avait été réveillé par un certain Cecho de Notto de Piovene64 qui l’avait invité à aller avec lui et neuf autres personnes, qu’il n’avait jamais vues. Ensemble, ils s’étaient dirigés vers l’habitation de Tomio Crivellaro de Meda65, où ils avaient pris par la force quelques biens66. C’est alors que le Capitaine de Schio, s’estimant satisfait des confessions reçues, décide « selon la forme [du droit] » (juxta formam) que les procès-verbaux des interrogatoires devaient être ratifiés par le prévenu, en demandant leur transposition en langue vernaculaire, ce qui fut fait par le vice-chancelier Aldrighetto, afin que Francesco Busa puisse avoir une claire intelligence de ce qui avait été écrit (claram intelligentiam). La ratification eut lieu ce même jour, en présence de six témoins, parmi lesquels le syndic de Schio – Amedeo dal Soglio67 – et son vice-decano, comme si, par ces présences, il s’agissait de souligner la continuité existant entre les autorités civiles et pénales, expression de la communauté de Schio. De façon analogue aux procès anti-juifs célébrés dans la ville de Trente à la fin du xve siècle68, dont l’instruction devait sans doute rester à l’esprit du citoyen Nicolò dal Sale, la possibilité avait été accordée au prévenu de présenter ses défenses au terme de trois jours, en pouvant compter sur l’assistance d’un procureur. Aussi Francesco Busa choisit-il un certain Francesco di Valli, auquel revint la tâche difficile de recueillir des informations sur lesquelles l’habitant de Piovene pouvait fonder, vraisemblablement, ses chapitres défensifs69. Mais l’effort fourni et les espoirs caressés furent vains.
21Vendredi 22 août 1510, vers midi, dans la loggia de la communauté de Schio. Le tribunal est réuni et présidé par le Capitaine Nicolò dal Sale, lequel, assis avec la verge et le bâton de la justice en mains (sedentem cum Virga, et baculo justitie in manum) – des attributions qui, à l’instar de la main de justice utilisée par les souverains français70, contribuent à faire du droit une expérience concrète71 –, prononce la sentence contre Francesco Busa de Piovene, un voleur, un assassin et un homme de mauvaise vie et condition. Des stéréotypes évidemment imprécis, mais qui tendent à renforcer le rôle du juge et, donc, de l’instance politique en tant que dispensateur d’une justice72 à laquelle il est demandé – jamais peut-être comme en temps de guerre (in tempore belli) – de déterminer les limites entre le licite et l’illicite, entre les gouvernants et les gouvernés. Nombreux, comme le rappelle la cour, sont les crimes qu’il avait perpétrés au détriment de la loi de Dieu, de la justice et des bonnes mœurs – malum malis addendo Deum pro oculis non habendo –, lesquels doivent être sévèrement punis pour défendre et rétablir les équilibres sociaux de la communauté. L’histoire processuelle, n’importe quelle histoire processuelle, se fonde nécessairement, en dernière instance, sur la réalité locale, reproduit et défend un ordre de groupe et juridique ressenti comme immuable73, parce qu’il se conforme au modèle divin. C’est seulement de cette façon qu’il est possible de réaliser le transfert74 d’une justice abstraite à la foule des sujets qui ne reconnaissent pas d’autre Prince que leur propre caprice (che altro Prencipe non riconoscono, che il proprio capriccio), comme l’écrivit deux siècles plus tard le comte vicentin Vincenzo Enrico Capra75. C’est vraisemblablement cette motivation qui poussa le Capitaine de Schio à rendre publique et à vulgariser la sentence prononcée contre Francesco Busa, sentence qui fut ensuite lue et publiée devant les portes de la maison où siège le Capitaine.
22Victime rituelle – bien plus que personne – ils l’exposèrent sur la fourche, suspendue par la gorge, jusqu’à ce qu’il passe de vie à trépas76.
Notes de bas de page
1 Sur les événements de la guerre de la Ligue de Cambrai, Alberto Aubert, La crisi degli antichi stati italiani, Florence, Le Lettere, 2003, p. 216-221, 228-236.
2 A Cogolo, a Vello, Coltran, a Lugo, a Calvene, villaggi vicentini posti al piè dell’Alpi. Jeannine Guérin-Dalle Mese, Una cronaca vicentina del Cinquecento, Vicence, 1983, f° 175.
3 Jeannine Guérin-Dalle Mese, op. cit., f° 175 : quelle sommità et selve [...] vi erano Vicentini che godevano forsi per non haver che perder di tal miseria et de la costoro fuga, perché rubbavano le robbe lasciate e violavano violentemente le donne de’ poveri fugiti.
4 Angelo Ventura, Nobiltà e popolo nella società veneta del Quattrocento e Cinquecento, Milan, Unicopli, 1993, p. 168-187 [1re édition, Rome-Bari, Laterza, 1964]. Voir, par ailleurs, Giuseppe Del Torre, Venezia e la terraferma dopo la guerra di Cambrai. Fiscalità e amministrazione (1515- 1530), Milan, Franco Angeli, 1986, p. 170.
5 Marin Sanuto, I diarii, Ix, Venise, 1883, coll. 373.
6 Ibid., coll. 513.
7 En fait, le 27 décembre 1509, le général Andrea Gritti se rendait à Schio, libérée depuis à peine un mois des troupes impériales, pour en extraire 10 guastatori. Biblioteca Civica de Schio (désormais : BCS), Memorie Maraschin, x, p. 25.
8 Giovanni Mantese, Storia di Schio, Schio, 1969, p. 360, note 61 : Marco faremo che tu anderai a pescar e pigliar delle anguille e gamberelli et che saremo fatti cittadini di Schio a dispetto dei Veneziani et di quelli di Vicenza : et sempre gridando : Imperio, Imperio.
9 Sur Leonardo Trissino, membre de la noblesse de Vicence, qui avait trouvé refuge dans les territoires impériaux après l’homicide, en 1495, du noble chevalier vicentin Giovanni Loschi, et était entré dans les grâces de Paolo Liechtenstein, puis de l’empereur Maximilien Ier, qui le créa chevalier, cf. Domenico Bortolan, « Leonardo Trissino celebre avventuriero », Nuovo Archivio Veneto, III (1892), p. 5-46.
10 Claudio Povolo, L’intrigo dell’Onore. Poteri e istituzioni nella Repubblica di Venezia tra Cinque e Seicento, Vérone, Cierre, 1997, p. 64.
11 James S. Grubb, La famiglia, la roba e la religione nel Rinascimento. Il caso veneto, Vicence, N. Pozza, 1999, p. 257-261.
12 Giovanni Mantese, op. cit., p. 364, note 72 : un Capitanio overo Podestà dove parerà a voi del loco sotoposto alla Cesarea Maestà.
13 Ainsi Schio avrebbe goduto delle condizioni fiscali caratteristiche di una città, ovvero di pagare come unica gravezza le dadie, senza gli altri oneri diretti riservati agli abitanti rurali, Michael Knapton, « Il Territorio vicentino nello Stato veneto del ’500 e primo ’600 : nuovi equilibri politici e fiscali », in Giorgio Cracco, Michael Knapton, dir., Dentro lo « Stado italico ». Venezia e la Terraferma fra Quattro e Seicento, Trente, 1984, p. 83.
14 Archivio Storico de la Commune de Schio [désormais : ACSc], Liber provisionum 1503-1523, carton [désormais : c.] 3, fasc. 4, f° 85v°. Je dois le signalement des documents déposés aux archives de Schio à Paolo Snichelotto.
15 Giovanni Mantese, op. cit., p. 366, note 79.
16 L’attitude des Sept Communes d’Asiago a été analogue envers la République de Venise, voir Jacopo Pizzeghello, « La devozione interessata. Uomini, comunità, fazioni, milizie nell’altopiano dei Sette Comuni tra Cinque e Seicento », Studi Veneziani, 56 (2008), p. 15-30.
17 Bartolomeo Bressan, Serie dei Podestà e dei Vicari della città e territorio di Vicenza, Vicence, 1877, p. 136.
18 Magistrati della Spettabile Città di Vicenza e del suo Territorio a tempi della Repubblica, Vicenza, 1881, p. 15-16.
19 Marin Sanuto, I Diarii, x, Venise, 1884, coll. 329.
20 Ibid., coll. 179.
21 Raffaele Vergani, Miniere e società nella montagna del passato. Alpi venete, secoli xiii-xix, Vérone, Cierre, 2003, p. 20-22.
22 R. Vergano, op. cit., p. 23.
23 Edoardo Demo, L’« anima della città ». L’industria tessile a Verona e Vicenza (1400-1550), Milan, Unicopli, 2001, p. 324. Voir, en outre, le document conservé dans ACSc, Pergamene, A/XV/20, fascicule « Sull’arte della lana », 19 juin 1485.
24 Filiberto Dal Cortivo, « Il Vicariato di Thiene in età veneziana e il conflitto fra “estimati” e “popolari” », in Annachiara Bruttomesso, Francesca Lomastro Tognato, Matteo Dal Santo, dir., Storia di Thiene, volume primo, Vicence, 1993, p. 247.
25 Giovanni Mantese, op. cit., p. 337.
26 Ibid., p. 340.
27 Ibid., p. 351.
28 Sur les conflits entre Marostica et Vicence, Sergio Zamperetti, « Conflitti giurisdizionali. La podesteria di Marostica nei primi due secoli di dominazione veneziana », Claudio Povolo, dir., Marostica. Profilo istituzionale di un centro urbano nell’età della Serenissima, Vicence, 2004, p. 275-327.
29 Sur la création du Corps Territorial vicentin, dans lequel joua un rôle important la famille dei Toaldi, de Schio, Sergio Zamperetti, « Per una storia delle istituzioni rurali nella terraferma veneta : il contado vicentino nei secoli xvi e xviii », in Gaetano Cozzi, dir., Stato, società e giustizia nella Repubblica Veneta (sec. xv-xviii), t. i, Rome, Jouvence, 1985, p. 61-131.
30 Sergio Zamperetti, « Per una storia delle istituzioni rurali nella terraferma veneta… », in Gaetano Cozzi, dir., op. cit., t. i, p. 76.
31 Luciano Pezzolo, L’oro dello Stato. Società, finanza e fisco nella Repubblica veneta del secondo ‘500, Venise, Il Cardo, 1990, p. 44-45.
32 Luciano Pezzolo, op. cit., p. 331-338.
33 Giuseppe Del Torre, op. cit., p. 16.
34 Ibid., p. 32-33.
35 Michael Knapton, « Il Territorio vicentino… », in Giorgio Cracco, Michael Knapton, dir., op. cit. p. 83.
36 Marin Sanuto, I Diarii, xVIII, Venise, 1887, coll. 266, 13 novembre 1514.
37 Marin Sanuto, I Diarii, XI, Venise, 1884, coll. 275.
38 Voir, à titre d’exemple, les notes retranscrites de Giacomo Pozzolo, « Notizie della Terra di Schio scritte dall’anno 1712 al 1714 », in Giacomo Bologna, Francesco Rossi, dir., Schio e territorio. Tre cronache, Padoue, 1876.
39 Marin Sanuto, I Diarii, xIII, Venise, 1886, coll. 452.
40 Claudio Povolo, « Centro e periferia nella Repubblica di Venezia. Un profilo », in Giorgio Chittolini, Anthony Molho, Paolo Schiera, dir., Origini dello Stato. Processi di formazione statale in Italia fra medioevo ed età moderna, Bologne, Il Mulino, 1994, p. 207-221.
41 Sur la dédition (deditio) de Vicence, James S. Grubb, Firstborn of Venice. Vicenza in the Early Renaissance State, Baltimore-Londres, The Johns Hopkins University Press, 1988.
42 Claudio Povolo, L’intrigo dell’Intrigo, op. cit., p. 111.
43 Mirjan R. Damaška, I volti della giustizia e del potere. Analisi comparatistica del processo, Bologne, Il Mulino, 1991, p. 251 : Se lo scopo del processo è realizzare le scelte politiche dello Stato, le decisioni sono legittimate soprattutto dal punto di vista dell’accuratezza degli esiti che producono. È appropriata la procedura che aumenta le probabilità – o massimizza le possibilità – di pervenire a un risultato esatto sul piano sostanziale, piuttosto che quella che realizza principi di correttezza o protegge qualche valore sostanziale. Sur le sujet, Claudio Povolo, « Dall’ordine della pace all’ordine pubblico. Uno sguardo da Venezia e il suo stato territoriale (secoli xvi-xviii) », in Claudio Povolo, dir., Processo e difesa penale in età moderna. Venezia e il suo stato territoriale, Bologne, Il Mulino, 2007, p. 27-51.
44 À cet égard, l’épisode le plus révélateur est certainement l’opposition de Vicence au bourg de Schio durant l’occupation des troupes impériales, qui constitue l’arrière-fond de cet article. Pour une analyse des antagonismes au cours de la grave crise que traverse la République après la défaite d’Agnadel et ses motifs généraux, Angelo Ventura, op. cit., p. 121-150.
45 Sergio Lavarda, « Politica e giustizia nella Terraferma veneta del Seicento. Il Tribunale vicentino del Consolato (1640-1690 circa) », Archivio Veneto, 163 (2004), p. 56 : nella pena ravvisava soprattutto un risarcimento alla parte lesa e a mezzo del quale veniva garantito il controllo della faida all’interno dei gruppi di potere locali. Sur les compétences du Consulat, Claudio Povolo, « Aspetti e problemi dell’amministrazione della giustizia penale nella Repubblica di Venezia. Secoli xvi-xvii », in Gaetano Cozzi, dir., Stato società e giustizia nella Repubblica Veneta (sec. xv-xviii), Rome, Jouvence, 1980, p. 183.
46 Sur le thème du rituel judiciaire, sur lequel il convient de revenir dans cet article, je renvoie à Antoine Garapon, Del giudicare. Saggio sul rituale giudiziario, Milan, Raffaello Cortina Editore, 2007 [trad. italienne]. Je suis très reconnaissant au prof. Lucien Faggion de m’avoir signalé ce texte.
47 Biblioteca Civica Bertoliana de Vicence, DO46, fascicule intitulé « Piovene ». Il s’agit d’une copie qui date vraisemblablement de la deuxième moitié du xixe siècle. Une copie extraite d’un manuscrit autrefois conservé par la famille Bottari, légèrement différente de la précédente, est reproduite dans le manuscrit de Pietro Maraschin, « Moderne ed antiche memorie di Schio », partie i, conservé dans la Biblioteca Civica locale. Sur cette source, il existe une brève présentation du procès publiée par la Paroisse de Pievebelvicino, « Groupe pour la restauration de l’ancienne Pieve », « Il castello di Belvicino. Appunti storici e ricerche nel 50° anniversario dell’erezione della croce, 1949-1999 », Quaderni della Pieve, 2 (1999), p. 49-52.
48 Antoine Garapon, op. cit., p. 121-122 : L’utilizzo di questa lingua sacra [...] radica il discorso al di fuori dell’immediatezza della vita e del tempo stesso, proiettandolo verso il momento fondatore del diritto.
49 Ces mécanismes informels (tractations, médiations, compositions) ont été traités par Michelangelo Marcarelli, « Pratiche di giustizia in età moderna : riti di pacificazione e mediazione nella Terraferma veneta », in Giovanni Chiodi, Claudio Povolo, dir., L’amministrazione della giustizia penale nella Repubblica di Venezia (secoli xvi-xviii), vol. II, Retoriche, stereotipi, prassi, Vérone, Cierre, 2004, p. 259-281.
50 « 1510. venne Messer Nicolò dal Sale Cittadin di Trento per cap. li stete per tutto Agosto se partì, lasciò in Canceliero, ms. Ant. da Vigolo », tel est le titre du manuscrit de la Maison Bottari lu et retranscrit par Gaetano Maccà, Storia del Territorio Vicentino, t. xi, Storia di Schio, Caldogno, 1814, p. 238. En 1513, une fois revenu sur sa terre natale, Nicolò dal Sale est présent lors de la rédaction des statuts de Vigolo Baselga, aujourd’hui une fraction de la Commune de Trente. Fabio Giacomoni, dir., Carte di regola e statuti delle comunità rurali trentine, vol. 1, Dal ‘200 alla metà del ‘500, Milan, Edizioni Universitarie Juca, 1991, p. 377.
51 À relever que le latro agit avec violence et, habituellement, sur la voie publique, alors que le fur – comme le souligne également Lorenzo Priori – n’utilise pas les armes et n’affronte pas les victimes à visage découvert, préférant intervenir en cachette, clam et occulte. Luigi Lacchè, Latrocinium, giustizia, scienza penale e repressione del banditismo in antico regime, Milan, Giuffrè, 1980, p. 98-103. Le texte du chancelier vénitien, Lorenzo Priori, Prattica criminale, a été récemment édité par Giovanni Chiodi, Claudio Povolo, dir., L’amministrazione della giustizia penale nella Repubblica di Venezia (secoli xvi-xviii), t. i, Lorenzo Priori e la sua Prattica criminale, Vérone, Cierre, 2004.
52 Sur la famille Cera ou Cerato, originaire de la localité de Forni, dans le Val d’Astico, et détenteur, grâce à l’empereur Sigismond, en 1437, du titre d’Imperiali Conti Palatini e Cavalieri con l’insegna dorata del Sacro Lateranense Palazzo e dell’Aura Imperiale, Rizieri Zanocco, Cenni storici su Forni d’Astico, Vicence, 1909, p. 32.
53 Paroisse de Pievebelvicino, Il castello…, p. 45-47.
54 ACSc, Diverse antiche lettere imperiali per la spetabile Comunità concernenti diverse materie. 1509- 1510 e seguenti, c. 75, fasc. 362.
55 Antoine Garapon, op. cit., p. 44.
56 Lorenzo Priori, op. cit., p. 101-117.
57 Marco Bellabarba, La giustizia ai confini. Il principato vescovile di Trento agli inizi dell’età moderna, Bologne, Il Mulino, 1996, p. 277.
58 Marco Bellabarba, op. cit., p. 295.
59 John Bossy, L’Occidente cristiano. 1400-1700, Turin, Einaudi, 2001, p. 57.
60 Claudio Povolo, « La piccola comunità e le sue consuetudini », communication introductive au séminaire intitulé « Per una storia delle comunità. (Ricordando i primi anni ’80) », qui s’était tenu à Este (Gabinetto di lettura), province de Padoue, le 20 avril 2002, p. 2-3.
61 Sur ce sujet, voir Stefano Barbacetto, « La più gelosa delle pubbliche regalie ». I « beni communali » della Repubblica Veneta tra dominio della Signoria e diritti delle comunità (secoli xv-xviii), Venise, Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, 2008.
62 On se réfère au campement des troupes impériales qui se trouvaient alors dans la localité d’Olmo près de Vicence, comme le rappelle Giovanni Mantese, op. cit., p. 372-373 : ainsi, tre Facchini, ovvero Alemanni, quali venivano dal campo, et esso Francesco e Marc’Antonio predetti assaltassimo essi Facchini, e si ghe tolessimo ducati 6, troni 23 : 18 e certi beni che loro avevano in sacco li quali beni portassimo in un bosco, e dopo ho inteso che Sartorello da Chiupan abitator di Mason ha trovato quelli beni.
63 Cf. les analyses de Gaetano Cozzi, « La difesa degli imputati nei processi celebrati col rito del Consiglio dei x », Luigi Berlinguer, Floriana Colao, dir., Crimine, giustizia e società veneta in età moderna, Milan, Giuffrè, 1989, p. 21.
64 Selon toute probabilité, il s’agit du même Zamaria detto ceccho del notto da piovene, sur laquelle fabbrica – dont une instruction judiciaire était en suspens de la part de Zorzo Antonio da Orgiano, chevalier de la Commune de Vicence – le 4 juin 1555 une assemblée des chefs de famille de la Commune de Piovene avait été appelée à se prononcer. Archivio di Stato di Vicenza [désormais : ASVi], Notai di Vicenza, registre [désormais : reg.] 814.
65 Il s’agit probablement d’un personnage plutôt important, puisqu’il lui incombe, le 11 février 1507, de se présenter avec le syndic du village pour demander le renouvellement de certains baux de locations anciens (livelli) que les habitants de Meda tiennent ab antiquo des nobles comtes Velo. ASVi, Archivio Velo, reg. 7, f° 1001. Dans le même registre, au folio 1097, sont également rapportées les divisions qui eurent lieu le 14 novembre 1521 entre Tommaso de feu Guglielmo Crivellaro, son frère Giorgio et ses neveux Guglielmo et Batta.
66 Il est rapporté que per forza certi mobili, e una cavalla, la quale il predetto Cecho ha nelle mani, et ho [Francesco Busa] avuto per parte mia un Gabbano bruno, fodrà de panno bruno da mezzavita, ed un Calzarello.
67 Pietro Maraschin, Serie de’ signori, vicari, arcipreti, sindici, governatori ecc. della terra di Schio da’ primi tempi sino a quelli del Regno Italico, Schio, 1877, p. 14-18, qui le signale decano en 1506 et syndic en 1510 et en 1518.
68 Marco Bellabarba, op. cit., p. 289-291.
69 Gaetano Cozzi, « La difesa… », p. 10.
70 Antoine Garapon, op. cit., p. 61.
71 Ibid., p. 53.
72 Claudio Povolo, Stereotipi imprecisi. Crimini e criminali dalle sentenze di alcuni tribunali della Terraferma veneta (secoli xvi-xviii), Vicence, 2000, p. 3-5.
73 Voir Claudio Povolo, « Interpreti di culture : culture dominanti e culture subordinate a confronto », Acta Histriae, 16 (2008), p. 433.
74 Antoine Garapon, op. cit., p. 202-203.
75 Archivio di Stato de Venise, Consiglio dei Dieci, Processi criminali delegati, Vicenza, c. 16, fasc. 3. Dénonciation de Vincenzo Enrico Capra au Podestat et Vice-capitaine de Vicence, sans date mais remontant probablement à l’année 1768.
76 De la mention figurant dans ACSc, Spese ed entrate 1504-1511, c. 33, fasc. 98, f° 322r°-328, on apprend que la fourche a été érigée dans la place de Schio par les soins de Gardellino Gardellini et de Gaetano Ruaro. Une fois mort, le cadavre de Francesco Busa a été enseveli dans le cimetière contigu à l’église de San Francesco.
Notes de fin
1 L’article a été traduit de l’italien par Lucien Faggion.
Auteur
Università Ca’ Foscari, Venise
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