« J’enseigne et j’évalue l’oral »
Pratiques effectives au 3e cycle du primaire
p. 151-176
Texte intégral
Introduction
1Bien que les pratiques déclarées et effectives en lien avec l’enseignement de l’oral soient plus documentées en Europe qu’il y a 20 ou 30 ans (Dumortier, Dispy et Van Beveren, 2012 ; De Pietro et Gagnon, 2013 ; Surian et Gagnon, 2014), force est de constater que peu de recherches font état de pratiques effectives d’enseignement et d’évaluation de l’oral à la fin du primaire au Québec (Dumais et Lafontaine, 2011 ; Nolin, 2013). De telles recherches sont pourtant nécessaires, notamment pour la formation initiale et continue des enseignants. Notre équipe de recherche a donc mis en place une recherche-action-formation (RAF) (Guay et Prud’homme, 2011) en collaboration avec quatre enseignantes du 3e cycle du primaire (élèves de 10 à 12 ans), et ce, à partir des besoins de formation en oral de ces enseignantes. Cette contribution fait état de la problématique et des éléments théoriques sur lesquels nous nous sommes appuyés pour mettre en pratique notre RAF. La méthodologie et des résultats des années 1 et 2 du projet sont présentés afin de rendre compte des compétences à l’oral des élèves et du renouvèlement des pratiques des enseignantes.
Problématique
2Même si l’oral est mis en pratique en classe du primaire au Québec, son enseignement est encore très limité (Nolin, 2013). Dans les pratiques déclarées à ce sujet, les enseignants disent l’évaluer puisqu’une note au bulletin est exigée, cela même s’ils ne savent pas toujours comment faire (Lafontaine et Messier, 2009). De plus, malgré une place importante accordée à l’oral dans les documents ministériels québécois, les pratiques effectives d’enseignement et d’évaluation de l’oral, notamment celles des enseignants de 3e cycle du primaire (élèves de 10-12 ans), sont peu connues (Dumais et Lafontaine, 2011 ; Plessis-Bélair et Cauchon, 2010). Actuellement, à notre connaissance, il n’y a pas de dispositif didactique concret pour les classes du primaire qui appuierait les pratiques d’enseignement, permettant ainsi aux enseignants de choisir des pratiques d’évaluation en adéquation avec l’enseignement donné, et qui les guiderait afin qu’ils puissent effectuer des changements dans leurs pratiques (Lafontaine et Le Cunff, 2005 ; Plessis-Bélair et Cauchon, 2010). De plus, peu de données de recherches documentent la transition primaire-secondaire en ce qui concerne la langue orale (Dumais, Lafontaine et Pharand, 2015). Il s’avère pourtant important de bien former les élèves, d’une part afin de leur assurer une meilleure maitrise du langage de l’école dans toutes les disciplines (registre de langue plus soutenu, variété et spécificité du vocabulaire, etc.) et favoriser ainsi leur entrée au secondaire (Snow, 1991) et, d’autre part, afin qu’ils soient des locuteurs compétents au quotidien.
3C’est dans cette optique que nous menons présentement une RAF sur l’oral auprès d’enseignantes du 3e cycle du primaire. Ce sont les problèmes rencontrés par ces enseignantes dans leur pratique qui ont été le point de départ de cette recherche1. En ce sens, nous répondons à une exigence du Conseil supérieur de l’éducation du Québec qui affirmait déjà en 2003 que « trop de réformes éducatives ont échoué en matière de transformation des pratiques pédagogiques et de gestion, faute de formation et d’accompagnement adéquats et suffisants » (p. 54). Dans le même ordre d’idées, dans un avis2 publié en 2015, le Conseil supérieur de la langue française (CSLF) formule deux recommandations touchant spécifiquement à la langue orale : « Le Conseil recommande que le ministère de l’Éducation assure une formation continue aux conseillers pédagogiques, particulièrement en ce qui concerne les avancées didactiques et disciplinaires ; cette formation doit mieux les outiller pour l’enseignement du français, notamment en ce qui a trait à l’enseignement de l’oral » (recommandation 5, p. 39) et « Le Conseil recommande au ministère de l’Éducation d’accorder une attention plus grande à l’enseignement et à la correction du français oral, particulièrement au primaire » (recommandation 11, p. 42). Nous sommes d’avis que la recommandation 5 s’adresse également aux enseignants qui sont les premiers intervenants auprès des élèves. De plus, par cette recherche, nous voulons faire état de pratiques effectives en oral et ainsi documenter les changements de pratique des enseignantes participant à notre recherche. La RAF nous a semblé la démarche la plus appropriée pour explorer cette zone d’ombre de la didactique de l’oral au primaire québécois et pour apporter de nouveaux résultats de recherche.
Cadre théorique
4Certains travaux en didactique de l’oral postulent qu’il est nécessaire de considérer l’oral comme un objet d’enseignement (Dolz et Schneuwly, 1998 ; Lafontaine, 2007 ; Dumais et al., 2015). Dans cette perspective, l’enseignant doit être en mesure d’identifier des éléments enseignables d’un genre, d’une conduite discursive ou d’un acte de parole, et de les inscrire dans une démarche didactique permettant une exercisation de l’oral en classe par les élèves et aboutissant à une production finale (Lafontaine et Dumais, 2014). L’oral objet d’enseignement peut notamment être travaillé à partir de genres (Dolz et Schneuwly, 1998 ; Lafontaine, 2007, 2011). Ces genres sont des pratiques sociales de référence (par exemple : le débat, la critique cinématographique et la discussion). Ils permettent de travailler des objets précis de l’oral (De Pietro et Schneuwly, 2003 ; Lafontaine, 2007). Par exemple, pour le genre débat, il est possible d’enseigner la structure dudit genre, le registre de langue adapté à la situation de communication, l’intonation, l’argumentation, la réfutation, etc. Cela fait, il devient possible de définir clairement des contenus d’évaluation. Cette façon de concevoir l’oral rejoint certaines activités proposées dans les documents ministériels québécois ainsi que les besoins de formation des enseignantes explicités dans le déroulement de la recherche, section méthodologie.
5Le dispositif didactique retenu pour structurer l’enseignement de l’oral dans cette recherche est le modèle didactique de la production orale de Lafontaine (2001, 2011), présenté à la figure 1.
Figure 1 : Modèle didactique de la production orale en classe de français langue d’enseignement (Lafontaine, 2001, p. 218 ; 2011, p. 12)
1- | Intention de communication. |
2- | Situation de communication : intégration des pratiques de lecture, d’écriture et d’oral ; types de sujets présentés aux élèves : signifiants et non signifiants ; prise en compte des intérêts des élèves ; prise en compte de l’auditoire. |
3- | Activités d’oral planifié : |
4- | Impact sur l’élève : prise en charge de sa communication orale. |
6Ce modèle a notamment été inspiré de la « séquence didactique » de Dolz et Schneuwly (1998), mais il s’en distingue par la manière d’envisager les paramètres de la situation de communication, les types d’ateliers et les outils d’évaluation de l’oral (voir figure 1). En effet, le modèle de Lafontaine (2001, 2011) propose quatre paramètres de la situation de communication : 1) l’intégration de pratiques de lecture, d’écriture et d’oral dans le cadre du projet de communication choisi ; 2) les types de sujets présentés aux élèves : signifiants, car partant directement de leurs intérêts, et non signifiants, car étant parfois loin des préoccupations immédiates des élèves (lecture imposée, sujet relié à la culture, etc.). Les enseignants présentent les sujets non signifiants par des mises en situation visant à capter l’intérêt des élèves pour le sujet choisi ; 3) prise en compte de l’intérêt des élèves dans l’organisation du projet d’oral : activités réalisées en équipe, costumes et accessoires, rôles, etc. ; 4) prise en compte de l’auditoire : rôle actif de l’auditoire dans le projet, par exemple la participation à une période de questions, l’évaluation par les pairs, les rôles de gestion, etc.
7Ce modèle prévoit quatre types d’ateliers « formatifs », soit l’apprentissage des rôles à jouer (selon le genre : intervieweur, animateur de débat, etc.), l’apprentissage lié aux types de pratiques (structure du genre), l’apprentissage lié aux faits de langue (différents objets de l’oral tels que le regard, la prononciation, etc.) et l’apprentissage des techniques d’écoute (objets de l’oral liés à l’écoute, par exemple la reformulation et les procédés de relance). Ces types d’ateliers sont soutenus par le modelage3 de l’enseignant et parfois des élèves. Par exemple, dans un atelier portant sur l’apprentissage de faits de langue, l’enseignant modèle les débits rapide, lent et normal et les élèves les commentent.
8Les six étapes de l’atelier formatif de Dumais (2011a) ont également été ajoutées au modèle, à savoir 1) l’élément déclencheur : présenter un contrexemple et un exemple de l’objet d’oral choisi afin de susciter une réaction et un intérêt chez l’élève ; 2) l’état des connaissances des élèves : retour avec eux sur leurs observations à la suite du contrexemple et de l’exemple afin de voir ce qu’ils connaissent de l’objet et ce qu’ils ont remarqué ; 3) l’enseignement : enseignement explicite de l’objet d’oral selon des modalités choisies par l’enseignant (modelage, création d’un référentiel, prise de notes par les élèves, etc.) ; 4) la mise en pratique : activités permettant une exercisation de l’objet en classe ; 5) le retour en grand groupe : questionnement sur ce qui a été appris lors de la mise en pratique, retour sur les éléments moins bien compris ; 6) la réflexion métacognitive : travail réflexif qui peut se faire de diverses manières (carte conceptuelle, journal de bord, dessin, fiche réflexive, etc.) afin de garder des traces des apprentissages réalisés.
9Finalement, s’ajoutent à ce modèle des outils d’évaluation en cours d’apprentissage que l’enseignant peut utiliser pour garder des traces des apprentissages des élèves tels que la grille d’observation et d’évaluation, le portfolio, le journal de bord, etc.
10Ajoutons que le modèle choisi permet la collaboration entre les élèves pour favoriser les apprentissages (Dumais, 2008, 2010) et entre les enseignantes pour élaborer des projets d’oral sous forme de situations d’apprentissage et d’évaluation (SAÉ) et pour s’entraider dans l’enseignement. Dans le modèle retenu, nous avons privilégié l’évaluation par les pairs (Dumais, 2008, 2010, 2011b), qui peut se faire en trois temps : autoévaluation, rétroaction des pairs et évaluation de l’enseignant. L’évaluation par les pairs peut être utilisée à tout moment dans le modèle : lors de la production initiale lorsque les élèves s’observent, lors des ateliers formatifs, notamment à l’étape de la mise en pratique, et lors de l’évaluation finale. L’évaluation par les pairs permet d’analyser les prises de parole des pairs en identifiant les forces et les éléments à améliorer afin de leur donner des commentaires constructifs ; et elle amène aussi les élèves à réfléchir et à analyser leur propre prise de parole (autoévaluation). Selon les travaux de Dumais (2008, 2010), le fait d’évaluer un pair, c’est-à-dire de lui faire part des forces et des éléments à améliorer de sa prise de parole, tout en expliquant pourquoi et comment faire, favorise les apprentissages de celui qui reçoit les commentaires ainsi que de celui qui les émet. D’autres recherches ont également montré l’effet positif de l’évaluation par les pairs sur les apprentissages des élèves (Li, Liu et Steckelberg, 2010 ; Topping, 2005).
Question et objectifs de recherche
11Notre question de recherche est la suivante : comment des enseignantes québécoises du 3e cycle du primaire adaptent-elles et mettent-elles en place un dispositif didactique et des outils d’évaluation en oral ? Il est important de mentionner que la recherche-action-formation exige, comme son nom l’indique, deux types d’objectifs : des objectifs de formation et des objectifs de recherche. Au plan de la formation, nos objectifs visent : 1) à former quatre enseignantes à la didactique de l’oral à partir de leurs besoins ; 2) à adapter avec elles un dispositif didactique et des outils d’évaluation en oral ; 3) à mettre en pratique le dispositif didactique et les outils d’évaluation dans leur classe. Au plan de la recherche, nos objectifs sont : 4) analyser la mise en pratique du dispositif et des outils d’évaluation par les enseignantes ; 5) rendre compte du renouvèlement de leurs pratiques. Nous avons travaillé avec deux groupes expérimentaux (GE), constitués de deux enseignantes de 3e cycle du primaire œuvrant à l’école 1 (une de 5e année, GE5, et une de 6e année, GE64) et deux groupes témoins (GT) formés de deux enseignantes du 3e cycle du primaire travaillant à l’école 2 (une de 5e année, GT5, et une de 6e année, GT6). Le fait d’ajouter deux GT à notre recherche, même si nos résultats ne sont pas généralisables, permet de mieux comprendre en quoi le modèle didactique pourrait s’avérer efficace au 3e cycle du primaire, et ce, de trois manières : a) en comparant les résultats d’une prise de parole semblable faite au début et à la fin de l’expérimentation dans les GE et GT ; b) en documentant par un journal de bord ce que font les enseignantes des GE et celles des GT ainsi qu’en recueillant leurs outils pédagogiques afin de voir ce qui peut être efficace ou non en oral ; c) en documentant ce que font des GT dans leur pratique, ce qui permet de mieux comprendre les retombées d’une intervention didactique dans les GE et à l’an 2 dans les GT (Lafontaine, 2007). Cette contribution rapporte quelques résultats en lien avec les années 1 et 2 de cette recherche qui se déroule sur trois ans et qui prend fin en juin 2017.
Méthodologie
12La recherche-action-formation (RAF) est reconnue pour générer des connaissances au sujet d’une situation pédagogique (Guay et Prud’homme, 2011), ici l’enseignement et l’évaluation de l’oral, par l’entremise de rencontres praticiens-chercheurs collaborant à la construction d’un outil, ici les projets d’oral sous forme de SAÉ. La RAF « repose sur l’idée que la recherche a avantage à s’orienter vers l’action, à s’ancrer dans l’expérience et à s’inscrire dans une perspective participative où praticiens et chercheurs collaborent à la solution de problèmes liés au développement de la pratique » (Guay et Prud’homme, 2011 : 190-191), ici les problèmes soulevés par les enseignantes participantes avant de commencer la formation et qui sont précisés plus bas dans la section « déroulement de la recherche ». La RAF propose une méthodologie rigoureuse et souple à la fois préconisant une démarche itérative qui favorise un va-et-vient continu entre ses trois facettes : recherche (améliorer l’état des connaissances sur la situation pédagogique, soit l’enseignement et l’évaluation de l’oral), action (provoquer un changement aux composantes de ladite situation), formation (participer au développement des personnes qui vivent la situation pédagogique) (Dolbec et Clément, 2004 ; Guay et Prud’homme, 2011).
Échantillon
13Nos participantes sont 4 enseignantes de 3e cycle du primaire de 2 écoles et leurs 163 élèves (95 à l’an 1 et 68 à l’an 2). Il s’agit d’un échantillon de convenance (Gaudreau, 2011). À l’an 1, l’expérimentation s’est réalisée dans les classes des quatre enseignantes (GE5, GE6, GT5 et GT6). Toutefois, à l’an 2, l’enseignante GE5 n’a pu faire partie du projet ayant changé de cycle d’enseignement. De plus, lors de cette deuxième année, l’enseignante GT6 a enseigné en 5e année du primaire plutôt qu’en 6e année comme cela était prévu au départ (GT5 est devenu GT5A et GT6 est devenu GT5B). Il y avait donc trois enseignantes à l’an 2 (GE6, GT5A et GT5B). Mentionnons que les enseignantes des GT n’ont reçu aucune formation lors de l’an 1 de la recherche. La formation a été offerte à ces enseignantes l’année suivante. En accord avec les principes de la RAF, ces quatre enseignantes ont fait partie de l’équipe de recherche, qui était aussi composée de trois chercheurs et de deux assistants de recherche.
Instruments de collecte et méthode d’analyse des données
14Pour le volet recherche, aux ans 1 et 2, nous avons fait remplir aux enseignantes des GE et GT un questionnaire pré- et post- enseignement et évaluation de l’oral afin de connaitre leurs perceptions, opinions et connaissances au sujet de la didactique de l’oral et de leurs propres pratiques. Nous avons aussi réalisé des entrevues semi-dirigées avec chacune d’elles pour mettre en mots des informations, pensées, émotions, intentions, conceptions et exemples reliés à la démarche de RAF et aux démarches personnelles des enseignantes GT, cela à la fin de chaque année de la recherche. La méthode d’analyse de contenu retenue est l’analyse thématique de Paillé et Mucchielli (2003).
15Pour le volet formation, chaque journée de formation a été enregistrée en vue d’une synthèse la plus fidèle possible du déroulement et des propos échangés. Ces données ont été transcrites sous la forme de comptes rendus in extenso. Le tableau 1 présente le contenu des journées de formation.
Tableau 1 : Volet formation, ans 1 et 2

16Pour le volet action, nous avons filmé les séances d’enseignement de l’oral dans les GE et GT aux ans 1 et 2 (prétests GE-GT, SAÉ GE, enseignement habituel GT an 1 et SAÉ an 2), nous avons recueilli les documents créés par les enseignantes et nous avons analysé leur enseignement à l’aide d’une grille d’observation non participante validée dans la recherche de Lafontaine (2001). Cette grille, fort simple, était divisée en trois parties : informations générales sur la classe (nombre d’élèves, durée de la séance, disposition des élèves, matériel utilisé), section enseignant et section élèves. Dans ces deux sections étaient notées des informations au regard de l’enseignement et de l’évaluation de l’oral ainsi que de la participation des élèves (forces, faiblesses, attitudes, etc.). Nous avons créé des grilles d’évaluation des genres oraux choisis par les enseignantes (GE : débat ans 1 et 2 ; GT : capsule d’information et publicité an 1 ; GT : critique cinématographique sous forme de table ronde an 2) dont les critères ont été déterminés à partir de ce qui est proposé dans les documents ministériels en usage dans les écoles québécoises : Programme de formation de l’école québécoise (MEQ, 2001), Progression des apprentissages en communication orale (MELS, 2011) et Cadre d’évaluation des apprentissages au primaire (MELS, 2012). De 9 à 19 objets d’enseignement de l’oral, selon le genre retenu, ont été évalués en prétest et posttest, sur une échelle de 0 à 2 (0 : non réussi ; 1 : réussi à l’occasion ; 2 : réussi de façon satisfaisante). À titre d’exemple, le tableau 2 présente les critères d’évaluation utilisés lors des prises de parole de l’an 1. Ces critères sont formulés selon la terminologie issue des programmes ministériels québécois utilisés dans le cadre de cette recherche.
Tableau 2 : Critères d’évaluation5 des genres oraux de l’an 1 (MELS, 2011)
GT : publicités et capsules d’information | GE : débat farfelu |
Information donnée ou reçue à propos d’un sujet exploré | Proposition ou prise en compte d’arguments |
Respect de l’intention | Respect de l’intention |
Intervention au moment approprié | Intervention au moment approprié |
Engagement dans l’échange selon le contexte privilégié | Engagement dans l’échange selon le contexte privilégié |
Choix des idées – pertinence | Choix des idées – pertinence |
Choix des idées - suffisance (nombre d’idées) | Choix des idées - suffisance (nombre d’idées) |
Conduites sociales adéquates | Organisation des idées : enchainement des propos avec ce qui précède, ajout d’idées nouvelles pour faire avancer le propos, reprise d’idées émises, etc. |
Registres de langue | Conduites sociales adéquates |
Prononciation | Écoute attentive selon la formule retenue |
Volume | Intégration des idées |
Rythme et débit | Registres de langue |
Intonation | Prononciation |
Articulation | Volume |
Regard | Richesse du vocabulaire |
Posture | |
Geste | |
Mimique | |
Richesse du vocabulaire | |
Syntaxe |
17Finalement, les chercheurs et les enseignantes des GE et GT ont tenu un journal de bord afin de faire rapport des observations qu’elles-mêmes avaient recueillies.
Déroulement de la recherche
18Notre RAF s’inscrit dans le courant de la recherche-action et est organisée selon le modèle de Dolbec et Clément (2004) qui comporte six étapes : 1) point de départ, 2) clarification de la situation, 3) planification de l’action, 4) action, 5) évaluation, 6) partage du savoir généré. Notons que le volet formation est inclus dans les étapes 1 à 3. Le déroulement selon les deux groupes de participantes est maintenant présenté en précisant les liens avec le modèle de Dolbec et Clément (2004).
19An 1 de la recherche. À l’automne 2013, nous avons formalisé le déroulement de la recherche avec les quatre enseignantes (étape 1 du modèle de Dolbec et Clément). Nous avons fourni six ordinateurs portatifs à chacune des classes, avec tout l’équipement nécessaire pour filmer les activités. Nous avons ensuite identifié, d’une part, les insatisfactions exprimées par les enseignantes quant à leurs pratiques (étape 2) : malaise à enseigner et à évaluer l’oral, pratiques intuitives insatisfaisantes et non appuyées par la recherche, matériel didactique plus ou moins adéquat, notation plutôt subjective des prises de parole, méconnaissance à propos du fonctionnement de la compréhension orale. D’autre part, nous avons identifié avec elles leurs besoins de formation afin de renouveler leurs pratiques : circonscrire l’oral (production et compréhension), mieux comprendre les documents ministériels en oral, connaitre un modèle didactique de l’oral, améliorer l’évaluation de l’oral, approfondir la connaissance des objets de l’oral et élaborer des projets selon certains genres sous forme de SAÉ.
20Nous avons alors amorcé la formation à l’an 1 – avec les enseignantes GE seulement – et choisi avec elles le genre oral à travailler, soit le débat farfelu6, et nous les avons formées à la didactique de l’oral et à son évaluation. Le prétest (production initiale), soit les premiers débats farfelus réalisés sans formation préalable de notre part, a été filmé dans chaque classe (étape 2). À l’hiver 2014, un travail spécifique sur le genre « débat farfelu » a été fait avec les enseignantes GE afin qu’elles s’approprient ce genre. Le modèle didactique et les outils d’évaluation ont été adaptés sous forme de SAÉ (étape 3). Au printemps 2014, les enseignantes des GE ont expérimenté la SAÉ et réalisé un posttest filmé, soit les débats farfelus faits par les élèves et l’enseignement par ateliers de différents objets choisis de l’oral (étape 4).
21Parallèlement, les enseignantes des GT ont enseigné l’oral à leur manière et filmé elles aussi un prétest et un posttest (genre publicité GT5 et genre capsules d’informations GT6), ce qui a permis de collecter des données comparatives pour voir l’effet du dispositif retenu sur l’apprentissage des élèves (étape 5). En effet, à la fin de la collecte de données de l’an 1, nous avons comparé les résultats entre les prétests et les posttests des GE afin de voir s’il y avait une amélioration de la compétence à communiquer oralement des élèves. Nous avons fait de même avec les résultats des GT, ce qui nous a permis d’analyser les effets du dispositif didactique comparativement à l’enseignement de l’oral habituel fait par les enseignantes des GT.
22An 2 de la recherche. À l’an 2, soit à l’automne 2014, les enseignantes des GT ont reçu la même formation en oral que celles des GE de l’an 1 puisqu’elles avaient fait part des mêmes préoccupations et besoins de formation. Elles ont cependant choisi le genre oral « critique cinématographique ». Elles ont filmé la production initiale des élèves (le prétest), reçu ensuite la formation en enseignement et en évaluation de l’oral et développé une SAÉ sur ce genre (étapes 2 et 3). Elles ont expérimenté cette SAÉ en mars 2015 (étape 4). Parallèlement, l’enseignante GE6 a planifié une nouvelle SAÉ, sur le débat académique7, puisqu’elle recevait les élèves de l’enseignante du GE5 de l’an 1 qui avaient donc déjà fait la SAÉ sur le débat farfelu l’année précédente. Toutefois, même si l’enseignante GE6 a planifié une nouvelle SAÉ, celle-ci portait sur un genre similaire à l’an 1 et permettait d’aller plus loin dans l’enseignement de l’oral et du débat avec des élèves déjà connus à l’an 1 de la recherche. À la fin de l’an 2, nous avons encore une fois comparé les résultats entre les prétests et les posttests de chaque groupe afin de voir s’il y avait eu amélioration de la compétence à communiquer oralement des élèves.
Situations d’apprentissage et d’évaluation (SAÉ)
23Le modèle didactique de Lafontaine (2001, 2011) a été opérationnalisé sous forme de SAÉ tel qu’exigé par les prescriptions ministérielles (MÉQ, 2001). Nous avons utilisé le gabarit de SAÉ de Garnier et Lafontaine (2012) validé dans une recherche antérieure. Une SAÉ propose trois phases : 1) préparation (mise en situation, activation des connaissances antérieures des élèves, objectifs du projet, production attendue), 2) réalisation (activités d’apprentissage à réaliser selon les objectifs de la SAÉ et accompagnement fait par l’enseignante, évaluations en cours d’apprentissage et en fin de projet) et 3) intégration (synthèse des apprentissages des élèves et transfert de leurs apprentissages).
24Le tableau 3 décrit ces SAÉ qui intègrent le modèle didactique. De plus, afin d’illustrer les étapes de l’atelier formatif et de donner un exemple concret d’un enseignement d’un objet de l’oral, l’atelier formatif sur la reformulation mis en œuvre par les enseignantes des GE5-6 de l’an 1 figure en annexe.
Tableau 3 : SAÉ en oral selon le modèle didactique de Lafontaine (2001, 2011)


Résultats de la recherche 8
An 1
25À la suite de l’évaluation, par un chercheur et un professionnel de recherche, de toutes les prises de parole des élèves de l’an 1, avant et après la mise en œuvre des SAÉ, la moyenne des résultats de tous les critères d’évaluation (voir tableau 2) pour chacun des groupes a été calculée. Cela signifie que les objets de l’oral enseignés et d’autres non enseignés, mais en lien avec le genre mis en pratique, ont été évalués. La figure 2 présente la moyenne de chacun des groupes au prétest et au posttest pour tous les critères d’évaluation (objets de l’oral).
Figure 2 : Résultats GT-GE an 1 (publicité [GT5], capsule d’information [GT6], débat farfelu [GE5 et GE6])

26En ce qui concerne les GT, cette figure permet de montrer qu’il y a une légère baisse pour le GT de 5e année (GT5). Pour ce qui est du GT de 6e année (GT6), il y a peu d’écart entre le prétest et le posttest. Par contre, en ce qui concerne les deux GE, on observe une progression qui permet de supposer une amélioration de la compétence à l’oral des élèves. Des tests t9 montrent que les différences entre les résultats du prétest et du posttest ne sont pas toutes significatives. En effet, la différence n’est pas significative entre le prétest et le posttest du GT5, du GT6 et du GE5. Cependant, il y a une différence significative entre les résultats des élèves au prétest et au posttest du GE6 (p = 0,000031211). La différence entre les résultats au prétest et au posttest est de 0,516 et elle est statistiquement significative. Selon nous, cette amélioration pourrait peut-être s’expliquer par la mise en pratique du modèle didactique de production orale comme démarche, l’enseignement des objets de l’oral à l’aide des ateliers formatifs en six étapes et l’évaluation par les pairs.
27Dans les GT, rappelons que les enseignantes ont enseigné l’oral à leur façon selon ce qu’elles croyaient le plus efficace pour permettre le développement de la compétence à l’oral de leurs élèves. Les résultats obtenus dans ces deux groupes semblent indiquer que leur façon d’enseigner l’oral ne permet pas une amélioration de la compétence à l’oral des élèves. Les résultats des élèves sont semblables au prétest et au posttest.
An 2
28Rappelons que, à l’an 2, l’enseignante du GE6 a modifié sa SAÉ sur le débat, car ses élèves, issus du GE5, avaient déjà travaillé ce genre, sous forme d’un débat farfelu, lors de l’expérimentation à l’an 110. Les enseignantes des GT (GT5A et GT5B), elles, ont donc reçu la formation en oral et conçu ensuite leur SAÉ qu’elles ont mis en pratique pour la première fois. La figure 3 présente la moyenne de chacun des groupes en ce qui concerne le prétest et le posttest des élèves.
Figure 3 : Résultats GT-GE an 2 (critique cinématographique [GT5A et GT5B], débat académique [GE6])

29D’emblée, nous devons préciser que les résultats de l’an 2 soulèvent des questions qui interrogent notre recherche. En effet, concernant les deux GT, malgré un progrès des élèves, il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les résultats au prétest et au posttest. Par conséquent, il n’est pas possible d’affirmer que la progression des élèves à l’oral résulte de la mise en place du dispositif contrairement à ce que nous supposions à l’an 1.
30Pour le GE6, les résultats montrent une légère baisse entre le prétest et le posttest qui peut s’expliquer par différents facteurs. Tout d’abord, les élèves de ce groupe sont ceux de l’enseignante du GE5 de l’an 1 et avaient déjà fait la SAÉ sur le débat farfelu. Ils étaient fort intéressés à travailler un autre type de débat mais, lors de la production initiale, les besoins qui ont émergé étaient des objets plus complexes comme l’argumentation et les marqueurs de relation à l’oral. Des ateliers ont donc été développés pour les travailler. Cependant, l’argumentation occupe une place très restreinte dans le programme d’études du primaire au Québec et n’est, en général, guère travaillée dans les classes du primaire (Nolin, 2013). Comme il s’agit d’un apprentissage complexe (Golder, 1996), il semble par conséquent possible que les élèves n’aient pas pu s’améliorer grandement puisque la SAÉ a été travaillée sur une période de temps restreinte. À notre avis, il est difficile pour des élèves de 11 et 12 ans, notamment de milieu défavorisé comme dans le cas de l’école du GE6, de développer suffisamment leur compétence argumentative en quelques séances d’enseignement.
31Le thème choisi peut également avoir contribué à cette diminution entre le prétest et le posttest. Dans cette recherche, les enseignantes étaient libres de choisir des thèmes qu’elles estimaient intéressants et pertinents pour les élèves. L’enseignante GE6 a choisi avec soin la thématique – la consommation responsable –, en lien avec les intérêts de ses élèves, et elle a fait une mise en situation qui a éveillé leur curiosité et leur motivation à travailler ce sujet (écoute d’un documentaire et discussion en grand groupe), mais il s’est avéré que plusieurs sous-thèmes de la consommation responsable étaient trop éloignés du quotidien des élèves. Par exemple, le fait de manger des aliments biologiques ou non, d’acheter des vêtements neufs ou usagés, de consommer des produits locaux ou importés ne correspond pas à leur réalité, en particulier pour les familles qui ne disposent pas de ressources financières suffisantes. Il était donc difficile pour les élèves de trouver des arguments qui avaient du sens pour eux lorsqu’ils faisaient leur recherche d’informations. Un thème plus inclusif s’adressant aux élèves de tous les milieux, comme l’environnement, leur aurait peut-être permis de s’investir davantage et de trouver plus d’arguments. Par ailleurs, le documentaire présenté lors de la mise en situation provenait de la France, ce qui a eu pour conséquence que le vocabulaire utilisé (par exemple « fringues ») pour parler de consommation responsable de vêtements ainsi que l’accent étaient difficiles à comprendre pour des élèves provenant d’un milieu plutôt homogène, peu ou pas exposé à différentes variétés du français.
32Enfin, un autre élément qui pourrait avoir eu un effet sur le résultat du GE6 à l’an 2 est le fait que l’enseignante avait formé une équipe de petits parleurs (Doré, 2012 ; Florin, 1985), soit des élèves qui parlent peu en contexte scolaire, par timidité, anxiété ou difficulté langagière. Ces élèves ont été regroupés dans la même équipe de travail, afin de les encourager à prendre la parole. Cette démarche s’est révélée fructueuse : le fait de regrouper les petits parleurs a favorisé leur engagement et les ateliers formatifs leur ont permis de développer leur confiance et de s’exercer avant la production finale. Toutefois, ces élèves ont moins suivi la structure du débat enseignée, ont plus hésité et ont moins argumenté que les autres élèves de la classe lors de la production finale, ce qui a occasionné de moins bons résultats à l’évaluation finale. Nous avons pu constater, lorsqu’il y a constitution d’une équipe de petits parleurs, que la présence de l’enseignante est d’une grande nécessité pour guider les élèves et étayer leur parole. Lors de l’expérimentation, l’enseignante n’a pas été en mesure d’offrir suffisamment de soutien à ces élèves. Néanmoins, faire partie d’une équipe de petits parleurs semble avoir été une expérience positive pour ces élèves. Ils ont pu progresser, malgré qu’ils soient restés les plus faibles du groupe.
Discussion
33Actuellement, malgré le fait que certaines données ne sont pas statistiquement significatives, nos observations nous amènent à penser que la mise en place du dispositif pourrait aider les élèves à améliorer leurs compétences à communiquer oralement, d’où la nécessité de poursuivre la recherche pour une troisième année et de s’intéresser plus particulièrement aux objets enseignés à l’aide du dispositif. À ce moment-ci de la recherche, il est difficile de départager précisément l’effet de l’application du modèle didactique, des ateliers formatifs et de l’évaluation par les pairs, qui inclut l’autoévaluation, sur la compétence des élèves à communiquer oralement. Il s’agit donc d’une limite de cette recherche.
34D’autres limites nous semblent également présentes. Il s’avère difficile de savoir si les objets enseignés étaient adaptés au développement des élèves et si les attentes étaient réalistes étant donné le manque de données de recherche sur les capacités des élèves à l’oral (Dolz et Schneuwly, 1998 ; Dumais, 2014). De plus, il est complexe de déterminer l’effet du milieu sur les résultats obtenus par les élèves. Il serait pertinent de refaire les mêmes SAÉ dans des milieux différents afin de pouvoir comparer les résultats obtenus. Également, le fait que les mêmes élèves (GE5 an 1 et GE6 an 2) aient vécu pendant deux ans un travail sur un genre similaire (le débat) et qu’il n’y ait pas eu d’amélioration significative nous interroge sur le transfert des apprentissages, ici pour un genre similaire dans le contexte scolaire (débat farfelu et débat académique), mais aussi, plus largement, dans le quotidien des élèves.
35Malgré les limités évoquées, certains résultats de la recherche nous permettent de croire qu’il y a eu un renouvèlement des pratiques des enseignantes à la suite de ces deux années d’expérimentation. En effet, les questionnaires, les entrevues et le journal de bord des enseignantes font état de ce renouvèlement. Les enseignantes affirment que leurs pratiques ont évolué : elles travaillent désormais différemment les objets de l’oral. L’enseignante du GE6 affirme : « Je me rends compte que j’enseignais mal, sinon peu, l’oral [avant le projet de recherche] et que c’était difficile pour eux [les élèves] de s’améliorer. » L’enseignante du GE5 se sent plus confiante maintenant : « Je dirais qu’avant, je ne savais pas sur quel pied danser […] aujourd’hui, mon enseignement est plus teinté des objets de l’oral. » Les changements qu’elles ont effectués dans leur enseignement et leur évaluation de l’oral sont jugés positifs, même si cela a pris beaucoup de leur temps au départ. Selon les enseignantes, il y a eu des essoufflements, mais le projet a été gagnant et la SAÉ les a motivés elles et leurs élèves. Pour ces enseignantes, les différents éléments appris lors des formations sur l’oral sont utiles bien que ceux reliés à la compréhension aient été plus difficiles à mettre en place, car elles ne sont pas habituées à travailler la compréhension orale avec les élèves de cette façon. Pour l’enseignante du GT5B, cela reste à développer : « J’aimerais l’exploiter davantage l’année prochaine. C’est encore nébuleux. » Les observations des chercheurs en classe et l’analyse des pratiques des enseignantes et de leurs outils pédagogiques vont dans le même sens que les propos des enseignantes. Il a aussi été possible d’observer que les enseignantes des groupes GT évaluent maintenant seulement ce qu’elles ont enseigné. Enfin, nous avons noté que les quatre enseignantes laissent une plus grande place aux élèves dans les apprentissages concernant l’oral. Les élèves prennent davantage la parole en classe, notamment lors des ateliers formatifs : « C’est quelque chose que j’aime bien pratiquer, pratiquer mes exigences de l’oral sous forme d’ateliers. Donc, ça permet aux enfants de s’exprimer. » (GT5B)
36Il a aussi été possible de voir un plus grand engagement de la part des enseignantes au fur et à mesure que la recherche avançait : « L’oral bien… ça prend une place plus importante dans mon enseignement. C’est quelque chose qu’on faisait [avant] un petit peu sur le bord de la table. » (GT5A) Elles se questionnent davantage et sont plus motivées : « Je revenais chez moi drainée cognitivement parce je me suis questionnée. » (GE6) Les enseignantes semblent avoir davantage confiance en leur compétence : « L’année prochaine ça va être mon an 3, mais après quand on sera plus ensemble, je vais être capable de me bâtir quelque chose. » (GT5B)
Conclusion
37Il est impossible de généraliser les résultats de cette recherche étant donné le nombre limité d’enseignantes et d’élèves concernés. D’autres recherches seront nécessaires au 3e cycle du primaire et aux autres cycles. Cependant, les résultats de ces deux années nous laissent penser que l’accompagnement fait auprès des enseignantes, la collaboration chercheurs-enseignantes, notamment pour l’élaboration des SAÉ, sur la base du modèle et des outils retenus, l’enseignement que les élèves ont reçu et la place accordée à l’évaluation par les pairs pourraient favoriser le développement de la compétence à communiquer oralement des élèves et le renouvèlement des pratiques des enseignantes. La poursuite de cette recherche permettra de préciser ces premiers résultats. Les enseignantes auront la possibilité, lors de la 3e année, de mettre de nouveau en pratique une SAÉ et d’être accompagnées par l’équipe de recherche. Cela aidera à mieux comprendre les effets des différents dispositifs mis en place et certaines limites évoquées précédemment. Il sera aussi possible d’observer la transformation des pratiques des enseignantes sur une période de trois ans. Au terme du projet, les enseignantes participantes seront encouragées à devenir des personnes-ressources en oral dans leurs milieux en offrant des formations à leurs collègues et à ceux d’autres commissions scolaires. Elles participeront donc à l’étape 6 du modèle de Dolbec et Clément (2004) avec les chercheurs, à savoir le partage du savoir généré.
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Annexe
Annexe 1 Atelier formatif sur la reformulation (Dumais et Lafontaine, 2015 : 15)11
Élément déclencheur : À la suite de longues explications (plus complexes qu’à la normale) données oralement sur un travail à effectuer, l’enseignant reformule ses propos sans que cela permette aux élèves de mieux comprendre l’information (contrexemple). Par la suite, il reformule de nouveau en faisant en sorte que la reformulation permette de redire de façon simple et efficace les explications précédemment dites (exemple). Si possible, l’enseignant enregistre sa prise de parole afin de la faire écouter de nouveau aux élèves à l’étape suivante.
État des connaissances : S’il a été possible pour l’enseignant de s’enregistrer, il fait de nouveau entendre les deux reformulations. Il demande aux élèves laquelle a permis de mieux comprendre le propos initial (explications sur un travail) et pourquoi (points forts et points faibles des deux reformulations à nommer). Par la suite, l’enseignant demande aux élèves d’identifier l’objet (la reformulation). Il les questionne sur les conséquences de la reformulation sur la compréhension d’un message et sur son utilité.
Enseignement : À partir des réponses des élèves lors de l’état des connaissances, l’enseignant explique ce qu’est la reformulation. Il invite les élèves à prendre en note les explications afin qu’ils puissent garder des traces écrites. Dans les mots des élèves, l’enseignant définit la reformulation (Quoi ?). Il explique comment reformuler (Comment ?) et pour quelles raisons il peut être important de reformuler (Pourquoi ?). Il demande également aux élèves quand il est nécessaire de reformuler (Quand ?). Il termine l’enseignement en mettant en pratique différentes reformulations (modelage).
Mise en pratique : L’enseignant explique aux élèves qu’ils doivent écouter des messages téléphoniques qui seront à reformuler. Il fait la lecture au groupe de trois messages téléphoniques. Il peut aussi enregistrer des messages pour rendre l’activité encore plus véridique. Pendant l’écoute, sur la base de ce qui a été enseigné, les élèves prennent en note les éléments qu’ils jugent importants de prendre en compte pour une reformulation. Par la suite, l’enseignant forme des équipes de trois élèves afin qu’ils comparent les éléments qu’ils ont pris en note pour reformuler les messages téléphoniques. Un représentant par équipe doit reformuler l’un des trois messages entendus. Les élèves mettent en pratique les apprentissages faits précédemment.
Retour en grand groupe : Des exemples de reformulation en lien avec les trois messages téléphoniques sont présentés par les élèves. Il est important de questionner ces derniers sur les forces observées ainsi que sur les difficultés rencontrées au cours de l’activité. C’est l’occasion pour l’enseignant de revenir sur des éléments moins bien compris par les élèves. Si cela est nécessaire, l’enseignant peut faire plus d’une mise en pratique pour s’assurer de la compréhension des élèves. Il pourra réinvestir cet objet de l’oral dans une multitude de situations en classe et pourra faire des liens avec le genre travaillé si c’est le cas.
Activité métacognitive : L’enseignant peut faire remplir aux élèves une fiche réflexive ou leur demander de répondre à des questions dans un journal de bord pour leur permettre de réfléchir aux apprentissages effectués. Il peut également construire avec eux une carte conceptuelle qui reprend l’ensemble des apprentissages en lien avec la reformulation.
Notes de bas de page
1 Ces problèmes ont été identifiés avec les enseignantes lors d’une rencontre préparatoire à la recherche en septembre 2013. Ils sont décrits dans la section méthodologie.
2 L’avis s’intitule Rehausser la maitrise du français pour raffermir la cohésion sociale et favoriser la réussite scolaire.
3 Lorsqu’il y a modelage, l’objet de l’oral est mis en pratique par l’enseignant ou l’élève qui réfléchit à voix haute en plus de commenter les actions qu’il fait. Les élèves peuvent par la suite faire part de ce qu’ils ont observé et compris du modelage.
4 GE5 et GT5 : 5e année primaire, élèves de 10-11 ans ; GE6 et GT6 : 6e année, élèves de 11-12 ans.
5 L’absence de certains critères d’évaluation d’un genre à l’autre peut s’expliquer entre autres par le fait que le critère d’évaluation n’était pas pertinent au genre en question (par exemple le critère Écoute attentive selon la formule retenue pour les genres publicité et capsule d’information) ou encore que l’évaluation n’a pas été possible en raison de contraintes techniques (par exemple, le regard n’a pas pu être évalué dans le genre débat farfelu, car les enregistrements ne permettaient pas de bien voir le regard des élèves).
6 Le débat farfelu présente des thèmes loufoques (manger une pizza carrée ou ronde par exemple) et facilement accessibles aux élèves afin de leur permettre de développer des stratégies argumentatives. Les élèves sont en équipes de six, trois par position. Il y a un animateur qui présente le thème et les participants, et qui gère les tours de parole. La structure est la suivante : reformulation de l’argument de l’adversaire, réfutation et nouvelle idée. La durée totale du débat est d’une dizaine de minutes, chaque élève ayant ainsi deux ou trois tours de parole (Lafontaine, 2011).
7 Le débat académique présente un sujet d’actualité pour lequel il y a deux positions : pour ou contre. Les élèves, en équipes de six, sont divisés en deux camps. Il y a un animateur qui présente les participants, gère les tours de parole, présente le sujet et fait la clôture du débat. La durée est d’une dizaine de minutes, ce qui permet à chaque élève d’avoir deux tours de parole. Les élèves s’expriment à tour de rôle, un camp à la fois. La structure est la suivante : reformulation de l’argument de l’adversaire, réfutation et nouvelle idée. (Lafontaine, 2011)
8 Nous aimerions remercier Raymond Nolin et Kim Chaput, assistants de recherche, pour leur précieuse aide dans l’organisation et l’analyse de nos données.
9 Selon Gaudreau (2011), le test t est un procédé statistique d’analyse paramétrique qui sert à vérifier si une différence existe entre la moyenne de deux groupes. Dans ce cas-ci, il s’agit de la moyenne entre le prétest et le posttest de chacun des groupes. En recherche quantitative, il est généralement accepté d’utiliser un seuil de signification égal à 5 % (p = 0,05) (Nolin, 2013). Il s’agit de conventions arbitraires développées au cours des années par les statisticiens (Howell, 1998).
10 L’enseignante du GE5 ayant changé de cycle d’enseignement, nous ne rapportons que les résultats de l’expérimentation de l’enseignante du GE6 pour l’an 2.
11 Cet atelier formatif a été publié pour ainsi dire tel quel dans le numéro 8 de la revue L’Éducateur en 2015.
Auteurs
Université du Québec à Trois-Rivières, Département des sciences de l’éducation
Université du Québec en Outaouais, Département des sciences de l’éducation, CRIFPE
Université du Québec en Outaouais, Département des sciences de l’éducation
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L’évaluation en classe de français, outil didactique et politique
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L’oral aujourd’hui : perspectives didactiques
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Contextes institutionnels, réformes et recherches en didactique du français
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Approches didactiques de la littérature
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