Comprendre la progression en lecture par la forme scolaire : une comparaison Québec-Suisse romande1
p. 19-50
Texte intégral
La notion de progression, en ce qu’elle touche à l’organisation temporelle des enseignements et à l’expérience du temps, constitutive des apprentissages, est centrale dans toute réflexion didactique. (Nonnon, 2010)
1Nonnon le rappelait dans l’article de 2010 cité en exergue : la progression implique de sélectionner, hiérarchiser et distribuer des objets d’enseignement selon le cheminement d’une certaine cohérence. Sélectionner : quelles compétences et quels savoirs textuels, littéraires, cognitifs, métacognitifs enseigner ? Quelles tâches et activités privilégier ? Hiérarchiser : à partir de quelles configurations disciplinaires, transversales, interdisciplinaires ou pédagogiques ? Distribuer : dans quel ordre, selon quel seuil d’acquisition, selon quelle modalité de progressivité ? Ces questions sont cruciales tant pour les prescripteurs, pour les concepteurs de manuels que pour les enseignants.
2Les prescripteurs doivent organiser une linéarité temporelle de ce qu’il faut enseigner sur l’ensemble de la scolarité obligatoire et la mettre en discours dans la forme d’un curriculum imprégné des préconstruits sociohistoriques complexes, soutenus par différents modèles, rarement complémentaires, le plus souvent en concurrence. Instructions officielles, programmes, plans d’études, tous ces textes ont été écrits à plusieurs mains et portent en effet les stigmates de compromissions qui témoignent de la cohabitation de notions et concepts divers et parfois contradictoires.
3Aujourd’hui, certains pays francophones, dont la Suisse romande, ont tenté de penser la progression sur la linéarité d’une école obligatoire continue, de 4 ans jusqu’à 16 ans. Tenter de réduire la grande rupture entre les écoles primaire et secondaire, tout en cédant à une solide tradition d’une formation différenciée entre les enseignants de l’école enfantine/maternelle, du primaire et du secondaire, relève de la gageüre. Ce point de rupture est d’ailleurs encore présent au Québec, comme en Belgique, pour les enfants de 12 ans qui terminent leur primaire et font leur entrée au secondaire. Les trois Programmes de formation de l’école québécoise (PFÉQ) pour l’école obligatoire (5-17 ans) sont en effet répartis en deux ordres d’enseignement et cinq cycles (préscolaire-primaire composé de trois cycles – MÉQ, 2001 ; secondaire 1er cycle – MÉQ, 2005 ; secondaire 2e cycle – MÉLS, 2009). En revanche, en Suisse, le seul Plan d’études romand (PER) vaut pour l’ensemble des trois cycles de l’école obligatoire. Il est le produit d’une volonté politique d’assurer la continuité d’une linéarité de 4 à 15 ans et la cohérence d’un texte unique pour l’école obligatoire.
4La notion de progression est aussi centrale pour les enseignants qui veulent planifier une séquence, programmer une suite de séquences sur l’année scolaire, se coordonner avec leurs collègues, même s’ils constatent les décalages entre le prescrit, leur planification et l’« évolution des élèves » (Nonnon, 2010 : 6). Le cadre institutionnel et les réalités du terrain contraignent leur travail. Dans quelle mesure ? En fonction des résistances de quels fondamentaux pédagogiques et didactiques ? Quelles cohérences syncrétiques les enseignants élaborent-ils dans leur confrontation aux ressources et outils de la profession, forgés par d’autres mains et dans d’autres logiques (Goigoux, 2007) ? La notion de progression, que Chiss (2000) et d’autres après lui (Chartrand, 2008 ; Nonnon, 2010 ; Thévenaz, 2014) considèrent comme spécifiquement didactique, soulève ainsi une réflexion sous l’angle de la forme scolaire, à plusieurs niveaux : l’institution scolaire et les cohérences curriculaires, prises dans les préconstruits sociohistoriques et les contraintes de l’édition scolaire ; les pratiques enseignantes et les difficultés de mettre en œuvre les prescriptions dans une organisation curriculaire qui s’emboite sur plusieurs cycles et ordres d’enseignement ; les élèves eux-mêmes, leur activité dans les tâches, les exigences des évaluations, etc.
5Les réformes des années 1970 et 1980 ont modifié profondément les cohérences de l’enseignement du français, mais se sont concrétisées différemment selon les pays, les niveaux et les cycles. Par exemple, dans le domaine de la production d’écrits, au canton de Genève comme au Québec, la diversité des textes a pu se développer dans la cohérence du modèle communicationnel tandis que le texte narratif s’est imposé massivement dans la continuité des modèles représentationalistes (Thévenaz-Christen, 2014). Logique de juxtaposition ou d’articulation ? Dans cette cohabitation des modèles anciens et réformés, comment la forme scolaire détermine-t-elle désormais la progression de l’enseignement de la lecture au Québec et en Suisse romande ?
6Nous nous inscrivons dans le sillon des recherches récentes qui observent la progression des lecteurs sous les effets du contexte scolaire (Thévenaz-Christen, 2014). En dégageant des dimensions de la forme scolaire, nous souhaitons comprendre comment les élèves-lecteurs sont socialement construits, ce qui nous permettrait d’éventuellement réfléchir aux manières d’agir sur ces déterminismes. Notre projet est double : 1) méthodologique d’abord, en décrivant par la comparaison les dimensions constitutives de la lecture et de ses transformations progressives présentes dans la forme scolaire, orientée en fonction des niveaux scolaires et des contextes institutionnels suisse et québécois ; 2) théorique ensuite, en reconstituant les modèles didactiques de l’enseignement de la lecture, dans les programmes et plans d’études, ainsi que dans les manuels et moyens d’enseignement. Pour observer les logiques de progression, nous nous centrons sur deux variables : les ordres ou niveaux de la scolarité obligatoire ainsi que les fins de cycles (transition).
1. Quelle forme scolaire étudier pour comprendre les dimensions de la disciplinarisation ?
7Pour comprendre les effets de l’école sur les élèves, pour réfléchir aux déterminismes de la formation citoyenne, une réflexion sur la « forme scolaire » a initialement été soulevée par les philosophes politiques de tradition marxiste, Balibar et Macherey (1974). Puis avant d’être repris en didactique dans une réflexion tournée vers les déterminismes de la disciplinarisation, ce concept est apparu dans les travaux de sociologie de l’éducation (Lahire, 2008 ; Vincent, 1994) pour comprendre comment, dans l’institution scolaire, « se nouent des formes de relations sociales déterminées et se jouent des rapports singuliers au savoir et au pouvoir » (Lahire, 2008 : 229). Car pour les sociologues, la forme scolaire « est non seulement constitutive d’une forme de vie : elle a tendance à la coloniser progressivement » (Vincent, Lahire et Thin, 1994 : 40). Dès lors, pour les didacticiens, le concept de forme scolaire permet de mieux comprendre la relation entre l’enseignant et les élèves, les rapports au pouvoir, mais il offre en outre un espace d’analyse du rapport spécifique au savoir, angle privilégié dans la présente contribution, soit tout ce qui renvoie aux contenus dans les programmes, les leçons et exercices, les manuels, les tâches et activités proposées aux élèves ainsi que les paradigmes dans lesquels les objets d’enseignement se sont construits et qui fondent la discipline français qui s’est développée depuis le XVIIe siècle (Chervel, 2006).
8Alors que, pour les sociologues, la forme scolaire serait une forme de soumission au pouvoir, les didacticiens la conçoivent plutôt comme une forme qui détermine la disciplinarisation des élèves et qui oriente le développement de la discipline scolaire. Thévenaz-Christen (2008) a d’ailleurs repris le concept de forme scolaire pour étudier comment, dès l’école enfantine, on observe des traces d’un enseignement disciplinarisé. Ses travaux ont montré qu’on ne peut ignorer la question de la forme scolaire dans les recherches centrées sur la progression de l’objet d’enseignement au fil du cursus scolaire : « Cette forme scolaire semble émerger et évoluer au fur et à mesure que l’élève progresse d’un cycle d’enseignement à un autre, selon une disciplinarisation progressive, marquée par des continuités mais aussi des ruptures » (p. 320). Cette forme scolaire crée un horizon d’attente, soit des attendus spécifiquement scolaires, et scolarisant, notamment en marquant la manière de conceptualiser l’objet d’enseignement à partir de la façon dont il est représenté (par ex. dans les manuels, dans la formation initiale des enseignants, dans les grilles d’évaluation), de poser des questions ou d’y répondre, de développer des habiletés pour réussir les épreuves certificatives, de lire un texte selon la discipline, etc. Les élèves-lecteurs de la classe de français se développent d’emblée dans cette forme scolaire, car celle-ci « contraint ou imprègne, souvent à leur insu, les fonctionnements des systèmes et des pratiques didactiques, voire des théories qui s’efforcent d’en rendre compte » (Reuter, 2010 : 111).
9Mais quelles seraient les dimensions de la forme scolaire empiriquement observables pour mener une telle analyse ? De la même équipe que Thévenaz-Christen (GRAFE), Dolz (2008) a théorisé la forme scolaire pour la didactique en dégageant trois principales caractéristiques à observer : 1° l’organisation des savoirs dans la discipline français (p. ex. paradigme, programmes d’études) ; 2° l’organisation et la structure de l’enseignement en fonction de classes d’âge (p. ex. contenus/objet d’enseignement dans les manuels, exercices, supports d’enseignement, épreuves certificatives, les leçons, observations, échanges par questions-réponses, exercices, types d’évaluation et outils d’évaluation, etc.) ; 3° la mise en scène des situations d’enseignement (séquences d’enseignement, objets enseignés, activités d’apprentissage, réactions des élèves, régulation de l’enseignant, etc.). À ces trois dimensions, et à l’instar de Thévenaz-Christen (2008 : 311), nous incluons 4° le (méta) langage utilisé, par exemple « donner accès à une certaine langue littéraire, distincte de la langue familière, relève d’une visée à la fois disciplinante et disciplinarisée ». De plus, nous ajoutons 5° l’espace-temps didactique (p. ex. disposition de la classe, temps de travail sur un objet) et le cadre social (filières de formation, mesures adaptatives, etc.).
2. Méthodologie : dimensions opératoires pour analyser la forme scolaire
10Le tableau ci-dessous présente les dimensions de la forme scolaire observables empiriquement.
Organisation des savoirs dans la discipline | Espace-temps didactique et cadre social | Organisation et structure de l’enseignement | Mise en scène des situations d’enseignement | Langage utilisé |
Savoirs savants, pratiques sociales et transposition externe (paradigmes, courants théoriques, etc.) | Disposition de la classe dans l’espace, temps d’enseignement, milieu, type d’établissement scolaire, etc. | Supports et leur contenu (manuels, exercices, évaluation, etc.) | Dispositifs didactiques (séquences d’enseignement, leçons, etc.), leur découpage et leur ordonnancement | Métalangage disciplinaire |
Savoirs à enseigner et transposition interne (programmes, progression des apprentissages, finalités éducatives, etc.) | Âge des élèves, filière d’enseignement (classes ordinaires, programme d’éducation internationale2, programme sports-études, etc.), mesures adaptatives, etc. | Formes sociales de travail (exposé magistral, travail individuel ou de groupe, cours dialogué, etc.) | Gestes des enseignants (régulation, institutionnalisation, création de la mémoire didactique), genres d’activités scolaires (résumé, lecture à haute voix, explication de texte, travail sur la compréhension, etc.) | Métalangage scolaire (ex. : issu des |
Rapport aux savoirs des enseignants, formation des enseignants | Contrat didactique | Objet enseigné |
Tableau 1. Dimensions de la forme scolaire observables empiriquement
11Dans le tableau 1, les cases en gris sont les dimensions sur lesquelles nous avons choisi d’orienter nos analyses pour cette contribution. En choisissant de nous concentrer sur trois dimensions (l’âge des élèves selon leur niveau scolaire, les programmes et les manuels destinés aux élèves), nous avons pu décrire les contenus privilégiés pour l’enseignement de la lecture, leur hiérarchisation et leur organisation, et esquisser la manière dont le développement des lecteurs est conçu dans la forme scolaire. Notre corpus est composé de données provenant de deux pays francophones (Québec et Suisse romande), porte sur l’école obligatoire (primaire et secondaire) et, pour l’analyse des manuels, est centré sur trois années scolaires couvrant la fin de cycles du primaire et du secondaire obligatoire. Nous avons voulu comparer la forme scolaire de ces deux pays pour au moins trois raisons : les programmes nationaux et plans d’études s’appuient sur une approche par compétence dans les deux cas ; il a été observé dans les pratiques d’enseignement de la lecture de ces deux pays que des traces de sédimentation du modèle représentationaliste apparaissent malgré que le paradigme communicationnel soit celui qui domine dans les documents officiels (Émery-Bruneau, 2014 ; Thévenaz-Christen, 2014) ; enfin, il s’agit de deux pays dont la tradition de l’enseignement de la lecture et, plus largement, de la discipline français, s’inscrit en périphérie de la tradition française. Le tableau 2 suivant présente les données analysées.

Tableau 2. Données analysées3
12Une précision s’impose. Le manuel est une unité matérielle et textuelle, brochée ou cartonnée, couvrant ou non l’ensemble des matières de la discipline. Il se distingue des moyens d’enseignement qui peuvent comprendre un manuel de l’élève, un guide pédagogique pour l’enseignant, un document de référence (mémento grammatical, manuel de conjugaison), des fiches reproductibles, etc. Dans tous les cas, ces outils supposent une grande autonomie lors de leur utilisation en classe : 1° la planification de la progression appartient à l’enseignant en fonction du contexte de sa classe ; 2° cette progression n’est concevable que s’il a à sa disposition des outils d’analyse des capacités des élèves ; 3° plus globalement, il lui faut une vue d’ensemble du curriculum au risque d’atomiser la progression et de perdre le sens des enseignements ; 4° à ce titre, le moyen d’enseignement pose les notions fondamentales qui seront reprises et développées par la suite. Ici, nous nous tenons aux manuels recommandés et évoquons brièvement les autres ressources à disposition.
13Pour procéder à l’analyse des compétences et des savoirs en lecture prescrits dans les programmes de l’école obligatoire, nous avons observé la structure des programmes selon les ordres et les cycles d’enseignement, la logique de la progression curriculaire entre les cycles et les ordres (compétences, attentes de fin de cycle) et la manière dont les textes sont travaillés en lecture. Du côté de l’analyse des manuels, nous nous sommes concentrés sur les tables des matières et en avons observé l’organisation générale (p. ex. thématique, générique), la présentation des textes (corpus, assemblages, amphitextualité) en lien avec le travail en lecture et les logiques de progressions par la transition en fin de cycle.
3. Analyse des programmes québécois et du plan d’études suisse romand
14Notre analyse des programmes porte sur la logique de sélection, de hiérarchisation et de distribution des textes à enseigner et des compétences à développer en lecture.
3.1. Les programmes québécois
15Les trois Programmes de formation de l’école québécoise (PFÉQ) de l’école obligatoire québécoise (5-17 ans) sont répartis en deux ordres d’enseignement et cinq cycles (préscolaire-primaire composé de trois cycles4 – MÉQ, 2001 ; secondaire 1er cycle5 – MÉQ, 2003 ; secondaire 2e cycle6 – MÉLS, 2009). Dans ces programmes des années 2000 sont apparus pour la première fois les cycles, 1er, 2e et 3e pour le primaire ; 1er et 2e pour le secondaire. Cette organisation par cycle est apparue dans un souci de progression (entre les années, les cycles et les ordres) et d’évaluation7.
3.1.1. Le programme du primaire québécois
16Dans le programme du primaire, deux des quatre compétences du domaine « français langue d’enseignement » portent sur la lecture. La première, « Lire des textes variés », repose sur deux finalités, comprendre et réagir, en privilégiant le recours à des « stratégies ». Dans les « attentes de fin de cycle » (MÉQ, 2001 : 75), des éléments de progression apparaissent. Par exemple, pour comprendre, les élèves du 1er cycle doivent relever les « éléments explicites » du texte alors que les élèves des 2e et 3e cycles doivent en plus relever les « éléments implicites », auxquels s’ajoute au 3e cycle la capacité à comparer « l’information contenue dans plusieurs textes ». Pour réagir, les élèves du 1er cycle passeraient d’une réaction « spontanée essentiellement liée à ses expériences personnelles » à une réaction « aux divers aspects d’un texte […] de façon pertinente et avec précision » au 2e cycle puis, au 3e cycle, ils devraient être finalement en mesure de justifier une « interprétation personnelle » en établissant des « liens avec d’autres textes ». La deuxième compétence, « Apprécier des textes littéraires » (MÉQ, 2001 : 85), privilégie plutôt la lecture esthétique à la lecture stratégique. La finalité repose sur la constitution d’un « bagage culturel » pour témoigner de leurs « connaissances d’œuvres littéraires ». Ces connaissances s’avèreront transférables dans des « activités culturelles » ou de « promotion des œuvres ». À la fin du 1er cycle, les élèves doivent connaitre « quelques œuvres littéraires » et en « parler volontiers » pour alimenter « divers projets », ce qui les amènera à exprimer dans des activités culturelles leurs « gouts, sentiments, émotions et préférences ». À la fin du 2e cycle, ils devraient connaitre un « grand nombre d’œuvres littéraires » et être en mesure de « se prononcer sur leurs qualités et leurs faiblesses ». Ils participeront à de « nombreuses activités culturelles rattachées à ces œuvres », en plus de faire la « promotion d’œuvres de littérature pour la jeunesse et de littérature générale auprès de [leurs] pairs ». Puis, à la fin du 3e cycle, il est attendu que les élèves s’approprient « un répertoire étendu et varié d’œuvres littéraires » pour les « comparer entre elles et établir des liens avec d’autres formes de représentation » artistiques et culturelles, qu’ils soient en mesure de « justifier [leur] appréciation » et qu’ils puissent « transposer » leurs « expériences littéraires dans divers contextes disciplinaires de même que dans les activités culturelles ».
3.1.2. Les programmes du secondaire québécois
17Dans les programmes du secondaire, les deux compétences du primaire se fondent en une seule et la dimension « littéraire » disparait du libellé pour faire place aux « textes variés ». La même compétence est à développer aux deux cycles : « Lire et apprécier des textes variés ». Pour tout le secondaire, les finalités visées sont les mêmes : comprendre, interpréter et apprécier en posant un jugement critique. En termes de progression, les différences entre les cycles sont peu marquées. Au 1er cycle (MÉQ, 2005 : 101), les élèves doivent lire et apprécier « différents genres de textes de complexité moyenne » ou « plus complexes » pour lesquels ils devront adopter des « stratégies appropriées pour surmonter les difficultés lexicales et syntaxiques », soit des aspects qui relèvent davantage du travail sur la langue que sur le contenu des textes. Au 2e cycle (MÉLS, 2009 : 29), on s’attend à ce que les élèves lisent plutôt des « textes consistants » qui « requièrent une certaine profondeur d’analyse ». Dans les deux cycles, on s’attend à ce que les élèves « s’informent à partir des textes courants », « sélectionne l’information » et la « synthétise ». Ils doivent également « découvrir des univers littéraires » afin de se constituer un « répertoire personnalisé » leur permettant d’établir « des liens entre des œuvres », en plus de cerner « les principaux éléments des textes (personnages, lieux, époque, etc.), de reconnaitre « le point de vue du narrateur ou des personnages » ainsi que « le contenu et l’organisation ». Au 1er cycle, les élèves devront fonder leur « interprétation des textes » et leur « réaction »« sur des extraits ou des exemples », aspect qui n’est pas spécifié pour le 2e cycle. Enfin, dans les deux cycles, afin de justifier leur compréhension, interprétation, réaction ou jugement critique, les élèves doivent s’appuyer sur des connaissances « textuelles et linguistiques » ainsi que sur des « repères culturels ».
18De plus, les programmes du secondaire contiennent, pour la première fois dans l’histoire moderne de l’enseignement au secondaire québécois, dans une section intitulée « Connaissances à construire et à mobiliser », une liste des « Notions et concepts de littérature » à enseigner. Au 1er cycle, on prescrit d’enseigner trois notions de littérature : « sujet/univers, type, genre » (MÉQ, 2005 : 130-131). Au 2e cycle, une dizaine de notions et concepts sont recommandés : « littérature, institution littéraire, texte littéraire, genres littéraires narratif, poétique et dramatique, texte de genre narratif, texte de genre poétique et texte de genre dramatique » (MÉLS, 2009 : 146-159). En outre, dans les PFÉQ du secondaire, les enseignants sont tenus de faire lire au moins cinq œuvres intégrales par année. Un corpus spécifique n’est pas imposé, mais on recommande de sélectionner, pour chaque année, au moins trois auteurs différents, au moins trois « univers » différents (nommés « genres » dans la Progression des apprentissages de 2011) et autant d’œuvres québécoises que de la francophonie.
3.1.3. Les genres textuels sélectionnés au primaire au secondaire
19En ce qui concerne le primaire, une liste exhaustive est proposée (92 genres), sans toutefois préciser si ces textes doivent être travaillés en lecture, en écriture ou à l’oral, et sans préciser à quel cycle ils doivent être travaillés. Une progression des genres n’apparait donc pas pour le primaire. Au secondaire, la Progression des apprentissages (MÉLS, 2011) a été publiée pour pallier les flous du PFÉQ entourant la progression (Chartrand, 2008). Elle est organisée autour de sept modes de discours : la description, l’explication, la justification, l’argumentation, la narration, le théâtre et la poésie. « Comme ces modes de discours s’actualisent dans des genres de textes particuliers, une sélection de genres amorce la Progression » (MÉLS, 2011 : 4). Parmi la cinquantaine de genres identifiés, au moins 36 sont spécifiquement sélectionnés pour travailler la lecture. Pour les genres de textes non littéraires, la Progression est organisée de façon à travailler au 1er cycle les genres dans lesquels le mode de mise en discours descriptif est dominant, puis au 2e cycle on met plutôt l’accent sur les modes de mise en discours explicatif et argumentatif. Du côté des textes littéraires, le narratif et le poétique sont travaillés toutes les années, avec des genres qui se rapprochent de la littérature de jeunesse au 1er cycle (ex. : album, bande dessinée, poème ludique, roman d’aventures), et de la littérature classique (ex. : légende, mythe, poème lyrique, théâtre classique) et contemporaine (ex. : roman de science-fiction, chanson engagée) au 2e cycle. Le théâtre est seulement sélectionné pour la 4e secondaire.
3.1.4. Des choix institutionnels déterminant les lecteurs à former à l’école québécoise
20L’analyse de ces documents officiels soulève au moins trois déterminismes pour le développement des lecteurs progressant à l’école québécoise.
1° Former des lecteurs stratégiques capables de comprendre des textes variés
21Pourquoi avoir fait disparaitre, entre le primaire et le secondaire, une compétence portant spécifiquement sur l’appréciation des textes littéraires pour la fondre en une seule compétence visant à lire des « textes variés » ? L’enseignement stratégique étant privilégié par l’insistance mise sur les « stratégies de lecture » au primaire et au secondaire, la lecture littéraire semble reléguée à un second rang. La littérature apparait peu comme un objet d’enseignement à part entière, à l’exception d’une liste de notions et concepts insérée à la fin des PFÉQ du secondaire, car les textes littéraires seraient plutôt utilisés comme des outils pour développer des habiletés en lecture. Dans les documents officiels, on mise donc sur des compétences en littératie pour amener les lecteurs à comprendre des genres variés. Le paradigme communicationnel domine. Serait-ce une orientation prise dans le but de contrer le problème de littératie au Québec (OCDE, 2011) où 52 % des citoyens n’atteignent pas un niveau de littératie supérieur à 3, c’est-à-dire qu’ils n’arrivent pas à lire en vue d’apprendre, de comprendre, d’agir ou d’intervenir en toute autonomie ?
2° Cloisonner le travail sur la langue et sur la littérature
22Dans les PFÉQ du secondaire, une liste de notions et concepts de littérature est présentée : comment propose-t-on de les travailler (objets d’enseignement à articuler aux œuvres lues à enseigner de façon magistrale ? à évaluer ?) et dans quel but (acquérir des connaissances ? développer des compétences en lecture ou en écriture ?) ? Le problème de l’articulation entre le travail sur la littérature et la langue a été souligné à plusieurs reprises dans des recherches récentes (Biao, 2015 ; Bilodeau, 2005 ; Chartrand et Lord, 2013 ; Gauvin-Fiset, 2012), et l’une des raisons de ce cloisonnement pourrait justement être l’absence d’articulation entre ces objets, dans les programmes comme dans les manuels, puisque la logique des apprentissages langagiers n’y est pas montrée de façon compatible avec celle des apprentissages en lecture (Biao, 2015). Une volonté d’articuler langue et littérature a néanmoins été promue dans la Progression des apprentissages (MELS, 2011) au secondaire où un enseignement par les genres est proposé.
3° Absence d’évaluations nationales en lecture après 14 ans : fin des contraintes institutionnelles pour les lecteurs ?
23Trois épreuves nationales évaluent spécifiquement les compétences en lecture : en 4e année du primaire (10 ans), en 6e année du primaire (12 ans) et en 2e secondaire (14 ans). Les compétences en compréhension et en appréciation étant évaluées, c’est donc le savoir-lire fonctionnel des élèves qui est mesuré ; mais pourquoi y a-t-il absence d’évaluation nationale spécifique en lecture au 2e cycle du secondaire ? L’Institution a choisi de se tourner vers les « évaluations maison » conçues par les enseignants et les commissions scolaires plutôt que d’imposer une norme nationale en lecture pour la fin de la scolarité obligatoire, contrairement à ce qui est imposé en écriture (épreuve certificative à la dernière année du secondaire). Le paradigme communicationnel étant privilégié, la sélection ultime des élèves reposerait donc sur leur capacité à produire des discours écrits qui satisfont les critères d’évaluation de l’épreuve uniforme. En outre, dans le PFÉQ du primaire, ce sont les mêmes « critères d’évaluation » qui doivent être utilisés pour les trois cycles, tout comme dans les PFÉQ des 1er et 2e cycles du secondaire qui présentent aussi les mêmes « critères » pour évaluer la compétence en lecture. Si la progression des lecteurs n’est pas évaluée avec des critères adaptés, comment peut-on observer si les élèves progressent dans la discipline ? De fait, du primaire au secondaire, on vise à ce que les élèves développent leur identité de lecteur en vivant des expériences de lecture variées, visant à développer des stratégies de lecture transférables peu importe les genres ; le développement de l’identité littéraire d’un sujet lecteur (Rouxel, 2004), encouragé par nombre de didacticiens qui ont travaillé sur la lecture subjective, laquelle repose sur des visées esthétiques, créatrices, humaines et subjectives, semble relégué au second rang étant donné les visées utilitaristes, communicatives et littératiques qui dominent dans les programmes.
3.2. Le plan d’études romand
24Depuis sa mise en application en septembre 2011, le Plan d’études romand (PER) a donné lieu à suffisamment d’analyses approfondies (Aeby Daghé, 2012 ; Balsiger et al., 2012 ; Thévenaz, Aeby Daghé et Leopoldoff, 2014) pour que l’on se dispense d’en initier de nouvelles. Pour la présente comparaison, nous nous appuierons sur ces analyses et rappellerons leurs traits saillants. Dans cette section, nous décrivons un prescrit polyphonique. Ce texte rédigé à plusieurs mains est aussi le produit du « travail social » de la profession, selon l’expression de Daunay (2015), dans la mesure où des collectifs d’enseignants choisis par les autorités y ont pris part. Ajoutons que le PER s’inscrit dans la continuité d’autres plans d’études romands8. À ce titre, il est fécond de rendre compte des tensions et compromis du nouveau plan d’études.
25Le PER se présente matériellement comme un texte unique qui vaut pour l’ensemble des niveaux de la scolarité obligatoire. Il vise explicitement la continuité des apprentissages sur trois cycles et une modalité de progression spiralaire (reprise et approfondissement). La discipline français y est présentée sous le domaine général « Langues » au pluriel (comme au Québec), domaine que se partagent le Français, l’Allemand et l’Anglais. Le français est considéré depuis le point de vue communicatif comme une langue de scolarité qui « intervient dans toutes les disciplines ». La maitrise de la lecture est associée à celle de l’écriture. Son développement relève de trois modalités : d’abord, prioritairement, le développement de compétences de communication ; ensuite, à l’appui de cette première modalité, la découverte de mécanismes langagiers et communicationnels, et la construction de références culturelles. La littérature n’apparait pas nommément, mais la dernière modalité (construire des référents culturels) lui est dédiée. Le domaine général de la discipline français s’organise de manière semblable pour l’ensemble des trois cycles autour de deux « macros compétences » de compréhension et de production, qui se déclinent chacune dans les deux modalités écrite et orale. La version électronique9 nuance cette symétrie par l’emploi de verbes distincts : lire et écrire pour les supports écrits et comprendre et produire pour les supports oraux. Si nous considérons seulement la lecture comme une activité qui s’exerce à partir de supports écrits, comme le suggère le PER, les verbes se répartissent sur les cycles comme suit :

Tableau 3. Supports écrits
26Tandis qu’au premier cycle, le domaine de la lecture est envisagé dans sa double dimension de lecture et d’écriture, aux cycles 2 et 3, il se spécialise selon une progression qui va de l’autonomisation de la lecture silencieuse en 4e PH vers une activité métatextuelle d’analyse et de pluralité interprétative. Cependant, même si le terme de « texte » est présent à tous les niveaux, la notion de genre n’apparait qu’au cycle 3. Le prescripteur considère-t-il que la notion de genre est trop complexe pour outiller l’enseignement de la lecture à l’école primaire ? S’agit-il seulement d’un effet d’annonce de la titrologie pour se concilier la profession, s’assurer d’être compris des usagers et répondre ainsi au principe de pertinence (Bronckart et Schneuwly, 1991) ?
27Dès que l’on descend dans le texte des sous-sections, c’est bien le texte, entendu comme une unité de communication, et son regroupement en genres qui structurent les entrées des sous-domaines de la compréhension et de la production. Le terme de « genres de textes » apparait à côté des apprentissages fondamentaux dans les rubriques « Apprentissages communs à tous les genres de textes » et « Les regroupements de genres ». Cette dernière, surtout, est emblématique des spécificités du modèle communicatif psycholinguistique et textuel qui a pris corps dans le prescrit. Elle s’organise en six sections sous le libellé d’une périphrase10, « Le texte qui… », accompagné des verbes « narre », « argumente », « transmet des savoirs », « règle des comportements », « joue avec la langue » (accompagné de « texte poétique »). Faut-il considérer la périphrase comme une activité langagière ? Ou bien le « regroupement de genres » désigne-t-il l’ensemble des produits textuels concrets de cette activité langagière ? Le statut particulier que prend l’étiquetage du « texte qui joue avec la langue » ne trouverait-il pas à s’appliquer à d’autres catégories, aux textes qui narrent et qui relatent de cette même rubrique par exemple ? Ou encore, dans un autre domaine, aux textes littéraires ?
28Et la littérature justement ? Elle apparait sous le cinquième axe, dans la rubrique « Accès à la littérature », pour l’ensemble des trois cycles, et relève de la formation au « jugement de gout » de la tradition. La progression se décline en trois étapes de complexité croissante : au cycle 1, « Apprécier des ouvrages littéraires » ; au cycle 2, « Conduire et apprécier la lecture d’ouvrages littéraires » ; au cycle 3, « Apprécier et analyser des productions littéraires ». Une lecture approfondie des rubriques de ce cinquième axe montre que le jugement de gout ne s’exerce pas seulement sur le texte, mais sur bien d’autres objets culturels : film, peinture, musique, évènement.
29Assurément, ce plan d’études s’inscrit dans la continuité du « tournant communicatif » amorcé naguère par les précédents (Thévenaz, Aeby Daghé et Leopoldoff, 2014). Mais l’appareil notionnel semble hésiter entre plusieurs modèles : pour le primaire, entre le modèle des genres de textes et celui des types discursifs ; et pour le secondaire, selon les domaines de la lecture ou de la production, entre le modèle traditionnel de l’analyse de texte, le modèle des genres de textes et celui de la lecture littéraire. Nous interprétons cette hésitation comme l’influence de plusieurs modèles, « traditionnels » et réformés, qui se font concurrence, s’influencent et se transforment.
4. Les manuels et les moyens d’enseignement
30Pour l’analyse des manuels et moyens d’enseignement, nous nous sommes concentrés sur les tables des matières et en avons observé 1) l’organisation générale, la structure et la progression entre les chapitres ; 2) les corpus et les textes sélectionnés ; 3) la progression entre les cycles. Notre focale a porté plus spécifiquement sur les aspects liés à la lecture bien que nous ne puissions ignorer les éléments liés au travail sur la langue, l’écriture ou la communication orale.
4.1. Organisation des manuels québécois « approuvés » par le ministère de l’Éducation
31Précisons que les manuels québécois sont produits par des éditeurs qui délèguent le mandat de création de ces ressources didactiques à des équipes de concepteurs issus de formation diverses (enseignants, fonctionnaires, linguistes, généralistes, etc.). Pour être achetés par les écoles, les manuels doivent obligatoirement se trouver sur la liste officielle de matériel didactique « approuvé » par le ministère de l’Éducation du Québec.
32Huit manuels québécois ont été sélectionnés et analysés : deux utilisés en dernière année de l’école primaire, trois utilisés en dernière année du 1er cycle du secondaire et trois utilisés en dernière année du 2e cycle du secondaire. Sept des huit manuels présentent une organisation générale des chapitres11 par thèmes ; le seul faisant exception (ERPI, 5e sec.) est subdivisé en cinq parties entre autres liées aux compétences à développer, dont celle portant spécifiquement sur la lecture est organisée en « séquences » : narrative, descriptive et dialogale (manuel A) puis argumentative, explicative et poétique (manuel B). La partie thématique (p. ex. « Avoir du métier », « N’écouter que son courage »), qui représente les trois quarts de chaque manuel, est composée de textes à lire puis de projets ou tâches à réaliser : à la fin de chaque chapitre, dans tous les manuels de 6e primaire et de 2e secondaire, des tâches en écriture ou en communication orale sont proposées, par exemple « exprimer ses réactions à partir d’un récit » (CEC, 6e primaire) ou « rédiger la critique d’un roman policier » (Graficor, 2e sec.). Toutefois, on ne décèle pas de tâches à réaliser dans les tables des matières des manuels de 5e secondaire, ces derniers listant plutôt les titres des textes à lire (ce qui est peut-être dû aux limites de nos choix méthodologiques puisque notre analyse se concentre sur le contenu et l’organisation des tables des matières). En plus de la section thématique, la plupart des manuels présentent une section d’enrichissement où se trouve une sélection de notions grammaticales et d’outils ; en outre, une rubrique sur les « stratégies de lecture et d’écriture » est parfois intégrée à ces chapitres d’enrichissement (Grand Duc, 2e sec. ; ERPI, 5e sec.), ou bien elles font l’objet de chapitres spécifiques à la fin du manuel (p. ex. chapitre 3 de Graficor [2e sec] intitulé « stratégies »- lecture, écriture, communication orale).
33En somme, pour l’organisation générale, la structure et la progression entre les chapitres, nous constatons trois aspects qui reviennent systématiquement : 1° les manuels sont organisés par thématiques menant à lire plusieurs textes sur un thème donné puis à produire une tâche en écriture ou en communication orale sur ce thème ; 2° les savoirs à travailler (notions grammaticales ; stratégies de lecture, d’écriture, etc.) ne sont pas intégrés dans les chapitres thématiques, mais font plutôt l’objet d’une section à part, à la fin des manuels ; 3° les manuels devant obligatoirement être « approuvés » par le ministère de l’Éducation, ils collent de près aux programmes et utilisent le même langage en mettant clairement en évidence les « compétences » à travailler, les « stratégies à développer » ou les « familles de situation » sous lesquelles s’inscrivent les chapitres, termes issus des PFÉQ.
4.2. Corpus et tâches : indices de progression dans les manuels québécois
34Les manuels étant organisés en chapitres thématiques, les corpus de textes sont aussi regroupés par thématique. Les textes sélectionnés sont intégraux lorsqu’il s’agit de textes courts (p. ex. article de journal, poème, chanson) et d’extraits pour les romans et récits. En outre, la quantité de textes et la précision sur les titres, les auteurs et les genres sont nettement supérieurs dans les manuels de 5e secondaire. Dans les manuels de 6e primaire, les titres des textes ne sont jamais mentionnés et on peine à saisir, à partir de la table des matières, ce que les élèves liront. Les tâches présentes dans les tables des matières des manuels de 2e secondaire sont clairement organisées autour de genre à lire, à écrire ou à communiquer oralement, par exemple « rédiger la critique d’un roman policier », « écrire le début d’un récit d’aventures » ou « faire la lecture théâtralisée d’un texte fantastique ». On observe un mélange de textes littéraires et non littéraires de genres variés et d’origines diverses, bien qu’il y ait toujours au moins un texte d’un auteur québécois par thème. En 5e secondaire, les titres des textes, leur genre et le nom des auteurs sont toujours présentés et les textes littéraires dominent puisqu’au moins une douzaine de textes est sélectionnée par chapitre et présentée clairement : les genres sont diversifiés, mais les auteurs sont en grande majorité d’origine québécoise et française.
35Les tables des matières de ces manuels nous permettent d’observer une progression entre les cycles, de la fin du primaire à la fin du secondaire. Premièrement, la place donnée aux textes littéraires est beaucoup plus importante au secondaire, et particulièrement en 5e, comme quoi les manuels s’inscrivent aussi dans la tradition scolaire où la littérature a toujours été davantage enseignée vers la fin du secondaire (Lebrun et Roy, 1999). Du primaire au début du secondaire, le modèle communicationnel est plus présent (importante variété de genres textuels et d’auteurs d’origines diverses, surtout des XXe et XXIe siècles) alors qu’on se rapproche du modèle traditionnel visant à former des êtres cultivés et « fiers de s’exprimer en français » (MÉLS, 2009 : 16) vers la fin de la scolarité. Deuxièmement, une progression s’observe à travers les tâches demandées aux élèves : en 6e primaire, les élèves « s’informe[nt] » ou « exprime[nt] [leurs] réactions » ; en 2e secondaire, ils « critique[nt] » (un roman) ou « décri[vent] » (un lieu, des péripéties, un personnage, un objet) ; en 5e secondaire, ils doivent « lire, comprendre et interpréter, réagir et comparer » (ERPI) en plus de « prendre position » dans les « débats de société ». La progression apparait alors à travers les modes de mise en discours travaillés (descriptif en 6e primaire et 2e secondaire ; argumentatif en 5e secondaire) et les genres à lire (plus divertissant et près de la littérature de jeunesse en 2e secondaire, notamment avec le récit d’aventures, le roman policier, le texte fantastique, le conte merveilleux ou le récit de science-fiction ; plus « sérieux » en 5e secondaire avec des classiques de la littérature française et québécoise). Troisièmement, dans tous les cas, une progression des notions grammaticales et des stratégies – de lecture, d’écriture et en communication orale – semble floue, voire absente, comme si ces notions n’étaient pas travaillées avec ces manuels, même si elles y figurent.
4.3. Les « moyens d’enseignement » romands
36Les « manuels » en cours dans le canton de Genève ont fait l’objet de recommandations cantonales. Distinguons les manuels du cycle 1, provenant de deux sources éditoriales, épistémologiques et formelles différentes, de ceux du cycle 2 et 3, qui obéissent à la même logique. Les manuels du cycle 1 sont emblématiques des problèmes rencontrés dans la mise en œuvre des recommandations du PER concernant la progression en lecture.
37Les moyens romands Dire, écrire, lire (DEL) ont été produits sur le mandat de la Conférence Intercantonale de l’Instruction Publique de Suisse romande et du Tessin (CIIP) qui rassemble les Présidents de l’Instruction publique des cantons mentionnés. Ils se présentent sous la forme d’un guide pédagogique à destination des enseignants, d’un classeur d’exercices détachables et d’un cédérom. Ils ont été pensés, confectionnés et expérimentés dans des classes en fonction des orientations des plans d’études genevois et du PER qui leur a succédé, contrairement aux deux manuels À l’école des albums (ALEDA) et À l’école des livres (ALELI), qui ont été choisis dans le matériel didactique existant. Priorité est faite à trois « activités types pour entrer dans la langue écrite » (DEL, Introduction : 20) : la lecture émergente provisoire, la dictée à l’adulte et le texte de référence. Ces dispositifs font la part belle à l’articulation de l’écrit et de la compréhension orale. C’est une première spécificité du moyen romand DEL qui le distingue des moyens ALEDA et ALELI. Mais comme dans les deux moyens ALEDA et ALELI, la progression s’organise à partir de fondamentaux de la langue écrite (pluralité des codes, principes orthographiques, identité des phonèmes, fonctions de l’écrit) et de la lecture de textes littéraires (personnages, histoire, valeurs du livre). Chaque séquence d’enseignement est structurée à partir d’un album tiré de la littérature de jeunesse. Or, si les albums à lire sont variés, ils représentent pour la plupart des textes qui racontent.
38Entre les moyens d’enseignement, plusieurs ruptures sont manifestes. La première rupture se situe entre les niveaux 1-2 (DEL) et 3 (ALELI), du point de vue de la compréhension et de son soutien par la production de texte. Contrairement à DEL, ALEDA et ALELI donnent la priorité à la lecture. Une séquence type d’ALEDA commence par la compréhension orale d’un album, puis se poursuit par des tâches sur l’identification de phonèmes et de graphèmes, les correspondances graphophonémiques, l’identification de mots et retour à la compréhension. Deuxième rupture, entre les niveaux 3 (ALELI) et 4 (ALEDA) : alors qu’ALEDA tire sa pertinence de l’album comme unité de travail, ALELI sélectionne ses assemblages à partir d’extraits. Ces ruptures sont-elles dues au fait que DEL tire ses orientations du PER et pas les autres ?
39Les manuels du cycle 2 et 3 s’inscrivent dans une ligne éditoriale et épistémologique qui confère une certaine cohérence à la progression des contenus. La lecture est centrale et la production d’écrits au service de la compréhension. La compréhension s’exerce sur des extraits de textes littéraires. Au cycle 2, par exemple, Mon manuel de français 8e se structure sur des entrées thématiques relatives aux disciplines scolaires (français, mathématique, histoire, géographie, sciences) et génériques relatives aux genres littéraires (théâtre, roman, conte étiologique, haïku). Quand bien même la plupart des séquences déclarent explicitement déboucher sur une production écrite, c’est bien la lecture de textes qui les structurent.
40C’est la même prégnance de la littérature dans Le livre unique 11e. Le manuel pour les élèves comprend deux parties : la partie principale se présente comme un recueil d’extraits de textes littéraires pour la plupart ; la deuxième comme des « leçons » de grammaire, conjugaison, orthographe, vocabulaire et méthodologie. Le recueil est organisé à partir d’un dispositif de lecture suivie (une nouvelle de Dahl [section 1]) et de notions éclectiques : notions de genres littéraires (l’autobiographie [section 2], la poésie lyrique [section 3], le fantastique [section 5]), de narratologie (les personnages dans les romans réalistes de la 2e partie du XIXe et du XXe), de type (argumenter » [section 6]), d’œuvre (Le dernier jour d’un condamné [section 7]), de thématique (« Le motif amoureux au théâtre »). Quelques brèves critiques de film, une dépêche et un dossier sur la mode sont regroupés dans le dernier chapitre dédié à la presse. La première section est consacrée à la lecture d’une nouvelle, selon le dispositif de la « lecture suivie ». L’ambition de la séquence est de poser les principaux outils de lecture du texte narratif : structure de l’histoire (schéma narratif), personnages, contextes spatial et temporel, focalisation et point de vue, progression de l’action, etc.
41L’ensemble de ces moyens pour les cycles 2 et 3, par la priorité mise sur la lecture d’une part, par l’importance des textes et extraits littéraires d’autre part, contredit les orientations du PER et consacre le retour à la tradition du texte modèle qu’il s’agit d’abord de comprendre, dont il s’agit ensuite d’évaluer la qualité stylistique, dans une progression pensée aux premiers temps de la rénovation comme cumulative et hiérarchisée. Face au texte modèle, l’écrit se soumet aux contraintes d’une activité de paraphrase métatextuelle, celle du commentaire. Cette activité est soutenue par des notions de stylistique qui touchent à l’unité de la phrase (la métaphore et la comparaison) et à celle d’un genre de texte particulier, le roman (sa structure, le point de vue, distinction entre narration et histoire, cohésion transphrastique des anaphores concernant les personnages, conformité à la référence, etc.). Quand la lecture s’exerce à partir d’autres supports que des textes littéraires, ils se nomment « documents d’époque », « textes documentaires », conformément à cette partition entre textes littéraires et textes fonctionnels, rendue célèbre dans les années 1980 notamment par Combettes (Adam, 2010). La partition des textes à lire est moins générique que littéraire dans une orientation générale qui est celle du discours. La logique de la progression n’est pas de reprendre des composantes textuelles et de les développer au fil des cycles, mais plutôt de permettre d’accéder au niveau ultime du discours, l’argumentation, par une propédeutique de la lecture du texte narratif et de l’écriture de portions de discours argumentatifs.
5. Déterminants de la forme scolaire sur la progression des lecteurs
42Nous avons constaté que l’approche par compétence semble faire l’unanimité dans les prescrits des deux côtés de l’Atlantique. De plus, dans les deux cas, la lecture est assimilée à une activité de résolution de problème liée à la compréhension, que les élèves sont invités à articuler à une activité de production – écrite ou orale. Au Québec comme en Romandie, l’approche communicative semble bien être communément admise pour structurer l’enseignement de la langue, tant en lecture qu’en production de texte, les deux contextes étudiés proposant une large variété de genres textuels à lire et à écrire. Dans les programmes et plans d’études des deux régions, la progression s’organise donc autour de l’unité communicative du texte et de la variété des genres, et selon une modalité spiralaire de la réaction spontanée à la compréhension de textes variés, vers l’interprétation de textes réputés littéraires. Ces derniers sont présents aux différents cycles, bien que parfois dilués dans une conception trans-sémiotique du texte, mais leur place marque fortement la fin de la scolarité obligatoire.
43Cependant, contrairement aux manuels québécois obligatoirement « approuvés » par le ministère de l’Éducation et collés aux prescriptions officielles, les outils suisses romands ne respectent que très partiellement les orientations des prescrits. La diversité des genres de textes recommandés par le PER romand ne sont relayés que dans leur application au champ de la littérature, contrairement à la Progression des apprentissages (2011) québécoise qui a une visée plus globale, intégrant genres littéraires et non littéraires. Les grands genres littéraires de la rhétorique traditionnelle, le roman, la poésie et le théâtre, auxquels se sont ajoutés la bande dessinée et l’album dans le domaine littéraire et les textes informatifs dans le domaine de la presse et de l’argumentation, constituent l’essentiel des supports de lecture. Les textes réputés littéraires sont présents sous la forme d’albums de jeunesse et d’extraits de la littérature de jeunesse pour le cycle 1 suisse ainsi que pour le primaire et le 1er cycle du secondaire québécois ; et pour le cycle 2 suisse ainsi que le 2e cycle du secondaire québécois, ils apparaissent sous forme de textes et surtout d’extraits tirés du patrimoine littéraire français – et québécois. Même si les manuels et moyens d’enseignement déclarent leur allégeance aux programmes et plan d’études, ils organisent leurs matières selon un découpage thématique plutôt traditionnel et la lecture se pratique encore essentiellement à partir d’extraits. La lecture est d’ailleurs considérée comme un exercice de compréhension où le sens se construit à partir de questionnaires (Romandie) ou se traduit par la réalisation de tâches (Québec). Le seul manuel qui fasse exception, DEL pour le cycle 1, est un outil confectionné par des chercheurs qui ont reçu mandat de la commission intercantonale.
44Notre analyse des programmes québécois et du plan d’études romand témoigne de mises en discours contrastées de la progression. La forme scolaire québécoise encourage toujours la sélection à chaque cycle de transition, présentant un découpage de la scolarité obligatoire en deux ordres et cinq cycles d’enseignement marqués par trois programmes distincts bien que complémentaires, et elle est soutenue par plusieurs épreuves certificatives nationales, dont trois en lecture. En Romandie, la progression de la lecture est plutôt pensée dans les plans d’études sur l’ensemble de la scolarité obligatoire avec un seul plan d’études. Pour cet aspect, il semble qu’une forme scolaire plus traditionnelle soit présente au Québec alors que la Suisse romande a fait le choix d’une progression curriculaire unique peut-être utopiste, mais marquée d’une volonté d’assurer la continuité de l’enseignement au moment des transitions entre les cycles.
45En réfléchissant à la progression des lecteurs, orientée par la forme scolaire dans laquelle ils se constituent, nous avons posé un regard sociopolitique sur l’enseignement de la lecture. Notre analyse croisée des programmes, plans d’études, manuels et moyens d’enseignement, pour nos pays respectifs, nous a finalement amenés à identifier trois déterminants de la forme scolaire actuelle :
l’ère du paradigme communicationnel : la variété des genres de textes sélectionnés dans les documents officiels et proposés dans les manuels semble être utilisée à des fins utilitaristes pour enseigner la lecture dans le but de développer la littératie et contribuer à la formation des citoyens, travailleurs de demain confrontés à différents discours et sujets sur lesquels ils doivent apprendre à réagir, par la production d’un rapport, d’un compte rendu, d’une appréciation, d’un débat, etc. ;
les sédiments du cognitivisme : les tâches proposées dans les manuels sont des situations problèmes et les stratégies de lecture prescrites dans les programmes semblent incontournables pour les résoudre ; la formation du sujet-lecteur, pourtant très étudiée dans les travaux des quinze dernières années en didactique de la littérature, ne semble pas s’être taillé une place dans la forme scolaire actuelle. La psychologie cognitive, qui a marqué les prescrits depuis les années 1990 en misant sur la lecture stratégique, présente des traces de sédimentation qui se sont manifestement superposées aux approches plus traditionnelles ;
le contraste créé par la tradition littéraire : malgré l’idéologie inclusive des prescrits, soutenue par des principes de diversités et de collaboration, la sélection des individus est toujours en acte, car plus les élèves approchent de la fin de la scolarité obligatoire, plus les visées de transmission/appropriation d’une culture de la langue apparaissent fortes et ancrées dans les visions institutionnelles.
Tant dans les notions et genres prescrits que dans la facture des manuels, une rupture claire apparait à la fin de la scolarité obligatoire, laquelle confirme la logique de distinction dans laquelle les lecteurs se sont construits au fil de leur progression.
46Les déterminants de la forme scolaire demeurent ancrés dans des rapports aux pouvoirs complexes ; mais pour aller dans le même sens que Schneuwly et Hofstetter (2017), quel rôle les didacticiens du français jouent-ils dans ce débat ?
Bibliographie
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Annexe
Annexe - Manuels et moyens d’enseignement analysés selon les niveaux sélectionnés

Notes de bas de page
1 Nous remercions vivement Orianna Franck, Olivier Dezutter et Érick Falardeau pour leurs relectures avisées.
2 Programme enrichi qui relève de l’Organisation du baccalauréat international et qui sélectionne les élèves sur la base de leurs performances.
3 Il existe un grand nombre de matériels didactiques approuvés par le ministère de l’Éducation du Québec que les enseignants peuvent utiliser pour enseigner le français, par choix personnel ou en respectant une entente avec une équipe d’enseignants d’une même école. Au 3e cycle du primaire, six manuels sont approuvés. Au 1er cycle du secondaire, quatre manuels sont approuvés. À la dernière année du 2e cycle du secondaire, quatre manuels sont approuvés. Pour cette contribution, nous avons choisi de sélectionner deux manuels pour les trois fins de cycles ciblés. Bien que représentatif de 50 % des manuels scolaires pouvant être utilisés par les enseignants, il s’agit d’un échantillon produit à partir d’observations de classe : il semble qu’il s’agisse des manuels les plus communs pour ces classes.
4 Le 1er cycle du primaire renvoie aux 1re et 2e années, soit des élèves de 6 à 8 ans ; le 2e cycle renvoie aux 3e et 4e années, soit des élèves de 8 à 10 ans ; le 3e cycle renvoie aux 5e et 6e années, soit des élèves de 10 à 12 ans.
5 Le 1er cycle du secondaire renvoie aux 1re et 2e années, soit des élèves de 12 à 14 ans.
6 Le 2e cycle du secondaire renvoie aux 3e, 4e et 5e années, soit des élèves de 14 à 17 ans.
7 Pour le primaire, « épreuves obligatoires » nationale en lecture et en écriture à la fin du 2e cycle (4e année) et à la fin du 3e cycle (6e année). Pour le secondaire, deux « épreuves obligatoires », en lecture et en écriture, à la fin du 1er cycle (2e secondaire) et une « épreuve unique » en écriture à la fin du secondaire (5e secondaire).
8 Pour le détail de cette analyse, voir le chapitre 2 de Thévenaz, Aeby Daghé et Leopoldoff (2014).
9 https://www.plandetudes.ch/web/guest/
10 Le PFÉQ du primaire québécois présente aussi les textes à faire lire à l’aide de telles périphrases.
11 Nous employons le terme « chapitre » pour désigner la division des manuels bien que des termes très diversifiés soient utilisés pour les désigner, selon les maisons d’édition, par exemple : module (Graficor), escale (Grand Duc), regards (Grand Duc), dossier (CEC), etc.
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