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L’impact des épidémies sur les usages funéraires du passé

Faits archéologiques versus idées reçues

p. 233-251

Remerciements

Le travail présenté dans cet article s’inscrit dans le cadre d’un programme de recherche sur les épidémies du passé financé par le Labex des Sciences Archéologiques de Bordeaux (LaScArBx). Ce projet a bénéficié d’une aide de l’État français, gérée par l’Agence nationale de la Recherche au titre du programme Investissements d’avenir portant la référence anr-10-labx-52.


Texte intégral

1À travers ce bref exposé écrit, nous allons tenter de montrer ce que l’archéo-anthropologie funéraire a apporté ces dernières années à la connaissance des épidémies du passé et tout particulièrement de discuter des pratiques funéraires en lien avec des épidémies et de leur évolution au cours du temps. Nous tenterons de ne pas perdre de vue l’angle retenu pour ce colloque : Le cimetière au village dans l’Europe médiévale et moderne ; ce sera pour nous l’occasion de mettre en exergue d’éventuelles différences dans la gestion funéraire en temps d’épidémie entre milieux ruraux et urbains.

2Les « pestes1 » ont de tout temps stimulé les fantasmes des humains et leur simple évocation réveille bien souvent des images de grands drames médiévaux, de danses macabres et de grandes fosses dans lesquelles venaient s’entasser de nombreux cadavres. Ces inhumations rapides, impliquant plusieurs individus rassemblés en une même fosse, sont censées révéler un comportement pragmatique face à une mortalité brutale et importante. Les sources textuelles et iconographiques qui relatent certains épisodes épidémiques du passé constituent bien évidemment un témoignage précieux mais leurs objectifs n’étaient pas toujours de transcrire la réalité et, bien souvent, la subjectivité de leurs auteurs déformait la réalité sociale, du moins certains de ses aspects.

3Dans le champ d’étude des crises de mortalité du passé, on assiste, ces dernières années, à un réel progrès des connaissances. On sait notamment que les sépultures relatives à des crises de mortalité par épidémies sont archéologiquement tangibles2, contrairement à certaines assertions3, et que les données obtenues renvoient par conséquent à des notions bien différentes de celles généralement admises dans de tels contextes4. Ainsi, malgré des témoignages certes encore très ponctuels, de nombreuses « lectures », voire « relectures », sont maintenant possibles et notamment dans le domaine funéraire jusqu’alors peu exploité ; c’est ce dont nous allons discuter sur la base des quelques exemples présentés ci-dessous.

Les données bio-archéologiques au service de la connaissance des épidémies du passé

4Grâce au perfectionnement de méthodes propres à l’anthropologie de terrain – discipline née au début des années 1980 et plus communément appelée maintenant archéothanatologie5 – il est actuellement possible d’identifier des sépultures dites multiples6, liées à des crises de mortalité. Dans ce cas, le fait archéologique, dépôt simultané de plusieurs corps, témoigne d’une quantité inhabituelle de décès dans un court laps de temps. Parallèlement, le développement de l’archéologie préventive sur le territoire national7 a permis de mettre au jour plusieurs ensembles funéraires reconnus comme étant liés à des crises de surmortalité.

5Une autre évolution d’importance a touché plus spécifiquement les acquis concernant la biologie des populations du passé, ce qui a permis dans certains cas de pouvoir discuter de la nature même de ces crises de mortalité (fait de guerre, épidémie, etc.). En effet, jusqu’à une période relativement récente il était impossible d’identifier des agents infectieux hautement pathogènes et à très forte létalité (type peste, choléra, etc.), qui ne génèrent aucun stigmate observable sur le squelette du fait de leur rapidité d’action. Le diagnostic d’une sépulture d’épidémie repose donc bien souvent sur un diagnostic par défaut, c’est-à-dire l’absence de traumatismes sur les os, excluant des violences interhumaines. On sait également maintenant que d’autres données biologiques peuvent être exploitées, en particulier celles relevant de ce qui est communément appelé le « recrutement » par âge et par sexe des inhumés. Celui-ci permet de différencier une population « normale » (en accord avec un profil de mortalité théorique propre aux populations anciennes) d’une population « sélectionnée ». Dans ce dernier cas, la sélection doit être discutée en sachant notamment que, selon sa nature, une épidémie aura une signature démographique spécifique8. Mais les grands progrès récents dans ce domaine concernent plus particulièrement la paléobiochimie moléculaire. En effet, grâce à la présence de fragments d’adn contenus dans les restes squelettiques et le développement des méthodes d’extraction et d’amplification de cet adn, il est actuellement possible, sous certaines réserves9, d’identifier certains pathogènes responsables d’épidémies10.

6De nouvelles informations archéologiques sont donc exploitables mais demandent toutefois une évaluation rigoureuse, notamment la mise en évidence d’une récurrence du fait archéologique et d’une contemporanéité des sépultures multiples11. Des apports indéniables concernent le domaine médical avec une contribution certaine à l’étude des micro-organismes et des maladies infectieuses12 mais, dans cet article, c’est à l’aspect funéraire, au rapport des populations à la mort épidémique, que nous nous consacrerons, sujet d’autant plus important que les sources textuelles sont relativement silencieuses à ce sujet et n’en relatent généralement que les faits les plus effrayants.

Les ensembles funéraires exploitables

7En l’état de la recherche (fouilles, publications), nous pouvons estimer à une quarantaine le nombre de sites funéraires européens dont on soupçonne la relation avec des épidémies. Cependant les données recueillies sont très hétérogènes. Si nous nous limitons aux seuls sites pour lesquels nous disposons d’informations sur les modalités d’inhumation des victimes, environ la moitié des sites de ce corpus initial sont exploitables (fig. 1).

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Fig. 1 : Inventaire et répartition géographique des sites pris en compte dans la discussion des modalités d’inhumation en temps d’épidémie. Seuls ont été retenus les ensembles sépulcraux pour lesquels nous disposons d’informations archéologiques sur les modalités d’enfouissement des défunts.

8Nous avons, dans un précédent travail, proposé une analyse comparative de données issues de sites contemporains des premiers temps de la seconde pandémie de peste, plus connue sous le nom de Peste noire13. Ces données ont été, par ailleurs, mises en perspective avec certains éléments connus du traitement sépulcral en temps d’épidémie pour d’autres contextes chronologiques (antérieurs et postérieurs à la Peste noire) et/ou d’autres agents pathogènes14.

9Dans le cadre du présent article, et sur la base de ces mêmes sites, nous centrerons volontairement notre propos sur une confrontation entre milieu rural et milieu urbain, en nous intéressant, d’une part, aux deux sites ruraux de Vilarnau et de Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse et, d’autre part, aux ensembles funéraires de Dreux et de Saint-Côme-et-Damien. Pour une analyse comparative avec des contextes chronologiques et/ou géographiques différents, nous proposons d’y associer deux sites urbains étudiés récemment. Le premier est la sépulture plurielle du xive siècle de la basilique des Saints-Martyrs-Just-et-Pastor à Barcelone, découverte majeure pour l’archéologie funéraire de la Catalogne et plus généralement de l’Espagne15. Le deuxième concerne l’ensemble funéraire urbain de l’ancien couvent de Maria Troon (Termonde, Flandre orientale, Belgique), qui regroupe les victimes probables d’une épidémie de peste de la fin du xvie siècle16. De manière plus ponctuelle, nous proposerons des parallèles avec d’autres sites sépulcraux médiévaux et modernes relevant de contextes épidémiques. Notre attention sera centrée sur les gestes funéraires portés aux défunts, du choix des lieux d’inhumation jusqu’aux éventuelles spécificités des sépultures. En effet, certaines questions restent en suspens : les épidémies provoquent-elles des funérailles expéditives ou y a-t-il persistance des règles funéraires en usage ? Peut-on percevoir des différences entre les environnements ruraux et urbains ?

Choix du lieu d’inhumation

10Pour chacun des sites français étudiés pour la Peste noire, qu’il soit rural ou urbain, notre étude révèle que les sépultures de peste s’insèrent au sein d’un cimetière paroissial en usage avant le début de l’épidémie. La nature des décès n’a donc pas induit l’exclusion des défunts du lieu d’inhumation consacré. En ce qui concerne la Peste noire à Barcelone, la sépulture multiple mise au jour s’intègre au sein d’un espace appartenant au cimetière paroissial. En cela, elle se fait l’écho des découvertes réalisées en France. Pour les quatre cimetières français, les tombes multiples sont systématiquement rassemblées sur une surface restreinte de l’aire sépulcrale, ce qui pourrait révéler la volonté de créer un espace réservé aux sépultures inhabituelles. Ces espaces diffèrent cependant d’un site à l’autre17 ; et du fait de cette variabilité, il reste délicat d’affirmer la raison sous-jacente à ces regroupements, lesquels pourraient tout simplement signaler que seule une zone des cimetières était en usage au moment de l’épidémie. Cette insertion des sépultures d’épidémies au sein de cimetières préexistants semble être un fait commun aux sites du début de la deuxième pandémie. On peut noter toutefois une exception à ce schéma pour la ville de Londres, où deux cimetières ont été spécifiquement créés pour accueillir les morts de l’épidémie ; celui d’East Smithfield, partiellement fouillé entre 1986 et 1988, a révélé la présence de nombreuses fosses et tranchées ayant servi aux inhumations18.

11Lorsque l’on s’intéresse à d’autres périodes chronologiques et d’autres environnements géographiques, il apparaît que le cimetière paroissial n’a pas été l’unique lieu d’inhumation des corps en temps de crise épidémique. En effet, des espaces destinés à rassembler les victimes de l’épidémie ont parfois été créés. Pour la France, le plus ancien que l’on ait identifié est le cimetière des Fédons, qui était en relation avec une infirmerie de peste de la fin du xvie siècle ; il a fonctionné uniquement durant la période de crise épidémique. Pour la même période, on peut mentionner le site belge de Termonde, où les sépultures multiples ont pris place dans les jardins d’un couvent, comme cela s’observe par ailleurs pour le site funéraire de Santa-Clara à Palma de Majorque. Pour ce dernier, certaines sources textuelles19 nous informent que, face à un afflux important de décès lors d’une épidémie de peste, l’impossibilité de continuer à inhumer les défunts dans le cimetière existant avait conduit les autorités à réquisitionner les jardins du couvent pour abriter de nouvelles sépultures de pestiférés. On connaît également ce phénomène à Marseille avec les inhumations au couvent de l’Observance, lors de la rechute épidémique que connut la ville, entre mai et août 172220.

12D’une manière générale, l’enregistrement archéologique français ne livre que peu d’exemples d’espaces funéraires dédiés aux inhumations de victimes d’épidémies pour le début de la seconde pandémie. Mais si ces lieux sont rares pour les périodes anciennes, ils semblent se généraliser à la période moderne, ce qui traduit peut-être un changement dans la conception des épidémies par les populations. Nous ne percevons pas de différences significatives entre contextes rural et urbain quant au choix du lieu d’implantation des sépultures des victimes d’épidémies. Ce constat est toutefois à pondérer, compte tenu de la très faible représentation des sites ruraux dans le corpus étudié.

Caractéristiques et variations des modes d’inhumation

13Nous traiterons uniquement des inhumations car nous n’avons aucune preuve archéologique ou historique que des crémations de victimes d’épidémies aient eu cours durant la période médiévale, la crémation étant communément étrangère à la logique des funérailles chrétiennes.

Un relatif respect des usages funéraires traditionnels

14Toutes les tombes de victimes de la peste attribuables au début de la seconde pandémie (xive siècle) se caractérisent par un même mode d’inhumation, c’est-à-dire le dépôt des corps à même la terre, dans des fosses totalement dépourvues de structures funéraires en dur ainsi que d’aménagements internes. Cette modalité funéraire apparaît somme toute assez logique dans un contexte d’augmentation importante et soudaine des décès, la capacité de production de contenants funéraires étant forcément limitée. Devons-nous pour autant considérer ce traitement des corps comme un argument pertinent pour suspecter un contexte épidémique ? Gardons-nous de ce constat hâtif, car en élargissant notre point de vue nous pouvons nous rendre compte que chacun des sites étudiés livre des sépultures en pleine terre pour les périodes précédant l’épidémie. Ce type de tombes est par exemple majoritaire à partir du xie siècle pour les sites de Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse et de Vilarnau. Dans le cadre chronologique étudié ici, l’inhumation d’un corps en pleine terre ne peut donc être un argument suffisant pour suspecter un contexte épidémique.

15Les quatre sites français contemporains de la Peste noire témoignent tous d’une gestion rigoureuse des cadavres. La grande majorité des individus sont déposés couchés sur le dos selon une même orientation est/ouest, leur tête reposant à l’ouest, une position commune à la plupart des individus inhumés dans les cimetières médiévaux. Ces gestes témoignent d’une certaine volonté de perpétuer, au moins tant que cela est possible, des pratiques funéraires en usage lors de la période précédant l’épidémie. En effet, les dispositions tête-bêche, connues par ailleurs pour des sépultures multiples de différentes périodes, sont totalement absentes en France pour les tombes relevant de la Peste noire. Pour la sépulture multiple de Barcelone en revanche, si l’analyse révèle que la très grande majorité des corps sont couchés sur le dos, fréquemment côte à côte, selon une attitude proche de celle relevée dans les cimetières français de la même période, ils sont parfois disposés tête-bêche21 (fig. 2). Par ailleurs, pour ce site, la découverte de nombreux vestiges textiles suggère que les corps étaient enveloppés dans des enveloppes souples probablement constituées de lin ou de chanvre22.

16La comparaison avec d’autres contextes chronologiques rend compte du fait que l’inhumation à même la terre est demeurée la modalité majoritaire des inhumations, quels que soient la période et le type d’épidémie considérés. Cependant, l’utilisation de contenants est parfois possible. L’exemple le plus parlant est certainement le cimetière de peste de Londres, où les longues tranchées creusées pour les inhumations ont accueilli des rangées de cercueils, individualisant ainsi chaque défunt23. Sur certains sites, comme aux Fédons, a pu être prouvée la présence d’enveloppes textiles (fig. 3)24.

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Fig. 2 : Disposition « tête-bêche » sur le site de la basilique des Saints-Martyrs-Just-et-Pastor (Barcelone, Espagne).

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Fig. 3 : Proposition de linceul pour une sépulture individuelle du site des Fédons à Lambesc
Plusieurs indices plaident en faveur d’une décomposition en espace colmaté : dans un espace vide, les patellas et les os des mains, surtout ceux de la main gauche, auraient dû s’effondrer sur le fond de la tombe. D’autres signent indiscutablement l’existence d’un espace vide : ouverture de la cage thoracique bien au-delà des limites corporelles, bascule de la mandibule et mise à plat du bassin. Enfin, la verticalisation des clavicules, l’obliquité des scapulas et l’adduction des humérus indiquent de toute évidence une constriction au niveau des épaules. Il est bien difficile de concilier diverses constatations qui semblent a priori contradictoires, à moins d’imaginer l’existence d’une enveloppe relativement serrée à la partie supérieure du thorax, beaucoup plus lâche au niveau du tronc et du bassin, et qui aurait directement épousé les contours des membres inférieurs.

17À Termonde, outre la position et l’orientation variable des individus rassemblés au sein d’une même tombe (sur le dos, sur le côté et sur le ventre), nous avons, pour la première fois en contexte épidémique, certains indices d’aménagements particuliers avec la présence de tombes multiples architecturées (fig. 4), mode d’inhumation qui s’applique à plusieurs sépultures de ce site25.

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Fig. 4 : Exemple de sépulture multiple du site de Maria Troon (Termonde, Belgique).
Superposition des corps de 3 individus. Les mouvements de certaines pièces osseuses suggèrent une décomposition en espace vide (par exemple, le basculement du crâne du deuxième sujet ou la dislocation de l’épaule gauche du premier qui a entraîné la sortie hors du volume initial du corps de l’humérus et son apparition en face postérieure). Par ailleurs des effets de contraintes sont remarquables : effet de verticalisation des pieds de l’individu n ° 3, alignement strictement rectiligne des membres supérieurs gauche des sujets n ° 2 et 3. Ces différentes caractéristiques suggèrent que les corps ont été inhumés dans un coffrage de bois.

Sépultures individuelles versus sépultures multiples

18Comme nous l’avons vu, le recours à la sépulture dite multiple est communément considéré comme le marqueur d’une crise de mortalité. Or, nous avons maintenant quelques exemples pertinents qui nous permettent de prouver que ce type de traitement ne reflète qu’une part des expressions sépulcrales en temps d’épidémie. Ce fait d’importance a pu être mis en évidence pour la première fois lors de l’étude du cimetière de l’infirmerie de peste des Fédons26.

19Sur ce site, les données recueillies ont permis de démontrer une gestion raisonnée des inhumations et de suggérer que certaines épidémies pouvaient n’avoir produit que des sépultures individuelles, archéologiquement indiscernables de sépultures relevant d’une mortalité normale. Les inhumations en sépulture individuelle ont également pu avoir cours durant la Peste noire, comme l’attestent les résultats de l’étude du site de Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse27.

20Par ailleurs, le nombre de corps inhumés dans les sépultures multiples semble varier sensiblement en fonction du contexte dans lequel s’inscrivent les cimetières. La sépulture multiple découverte récemment à Barcelone a ainsi livré les restes squelettiques de 120 individus ; en tenant compte du caractère partiel de la fouille, il faut envisager que cette unique fosse pourrait avoir servi à l’inhumation de plusieurs centaines d’individus28. Le site de Dreux, localisé aux abords immédiats de la ville, se caractérise, quant à lui, par un effectif important de sépultures multiples, contenant entre 2 et 22 cadavres. Au contraire, le cimetière du village de Vilarnau a essentiellement livré des sépultures doubles. Pour le second site rural de notre échantillon (Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse), seule l’une des trois sépultures regroupe les dépouilles de cinq individus, tandis que les autres sont des sépultures doubles et que de nombreuses sépultures individuelles seraient en relation avec l’épidémie.

21Ainsi donc, il semble que nous voyons poindre certaines divergences entre les contextes ruraux et urbains : il s’avère en effet que le nombre d’individus déposés dans les fosses est plus important en contexte urbain et, ce, d’autant plus que les villes considérées sont de grande taille, tandis que la plupart des sépultures multiples mises au jour en contexte rural ne regroupent qu’un nombre restreint de corps. Cette différence, qui pourrait, pour partie, résulter d’une contagion favorisée de l’épidémie dans les villes29, pourrait être également liée à la structure démographique des populations atteintes. La moindre taille des populations dans les campagnes implique en effet que l’effectif absolu des défunts est moins élevé qu’en ville. De fait, en contexte rural, la crise pourrait avoir été plus facilement maîtrisée du point de vue de la gestion des cadavres qui auraient donc fait plus fréquemment l’objet d’un traitement individuel. Si le recours à de grandes sépultures multiples ne constitue donc qu’une partie de l’expression sépulcrale de l’épidémie, nous pouvons affirmer qu’en l’état de nos connaissances, ceci est particulier vrai en contexte rural. Ce résultat nous conduit aussi à une certaine vigilance, car il s’avère que considérer les sépultures multiples comme le point commun à tous les sites d’épidémies constitue donc un biais de raisonnement car, en général, c’est justement ce critère qui est à la base des investigations qui ont permis de démontrer la crise de mortalité.

22En remontant dans le temps, les sites les plus anciens de notre corpus (Sens et Poitiers) révèlent deux cas de figures différents : pour le premier de ces sites, plusieurs sépultures multiples juxtaposées ont été identifiées ; au contraire, le second renferme une association de sépultures individuelles et multiples. Les résultats des travaux récents sur ce site suggèrent, toutefois, que cette petite nécropole intra-muros précoce aurait été établie dans un quartier désaffecté de la ville antique. Pour le haut Moyen Âge, le site funéraire de Sens semble également confirmer la présence de larges sépultures multiples en contexte urbain, en relation avec un effectif important de victimes. De la sépulture multiple découverte récemment à Barcelone, ont été exhumés les restes osseux et dentaires de 120 individus. En tenant compte du caractère partiel de la fouille30, ce site se distingue encore une fois par le traitement funéraire dont ont fait l’objet les individus décédés d’épidémies. À ce jour, c’est la plus ancienne sépulture reconnue renfermant un nombre aussi important d’individus.

23À plus large échelle, il semble que le recours à des sépultures multiples ait eu lieu quels que soient la période et le type d’agent en cause dans les décès. Toutefois, il faut une nouvelle fois souligner les limites des outils analytiques de l’archéologie, qui n’autorisent que rarement l’identification de victimes d’épidémies autrement que par leur regroupement au sein de sépultures multiples. Des sépultures individuelles ont, en effet, existé lors des épidémies, ceci étant également vrai pour des périodes récentes, comme l’illustrent les très nombreuses sépultures individuelles du cimetière de peste du xviie siècle de Lariey31. Enfin, un nouveau type de sépultures de crise semble apparaître à la période moderne, en particulier en contexte urbain où la mortalité est très élevée. Ces charniers se caractérisent par le dépôt d’un grand nombre de corps dans une même fosse, mais se distinguent des sépultures multiples rencontrées pour les périodes précédentes par l’absence de réelle organisation interne et le peu de soin apporté au placement des corps.

Autres spécificités des sépultures d’épidémies

Usage de matériaux à caractère prophylactique

24Une spécificité de certaines sépultures en relation avec des épidémies est la présence de matériaux à caractère prophylactique. Certaines sources textuelles font en particulier mention de l’utilisation de la chaux, dont il était préconisé de recouvrir les corps32. Si l’emploi de ce matériau est documenté en contexte funéraire pour différentes périodes33, son utilisation dans une optique prophylactique semble toutefois n’avoir connu une réelle diffusion qu’à partir de l’Époque moderne34. Le dépôt de chaux sur les corps est clairement attesté pour de nombreuses sépultures multiples à la période moderne, parmi lesquelles celles de Prague, Marseille, Martigues. À cette période, il semble que la notion de contagion s’impose progressivement au sein des populations, ce qui a peut-être justifié le recours à des moyens d’enrayer la propagation des épidémies.

25Jusqu’à peu, l’utilisation de chaux dans un contexte d’inhumation de victimes d’épidémies n’avait pas été documentée pour des contextes antérieurs au xviie siècle. Or, la fouille récente de la sépulture multiple de Barcelone a révélé une épaisse couche de chaux venant sceller les niveaux d’inhumations35. Aucune autre sépulture de peste médiévale découverte en Europe ne se caractérisant par la présence de chaux, cette découverte doit toutefois être considérée, en l’état actuel des connaissances, comme une exception. Elle démontre que l’emploi de ce matériau pourrait avoir eu cours dans certaines régions d’Europe de manière précoce, bien avant que ses vertus36 n’en fassent une composante essentielle du traitement des corps en contexte épidémique. Cette avance méthodologique dans la mise en œuvre de procédures prophylactiques ne saurait, pour autant, être considérée comme la preuve d’une meilleure connaissance du mode d’action de la maladie ; d’autres éléments du traitement funéraire suggèrent en effet une méconnaissance de son mode de transmission. L’application de chaux sur les cadavres avait donc vraisemblablement pour but premier de lutter contre les odeurs de la putréfaction, considérées alors comme l’élément pourvoyeur de la maladie.

26Outre les objets de parure stricto sensu, sur lesquels nous reviendrons, certains objets déposés avec les défunts pouvaient également l’être dans le but de prévenir la propagation de l’épidémie. Ainsi, aux Fédons, des perles en ambre et en cristal de roche facettées ont été recueillies dans deux sépultures féminines. La valeur prophylactique de ces matériaux, leurs vertus curatives et magiques sont attestées au Moyen Âge par des sources documentaires, en relation avec des contextes funéraires37, et à l’Époque moderne, notamment au cours des épidémies de peste38.

Le mobilier d’accompagnement des défunts

27Une autre caractéristique du traitement funéraire en temps d’épidémie est la rareté du mobilier d’accompagnement des défunts. Pour le début de la seconde pandémie, que ce soit en milieu rural ou en milieu urbain, on peut souligner l’absence quasi-systématique de mobilier vestimentaire, ce qui tendrait à démontrer un dépouillement des défunts préalablement à leur ensevelissement. Cette particularité pourrait, à première vue, être mise sur le compte de l’urgence d’inhumer au plus vite les victimes de l’épidémie, au détriment des usages traditionnels ; l’absence de mobilier pourrait alors être perçue comme un argument supplémentaire pour discuter l’existence d’une crise de mortalité. Mais peut-être faut-il y voir aussi, dans certains cas, un acte délibéré de la part des vivants, signalant une volonté d’égalité devant la mort, une pratique codifiée qui, outre le rassemblement en un même lieu, imposerait le dépouillement des victimes39. Par ailleurs, il faut souligner que l’absence de dépôt de mobilier funéraire doit être analysée avec prudence dans le contexte chronologique qui nous intéresse. En effet, il est assez peu fréquent d’une manière générale pour toutes les sépultures des périodes médiévale et moderne40.

28Pour autant, certaines sépultures relevant de contexte épidémique de la période moderne (Les Fédons, Prague, Boulogne-sur-Mer) ont livré diverses parures et petits accessoires de la vie quotidienne, ainsi que des monnaies. Dans ces cas, il est difficile de préciser si les éléments mobiliers rendent compte de dépôts délibérés ayant une quelconque valeur symbolique ou s’ils témoignent, au contraire, d’une volonté des vivants de limiter les contacts physiques avec les dépouilles des victimes d’épidémies, qui seraient alors mises en terre sans que leurs corps fassent l’objet d’une préparation préalable (dévêtement, toilette mortuaire, etc.).

Les épidémies en archéologie : constats

29En guise de synthèse, il apparaît donc que les contextes de crises de mortalités ont donné lieu à des expressions sépulcrales extrêmement variables. Les corps ont été déposés dans divers types de structures funéraires, de la sépulture individuelle au véritable charnier. L’inhumation des corps à même la terre semble avoir été presque exclusive en temps d’épidémie. Toutefois, l’utilisation de cercueils, de même que l’enveloppement des corps dans des linceuls ont parfois pu exister. En conséquence, l’absence de contenant funéraire ne peut être considérée, à elle seule, comme étant un bon argument pour identifier des sépultures en relation avec des crises de mortalité de nature épidémique. Pour la période médiévale, différents aspects du traitement du cadavre démontrent le soin apporté aux dépouilles des victimes d’épidémies avant leur mise en terre, ce qui suggère par là même un contact prolongé des vivants avec le mort. Cette attention portée au corps apparaît en net contraste avec l’empressement des inhumations pour certains sites d’épidémies plus récents, une différence qu’il est possible de mettre en relation avec l’évolution des concepts médicaux41.

30Dans la même logique, et même si pour les sépultures d’épidémies du passé l’absence de dépôt funéraire pourrait être liée à une « idéologie égalitaire42 » de la part des vivants, sa présence pour certaines sépultures constituées en contexte épidémique moderne pourrait témoigner d’une volonté des vivants de limiter les contacts physiques avec les dépouilles des victimes. Enfin, il semble que les morts par épidémies n’aient pas toujours été exclus des lieux d’inhumation en usage, un regroupement de ces sépultures de crise en un lieu réservé du cimetière étant toutefois envisageable dans certains cas.

***

31Les exemples archéologiques développés ici rendent compte de l’adaptation et de la maîtrise qu’ont su développer les sociétés du passé face aux crises épidémiques auxquelles elles ont été confrontées. Ils offrent une image nuancée du traitement des morts dans des contextes particuliers d’épidémies, qui apparaît bien éloignée des stéréotypes généralement admis. Contrairement aux idées reçues, certains sites funéraires liés à des épidémies renvoient l’image d’une parfaite maîtrise des événements, les cadavres étant inhumés avec des égards manifestes. Ce constat doit nous inviter à la plus grande prudence quant aux interprétations qui peuvent être tirées de certaines sources littéraires et iconographiques.

32Malgré la grande variabilité du traitement sépulcral des victimes d’épidémies, certaines tendances chronologiques peuvent être mises en exergue. On peut ainsi noter une nette évolution des usages funéraires depuis le bas Moyen Âge jusqu’à l’Époque moderne, le recours à de grandes sépultures multiples, voire à de véritables charniers, semblant s’intensifier au cours du temps. D’autres aspects du traitement des corps, telle l’application de chaux, semblent directement liés aux avancées médicales, plus particulièrement sur la notion de contagion.

33On ne peut qu’insister sur le potentiel grandissant de la recherche archéologique sur les épidémies, dans la mesure où de nouveaux sites sépulcraux relevant de tels contextes sont régulièrement découverts. Il nous paraît, de fait, fondamental que les réflexions menées jusqu’à présent sur l’évolution des usages funéraires en temps d’épidémie soient complétées et alimentées par l’examen de sites actuellement en cours d’étude. Les travaux futurs devront s’attacher autant que possible à considérer des sites aux chronologies bien établies et pour lesquels les agents pathogènes incriminés dans les décès sont identifiés. Ils devraient alors permettre de démontrer toutes les subtilités du traitement sépulcral en contexte de mortalités épidémiques, de même que ses variations géographiques et temporelles. En parallèle, ces travaux devront mettre l’accent sur la comparaison de ces espaces d’inhumation avec des cimetières relevant d’une mortalité naturelle, de manière à définir les productions funéraires locales en vigueur, avant et après les épidémies. À terme, cette démarche permettra peut-être de déceler certains critères d’ordre sépulcraux permettant de suspecter une crise de mortalité, notamment en l’absence de sources écrites et de faits archéologiques manifestes.

Notes de bas de page

1 Terme générique qui selon les époques peut regrouper des maladies infectieuses fulgurantes de différentes natures.

2 D. Castex, P. Georges, P. Blanchard, « Complémentarité et discordances entre sources textuelles et sources archéo-anthropologiques en contexte de crises de mortalité par épidémie. Études de cas », Revue Archéologique du Centre de la France, 2008 [En ligne], t. 47. url : http://racf.revues.org/1218.

3 M. Colardelle, « La mémoire des exclus. Réflexions archéologiques et historiques sur la maladie et la mort épidémiques », Ethnologie française, t. XXVIII, 1, Sida : deuil, mémoire, nouveaux rituels, 1998, p. 20-25.

4 G. Clavandier, La mort collective – Pour une sociologie des catastrophes, Paris, 2004, p. 191.

5 H. Duday, « L’archéothanatologie ou archéologie de la mort », O. Dutour, J.-J. Hublin, B. Vandermeersch (éd.), Objets et méthodes en paléoanthropologie, Paris, 2005, p. 153-215.

6 Par opposition aux sépultures collectives qui se constituent sur le long terme, au fur et à mesure des décès, les sépultures dites multiples résultent de l’accumulation simultanée de plusieurs individus au cours d’une même opération ou tout au plus dans des intervalles de temps très courts. Ibid., p. 198.

7 Ce qui explique peut-être la quantité de sites funéraires en relation avec des épidémies découverts en France, comparée à ceux mis au jour dans d’autres pays.

8 D. Castex, « Les anomalies démographiques : clefs d’interprétation des cimetières d’épidémies en archéologie », D. Castex, I. Cartron (éds.), Épidémies et crises de mortalité du passé, Actes des séminaires de la Maison des Sciences de l’Homme, Pessac, 2007, p. 109-138.

9 Il est important de préciser que l’adn, présent un temps dans les restes squelettiques, peut ne plus être conservé au moment de la découverte archéologique.

10 Entre autres : M. Drancourt, V. Roux, D. La-Vu, L. Tran-Hung, D. Castex, V. Chenal-Francisque, H. Ogata, P.-E. Fournier, E. Crubezy, D. Raoult, « Genotyping, Orientalislike Yersinia pestis, and Plague Pandemics », Emerging Infectious Desease, 10, 2004, p. 1585-1592 ; M.J. Papagrigorakis, C. Yapijakis, P.N. Synodinos, E. Baziotopoulou-Valavani, « dna examination of ancient dental pulp incriminates typhoid fever as a probable cause of the Plague of Athens », International journal of infectious diseases, 10, 2006, p. 206-214.

11 D. Castex, P. Georges, P. Blanchard, « Complémentarité et discordances… ».

12 Les résultats déjà obtenus quant à l’identification de pathogènes anciens, tel le bacille de la peste, préfigurent un développement très important de la paléomicrobiologie dans les années à venir. En effet, sur la base des modèles de peste ancienne qui ont pu être identifiés, il est actuellement possible de mesurer l’évolution du bacille Yersinia pestis sur le long terme et donc de développer d’éventuels moyens d’y faire face actuellement de la manière la plus efficace possible. Ces résultats apparaissent particulièrement importants à un moment où l’on note une recrudescence de la peste en différents points du globe (Afrique, île de Madagascar, États-Unis, Mexique).

13 S. Kacki, D. Castex, « Réflexions sur la variété des modalités funéraires en temps d’épidémie. L’exemple de la Peste noire en contextes urbain et rural », Archéologie Médiévale, t. 42, 2012, p. 1-21.

14 D. Castex, S. Kacki, « Funérailles en temps d’épidémies : croyances et réalité archéologique », Les Nouvelles de l’Archéologie – Une archéologie des temps funéraires ? Hommage à Jean Leclerc, t. 132, 2013, p. 23-29.

15 J. Beltran de Heredia, I. Gibrat « El primer testimoni arqueològic de la pesta negra a Barcelona : la fossa comuna de la Basílica dels Sants Màrtirs Just i Pastor », Quarhis : Quaderns d’Arqueologia i Història de la Ciutat de Barcelona, sous-presse.

16 G. Gueguen, S. Kacki, C. Polet, A. Colombo, M. Rouzic, E. Goudie Falckenbach, D. Castex, « Le cimetière du couvent de Maria Troon (Termonde, Flandre orientale, Belgique, xvie siècle) : un “modèle” de gestion des corps au cours d’une épidémie de peste », communication affichée au XXXIe colloque du galf organisé par l’umr 7268 ades, du 16 au 18 octobre 2013 à Marseille.

17 Nous pouvons noter par exemple que, pour le site de Vilarnau, les sépultures relevant d’une mortalité anormale sont localisées dans la moitié est du cimetière, alors que pour celui de Dreux elles sont surtout situées en marge de l’espace sépulcral.

18 I. Grainger, D. Hawkins, L. Cowal, R. Mikulski, The Black Death Cemetery, East Smithfield, London, Londres, 2008.

19 Communication personnelle du service archéologique de la ville de Palma de Majorque en 2002.

20 M. Signoli, Études anthropologiques des crises démographiques en contexte épidémique : aspects paléo-et biodémographique de la peste en Provence, British Archaeological Reports, International Series, 1515, Oxford, 2006.

21 J. Beltran de Heredia, I. Gibrat « El primer testimoni arqueològic… ».

22 Voir les études de S. Carbonell Basté et d’E. Carrera i Gallissà dans J. Beltran de Heredia, I. Gibrat, « El primer testimoni arqueològic… » Annexe 1 (p. 173-177) et Annexe 2 (p. 178-179).

23 I. Grainger et al., The Black Death Cemetery…

24 B. Bizot, D. Castex, P. Reynaud, M. Signoli, La saison d’une peste (avril-septembre 1590). Le cimetière des Fédons à Lambesc, Paris, 2005.

25 G. Gueguen et al., « Le cimetière du couvent de Maria Troon… ».

26 B. Bizot et al., La saison d’une peste…

27 S. Kacki, L. Rahalison, M. Rajerison, E. Ferroglio, R. Bianucci, « Black Death in the rural cemetery of Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse (Aude-Languedoc, southern France, 14th century) : immunological evidence », Journal of Archaeological Science, 38, p. 581-587.

28 J. Beltran de Heredia, I. Gibrat « El primer testimoni arqueològic… ».

29 Ce point de vue est toutefois débattu, certains travaux historiques suggérant que le taux de morbidité dans les campagnes aurait été aussi important que dans les cités, si ce n’est supérieur (O. J. Benedictow, « Morbidity in Historical Plague Epidemics », Population Studies, 41, p. 401-431).

30 Il est important de rappeler que la fosse n’a pas pu faire l’objet d’une fouille exhaustive, ses limites sud-est, nord-est et sud-ouest étant situées hors de la fenêtre d’exploration archéologique.

31 M. Signoli, S. Tzortzis, B. Bizot, Y. Ardagna, C. Rigeade, I. Séguy, « Découverte d’un cimetière de pestiférés du xviie siècle (Puy-Saint-Pierre, Hautes-Alpes, France) », M. Signoli, D. Chevé, P. Adalian, G. Boëtsch, O. Dutour (éd.), Peste : entre épidémies et sociétés, Florence, 2007, p. 131-135.

32 À titre d’exemple, en Angleterre, une ordonnance royale de 1666 recommande de déposer une grande quantité de chaux dans les sépultures des victimes de la peste (Rules and orders to be observed by all justices of peace, mayors, bayliffs, and other officers, for prevention of the spreading of the infection of the plague, Londres, imprimée par John Bill et Christopher Barker, 1666).

33 E. M. J. Schotsmans, J. Denton, J. Dekeirsschieter, T. Ivaneanu, S. Leentjes, R. C. Janaway, A. S. Wilson, « Effects of hydrated lime and quicklime on the decay of buried human remains using pig cadavers as human body analogues », Forensic Science International, 217, 2012, p. 50-59.

34 S. Kacki, D. Castex, « Réflexions sur la variété des modalités funéraires… » ; Id., « Funérailles en temps d’épidémies… ».

35 Une première analyse physico-chimique de ce matériau a permis de l’identifier comme étant de la chaux ; analyse effectuée par Núria Armentano (Université autonome de Barcelone).

36 On prête généralement à la chaux diverses propriétés, parmi lesquelles celles d’accélérer la disparition des chairs et de minimiser les odeurs de putréfaction. Des données expérimentales suggèrent toutefois que l’application de ce matériau engendrerait au contraire un ralentissement de la décomposition de la matière organique (E. M. J. Schotsmans et al., « Effects of hydrated lime… »).

37 D. Alexandre-Bidon, « Le linceul : texte et images, xiiie-xve siècle », Rencontre autour du linceul, gaafif, bulletin de liaison, n ° spécial, 1996, p. 10-14.

38 J. N. Biraben, Les hommes et la peste en France et dans les pays méditerranéens, Paris-La Haye, t. I et II, 1975.

39 Cette volonté d’une non-différenciation dans la mort lors d’une catastrophe entraînant le décès simultané de plusieurs individus est du reste discutée dans un ouvrage sociologique concernant des morts collectives accidentelles récentes : G. Clavandier, La mort collective – Pour une sociologie des catastrophes, Paris, 2004, p. 91-94.

40 Son absence est plus intéressante en termes interprétatifs pour les sépultures multiples plus anciennes, telles que les tombes du haut Moyen Âge de Sens et de Poitiers (D. Castex, S. Kacki, « Funérailles en temps d’épidémies… »).

41 Au Moyen Âge, la diffusion de la maladie était mise sur le compte d’une corruption de l’air. À l’Époque moderne, les concepts contagionistes se sont progressivement imposés dans les esprits, une transmission interhumaine étant souvent incriminée. Le bacille de la peste et son mode de diffusion n’ont été découverts qu’à la fin du xixe siècle : A. E. J. Yersin, « La Peste Bubonique à Hong-Kong », Annales de l’Institut Pasteur, 8, 1894, p. 662-668 ; P. L. Simond, « La propagation de la peste », Annales de l’Institut Pasteur, 12, 1898, p. 625-687.

42 G. Clavandier, La mort collective…, p. 93.

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