Les cimetières villageois français du xvie au xixe siècle
p. 61-81
Texte intégral
1Les cimetières français d’Ancien Régime ont été beaucoup moins étudiés que ceux du Moyen Âge, ne serait-ce que parce que l’archéologie funéraire des époques modernes et contemporaines est moins avancée que la médiévale et surtout parce que les travaux fondés sur la documentation écrite n’ont trop souvent envisagé que les cimetières urbains ou plus précisément les sépultures urbaines1. Une caractéristique de la période qui va des xive-xve siècles au xviiie est, en effet, en particulier dans les villes, l’entrée massive des tombes et tombeaux dans les lieux de culte et le dédoublement des espaces funéraires. Une autre est, à partir du xvie siècle, la production croissante d’archives et d’imprimés urbains, avec pour conséquence la surreprésentation des villes dans les discours qui dénoncent, par exemple, l’état ou l’hygiène des cimetières à la fin de l’Ancien Régime. Pourtant, le monde urbain est démographiquement très minoritaire. On estime ordinairement les habitants des villes à 14-15 % de la population vers 1600, 18 % vers 1740, et peut-être 20-21 % des Français sous Louis XVI.
2Les villes sont autant d’îlots dans une France majoritairement rurale. La définition que les dictionnaires du temps donnent de la ville est « Assemblage de plusieurs maisons disposées par rues et fermées d’une closture commune qui est ordinairement de murs et de fossez »2. Je retiendrai ces critères pour esquiver le débat académique sur la limite entre monde rural et urbain. Ces deux spécificités que sont la densité du bâti et son enveloppe fortifiée soulèvent pour l’aménagement, la superficie ou l’extension des cimetières des problèmes qui sont bien moins aigus au village, voire qui ne s’y posent pas. Au demeurant, les deux premiers textes de la législation funéraire française, la déclaration royale du 10 mars 1776 et le décret du 23 prairial an XII (12 juin 1804), qui interdirent quasiment l’inhumation dans les lieux de culte et ordonnèrent le transfert des cimetières à quelque distance des enceintes, ne concernent explicitement que les villes et les bourgs. C’est l’ordonnance de Louis-Philippe du 6 décembre 1843 qui étendit par son article premier ces prescriptions à « toutes les communes du royaume ». Soulignons d’emblée une autre différence. L’histoire sociale d’Ancien Régime a caractérisé la ville par l’importance numérique des « gens du bel air », qui n’exercent pas une activité manuelle mais intellectuelle, servent Dieu ou le roi ou sont rentiers. Ces catégories tendent à privilégier l’inhumation dans les églises avec éventuellement un tombeau. La ville se caractérise encore par la présence des couvents des ordres mendiants, les chapelles de confréries, d’hôpitaux. Si l’on excepte le Midi aux vastes paroisses urbaines, la ville de quelque importance est divisée entre plusieurs paroisses intramuros. L’offre d’espaces funéraires y est, pour les catholiques, importante et diversifiée3. Elle est réduite dans les villages.
État de la bibliographie et sources
3Si l’on excepte l’ensemble, nullement négligeable, des monographies villageoises qui consacrent souvent quelques lignes aux cimetières et quelques grandes études de synthèse qui privilégient cependant les exemples urbains4, les principaux travaux sont des thèses d’histoire régionale. Quelques-unes relèvent d’une histoire de la mort apparue précocement en France mais qui s’y est moins développée que les funeral studies anglo-saxonnes : thèse de François Lebrun sur l’Anjou, immense thèse d’Alain Croix sur la Bretagne, thèse de Michel Vovelle et la mienne sur la Provence ; thèse de Ramon Sala sur les Pyrénées catalanes5. On doit ajouter deux essais de synthèse de longue durée sur la Bretagne et plus récemment sur la Lorraine6. Plus nombreuses sont les thèses sur des aspects de l’histoire d’un diocèse. Mais certaines ne traitent pas des cimetières, soit que leurs sources n’en disent rien, soit que leurs auteurs les aient jugés peu significatifs pour leur propos7. Sinon, ces travaux ne consacrent souvent que quelques paragraphes à l’état des cimetières, pour signaler en général leur défaut de clôture et citer quelques notations jugées pittoresques sur leurs usages profanes8. Sauf exception, la plupart des auteurs se soucient peu de distinguer entre village, bourg et ville. Les recherches sur les cimetières postmédiévaux sont actuellement surtout le fait d’historiens et d’historiens de l’art de l’Époque contemporaine, qui disposent de sources diversifiées. En revanche, les sources sont souvent rares et lacunaires pour le xvie siècle qui est aussi le siècle le moins étudié par les travaux d’histoire diocésaine.
4La plupart des études consacrées aux protestants comportent des remarques sur leurs sépultures. La présence juive est essentiellement urbaine sous l’Ancien Régime, l’exception étant l’Alsace et une partie de la Lorraine où des cimetières juifs ruraux existent.
5Les cimetières villageois posent, pour les Temps modernes et même le xixe siècle, un problème de sources écrites. Certes, un patient dépouillement des délibérations communales, lorsqu’elles existent, peut permettre de glaner quelques indications. Au xixe siècle, les translations et agrandissements des cimetières donnent lieu à des dossiers munis de plans dans les archives communales et préfectorales. Grâce à eux, Philippe Boutry a pu consacrer un chapitre aux cimetières dans sa thèse sur l’Ain au temps du curé d’Ars9. Mais le cimetière d’un petit village, qui n’a été ni transféré ni agrandi au cours des derniers siècles, peut n’apparaître dans les archives communales qu’à travers quelques réparations de sa clôture et de son portail, outre l’indication de son périmètre sur les plans cadastraux.
6Une source exceptionnelle n’a guère été exploitée jusqu’ici : l’enquête de l’an XII (1804) diligentée par le ministère de l’Intérieur sur « les lieux consacrés aux inhumations », la seule enquête détaillée, riche en données chiffrées, qui ait été tentée dans l’ensemble de la France. Mais ses tableaux, récapitulant par arrondissement les réponses des maires, sont dispersés, lorsqu’ils ont été conservés, entre les archives nationales qui ne possèdent que ceux d’une minorité de départements, certaines archives départementales, et des archives communales qui peuvent renfermer les brouillons de réponses pour des départements dont les tableaux récapitulatifs sont perdus ou n’ont pas été élaborés en leur temps. Les lacunes semblent très importantes. Néanmoins les réponses retrouvées se répartissent dans la plupart des parties de la France10.
7Une source souvent sous-utilisée est constituée par les registres paroissiaux où ont été enregistrées les sépultures. La mention du lieu d’inhumation, l’église ou le cimetière, y est très variable d’un curé à un autre. L’existence d’aires familiales, sur lesquelles je vais revenir, peut être entrevue par une phrase telle que « (il) a été enseveli au cimetière à la tombe de ses prédécesseurs ». Toute étude locale des cimetières devrait s’accompagner d’un sondage dans ces registres afin de tenter de déterminer, lorsque la source le permet, la part de population enterrée dans l’église. Les testaments sont une autre source susceptible de renfermer des données éparses sur les cimetières, à travers la clause de l’élection de sépulture. Leur dépouillement n’est rentable que dans le cadre d’une enquête plus large, prenant en compte la plupart de leurs données11. La même remarque vaut pour les livres de raison et, plus largement, les documents du for privé.
8La principale source écrite est souvent constituée par les visites pastorales et parfois les enquêtes paroissiales qui peuvent les préparer12. Le cérémonial de la visite comprend souvent, au xviiie siècle, une absoute prononcée par l’évêque au cimetière, occasion de formuler parfois une remarque sur son état13. Le cimetière entre progressivement, au cours du xviie siècle, dans les préoccupations de l’évêque réformateur14, avec de nettes différences chronologiques selon les régions de France, ce qui explique que certaines études fondées sur les visites pastorales de ce siècle n’en fassent pas mention15. Si le cimetière est situé à quelque distance de l’espace aggloméré, le visiteur peut déléguer à un de ses vicaires généraux ou à un membre de sa suite le soin de son inspection. Lorsque des séries successives de visites ont été conservées, une évolution peut être dégagée. Non sans prudence critique cependant, car une telle source ne témoigne pas directement de l’état d’un cimetière : elle indique les écarts entre ce que peut observer ou apprendre le visiteur ou son représentant et leurs exigences en matière de « décence » de l’enclos. L’évolution reflète en fait celle des exigences épiscopales. L’utilisation des visites pastorales est cependant délicate pour les cimetières, car à la différence des églises, leur mention n’y est pas systématique. L’absence de remarques sur l’état du cimetière n’équivaut pas à une sorte de « rien à signaler ». Une longue pratique de ce type de texte me laisse penser que, dans certains cas, l’évêque, conscient du coût de la réfection de l’église, qui s’avère urgente, s’abstient d’ajouter celle du cimetière. À noter qu’il exige parfois des réparations au cimetière dans son ordonnance de visite alors que le procès-verbal n’en disait rien16.
9Les évêques tridentins réunissaient, après leurs visites, des synodes diocésains et les actes de nombre d’entre eux ont été publiés par leurs soins sous forme d’instructions pastorales. Les prélats y manifestent une nette propension à généraliser un « abus » qui n’a été signalé parfois qu’en un seul lieu ou même n’est pas attesté dans le diocèse mais pourrait l’être. En effet, ils reprennent, voire recopient, des paragraphes des recueils préexistants. Il en est de même des rituels diocésains qui peuvent renfermer, à l’article des obsèques, quelques données normatives. À noter que les évêques concordataires incluent les cimetières dans leurs visites et publient des ordonnances synodales.
10Le regard rapide et parfois distrait de l’évêque analyse théoriquement les cimetières à travers une grille d’enquête qui est précisée par quelques modèles de questionnaires imprimés ou manuscrits. Dans le cas provençal, le seul à avoir été publié semble celui que L. Aubert de Villeserin donna en 1694 pour son diocèse de Senez. Il prend en compte d’abord la localisation du cimetière, son aspect général et son organisation interne :
« Si le cimetière est près de l’église ;
– entouré de murailles ;
– fermé à clef ;
– s’il y a une grande croix de pierre au milieu ;
– s’il y a une place pour les enfans mort-nez et une pour les jeunes enfans baptisés. »
11Ensuite son entretien et l’éventuelle présence des vivants dans l’enclos :
« S’il y a des arbres ;
– si on brûle les herbes et les épines ;
– si on n’y tient point de marché ;
– s’il n’y a point de chemin public17. »
12Confronter point par point ce questionnaire avec la réalité telle qu’elle est perçue par l’évêque revient à vérifier son degré de conformité aux représentations que ce membre d’une élite urbaine se faisait de ce que devait être le cimetière, lesquelles ne correspondaient pas forcément à celles des fidèles ruraux. Les premières recherches ont implicitement avalisé l’expertise de l’ordinaire diocésain contre celle des usagers du cimetière et qualifié de « progrès » tout indice de rapprochement du réel observable à un moment donné avec le portrait idéal que traçait le prélat. Il m’arrivera, pour faire court, d’employer ce terme commode, en dépit de ses présupposés et du risque d’anachronisme. Il s’agit plutôt d’une évolution qui peut être lue comme la diffusion lente de principes de la Réforme catholique, en particulier celui de séparation du sacré et du profane, d’abord auprès du clergé puis des fidèles, en particulier de la sanior pars qui dirige la communauté rurale.
Un préalable : un cimetière pour qui ?
13Il convient cependant de poser une question préalable, trop souvent omise. Quelle catégorie de la population est enterrée au cimetière ? Ce qui revient à tenter de définir quelle portion de la population est inhumée dans les lieux de culte. Elle semble avoir été très variable selon les moments, les régions, voire les lieux18.
14L’insistance des paroissiens pour être enterrés dans les églises semble atteindre son intensité maximale au xviie siècle, temps de la Réforme catholique, avant de connaître une décrue au xviiie. Dans le diocèse de Chartres, le curé de Courtalain déclare en 1645 au visiteur que « la plupart des paroissiens désiroient estre enterrés » dans l’église du lieu19. Entre 1628 et 1647, le visiteur du Dunois, dans le même diocèse, doit fixer, dans neuf paroisses, pour les fosses creusées dans l’église, deux tarifs selon que les morts ont fait ou non leur communion20. De fait, l’inhumation dans le lieu de culte implique ordinairement une élection de sépulture testamentaire, à moins d’avoir des droits sur l’église ou d’y avoir un caveau de famille. Elle implique aussi un versement d’argent21.
15Noël Coulet a montré qu’à la fin du Moyen Âge, dans les agglomérations rurales provençales, le choix de l’inhumation dans l’église n’est le fait que d’une très faible minorité de prêtres et de notables. Il peut en être de même aux siècles suivants à en juger par les registres de catholicité : il était fréquent en Haute-Provence que seul le caveau du seigneur se trouve dans l’église et que l’on enterre aussi, à l’occasion, dans cette dernière des prêtres et quelques petits notables à même la terre22. L’essentiel de la population continuait d’être enterré au cimetière, vraisemblablement partagé en espaces familiaux. Dans les bourgs provençaux, la situation était très contrastée. Il semble bien y avoir eu, en fait, résistance efficace de certains curés, s’appuyant souvent sur des ordonnances épiscopales, devant ce qui était une nuisance majeure pour leur église. La carte qu’Alain Croix a pu réaliser pour la Bretagne des xvie et xviie siècles tend à suggérer des phénomènes de continuité entre paroisses, qui esquissent des zones d’inhumations dominantes à l’église ou au contraire au cimetière, d’explication difficile, d’autant que l’auteur n’a pas tenté de corréler le phénomène avec l’importance démographique des paroisses, indice de leur composition sociale23.
16Serge Brunet montre le contraste entre Val d’Aran et Comminges, où le caveau d’église est le fait du clergé et de quelques familles de notables et Bigorre où l’essentiel de la population est enterré dans l’église, la chaise de chaque famille étant posée sur la tombe des siens24.
Localisation par rapport à l’habitat
17Où se situe le cimetière d’une paroisse rurale ? La réponse n’est pas toujours aisée avant les premiers plans cadastraux et l’enquête de l’an XII. Un premier constat est la fréquence du lien d’immédiate proximité, et même de contiguïté, des cimetières des villages et des bourgs avec un lieu de culte. C’est ainsi le cas, à en juger par les indications des visites pastorales, en Provence des trois quarts, sinon des quatre cinquièmes des cimetières des diocèses d’Arles, Gap, Grasse et Vence. Encore qu’une telle source, qui n’est point systématique, pourrait-elle minorer le phénomène. Les visites épiscopales du diocèse de Senez, en Haute-Provence, n’indiquent que 53,5 % de cas. Or selon l’enquête de l’an XII, sur 36 communautés situées avant la Révolution dans le diocèse, 32 (89 %) avaient, au début du xixe siècle, un cimetière établi près de l’église ou d’une chapelle.
18Le cimetière n’est pas pour autant « communément […] au centre du village », comme Jean Fourastié et Pierre Goubert l’ont naguère affirmé25. En zone montagnarde, le cimetière peut longtemps subsister à l’ombre de la « primitive église » – ou du moins celle qui est jugée telle, édifice souvent médiéval, transformé en chapelle de pèlerinage, à distance de l’habitat qui a glissé vers une zone plus basse. Le cimetière peut aussi ne pas être « dans le lieu » mais à ses marges, parce que l’église est en limite de l’habitat. L’examen de vues aériennes anciennes ou de la carte au 25 000e montre que c’est souvent le cas dans nombre des régions de France où le cimetière subsistera jusqu’à nos jours aux côtés de l’église, parce qu’ils sont tous deux dans une zone peu habitée ou parce que l’habitat est desserré ou même très dispersé. L’utilisation de ces sources figurées très postérieures doit être cependant prudente : l’étude d’archive montre que le cimetière a pu être transféré au xixe siècle à côté, ou même autour, d’une chapelle préexistante proche du village.
19Lorsque l’évêque en visite pastorale juge trop forte la distance qui sépare une agglomération de son cimetière, il peut prescrire le transfert de l’enclos afin de le rapprocher de l’habitat. Les visites suivantes peuvent révéler qu’il n’en a rien été, sans qu’il soit aisé de trancher entre la résistance passive de la population qui souhaite continuer d’être inhumée au lieu de ses ancêtres, ou le refus de la dépense. Le cas inverse existe, les représentants de la population mettent alors à profit le passage de l’évêque pour obtenir l’autorisation de transférer un cimetière trop éloigné du noyau d’habitation, parfois accessible par un chemin ardu où s’épuisent les porteurs du corps. Peuvent exister dans ce cas des stations coutumières, dont l’emplacement est souvent marqué d’une croix ou d’un oratoire sur pilier, où l’on s’arrête pour relayer les porteurs ou pour qu’ils se reposent un peu. Le même type de petit aménagement peut exister en zone d’habitat dispersé pour indiquer l’endroit où se forme le cortège d’enterrement des habitants de la campagne.
20Il peut y avoir plusieurs cimetières, l’ancien et le nouveau, et surtout des cimetières de hameaux. Quant à la communauté dépourvue de cimetière, elle peut correspondre à un très faible groupement humain, souvent de formation récente, qui transporte ses morts dans le cimetière d’une paroisse voisine, ou bien à une localité qui enterre tous ses morts dans l’église. Il est parfois possible de déterminer qu’un évêque y a interdit le cimetière, parce qu’il le jugeait « indécent », précipitant ainsi une évolution en faveur de l’église. L’absence de cimetière ou l’état d’abandon du cimetière paroissial peuvent trahir aussi la présence quasi exclusive d’une population réformée qui se fait enterrer sur ses terres. Je reviendrai sur les inhumations des non-catholiques ci-après.
21Peut enfin exister un cimetière de peste, soit la parcelle, en général hors de l’espace villageois, où l’on a enterré lors des pestes ou d’une peste, parfois simplement marqué par une croix et peut-être quelques pierres servant de bornes. La toponymie, le cadastre et la mémoire collective peuvent conserver son souvenir26.
La clôture du cimetière
22Les visites pastorales nous renseignent, avant tout, sur l’état de la clôture du cimetière. Les indications sur ce sujet constituent souvent la majorité des remarques épiscopales, d’autant que l’article 22 de l’Édit de 1695 ordonne : « Seront tenus pareillement les habitans desdites paroisses d’entretenir et de réparer la nef des églises et la clôture des cimetières […] ». L’exigence de clôture des évêques correspond à leur volonté de délimiter nettement cet espace sacré par rapport aux espaces profanes qui l’entourent et aussi de le protéger des profanations ou, du moins, des « indécences » par une clôture et une porte bien fermée. Les évêques exigent pour cela des clôtures, minérales ou végétales selon les régions, « de hauteur suffisante ». Globalement, des progrès semblent se dessiner entre le xviie et le xviiie siècle, non sans rechutes lorsqu’une clôture qui a paru satisfaisante à un évêque est jugée en ruines ou insuffisante par un de ses successeurs quelques décennies plus tard. Dans le diocèse de Bordeaux, les visites du début du xviie siècle indiquent très peu de cimetières bien clos mais la priorité semble encore la restauration des églises. Des travaux sont cependant notés : ainsi en 1633 le cimetière de Cardan est-il doté de murailles neuves. Un siècle plus tard, sur dix paroisses visitées, dans l’archiprêtré de Moulis, huit ont des cimetières convenablement fermés. En Entre-Dordogne en revanche, les ordonnances épiscopales sont très mal suivies sur ce point27. Même constat en Anjou où en 1739-1740, le visiteur trouve dans 34 paroisses sur 40 (85 %) le cimetière « bien fermé et en règle ». En 1725, selon une enquête de l’évêque de Boulogne auprès des desservants de 263 paroisses, dans 225 cas, le cimetière est clos, dans 20 assez bien fermé (93,2 % au total) et dans 18 (6,8 %) mal ou non fermé28. Philippe Goujard s’est borné, dans sa thèse sur les paroisses rurales de haute Normandie au xviiie siècle, à estimer à 28 % la proportion globale de cimetières ouverts ou mal clos29. En Provence, les cimetières sans clôture sont, au xviiie siècle, ceux de très petites agglomérations ou de hameaux. Ce long combat ne sera totalement gagné qu’à l’Époque contemporaine par les autorités civiles. Il est très difficile, sauf exceptions bien conservées, en Bretagne par exemple, de trouver des précisions sur l’architecture et l’aspect des portes.
23Les évêques veulent des portes bien fermées, et même fermées « à clef », ce qui est plus qu’une nuance. Une porte simplement fermée par une barre interdit aux animaux l’accès au cimetière, qu’il s’agisse de ruminants que l’on y fait brouter, des poules qui y picorent et grattent le sol, des pourceaux ou des animaux carnivores, chiens et même loups, susceptibles de dévorer « la substance des morts » fraîchement ensevelis ou de déterrer et emporter les ossements. Les attaques des carnassiers ont particulièrement retenu l’attention. Dans sa grande enquête sur les loups, Jean-Marc Moriceau souligne que le loup nécrophage s’accoutume à la chair humaine et devient anthropophage30. Les témoignages qu’il cite suggèrent que de telles attaques, comme celles des chiens de troupeau, étaient ponctuelles, eurent lieu surtout au xviie siècle où nombre de cimetières semblaient encore mal clos et n’affectèrent qu’une faible minorité des cimetières français. L’évêque en visite ne peut guère être témoin de tels faits. Les déjections animales qu’il observe dans le cimetière en sont parfois l’indice. Le visiteur est renseigné par le clergé paroissial – du moins lorsque ce dernier espère que son supérieur parviendra à interdire ce qu’il considère comme un « abus » dont lui-même ne vient pas à bout. Car si les curés semblent les premiers à dénoncer les attaques des loups, ils peuvent omettre de signaler ce qui ne les choque que modérément : que des bestiaux viennent y paître ou que l’on y tienne quelques ruches.
24Si le cimetière est muni d’une « bonne serrure », comme l’écrivent aussi les prélats, il s’agit dès lors d’empêcher les humains d’y pénétrer, ne serait-ce que pour y passer. Pour éviter de fouler de la terre bénite, en particulier lorsque le cimetière est traversé par un « chemin public », certains prélats rendent à un statut profane la bande de terrain auquel correspond ce passage qui existe de facto à travers l’enclos. Ils peuvent transformer en place publique la partie du cimetière située devant l’église.
25La construction (ou la plantation) et l’entretien de la clôture constituent la plus lourde dépense à laquelle la communauté d’habitants doit consentir pour le cimetière. L’évêque transige parfois avec les représentants d’une communauté modeste : on pourra réduire la superficie du cimetière afin qu’il soit clos ; ainsi dans l’archidiocèse d’Autun où beaucoup de cimetières seront ensuite jugés « étroits » à la fin du xviiie siècle, sans doute parce que l’on ne pourra plus alors continuer d’enterrer aussi dans l’église31. Il est possible qu’un rapport existe entre l’étendue du cimetière, ramenée au nombre des habitants, et la forme de la clôture. Les données chiffrées de l’enquête de l’an XII permettent de l’apprécier. Le cimetière de Basse-Provence à clôture haute s’oppose déjà à celui de la Haute-Provence montagnarde, moins étroit mais à clôture plus basse. Tous deux sont moins étendus que le cimetière bas-normand, à clôture végétale. Cependant, des paramètres bien plus significatifs pourraient être la densité de l’habitat aggloméré, jointif ou desserré selon les régions, la répartition des morts entre l’église et le cimetière et, surtout, les rapports rituels que les habitants d’une petite localité ont entretenus avec des morts qu’ils avaient connus.
La croix centrale
26Après la clôture, l’exigence d’une croix centrale est la plus fréquemment émise par les visiteurs pastoraux. Elle constitue d’abord à leurs yeux la marque de sacralité de l’enclos. Elle le distingue aussi des autres clos – en pays d’enclos, l’évêque peut aussi exiger une petite croix sur la porte. Le symbole qui figure le cimetière sur les plans et cartes anciens est cette croix centrale. Elle est aussi nécessaire à la liturgie puisque le prêtre doit se tourner vers elle pour réciter les dernières prières au moment de l’inhumation. C’est enfin devant elle qu’en certaines régions, on bénit les branches de buis ou d’olivier le jour des Rameaux, d’où le nom de croix hosannière que les folkloristes du xixe siècle ont relevé, de l’incipit de l’hymne de la procession de cette fête, Hosanna in excelsis. Son absence peut surprendre. En fait, les célébrants semblent avoir, dans ce cas, récité les dernières prières devant la croix portée par un clerc ou bien s’être tournés vers la croix du clocher proche. Dans le diocèse de Bordeaux, au cours du xviiie siècle, on a installé des croix de pierre « en tous lieux ». Bernard Peyrous observe que « les prélats (y) tenaient beaucoup32 ».
Paysage et gestion du cimetière
27Le cimetière de la plupart des régions de France semble avoir eu, au moins à la fin du xviie et au xviiie siècle, l’aspect d’un champ ou même d’un terrain vague, et sa caractéristique est l’absence de repères d’inhumation explicites, c’est-à-dire de tombeaux. Des auteurs attentifs ont çà et là observé qu’il n’en était pas de même au xvie siècle ou au début du xviie, du moins dans les bourgs et les villes : le cimetière renfermait alors des tombeaux de notables. Le cas de celui de la chapelle Saint-Hilaire de Marville (Meuse) est exceptionnel par sa fossilisation : il a conservé, outre son ossuaire, de nombreux tombeaux établis entre le xve et le xviie siècle, période faste pour cette agglomération qui est alors une petite ville33. Les cimetières de certaines parties occidentales et surtout septentrionales de la France pourraient avoir renfermé des tombeaux, ainsi que ceux des régions belges et allemandes voisines. Ainsi les cimetières juifs alsaciens contenaient des stèles, alors que ceux des Juifs du pape, dans le Comtat, n’en renfermaient aucune, comme les cimetières catholiques34. L’enquête de terrain semble ici essentielle mais elle n’est qu’amorcée. Encore faut-il que l’enquêteur admette que la date d’érection d’un monument ne correspond pas forcément à celle du premier décès35.
28Deux formules radicalement différentes se dessinent avec, sans doute, des situations intermédiaires. La première est l’inhumation dans des fosses peut-être alignées au fur et à mesure des décès. Cependant dans le cas breton, l’emplacement des corps est à l’évidence connu du fossoyeur, puisqu’il procède aux exhumations et au dépôt dans les ossuaires des boîtes à crânes. Mais la culture spatiale du fossoyeur nous échappe. La seconde formule est le partage de facto du cimetière entre les principales familles. J’ai proposé d’appeler « aires familiales » ces portions de l’espace cimitérial qu’aucune marque ne semble avoir indiquées, qui échappent très largement au document d’archive public mais non aux clauses testamentaires et n’ont guère été perçues pendant longtemps. L’existence de ces « aires » a été démontrée, pour l’Époque moderne, dans les Pyrénées (« lo vas de casa », la fosse de maison), la Haute-Provence ou le Rouergue36 et, pour l’Époque contemporaine, en d’autres zones rurales, telle la Bourgogne, par les ethnologues37. L’« aire familiale », où l’on est enterré « parmi les siens » ou « à la tombe de ses prédécesseurs », caractérise avant tout de petits villages, en particulier en zone montagnarde. Là où elle existe, il semblerait que « le cimetière paroissial fait l’unanimité » (Ramon Sala38). Si quelques maires signalent son existence lors de l’enquête de l’an XII, leurs successeurs comprendront qu’elle constitue une forme d’usurpation de la terre communale en l’absence d’achat d’une concession et ils se garderont en général de la mentionner. Elle persistera discrètement dans de petits villages jusqu’à nos jours, ne commençant à être indiquée par des croix ou des stèles qu’au cours du xxe siècle.
29Que faire des ossements issus des fosses ou qui affleurent au sol ? La question de l’ossuaire semble avoir été surtout posée par les historiens dans les régions où il a pris la forme d’un aménagement spécifique très visible, qu’il occupe l’étage d’une galerie entourant le cimetière, comme dans l’aître Saint-Maclou de Rouen, qu’il constitue un petit monument comme en Bretagne, ou qu’il occupe des niches aménagées dans les murs, comme à Prat-de-Molo en Catalogne, tous ces aménagements semblant antérieurs à la fin du xviie siècle. Dans nombre de régions, l’ossuaire n’est pas réellement aménagé ou est peut-être constitué par un caveau. En Provence, on utilise une portion du cimetière ou on accumule les ossements le long de la face interne de ses murs ou bien on dépose les ossements déterrés lors du creusement d’une fosse au fond de celle-ci.
Le problème de la terre sacrée
30Lorsque Mgr de Villeserin demande « s’il y a une place pour les enfans mort-nez et une pour les jeunes enfans baptisés39 », il fait allusion à deux espaces radicalement différents mais parfois confondus par la postérité historienne. Assez peu fréquente est en fait l’exigence qu’un emplacement particulier soit réservé aux « innocents », les enfants baptisés morts avant l’âge de raison, « pour distinguer ces corps où le Saint-Esprit a toujours fait sa demeure », puisqu’étant morts lavés du péché originel et avant d’avoir pu sciemment commettre le mal, ils bénéficient de la béatitude céleste. Il s’agit d’isoler les restes d’une catégorie du peuple des baptisés dont le salut est tenu pour assuré et, donc, de leur accorder une sépulture plus digne. Certains évêques provençaux ne signalent jamais la présence de cet espace mais notent occasionnellement son absence qui pourrait sembler dès lors presque générale. Le fait est cependant surprenant : en effet, de tels coins enfantins, couverts de petites croix blanches, ont existé au xixe siècle et existent parfois encore dans nombre de cimetières ruraux. C’est là un exemple de la difficulté à interpréter le silence des textes.
31Les enfants morts sans baptême figurent dans la liste des interdits canoniques. N’étant pas entrés par le baptême dans la communion de l’Église, ils ne pouvaient être mis en terre bénite. Le souci de leur donner cependant une sépulture, quasiment analogue à celle des baptisés mais en terre profane, est manifeste dans une prescription des ordonnances synodales, presque constamment répétée à partir de la fin du xviie siècle : « Il y aura […] un petit lieu séparé et non béni pour y enterrer les enfants morts sans baptême », qui pourra être, selon les ordonnances de Toulon et de Gap « à côté » ou « proche » du cimetière. L’évêque de Vence s’est montré attentif à ces places non bénites lors de sa visite de 1771 : sur 18 cimetières visités, l’« endroit séparé pour enterrer les enfants morts sans baptême » est explicitement signalé dans cinq d’entre eux ; il y a présomption de son existence dans quatre autres enclos. Ce « lieu séparé et non béni » n’a pas été établi dans les neuf autres puisque l’évêque en choisit l’emplacement. Dans le diocèse d’Arles, l’enquête pastorale de 1777 indique qu’une telle « place séparée et non bénite » existe dans 14 cimetières paroissiaux contre 23 qui n’en renferment explicitement pas ; dans trois de ces derniers cas, cette place est cependant signalée hors du cimetière40.
32Les autres interdits canoniques de sépulture religieuse, fixés par le Rituel romain de Paul V (1614, chap. De exequiis), sont avant tout les non-catholiques, ainsi que les excommuniés, les suicidés – de façon restrictive : « Ceux qui par désespoir ou par rage non pas par folie, se sont procuré la mort, à moins qu’auparavant de mourir ils n’aient donné quelques signes de pénitence » – les duellistes et « les pêcheurs publics et manifestes, comme les usuriers, les blasphémateurs, s’ils ne font pénitence et réparation publique ». Les non-catholiques sont essentiellement, en milieu rural, des protestants. Le xvie siècle est progressivement marqué par le partage de certains cimetières paroissiaux entre catholiques et réformés et la création de cimetières propres à la nouvelle confession – ces derniers se distinguant surtout de ceux des catholiques par l’absence de lien de proximité avec le lieu de culte et une certaine distance de l’habitat. Les articles 28 et 29 de l’Édit de Nantes en 1598 et l’article 45 des articles secrets avaient prescrit aux officiers royaux d’accorder aux réformés des cimetières dans « toutes les villes et lieux ». Ces cimetières résultèrent soit d’une division du cimetière existant (quand elle n’avait pas déjà eu lieu) par réduction à l’état profane d’une portion de la terre bénite paroissiale, soit d’une extension du périmètre du champ des morts, soit encore d’une création ex nihilo. Enfin, les cimetières qu’avaient pu fonder au xvie siècle les protestants devaient leur être rendus. Mais en 1685, en conséquence de l’Édit de Fontainebleau par lequel Louis XIV révoquait celui de Nantes, les cimetières protestants furent supprimés. Pour les protestants clandestins, l’enterrement « dans les terres », pratique qui existait déjà en zone campagnarde, s’imposa en cas de refus de la sépulture ecclésiastique par le curé. Les règnes de Louis XIV et Louis XV connurent donc le développement de ces espaces voués à l’inhumation familiale. Leur emplacement que rien ne signalait n’était guère connu que des seuls descendants. Enfin l’article 27 de l’Édit de novembre 1787, qui restituait un état civil aux « non-catholiques », prescrivait que dans les villes, bourgs et villages où décéderaient des sujets ou des étrangers « auxquels la sépulture ecclésiastique ne devra être accordée », l’on établirait un « terrain convenable et décent pour l’inhumation41 ». L’article 15 du décret du 23 prairial an XII devait prévoir que « dans les communes où l’on professe plusieurs cultes », un « lieu d’inhumation particulier » serait prévu pour chaque confession, ou bien le partage du cimetière « par des murs, haies ou fossés, en autant de parties qu’il y aura de cultes différents, avec une entrée particulière pour chacun et en proportionnant ces espaces au nombre d’habitans de chaque culte ». Il allait susciter une jurisprudence considérable jusqu’à son abrogation par la loi du 14 novembre 1881 qui laïcisa les cimetières.
Un lieu public ?
33Au sujet des arbres et de ce que l’on appellera au xixe siècle le « produit spontané » des cimetières (herbe et fruits), l’attitude des évêques semble avoir été radicalement différente selon les régions. Dans l’Ouest, le cimetière peut être planté de pommiers dont la vente des fruits, ainsi que le droit de fauchage de l’herbe qui y croît bénéficient à la fabrique paroissiale. En Provence, les évêques s’opposent à la présence d’arbres dans les cimetières – peut-être en liaison avec des croyances qu’ils jugent superstitieuses – et ils ordonnent que les herbes et ronces qui y croissent spontanément soient régulièrement brûlées.
34L’idéal des autorités religieuses de la Réforme catholique semble un cimetière où ne pénètrent guère que le clergé, les porteurs du corps et le fossoyeur et éventuellement quelques membres du cortège à l’occasion d’un enterrement, à l’exception de quelques processions pour les Rameaux ou le Jour des morts. Il convenait sinon d’empêcher les enfants d’y jouer, comme le précisent parfois les évêques, et les adultes d’y exercer quelque activité que ce soit, de s’y assembler ou même simplement de le traverser.
35L’hostilité des évêques à toute utilisation du cimetière jugée par eux profane peut trahir un certain décalage entre les représentations des clercs ou des notables et celles de la population. Les interdits énumérés dans les ordonnances synodales constituent en quelque sorte le négatif des anciens usages sociaux du cimetière. Il est difficile cependant de distinguer entre la répression d’une attitude opiniâtre et la simple répétition à titre préventif de prohibitions déjà entrées dans les mœurs42. Les recueils d’ordonnances synodales des évêques provençaux de la seconde modernité indiquent ainsi des « profanations » telles que la tenue de marchés ou le débit de vin dans les cimetières, bien attestées au xvie siècle, mais dont on ne trouve nulle trace dans leurs visites pastorales. Les études qui signalent des pratiques profanes ne permettent pas de déterminer si les quelques exemples nominaux cités et datés sont les seuls rencontrés ou simplement les plus significativement dénoncés. Ou bien, l’énumération de ces usages ne s’accompagne d’aucune précision chronologique, comme si le phénomène persistait pendant toute la période prise en compte, qui couvre parfois deux siècles.
36Deux pratiques collectives « profanes » semblent résistantes à la fin du xviie et au début du xviiie siècle dans les cimetières du Sud-Est. Des communautés, en général montagnardes, peuvent y tenir assemblées et conseils, que l’on veuille ainsi marquer une continuité symbolique avec les ancêtres ou plus prosaïquement que l’on ne dispose d’aucun espace communal propre à ces réunions. Par ailleurs, on fait encore sécher au cimetière des lessives, sans doute, si le cimetière est bien clos, pour les préserver des animaux et des voleurs. Ces « profanations » sembleraient disparaître ou du moins s’atténuer au cours du siècle. L’impression générale est celle d’un progrès par rapport aux siècles antérieurs ; progrès partiellement lié sans doute à ceux de la fermeture des cimetières, à la transformation en place de leur partie située devant les églises ; progrès dû à une « active politique de sacralisation des cimetières », selon Philippe Martin qui observe qu’elle n’est pas nouvelle mais désormais relayée par le clergé. Il en résulte un certain effacement d’une « familiarité quotidienne »43 avec la terre des morts, de plus en plus isolée de la vie villageoise et même du « passage » des fidèles. Mais cette évolution pourrait aussi refléter une certaine assimilation, par ces derniers, des principes de « respect » des morts posés par le clergé. Subsisteront, d’ailleurs, des pratiques religieuses telles que les absoutes récitées par le prêtre à la demande des familles ou les prières dites par les laïcs sur les aires familiales, révélées incidemment par de rares documents. Ces usages de la France profonde annoncent paradoxalement le futur culte des morts qui se développera dans les cimetières urbains du xixe siècle.
Variété des cimetières
37Des variations régionales de longue durée semblent marquer la morphologie et la gestion des cimetières. Ainsi leur superficie moyenne, comparée au nombre de la population, met en évidence de nettes différences entre les quelques régions de France étudiées grâce à l’enquête de l’an XII. La clôture est, par la nature de ses matériaux, végétaux ou minéraux (parfois en fil de fer au xxe siècle), et par sa hauteur et sa porte, un autre élément de différenciation qui semble de longue durée.
38De la lecture des travaux disponibles, complétée par les observations d’auteurs régionaux et de folkloristes du xixe siècle, se dégagent quelques traits caractéristiques de certaines régions. Il s’agit avant tout de l’enclos paroissial breton, avec en particulier les ossuaires ouverts où les ossements extraits des fosses sont visibles et, surtout, la pratique des boîtes à crânes de la Bretagne bretonnante, qui a fait naître des édicules spécifiques dans certains cimetières. Mais des ossuaires et des boîtes à crânes existent aussi en Lorraine, à Marville par exemple44.
39Autre trait, l’héritage des tombes établies sur les terres familiales des régions protestantes de l’Ouest ou du Midi, du Poitou aux Cévennes et au Luberon, où l’on passe, au cours du xixe siècle, d’un emplacement dont l’usage funéraire est connu des seuls descendants à un cimetière en miniature, parfois très visible dans le paysage, fermé de murs, planté de cyprès et peuplé de tombeaux. Leur équivalent catholique, les très vastes chapelles sépulcrales établies hors des cimetières, le long des routes ou sur leurs terres par les familles de notables corses, sont un phénomène du xixe siècle, peut-être lié au retard à aménager des cimetières munis de concessions45. De vastes caveaux collectifs de plein air appelés arca, où auraient été déposés tous les corps de certains villages, existent, désaffectés, dans le comté de Nice et en Corse. Faute d’une étude systématique, il n’est guère possible de préciser si cette formule est antérieure à l’interdiction d’enterrer dans les églises. Elle est attestée dans quelques localités des Alpes-Maritimes par l’enquête de l’an XII.
40Pendant l’Époque contemporaine, se produit ce que j’ai proposé d’appeler la « transition funéraire », soit la mise au point, au début du xixe siècle avec la création du Père-Lachaise, du cimetière contemporain, bien clos, viabilisé, planté d’arbres d’ornement, doté de tombeaux pérennes sur des concessions et de signes distinctifs (croix, stèles) sur les fosses. Son originalité est d’être librement ouvert à la visite, à condition de respecter un comportement très maîtrisé défini par le « recueillement » imposé par le « respect dû au mort », principe qui fonde la nouvelle sacralité de l’enclos, de plus en plus détachée de celle de la religion. La lecture des règlements municipaux des cimetières permet d’observer que les maires de la IIIe République renchérirent sur les évêques d’Ancien Régime en matière d’interdits. Des éléments de ce modèle se diffusent progressivement à travers la hiérarchie des agglomérations46. Les cimetières ruraux achèvent d’être enclos et fermés à clef, un temps seulement parfois avant de devenir accessibles à la visite des tombeaux. Ces derniers s’y développent peu à peu dans la seconde moitié du xixe ou même au début du xxe siècle, les notables donnant souvent l’exemple.
41Au cours du xixe siècle se dégage une spécificité du monde villageois : le maintien de certains cimetières autour ou auprès de l’église, qui ne saurait être analysé en termes d’archaïsme, de ferveur religieuse ou d’absence de moyens financiers. La force des résistances villageoises est loin d’être négligeable et elle mériterait des études précises dans la plupart des régions. Non seulement le transfert coûtait cher et imposait la transformation en concessions des « aires familiales », mais l’observation de terrain prouve qu’en zone d’habitat desserré certains cimetières se trouvaient, en fait, à la distance d’au moins 40 m des maisons habitées, prévue par la loi. On sait qu’en d’autres lieux, l’église et son cimetière étaient à distance d’un noyau villageois aggloméré, par suite des déplacements de l’habitat. De plus, l’abandon des théories médicales aéristes sur la nocivité des « miasmes » et la diminution du nombre moyen des morts à cause de la baisse des taux de mortalité et de l’exode rural ont atténué les risques potentiels d’insalubrité que semblaient constituer ces cimetières.
42Dans les modalités d’occupation des enclos par des tombeaux pérennes, une différence régionale est sensible : un premier modèle, perceptible par exemple en Normandie, a privilégié les environs immédiats de la croix centrale. Un autre, qui est de règle en Provence, établit au contraire les premières concessions systématiquement le long des murs d’enceinte. Un troisième a peut-être privilégié, ailleurs, les portions les plus proches de la porte. Des zones où des rangées parallèles permettent l’orientation systématique de la « tête » de la tombe (et donc du cercueil) vers l’est pourraient s’opposer aux zones où l’orientation est indifférente.
***
L’ampleur de nos ignorances
43Le cimetière rural des Temps modernes figure indubitablement parmi les aspects du passé qui sont pauvrement renseignés par la documentation écrite. Encore conviendrait-il d’exploiter cette dernière au maximum, ce que ne firent pas certains auteurs du dernier tiers du siècle passé, période où le dépouillement boulimique des sources prévalut parfois sur leur analyse fine. Il conviendrait aussi de cerner ce sujet à son plus modeste niveau, celui des monographies campagnardes sur la longue durée, en tirant parti de tous les indices disponibles. Le développement de l’archéologie des Temps modernes et même contemporains devrait fournir dans les années qui viennent des éléments de réponse à des questions sur lesquelles les archives sont plus que laconiques, souvent silencieuses : à une période donnée, les inhumations étaient-elles orientées ? Les cadavres étaient-ils ensevelis dans des cercueils ? Les linceuls épinglés ou cousus ? Les archives peuvent apporter en revanche une datation fine de nombre de phénomènes observés. Beaucoup, sinon l’essentiel reste sans doute à découvrir.
Notes de bas de page
1 Cette recherche a bénéficié d’une aide de l’anr-08-blan-0164-01 (projet CoRPS, dirigé par Anne Carol, que je tiens à remercier). Pour des raisons de facilité, nous prendrons en compte ici le territoire français actuel.
2 Dictionnaire de l’Académie françoise dédié au Roy, Paris, 1694, t. 2, p. 644 (1re éd.).
3 Qu’il me soit permis de renvoyer à R. Bertrand, « Des morts à l’ombre de l’église paroissiale (xviie-xixe siècle) », A. Bonzon, P. Guignet, M. Venard (éd.), La paroisse urbaine. Du Moyen Âge à nos jours, Paris, 2014, p. 269-284.
4 Citons avant tout M. Vovelle, La mort et l’Occident de 1300 à nos jours, Paris, 1983, rééd. 2000, ouvrage qui propose une synthèse, à la date de sa rédaction, des travaux disponibles dans l’aire occidentale. L’ouvrage très souvent cité de Ph. Ariès, L’Homme devant la mort, Paris, 1977, relève plutôt du genre de l’essai historique. N’est pas à négliger, en dépit de sa date, D. Ligou, « L’évolution des cimetières », Archives des sciences sociales des religions no 39, 1975, p. 61-77.
5 F. Lebrun, Les hommes et la mort en Anjou aux xviie et xviiie siècles. Essai de démographie et de psychologie historiques, Paris-La Haye, 1971 ; M. Vovelle, Piété baroque et déchristianisation, les attitudes devant la mort en Provence au xviiie siècle, Paris, 1973, rééd. abrégée 1978 et 1996 ; A. Croix, La Bretagne aux xvie et xviie siècles. La vie, la mort, la foi, Paris, 1981, 2 vol. ; R. Sala, Le visage de la mort dans les Pyrénées catalanes. Sensibilité et mentalités religieuses en Haut-Vallespir, xviie, xviiie, xixe siècles, Paris-Perpignan, 1991 ; R. Bertrand, Les Provençaux et leurs morts. Recherches sur les pratiques funéraires, les lieux de sépultures et le culte du souvenir des morts dans le Sud-Est de la France depuis la fin du xviie siècle, Thèse, Paris I, 1994.
6 A. Croix, F. Roudaut, Les Bretons, la mort et Dieu de 1600 à nos jours, Paris, 1984 ; Ph. Martin, Figures de la mort en Lorraine, xvie-xixe siècle, Metz, 2007.
7 C’est le cas par exemple de L. Welter, La réforme ecclésiastique du diocèse de Clermont au xviie siècle, Bulletin historique et scientifique de l’Auvergne, fasc suppl. 1956, (Mémoires XLV) ou de L. Pérouas, Le diocèse de la Rochelle de 1648 à 1724, Paris, 1964.
8 Ainsi pour les premières, outre celle de Th.-J. Schmitt, soutenue en 1952, citée plus loin, J. Ferté, La vie religieuse dans les campagnes parisiennes (1622-1695), Paris, 1962, p. 104-105.
9 P. Boutry, Prêtres et paroisses au pays du curé d’Ars, Paris, 1986, notamment « Les mutations du paysage paroissial : l’éloignement des cimetières », p. 153-181, chapitre paru auparavant dans Ethnologie française, t. XV, no 1, 1985, p. 7-34.
10 Ces tableaux ont été étudiés par M. Bée, « Les cimetières du Calvados en 1804 », Cahiers des Annales de Normandie, no 8, 1976, p. 7-34 ; R. Bertrand, « Les cimetières provençaux au début du xixe siècle d’après l’enquête de l’an XII », Provence Historique, t. XXXIV, fasc. 135, 1984, p. 55-73 ; R. Devos, « L’espace des morts en Savoie, de la cohabitation à la ségrégation », M.-G. Martin-Gistucci (dir.), Traditions populaires, Genève, Cahiers de civilisation alpine I, p. 29-43 ; F. Thebault, Le patrimoine funéraire en Alsace. Du culte des morts à l’oubli, 1804-1939, Strasbourg, 2004, p. 102-117.
11 Outre M. Vovelle, Piété baroque et déchristianisation…, voir les remarques de méthode de A. Croix, La Bretagne aux xvie et xviie siècles…, t. II, p. 871-901.
12 Elles sont répertoriées dans Répertoire des visites pastorales de la France. Anciens diocèses jusqu’en 1790, Paris, 1977-1985, 4 vol. ; Diocèses concordataires et post-concordataires, à partir de 1801, 2 vol, 1978-1980 et dans M. Venard, Répertoire des visites pastorales de la France. Anciens diocèses jusqu’en 1790. Corrections et compléments, Paris-Turnhout, 2006.
13 N. Coulet, Les Visites pastorales, Turnhout, 1977 (Typologie des sources du Moyen Âge occidental).
14 M.-H. Froeschlé-Chopard et M. Froeschlé, Atlas de la Réforme pastorale en France de 1550 à 1790, Paris, 1986. L’attention portée à au moins un cimetière se retrouve dans 41 % des visites conservées entre 1550-1610, 84 % pour la période 1610-1670, 92 % entre 1670 et 1730 et 87 % pour 1730-1790.
15 Ainsi la première thèse de R. Sauzet, Les visites pastorales dans le diocèse de Chartres pendant la première moitié du xviie siècle, Roma, 1975, particulièrement précieuse pour la critique du document, ne mentionne que l’inhumation dans les églises (p. 283-284), les évêques de ce diocèse ne visitant pas encore les cimetières.
16 Exemple : O. Cabayé, G. Gras, L’Albigeois au xviie siècle. Les visites pastorales de Charles Le Goux de La Berchère, Albi, 2009.
17 Manuale seu ordo servandus in visitandis parochiis […] ad usum diocoesis senecensis accomodatum, s. l. 1694, p. 54-55. L’évêque demande enfin : « S’il y a une bière commune pour les pauvres. »
18 Les visites pastorales sont, sur ce point, souvent imprécises. Dans tel village où l’évêque signale que l’on enterre dans l’église, l’examen des actes paroissiaux révèle que ce n’est le cas que pour la famille seigneuriale.
19 R. Sauzet, Les visites pastorales dans le diocèse de Chartres…, p. 283.
20 Ibid.
21 A. Croix, La Bretagne aux xvie et xviie siècles…, longue étude de l’élection de sépulture et des tarifs, t. II, p. 1006-1036.
22 N. Coulet, « Mourir au village. Testaments du pays d’Aix au xve siècle », A. Carol, G. Buti (éd.), Comportements, croyances et mémoires. Europe méridionale xve-xxe siècle, études offertes à Régis Bertrand, Aix, 2007, p. 21-30. R. Bertrand, Les Provençaux et leurs morts…, t. II, p. 320-326.
23 A. Croix, La Bretagne aux xvie et xviie siècles…, t. II, p. 1009, d’après les registres paroissiaux. Carte reprise partiellement par Br. Restif, La Révolution des paroisses : culture paroissiale et Réforme catholique en Haute-Bretagne aux xvie et xviie siècles, Rennes, 2006, p. 309-314, qui a tenté de la mettre en rapport avec la reconstruction ou la rénovation des églises.
24 S. Brunet, Les prêtres des montagnes. La vie, la mort, la foi dans les Pyrénées centrales sous l’Ancien Régime, Aspet, 2001, p. 645-659.
25 J. Fourastié, « De la vie traditionnelle à la vie tertiaire », Population, 1959, p. 3 ; P. Goubert, L’Ancien Régime, t. I, La société, Paris, 1969, p. 86 : « La mort était au centre de la vie comme le cimetière au centre du village » ; phrase reprise dans la refonte de l’ouvrage par D. Roche, Les Français et l’Ancien Régime, t. I, La société et l’État, Paris, 1984, p. 80. À noter au t. 2, Culture et société, l’ajout d’un développement : « Clochers et cimetières de village », p. 51-54.
26 P. Martin, Figures de la mort…, p. 284. Exemple d’étude archéo-anthropologique d’un de ces cimetières : B. Bizot, D. Castex, P. Reynaud, M. Signoli, La saison d’une peste (avril-septembre 1590). Le cimetière des Fédons à Lambesc (Bouches-du-Rhône), Paris, 2005.
27 B. Peyrous, La Réforme catholique à Bordeaux (1600-1719). Le renouveau d’un diocèse, Bordeaux, 1995, t. I, p. 589 et t. II, p. 856-857.
28 F. Lebrun, Les hommes et la mort en Anjou…, p. 479 ; A. Playoust-Chaussis, La vie religieuse dans le diocèse de Boulogne au xviiie siècle (1725-1790), Arras, 1976, p. 62, note 110.
29 P. Goujard, Un catholicisme bien tempéré. La vie religieuse dans les paroisses rurales de Normandie, 1680-1789, Paris, 1996, p. 267.
30 J.-M. Moriceau, Histoire du méchant loup. 3 000 attaques sur l’homme en France, xve- xxe siècle, Paris, 2007, p. 107-115.
31 T.-J. Schmitt, L’organisation ecclésiastique et la pratique religieuse dans l’archidiaconé d’Autun, de 1650 à 1750, Autun, 1957, p. 115.
32 B. Peyrous, La réforme catholique à Bordeaux…, t. II, p. 856-857.
33 F. Roussel, S. Collin-Roset, M.-F. Jacops, Marville, Meuse, Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, Région de Lorraine, Metz, 1988 ; P. Martin, Figures de la mort…, passim.
34 R. Weyl, « Les vieux cimetières », F. Raphaël, R. Weyl, Juifs en Alsace. Culture, société, histoire, Toulouse, 1977, p. 157-179 ; F. Thebault, Le patrimoine funéraire en Alsace…
35 Celle de F. Thebault, Le patrimoine funéraire en Alsace…, p. 117-122, a permis de retrouver 247 monuments antérieurs à 1800, le plus ancien datant de 1654. L’auteur propose des critères stricts de datation des tombeaux.
36 R. Sala, Le visage de la mort…, p. 219-222 ; S. Brunet, Les prêtres des montagnes…, p. 642-645 ; R. Bertrand, Les Provençaux et leurs morts…, t. II, p. 526-530 ; N. Lemaitre, Le Rouergue flamboyant. Clergé et paroisses du diocèse de Rodez (1417-1563), Paris, 1988, p. 192-198.
37 F. Zonabend, « Les morts et les vivants. Le cimetière de Minot en Châtillonnais », Études rurales, no 52, 1973, p. 7-23, repris dans T. Jolas et al., Une campagne voisine : Minot, un village bourguignon, Paris, 1990, p. 425-443. L’auteur avance l’expression de « portion familiale », qui risque de faire croire à un partage distributif du sol du cimetière suivant une règle ou une autorité, alors que l’on ne peut que constater une répartition familiale de fait.
38 R. Sala, Le visage de la mort…, p. 219.
39 Voir ci-dessus, note 17.
40 R. Bertrand, Les Provençaux et leurs morts…, t. II, p. 513-157 ; Id., « Les enfants qui “remplissent le ciel”. Obsèques et sépultures d’enfants en Provence aux xviie-xviiie siècles », Mort et mémoire. Provence, xviiie-xxe siècle, Une approche d’historien, Marseille, 2011, p. 101-112.
41 Voir, parmi une bibliographie abondante mais dispersée, les études publiées par C. Treffort, Mémoires d’hommes. Traditions funéraires et monuments commémoratifs en Poitou-Charentes, de la Préhistoire à nos jours, Poitiers, 1997, p. 96-108 ; J. Thibaut-Payen, Les morts, l’Église et l’État. Recherches d’histoire administrative sur la sépulture et les cimetières dans le ressort du parlement de Paris aux xviie et xviiie siècles, Paris, 1977 p. 158-195 ; S. Molinier-Potencier, La sépulture des protestants de l’Édit de Fontainebleau à l’Édit de tolérance (1685-1792), Thèse, Paris II, 1996.
42 Sur ces pratiques profanes outre P. Ariès, L’Homme et la mort…, p. 68-76, voir la plupart des auteurs déjà cités, ainsi P. Martin, Figures de la mort…, p. 288-292, « Un lieu de vie ».
43 L’expression est de F. Lebrun, Les hommes et la mort en Anjou…, p. 480.
44 A. Croix, F. Roudaut, Les Bretons, la mort et Dieu…, et pour la Lorraine, P. Martin, Figures de la mort…, p. 292-298.
45 J.-M. Pianelli, « Champs des morts corses », Monuments historiques, no 124, décembre 1983-janvier 1983, p. 20-26.
46 R. Bertrand, Les Provençaux et leurs morts…, t. II et IV ; Id., « La transition funéraire en France. Une rapide synthèse », R. Bertrand, Mort et mémoire…, p. 21-55.
Auteur
Professeur émérite de l’Université d’Aix-Marseille, umr Telemme, Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme.
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