Avant le cimetière au village : la diversité des espaces funéraires
Historiographie et perspectives
p. 23-39
Texte intégral
1Envisager d’élaborer un bilan sur l’organisation des espaces funéraires pendant le haut Moyen Âge (ve-xie siècle) n’est pas chose aisée. En France, depuis les années 1990, les opérations archéologiques, notamment dans le domaine préventif, se sont multipliées mais la documentation disponible est difficile à rassembler et les publications de synthèse demeurent encore rares1. Quels que soient les pays d’Europe, les recherches ont pendant longtemps été menées dans ce domaine sous l’angle de la christianisation et de la compréhension des « migrations barbares ». L’historiographie a donc conduit à proposer des schémas d’évolution des espaces funéraires, tant urbains que ruraux, dont il est encore parfois difficile de se départir. Depuis une dizaine d’années, plusieurs facteurs conduisent à remettre ces schémas en question et à renouveler les perspectives. Nous nous attacherons donc d’abord à présenter ces schémas évolutifs dans leur contexte historiographique, pour ensuite nous interroger sur leur validité à la lumière des recherches récentes. Pour cette période historique, nous utiliserons davantage les termes de « nécropole » ou « d’espace funéraire », entendus comme des espaces regroupant les morts. Même si le « cimetière » est une appellation fréquemment utilisée par les archéologues avec le même sens général, les travaux d’Éric Rebillard et de Michel Lauwers ont montré comment le cimiterium dans les sources latines recouvre d’abord des significations diverses – une tombe, un mausolée – avant de désigner plus spécifiquement un espace communautaire chrétien2.
Quelques jalons historiographiques
Du xixe siècle aux années 1970 : la lente mise en place d’un schéma évolutif
2Du xixe siècle jusqu’au milieu du siècle suivant, l’archéologie funéraire s’est surtout focalisée sur le début de la période médiévale – « le Bas-Empire » et la « civilisation mérovingienne » – les siècles postérieurs au xie siècle n’ayant suscité l’intérêt que bien tardivement, à partir des années 1960-19703. Cette préférence s’explique aisément, même si elle résulte de plusieurs facteurs concomitants dont nous ne pourrons rendre compte ici de toute la complexité. Globalement, les acteurs de ces premières investigations sont particulièrement préoccupés par la recherche des origines, qu’il s’agisse d’affirmer l’ancienneté de la religion chrétienne ou celle des identités nationales.
3Au xixe siècle, en réaction aux bouleversements de la Révolution, se met en place un néochristianisme au sein duquel la recherche des origines chrétiennes des Églises occupe une place importante et participe à un certain ressourcement4. Les acteurs de ce qui est défini alors comme « l’archéologie chrétienne » sont donc d’abord en majorité des membres du clergé et leurs propos ne sont pas dénués d’une certaine apologétique. On note donc que l’intérêt pour les vestiges funéraires se conçoit de manière très étroite avec le monument religieux dont ils tendent plutôt à compléter l’analyse5. Les premiers pas de l’archéologie funéraire sont donc associés à la recherche de la compréhension de la christianisation, ce qui marque l’historiographie pour longtemps, tant en ce qui concerne l’organisation de l’espace (l’articulation entre l’église et le cimetière) que les pratiques funéraires (identifier une tombe chrétienne).
4L’intérêt pour les origines trouve aussi un certain retentissement dans la définition des identités nationales, particulièrement exacerbées à l’heure où l’Europe des nations se construit et se renforce, notamment dans le nord de la France et en Allemagne6. Dans ces régions, la découverte de nécropoles dites « de plein champ » ou « en rangées » désigne des nécropoles isolées, sans lien spécifique avec un habitat ou une église, au sein desquelles les sépultures sont ordonnées en rangées, généralement sans recoupements. Ce terme, « Reihengräberfeld », inventé par les érudits allemands du xixe siècle, est encore largement employé aujourd’hui. L’intérêt s’est toutefois focalisé sur les sépultures renfermant un certain nombre d’objets plus ou moins précieux qui conduisent à proposer une classification des tombes, fondée sur des critères ethniques ou de rang social en lien avec les migrations barbares. L’étude du mobilier associé aux sépultures prend alors une place particulièrement importante au détriment de l’organisation des nécropoles et de l’étude des restes humains. Ces nécropoles sont alors qualifiées de « barbares », par opposition aux nécropoles gallo-romaines.
5Ces tendances historiographiques ont engendré un certain clivage géographique dans la manière d’appréhender les espaces funéraires qui, sous certains aspects, perdure encore aujourd’hui. L’héritage de l’archéologie chrétienne a surtout été recueilli dans les régions méridionales, alors que l’approche identitaire est davantage pratiquée au nord de la Loire7. On constate d’ailleurs que l’absence d’un schéma évolutif dans les régions méridionales a sans doute contribué à adopter celui des régions septentrionales ; cette transmission historiographique marque donc encore nos pratiques actuelles.
6À partir des années 1960, le contexte social et politique invite les historiens et les autres disciplines des sciences humaines à prendre de nouvelles directions et notamment à se rapprocher de l’anthropologie biologique et sociale. L’archéologie médiévale trouve alors une place dans ces nouveaux questionnements, notamment à travers la valorisation de la « culture matérielle » et de l’histoire des « mentalités »8. L’archéologie funéraire est particulièrement inspirée par les travaux contemporains qui touchent à l’histoire de la mort9. Jusque dans les publications les plus récentes, on ne peut compter le nombre de chercheurs qui se placent dans le sillage des travaux de Philippe Ariès, référent dominant des historiens et des archéologues10. Il est indéniable que ces travaux ont ouvert de nouveaux champs intellectuels dans le domaine de l’histoire et de l’archéologie. En premier lieu, ils ont favorisé le croisement des sources textuelles, matérielles et visuelles dans l’approche du cimetière qui est envisagé aussi d’un point de vue spatial11. Toutefois, les idées prônées par Philippe Ariès ont aussi été simplifiées et généralisées, au point de se cristalliser en des traditions historiographiques devenues de véritables topoi sous la plume d’historiens et d’archéologues. Le motif le plus prégnant est contenu dans l’expression consacrée « la mort apprivoisée », caractérisant en fait celle des temps anciens – « une longue série de siècles, de l’ordre du millénaire »12 – et notamment l’époque médiévale. Le paradigme de la « mort apprivoisée » sous-tend aussi les premières conclusions sur la topographie funéraire urbaine médiévale, la proximité des morts et des vivants venant conforter cette idée13. L’évolution des espaces funéraires entre l’Antiquité et le Moyen Âge est analysée en termes de tensions entre les morts et les vivants, ce qui a orienté largement les recherches à venir14.
7Philippe Ariès n’a pas beaucoup écrit sur les nécropoles du monde rural, ni sur le haut Moyen Âge. Il y accordait toutefois de l’intérêt : en 1978, alors qu’il venait d’intégrer l’ehess, il avait demandé à Patrick Périn de concevoir un cours sur ce sujet, qui devait être publié dans un recueil sur la mort et les cimetières15. Malheureusement, cet ouvrage n’a pas vu le jour (Philippe Ariès est décédé en 1984). Patrick Périn en a cependant publié l’essentiel en 1987 dans les Cahiers archéologiques. Cet article, prudent, permet de dresser un premier bilan des acquis à la fin des années 1970. L’auteur propose « d’essayer de mettre en évidence un certain nombre de schémas évolutifs-types » des nécropoles entre l’Antiquité et la fin du haut Moyen Âge, en s’appuyant essentiellement sur les sources archéologiques. Ses positions résument assez bien le consensus qui s’effectue au début des années 1980.
8Pour lui, la typologie des espaces funéraires mérovingiens est dominée par la nécropole « de plein champ », située à distance de l’habitat et dépourvue de lieu de culte chrétien. En premier lieu, cette nécropole peut être établie en continuité avec les espaces funéraires gallo-romains, établis à proximité d’un habitat de type vicus, même si les sites fouillés venant conforter ce schéma restent peu nombreux. Par ailleurs, la nécropole mérovingienne peut se trouver à proximité du vicus mais se distinguer nettement de la nécropole antérieure. Son noyau initial serait constitué de petits groupes de « barbares » qui auraient ensuite généré un regroupement et témoigneraient de l’assimilation des nouveaux arrivants, à l’instar de la nécropole normande de Frénouville16. Dans les deux cas, la topographie funéraire du haut Moyen Âge s’inscrit dans la continuité du mode de peuplement antique. La troisième possibilité consiste en la création ex nihilo d’une nécropole mérovingienne, phénomène qui apparaîtrait davantage à partir du vie siècle. On constate que ces nouveaux espaces, nombreux, sont souvent localisés à proximité des villages actuels ou qu’ils s’implantent sur d’anciennes ruines antiques17.
9Le point de rupture de ce paysage se situerait vers 700, même si le processus s’effectue avec une certaine lenteur. En effet, majoritairement, ces nécropoles seraient alors abandonnées au profit des cimetières se regroupant autour des églises paroissiales des villages. Il s’agit donc d’une importante modification du peuplement et de l’organisation spatiale des cimetières, engendrée notamment par la christianisation. Pour Patrick Périn : « L’évolution des nécropoles témoigne d’un changement décisif des coutumes funéraires : […] c’est en effet au cours de cette période que les cimetières vont devenir (pour longtemps) indissociables des églises18. » Par ailleurs, la nécropole de « plein champ » peut alors s’enrichir de la construction d’une église. Ces monuments, parfois difficiles à identifier et éventuellement édifiés par des groupes aristocratiques, resteraient toutefois éphémères au profit des lieux de culte villageois. Ce phénomène s’accompagne d’une transformation de la structure des nécropoles et des pratiques funéraires : polarisation autour de l’église, anonymat des sépultures allant de pair avec un abandon du dépôt d’objets dans les tombes et du port d’accessoires vestimentaires pour les défunts. Reste toutefois que la datation des sépultures postérieures au viie siècle est alors particulièrement mal assurée, ce qui invite l’auteur à rester prudent sur la chronologie proposée. Pour lui, cette mutation pourrait résulter en partie d’une imitation du modèle urbain contemporain, en référence notamment aux cimetières suburbains qui se constituent autour des nouvelles basiliques. Cette trame sur l’évolution des nécropoles rurales sert de cadre de pensée pour les années à venir, particulièrement centrées sur cette thématique spatiale.
L’organisation spatiale des espaces funéraires : une thématique dynamique (1980-1990)
10Dans le sillage de l’ouverture suscitée par les travaux de Philippe Ariès mais aussi des problématiques sur le peuplement, une des questions les plus fertiles dans les années 1980-1990 est celle de l’approche de l’espace funéraire médiéval, à la fois dans son organisation – limites, liens avec les lieux de culte – dans son évolution topographique – relations entre morts et vivants – mais aussi dans son insertion juridique dans la société19. Tout d’abord, mentionnons les recherches sur la période antique tardive qui connaissent un fort renouvellement, même si elles s’inscrivent dans la tradition de l’archéologie chrétienne évoquée plus haut20. Elles vont privilégier un examen des relations spatiales entre les églises et les sépultures et notamment avec les tombes des saints et des martyrs21. Ces recherches sur l’articulation entre sépultures et église sont discutées lors de rencontres dont les publications font date comme le XIe congrès international d’archéologie chrétienne (1986) ou le colloque de Créteil, initié par Yvette Duval et Jean-Charles Picard, sur l’inhumation privilégiée du ive au viiie siècle (1984)22.
11Parallèlement, en lien avec les études précédemment évoquées, des investigations sont menées par les archéologues médiévistes sur le rôle de l’église dans l’organisation du peuplement. L’association quasi systématique des sépultures aux lieux de culte a alors inévitablement conduit à s’interroger sur leurs relations. Cette problématique a été abordée dans le cadre d’un groupe de recherche (gdr 94 du cnrs intitulé « Sociétés et cadres de vie au Moyen Âge : approches archéologiques ») qui a fonctionné entre 1986 et 1990, sous la direction de Michel Fixot et d’Élisabeth Zadora-Rio et dont les principaux résultats sont publiés à la fin des années 1980. En 1989, paraît un premier volume intitulé : L’Église, le terroir, qui réunit un ensemble de monographies permettant de réfléchir sur le rôle de l’Église dans le monde rural, la présence des édifices traduisant une emprise de l’institution ecclésiastique23. La même année se tient à Aix-en-Provence, le troisième congrès international d’archéologie médiévale, publié en 1994, sous le titre : L’environnement des églises et la topographie religieuse des campagnes médiévales24. La question des espaces funéraires reste donc secondaire étant donné l’ampleur du thème ; plus exactement, le cimetière est envisagé à une échelle globale, pris comme une entité dont on cherche à comprendre l’articulation avec l’église, tant du point de vue spatial que chronologique. Les travaux les plus novateurs portent alors sur la définition des aires sacrées autour des églises, incluant parfois le cimetière. Initiée notamment par Élisabeth Zadora-Rio dès le début des années 1980, la prise en compte des plans des villages et des cimetières – souvent à partir des cadastres – et des sources écrites aboutit à une meilleure compréhension du cadre juridique (voire liturgique), qui marque les premiers jalons vers une compréhension du cimetière comme espace sacré25.
12Il faut attendre une dizaine d’années pour qu’archéologues et historiens s’intéressent collectivement de plus près à l’organisation du cimetière. C’est un autre groupe du même gdr 94, pris en main par Jean-Charles Picard (1989-1992) puis poursuivi par Henri Galinié (1992-1994), qui s’attelle à cette question. Dans son introduction à la publication du colloque Archéologie du cimetière chrétien, Henri Galinié revient sur les méthodes utilisées pour cette enquête collective26. L’absence de coordination autour de l’archéologie funéraire depuis les années 1970 trouve ici un point d’achèvement ; la tenue du colloque d’Orléans en 1994 puis sa publication en 1996 marquent donc le temps d’un premier bilan. La question de la genèse du cimetière rural chrétien est abordée et c’est sur ce point que les recherches sont les plus abouties. La synthèse proposée par Brigitte Boissavit-Camus et Élisabeth Zadora-Rio montre combien le précédent gdr avait préparé le terrain. Le cimetière paroissial est présenté comme un espace communautaire au statut juridique et liturgique nettement mieux cerné, tant du point de vue historique que topographique27. L’article présente aussi de nouvelles pistes de recherche qui consistent à s’approcher du cimetière pour en comprendre la gestion interne. Dans cette même lignée, les recherches de Cécile Treffort vont contribuer à affirmer et approfondir cette question28. Sa thèse, publiée en 1996, atteste de l’importance de l’époque carolingienne dans le processus de genèse du cimetière chrétien, préparé par le discours des clercs contemporains29. Des liens sont enfin établis avec les pratiques liturgiques, notamment avec les rites de consécration et la célébration de la mémoire des morts. Par ailleurs, en filigrane, plusieurs de ces auteurs apportent des nuances à la trame de l’évolution des espaces funéraires au cours du haut Moyen Âge, en insistant sur la complexité du phénomène.
Des travaux de synthèse récents
13Le début de la décennie 2000 a été marqué par quelques grandes synthèses – écrites par des historiens – qui renouvellent la compréhension du cimetière médiéval en tirant parti des recherches précédentes. En 1999, Michel Lauwers s’attache à la question de la sacralisation de l’espace cimitérial dans un article synthétique auquel succède, en 2005, un ouvrage sur la Naissance du cimetière chrétien30. Ainsi, le cimetière du Moyen Âge central est compris comme un espace sacré, polarisé autour de l’église, et intégré dans l’ecclesia médiévale31. L’analyse conjointe des textes et des sources archéologiques trouve ici un point de convergence important. En revanche, l’établissement d’un schéma structurel de l’évolution des nécropoles sur l’ensemble de la période, qui peut apparaître comme une nécessité intellectuelle, a sans doute contribué à enfermer la recherche dans certains paradigmes.
Perspectives actuelles : la diversité des espaces funéraires
14La multiplication des fouilles archéologiques et l’évolution des méthodes utilisées pour appréhender les espaces funéraires permettent aujourd’hui de nuancer, voire de réviser, le schéma retenu. Si les moyens ne sont pas toujours au rendez-vous et que beaucoup reste encore à parfaire, le recul donné par le contexte historiographique montre que la façon d’aborder les gisements funéraires a globalement changé. Il est désormais presque impensable d’entreprendre la fouille d’une nécropole sans la présence d’anthropologues. La conception même de l’anthropologie « de terrain » a évolué : cette appellation a été remise en question pour préférer le terme « d’archéothanatologie », plus global et entendu comme une science qui étudie la mort et ses différentes composantes, biologiques et sociales32. Enfin, il faut aussi mentionner les possibilités offertes par l’archéométrie et notamment la multiplication des datations radiocarbone, devenues plus accessibles33. Palliant l’absence d’artéfacts suffisamment datant, il est indéniable que le résultat de ces séries de datations conduit à reconsidérer la chronologie de l’évolution des nécropoles. La pratique de l’archéologie funéraire se tourne résolument vers l’interdisciplinarité, ce qui impose un travail d’équipe efficace que l’on peut apprécier dans plusieurs publications récentes34. Les effets de ce renouvellement se mesurent assez bien dans le choix des thèmes des colloques les plus récents : plus interdisciplinaires, les questions abordées sont aussi plus transversales, qu’il s’agisse du domaine des représentations, de l’histoire du corps, de l’utilisation de certains matériaux ou encore de certaines pratiques35. Enfin, les grands travaux d’archéologie préventive ont permis d’appréhender de vastes surfaces, et, par conséquent, de mieux cerner l’environnement proche des espaces funéraires et d’appréhender la dynamique des territoires.
15Fort de ces constats, nous discuterons de la validité du schéma d’évolution des nécropoles du haut Moyen Âge. Le concept de nécropole « de plein champ » ou « en rangées » est-il toujours adéquat ? Le regroupement des morts autour de l’église paroissiale est-il aussi précoce et s’accompagne-t-il d’une réorganisation des pôles d’habitats ?
Les concepts de nécropoles « de plein champ » ou « en rangées » sont-ils toujours pertinents ?
16Quelle que soit la région, ces appellations ont été adoptées par la plupart des archéologues, elles font partie des facilités de langage employées pour désigner une nécropole dépourvue de lieu de culte, sans lien direct avec un habitat, et dont les sépultures sont organisées en rangées, de manière plus ou moins ordonnées. Ce paradigme doit toutefois être révisé dans certains cas et ce, pour plusieurs raisons.
17Le suivi des grands travaux en archéologie préventive, notamment en Île-de-France et dans la vallée du Rhône, a d’abord mis en évidence, grâce à l’étendue des surfaces explorées (de l’ordre parfois de plusieurs hectares), une plus grande fréquence de la proximité des lieux d’habitat et d’inhumation36. Le peuplement est désormais abordé en termes de dynamique spatiale, c’est-à-dire en prenant en compte les relations entre les pôles d’habitat et les espaces funéraires d’un même secteur et leur évolution sur plusieurs siècles. Les nécropoles sont davantage analysées en termes de « recrutement » afin de caractériser les populations inhumées. On comprend mal, en effet, comment ces espaces funéraires pourraient avoir été totalement isolés des lieux d’habitat même si ceux-ci s’avèrent dispersés ou relativement temporaires37. C’est en tout cas ce que suggère la documentation réunie récemment pour les régions situées dans les anciens regna de Neustrie et d’Austrasie38. Ainsi, les fouilles extensives réalisées à Serris en Île-de-France à la fin des années 1980 et au début des années 1990 ont mis au jour un cimetière du haut Moyen Âge comportant probablement un petit lieu de culte ainsi que plusieurs groupes de sépultures, répartis dans les sites d’habitats environnants39. Cet ensemble complexe a été réétudié récemment par Frédérique Blaizot qui met en évidence la contemporanéité de ces espaces funéraires40.
18De fait, de nombreux sites dans les régions septentrionales mettent en évidence la présence simultanée de plusieurs groupes funéraires, de dimensions variées (de quelques sépultures à plusieurs centaines). Ainsi, sur le site de « La Tuilerie » à Saint-Dizier en Champagne, un petit groupe de trois sépultures privilégiées, probablement contemporain d’une nécropole plus étendue, puis d’une zone d’habitat du haut Moyen Âge, a été mis au jour. L’isolement de ces sépultures du vie siècle s’explique probablement par le statut aristocratique des personnes inhumées, placées en marge de la nécropole41. L’exploitation de ces données récentes, dont la synthèse reste à faire, remet donc en question l’éloignement supposé entre les nécropoles et les lieux d’habitat dans les régions septentrionales, postulat qui constitue l’un des fondements de l’expression « nécropole de plein champ ».
19Par ailleurs, les recherches récentes montrent que l’organisation des nécropoles « en rangées » se révèle nettement plus complexe. Depuis une quinzaine d’années, les archéologues ont porté une attention accrue au fonctionnement et à la gestion des nécropoles. Les données stratigraphiques recueillies sur la circulation au sein de l’espace funéraire, le signalement des tombes, mais aussi la diversité des architectures funéraires conduisent à proposer des organisations plus variées, s’éloignant d’un modèle où domine l’alignement. Ainsi, on peut souligner la mise en évidence dans les nécropoles du nord-est de tumuli tardifs ou de dispositifs en bois mettant en valeur certaines sépultures et introduisant une certaine hiérarchisation des tombes42. La diversité dans l’orientation des tombes ne suffit désormais plus à expliquer le développement progressif de la nécropole ; ces indices sont alors mis en regard avec les pratiques funéraires, la datation des éléments mobiliers et les datations radiocarbone. Les premières conclusions sur l’évolution de la nécropole mérovingienne de Bossut-Gottechain dans le Brabant témoignent d’une relative complexité, malgré une durée d’utilisation assez courte d’un siècle et demi environ : à partir d’un noyau central comportant quelques tombes privilégiées et des orientations diverses, l’espace funéraire s’accroît d’abord vers le sud puis vers le nord43. Des interrogations portant sur l’identification de regroupements familiaux sont davantage formulées, comme à Serris par exemple44.
20Dans les régions méridionales de la Gaule, le faible nombre des grands décapages liés à l’archéologie préventive n’autorise pas de semblables conclusions. La récente découverte de la nécropole mérovingienne de Saint-Laurent-des-hommes en Dordogne montre toutefois l’existence d’espaces funéraires similaires, d’une durée relativement limitée dans le temps, et dont les tombes sont disposées « en rangées »45. Un habitat, dont la contemporanéité est difficile à établir, a été retrouvé à proximité immédiate. Pour une période un peu plus récente, le site de Pouthumé dans la région poitevine atteste également d’un rapport étroit entre nécropole et habitat46. Plus fréquemment, les nécropoles sont installées sur d’anciens sites antiques ; malheureusement, ces sites ont souvent été fouillés anciennement et partiellement, ce qui ne permet plus de formuler des hypothèses quant à la chronologie de l’occupation ou à la proximité d’un espace habité47. Si un hiatus d’occupation entre les monuments antiques et la nécropole semble fréquent, le positionnement de l’habitat reste largement méconnu. L’organisation des tombes « en rangées » demeure ici souvent trop restrictive car il convient de tenir compte du bâti antique préservé, souvent sous la forme d’enclos funéraire. Ainsi, à Saint-Martin de Bruch, dans le Lot-et-Garonne, la nécropole du haut Moyen Âge s’installe dans les ruines de ce qu’il convient sans doute d’identifier comme les bâtiments d’une grande villa48. Certaines sépultures, majoritairement en sarcophages, s’inscrivent en rangées successives dans un grand enclos funéraire mais leur organisation est différente dans les espaces voisins. Des structures domestiques ont été identifiées mais leur datation reste problématique et il est difficile de déterminer si elles sont contemporaines de la nécropole ou postérieures.
21L’appellation de « nécropole de plein champ en rangées », devenue trop commune, limite aujourd’hui les questionnements. Elle induit l’éloignement ou l’absence d’habitat, elle réduit le champ des possibles quant à l’organisation interne des cimetières. Certes, la catégorie existe, probablement davantage dans le nord-est de l’Europe, mais un nouvel examen s’impose pour d’autres régions.
La présence d’églises dans les nécropoles du haut Moyen Âge
22La trame schématique de l’évolution des espaces funéraires du haut Moyen Âge induit également l’absence de lieux de culte. Cette assertion a toutefois été nuancée en soulignant d’abord la difficulté à identifier ces premiers édifices chrétiens49. Ainsi, l’utilisation de matériaux périssables, la caractérisation insuffisante du plan des édifices50 ou la réutilisation du bâti antique51 limitent parfois fortement la reconnaissance des premières églises dont la durée d’utilisation peut être courte. Plus souvent, l’extension limitée des opérations archéologiques, notamment autour des églises paroissiales du Moyen Âge central, permet d’identifier la présence d’une nécropole antérieure mais n’assure pas la reconnaissance d’une église contemporaine.
23Depuis une quinzaine d’années, cette question se pose avec davantage d’acuité, les archéologues étant particulièrement attentifs à ce phénomène. La proportion de nécropoles dépourvues de lieux de culte doit sans doute être révisée, mais les données récentes ne permettent pas encore de proposer une synthèse à ce propos : là encore, ces siècles de transformations semblent révéler une grande diversité des situations avec des tendances régionales. Dans les régions méridionales, les cas d’églises contemporaines de l’installation des nécropoles paraissent plus nombreux. À Jau-Dignac et Loirac, en Gironde, un temple antique a été transformé en église funéraire, située au cœur de la petite nécropole52. À l’Isle-Jourdain, à proximité de Toulouse, une église est édifiée, contemporaine de l’espace funéraire53. La synthèse récente, proposée par Laurent Schneider sur les églises rurales de la Gaule, atteste bien ce phénomène54. Ailleurs, si la nécropole semble préexister, c’est parfois la présence d’une sépulture privilégiée qui conduit à la construction d’une église au sein de l’espace funéraire comme à Saleux Les Coutures dans la Somme55. Les cas précédemment cités invitent toutefois à penser que les églises sont davantage présentes au sein des nécropoles à partir du tout début du viie siècle56.
24La compréhension de ces premières fondations passe incontestablement par la caractérisation de leur statut et de leur fonction. En l’absence de textes contemporains, cette question a toujours été particulièrement délicate à traiter. Des nuances ont cependant été introduites en prenant en compte la diversité des fondateurs. En effet, ces fondations ont été majoritairement imputées aux membres de l’Église, dans un souci missionnaire. Le succès de l’entreprise n’aurait cependant pas été total sans l’appui d’autres acteurs. Les élites laïques notamment – puisqu’on les connaît mieux à travers les sources – ont participé au processus. Les églises fondées par les membres des familles de ces élites, si difficiles à identifier, ont probablement été un facteur déterminant dans la christianisation des campagnes57. La fonction funéraire de ces églises était d’ailleurs importante, compte tenu des liens étroits avec la mémoire et l’ancrage territorial des familles58. Dès l’Antiquité tardive, les clercs ont tenté de contrôler ces initiatives spontanées, en souhaitant uniformiser et organiser le réseau des églises rurales, mais cette tâche n’aboutit pas pleinement avant les xie-xiie siècles59.
25L’association entre les espaces funéraires et les églises pendant le haut Moyen Âge reste donc une question complexe, la variété des cas reflétant les hésitations et la liberté de ces siècles de transformation.
Le regroupement du cimetière autour de l’église à l’époque carolingienne
26L’ancien schéma plaçait une césure au début du viiie siècle, période durant laquelle les nécropoles dites « de plein champ » auraient pour la plupart été abandonnées au profit d’un regroupement du cimetière autour des églises paroissiales. Plusieurs facteurs invitent à réviser la chronologie qui a été proposée jusqu’alors. Il est indéniable que la multiplication des datations radiocarbone, devenues plus accessibles et effectuées sur les sépultures dépourvues de mobilier, conduira à modifier ce terminus dans les prochaines années. Des synthèses régionales doivent désormais être mises en œuvre pour pouvoir réfléchir à ces questions de chronologie ; le viiie siècle n’apparaît toutefois déjà plus comme une césure pertinente. Plusieurs cas précédemment cités attestent soit d’une courte durée d’occupation de la nécropole, soit d’une occupation continue entre le viie et le xie siècle60.
27Par ailleurs, les recherches récentes ont permis de mettre au jour l’existence de petits groupes d’inhumations, souvent qualifiés de « sépultures isolées » situées à proximité immédiate des habitats attribuables notamment aux ixe-xie siècles. Elles sont d’abord interprétées comme des sépultures atypiques, voire de relégation mais plusieurs études tendent à montrer la fréquence de ces groupes. Les fouilles extensives réalisées à Serris ont permis de découvrir un cimetière du haut Moyen Âge comportant probablement un petit lieu de culte, ainsi que plusieurs groupes de sépultures, répartis dans les sites d’habitats environnants61. Dans la vallée du Rhône, les interventions archéologiques menées dans le cadre du suivi du tracé du tgv Méditerranée ont permis d’analyser huit ensembles comportant des petits groupes de sépultures, la plupart attribués à l’époque carolingienne62. Une distinction a pu être réalisée entre des regroupements de deux à cinq sépultures, souvent implantés en marge des espaces domestiques, et des groupes plus importants, rassemblant 30 ou 40 inhumations, qui pourraient révéler une organisation communautaire précoce de l’espace funéraire, toujours dépourvu de lieu de culte. Ces découvertes mettent en évidence la coexistence de plusieurs formes d’espaces funéraires jusqu’à l’époque carolingienne et nuancent fortement l’interprétation qui avait été proposée pour ces tombes : de marginale, cette pratique pourrait finalement s’avérer fréquente. Cette diversité permet de réviser à la baisse l’ampleur du mouvement de réorganisation des cimetières autour des églises paroissiales dès l’époque carolingienne.
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28Très loin de présenter un bilan exhaustif, ces quelques réflexions ont surtout pour objectif de poursuivre un débat qui constitue une préoccupation constante des historiens et des archéologues. Depuis une quinzaine d’années, l’archéologie funéraire s’est considérablement enrichie : les sites fouillés se sont multipliés et les méthodes d’approche de la sépulture et de l’espace funéraire se sont diversifiées et ont évolué, offrant ainsi au chercheur une occasion de renouveler son questionnement. Aussi le schéma adopté depuis les années 1980 doit-il être nuancé et révisé.
29La genèse du processus qui mène à l’association étroite entre le cimetière, l’église et l’habitat est lente, elle n’est pas homogène et linéaire mais présente des rythmes différents, variant en fonction de multiples facteurs. La tendance à lire une « mutation » entre le haut Moyen Âge et les siècles suivants ne semble pas convenir. Le haut Moyen Âge est une période de transformation par excellence, au cours de laquelle les normes sociales sont en construction et où l’on constate une assez large variété de pratiques et de formes d’espaces funéraires. La multiplication des fouilles extensives dans certaines régions et le recours plus systématique aux datations radiocarbone contribuent à renouveler la chronologie et les modalités de ce phénomène, surtout en ce qui concerne la période carolingienne et les résultats à venir amèneront à réviser encore ces données. La multiplication des études de cas, menées sur des petits ensembles bien documentés, constitue une perspective de recherche. Sous certaines conditions, elle est susceptible de modifier à terme la perception des pratiques et la compréhension de la gestion des espaces funéraires par les vivants pendant cette période du haut Moyen Âge. Le défi consiste probablement aujourd’hui à comprendre les dynamiques d’un processus qui doit se conjuguer au pluriel.
Notes de bas de page
1 Ce rapport concerne essentiellement la France même si des références complémentaires européennes seront données au fil du texte. Pour un bilan récent de l’archéologie médiévale, voir J. Chapelot (dir.), Trente ans d’archéologie médiévale en France, Caen, 2009.
2 É. Rebillard, Religion et sépulture. L’Église, les vivants et les morts dans l’Antiquité tardive, Paris, 2003 ; M. Lauwers, Naissance du cimetière. Lieux sacrés et terre des morts dans l’Occident médiéval, Paris, 2005.
3 Le phénomène est souligné par Élisabeth Lorans : É. Lorans, « Le monde des morts de l’Antiquité tardive à l’Époque moderne (ive-xixe siècle) », É. Crubézy, C. Masset, É. Lorans, F. Perrin, L. Tranoy (dir.), Archéologie funéraire, Paris, 2000, p. 155.
4 P.-A. Février, « Naissance d’une archéologie chrétienne », Naissance des arts chrétiens. Atlas des monuments paléochrétiens de la France, Paris, 1991, p. 343-344 ; A. Guerreau, L’avenir d’un passé incertain. Quelle histoire du Moyen Âge au xxie siècle ? Paris, 2001, p. 41-50.
5 Cf. par exemple les travaux de Jean Hubert puis d’Aliette de Maillé dans les années 1950 ; J. Hubert, L’art pré-roman en France, Paris, 1938.
6 Voir l’introduction proposée par P. Geary, Quand les nations refont l’histoire. L’invention des origines médiévales de l’Europe, Paris, 2004, p. 9-24.
7 Cette partition spatiale est aussi dépendante de la répartition des chercheurs et de leurs centres d’intérêts. L’Antiquité tardive est plutôt envisagée du point de vue de la christianisation et s’est surtout développée autour de la Méditerranée alors que la « période mérovingienne » concerne plutôt les régions situées au nord de la Loire.
8 Le bilan sur la culture matérielle est rédigé par Jean-Marie Pesez (J.-M. Pesez, « Histoire de la culture matérielle », J. Le Goff (dir.), La nouvelle histoire, Paris, 1978, p. 191-228). Sur la place de l’archéologie médiévale, J. Burnouf (dir.), Manuel d’archéologie médiévale et moderne, Paris, 2009 et I. Cartron, L. Bourgeois, « Archéologie et Histoire du Moyen Âge en France : du dialogue entre disciplines aux pratiques universitaires », Être historien du Moyen Âge au xxie siècle, Paris, 2008, p. 133-148.
9 Outre Philippe Ariès et Louis-Vincent Thomas sur lesquels nous allons revenir, citons également les travaux de Michel Vovelle et de Pierre Chaunu sur la période moderne.
10 On pourrait aussi citer Louis-Vincent Thomas – héritier privilégié des anthropologues biologistes et en sciences sociales.
11 Ce que confirme son dernier ouvrage sur les images de la mort et l’étude des monuments funéraires : P. Ariès, Images de l’homme devant la mort, Paris, 1983.
12 P. Ariès, Essais sur l’histoire de la mort en Occident du Moyen Âge à nos jours, Paris, 1975, p. 21.
13 Les contributions sur la place des morts dans la ville au colloque d’Orléans de 1994 confirment le schéma proposé par cet auteur : une séparation des morts et des vivants pendant l’Antiquité qui perdure jusqu’au xie siècle environ, avant « l’entrée des morts » dans la cité. H. Galinié, « Le passage de la nécropole au cimetière : les habitants des villes et leurs morts du début de la christianisation à l’an Mil », H. Galinié, É. Zadora-Rio (dir.), Archéologie du cimetière chrétien, Tours, 1996, p. 17-30.
14 Ainsi, l’interdiction d’inhumer à l’intérieur de la ville aurait perduré jusqu’au xie siècle. Or, depuis une dizaine d’années, les découvertes de sépultures intra muros se multiplient ce qui invite à nuancer le respect de la norme antique dès l’Antiquité tardive. Ainsi à Rome et en Italie du Nord, G. Cantino Wataghin, « The ideology of urban burials », G.-P. Brogiolo, B. Ward-Pekkins, The Idea and Ideal of the Town between Late Antiquity and the Early Middle Ages, Leiden, Boston, Cologne, 1999, p. 147-180.
15 P. Périn, « Des nécropoles romaines tardives aux nécropoles du haut Moyen Âge. Remarques sur la topographie funéraire en Gaule mérovingienne et à sa périphérie », Cahiers archéologiques, 35, 1987, p. 9-30. L’auteur envisage également les nécropoles en milieu urbain.
16 C. Pilet, « Les nécropoles de Giberville », Archéologie médiévale, 20, 1990, p. 1-140.
17 J. Le Maho, « La réutilisation funéraire des édifices antiques en Normandie au cours du haut Moyen Âge », M. Fixot, É. Zadora-Rio (dir.), L’environnement des églises et la topographie religieuse des campagnes médiévales, Paris, 1994, p. 10-21.
18 P. Périn, « Des nécropoles romaines tardives… », p. 20.
19 Nous n’évoquons dans cette sous-partie que les recherches des historiens et des archéologues, la question de l’anthropologie de terrain est traitée infra. Cette partition reflète finalement les difficultés à pratiquer alors une interdisciplinarité.
20 On note par exemple une certaine permanence dans les rencontres scientifiques comme le Congrès international d’archéologie chrétienne et des liens étroits établis avec l’École française de Rome. En France, Paul-Albert Février enseigne à l’Université d’Aix-en-Provence à partir de 1968 ; la première chaire d’archéologie de l’Antiquité tardive est ouverte à l’Université de la Sorbonne en 1975 et occupée par Noël Duval.
21 Ainsi, on pourra citer, entre autres, les travaux de Jean Guyon sur les catacombes de Rome (J. Guyon, Le cimetière aux deux lauriers, Rome, 1984), de Jean-Charles Picard sur les sépultures et le souvenir des évêques de Rome (J.-C. Picard, Le souvenir des évêques. La sépulture, le souvenir collectif et le culte des évêques en Italie du Nord des origines au xe siècle, Rome, 1988) ou d’Yvette Duval sur l’inhumation ad sanctos (Y. Duval, Auprès des saints, corps et âmes. L’inhumation « ad sanctos » dans la chrétienté d’Orient et d’Occident du iiie au viie siècle, Paris, 1988).
22 Les trois volumes du XIe congrès d’archéologie chrétienne sont publiés en 1989 (N. Duval (éd.), XIe congrès international d’archéologie chrétienne : Lyon, Vienne, Grenoble, Genève et Aoste (septembre 1986), Rome, 1989). Le colloque de Créteil, très riche, a réuni pratiquement l’ensemble des acteurs des années 1980 sur les espaces funéraires de la période médiévale et favorisa sans doute largement les échanges (Y. Duval, J. C. Picard (dir.), L’inhumation privilégiée du ive au viiie siècle en Occident, Paris, 1986). Il marque l’historiographie durablement, puisque la problématique a été reprise récemment à Caen dans un colloque réuni autour des inhumations de prestige (A. Alduc-le-Bagousse (dir.), Inhumations de prestige ou prestige de l’inhumation ? Expression du pouvoir dans l’au-delà (ive-xve siècle), Caen, 2009).
23 M. Fixot, É. Zadora Rio (dir.), L’église, le terroir, Paris, 1989.
24 M. Fixot, É. Zadora-Rio (dir.), L’environnement des églises…
25 É. Zadora-Rio, « Les cimetières en Anjou aux xie et xiie siècles », Actes du 105e congrès national des sociétés savantes, Caen, 1980, p. 319-329.
26 H. Galinié, « Introduction », H. Galinié, É. Zadora-Rio (dir.), Archéologie du cimetière chrétien…, p. 9-13.
27 B. Boissavit-Camus, É. Zadora-Rio, « L’organisation spatiale des cimetières paroissiaux », H. Galinié, É. Zadora-Rio (dir.), Archéologie du cimetière chrétien…, p. 49-53.
28 C. Treffort, « Du cimiterium christianorum au cimetière paroissial : évolution des espaces funéraires en Gaule du vie au xe siècle », H. Galinié, É. Zadora-Rio (dir.), Archéologie du cimetière chrétien…, p. 55-63.
29 C. Treffort, L’Église carolingienne et la mort. Christianisme, rites funéraires et pratiques commémoratives, Lyon, 1996.
30 M. Lauwers, Naissance du cimetière chrétien… Pour l’Antiquité tardive, voir É. Rebillard, Religion et sépultures…
31 De nombreux travaux concernent la mise en place du réseau paroissial, on citera entre autres : C. Delaplace (dir.), Aux origines de la paroisse rurale en Gaule méridionale (ive-ixe siècle), Paris, 2005 ; D. Iogna-Prat, É. Zadora-Rio (dir.), La paroisse, genèse d’une forme territoriale, Médiévales, 49, Paris, 2005.
32 Henri Duday explique sa position dans B. Boulestin, H. Duday, « Ethnologie et Archéologie de la Mort : de l’illusion des références à l’emploi d’un vocabulaire », C. Mordant, G. Depierre (dir.), Les pratiques funéraires à l’Âge du Bronze en France, Sens, 2005, p. 17-35.
33 J. Evin, C. Oberlin, J.-P. Daugas, J.-F. Salles (dir.), C14 et Archéologie, Paris, 1999.
34 Par exemple, pour les monographies : O. Passarius, R. Donat, A. Catafau (dir.), Vilarnau. Un village au Moyen Âge en Roussillon, Perpignan, 2008 ; F. Carré, F. Jimenez (dir.), Louviers (Eure) au haut Moyen Âge. Découvertes anciennes et fouilles récentes du cimetière de la rue du Murier, Saint-Germain-en-Laye, 2008.
35 Parmi des travaux variés : A. Alduc-le-Bagousse, Inhumations de prestige… ; B. Bizot, M. Signoli (dir.), Rencontre autour des sépultures habillées (Carry-le-Rouet 2008), Gap, 2009 ; I. Cartron, D. Castex, P. Georges, M. Vivas, M. Charageat (dir.), De corps en corps : traitement et devenir du cadavre, Bordeaux, 2010 ; F. Carré, F. Henrion (dir.), Le bois dans l’architecture et l’aménagement de la tombe : quelles approches ?, Saint-Germain-en-Laye, 2012.
36 À propos de l’évolution des surfaces fouillées en archéologie préventive : J. Chapelot, F. Gentili, « Trente ans d’archéologie médiévale en France », J. Chapelot (dir.), Trente ans d’archéologie médiévale en France…, p. 9-30.
37 Une critique de ce concept dans A. Guerreau, L’avenir d’un passé incertain…, p. 146-148.
38 Pour la Neustrie, voir Villes et campagnes en Neustrie, sociétés, économies, territoires, christianisation, Actes des XXVe journées internationales d’archéologie mérovingienne (Tournai, 17-20 juin 2004), Montagnac, 2007 ; sur l’Austrasie, L’Austrasie : sociétés, économies, territoires, christianisation, Nancy, 2008.
39 F. Gentili, K. Escher, « Le village mérovingien de Serris au cœur de la ville nouvelle », Actes des XXIXe Journées internationales d’archéologie mérovingienne, Amiens, 2009, p. 145-152.
40 F. Blaizot, Les espaces funéraires de l’habitat groupé des Ruelles à Serris du viie au xie siècle (Seine-et-Marne, Ile-de-France) : taphonomie du squelette, modes d’inhumation, organisation et dynamique, Bordeaux, 2011.
41 M.-C. Truc, « Trois riches tombes du vie siècle sur le site de “La Tuilerie” à Saint-Dizier (Haute-Marne) », L’Austrasie…, p. 313-329.
42 Pour les tumuli, voir la synthèse proposée par L. Verslype, « Tertres funéraires et sépultures délimitées en Neustrie septentrionale. Réflexions préliminaires sur les tumuli et les sépultures encerclées mérovingiens », Villes en campagnes en Neustrie…, p. 337-356.
43 O. Vrielynck, La nécropole mérovingienne de Bossut-Gottechain, commune de Grez-Doiceau, Brabant wallon, catalogue d’exposition (Namur 2006-2007), Namur, 2007.
44 F. Blaizot, Les espaces funéraires…
45 C. Scuiller, J. Hernandez, « La nécropole de Belou Nord à Saint-Laurent-des-Hommes (Dordogne) », Du royaume goth au midi mérovingien, à paraître.
46 La nécropole, limitée par un enclos fossoyé, se situe à proximité immédiate de l’habitat ; voir T. Cornec, B. Farago, B. Brisach, V. Gil, « L’habitat et les cimetières du haut Moyen Âge de Pouthumé à Châtellerault », L. Bourgeois (dir.), Wisigoths et Francs autour de la bataille de Vouillé (507), Saint-Germain-en-Laye, 2010, p. 97-112.
47 Des exemples pour le Sud-Ouest et la Provence : Y. Codou, M.-G. Colin, « La christianisation des campagnes (ive-viiie siècle) », Gallia, 64, 2007, p. 57-83. Un bilan pour la Normandie : J. Le Maho, « La réutilisation funéraire… »
48 I. Cartron, D. Castex, G. Sachau-Carcel, Saint-Martin de Bruch (Lot-et-Garonne), habitat antique et nécropole du haut Moyen Âge, Rapport d’opération, Bordeaux, 2013.
49 É. Zadora-Rio, « L’historiographie des paroisses rurales à l’épreuve de l’archéologie », C. Delaplace (dir.), Aux origines de la paroisse rurale…, p. 15-23.
50 Par exemple, le bâtiment rectangulaire de la nécropole de Serris ou, dans la région poitevine, le monument situé à Chasseneuil-sur-Bonnieure.
51 On pourrait citer ici la première transformation du fanum de Boscherville, ou le bâtiment rectangulaire accueillant des sarcophages sur le site de la villa de Monségur en Gironde. N. Duval, S. Camps, « Monségur-Neujon, cimetière et église », Les premiers monuments chrétiens de la France, 2, Paris, 1996, p. 47-50.
52 I. Cartron, D. Castex (dir.), Du temple antique à la chapelle Saint-Siméon. L’occupation d’un îlot du rivage de l’estuaire de la Gironde, Rapport final d’opération, Bordeaux, 2010.
53 J.-L. Boudartchouk, S. Bach, « La nécropole franque du site de la Gravette, l’Isle-Jourdain (Gers) », Aquitania, 14, 1996, p. 153-156.
54 L. Schneider, « Les églises rurales de la Gaule (ve-viiie siècle). Les monuments, le lieu et l’habitat : des questions de topographie et d’espace », M. Gaillard (dir.), L’empreinte chrétienne en Gaule du ive au ixe siècle, Turnhout, 2014, p. 419-468.
55 I. Cattedu, « Le site médiéval de Saleux Les Coutures, habitat, nécropole et églises du haut Moyen Âge », G. D. Boe, F. Verhangaeghe (dir.), Rural settelments in Medieval Europe, Zellik, 1997, p. 143-148.
56 Cette hypothèse doit toutefois encore être affinée ; les églises de Jau-Dignac et Loirac, Séviac, Saleux, Boscherville correspondent à ces implantations du viie siècle. D’autres cas sont aussi mentionnés par Laurent Schneider ; comme le souligne l’auteur, ces fondations pourraient être liées à l’affirmation territoriale de certaines familles aristocratiques (L. Schneider, « Les églises rurales… »).
57 Pour l’Italie, G. P. Brogiolo, « Oratori funerari tra vii e viii secolo nelle campagne transpadane », Hortus Artium Medievalium, 8, 2002, p. 9-30.
58 Un cas particulièrement bien documenté en Italie : S. Gasparri, C. La Rocca (dir.), Carte di famiglia. Strategie, rappresentazione e memoria del gruppo familiare di Totone di Campione (721-877), Rome, 2005.
59 C. Delaplace (dir.), Aux origines de la paroisse rurale…
60 L’impression est que les nécropoles des ve et vie siècles ont parfois une durée d’occupation courte, sur quelques générations (Saint-Laurent-des-Hommes en Dordogne ou nécropole de Bossut-Gottechain en Belgique par exemple), alors que d’autres (Jau-Dignac et Loirac, Saleux, Les Ruelles à Serris ou Portejoie) attestent d’une occupation continue entre le viie et le xie siècle.
61 F. Blaizot, Les espaces funéraires…
62 F. Blaizot, « Ensembles funéraires isolés dans la moyenne vallée du Rhône », Habitats, nécropoles et paysages dans la moyenne et la basse vallée du Rhône (viie-xve siècle), Paris, 2006, p. 281-338.
Auteur
Professeur d’histoire et d’archéologie médiévale à l’Université Bordeaux-Montaigne, Institut Ausonius, UMR 5607.
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