Conclusion de la troisième partie
p. 345-346
Texte intégral
1De la Communauté, entendue donc dans son sens institutionnel, quel bilan dresser ? Sans doute, vue de l'extérieur, est-elle parfaitement reconnue et identifiée dans l'espace politique de la ville comme l'expression d'un groupe particulier de concitoyens, unis non plus seulement par une religion commune mais – c'est ce qui ressort des allocutions des hommes politiques –, par une communauté de sort, voire une minorité à part entière.
2Envisagée d'un point de vue interne et si l'on considère l'aspect institutionnel, elle existe, étoffée, professionnalisée, capable de rendre à la population juive de nombreux services. Une partie des nouveaux arrivants ont su trouver le chemin des institutions pour rechercher la satisfaction de besoins matériels (l'aide à la réinsertion, l'encadrement des enfants) et en partie de l'esprit grâce aux nombreux lieux de culte qui se sont créés. Des institutions communes existent, mais cela suffit-il à fonder une communauté ?
3En faisant passer la Communauté d'un axe essentiellement religieux à un axe plus large qu'on appelle culturel, on voit émerger la revendication d'une différence, d'une particularité qui ne tient plus seulement au culte professé. En ce sens, le remplacement d'israélite par juif n'est pas seulement le douloureux héritage de la guerre, c'est la reconquête d'une spécificité affirmée. Or, si ce cheminement est bien accepté dans les consciences, à l'échelle individuelle, de nombreux juifs hésitent encore à affirmer leur différence de façon collective sous la forme d'une institution qui les représenterait. Dans ces années-là, la majorité des juifs d'Afrique du Nord sont trop soucieux de réussir leur intégration en France, pour affirmer leur différence.
4Le refus de créer une école juive à plein temps illustre bien cette position. De nombreux juifs envoient leurs enfants au Talmud Tora dans les organisations de jeunesse dans le but de leur donner une éducation juive. Mais la répugnance à créer une école privée témoigne de leur volonté de ne pas se situer en tant que groupe à part, dans l'espace national.
5Ainsi la Communauté apparaît comme un ensemble d'institutions destinées à un public juif. Mais on ne lui accorde pas forcément le sens de communauté émotionnelle (réservé à ceux qui ont connu la même expérience historique, les Polonais, les juifs d'Afrique du Nord...) ni la fonction de représentation d'un groupe, d'une minorité, comme l'aimeraient les responsables communautaires (la communauté au sens américain du terme).
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