Chapitre I. Typologie des chantiers à Gérone au XVe siècle
p. 25-48
Texte intégral
1Avant de nous lancer dans l’étude des structures et mécanismes des chantiers, il convient d’en dresser un inventaire. Le corpus documentaire dont nous disposons nous offre de larges possibilités. Les XIVe et XVe siècles sont le théâtre d’une forte expansion de la ville, qui est marquée par le style gothique. L’expansion de ce type d’architecture ne signifie pas uniquement le foisonnement de monuments représentatifs, mais un changement de conception de la ville elle-même, pouvant inclure des couvents, des églises, des fortifications ou des équipements collectifs1.
1. Les chantiers civils
2Nous considérons comme chantier civil les travaux commandités par le Conseil de la cité de Gérone. La tentation était grande de prendre aussi en compte les travaux effectués chez des particuliers. Mais, nous ne disposons hélas à ce sujet que de bien peu de sources. Les actes notariés nous fournissent sporadiquement des reconnaissances de dettes. C’est le cas par exemple d’Anthoni Bosch, qui reconnaît devoir à Jaume Soler, maître d’œuvre 14 sous « pour les travaux dans ma maison.»2. Mais ces actes ne nous donnent guère plus d’informations. Le type de document le plus fréquent dans les registres notariaux est le contrat d’embauche3. Ces contrats nous renseignent sur de nombreux points : délai, lieu, salaires, avantages, nature des travaux, etc. Nous disposons d’une trentaine d’exemplaires. Comment savoir quel pourcentage ils représentaient face à la masse complète des travaux effectués en ville ? : Il est de plus difficile de parler de chantiers quand il ne s’agit que du travail d’un artisan. Nous avons donc opté pour écarter ces actes de la typologie. Mais ils nous seront utiles plus loin pour étudier les conditions de travail.
3Les chantiers civils ont donc pour origine une décision municipale. Ils répondent aux besoins d’une ville en expansion, qui cherche à s’embellir, qui tente de dominer la nature environnante, ou qui doit se défendre contre des agressions extérieures. Parmi les travaux qui incombaient à l’exécutif urbain, il en est un de première nécessité à partir des années 1360 : la construction ou l’entretien des remparts.
4Les murailles qui entourent la ville de Gérone datent de l’époque romaine4. Gérone se trouvait en effet sur l’une des premières voies de communication : la via Augusta. La ville fut crée au premier siècle avant Jésus-Christ sur l’ancien chemin d’Héraclès. C’était un site privilégié pour contrôler l’axe Rome-Provinces hispaniques. Le vieux quartier de la Força Vella correspond à l’ancien Cardo Maximus. Il semble peu probable qu’il y ait eu un Décumanus. Dès le IXe siècle, la ville s’étend extra-muros et des noyaux de population s’installent autour de l’église Sant Marti Sacosta, du monastère Sant Pere de Galligans, de l’église Sant Feliu, et au Mercadal. Ce dernier regroupait d’abord des zones de vignes ou de jardins. Gérone va intégrer ces différents quartiers, surtout ceux du sud. L’Areny de la rive droite de l’Onyar (zone de la plaça del Vi et des Albergueries) devient le centre de la ville. Au début du XIVe siècle, on construit les couverts de la Rambla. En 1342, le roi fait construire la Cort Reial, entre la place des Cavallers et celle dels Quatre Cantons. C’est le cœur du centre administratif et le siège du notariat géronais.
5À l’expansion s’allient des besoins de défense. Si les murailles de l’ancien rempart de Gérone ont été très endommagées par le temps et la croisade contre l’Aragon, sa position stratégique en faisait la clé de la Catalogne, clau del regne5. Il faut donc construire ou reconstruire les murailles pour se préparer à un siège éventuel et pour protéger les populations des nouveaux quartiers. Pierre le Cérémonieux, fut le moteur de cette construction, avec le gouvernement local. En juillet 1362, il ordonne la construction d’une muraille au niveau de la Tour del Call6, ancien quartier juif. On fortifie les murs anciens et les églises, à l’image de Sant Feliu dont le chevet est entièrement intégré au système défensif, au détriment du cloître gothique, achevé en 1368 et détruit en 1374. Le portail des Ballesteries est renforcé. En 1366, le chapitre participe aux frais et collabore aux travaux des murs et fossés, comme à Barcelone et Valence. En 1368, on commence l’ouvrage du mur de Sant Pere de Galligans. Les travaux s’arrêtent très vite cette même année, faute d’argent. Les jurats, réunis dans le cloître des frères Mineurs, doivent trouver un nouveau moyen de financer les chantiers, devant la menace des compagnies de Provence et de France7. À la demande du roi, les travaux recommencent : ils sont marqués par une grande vague d’expropriations, surtout dans le bourg Sant Pere8.
6Le chantier des murs du Mercadal est le plus compliqué. En effet, il débute en 1369, mais ne se termine qu’à la fin du XVe siècle. Les fortifications englobent le quartier jusqu’aux rues de Cuguçac, Canaders (actuelle Pompeu Fabra), Flassaders, ainsi que le couvent Sant Francesc. Dès 1370, le roi somme les jurats de finir le mur au plus vite. Ses injonctions sont réitérées en mars 1373, par peur de perdre la ville9. Pour la dernière fois en 1386, Pierre le Cérémonieux ordonne aux jurats de terminer les travaux du quartier du Mercadal10.
« … Be vos recordar, com en l’any present, nos, ab altra letra nostra, manam a cascun de vosaltres, sots pena de 2 000 florins, que dins de cert temps, faessets compliment als obrers del mur e vall del Mercadal de la dita ciutat, en aquells 7 000 florins que l’any passat, oren ordenats ésser convertits per la universitat de la dita ciutat en les obres dels dits mur e vall. E per tal com aço, dins lo dit temps no curàs fer, nos, ab altra letra nostra, vos manam, sots pena del cap a perdre, que dits certs dies ho complissets o venguessets personalment a nos, per dir rahons perque no ho compliets… »11
7La volonté royale est une chose, les disponibilités financières de la ville une autre. En 1385, la cité lève une taille pour financer les fortifications. Au début du XVe siècle, le chantier stagne. En 1407, la ville continue à indemniser12, pour les travaux qui « debe (n) hacerse en el arrabal del Mercadal de Girona ». En 1412, les comptes du chantier du Mercadal, ainsi que ceux des murs de Sant Feliu et de Sant Pere13 sont encore ouverts.
8La phase de travaux la plus importante semble être celle commencée en 143814. La page de garde du compte stipule « comptes des dépenses faites pour les chantiers du mur du Mercadal et de Sant Pere et d’autres dépenses faites pour [à cause] les compagnies de France en 1438.»15. Ces hésitations firent de la muraille du Mercadal une construction peu solide. Parallèlement fut réalisé sur l’autre rive de l’Onyar un pan de muraille au sud-est, qui, descendant par les Pedreres, jusqu’à la rue del Carme, puis longeant l’Onyar jusqu’au pont de Sant Francesc, englobait le couvent des Dominicains, la Vilanova et la rive gauche de l’Onyar16. En 1459, Le Conseil de la ville ordonna la construction de la porte de Bonaventura, et « les jurés17 (…) ordonnent que l’honorable Bernat Totham sous-bailli de Gérone, et les autres officiels ». soient chargés de récupérer les taxes des personnes « ui sont taxés pour faire les travaux du mur devant le portail de Bonaventura qui suit l’Onyar pour la défense de la place et du mur de la Galea de la dite ville. ». À la veille de la guerre civile, Gérone était ceinturée par une muraille ancienne sur les hauteurs de la ville, dont le point culminant était la Torre Gironella, elle même objet de travaux en 141118, et d’une muraille nouvelle allant de la porte du Carme aux bourgs de Sant Pere et Sant Feliu, et, traversant la rivière, au Mercadal. La ville comptait alors 983 feux, et sa physionomie devait être très proche de la Gérone d’avant 193619. Paradoxalement, ce furent les murs les plus anciens qui résistèrent aux attaques, alors que le Mercadal était facilement occupé.
9Les murailles furent construites alors que la ville se préparait à la guerre. Il y eut d’autres chantiers au cœur même du conflit. Entre 1462 et 1463, des travaux furent entrepris dans la Força Vella20, cœur historique de la ville, situé sur les hauteurs à l’Est du cardo romain. L’intitulé des comptes nous renseigne sur les raisons de ce chantier :
« Comptes des recettes que moi, Pere Miquel, juriste de Gérone, ferai pour l’administration que m’a commandé et ordonné son excellence Doña Jeanne, par la grâce de Dieu reine d’Aragon, tutrice de l’illustrissime Don Ferdinand, fils aîné du sérénissime seigneur Don Jean, par la grâce de Dieu roi d’Aragon, et le lieutenant général du dit sérénissime seigneur roi, comme les dits sérénissimes reine et illustrissime seigneur aîné furent délivrés du siège que leur avait imposé le rebelle scélérat, comte de Pallars, dans la Força Vella de Gérone. ».21
10Les lieux et édifices endommagés, et par conséquent réparés, furent les suivants22: : les portes de Sant Cristofol, de Sobreportes, de Sant Pere, de la Força, du Mercadal et de Sant Llorenç ; : les tours de Gironella et de Requesens ; : les Ballesteries, l’église Sant Feliu, la maison des Sobregaites, la prison, la Pia Almoina et la Sacristie majeure. Hors de la Força Vella, la guerre a fait de nombreux dégâts. En 147323, Joan Agusti, maître majeur de la seu, Francesc Boet, Jaume Girones, Joan Exoli et Miquel Geroni sont convoqués par les jurats pour qu’ils voient la Tour « gross. » de la porte des Albadivers : « … Ils ont vu que les voûtes de la dite porte l’une qui est à l’extérieur et l’autre qui est à l’intérieur sont brûlées, éclatées et endommagées en hauteur de telle manière qu’elles doivent être défaites et réparées, de façon à ce qu’elles retrouvent le dû et la force qu’elles avaient avec des linteaux, pierres taillées de nouveau et de la bonne chaux.»24. La Tour penchant vers l’Onyar, il est conseillé qu’une palissade soit construite en dessous « de longitud de 11 a 12 palms ».
11Dix ans après la fin du conflit, les dégâts ne sont pas encore réparés. En accord avec les jurats, le maître d’œuvre de la cathédrale, Julia Julia est chargé de combler « les trous de la Força et des portes.»25. En fait, les travaux sont beaucoup plus étendus que cela. Maître Julia doit réparer la porte du château de Gironella, celles de Notre Dame, du Carmel, des Albadiners, de Sant Antoni, de Maître Girart, de Pallisser, de Sant Feliu, des Adobaries de Sant Pere, de Figueroles, d’en Cardonet du Mercadal, du Moner, de Thomas Farrador, de la place de la Villa, de la rue de Ginesta, de Naples, des Frères Mineurs, de maître Jaume savetier des Ballesteries26. Bref, il doit refaire à neuf les principaux accès de la ville.
12Les fortifications et murailles ne concentrent pas à elles seules toute l’activité de construction aux XIVe et XVe siècle. La ville s’est développée sur les deux rives de l’Onyar et du Galligans : la construction et l’entretien des ponts est un souci majeur des jurats. De tous temps, Gérone a dû lutter contre les caprices des quatre rivières qui la traversent. Pour ne citer que quelques exemples, en 1421 le Ter et l’Onyar ont débordé, en 1423, le Ter, en 1445 le Galligans et l’Onyar27… Pour la sécurité des habitants, mais aussi pour un apport financier certain, les jurats ne peuvent négliger les ponts de la ville. Le droit de passage devint une coutume28. En 1405, le roi Martin concéda son application à Gérone pour 10 ans, avec possibilité de le vendre ou de l’affermer. Toutes les personnes transitant par Gérone devaient le payer. La moitié des revenus devait être employée à la construction ou à la réparation les ponts, l’autre laissée aux besoins de la ville. En 1424, une licence royale donne aux jurats et à l’obrer des ponts principaux le droit de prélever durant 10 ans 2 deniers par homme à cheval et 1 denier par homme à pied ou animal chargé ou non29. Les décisions municipales nous fournissent de nombreux renseignements leur construction. En 142130, se met en place l’administration du Pont du Mercadal, encore appelé Pont Nou. D’abord en bois, puis en pierre, il avait à l’une de ses extrémités une tour de défense, dont une niche contenait une statue de Notre Dame del Coll. Cette statue fut conservée jusque dans les dernières années du siècle passé31. En 1424, on cite pour la première fois un Pont Nou, « in rivo Tercis et in vico vocato de Padreto.»32. En 1426, une taille est levée pour financer des travaux sur le Ter33. En 1438, ces travaux continuent toujours34.
13Entre 1446 et 1448, les jurats décident d’ériger un autre pont, le pont de Sant Jaume ou de Pedret35. Il était situé « Tout près de l’église de Sant Jaume de Sens, aujourd’hui de Pedret ». Le chantier était à la charge des jurats et des chanoines de la cathédrale, qui en avait la gestion directe. Le maître d’œuvre, Pere Cipres, dirigea les travaux de la cathédrale entre 1430 et 1434. L’inventaire des outils utilisés lors de ce chantier est conservé aux archives de la ville de Gérone36. De même, en 1432, un contrat engage Pere Cipres, Pere Bisbe et Pere Mollet, charpentiers, pour réparer une poutre du pont, alors que Pere Fuxa et Gonsalvo travaillent sur les structures en pierre37. La durée de vie de ce pont fut courte38. En 1493, un autre fut construit avec un certain nombre de problèmes : Francesc Gomis, maître d’œuvre de la seu, interdit aux tailleurs de pierre d’extraire des matériaux des Pedreres, carrière qui fournissait le chantier de la cathédrale. Il alla en prison pour cela. De la fluidité de l’approvisionnement en matières premières dépendait le bon déroulement d’un chantier : Gomis a tenté de préserver sa main mise sur le pierres de bonne qualité des Pedreres.
14Enfin, d’autres chantiers furent commandités par les jurats. Toujours selon les livres d’actes, il semble que le pouvoir local fit des efforts certains pour suivre l’évolution naturelle de la ville, c’est-à-dire déplacer le centre du pouvoir vers la Plaça del Vi. En mars 142739, commencent des travaux de rénovation de la « la nouvelle maison de la ville de Gérone ». Les réparations et travaux étaient nécessaires, selon les termes de l’époque. Les travaux sont financés par la Boutique du Froment40. À la fin du siècle, la voûte de la chapelle de la casa del Consell de la Ciutat devait être à son tour refaite, « en deux rangs de briques »41. De nombreux travaux sont entrepris dans ce quartier. En 1434, Pere Castell et Pere Domenec remettent en état l’arc « qui donne sur la rue. », « construit dans la maison de Petri Descala et les autres maisons du dit Francisci de Sanct Martino (…) au lieu dit des ateliers de draperie »42. En 1448, un contrat lie Bartomeu Fuxa et Bartomeu Sans, tailleurs de pierre de Gérone aux jurats. Il s’agit de construire, pour la maison de Ponç Esteve et Jauma sa femme, « au bout de la rue de la galea (…) dans la partie de la voute en dévers sur la dite rue de la galea », un arc de pierre et un pilier. Pour payer les 63 lb. 7 s. nécessaires à la construction de cet arc, on lève une taille la même année43. On apprend d’ailleurs que parmi les neuf maîtres d’œuvres qui sont intervenus sur ce chantier, figure Pere Cipres, maître d’œuvre de la cathédrale. Il était, semble-t-il, un ingénieur très apprécié. Joan Guilana, Jaume Valor, Jaume Cubies, Bernat Viçens, Antoni Puig, Bernat Andres, Pere Serra, et Llorenç Puig, tous maîtres à la cathédrale, ont travaillé avec lui44.
15À la fin du siècle, à cause des dégâts des différents sièges, ou par souci d’urbanisme, les jurats décident « l’embellissement et l’ornementation des places et lieux publics et des rues de la dite ville.»45. Ils veulent mettre en valeur la Plaça del Vi, où se situe la Maison de la Ville. Pour cela, « la maison (…) située au bout de la place des Albergaries et de la rue des Ciutadans (…) est fort laide et déforme la dite place »46, et par conséquent « les dits arcs et tirants soient complètement démolis et mis à terre.»47. Ainsi, « par cette démolition la dite place s’agrandit »48. Cette maison est loin d’être la seule à tomber pour la cause d’un « embellissement ». 37a : utres font partie d’une liste des maisons à sacrifier pour « bénéficier de clarté et de beauté ». Le coût approximatif de ces destructions est de 66 lb 5 s. Dans la même optique, en 149549, la ville engage Joan Perer, maître de maison, pour refaire les murs de la rue des Ciutadans.
16Le Conseil de la ville est très actif aux XIVe et XVe siècles. Sa politique de travaux répond principalement à des agressions : celles des hommes au travers des guerres et des sièges, et celle du milieu dans un espoir de dominer les caprices de la nature. Cependant, à la fin de la période, les jurats ont compris l’intérêt d’aller plus loin que de simples reconstructions : la ville doit être belle et se moderniser, les rues doivent être aérées pour des raisons d’hygiène. C’est une prise de conscience de l’importance de l’urbanisme.
2. Les chantiers ecclésiastiques
17Cependant, l’Église est de loin le principal promoteur des chantiers effectués à Gérone au XVe siècle. Ce n’est pas par la diversité des travaux que l’Église se manifeste, mais par l’ampleur des ouvrages réalisés. Les chantiers ecclésiastiques regroupent un très grand nombre d’ouvriers, et ce sur une période très longue, ils nécessitent un financement important qui s’appuie sur une organisation financière perfectionnée.
18La Pia Almoina est l’un des ensembles gothiques les plus emblématiques de Gérone. Cette institution qui distribuait du pain aux pauvres a été fondée en 1228. Cette administration de caractère bénéfique dépendait de la cathédrale50. À sa fondation, elle n’englobait que quelques maisons dans la juiverie, au pied de la seu. Petit à petit, elle achète les maisons juives environnantes pour atteindre vers 1421 son extension maximale51. Au XVe siècle, elle ne fait l’objet que de très rares travaux, surtout d’entretien. Les comptes de la Pia Almoina nous renseignent sur les dépenses engagées à cet effet52. En 1451, la toiture est refaite au niveau de la chambre des apprentis, « cambra dels fadrins »53. Les travaux les plus importants se situent à la fin du siècle. Il s’agit de réparer des portes et fenêtres (1479), et la citerne (1483), ou de repaver le segment de rue qui se situe « devant la maison de Miquel Pages » (1485). Le seul fait notable serait peut-être l’intervention du maître d’œuvre de la seu, Julia Julia en 1485 pour la réparation d’un mur devant la maison du Bénéfice de la Santa Creu. La Pia Almoina semble donc achevée totalement à cette époque.
19L’autre construction importante de l’ensemble religieux qui s’élève sur l’ancien forum romain est le Palais Épiscopal. On connaît l’existence d’une domus episcopi au Xe siècle54. La documentation le concernant est quasiment inexistante avant le début du XIVe siècle. Durant tout ce siècle, des travaux d’agrandissement lui donneront sa forme actuelle55. L’utilisation de l’arc diaphragme dans sa construction fait de cet édifice un exemple d’architecture prégothique à Gérone56. Dans les dernières années du XIVe siècle, le palais présente sa structure définitive. Il est composé de trois ensembles : la Curie, à l’est, la zone d’habitations, salles de réceptions, galeries et chapelles entre la Curie et la seu, et enfin, l’ensemble fortifié, situé entre la Tour de la Preso et la façade principale57. En 1427, un tremblement de terre fait de nombreux dégâts à Gérone. Des réparations doivent alors être effectuées au palais. Antoni Marco et Pere Cipres, maître d’œuvre de la seu, tous deux charpentiers, sont engagés pour remplacer les portes du grand portail et du patio. De même, ils refont la toiture du grand escalier, du grand salon, et de la citerne « pelada gorda meniar ». Enfin, ils refont la porte qui mène aux cuisines du vieux palais58. En 145159, l’évêque entreprend des travaux de plus grande envergure. Ils ont surtout lieu au nouveau palais60. Il s’agit des chambres des « scudes »61, du grain, du four « vers cers e sol ixent »62, de Montrodon, la maison de Balaguer, située à coté de l’escalier du salon, et dans la salle basse, qui donne vers la seu63.
20Enfin, en 1495, les paroissiens de l’église de Sant Miquel de Palau, sise dans le quartier Sant Feliu, engagent Joan Parer, maître de maison. Ils lui demandent de construire une nouvelle église sur les ruines de l’ancienne qu’il aura pris soin de détruire. Il dispose d’une année pour mettre en place les fondations.
21Ces chantiers ne sont que de faible importance. L’activité de construction se concentre surtout sur trois grands points : la collégiale Sant Feliu, le monastère Sant Daniel, et bien sûr la cathédrale.
22L’ancienne Collégiale Sant Feliu, située hors les murs, subit de nombreuses modifications au XVe siècle. Comme nous l’avons vu, lors des grands travaux de fortification de la ville, elle perdit son cloître gothique. En 1435, des donations permettent de finir l’autel de Sant Narcis64. Il faut ensuite attendre 1488 pour que la décision de couvrir les deux dernières travées de la nef soit prise65. Les deux maîtres d’œuvre de la seu, Julia Julia et Francesc Gomis unissent leur savoir faire pour venir à bout de cette tâche. De plus les murs de contention nord et sud sont renforcés66. En 1489, Julia Julia signe un nouveau contrat avec la fabrique de Sant Feliu pour réaliser et terminer la grande voûte de la nef.
23Hors les murs, le chantier le plus important est celui du monastère de Sant Daniel. De nombreuses sources documentaires font état de travaux effectués lors du XVe siècle67. Ermessenda, abbesse du monastère, entreprend dans les années 1425 de transformer le dortoir et le cloître. En 1427, le notaire Pere Cervia68 rédige l’acte des réformes projetées et de leur financement, à la suite d’une réunion entre Dalmau de Raset, archidiacre du diocèse de Gérone, de l’abbesse Ermessenda et du chapitre du couvent. Ils demandent à « queP.ere Capmany, procurateur du dit monastère fasse découvrir la maison du dortoir du dit monastère et reconnaître et réparer les arcs s’y trouvent et, si nécessaire, les renforcer en totalité ou en partie, et le recouvrir d’une bonne charpente (…) toute la dite maison et de même, [que] le dit dortoir [soit] bien terminé et crépi à la chaux de façon à ce qu’il paraisse tout neuf, et que les fenêtres qui y sont soient fermées convenablement et si nécessaire, soient refaite. Plus tard, qu’il fasse faire un beau cloître sur le cloître existant avec de belles colonnes et arcs et des bancs en pierre, et avec une voûte de briques, avec arêtes et clefs comme dans une chapelle, (…) ainsi que le portail ou porte du dortoir en haut dans le dit cloître neuf par lequel on entre, et un escalier de pierre en bas dans le jardin du cloître inférieur par où on monte dans le chœur, et une porte pour qu’on puisse passer dans le dit cloître et aller au dit dortoir, et repousser la voûte et les côtés du chœur de la dite église, et si nécessaire, fermer les fenêtres qui y sont et en faire de nouvelles si nécessaire (…) »69.
24Les travaux sont entrepris peu après. Pere Capmany prend à son service les maîtres d’œuvres Arnau Sans, Bernat Pericas et Bernat Escuder. C’est Pere Cipres, le charpentier de Gérone, et maître d’œuvre de la seu, qui supervise le chantier. Trois années plus tard, on trouve déjà des quittances pour paiement du charpentier Joan Cervia, pour les portes du dortoir et celles du chœur70. Les travaux sont donc presque achevés. Cependant, Pere Cipres est encore chargé de changer la toiture du dortoir, en bois, et de la remplacer par une voûte gothique en pierre, afin d’assurer une meilleure isolation. Enfin, en 1453, Bernat Viçens est engagé pour remplacer le portail roman de l’église71. Il réutilise les pierres pour construire la nouvelle entrée gothique.
25Mais le chantier ecclésiastique le plus important à Gérone au XVe siècle est sans conteste celui de la cathédrale Santa Maria, la seu. Cet ouvrage représente la source première de notre étude. Il couvre la quasi totalité du siècle. Néanmoins, la construction de cette cathédrale a débuté bien avant le XVe et s’est achevéé bien après. Cependant, nous pouvons considérer cette période comme l’axe central du chantier, du fait de l’ampleur des travaux et de leur importance architecturale. Avant de brosser le tableau du chantier au XVe siècle, il convient de retracer son histoire antérieure72.
26À la fin du XIIe siècle, le temple roman primitif ne suffisait plus aux fidèles géronais. En 1292, le chapitre eut toute liberté pour utiliser les 10 000 sous barcelonais que laissait Guillem Joffre dans son testament afin d’agrandir la cathédrale romane. Nous savons qu’en 1312 la nouvelle abside est composée de neuf chapelles. L’ancien dortoir de l’édifice est remplacé par la sacristie. Les travaux de construction de cette nouvelle abside durent jusqu’en 1347. Maître Enric Faveran, originaire de Narbonne, semble être l’architecte qui réalisa les plans de ce chantier. L’école Narbonnaise joue un rôle important dans les prémices de cette construction. Jaume Faveran remplace son frère en 1321 à la tête du chantier. Puis Guillem de Cors, son successeur en 1330 doit faire face à une période économiquement difficile, mais n’arrête pas pour autant les travaux. En effet, il bénéficie de l’aide de l’évêque Guillem de Vilarnau, qui assigne à l’obra de la seu les revenus d’une année des bénéfices ecclésiastiques vacants dans le diocèse pendant 5 ans:73. Cette solution d’urgence devient une habitude, puisque l’obra a bénéficié de cette aide, au départ occasionnelle, jusqu’à l’achèvement de la cathédrale. Le 12 mars 1347, Arnau de Montrodon transfère l’autel dans la nouvelle abside gothique. En 1349, à la mort, de la peste, de Guillem de Cors, Pere Capmany prend la tête du chantier jusqu’en 1359, date à laquelle il est également à la tête de l’obra de Sant Feliu. Son successeur, Dionis de Lovaina, apparaît dans un acte notarié74 aux côtés de Francesc Bornat, tailleur de pierre, qui serait originaire de Savoie. Le chantier, paralysé par la peste, les pandémies de 1362 et 1371 et la crise économique qui en découle, ne suit pas le projet du chapitre qui était d’unir le chœur gothique aux nefs romanes grâce à un transept75. L’année 1368 s’avère une date clé. En effet, Pere ça Coma devient maître d’œuvre. Il est considéré comme celui qui donna l’impulsion créatrice à la construction de la nef unique. Le chantier le plus important effectué sous sa direction est la construction de la tour-clocher du Saint Sépulcre, dont la première référence date de 137976. Elle s’élève au dessus du narthex et de la chapelle du Saint Sépulcre. Les travaux durent deux ans. Pour la première fois, Guillem Bofill, tailleur de pierre, travaille à la voûte de la tour. Guillem Morey réalise une girouette en forme d’ange de cuivre, indiquant la direction du vent à la croix qu’il tenait à la main. Afin que les fidèles le voient de loin, il fut peint en blanc et ocre. Entre 1381 et 1386, on creuse une fosse pour fondre l’une des cloches. Cette tour est achevée vers 140077. La question de la nef n’est pas pour autant résolue. Depuis Pere ça Coma, l’idée d’une nef unique a fait son chemin, mais les défenseurs des trois nefs restent inflexibles. Vers 1380, les chapelles latérales des deux premières travées sont achevées. Quelle image les contemporains avaient-ils de cette cathédrale, avec son chœur gothique, tête énorme flanquant le corps étroit de la nef romane, entouré de ces chapelles, indépendantes de l’ensemble général ? :
27En 1386, l’archidiacre de Besalú, Galcerand de Vilanova et le paborde du chapitre Pere Carrera, tous deux obrers de la seu, demandent à l’évêque Berenguer d’Anglesola la présence du maître d’œuvre de la cathédrale de Barcelone pour envisager la continuation des travaux. Une première réunion d’architecte est alors convoquée le 25 octobre, pour discuter de l’adoption ou non de la nef unique. Le maître d’œuvre de la Lotja dels Mercaders de Barcelone, Pere Arvey, est présent, ainsi que Bartomeu Sisbert et Arnau Bargués, mestres de cases de Barcelone, Bernat Roca, maître majeur de la cathédrale de Barcelone, Pere ça Coma, Guillem Morey, Guillem Mieres et Pere Ramon Bosch, tailleurs de pierre de Gérone. Les défenseurs de la nef unique ne peuvent se faire entendre. Le plan à trois nefs est maintenu, car la nef unique « ne peut être établie ni être stable ni ferme »78. Mais l’idée n’est pas abandonnée. Pere ça Coma dirige les travaux jusqu’à sa mort en 1393. Guillem Morey lui succède. Originaire de Mallorca, il vit à Gérone depuis 1364. Il a travaillé aux tombeaux de Raymond Béranger II et de sa femme Mafalda à la seu. Il collabore également à la réalisation de la porte des Apôtres, au sud de la cathédrale. Lors de sa maîtrise d’œuvre, il réalise deux piliers, correspondant à l’ébauche d’un plan à trois nefs. Le premier se situe au niveau de la chapelle Sant Esteve, le second devant la chapelle Sant Miquel, pour soutenir la nef centrale. En 1397, un picard, Pierre de Saint Jean, dit Pere de Sant Joan, prend la tête des travaux. Il a déjà travaillé à la construction du portail del Mirador de la seu de Mallorca sous les ordres de Pere Morey. Il est également l’auteur de la porte de Santa Maria de Castello d’Empuries79. Il devait rester à la tête de la seu jusqu’en 1404, date à laquelle Guillem Bofill devient maître majeur, et qui marque le début de notre étude.
28Contrairement à ce que l’on pouvait penser jusqu’alors, on n’a pas détruit immédiatement l’ancienne cathédrale. L’usage était de démolir l’ancien édifice au fur et à mesure qu’avançait la nouvelle construction. Ce système permettait de récupérer des matériaux qui étaient réemployés pour la construction du nouveau bâtiment, et de continuer à accueillir les fidèles pour célébrer le culte80. Les fouilles récentes effectuées dans la seu géronaise dans le cadre du projet européen « Progress »:81 ont mis à jour l’entrée de la cathédrale romane, qui se situe au niveau du baptistère actuel. Les sources archivistiques sont très abondantes pour l’édifice gothique. Elles le sont beaucoup moins, hélas, pour la cathédrale romane. Cependant, on y fait beaucoup allusion, sans pour autant donner de détails sur la structure de l’église. Pourquoi décrire ce que tout le monde voit quotidiennement ? :
29De l’édifice roman, il ne reste à présent que le cloître, la tour dite de « Charlemagne »et deux ailes de dépendances canoniales. L’essentiel de la structure nous échappait, ce qui laissait libre cours à de nombreuses hypothèses. Celles du Dr Josep Maria Marquès82 sont les plus proches de la réalité, maintenant connue. Si nous devons faire une synthèse de ce que fut l’église romane à la veille du commencement de l’édifice gothique, voici ce que nous retiendrions. Les deux temples sont orientés selon le même axe. Devant l’entrée principale, il y avait un narthex, nommé galilea en Catalogne. Il renfermait de nombreuses sépultures, dont celles d’Ermessenda (ou Mafalda, ce point restant à éclaircir) et du comte Raymond Béranger II, « c a p d’estopes.»83. Ces deux sépultures furent ensuite transférées à l’intérieur de la cathédrale gothique. Au dessus de la galilea se trouvait une chapelle dite « du sépulcre ». Le tout était surmonté d’une tour, le cloquer del sepulcre, qui tenait lieu de clocher. La façade de l’édifice devait être légèrement plus étroite que l’actuelle, et comme nous l’avons déjà dit, devait se situer au niveau du baptistère et de la chapelle des Sants Doctors. Le plan, basilical, comprenait trois nefs et un transept84. Les fouilles opérées dans le cadre du projet Progress ont confirmé les hypothèses du Dr J. Ma Marquès. L’équipe d’archéologues de l’Université de Gérone a mis à jour, guidée par les indications préalables des géophysiciens, la façade occidentale de la cathédrale romane, ainsi qu’une grande partie du narthex qui la précédait. Le dénivelé du terrain a permis de conserver ces restes dans un parfait état. En effet, comme toutes les églises, celle-ci fut d’abord commencée par le chœur, afin que l’autel soit le plus rapidement possible disponible pour accueillir le culte. Au fur et à mesure que le chantier avançait vers l’ouest, les bâtisseurs eurent affaire à un problème de dénivellation important : presque deux mètres séparaient le sol de l’église de la roche mère. Les architectes ont préféré, à l’heure de construire le narthex, rectifier ce dénivelé par un escalier, plutôt que le combler par un farcit, c’est-à-dire des gravats. Quand, plus tard, l’église gothique arriva à ce niveau, ils ont comblé entièrement l’espace anciennement occupé par le narthex, profitant des décombres de la démolition de la façade romane. Cette façade faisait donc une quinzaine de mètres de long, avec à chaque extrémité des piliers. Si on respecte la règle de un à trois85, l’église devait donc avoir quelque 45 mètres de long. La porte d’entrée était de belle taille, 3 m 30, et était flanquée de chaque côté d’une colonne juchée sur un podium. Ces deux colonnes devaient vraisemblablement soutenir deux des arcs du narthex. Entre ces deux colonnes, on trouve en effet les restes de l’escalier qui conduisait de la galilea au temple proprement dit. Les lauses qui avaient dû être utilisées pour recouvrir cet escalier ont disparues, et ont été sûrement réemployées lors de la construction de l’édifice gothique. Il n’en reste donc que le squelette.
30Les fouilles ont aussi mis à jour une partie du mur sud de cette église, sur lequel il est intéressant de constater que les tombes actuelles sont alignées. Enfin, lors de celles du narthex, à l’angle avec la façade sud, les archéologues ont découvert une structure, qui pourrait correspondre au Clocher du Sépulcre. De fait, on pouvait accéder par l’intérieur à cet élément. Si cette structure n’est pas la base même de la tour du sépulcre, il s’agit, semble-t-il, de l’escalier qui permettait de monter dans la chapelle, puis dans le clocher.
31Tel est donc l’aspect de la seu quand Guillem Bofill prend la tête du chantier en 1404. Pere de Sant Joan lui laisse la direction pour aller à Urgell travailler avec Antoni Canet. Né à Galliners, près de Gérone, Bofill travaille déjà depuis 25 ans sur le chantier de la cathédrale. Les quinze premières années de sa direction sont sans grande activité. Une porte d’accès au cloître est ouverte en 1416, que l’on recouvre d’une toiture. La chapelle Sant Benet est aussi couverte86. En 141587, l’obra envoie un messager à Narbonne pour chercher le maître d’œuvre de la cathédrale, afin qu’il vienne voir la seu. L’idée de la nef unique ressurgit, certainement à l’initiative de Bofill, fervent partisan de cette solution. Puis, des messagers sont envoyés dans d’autres villes : Tarragone, Barcelone, Perpignan, Urgell afin d’inviter les architectes à une seconde réunion qui a lieu l’année suivante, en 141688. Il faut enfin décider quelle structure employer pour achever la cathédrale, dont l’autel fonctionne depuis déjà près de 50 ans. Depuis 1386 en effet, la situation n’avait guère évolué, et la paralysie qui frappait le chantier devait cesser. La pratique de réunir des experts pour décider collégialement du plan à suivre pour la continuité des chantiers est assez répandue. Nous avons les exemples du Duomo de Milan, ou de la cathédrale de Chartres, un siècle plus tôt89.
32Dans le cas qui nous intéresse, étaient présents ce 23 janvier 1416 : Pasqual de Julbe, maître majeur de la seu de Tortosa, Joan de Julbe, son fils et collaborateur, Pere de Vallfogona, maître majeur de la cathédrale de Tarragone, Guillem de la Mota, tailleur de pierre et associé du maître d’œuvre de la seu de Tarragone, Pere de Vallfogona, Barthomeu Gual, superviseur des travaux de la seu barcelonaise, Antoni Canet, sculpteur de Barcelone et maître majeur de la seu d’Urgell, Guillem Abiell, responsable de divers ouvrages à Barcelone (les églises del Pi et del Carme ainsi que de l’hôpital Santa Creu), Arnau Valleras, responsable de la seu de Manresa, Antoni Antigo, maître d’œuvre de Santa Maria de Castello d’Empúries, Guillem Sagrera, de Saint Jean de Perpignan, Joan de Guincamps, tailleur de pierre de Narbonne, et, bien sûr, Guillem Bofill90. L’évêque Dalmau leur posa trois questions :
« [Il demande].d’abord si les travaux de la dite cathédrale commencée antérieurement avec une nef peuvent continuer avec intention qu’elle fut ferme, quitte et sûre. De même, si ces travaux ne peuvent ou ne veuillent continuer, et si travaux pour une église à trois nefs sont continués, [il veut savoir] s’ils sont congrus et suffisants et tels qu’ils méritent d’être continués ou d’être cessés ou transformés, et s c’est le cas, en quelle autre forme et hauteur la nef doit être montée, pour qu’elle ne dévie pas. De même, de quelle forme ou continuation les dits travaux seraient plus compatibles et proportionnés au chœur de la dite seu déjà commencé et terminé. »91
33La formulation des questions laisse sous-entendre la solution vers laquelle penche l’évêque. Essayons de synthétiser les réponses des architectes92: :
Nom | La nef unique est-elle possible ?c | Que penser des trois nefs ?c | Quelle serait la nef la plus « convenable » c ?c |
Pasqual de Julbe | Elle offre une totale sécurité | La construction de trois nefs offre de plus grandes difficultés techniques | Les trois nefs s’harmonisent mieux avec l’abside actuelle |
Joan de Julbe | Il n’y a aucun danger | Trois nefs sont la meilleure solution | Les trois nefs s’harmonisent mieux avec l’abside |
Pere de | Une nef est bien | Trois nefs sont la meilleure solution | Trois nefs, sans « comparaison » : |
Guillem de la | La sécurité d’une nef unique semble douteuse face aux tremblements de terre | Trois nefs sont la meilleure solution | Trois nefs, sans « comparaison » : |
Bartolomeu Gual | La nef unique est dangereuse | Les trois nefs offrent une sécurité absolue | Trois nefs, sans « comparaison » : |
Antoni Canet | La nef unique offre une sécurité absolue | Les trois nefs aussi, mais de façon moins « noble », et beaucoup plus coûteuse | Une nef serait un tiers moins chère |
Guillem Abiell | Une nef unique est sûre | Le système des trois nef est bon, harmonieux et plus sûr | Trois nefs, sans aucun doute |
Arnau de | Une nef est sûre, solide et sans risque | Le système des trois est bon, applicable et « convenant » : | Les trois nefs sont plus compatibles et mieux proportionnées. |
Antoni Antigo | La nef unique est sans danger | Les trois nefs ne conduiront jamais à quelque chose de beau | La nef unique sera toujours la plus belle, la plus compatible et la mieux proportionnée. |
Guillem Sagrera | La nef unique est bien, solide et sûre et ne risque rien en cas de tremblement de terre | Le système des trois nefs est mauvais | La nef unique est sans comparaison mieux proportionnée et compatible avec le chœur |
Jean de | Une nef est bien, solide et sûre | Les trois nefs sont une mauvaise solution | La nef unique est sans comparaison mieux proportionnée et compatible avec le chœur |
Guillem Bofill | Garantit la solidité de la nef unique | Condamne les trois nefs | Une seule nef avec de grandes ouvertures sera forte, belle et noble |
34Le 15 mars 1417, bien que les trois nefs aient remporté 7 des 12 opinions des architectes, les chanoines se prononcent en faveur de la nef unique, alléguant qu’elle serait plus claire et solennelle, que la lumière serait plus importante et donc plus agréable et enfin, argument de choix, que les travaux dureraient moins longtemps (entendons par là seraient moins coûteux). L’idée géniale de percer le mur ouest du chœur par trois rosaces permit en effet de laisser entrer la lumière dont le clergé paraissait tant se soucier. Notons enfin que les opposants à la nef unique sont tous les représentants des cathédrales du sud de la Catalogne. Les maîtres de Barcelone sont les plus hostiles au projet, alors que les Géronais y sont favorables93. Faut-il voir ici une simple divergence d’esthétisme selon les modes locales, ou déjà une compétition entre Gérone et la capitale du Principat ? : Ou peut-être une prise d’influence de Gérone dans les relations avec le Languedoc.
35Le 18 mars, le chapitre nomme Antoni Canet maître majeur de la seu94 : « Par la volonté de Monseigneur Guillem Mariner, je paye le 17 de ce mois à Antoni Canet maître de Barcelone qui est venu pour tracer l’œuvre d’une nef et faire les gabarits et est resté ici d’autres jours et le dit monseigneur Guillem avec lui 24f.lorins… 264 sous. De même, je lui donne d’autre part par ordre de Monseigneur 6f.lorins… 66 sous »95. La seu de Gérone compte donc deux maîtres à la tête de son chantier, car Guillem Bofill n’est pas pour autant destitué. Ensemble, ils dirigent les travaux des deux premières travées. Cependant, il faut noter que Canet, dont la jeunesse semble plus valorisée que l’expérience de Bofill, a un salaire plus élevé. Bofill sera toujours payé trois sous, alors que Canet touche 5 sous 6 par jour. De plus, leurs pensions annuelles respectives ont presque un rapport de 1 à 3, Bofill percevant 100 sous et Canet 275. Il semble que Canet ait le rôle de théoricien, alors que Bofill reste le technicien, formé sur le chantier. Il apparaît d’ailleurs tous les jours dans les comptes de l’obra, alors que Canet y figure très peu. Il apparaît au travers d’achat de matériel très significatif : par exemple, celui du 13 mars 1418 (c’est-à-dire officiellement trois jours avant son embauche) : cinq parchemins « pour Antoni Canet pour tracer la voûte ».96.
36Cette même année 1417 est aussi marquée par la mise en place des cloches du clocher du Sépulcre97. On nous apprend ceci :
« Ceci sont les frais des cloches faits et administrés par Jaume Eymerich marchand élu par les honorables jurés de la ville de Gérone et Pere Siffre bénéficiaire de la seu élu par l’honorable chapitre de la dite seu, il fut convenu entre l’honorable monseigneur Dalmau de Raset, ardiacre de la Selva et les dits honorables jurés que, de tous les frais des dites cloches, on fasse un total et on en fasse trois parts des quelles deux soient de la grande cloche et le reste soit de la cloche des heures. Il faut savoir que des dites deux parts de la grande cloche on fit trois parts dont la dite ville paye deux parts et la troisième restante est payée par la dite église. Et la dite troisième part qui est celle de la dite cloche des heures se paye à moitié-moitié entre les dites Eglise et Ville »98.
37Les dispositions financières sont très claires. La ville participe aux frais de mise en place des cloches, puisque les citoyens en bénéficient sans exception. De plus, la cloche de l’horloge permet d’égrener un temps « laïc », non rythmé par les offices religieux. Il faut noter que curieusement, on demanda à 8 marins de venir avec leur « arga »:99 pour hisser la cloche majeure.
38À partir de 1417, les travaux vont bon train. En 1418, on achète des barres de fer « per la vidriera que fa a migdia a la Seu ».100, ce qui nous renseigne sur la hauteur déjà atteinte par les parois de la nef, soit environ la moitié de la hauteur finale. En 1420, l’obra fait le même achat pour « la vedriera que es davant les claustres »101. Les deux murs sont battis, il faut à présent monter la voûte. En 1421, la première travée est terminée, et Antoni Canet en personne est l’auteur de la clef de voûte, représentant la Vierge à l’Enfant, qui sera posée en 1424. C’est l’unique œuvre sculptée que la seu conserve de ce maître. La toiture est immédiatement mise en place et terminée, comme le prouvent les achats de tuiles en 1420102. En 1422, on transporte déjà la seconde clef de voûte (« carreton la clau segona ».103). Le 18 décembre 1422, Bofill apparaît pour la dernière fois sur le chantier en tant que maître. Il gagne à cette époque 2 sous. C’est un salaire de misère pour un homme très âgé. Cependant, il réapparait pour une dernière fois en 1424, pour inspecter les formerets104. En 1423, Raymon de Boet est payé pour faire les « fulys de la clau.»105. On achète des arbres pour faire l’échafaudage de la clef de voûte106. Il semble donc que la seconde travée soit en bonne voie, tout comme la toiture lui correspondant, comme le montrent les achats massifs de tuiles qui durent jusqu’en 1424. En 1425, on met en place les clefs de voûtes des chapelles de Sant Domenec et Santa Julia. La même année, deux barres de fer sont achetées pour tenir «:la image de Maria Sancta de la Clau.»107. De la terre est sortie de l’église, peut-être correspondant à la destruction progressive de l’église romane. Enfin, les obrers achètent du plâtre pour «:refermar la volta» et Ramon Sola I peint l’image de la clef de voûte108. La première travée est définitivement achevée, la seconde est bien entamée. C’est une volonté du chapitre de construire rapidement ces deux premières structures, étant donné l’audace et les difficultés d’un tel projet. Une fois les travaux engagés, on ne peut plus revenir en arrière. Le 3 janvier 1427, Raoul Vaultier, architecte français, prend la place d’Antoni Canet : «.Die tertia ianuarii anno MCCCCXXVII fuit provisum de magisterio operis seu fabrice magistro Rotlino Vautier diocesis Berodunensis ad beneplacitum capituli et quod non possit petere salarium nec aliquid aliud donativum requiratur per causam quod veniat ad operandum, et tunc sine salario habeat stare ordinacioni capituli, in posse Michaelis Petri notarii.»109. En 1430, le chapitre le remplace («:revocato primitus magistro Rotlino Beutier constituit magistrum operis sedis Petrum Cipres.»110) par le Géronais Pere Cipres, qui renonce à sa charge en faveur de Berenguer Cervia le 28 septembre 1434. Les travaux avancent vite, puisque la deuxième travée est en pleine réalisation. Sous la direction de Cipres, les dernières chapelles, la galerie et le triforium correspondant à la nef déjà réalisée, les fenêtres hautes et la façade principale, par la suite modifiée, sont réalisés. La maîtrise d’œuvre de Cervia fut d’une remarquable longévité, puisqu’il est à la tête du chantier jusqu’en 1470. Les travaux continuent, même si la majeure partie de la construction a déjà eu lieu. En 1434, est reconstruite une nouvelle loge111, ainsi qu’une nouvelle école112. C’est sous la direction du Géronais que le chapitre commande au maître de Barcelone Antoni Clapers les douze statues des apôtres qui doivent orner la porte du même nom, au sud de l’édifice113. Cette porte devait être surmontée d’un tympan que Joan Clapers, fils du premier, était chargé de décorer. Nous avons conservé l’acte notarié le liant, ainsi que son père, au chantier de la seu114. Il devait réaliser en terre cuite un groupe de sculpture illustrant l’Assomption de la Vierge. Antoni eut le temps de réaliser les apôtres. Mais Joan subit les affres de la guerre civile qui éclata en 1462 et il est probable qu’il ne remit jamais au chapitre son œuvre. De fait, cette Porte des Apôtres ne fut jamais achevée. Nous savons que Guillem Bofill, quand il n’était que tailleur de pierre sculpta certaines des corniches sur lesquelles reposaient les apôtres, que nous conservons toujours. L’œuvre ne put être achevée à cause de la première guerre civile (1462-1472), et ce qui avait pu être réalisé alors fut détruit lors de la seconde (1936-1939).
39L’œuvre devait être à l’image du Portal Nou de la seu barcelonaise. Pour protéger les statues en attendant d’achever la porte, on fit une toiture, qui dura donc jusqu’à nos jours. Les statues étaient disposées de la façon suivante : à gauche, Saint Pierre (avec une ou deux clefs), Saint Jacques l’ancien (avec un bourdon de pèlerin ou une épée rappelant son martyr), Saint Philippe (avec une croix inversée), Saint Mathieu (avec une épée, une hache ou une lance), Saint Jacques le jeune (avec un bâton) et Saint Mathias (avec une lance ou une masse) : ; à droite, Saint André (avec une croix en forme d’X), Saint Jean (avec un calice), Saint Thomas (avec une lance), Saint Bartholomé (avec un couteau), Saint Simon (avec une scie, un poignard ou une masse) et Saint Judas Tadeo (avec une croix et un couteau).
40La guerre civile paralysa donc le chantier. Il faut attendre 1471 pour trouver mention d’un nouvel architecte, Joan Agustí. Son action sur la construction en elle-même est assez minime, mais il fut le réalisateur de la fameuse horloge commandée par le chapitre et les jurats, qui est conservée de nos jours au Musée de la Ville de Gérone. Elle est réalisée « à la mode de Barcelone », c’est-à-dire qu’elle sonne les heures et les quarts. En juin 1479, mestre Julia Julia lui succède à la tête du chantier115. En fait, cette passation de pouvoir reste en famille car Julia n’est autre que le gendre d’Agustí. Ceci a son importance à une époque où la maîtrise tend à devenir une charge héréditaire116. L’activité constructrice sous ses ordres est toute relative. Le temps des grands travaux est terminé, mais le chantier reprend de la vigueur après le calme forcé de la guerre. En 1479, on répare la toiture qui couvre les Apôtres récemment mis en place. On renforce aussi la base du Clocher du Sépulcre, et parallèlement des travaux sont effectués dans le narthex. Cet ensemble, narthex et clocher, semble fragile. Le vocabulaire employé dans les comptes (lo renforç del campanar, apuntalar, paradar, tasconar, …117) souligne cette fragilité.
41En 1479, on couvre la chapelle Sant Pere, qui correspond à la seconde travée de la nef. La chapelle de Tots Sants est construite en lieu et place de l’ancien accès au cloître. La « porta nova a les claustres. » avait été en effet réalisée en 1416118. Même si un autel primitif semblait exister au XIVe siècle, cette chapelle est réalisée de toutes pièces et elle est peinte par le maître Ramon Sola II. La clef de voûte est l’œuvre de Julia lui-même. Elle représente la Sainteté, par une ingénieuse superposition de saints ou martyrs, dont on ne voit que les auréoles119. La santé de Julia semble précaire à la fin de la période. En 1489, quand il perçoit sa pension, le procurateur fait un lapsus en écrivant le nom de Gomis, futur maître, à la place de Julia120. Est-ce la fragilité de sa santé qui pousse le chapitre à déjà lui choisir un remplaçant ? : Le fait est qu’il décède quelques mois plus tard. Francesc Gomis le remplace donc, et reste à la tête du chantier jusqu’en 1511. La réalisation des voûtes est très en retard. Depuis 1447, date à laquelle on fait mention à la « fermeture » de la seu au niveau de la « porta del mig »(porte du milieu), on peut penser que les deux premières travées sont achevées, mais que les suivantes n’ont pas encore été commencées. La troisième travée ne sera réalisée qu’entre 1577 et 1580 par Joan Balcells. On peut donc penser qu’en cette fin de siècle, la cathédrale offre le spectacle surprenant d’une église romane à moitié détruite, recouverte par deux travées d’une cathédrale gothique.
42On pourrait donc résumer ce siècle de construction avec deux noms : Guillem Bofill et Antoni Canet. Le premier pour sa longévité exceptionnelle au sein du chantier de la cathédrale et l’expérience qu’il en a tirée, fut un élément de poids dans le débat sur la nef unique ; : le second pour son génie constructif qui lui permit de dessiner les plans de cette nef grandiose, et d’en diriger les travaux. Le chapitre de la cathédrale a donc su relever en moins de trois quarts de siècle un défi de taille : concevoir et défendre un projet architectural audacieux, le réaliser, et maintenir les grandes lignes de conception malgré les crises économiques et politiques.
43La ville de Gérone offre donc un panorama architectural très actif en ce XVe siècle. Les jurats œuvrent à la protection du site et à son embellissement, l’Église entreprend de grands travaux autant intra qu’extra-muros afin d’offrir aux fidèles comme aux clercs des lieux de culte, de vie et d’administration.
Notes de bas de page
1 Guia d’arquitectura de Girona, Collegi d’arquitectes de Catalunya, Barcelone, 1984, p. 25.
2 AHPG, not. 1, n° 454, 1458-1459, s/f (Sans foliotation).
3 Exemple : AHPG, not. 1, n° 487, s/f : le 13 mars 1487, Pere Frou, marchand, embauche les maîtres Pere Marti et Pere Mostet pour des travaux dans sa maison.
4 Historia de Girona, ADAC, n° 5, p. 152.
5 « Clef du royaume ».
6 J. M. Madurell Y Marimon, « Obras de las murallas de Girona », Annals de l’Institut d’Estudis Gironins, vol. XVII, 1964-1965, Gérone, 1965, p. 331-372.
7 P. Freixas I Camps, L’art gotic…, op. cit., passim.
8 C. Guilleré, Girona medieval, crisis i desenvolupament, Quaderns d’Historia de Girona, Gérone, 1992, p. 10-11. Voir également AHMG, Diversa XXV, Indemnizacion por fortificacion, llig. n° 5.
9 Cité par J. M. Madurell Y Marimon. « Obras de las murallas… », op. cit., p. 333.
10 ACA, reg. 850, fol. 59 v.
11 « … de bien vous rappeler, comme cette année, que nous, par notre autre lettre, ordonnons à chacun de vous, sous peine de 2000 florins que dans un certain laps de temps, vous accomplissiez les travaux du mur et du fossé du Mercadal, grâce aux 7000 florins que la communauté a ordonné l’an passé de convertir en travaux des dits murs et fossé. Comme cela ne fut pas réalisé dans ce délai, nous vous avons ordonné, dans un autre courrier, sous peine de perdre la tête, que vous accomplissiez ou veniez personnellement à nous pour nous dire les raisons pour lesquelles vous ne l’avez pas réalisé ».
12 AHMG, Diversa. XXV. Indemnizacio per fortificacio. llibre 10, fol. 3.
13 AHMG, Comptes del clavari, llig. 4, 1.3.3.1.2.
14 AHMG, Fortificacions. XIII.1. llig. 1.
15 « … comptes dels seduls fets per les obras del mur del Mercadal e de Sant Pere e d’altres despeses fetes per les companyes de Franse l’any 1438 ».
16 ADAC, n° 5, op. cit., p. 152.
17 AHMG, Manuals d’acords, n° 68, 1458.
18 AHG, Urbanisme, reg. 11686, Llibres de comptes de Pere Perpinyà, 1411.
19 Nous pouvons nous faire une idée assez claire de la physionomie de la ville grâce aux photos de Fargnoli, conservées dans le fonds photographique de l’AHMG.
20 ACA, Real Patrimoni, Mestre Racional, Llibres de tresoreria de les Reines d’Arago.
21 « Compte de les reebudes que jo Pere Miquel juriste de Gerona, feré per la administracio a mi comenade e manade per la excellentissima senyora dona Johana per la gracia de Déu regina de Arago, tudriu del illustrissimo don Fernando fill primogenit del serenissimo senyor don Johan per la dita gracia rey de Arago e seu loctiment general del dit serenissimo senyor rey, com los dits serenissima regina e illustrissimo senyor primogenit foren desliurats del siti contra ells posat per lo malvat rebelle comte de Pallars en la Forsa Vella de Gerona… ».
22 L. Camos Cabruja, « La força vella de Girona en 1462-1463 segons un manuscrit de l’epoca », Butlleti de l’Academia de Bones Lletres, Barcelone, 1936, p. 100.
23 AHG, Manuals d’acords, 1473, fol. 204.
24 « han vist que los revolts del dit portal la hun que es de fora del portal e l’altre de dintre son cremat, sclafats e permuts en avall de tal manera que estan a desfer e reperarlos, en tal forma que tornen en lo degut e fortalesa en que staven ab ponts, pedres picades de nou e de bona calç ».
25 AHG, Manuals d’acords, n° 83.
26 Ibid.
27 Ramon Alberch I Fugueres, P. Freixas I Camps, E. Massanas I Burcet, Joan Miro I Ametller, Girona, rius, ponts, ayguas, Gérone, 1982, p. 32.
28 M. M. Costa Paretas, « Els antics ponts de Girona »., Annals de l’Institut d’Estudis Gironins, XXII, 1974-1975, p. 2.
29 ACA, Cancelleria, reg. 2593, f. 95 v.
30 AHG, Manuals d’acords n° 40, 1421-1423.
31 M. M. Costa Paretas, « Els antics ponts de Girona », op. cit., p. 5.
32 AHG, Manuals d’acords, n° 47, 1424. Une description assez complète en est donnée : « huius civitatis fuit construi et hedifficari inceptus pons lapideus, vocatus lo pont nou, in quo ponte unica archata est constructa, cui arcatam lapideam superadditus fuit pons, constructus ex lignis et terra »., ainsi que les raisons évidentes de son édification : « plurimis vicibus fluctuacionibus aque et per ipsum rivum Ticeris labencium ruptus extitit et destructus ». « ponte fusterio destencho et demolito. »« non potuit neque pont herie transitus per pontem ipsius. ». Les jurats décidèrent donc que « dictum pontem perfici facere de lapidibus ».
33 AHG, Obres Publiques, XIII.4.1 : ponts. llig. 8.
34 AHG, Fortificacions, XIII.1, llig. 1.
35 AHG, Ponts, XIII.4.1, llig. 1.
36 AHG, Manuals d’acords, n° 50, 1430.
37 AHG, Manuals d’acords, n° 51, 1432-1433.
38 R. Alberch I Fugueres, P. Freixas I Camps, E. Massanas I Burcet, J. Miro I Ametller, Girona, rius, ponts, op. cit., p. 89.
39 AHG, Manuals d’acords, n° 48, 1426-1427, s/f.
40 « Pecunias necessarias exsolvi de pecunii et emolumentis botigue frumenti»:, ibid.
41 « En rajola doblada», AHG, Manuals d’acords, n° 97.
42 AHG, Manuals d’acords, n° 52, 1434, s/f.
43 AHG, Manuals d’acords, n° 60, 1460, s/f.
44 « Los dits mestres mitjaçant jurament votaren que la dita obra sia feta en aquesta manera»., ibid.
45 « l’embelliment e ornament dels places et lochs publics e carrers de la dita ciutaṭ ».
46 « la casa (…) en lo cap de la Plassa dels Albergaries e lo carrer dels ciutadans (…) dona molta ofuscacio empatie (sic) e deformans a la dita plassa»:.
47 « los dits archs e etibancs sien del tot demolits e derrocats fins a terra»:.
48 «:per la qual demolicio la dita plaça pren gran ampliacio.», AHG, Manuals d’acords, n° 93, 1493, s/f.
49 AHG, Manuals d’acords, n° 95.
50 Cécile Fouchard, Assistance et pauvreté à Gérone au début du XVe siècle, mémoire de maîtrise d’histoire de l’Université de Savoie, 1995, p. 50.
51 Archives Historiques du Collège d’Architectes de Gérone, plans et éléments architecturaux de la Pia Almoina ; C. Guilleré, Diner, poder i societat a la Girona del segle XIV, Gérone, 1984, p. 170 sq.
52 AHG, Pia Almoina, llibres 51, 62, 65.
53 « He fiu cambiar he recobrir tot lo dit taulat car lo canis era tot podrit»., ibid.
54 Joan Marques Casanovas, Josep Maria Marques Planaguma, « Apuntes historicos sobre el palacio episcopal de Gerona », AIEG, XIV, Gérone, 1960, p. 270.
55 P. Freixas, L’art gotic a Girona, op. cit., p. 30.
56 Ibid.
57 Ibid. p. 31.
58 AHPG, not. 4, n° 143, s/f.
59 AHPG, not. 4, n° 184, s/f.
60 Ainsi appelé en opposition à l’ancien palais, et qui représente la partie de l’édifice construite après 1300.
61 « Des écus ».
62 « Au Nord et à l’Ouest ».
63 AHPG, not. 4, n° 184, s/f.
64 AHPG, not. 1, n° 414, s/f.
65 P. Freixas, L’art gotic…, op. cit., p. 34.
66 Ibid.
67 Voir les travaux de P. Freixas sur le thème : L’art gotic a Girona, op. cit., p. 34, et l’article « El monestir de Sant Daniel : reformes i ampliacions gotiques », Estudi General, n° 1, 1981, Gérone, p. 113- 118.
68 AHPG, not. 6, n° 161.
69 « Pere Capmany, procurador del dit monastir, que fasse descobrir la casa del dormidor del dit monastir e fasse regonaxer e reparar los archs qui son en lo dit dormidor e, si necessari serà, fer respatles en los dits archs o en partida de aquels, e puys cobrir de nou de bona fusta (…) tota la dita casa e aximateix, la dita casa del dit dormidor ben rabatre e anholir de calç en manera que parega tota nova, e les finestres quiy son, tancar pertida e si necessari sera, ferna de noves. Mes avant fer fer bela claustra sobra la dita claustra qui ja es en lo dit monastir ab beles colones e archets e maqui o padris tot de pedra e ab volta de raiola, ab guies e claus a manera de capela, (…), e fer lo portal o porta del dormidor alt en la dita claustra nova per la quel claustra nova entra hom al dit dormidor, e fer scala de pedra baix en l’ort de la claustra jusana per on puig hom alt en lo cor e fer porta per un puxa hom passar en la dita claustra e nar al dit dormidor, e rebatra e anloir la volta e los costats del cor de la dita sgleya e, si necessari sera, tancar finestres qui ja hi son e fer ni de noves en la manera que sera necessari (…)», ibid.
70 AHPG, not. 6, n° 167.
71 AHPG, not. 4. n° 188.
72 Nous nous sommes appuyés sur les ouvrages suivant pour reconstituer l’histoire du chantier de la seu : P. Freixas, L’art gotic a girona, op. cit., p. 15-29 ; Cristina Homs Rourich, «L:os constructores de la catedral de Girona:», Cuadernos de Historia Economica de Catalunya, vol. XVII, Barcelone, 1977, p 76-157 ; Jacques Paul, «L:e problème de la nef unique:», Cahiers de Fanjeaux, n° IX, 1974, p. 21-53 ; Serra I Rafols, «:La nau de la catedral de Girona:», Miscel.lània Puig i Cadafalch, vol. I, Barcelone, 1947-1951, p. 185-204 ; J. Bassegoda, La catedral de Gerona, Barcelone, 1889 ; P. Lamberto Font, Gerona, la catedral y el museu diocesano, Gérone, 1952 ; Alain Erlande Branderbourg, La cathédrale, Paris, 1986 ; J. Marques Casanova, «E:l portal de los apostoles en la Seo de Gerona:», Annals de l’Institut d’Estudis Gironins, 1959 ; Padre Villanueva, Viaje literario a las iglesias de Espana, T.XII, Madrid, 1850 ; J. Calzada I Olivera, Las claves de boveda de la catedral de Girona, Barcelone, 1975.
73 J. Bassegoda, op. cit., p. 51 : « … dio a favor de las obras los reditos y frutos que debian percibir el primer año todo los beneficios vacantes en la diocesis durante 5 años ».
74 AHG, not. 1, n° 66, s/f.
75 P. Freixas, L’art gotic a Girona…, op. cit., p. 17.
76 Ibid., p. 18.
77 ACG, Obra de la Seu, n° 22, s/f.
78 « non posse stare nec esse stabile sive firmum. ».
79 P. Freixas, « El proces constructiu de la seu de Girona », Girona a l’ abast VI, 1996, p. 161-173.
80 Le procédé est détaillé dans le contrat entre Joan Parer et les paroissiens de Sant Miquel de Palau, déjà cité : « … ço es que en lo loch o part ont es ja situada l’esglesia fara de nou una esglesia maior que la quey es en tal manera que obrant la nova de fonaments la sglesia vella rest fins que faça la volta… ». (AHPG, not. 1, n° 502, s/f).
81 « Progress » est un projet FEDER 10 de la Commission Européenne de géophysique appliquée à l’archéologie, qui vise à développer l’usage des fouilles non destructives en milieu urbain. Pour valider la méthode géophysique, une équipe internationale de géophysiciens, composée de MM. : Dabas (CNRS), Casas (Université de Barcelone) et Ranieri (Université de Cagliari), a procédé à une prospection dans la partie ouest de la cathédrale. Des archéologues de l’Université de Gérone, sous la direction de M. Palahi Grimal, ont ensuite effectué un sondage archéologique de vérification. Nous tenons à remercier P. Freixas, responsable du projet, de nous avoir permis d’utiliser les conclusions de ces études.
82 J. M. Marquès, « La fachada de la catedral de Gerona », RDG, X, 1955, p. 285-316.
83 « Cheveux fillasses », en référence à la couleur rousse de sa chevelure, et à son aspect frisé.
84 Catalunya Romànica, vol. V, 1991, p. 111.
85 Règle de proportion du bâti roman : 3 largeurs de l’édifice égalent sa longueur.
86 ACG, Obra de la Seu, 1416, fol 67 r., 72 v., 75 r.
87 ACG, Obra de la Seu, 1415, 32 r.-33 v.
88 Voir J. Villanueva, viage literario a las Iglesias de España, t. XII : « Viage a Urgell y a Gerona », Madrid, 1850, p. 324-338.
89 P. Freixas, « El proces constructiu… », op. cit.
90 Voir entre autres : P. Freixas, « El proces constructiu de la seu… », op. cit., p. 169 ; A. Erlande-Brandenburg, La cathédrale, Paris, 1989, p. 188 sq. ; J. Villanueva, Viaje literario a las Iglesias de España…, op. cit., p. 324-338 ; P. Lavedan, Histoire de l’art, t. 2, Paris, 1944.
91 « Primo si la obra de la dita seu pus altament a una nau antigament comensada se pora continuar ab intencio que fos ferma, quitia è sens tota dubtansa. Item posat que la dita obra a una nau quitiament è segura nos posques o nos volgues continuar si la obra derrerament de tres naus continuada es congrua è sufficient è tal qui merescha essser continuada o si mereix esser cessada o mudada en altra forma e al cas ques haia mudar en altre forma a quanta altura deu esser puiada specifficant ho per manera que no puixa deviar. Item qual forma o continuacio de les dites obres seria pus competible e mes proporcionable al cap de la dita seu je comensat fet è acabat ».
92 A. Erlande-Brandenburg, La cathédrale…, op. cit., p. 188.
93 Serra I Rafols, « la nau de la catedral de Girona », Miscel.lania Puig I Cadafalch, op. cit.
94 ACG, Obra de la Seu, 1417-1418, fol. 34 r.
95 « De menement de monseyn Guillem Mariner, item pague a 17 del mes an Antoni Canet mestre de Barcelona que ere vengut açi per traçar la Obre de una nau e per fer les molles e stech açi altres dies e lo dit monseyn en Guillem fin a ab el a 24 florins… 264 sous. Item li done d’altre part per menement del monseyn 6 florins… 66 sous ».
96 Ibid., 34 r.
97 Ibid., 1417.
98 Ibid. 2 r. : «Aquestes son los messios de les senys fetes e administrades per en Jaume Eymerich mercader elet pro los honorables jurats de la ciutat de Gerona e Pere Siffre beneficiat de la Seu elet pro lo honorable capitoll de la dite Seu fou convengut entre lo honorable monseyn Dalmau de Raset ardiaque de la Selva e los dits honorables jurats que de totes les dites messions dels dits denys se fes una massa e fossen fetes III parts de les quals les II fossen del seny maior e de la restant fos del seyn de les ores. Es assaber de les dites II parts del seny major se fessen III parts de que pagua II parts la dita ciutat e la tercere restant pagua la dite sgleya. E la dita terça part qui es del dit seny de les hores se pagua mig per mig entre les dites Sgleya e Ciutat. ».
99 Cabestan, utilisé par les pêcheurs pour hisser les barques sur la rive.
100 ACG, Obra de la Seu, 1418, 23 v.
101 ACG, Obra de la Seu, n° 31, 1420, 148 r.
102 ACG, Obra de la Seu, n° 31, 1420, 171 r. sq.
103 ACG, Obra de la Seu, n° 31, 1422, 285 v.
104 ACG, Obra de la Seu, n° 33, 1424, s/f.
105 ACG, Obra de la Seu, n° 33, 1423, 48 r., «l:es feuilles de la clef»:.
106 Ibid. 49 r.
107 ACG, Obra de la Seu, n° 34, 1425, s/f.
108 ACG, Obra de la Seu, n° 34, 1425, s/f.
109 ACG, Codex du secrétaire du chapitre, fol. 63 r., cité par F. Fita I Colomer, Los reys de Aragó y la seu de Girona : desde l’any 1462 fins al 1482 : col.leció de actes capitulars, Barcelone, 1873, p. 107.
110 Ibid.
111 ACG, Obra de la Seu, n° 36, 1434, 13 r.
112 ACG, Obra de la Seu, ibid. 13 v.
113 J. Marques Casanovas, « El portal de los Apostoles de la Seo de Gerona », RDG, n° 71, 1975, n° 7 : 2, 1975.
114 ADG, negotiorum capituli, t. 3, fol. 9 r. sq.
115 Sandrine Victor, « La cathédrale de Gérone durant la maîtrise d’œuvre de maître Julia. 1479- 1490 », Lambard, vol. X, Barcelone, 1997, p. 169-186.
116 P. Bonnassie, La organización del trabajo trabajo en Barcelona a fines del siglo XV, Barcelone, 1975, passim.
117 « Renforcer, soutenir, bloquer, coincer », Miquel Fullana, Diccionari de l’art i dels oficis de la construccio, Majorque, 1995.
118 ACG, Obra de la Seu, n° 28, 1416, 67 r.
119 J. Calzada I Oliveras, Las claves de boveda de la catedral de Girona…, op. cit., p. 46.
120 ACG, Obra de la Seu, n° 50, 1489-1493, fol. 20 r.
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