Parole d’illuminées (1530-1655)
p. 151-164
Texte intégral
1De nombreux historiens ont montré que l’Inquisition poursuivait bien plus les opinions que les comportements1. Entendons par « opinions », d’une part, ce qui se rapporte aux croyances ou à « [l’]ensemble des idées que l’on a dans un domaine déterminé » ; d’autre part, ce qui relève de l’acte d’opiner ou de « dire son opinion » sur un sujet ou une idée que l’on soutient (Le Robert). C’est dans le sens de cette deuxième assertion que nous souhaitons développer le thème de cet article.
2En étudiant le langage dans le domaine de l’extra-linguistique2, nous voulons savoir si la façon dont les femmes alumbradas et/ou ilusas ont exprimé leur point de vue a pu influencer la décision du Tribunal de l’Inquisition. Plus exactement : peut-on observer des points significatifs permettant de préjuger de la sentence concernant ces femmes que l’on accuse de s’être égarées dans leur Foi ?
3Afin de considérer le discours des accusées en situation d’interaction avec le système judiciaire inquisitorial, en nous appuyant sur les exemples les plus saillants, nous analyserons tout d’abord les paroles des femmes dont la cause s’est soldée par une condamnation. Nous étudierons, ensuite, le discours de celles dont le procès a abouti à un acquittement3.
S’opposer ou se défendre : le chemin de la condamnation
4« [La rea] niega todo lo contenido en el capítulo (en la acusación) ». Malgré les scrupuleuses retranscriptions des greffiers inquisitoriaux, nous ne pouvons pas dire quels termes exacts recouvre cette formulation. Plus précisément, nous ne saurons pas si, lors de la réponse à la lecture des chefs d’accusation, les inculpées auront employé le mot négatif « no » ou d’autres expressions engageant une opposition plus marquée du type « lo niego », « no es cierto » ou « todo es falso ». Mais ces formules sont fréquentes et ouvrent la transcription des réponses des inculpées aux accusations du procureur.
5Pourtant, cela n’est pas une caractéristique liée au « genre » féminin. Présente dans tout type de procès, la négation fait partie d’un mécanisme de défense face à ce qu’un sujet homme ou femme perçoit comme une agression et traduit, dans le système juridique inquisitorial, une position condamnable quel que soit le sexe du prévenu. Car en niant, c’est-à-dire en refusant les faits accusatoires et en s’y opposant, la personne inculpée met en cause la compétence du Tribunal. En effet, dans le cadre de l’instruction, la preuve décisive qui garantit la validité de l’information accusatoire et la démonstration de la culpabilité de l’accusé(e) par le procureur, c’est la confession. La personne inculpée qui y consent est réconciliée et réprimandée modérément à condition qu’elle confesse entièrement son crime et qu’elle désigne les personnes susceptibles d’en avoir perpétré. Or si elle s’obstine à nier les charges répertoriées par le procureur en ne confessant pas ses « crimes », la personne ne collabore pas pleinement avec le système judiciaire. En cachant la ’vérité’, l’accusé(e) fait obstruction à la justice et, par là même, offense la Foi.
6Dans la mesure où nous sommes ici face à l’une des formes de rejet les plus naturelles et élémentaires, nous allons nous intéresser plus particulièrement aux accusées qui vont user de la raison et du langage pour se défendre. Car, culturellement, et en particulier dans le domaine de la Foi, la parole des femmes suscite, au premier abord, de la méfiance4. Ainsi, la première des marques qui montre la capacité de certaines accusées à se défendre apparaît à travers la façon dont elles vont répondre concrètement aux questions des inquisiteurs. Dans leur réponse, ces accusées introduisent des arguments pertinents qui restent centrés sur le thème de la question posée. Cette tendance est perceptible, notamment, dans le procès contre Isabel de Caparroso5 en 1645.
7Après une enquête préliminaire de deux ans (1643-1645), son procès s’ouvre en 1645. Elle est accusée d’adhérer aux doctrines hérétiques des religieuses de San Plácido et d’alumbradismo et comparaît alors devant le Tribunal de Tolède.
8Mais elle a l’expérience de ce genre de procès. En effet, en 1626, cette beata avait témoigné dans l’affaire qui opposait l’Inquisition de Madrid aux religieuses, prétendument possédées, du couvent de San Plácido.
9Le 12 septembre 1645, lors des premières audiences de la beata, et comme à l’accoutumée, le Tribunal ne lui indique pas les raisons de son emprisonnement. Aux questions générales, Isabel répond strictement : elle vient d’une lignée de vieux chrétiens, ne s’est jamais mariée et n’a jamais eu d’enfants, elle sait se signer, connaît les prières essentielles (Pater Noster, Ave Maria, Credo, Salve Regina), les commandements et la doctrine. Cependant, là où plusieurs autres femmes accusées répondent sans précision à la question si elles savent lire, écrire et si elles ont étudié, Isabel de Caparroso déclare :
Preguntada si sabe leer y escribir y si ha estudiado alguna ciencia ; dijo que sabe leer y escribir, que se lo enseñaron en casa de sus padres y no ha estudiado facultad ninguna ni ha leído en libros prohibidos, (fol. 158v)
10De par son expérience de témoin à charge en 1626, elle est familiarisée avec l’univers inquisitorial ; et cette dernière précision (ni ha leído en libros prohibidos) dénote une prise de conscience de la situation dans laquelle elle se trouve. La beata ajuste son discours pour prévenir de possibles attaques. Sur la question relative à sa vie, elle replace ainsi le débat sur l’affaire de San Plácido et finit par conclure :
[...] No sabe por qué ha sido presa y que todo lo que vio y oyó a San Plácido acerca de demonios lo había declarado [antes] en dos audiencias para el proceso, (fol. 159r)
11Entendue trois fois, la beata est soumise à la lecture des vingt chefs d’accusations retenus par Jacinto Sevilla. Au deuxième chapitre, le procureur notifie le vil intérêt de la beata pour attirer à elle les honneurs des fidèles en feignant des attitudes vertueuses :
Item [...] con color de virtud, solía esta rea estando en los templos o en pie o en rodillas hacer unos como movimientos muy sútiles a la manera de los que tienen las personas santas que se arroban [...] con lo cual grangeaba aplauso y estimación de las personas y participaba de las prendas celestiales de altísima contemplación de las cosas divinas, (fol. 163r)
12Aucune évocation directe des événements du couvent de San Plácido n’apparaît dans cette accusation. Cependant, on peut voir la perspicacité dont fait preuve l’accusée à travers la réponse qu’elle fournit au Tribunal. Elle ne se contente pas de répondre à l’accusation en se justifiant, mais elle la contextualise en rappelant que lorsque le démon s’était manifesté alors chez les religieuses, elle avait craint que le mal ne l’atteigne :
[En el capítulo 2] la rea dixo que cuando estaba en oración lo sentía [los movimientos], pero que nunca ha pretendido que la veneraran como una santa pero que para esta rea lo había interpretado como la manifestación del demonio.
Preguntada qué es lo que la llevó a pensarlo; dixo que había oído decir, no sabe a quién, en el convento de San Plácido que en unas monxas se había manifestado el demonio y a ésta se le puso a la imaginación si acaso era ésa la causa de menearse en la oración fuese el querer manifestar en ésta el demonio y la parece comentó esto con fray Francisco García Calderón [son confesseur],
[Preguntada por qué razones lo creyó]; dixo que como ésta tenía tanta amistad en San Plácido con la abadesa doña Andrea de Celis que ya murió y doña Teresa de la Cerda [...] y después de haber visto cómo el demonio se había manifestado en una monja, ésta tuvo horror de aquello y porque iban manifestándose cada día en otras monjas temió que aquel movimiento o meneo fuese quererle también manifestarse en ésta y no tuvo otra causa ni razón para esto. (fol. 167r-168v)
13En même temps que la beata rejette sur les religieuses et le confesseur les fautes qu’ils ont commises, elle montre son dégoût pour cette affaire et pour le diable. Mais en introduisant dans sa réponse une sorte de jeu d’opposés, elle semble informer6 ses interlocuteurs qu’elle sait faire la distinction entre ce qui est une offense envers Dieu et ce qui relève d’une attitude réservée et prudente. On peut penser que cette capacité à mettre en évidence les enjeux antinomiques crainte / mépris, bien / mal a sans doute influencé la sentence « légère » du Tribunal contre Isabel de Caparroso : elle fut admonestée.
14Mais un point important doit être relevé avant de tirer une quelconque conclusion. Qui dit réponse adéquate aux interrogatoires ne dit pas pour autant que les arguments avancés soient fondés. Il se peut que certaines femmes usent de stratégies de persuasion ajustées à la situation, en jouant d’arguments fondés ou non. Si l’impulsion de décharger sa culpabilité sur d’autres ne relève aucunement de l’intelligence, certaines femmes trouvèrent des arguments, usèrent de la réfutation pour nier ou contredire les charges retenues contre elles. Au xvie siècle, le procès de María de Cazalla7 est d’autant plus significatif que c’est le portrait d’une femme cultivée et intelligente qui se fait jour à travers ses réponses. Lors des premières audiences (3 mai – 12 juin 1532), les répliques de Maria aux interrogatoires montrent une femme qui a intégré le raisonnement contenu dans les questions du procureur et qui rectifie avec subtilité les accusations portées contre elle :
dixo questa declarante dixo algunas veces, viendo la solicitud que se ponía en aderezar los altares e cosas de la iglesia, que si tanta diligencia pusiésemos en alimpiar las conciencias e quitar las malas costumbres, que se agradaría Dios mucho dello siendo juntamente con lo otro, pero que no lo dixo de la manera en que la pregunta se contiene, (fol. 28r)
15En ne niant pas catégoriquement les propos contenus dans la question, mais en les réemployant pour mieux les expliquer, l’argumentation de Maria de Cazalla met en évidence la mauvaise interprétation et le peu de fiabilité des accusateurs anonymes. Même lorsque l’accusée réfute certaines affirmations retenues par le procureur, elle évite le rejet :
Preguntada si algunas veces cuando había confesado esta declarante dixo que el tiempo que gastaba en confesarse fuese en remisión de sus pecados e que es posible que la obligase a ella « Dios a que diga yo a este clérigo mis pecados para que sin darme melecina me dé tormento e que en aquello esté el perdón de sus pecados »;
Dixo quel hierro que [esté] en [esta] pregunta que no se acuerda esta declarante haberlo dicho e que podría ser que dixese esta declarante que era cosa recia ésta que Dios nos había obligado a decir nuestras faltas a otro hombre, mas no por eso lo negaba sino que lo tenía por muy bueno, (fol. 28v)8
16María de Cazalla s’engage dans son discours par l’attitude prudente qu’elle adopte. Bien qu’affirmant ne pas se souvenir d’avoir prononcé les paroles qu’on lui reproche, elle admet cependant qu’elle les a peut-être dites (no se acuerda esta declarante haberlo dicho e que podría ser que dixese) et montre sa capacité à distinguer ce qui est offensant ou contre la parole de l’Église (mas no por eso lo negaba sino que lo tenía por muy bueno). Et quand bien même elle aurait tenu les propos outrageants qu’on lui attribue, elle reconnaît sa possible faute, mais non l’intention de porter atteinte à l’Église :
Preguntada si ha dicho aquellas palabras que dicen « que te determinen lugar donde estés, siendo infinito »;
dixo que no se le acuerda, mas si las dixo que herró la lengua porque esta declarante no tuvo tal intento de tener por mala orden lo que la santa madre Iglesia tiene, (fol. 8r)9
17Cette attitude de Maria est constante. Déjà la confession écrite qu’elle envoya au Tribunal le 2 mars 1525 à la suite de l’édit de grâce sur les alumbrados exprimait de façon explicite que le péché qu’elle avait pu commettre était celui de l’orgueil, malgré son « deseo congoxoso de ver a Dios ya sin vélos e sin (su) cuerpo »10. Tout au long de son procès, Maria de Cazalla fait preuve d’humilité en admettant qu’elle a pu se tromper. En même temps qu’elle affirme sa position, elle ne réfute pas le fait qu’elle ait pu se méprendre. Cette position de défense donne alors à entendre aux autorités qu’elle ne se conforte pas dans ses propres certitudes. En d’autres termes, même si la femme accusée semble répondre de façon conforme à ce qui lui est demandé, nous pensons que l’absence de réfutation explicite de sa propre parole quant à sa relation à la Foi paraît jouer en sa défaveur. L’affaire instruite par l’Inquisition de Tolède contre la beata Francisca de los Apóstoles11 en 1578 nous a conduite sur cette voie.
18Au mois de décembre 1575, arrêtée et interrogée par l’inquisiteur Juan de Llano de Valdés, Francisca de los Apóstoles décrit au Tribunal inquisitorial de Tolède deux visions d’essence apocalyptique dont elle fit l’expérience : l’une portant sur le jugement dernier, l’autre sur le Christ, la Vierge Marie, les saints et leur rôle d’intercesseurs pour la fondation de deux monastères. Francisca produit tous les détails de ces deux visions. Pour autant, les réponses adéquates qu’elle fournit à l’inquisiteur et procureur Valdés sur leur nature et les moments où ces visions se produisent ne le convainquent pas. Lorsque Francisca affirme qu’elles ont lieu toujours après avoir communié, Valdés exige qu’elle précise les raisons qui l’amènent à penser qu’elles sont de Dieu et non du démon :
[...] No es bastante seguridad lo que ha dicho y declarado en decir que porque le ha acaecido en acabando de comulgar porque en ese tiempo y antes y en la mesma comunión y en todos tiempos el demonio anda buscando cómo engañar a las personas, que diga si hay otra racón alguna [...].
19La beata répond sans hésitation et en toute simplicité :
Hechaba de ver que era cosa de Dios y no del demonio lo primero era cosa de Dios se le va arrobando el espíritu con gran suavidad que en ese tiempo los sentidos no sienten cosa corporal ni que perturbe al alma sino todo una grande suavidad y da en estando el alma grandísima luz y gran conocimiento de su baxeza y de que ha pasado lo que se ve y la persona la torna en sí halla en sí gran humildad y gran sujeción para todo lo que toca al servicio de Nuestro Señor para con gran facilidad obrar todas las cosas de virtud y que da con gran aborrecimiento de todo lo que es culpa y abraza con grande eficacia todas las cosas que son de pena y fatiga por amor de Nuestro Señor y en esta seguridad que quedaba en su alma podría entender si era bueno y si era de parte de Nuestro Señor. [...] Y no fiándose de sí mesma esta confesante lo trataba con Miguel Ruiz [son confesseur] para satisfacerse más y el dicho Miguel Ruiz le decía que imprimían en su alma seguir con rectitud los caminos de Nuestro Señor y guardar los mandamientos que podía estar segura no ser de parte del demonio y que se metiese la confesante en su baxeza porque ella era obligada aborrecer lo que fuese ofensa de Nuestro Señor y amar las cosas de trabajos por amor de Nuestro Señor, (fol. 188r-v / p. 156)
20La réponse de Francisca reste centrée sur la question du procureur ; elle invoque deux arguments a priori en accord avec l’orthodoxie : une forte ressemblance avec la forme des effets décrits par certaines figures mystiques, l’obéissance à l’avis de son confesseur. Pourtant, malgré le fait qu’elle affirme ne pas se fier à elle-même, ses déclarations ne parviennent pas à convaincre le procureur. Plus exactement, Valdés en vient à estimer que cela relève d’un certain « orgullo espiritual ». Pourquoi la déclaration de Francisca ne le convainc-t-elle pas, alors que la beata semble avoir répondu concrètement aux questions ?
21Sur ce point, nous adhérons totalement au point de vue de Gilian Ahlgren pour qui c’est « la franchise et la sincérité » de la réponse de la beata qui amène le procureur à rejeter ses propos et à exiger qu’elle reconsidère son point de vue12. Les réflexions d’Ahlgren découlent de l’observation des arguments de Francisca et des questions de Valdés tout au long de ce premier interrogatoire. Selon Ahlgren, le procès de la beata prend un autre tournant, lorsque Valdés l’incite à s’exprimer non plus sur la forme des visions, mais sur leur contenu théologique. Francisca se contredit, hésite, s’égare et confirme ainsi les doutes du procureur qui l’accusera formellement d’illuminisme13.
22Revenons sur la question de l’inquisiteur. Il exige de Francisca qu’elle dise devant le Tribunal ce qui l’amène à croire, au moment où elle est interrogée, que ses visions d’alors étaient de Dieu ; étant entendu que le diable trompe les âmes « en todos tiempos », y compris avant et pendant la communion (« y antes y en la mesma comunión »). Autrement dit, la question du procureur engage la capacité de la beata à une prise de recul qui invite bien plus au doute qu’à la certitude. Elle aurait dû revenir sur ses certitudes d’alors.
23Or Francisca ne prend pas position rétrospectivement sur les visions qu’elle a eues et qui pourraient être erronées. Elle a assimilé son expérience comme étant réelle et elle le maintient : « Hechaba de ver que era cosa de Dios y no del demonio... porque... ». Les visions s’étaient produites à la suite de la communion : pour Francisca, elles venaient de Dieu. Comme ses visions étaient de Dieu, non seulement elle est sûre qu’elles sont toujours de Dieu (« y en esta seguridad... »), mais elle confirme leur authenticité. De fait, Francisca donne de ses visions une image claire et positive sans avoir saisi la nuance que la question de l’inquisiteur contenait. En ne réfutant pas d’emblée ses expériences pour mieux s’en défendre, la position de Francisca montre, d’une part, qu’elle suit ses propres certitudes, d’autre part, qu’elle ne possède ni n’a intégré la capacité à faire des distinctions : méfiance envers elle-même / croyance en ses propres images ; humilité / arrogance ; vision divine / vision démoniaque ; forme des visions / contenu des visions ; subjectivité / objectivité. Son absence de rétractation et son incapacité à faire preuve d’un discernement adéquat (c’est-à-dire en conformité avec le discours des autorités ecclésiastiques) « méritaient » d’être élucidées à en juger par l’acharnement avec lequel Valdés s’est employé à interroger la beata. Les conditions procédurales qui voulaient que l’accusée réagisse sur le vif aux attaques du procureur participèrent sans doute à ce que Francisca se lançât dans une argumentation incohérente.
24Ces réflexions sembleraient quelque peu hasardeuses si Francisca de los Apóstoles elle-même, sommée de répondre aux cent quarante-quatre chefs d’accusations en 1576, n’avait alors exprimé son incapacité intellectuelle à répliquer :
E luego la dicha Francisca de los Apóstoles dixo que ella es mujer de muy flaco ánimo y el señor Inquisidor es una persona de tanto rigor en sus preguntas y en todas las demás cosas y que ella no tiene ánimo para esperar sus redarguiciones tan terribles y pide que todavía se le dé letrado en quien sienta tiene un poco de favor, (fol. 207v. / p. 162-163)
25Peu de temps après (février 1576), le procureur l’interroge de nouveau avec virulence sur les accusations. Alors qu’il persiste à savoir si elle croit toujours que ses visions étaient de Dieu, Francisca en vient à déclarer :
Dixo que no se determinará a decir si eran de Dios o del demonio más de que lo que el señor Inquisidor la dixere y le enseñare eso creerá, (fol. 235v)
26L’inquisiteur insiste, elle finit par se rétracter complètement :
Dixo que ella cree todo lo que el señor Inquisidor le dice como persona que terná más luz de Dios para entender esas cosas que no ella y que lo que ella trata es que no ha dicho ni pretendido hacer cosas en ofensa de Nuestro Señor y que si entendiera que lo era no lo hiciera por el cielo ni por la tierra, (fol. 235v)
27Les deux réponses de Francisca annoncent la fin de sa propre défense. La façon dont elle a tenté de justifier son intégrité et son point de vue s’oppose à l’acceptation explicite de sa faiblesse morale ; une faiblesse considérée comme « inhérente » au sexe féminin et admise comme étant une caractéristique biologique de la femme14. Dans le cas de Francisca de los Apóstoles, sa parole aurait dû, devant le procureur et les autorités inquisitoriales, exprimer l’humilité, la défiance envers elle-même et l’obéissance. Cette dernière réflexion nous amène à poser une question : l’acquittement serait-il prononcé si la femme accusée faisait acte d’humilité en ne s’opposant pas aux accusations ?
Avouer son ignorance : une voie possible vers la disculpation ?
28L’Inquisition cherchait à connaître les motivations de ces femmes accusées d’avoir commis un délit, léger ou grave, contre la Foi. Sonder l’état d’esprit de ces accusées au moment précis de leur comparution participait aussi de cette recherche. Sans doute les réactions émotionnelles proprement dites face aux accusations, et plus largement face au cadre judiciaire, intervenaient-elles dans cette expertise. En ce qui concerne plus particulièrement les réactions des femmes disculpées, c’est à travers leurs déclarations que l’on peut saisir les positions « raisonnables » qu’elles ont adoptées face au Tribunal (condition sociale, idées et opinions sur cette condition, façon de l’exprimer). Une de ces « positions raisonnables » est d’avoir intégré comme allant de soi que leur nature est, sinon diabolique, du moins faible et ignorante.
29L’aveu de cette faiblesse naturelle dans le cadre inquisitorial apparaît tout d’abord sous l’expression de l’incapacité. En 1564, tous les témoins, laïcs et membres du clergé, dépeignent Isabel Ortiz15 comme une « mujer grosera », communiant souvent, tenant des propos scandaleux sur les œuvres extérieures, enfreignant les jours de jeûne et ayant écrit un livre. Le procureur accuse Isabel d’être alumbrada et lui impute en particulier trois griefs : avoir prétendu que seule valait l’oraison intérieure, ne pas avoir respecté le jeûne, avoir écrit un livre jugé arrogant et inutile pour le bien de l’Église.
30Tout au long de ses interrogatoires, l’accusée, qui se dit « ruin », se défend en insistant sur le fait qu’elle n’a jamais eu l’intention d’offenser Dieu ni son Église. Les tachas qu’elle présente pour sa défense présentent la particularité de synthétiser la position qu’elle a adoptée face au Tribunal. Quant à la critique de « la oración vocal superficial », Isabel déclare :
Yo nunca traté de quitar la oración vocal salvo que decía que la mental por ser de espíritu era más acepta (sic) a Dios Nuestro Señor por tener en ella todo el pensamiento. Y si en esto yo erré yo pido y suplico a Vs Ms me alumbren en ello y me digan lo que tengo de tener y me den penitencia saludable para mi ánima, (fol. 107r-v)
31Les notions explicites et implicites que comporte cet article permettent de saisir que la distance que l’accusée prend par rapport au temps de ses erreurs vise à traduire son ignorance. Si l’on suit en effet la structure de la proposition, la défense d’Isabel Ortiz met en évidence la distinction entre ce qu’elle aurait pu dire d’erroné et ce qu’elle dit devant le Tribunal. Isabel ne voulait pas offenser l’Église en prononçant ces paroles, parce qu’elle ignorait que cela fût offensant. Mais son intention n’est pas d’abonder dans le péché ni de l’excuser. Comme elle ne savait pas, elle se montre comme une femme qui s’est trompée (si en esto yo erré) et qui réclame (yo pido y suplico) que les inquisiteurs lui apprennent la vraie dévotion qu’elle n’a pu saisir par elle-même (me alumbren en ello y me digan lo que tengo de tener). Isabel Ortiz admet donc qu’elle a vraisemblablement commis une erreur, mais elle sous-entend que c’est une ignorance involontaire, car naturelle, qui est la cause de son égarement et elle exprime sa volonté d’être instruite16.
32Le fait que la beata sollicite qu’on la corrige parce qu’elle se dit ignorante semble avoir exercé une influence positive sur les inquisiteurs. Inapte par son imperfection, elle est inhabile à juger son expérience ou à en parler et elle le « dit ». Le Tribunal absout Isabel Ortiz.
33Selon le concept théologique développé à partir des thèses thomistes, l’ignorance n’est pas condamnable lorsqu’elle est invincible :
[...] Celui qui par sa négligence à s’instruire ignore ce qu’il est tenu de savoir commet un péché. On n’imputera à la négligence de personne qu’il ignore ce qu’il ne peut savoir. L’ignorance invincible, qu’aucune étude ne peut faire cesser, n’est donc pas imputable, puisqu’elle n’est pas volontaire, ne pouvant être dissipée par celui qui en est atteint. Toute ignorance invincible n’est donc pas un péché. [...] La gravité de la faute d’ignorance est proportionnée à la gravité de la négligence mise à apprendre la vérité ou le devoir17.
34Dans le cadre judiciaire, l’ignorance est condamnable lorsqu’elle est volontaire, c’est-à-dire, lorsque les femmes persistent à affirmer qu’elles sont dans le vrai ; lorsqu’elles feignent d’ignorer qu’elles sont « naturellement » faibles et faillibles. Au contraire, se dégager de toute conscience personnelle, de toute introspection, est une façon d’avouer son ignorance involontaire, car naturelle, donc invincible. Ainsi, lorsqu’elle est interrogée pour la première fois le 8 juin 1627, la beata Gerónima de Noriega18 donne des réponses directes et franches sur les raisons éventuelles de son emprisonnement. Dès le début, Gerónima répond sans détour en nommant les trois personnes qu’elle fut forcée de renvoyer de chez elle et qu’elle sait être à l’origine des accusations devant le Saint-Office. Mais la beata ne s’en tient pas à ce seul fait et décide d’ouvrir son âme, devançant ainsi les exigences inquisitoriales. Elle revient sur les propos qu’elle aurait pu dire et qui ont pu être transformés ou incompris. Elle adopte ainsi une position de recul face à son vécu :
Y que recorriendo su memoria por lo que presume que la han hecho venir aquí es porque un día estando ésta y doña Ana Manjón y doña María de la Serna habiendo labor a la almoadilla y las dichas decían que una monja veía al Niño Jesús en la hostia, y dixo la dicha doña María según la parece « ¡ay Dios, y quién le viera! » y que esta confesante respondió « pues véale Dios y hombre con los ojos de la fe como le ven todos los cristianos; que la ciega le ve », cerrando ésta al decirlo los ojos, dando a entender y queriendo decir que con la fe ciega le veyamos todos los cristianos y desto presume, o ellas no entendieron lo que ésta quiso decir o de aquí tomaron ocasión para hacerla mal.
35La confession que fait Gerónima de Noriega en posant un regard rétrospectif sur ses actions ainsi que sur ses dires s’achève sur une proposition engageant une position d’humilité face aux juges :
Y que no sabe otra cosa ni la presume por qué pueda haber sido llamada a este Santo Oficio, porque si la tuviera ella misma se viniera a delatar [...] y si en algo hubiere errado en lo exterior (porque con la intención sabe que no ha errado) pide a Dios perdón y a este Santo Oficio penitencia y misericordia.
36Gerónima de Noriega ne sait pas en quoi elle a pu offenser Dieu, mais elle ne refuse pas le fait qu’elle ait pu se tromper. Son intention n’est pas d’abonder dans l’erreur ou de l’excuser et elle réclame pénitence. Elle avance l’argument qu’elle se dénoncerait elle-même si elle se savait commettre un péché contre Dieu et le Saint-Office (porque si la tuviera ella misma se viniera a delatar). Cet argument risque de la perdre, car le Tribunal considère cette assertion comme une marque d’arrogance : non seulement Gerónima fait preuve d’une réflexion affective ou psychologique sur soi, mais elle se prétend elle-même juge de ses actes. Le positionnement sous-entendu dans l’argument de la beata s’oppose donc au principe même d’une nature qui doit se penser pour les autres et ne doit pas faire preuve d’amour propre. Or, comme l’exalte la doctrine thérésienne, la connaissance véritable de soi requiert humilité et abnégation19. Le Tribunal décide donc d’établir les accusations contre elle.
37Pour se défendre des accusations, elle exprime la vérité sans ornement :
Todo es falso pero que [esta declarante] cree católicamente que Dios está en todo lugar. Que estando dormida tuvo la impresión de haber visto a Luisa de Carrión y que pudo haber contado eso como un sueño no como visión.
38L’accusée dit son infériorité naturelle. Au sujet de l’état d’innocence, elle nie avoir voulu prétendre un tel état « porque bien conoce de si que es gran pecadora ». La simplicité des réponses de la beata montre une femme qui ne désire pas être individualisée ni être singulière devant Dieu, car elle agit « siempre con temor de Dios (y) obedeciendo siempre a sus confesores ». Elle rejette toute inspiration surnaturelle et pratique l’humilité. La beata ne revendique rien d’exceptionnel, use de bon sens et démontre sa lucidité. À l’accusation :
[...] en cierta ocasión dixo a cierta persona que había perdido un marido que era un santo y que por él había hecho Dios mil mercedes y le había dado un hijo que cuando le parió aunque había tenido unos dolorcillos al tiempo de parirle, no sintió dolor ninguno [...]
Gerónima réplique avec simplicité et franchise :
Niega […] que lo que ésta puede haber dicho es oyendo tratar de partos monstruosos por pensar las mujeres en cosas diversas, dixo ésta « bendito sea Dios que me dio buenos pensamientos, pues parí hijo tan lindo » y no se le acuerda a quién lo ha dicho, mas de que ha sido hablando generalmente [...].
39La seule chose qui relève d’une réflexion affective ou psychologique sur soi apparaît à la fin de ses réponses, lorsqu’elle dit son désir de vivre humblement : « [...] que de lo que puede afirmar con verdad es que procura vivir bien, honradamente ». À la fin de cette audience, le procès fut suspendu (21 juin 1628).
40Citons un extrait du procès de 1625 contre la beata Ana Baroja20 qualifiée d’energúmena par le Tribunal. Répondant de façon juste aux propos contenus dans la question, la dissociation que produit dans sa réponse la beata Ana Baroja entre le moment de ses états et le moment de son récit tend à montrer son absence de malice. Dès les premiers instants, l’energúmena ouvre son âme aux inquisiteurs comme s’il s’agissait de ses confesseurs :
Preguntada qué sintió y qué pasó entre el día de San Ildefonso y el día de Nuestra Señora de la Purificación;
Dixo muchos dolores [...] y inconciente [...] oyó decir que su lengua formaba algunas palabras tan torpes y deshonestas que le parece que no era voz suya y que la lengua era tan robusta en la voz y formada con todo pecho que parecía ser de hombre muy fuerte y robusto y dice también esta confessante haber oído los exorcismos y que le parece eran tantas las voçes que daba que no los dejaba hacer nada y que cuando escupía a las cruçes o a obras y matines dice que no se acuerda ni tiene noticia de haberlo hecho y que ha quedado espantada de ver que su lengua hubiese hecho ni dicho tales cosas de donde presume que si no es que Dios permita que fuese algún demonio que se pusiese en la lengua. Esta confesante confiesa que no tiene otra presunción y después acá como le han contado lo que pasó y dichos que dijo y cuentas que hizo y cosas que sin verlas dijo lo que era le parecieron extra naturales. Y que ella en su vida ni había tratado de ellas ni vístolas ni oídolas. [...] Y finalmente entiende que haver hecho en esta villa muchas oraciones y súplicas a Dios que descubra la verdad desta enfermedad fue causa para que con exorcismos que le hiço el licenciado Juan de Salinas presbítero y el licenciado Cristóbal Vargas en su compañía tuviesen el efecto que hubo pues el domingo en la noche los dos solos (de lo cual tiene noticia esta confessante y noticia de no haver habido otra persona) estando cerrada la puerta del aposento donde estaba mala la dicha doña Ana de Baroja, fue Dios servido (que) quedase buena aunque muy flaca y como atontada y en calma [...].
41Par la parole, elle exprime les émotions et les agissements qui s’emparent d’elle. Mais ce n’est pas elle qui agit en pleine conscience, c’est un autre en elle. Un autre qui l’aliène et dont les agissements lui procurent de l’effroi lorsqu’elle recouvre sa pleine conscience : « ha quedado espantada de ver que su lengua hubiese hecho ni dicho taies cosas ». Mais elle ne se fait pas pour autant juge de ses actes. La seule réflexion affective et psychologique sur son expérience renvoie à son rôle secondaire : c’est Dieu qui permet au diable de s’emparer d’elle (de donde presume que si no es que Dios permita que fuese algún demonio que se pusiese en la lengua). Elle ne participe à la réalité des événements que comme le territoire d’une lutte dont elle sort diminuée. En se confessant de la sorte devant les inquisiteurs, la beata s’en remet pleinement à leur avis, en même temps qu’elle manifeste un engagement douloureux à faire le récit de sa possession. Ces positions semblent avoir confirmé l’humilité dont faisaient acte les témoins du procès. La cause fut suspendue, l’Inquisition la jugeant comme étant « una mujer sancta y de buena vida ».
42Nier, émettre un avis ou se défendre sans remettre en question ses propres opinions revient à avoir « foi » en ses certitudes, à croire en sa propre parole. Cela – nous l’avons vu – ne constitue pas une spécificité des procès contre les femmes illuminées. Mais dans la mesure où le sexe féminin est culturellement rattaché à toute une symbolique négative qui lui préexiste, ce positionnement semble manifester une attitude qui renvoie directement à l’humilité que l’on attend naturellement des femmes. Plaider sa cause sans revenir sur les paroles prononcées ou sans se diminuer concourt à l’arrogance, quand bien même les accusations seraient fausses ou que le discernement de certaines accusées serait fortement mis à l’épreuve par les inquisiteurs pour dégager leur capacité à faire des distinctions. Car leur incapacité à penser par antinomies, c’est-à-dire à faire preuve d’un discernement adéquat ou conforme au discours des juges sur la Foi, semble participer du processus de condamnation.
43En contrepartie, dans les procès où le Tribunal prononça la suspension de la cause ou l’acquittement, une position semble exercer une influence positive sur les représentants inquisitoriaux. Il semblerait en effet que l’aveu de son ignorance, l’adhésion à la dépréciation de ses propos et de sa condition féminine, ainsi que l’expression de l’humilité aient plaidé en faveur de certaines accusées. La seule issue raisonnable pour les « illuminées » face à la raison absolue des juges serait-elle celle de la dépréciation de soi ? La résolution d’une telle question ne peut qu’engager un vaste champ de recherches, sujettes, sans conteste, à polémiques.
Notes de bas de page
1 Sur cette question, voir, entre autres : H.C. Lea, Historia de la Inquisición española, Madrid, FUE, 1983 ; P. Gandoulphe, « Mentalités populaires et christianisation en Castille », dans Solidarités et sociabilités en Espagne, XVIe-XXe siècle, R. Carrasco (éd.), Paris, Les Belles Lettres, 1991, p. 141-165 ; Perfiles jurídicos de la Inquisición española, J.A. Escudero (éd.), Madrid, Instituto de Historia de la Inquisición, Universidad Complutense de Madrid (2e éd.), 1992 ; J.P. Dedieu, L’Espagne de 1492 à 1808, Paris, Belin, 1994, p. 29-37.
2 Nous ne considérons pas les sources inquisitoriales comme des textes régis par une technique discursive. Elles sont un ensemble de récits établis sous le poids du filtre judiciaire dans un cadre où les personnes interrogées sont en situation d’interaction avec le système juridique. C’est la raison pour laquelle nous avons voulu étudier le langage de femmes, non pas en tant que tel, mais par rapport à un contexte judiciaire. Pour reprendre l’expression de la théorie pionnière du philosophe anglais J. Langshaw Austin concernant les actes du langage, c’est la parole comme action qui nous a intéressée ici. Voir, entre autres, J.L. Austin, Quand dire, c’est faire, trad. G. Lane, Paris, Seuil, 1970, p. 12-13, p. 108-109 ; J. Moeschler, Argumentation et conversation : éléments pour une analyse pragmatique du discours, Paris, Hatier, 1985, p. 16-17 ; C. Kerbrat-Orecchioni, Le discours en interaction, Paris, Armand Colin, 2005.
3 Notre analyse a pris en considération certaines particularités du discours des femmes dont les procès furent instruits par l’inquisition de Tolède entre 1530 et 1655. Nous avons retenu les cas suivants : AHN, Inq., leg. 110, exp. 6, 1535, Maria de Cazalla ; leg. 104, exp. 5, 1565, Isabel Ortiz ; leg. 113, exp. 5, 1578, Francisca de los Apóstoles ; leg. 114, exp. 13, 1625, Ana Baroja ; leg. 115, exp. 1,1628, Gerónima de Noriega ; leg. 103, exp. 2, 1649, Isabel de Caparroso.
4 L. Timmermans, L’accès des femmes à la culture, 1598-1715 : un débat d’idées de Saint François de Sales à la marquise de Lambert, Paris, H. Champion, 1993.
5 AHN, Inq., leg. 103, exp. 2,1649, fol. 148-149v.
6 Nous comprenons informer tel que le définit C. Kerbrat-Orecchioni lorsqu’elle considère la présence du destinataire dans l’énoncé : « Qu’on l’envisage dans sa fonction conative ou informationnelle (car informer autrui, c’est faire en sorte qu’il comprenne et admette l’information : les énoncés référentiels ne sont pas pour autant pragmatiquement neutres), c’est donc la totalité de l’énoncé qui reflète et construit, indirectement, une certaine image que L se fait de A ». Voir L’énonciation. De la subjectivité dans le langage, Paris, Armand Colin (4e éd.), 2006, p. 177.
7 AHN, Inq., leg. 110, exp. 6, 1535. Voir aussi Proceso de la Inquisición contra María de Cazalla (1535), éd. de M. Ortega Costa, Madrid, FUE, 1978, p. 107.
8 Voir M. Ortega Costa, op. cit., p. 107.
9 Voir ibid., p. 106.
10 Elle dut lire cette confession devant les inquisiteurs le 3 mai 1532 (fol. 24r-25v). Voir ibid., p. 99-101.
11 AHN, Inq., leg. 113, exp. 5, 1578, fol. 188r. Voir aussi G.T.W. Ahlgren, « Francisca de los Apóstoles : la voz de una visionaria a favor de la Reforma, en el Toledo del siglo XVI », Mujeres en la Inquisición : la persecución del Santo Oficio en España y el Nuevo Mundo..., p. 149-166.
12 « Fuele dicho vuelva sobre si y mire en lo que dice y lo que trata porque estas cosas de Dios son de tanto peso y de tanta importancia que no las había de osar tratar tan palpablemente aunque fuera verdad lo que ha dicho cuanto más que no lleva semejanza de verdad », fol. 190r. Voir ibid., p. 157.
13 Fol. 193r-194v. Voir ibid., p. 157-161.
14 Du point de vue religieux, la femme était en quelque sorte prédisposée à succomber plus facilement aux tentations. Comme l’explique clairement P. Martínez-Burgos García : « Todos dan por sentada la inferioridad de la mujer, tanto en lo moral como en lo puramente racional, lo que le confiere una debilidad – de cuerpo y de espíritu – que la convierte en presa fácil de Satán ». Sur cette vaste question, nous renvoyons, entre autres, à : S. Beauvalet-Boutouyrie, Les femmes à l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, Belin, 2003, p. 22-29 ; C. Frugoni, « La femme imaginée », dans Histoire des femmes, t. II, p. 357-394 ; A. Milhou-Roudié, « Hétérodoxie et condition féminine : le cas de María de Cazalla », Images de la femme en Espagne aux XVIe et XVIIe siècles. Des traditions aux renouvellements et à l’émergence d’images nouvelles, A. Redondo (éd.), Paris, Publications de la Sorbonne, 1994, p. 278 ; P. Martínez-Burgos Garcia, « Lo diabólico y lo femenino en el pensamiento erasmista. Apuntes para una iconografía de género », dans El diablo en la Edad moderna, J.S. Amelang, M. Tausiet (dirs.), Madrid, Marcial Pons Historia, 2004, p. 211-231.
15 AHN, Inq., leg. 104, exp. 5,1565.
16 Avec le XVIe siècle, cette déficience morale est en effet considérée comme une « imperfection naturelle » dans le sexe féminin. Preuve en est, dès la fin de ce siècle, la naissance d’un mouvement « féministe religieux » qui concrétise la volonté d’aider le « sexe faible » à corriger son ignorance naturelle par l’instruction des règles établies par la religion. Car l’ignorance des femmes est source d’impiété et de superstitions, raisons pour lesquelles il faut la corriger. Ainsi le souligne L. Timmermans dans ses analyses sur l’instruction chrétienne des femmes par les réformateurs catholiques : « [...] Naturellement déviantes, les femmes doivent êtres corrigées : il faut leur apprendre (ou Dieu doit leur inspirer) où réside la véritable perfection, qu’il leur est difficile d’entrevoir par elles-mêmes », op. cit., p. 444.
17 « Ignorance », Dictionnaire de Théologie Catholique, t. VII, col. 731-739.
18 AHN, Inq., leg. 115, exp. 1,1628 (pas de référence folio).
19 Dans les écrits de la Sainte d’Avila, voir, notamment, les Moradas Primeras, 2, 8-9 et les Moradas Sextas, 10, 8.
20 AHN, Inq., leg. 114, exp. 3,1625.
Auteur
FRAMESPA UMR 5236 CNRS LEMSO
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