Les destinées d’un thème historiographique : « Castelli » et peuplement dans l’Italie médiévale
p. 11-29
Texte intégral
1Je tiens tout d’abord à remercier M. Higounet pour m’avoir engagé à entreprendre ce que je n’aurais sans doute point fait de moi-même : à revenir avec plusieurs années de recul sur l’un des thèmes de recherche qui ont été au cœur de mon enquête sur les structures du Latium médiéval1 Je n’ai certes pas l’intention pour autant de servir un bouillon réchauffé, et le Latium n’apparaîtra pas plus ici qu’il n’est nécessaire. Je voudrais plutôt me risquer à une entreprise que j’ai souvent eu le désir mais jamais l’occasion de tenter : étudier les conditions d’émergence, jusqu’à leur épanouissement actuel, des recherches italiennes sur le castrum et esquisser à grands traits la destinée historiographique du thème castrai.
2Pour cela, je vous propose un plan en diptyque. Dans une première partie que je conduirai jusqu’à mes travaux sur l’Italie centrale, j’examinerai la place d’abord modeste puis lentement conquise par le château dans l’historiographie médiévale italienne. Je ferai ensuite le bilan des recherches et des orientations qui se sont développées depuis 1972 à partir du thème de l’« incastellamento ». Disposant avec le Latium, sinon d’un modèle du moins d’une base de référence précise et élaborée, ces travaux récents se sont attaqués avec alacrité à d’autres régions italiennes. Ils ont enrichi, nuancé et — à l’occasion — corrigé mes conclusions. Je me réjouis de ce que notre rencontre me donne ainsi l’occasion de faire un bilan si positif, je le dis tout de suite, de la recherche italienne de ces dernières années et des orientations actuelles qui me paraissent les plus prometteuses.
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3Ces progrès récents sont d’autant plus remarquables qu’ils contrastent avec la lenteur extrême avec laquelle l’histoire des castra s’est imposée à la recherche italienne depuis le xixe siècle jusqu’aux années 1960. Encore vaut-il la peine de retracer ce lent cheminement car, me semble-t-il, comprendre les raisons de ce long refus d’accepter le castrum comme un thème majeur de recherche nous aide à mieux connaître le climat culturel de l’historiographie italienne dans son ensemble.
4Le « castello », Aldo Settia l’a bien montré dans un article récent2, apparaît dans l’historiographie romantique italienne comme le symbole angoissant des temps ténébreux et barbares. Quoique avec moins d’éclat littéraire qu’en Angleterre, qu’en Allemagne ou en France, le « revival » gothique a sévi dans les premières décennies du xixe siècle, en Italie comme ailleurs. Sauf quelques rares exceptions, cette rêverie romantique sur le « castello » n’a débouché, toutefois, dans l’Italie du xixe siècle ni sur une castellologie d’antiquaires comme en France, ni sur une solide « Landesgeschichte » comme en Allemagne. En somme, du « castello » médiéval, nos érudits romantiques n’ont retenu que les oubliettes.
5Cette image négative, vers le milieu du siècle, perd du pittoresque sans pour autant gagner du terrain dans l’historiographie savante qui se met alors en place avec des médiévistes formés à l’école allemande et autrichienne comme Francesco Schupfer et Antonio Pertile3. Auteurs de monumentales histoires du droit italien, Schupfer et Pertile ont suffisamment pesé sur leurs successeurs pour que l’on regarde de plus près leur présentation du castrum. Ce dernier n’est présent dans leur œuvre que comme un acteur de seconde zone4. Rejetons typiques de l’historiographie du Risorgimento, ces auteurs voyaient, on le sait, dans le Moyen Age italien, la succession originale de trois périodes bien distinctes : la période féodale, la période communale et celle, enfin, des principautés fondées sur la signoria urbaine. Même s’ils divergeaient sur beaucoup de problèmes et, en particulier, sur la périodisation même de l’âge féodal, nos auteurs étaient d’accord pour voir dans le château le refuge sinistre d’une féodalité dont les pouvoirs, dès le milieu du xie siècle ou au xiie siècle, ont été mis en pièces par les énergies communales. C’est en celles-ci que s’incarnait l’idéal historiographique de la génération de Pertile. Ces hommes qui étaient surtout des historiens du droit, exaltaient dans l’Italie médiévale la terre d’élection des libertés et des autonomies locales dans leur cadre de civilisation quintessentiel, c’est-à-dire dans le cadre urbain. Du même coup, le « castello », lié à une féodalité dont les traits étaient d’ailleurs empruntés à l’historiographie allemande, apparaît comme le décor d’un contre-modèle — la féodalité —, comme le repoussoir du modèle culturel italien, urbain et communal.
6Les choses changent dès les dernières décennies du xixe siècle avec des savants comme Ferdinando Gabotto pour le Piémont et Gioacchino Volpe pour la Toscane. Quelles que fussent d’autre part leurs divergences — et chacun sait qu’elles étaient énormes — ces grands historiens ont eu en commun le refus d’un découpage simpliste entre époque féodale et époque communale conçues comme deux moments antinomiques et successifs de leur histoire. Abattant d’autre part toute barrière artificielle entre villes et campagnes, ils ont souligné au contraire, chacun à sa manière, l’homogénéité sociale qui a existé, du xe siècle au xiie siècle, entre aristocratie urbaine et aristocratie rurale. Ils ont placé avec perspicacité — dans le cas de Volpe — et quelque exagération incongrue — dans le cas de Gabotto — cette aristocratie aux origines du mouvement communal. Avec eux, les châteaux ont donc cessé, vers la fin du xixe siècle, d’être des refuges ou des pôles négatifs de la vie sociale. Ils ont acquis une fonction historique positive en tant que points d’appui majeurs de la puissance des grands lignages. Ils ont été observés non seulement comme des bases patrimoniales mais encore comme des lieux privilégiés où, dans l’analyse de Gabotto et d’autres après lui, les familles seigneuriales ont proliféré et constitué des collectivités de dominants où se sont élaborées les premières structures communales5. Les castra ont ainsi donné leur cadre concret à la dynamique des pouvoirs seigneuriaux, à la stratégie des frontières seigneuriales, etc. Il faut toutefois noter que, dans cette « nouvelle histoire » façon 1900, le castrum reste avant tout conçu comme un cadre de vie ou un centre de pouvoirs, d’ailleurs diversement défini, nullement comme un objet digne d’étude en lui-même. L’approche demeure avec rigueur celle de l’histoire sociale. La chose est patente chez Volpe qui, dans tous ses livres et en particulier dans son essai, tout récemment réédité, sur les « Lambardi », a été l’analyste le plus pénétrant de la stratification sociale interne à l’aristocratie toscane des xe-xiiie siècles6. Plus que tout autre, il a vu dans tous les groupes de la petite aristocratie que les textes italiens appellent ici lambardi, là valvassores, là encore ministérielles ou secundi milites, le ferment le plus actif de la dynamique sociale des xie-xiie siècles. Pourtant, bien qu’il ait parfaitement vu que c’est dans la garde des châteaux possédés par la couche supérieure des comtes, évêques ou abbés des grandes abbayes que cette « feudalità minore » puisait le meilleur de sa force, on chercherait en vain dans son œuvre ne serait-ce qu’une ébauche d’enquête sur les castra eux-mêmes, leur genèse, leur implantation, leur densité, etc. Depuis une quinzaine d’années, les œuvres de Volpe ont toutes fait l’objet de réimpressions et d’exégèses, comme celles de Cinzio Violante et de Gabriella Rossetti, qui ont souligné leur importance aux yeux des historiens d’aujourd’hui. Au risque d’émettre une petite fausse note dans ce concert, remarquons qu’il manquait au moins un sens au grand médiéviste : celui de l’insertion concrète de l’histoire sociale dans des espaces ou des paysages géographiques susceptibles d’en conserver l’empreinte jusqu’à nous.
7C’est paradoxalement de l’histoire du droit la plus orthodoxe qu’a émergé timidement cette notion d’espace castrai. C’est en effet à un bon historien du droit, longtemps professeur à l’Université de Pavie, Pietro Vaccari, que revient le mérite d’avoir insisté dans plusieurs études parues entre 1914 et 1923 sur la liaison qui existe entre le castrum et le territorium castri. Révélateur est, à cet égard, le titre même de son étude de 1923 réimprimée en 19637. Vaccari y conclut son analyse en observant que le complexe très hétérogène des droits qui se concentraient dans la seigneurie castrale ne pouvait s’y maintenir que « perche dominava nel castrum il concetto di territorialità8 ». Cette citation suffit à suggérer à la fois l’intérêt et les limites des recherches de Vaccari. Leur intérêt évident tient à la liaison solide qui, par la voie d’approche juridique, commence à s’imposer entre château et espace castrai. Les limites tiennent au caractère encore purement abstrait de cette liaison. Certes, Vaccari note — le premier ! — que le castrum comme structure juridique a pu revêtir des formes concrètes variées, allant de la « rocca », simple maison-forte seigneuriale isolée, jusqu’au gros village fortifié. Il ne va toutefois pas plus avant dans cette première esquisse de typologie. Il est clair d’autre part que son discours porte exclusivement sur la territorialité du castrum et qu’on ne saurait lui faire reproche d’avoir négligé l’étude des territoires concrets commandés par l’habitat et par les sites fortifiés. L’analyse, enfin, de la genèse même du castrum demeure chez lui indigente puisqu’il croit, pour citer ses propres termes, que le castrum naît dans la curtis et en devient peu à peu — ce « via via » si cher à Vaccari — l’élément principal, selon un processus spontané et quasi magique qui fait qu’avec l’éclatement de la curtis au profit du castrum, les rapports domaniaux (« rapporti curtensi ») se sont transformés en rapports féodaux9. Une dernière faiblesse des travaux de Vaccari tient non seulement à ces catégories abstraites et mal définies mais encore à leur indifférence envers toute chronologie fine. Comme tous ses devanciers en effet, et comme son contemporain Fedor Schneider, dont l’Entstehung von Burg-und Landgemeinde in Italien paraît en 192410, Vaccari ne perçoit ni rythmes ni temps forts, ni césures dans l’histoire des castra italiens. Chez lui comme chez Schneider, la longue durée est écrasée par l’idée de continuité des appareils fortifiés du Bas-Empire ou des castra qui ont jalonné les frontières lombardes des VIIe-VIIIe siècles. Il est inutile, enfin, d’insister sur le fait bien connu que Fedor Schneider, en exagérant démesurément le rôle des castra du limes longobard dans son étude précitée, a beaucoup pesé sur le blocage de la recherche que l’on constate dans les décennies suivantes11.
8Dans les années 1930, en tout cas, ni l’histoire sociale incarnée par Volpe dans ce qu’elle avait de meilleur, ni l’histoire du droit n’avaient débouché sur une analyse concrète de l’« incastellamento ». J’ajouterai maintenant : ni l’histoire économique. Si l’on dénote en effet chez les historiens économistes de ce temps un intérêt non négligeable pour le castrum, cet intérêt demeure occasionnel, voire souvent marginal. Deux noms, choisis parmi les meilleurs, nous aideront à illustrer ce phénomène : ceux de Gino Luzzatto et de Johann Plesner. Dans plusieurs travaux préparés à l’époque où, jeune professeur à Urbino, il écumait les archives des Marches, Luzzatto a bien vu que la lecture même des sources lui imposait le castrum comme thème de recherche. Il lui a consacré plusieurs articles et, en particulier, un travail monographique dédié au castrum de Matelica. C’est un travail tout à fait remarquable où s’épanouissent au mieux les qualités propres à Luzzatto12. Intitulé significativement « Les finances d’un castrum des Marches au xiiie siècle », ce travail est un modèle de ce qu’avec Jacques Le Goff, nous avons naguère proposé d’appeler histoire totale — ou mieux — globalisante. Luzzatto, en effet, posait dans son étude sur Matelica un problème comme central : le problème des finances d’un gros castrum pour lequel nous avons par chance conservé d’importantes archives comptables. Dès lors, Luzzatto partait de l’analyse des entrées et des sorties d’argent et de l’assiette de l’impôt pour s’élever à l’étude de la stratification sociale et de la dynamique des institutions. Mais là encore, comme pour Volpe, si pénétrante que fût l’analyse, il lui manquait la reconstruction d’un espace, voire la simple restitution d’un lieu. Le castrum de Matelica, sa morphologie, ses terroirs, l’horizon qui l’entourait, tout cela demeurait chez Luzzatto une sorte de décor implicite et muet. Quant à Plesner, sa thèse13 qui connut une célébrité singulière, eut pour principal mérite de montrer en quoi un castrum du contado florentin au XIIIe siècle pouvait être un habitat fortifié comptant quelques milliers d’« incastellati » et souffrant d’une surcharge démographique qui n’était contrôlée que par un exode important vers les grandes villes voisines. Aucun effort n’était fait d’autre part pour savoir comment et à la suite de quel processus vivaient ces hommes ni comment, en bref, ces castelli pouvaient s’inscrire dans les terroirs toscans.
9Nous en arrivons ainsi, en nous plaçant vers 1939, à conclure que ni l’histoire du droit, ni l’histoire sociale, ni l’histoire économique, ni la naissante démographie historique14 n’avaient encore réussi à imposer vraiment en Italie le thème de recherche qui nous réunit aujourd’hui. A preuve, cet étonnant constat : alors que, pour l’Europe du Nord, les travaux de Pirenne avaient familiarisé les médiévistes, dès la fin du xixe siècle, avec la problématique du castrum (ne serait-ce qu’en raison du rôle que lui attribuait le maître belge dans sa théorie des origines urbaines), le mot même demeurait dans les années 30 encore, presque absent des études qui portaient dans la lignée pirénnienne, sur les marchés et le développement commercial en Italie aux ixe-xie siècles15. Du reste, le point des recherches castellologiques en Italie vers 1939 est aisé à faire grâce à l’article publié cette année-là par Fabio Cusin dans la Rivista storica italiana et précisément intitulé Per la storia del castello mediœvale16. Il ne me paraît pas utile de m’attarder trop longtemps sur ce long article honnête et bien informé, pour la simple raison qu’il reprend et ramasse l’acquis historiographique épars dans la littérature antérieure, sans grandes innovations ni suggestions problématiques. Fabio Cusin a eu, entre autres, le mérite de réaliser en quelque sorte la synthèse des apports disparates de ses devanciers que je viens d’évoquer. A la suite de Pietro Vaccari, il a beaucoup insisté sur la nécessité de lier l’étude du castrum à celle de son territoire. A la suite de Gioacchino Volpe, il a bien rattaché le développement du castrum à la dynamique des groupes sociaux et, en particulier, de la petite aristocratie des secundi milites ou des lambardi. Mieux même que Volpe ou que Luzzatto, il a été sensible à l’aspect démographique : le succès d’une fondation castrale apparaît déjà chez lui — encore que timidement — comme le succès d’une entreprise de peuplement. Le château, en Italie, nous dit-il, est presque toujours aussi un habitat villageois, presque jamais une simple « Wohnburg », une pure résidence seigneuriale. Souvent aussi, ajoute-t-il, le développement d’un « castello » est lié à un marché ou à un péage. Quelques intuitions heureuses et nouvelles sur un fond de synthèse des éléments traditionnels : voilà donc Cusin. Ces innovations ne doivent pas nous faire sous-estimer les faiblesses de la seule synthèse vraiment méditée que l’historiographie italienne d’avant-guerre ait produite sur ce thème. Indiquons brièvement ces points faibles et ces lacunes :
- La force durable du carcan juridique, en premier lieu, fait qu’à la suite de Vaccari, Cusin ne peut guère concevoir un castrum que comme le produit d’une concession royale. Toute création seigneuriale, hors de cette sphère, est analysée par lui en termes d’usurpation d’un droit régalien. Justifiée au pied de la lettre, cette rigueur juridique dans l’approche limite évidemment sa compréhension de la genèse du phénomène et le conduit à en réduire l’ampleur initiale.
- En second lieu, et toujours comme ses devanciers, Cusin ne propose aucune périodisation. Il accorde, comme Fedor Schneider, une grande importance au substrat romain tardif et aux travaux fortifiés du limes longobard. Sur la foi des hypothèses de Leicht et de Checchini, relatives au peuplement de l’Italie lombarde par des garnisons d’arimanni dont le rôle mythique est aujourd’hui démontré17, Cusin a vu dans ces braves arimanni de vaillants bâtisseurs de castra. Mieux même : contrairement à toute vraisemblance textuelle ou archéologique, il a doté généreusement la sala longobarde d’éléments fortifiés de taille castrale. En d’autres termes, il est demeuré insensible à l’importance du xe siècle en tant qu’articulation chronologique majeure.
- Il est également resté éloigné de tout effort de typologie castrale. Il note bien en passant (et avec raison d’ailleurs) que la typologie allemande n’est pas transposable telle quelle au royaume d’Italie mais il se garde de proposer quelque formule mieux adaptée à son champ de recherches.
- Ajoutons enfin que Fabio Cusin, si bien informé qu’il ait été au plan général, n’avait d’expérience documentaire de première main vraiment approfondie que pour le Trentin qui n’offre peut-être pas, en l’occurrence, le paradigme italien le plus typique.
10Dans ses faiblesses même, le travail de Cusin est donc un fidèle témoin de l’état de la question castrale à la veille de la guerre. C’est lui que l’on cite désormais comme la référence obligée et définitive dans les décennies d’après-guerre chaque fois qu’il s’agit de castrum. Ce piétinement de la recherche n’est guère interrompu que par un éclair : la parution en 1955 dans l’Archivio storico per le Provincie napoletane de l’article de Mario Del Treppo sur l’abbaye de Saint-Vincent au Volturne et son environnement économique et social aux ixe-xiie siècles18. Quoique assez bref, ce travail est néanmoins le premier qui commence à poser les vraies questions. À partir d’une lecture directe du célèbre cartulaire-chronique de Saint-Vincent au Volturne beaucoup plus qu’à partir des suggestions conformistes de l’historiographie ambiante, Del Treppo a été le premier à mettre l’accent sur la signification du xe siècle comme grand siècle de l’« incastellamento » en Italie. Ceci indépendamment, me semble-t-il, des travaux plus généraux que menait à la même époque le groupe d’études animé par Roberto S. Lopez sur la « Renaissance » du xe siècle19. Pour la première fois avec Del Treppo, les fondations castrales des xe-xie siècles sont définies comme un fait nouveau qui a profondément bouleversé, d’une part les structures politiques et institutionnelles locales et, d’autre part, ce que l’auteur appelle encore vaguement la « geografia dei luoghi », nous dirions la carte du peuplement. Del Treppo est aussi sensible au fait que si l’« incastellamento » répond en partie à des nécessités de défense, il répond aussi et peut-être surtout à des exigences nouvelles de nature économique : ainsi, le castrum commence-t-il à apparaître comme une structure adaptée à une exploitation plus intensive des terres, à la mise en place des seigneuries rurales mieux structurées et plus engagées, avec la reprise démographique, dans le repeuplement des zones désertes. Si intelligent et suggestif qu’il fût, ce discours n’en demeurait pas moins, il faut le reconnaître, général. On ne trouve dans les recherches conduites autour de Saint-Vincent au Volturne aucun inventaire précis des « castelli », aucun effort pour dater ni pour cartographier les habitats nouveaux gravitant à partir du xe siècle autour de l’abbaye, aucune étude des sites castraux, des terroirs construits autour d’eux ni aucune tentative de classement typologique des habitats qualifiés tout uniment de castra dans les sources contemporaines de leur mise en place. En bref, le brillant article de Mario Del Treppo constitue avant tout une invitation à approfondir les aspects multiples d’un phénomène que l’auteur donnait comme fondamental pour la compréhension de toutes les mutations intervenues en Italie centro-méridionale à partir du xe siècle et auquel, en même temps, il ne consacrait malgré tout que quelques pages d’un article monographique. Après Del Treppo, d’ailleurs et dans la même aire géographique, Nicola Cilento revenait, en 1966, dans son livre sur la Signoria capuana20 sur l’importance de l’« incastellamento », mais, lui aussi, d’une manière générale et rapide. Il n’ajoutait rien d’essentiel au débat sinon (et ce n’est pas peu) une étude originale de la description du phénomène telle qu’elle nous a été transmise par ces sources narratives concordantes et précieuses que sont les chronica des grandes abbayes d’Italie méridionale21.
11Le bilan des recherches existantes au moment où j’élaborais mon propre travail est donc réellement modeste. On ne comptait, dans la décennie 1960-1970 en Italie, aucune étude régionale précise du phénomène castral. On ne disposait même d’aucun inventaire régional récent qui fût complet ou simplement utile. Celui de Davidsohn ne valait que pour le contado de Fiesole ; ceux de Cesari et Spinelli pour la région de Modène, de Feliciangeli pour la Marche de Camerino, de Giacosa pour le Val d’Aoste étaient anciens, sans aucun questionnaire directif : à tel point même qu’un honnête érudit comme Giacosa avait cru devoir signaler dans son répertoire son peu d’intérêt pour les castra désertés et ruinés22. Un grand inventaire de belle apparence, même, comme celui de B. Ebhardt ne donnait que des séries d’ailleurs fort utiles de relevés planimétriques de sites fortifiés, sans étude ni des territoires, ni de la typologie, ni de l’évolution morphologique des « Burgen » italiennes23. Une preuve éloquente de la lenteur avec laquelle émergeait le thème du castrum nous est enfin fournie par la grosse Storia d’Italia publiée en 1973 par Einaudi, où le chapitre intitulé Castelli e jeudi traite de la seigneurie rurale, certes, et des fiefs mais où le castrum, donné dans le titre comme structure de référence, est absent du texte même24.
12La cause de cette situation, au demeurant, doit être cherchée non du côté de quelque incapacité des historiens italiens, qui serait évidemment absurde à imaginer, mais bien plutôt dans les conditions culturelles qui ont présidé au développement de l’historiographie italienne depuis le xixe siècle. Dès l’origine, on l’a vu, avec Schupfer et Pertile, l’histoire du Moyen Age s’est développée en Italie en étroite symbiose avec l’histoire du droit et c’est dans ce sens que s’est d’abord faite l’histoire du castrum, bien étudié dès les années 1910-1920 par Vaccari dans ses implications juridiques et institutionnelles. Diversement en Allemagne avec la « Siedlungs- » et la « Landesgeschichte » ou — encore plus — en France, c’est avec la géographie que l’histoire a entretenu des relations anciennes du même type. On comprend aisément que, formé à cette école et me trouvant en Italie, j’y aie entrepris une recherche d’histoire régionale qui fît la première place aux problèmes d’occupation du sol et de mise en place, à partir du xe siècle, de cadres d’habitat d’une nouveauté aussi déterminante.
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13Je ne vous infligerai pas ici le résumé des conclusions auxquelles m’ont conduit mes recherches latiales. Avec plus d’optimisme que d’inconscience, je les suppose connues. Je voudrais plutôt, en tenant le plus grand compte des travaux — nombreux et de qualité — parus depuis 1972, faire le bilan de cet acquis récent et prospecter les orientations actuelles de la recherche castellologique italienne qui me paraissent les plus prometteuses.
141) Le premier grand problème — posé, certes, mais nullement résolu par mon travail sur le Latium — est celui des rapports entre l’histoire régionale du fait castrai et l’archéologie des sites castraux. Pour des raisons qui n’ont rien d’un parti-pris théorique, il s’est trouvé que mes recherches sur l’« incastellamento » latial n’ont intégré le résultat d’aucune fouille personnelle. De plus, les rares fouilles médiévales alors entreprises dans le Latium par les Britanniques et par les Danois ne concernaient qu’une zone exclue de ma recherche — l’Étrurie ou Tuscia romana médiévale — ou n’intéressaient fâcheusement que des habitats antérieurs à l’« incastellamento » (comme la domusculta Capracorum) ou des ensembles modestes, désertés tardivement et sans enseignement pour moi (cas des fouilles danoises25). Mais le problème posé me paraît à la fois général et toujours d’actualité. Au cours de ces dernières années, sans doute, divers sites castraux désertés ont fait l’objet d’études attentives en Ligurie, en Toscane, en Campanie, en Calabre et en Sicile, pour ne citer que les régions où les chantiers ont été les plus remarquables26. Le caractère très actif de ces recherches est frappant, de même que leur excellente qualité méthodologique et technique. On ne saurait pour autant se dissimuler le fait que l’intégration de l’archéologie castrale dans l’histoire de l’occupation du sol reste encore, dans une large mesure, à accomplir. À cet égard, la situation offerte par le Latium vers 1960-1970 vaut encore pour l’Italie en général : théoriquement complémentaire de la « Siedlungsgeschichte », l’archéologie castrale demeure, quelle que soit d’autre part la qualité de ses résultats, une discipline largement autonome et de faible secours pour la compréhension de l’« incastellamento » sur un plan régional. Cette intégration de l’archéologie doit donc être raisonnablement tenue (et nous ne parlons ici que de l’Italie) pour un but souhaitable à long terme, mais dont le processus est à peine installé. À titre de preuve parlante de cet état de la recherche, qu’il suffise d’évoquer le cas du Piémont où les recherches sur l’« incastellamento » ont accompli ces derniers temps — je vais y revenir — les progrès les plus remarquables et ceci, comme dans le Latium, sans qu’aucun secours particulier n’ait été porté par l’archéologie de fouilles. On notera, dans le même esprit, le cas inverse de la Ligurie où des équipes archéologiques très compétentes ont fait beaucoup de travail, et du travail excellent, mais où les recherches ponctuelles sur le terrain n’ont pas encore débouché sur une étude d’ensemble concernant les vicissitudes du peuplement médiéval et de l’occupation du sol en Ligurie entre le ixe siècle et le xiie siècle.
15On constate même mieux : grâce à l’intérêt exceptionnel des sources écrites, qui tient largement en Italie à la qualité du langage notarial, les textes fournissent parfois des renseignements précis et précieux sur divers aspects matériels du castrum (matériaux utilisés pour la construction des enceintes, hauteur et épaisseur des murailles, présence éventuelle de coursives ou d’appareils adventices, etc.). Force est de déplorer que la liaison entre ces données et celles que fournit l’observation des restes matériels n’ait été établie que très rarement27.
162) Un autre ordre de problèmes qui marque l’orientation actuelle des recherches en Italie est celui de la typologie castrale. Cette question ne m’avait guère retenu dans mes propres recherches, carence qu’il est aisé d’expliquer après-coup par le fait que prédominait dans le Latium des xe-xiie siècles, un seul type de castrum de peuplement, c’est-à-dire le village perché sur une sommité naturelle (podium, pesclum, etc.) et fortifié. Ce castrum-type du Latium était très généralement doté, à l’intérieur de l’enceinte villageoise, d’un second noyau fortifié, la rocca castri ou maison-forte dans laquelle résidait normalement le dominus castri et sa mesnie, siège ordinaire de la curia castri, résidence aussi — mais point toujours — du groupe des milites castri, etc. J’insistais donc sur cette structure castrale très prédominante et signalais l’existence minoritaire de sites fortifiés plus rudimentaires qualifiés tout uniment de « castelli » stratégiques. J’englobais dans cette catégorie tous les ensembles fortifiés ayant pour fonction première non de protéger un habitat rural concentré et perché mais d’assurer des fonctions diverses : protéger ici une frontière seigneuriale, là un point de péage ou de passage comme dans le cas des castra-portus du Tibre et de ses affluents en amont de Rome, etc.
17Il est évident que les études locales et régionales qui se sont multipliées depuis quelques années, ont scruté des régions fort différentes par les conditions géographiques et historiques, de la plaine padane aux collines piémontaises, toscanes ou émiliennes. Un des intérêts les plus immédiats de ces recherches récentes est d’avoir nuancé et enrichi la gamme typologique des habitats. C’est ainsi qu’à côté du castrum de peuplement sur site perché de prototype latial, les médiévistes de l’école de Turin (Aldo Settia, Renato Bordone et Rinaldo Comba) ont souligné l’importance d’autres types morphologiques comme, par exemple, le « ricetto » (receptum) dont on peut décrire le prototype dans la région de Biella mais dont on peut observer les formes plus ou moins dégradées jusque dans la région de Vérone28. Le « ricetto » a l’intérêt de présenter le cas d’une structure fortifiée destinée à assumer une double fonction : fonction d’abri pour les récoltes et de stockage pour les subsistances et les réserves alimentaires ; fonction aussi de refuge occasionnel offert à une population rurale vivant normalement dans des habitats dispersés à l’entour. Le « ricetto » pouvait en outre être associé — et parfois même adossé — à une maison-forte seigneuriale, ceci sans qu’il y ait à proprement parlé d’habitat villageois fortifié dans son ensemble. Dans la grande variété de ses formes mixtes ou « dégradées », le « ricetto » peut ainsi apparaître comme le complément fonctionnel d’un castrum et non comme une structure fortifiée toujours autonome ou exclusive d’autres formes de fortification.
18Il s’agit là bien clairement d’un type structural très différent de celui qui prédomine dans le Latium et qui n’est pas sans évoquer celui de certains castra-refuges ibériques, du royaume de Valence en particulier29. Il éclaire la liaison qui existe toujours entre l’histoire de la fortification et celle de l’habitat rural en général. Nous avions observé que la prédominance quasi absolue, dans le Latium d’après l’an Mil, du castrum de peuplement y avait pour corollaire l’effacement durable d’un habitat rural dispersé intercalaire. Inversement, c’est l’existence d’un habitat rural dispersé qui rend compte de la genèse et de la fonction de structures fortifiées du type du « ricetto » piémontais.
19Il est aussi un fait d’observation qui ne semble pas avoir été fortement souligné par nos collègues piémontais : à savoir l’importance que doit avoir l’axe chronologique dans tout inventaire des types castraux. On ne peut en effet qu’être frappé par le fait que, si l’on se place dans la première phase de l’« incastellamento », celle du xe siècle30, il semble bien que l’on soit partout en présence d’une typologie pauvre à deux ou trois types seulement : castra de peuplement ; castra « stratégiques » (au sens large indiqué plus haut) ; castra mixtes, tant il est souvent difficile pour nous de donner la primauté au facteur défensifmilitaire ou au facteur économique.
20Ce n’est qu’à partir des xiie-xiiie siècles, et ce « primo incastellamento » passé, que la typologie s’enrichit de types nouveaux sous l’action de plusieurs données concomitantes qu’il suffit ici d’énumérer : hausse démographique soutenue ; complexité croissante des habitats ruraux eux-mêmes et densité accrue de la dispersion intercalaire ; progrès technique dans l’architecture et la construction ; exigences défensives plus sophistiquées dans un monde où la guerre se perfectionne, où la vie de relations s’intensifie et où les castra de tout genre s’intègrent à des systèmes politico-militaires complexes31. Si bien que, si la typologie des châteaux aujourd’hui proposée pour l’Italie du Nord est aussi riche, c’est parce que les auteurs englobent volontiers dans leur recherche les xive-xvie siècles, époque où la mise en place des cités-états, puis des principautés territoriales, a entraîné de nouvelles vagues de fondations castrales qui n’ont évidemment plus rien à voir avec le « primo incastellamento » des xe-xie siècles. Cette évolution trouve d’ailleurs son reflet dans la terminologie elle-même. En rapport avec la typologie réduite que l’on vient d’évoquer, les documents des xe-xie siècles ont en effet recours à un lexique limité où castrum et castellum, oppidum, burgus, rocca et — très rarement — motta et tumba représentent la quasi-totalité des vocables en usage pour désigner des sites fortifiés, alors que le vocabulaire s’enrichit notablement, à partir du xiiie siècle, pour désigner une réalité qui elle-même se diversifie : receptum, castellare, reductum, reclusum, recinctum, bastita, etc., entrent alors plus décidément dans l’usage. Bref, tout indique qu’une typologie des habitats fortifiés doit faire intervenir à la fois les critères morphologiques et — plus nettement qu’on ne le fait aujourd’hui — les critères chronologiques. Nul doute que, même dans les zones à typologie plus complexe que le Latium, comme le Piémont, cette typologie ait été beaucoup plus simple aux xe-xie siècles qu’à la fin du Moyen Age. C’est là une évidence, sans doute, qu’il n’est cependant pas inutile de rappeler dans la mesure où les travaux récents qui étudient un phénomène comme la fortification dans la longue durée (xe-xvie siècles) prennent avec la méthodologie des risques qu’ils ne mesurent pas toujours. Si l’on périodise des phases d’« incastellamento » comme cela devient alors nécessaire, il faut aussi adapter la typologie castrale à cette périodisation. C’est ainsi dans la même tranche chronologique que l’historien aura soin de chercher ses éléments de comparaison : les « terre nuove » florentines ont leurs correspondants les plus fidèles dans la France méridionale des xiiie-xive siècles, non dans les « castelli » surgis en Toscane même aux xe-xie siècles32.
213) La typologie débouche sur les problèmes connexes de genèse et de densité des castra. Aux questions : quels types de castra et selon quels rythmes de fondations ? se lient nécessairement les questions : sous l’action de quelles causes et selon quelle densité ?
22Quant à la genèse et aux causes du premier « incastellamento », j’avais répondu dans mes volumes sur le Latium en privilégiant les facteurs démographiques, économiques et seigneuriaux. Contrairement au cas de figure exposé jadis par Fedor Schneider, je ne rencontrais pas dans le Latium de « castelli » fondés autrement que par des initiatives que l’on peut, en gros, qualifier de seigneuriales. Je voyais d’autre part prédominer dans ces entreprises un souci seigneurial de peupler, certes, de « far gente » mais, plus généralement, de maîtriser la croissance, de mieux asseoir tous les profits seigneuriaux en créant, avec la concentration castrale, un cadre plus efficace de contrôle de la paysannerie et — secondairement — des bases d’appui pour l’exercice de fonctions d’origine publique. Bref, je tournais le dos aux explications traditionnelles de type catastrophique qui étaient toujours à l’honneur, il faut l’observer, dans l’historiographie ambiante et qui faisaient d’un « incastellamento » d’ailleurs mal évalué la simple réponse que la société locale apeurée aurait trouvée aux défis sarrasin et hongrois. Il me paraît aujourd’hui que, par un mouvement de réaction contre le simplisme de ces idées reçues et répétées, je suis sans doute allé trop loin en sens inverse et que le facteur de défense doit être remis à une meilleure place dans la hiérarchie des causes de l’« incastellamento33 ». Ceci, à condition de restituer son vrai caractère à cette exigence de sûreté et de défense. Je persiste en effet à penser que les Hongrois et les Sarrasins n’ont joué dans l’affaire qu’un rôle modeste qui a été démesurément grossi par la célébrité des quelque quinze ou vingt diplômes de Béranger Ier qui en parlent. La mise en série des fondations castrales datées montre bien que celles-ci se multiplient après la fin de la menace hongroise. Si c’est à l’occasion de leurs incursions que les rois « italiens » ont pu concéder à diverses personnes privées la licentia castra hedificandi, c’est dans le climat général de la Renaissance du xe siècle que le bénéfice concret de telles concessions a pris tout son relief. Il suffit de songer au succès durable de la plupart des fondations castrales évoquées dans les diplômes de Béranger Ier pour admettre cette évidence. Plutôt que comme réponse à une cause aussi ponctuelle et transitoire que les raids hongrois des premières décennies du xe siècle, le souci défensif manifeste dans l’« incastellamento » doit être replacé dans une stratégie de base des politiques seigneuriales aux xe-xie siècles. Les excellents travaux de Renato Bordone, par exemple, sur l’« incastellamento » dans le diocèse d’Asti34 et celui de Giacomo Morello sur la genèse du Castrum de Piossasco (prov. de Turin35) ont montré, dans ce sens, que beaucoup de castra ont eu pour fonction originelle et longtemps primordiale de protéger des ensembles patrimoniaux de curtes. Par conséquent, la politique de création de points d’appui castraux pratiquée par les évêques d’Asti aux xe-xie siècles doit être intégrée dans la logique d’une politique seigneuriale d’ensemble qui apparaît en même temps comme dynamique (puisque créatrice de nouveaux centres) et comme conservatrice (puisque défensive de structures économiques plus anciennes). Notre connaissance de la genèse du castrum en Italie et des rapports entre curtis et castrum est ainsi notablement enrichie par des recherches récentes. Nous voyons qu’il n’y a ni opposition ni simple succession chronologique de la curtis au castrum : dans certains cas au moins, dans certaines régions et dans une phase de démarrage, le castrum a bien pu naître au cœur de la curtis et pour la défendre, surtout s’il s’agit d’une curtis fiscale où se pose pour les entrepreneurs seigneuriaux de l’opération d’« incastellamento », la question du maintien de l’exercice de fonctions d’origine publique au moment même où se disloquent les grandes marches du royaume d’Italie. Il ne saurait cependant s’agir là, selon nous, du schéma de base de l’« incastellamento » mais plutôt d’une situation particulière qui permet de faire entrer dans la typologie une catégorie de castra que Bordone appelle avec de bonnes raisons les « castelli curtensi », disons les castra domaniaux. Ceux-ci, bien sûr, ne sont attestés que là où, au xe siècle, la compacité et la solidité de la vieille structure de la curtis étaient encore suffisamment grandes pour que le castello curtense pût venir étayer cette dernière. Ailleurs au contraire, comme en Sabine autour de Farfa, la structure domaniale était si délabrée que l’« incastellamento », comme on le sait, a pris d’autres formes.
23À côté des conditions qui ont présidé à la formation des « castelli » du xe siècle, un problème auquel je m’étais gardé de chercher une solution trop formalisée a retenu depuis quelques années l’énergie des castellologues d’outre-Alpes : le problème — ailleurs bien connu depuis longtemps — des calculs de densité castrale aboutissant à une donnée chiffrée de valeur moyenne : un castrum pour tant de kilomètres carrés. De tels calculs ont-ils quelque intérêt, au-delà d’une appréhension grossière de l’ampleur quantitative du phénomène ? Il est permis d’en douter. Les castra — la complexité croissante de leur typologie le montre bien — ne forment pas des unités comptables homogènes. Ce qui compte, me semble-t-il, ce sont moins les castra que les systèmes castraux, c’est-à-dire les ensembles plus ou moins vastes de castra, structurés en patrimoines ou en sphères de pouvoir gravitant autour d’un pôle (une église épiscopale, une grande abbaye, une puissante famille, etc.). De tels systèmes comportent une hiérarchie de castra appartenant à plusieurs types ; ils impliquent une logique et une dynamique dans la constitution des patrimoines castraux. C’est ce que Vito Fumagalli et Aldo Settia ont montré, par exemple, en étudiant la formation du patrimoine de la famille des Canossa36 et ce que j’ai moi-même tenté de faire pour Farfa, pour Subiaco et, plus sommairement, pour le Mont-Cassin37. Beaucoup plus qu’un quotient abstrait de densité, c’est la taille et la structure de ces systèmes castraux qui comptent. On y voit s’y former-, s’y défaire, ou s’y défendre des patrimoines, certes, mais aussi des frontières seigneuriales ou féodales, des routes, des lieux de pouvoir ou de concentration des profits économiques. C’est là, sans aucun doute, que peut se situer aujourd’hui de la manière la plus efficace l’interface entre histoire du peuplement et histoire sociale.
244) Il est un dernier problème à évoquer : celui des désertions castrales. Si l’émergence du castrum comme thème de recherche a été laborieuse en Italie, c’est avec une plus grande difficulté encore que s’est imposée l’idée d’étudier les désertions castrales : il n’y a pratiquement pas de « Wüstungsforschung » italienne avant les années 60. Il suffit d’ouvrir le gros volume collectif de 1965 sur les villages désertés pour constater à quel point l’article sur l’Italie fait figure de travail pionnier38. C’est à propos du Latium, je crois, qu’a été conduite la première étude régionale systématique dont les conclusions peuvent être brièvement résumées ainsi :
- En datant les désertions par des méthodes assez proches de celles mises au point pour dater les fondations, il est d’abord apparu que les désertions anciennes — c’est-à-dire antérieures, grosso modo, au xiiie siècle — y ont représenté un phénomène de masse important. Pour la seule Sabine et le Latium méridional, l’inventaire des sites anciennement abandonnés comprend plus de quatre-vingts « castelli ». On peut ainsi parler sans emphase d’une première vague de désertions, contemporaine ou de peu postérieure à l’« incastellamento ».
- Les sites désertés et datés ont été, si possible, repérés sur la carte et le terrain. Leur distribution géographique a clairement fait apparaître un fait fondamental : c’est dans les zones où les fondations ont été les plus nombreuses que les désertions ont été les plus denses, elles aussi. Il s’agit de deux aspects synchrones du même processus de dynamique de peuplement.
- En regroupant les divers cas de désertion, on peut en proposer une typologie sur laquelle il n’y a pas lieu de s’étendre ici.
- Cette typologie des formes d’involution et des échecs castraux débouche naturellement sur une étude des causes de ces échecs.
25Les études conduites depuis 1972 en référence plus ou moins explicite au cas latial ont permis de couvrir de nouvelles régions. Le Piémont, une fois de plus, est à l’honneur avec les recherches de Comba et de Settia, en particulier39. l’observerai surtout que l’étude des formes, d’une part, et d’autre part, des causes de ces désertions castrales ne permet pas de dégager des types nouveaux par rapport à ceux définis pour le Latium. Sans doute, les différentes causes de désertions anciennes ont-elles joué diversement ici et là. Dans le Latium où prédominait très puissamment le castrum de peuplement, c’est l’incapacité à structurer autour des nouveaux sites perchés des espaces agraires suffisants et équilibrés qui explique la meilleure part des échecs. Il faut en outre y faire une place importante à la politique seigneuriale, à la rivalité des coutumes castrales, à cet ensemble complexe de facteurs qui explique que, par une sorte de concurrence vitale, il y a eu aux xe-xiie siècles une sorte de sélection des habitats qui a assuré la survie des uns au prix de l’élimination des autres.
26Tous ces éléments sont aujourd’hui reconnus comme valables en Italie du Nord où, de plus, d’autres causes, peu actives dans le Latium, ont contribué à maintes désertions. Il est évident, par exemple, qu’à partir des xiie-xiiie siècles, aussi bien dans le Piémont qu’en Toscane, l’attrait des villes a joué dans la désertion de certains sites ruraux un rôle plus important que dans des zones à moindre dynamisme urbain. Partout, au demeurant, les faits majeurs déjà prospectés pour le Latium se trouvent amplement confirmés : importance de la première grande vague de désertions des xe-xiie siècles ; peu d’importance (partout) de la guerre comme cause de désertions définitives et totales ; peu d’importance (partout) des facteurs proprement naturels tels qu’inondations, glissements de terrain ou « frane », facteurs climatiques de type malarigène, etc. ; importance partout frappante des désertions partielles avec soit des déplacements légers de site d’habitat sans désertions du territoire castrai soit des phénomènes d’absorption d’un castrum et de son territoire par un castrum voisin dans des conditions variées. Ces phénomènes de « spostamento », ou déplacement à court rayon, ont fait en particulier l’objet d’une microanalyse très poussée de R. Comba pour la région de Cuneo40. Enfin, conduisant ses recherches jusqu’aux xve-xvie siècles, Settia a pu observer que, dans le Piémont, le repeuplement a été en partie assuré grâce à la diffusion d’un habitat rural dispersé par « cascine » et « casali », sans réanimation notable des anciens habitats villageois abandonnés41. L’étude des « casali » de la Campagne romaine à la même époque, entreprise par plusieurs membres de l’École française de Rome depuis quelques années avec des résultats publiés si remarquables offre, à ce sujet, un point de comparaison intéressant.
***
27Le rythme de la production historiographique en matière d’histoire castrale ne semble pas près de se relâcher en Italie. Depuis la tenue même du colloque de Flaran (septembre 1979), de nouveaux travaux sont venus enrichir nos connaissances42. C’est dire que toute conclusion ne saurait encore avoir qu’un caractère rhétorique. Il suffira à notre ambition d’avoir montré ici que les recherches actuelles témoignent, par leur richesse et leur variété, de l’enthousiasme avec lequel le thème castral, tard venu dans l’historiographie italienne, s’impose aujourd’hui avec prédilection aux médiévistes d’outre-Alpes.
Notes de bas de page
1 Pierre Toubert, Les structures du Latium médiéval, 2 vol., Rome, 1973.
2 Aldo A. Settia, Erme torri e barbari manieri. Gusto antiquario ed evocazione romantica in due secoli di studi sui castelli medievali, dans le Boll. stor.-bibl. Subalpino, LXXV (1977), p. 5-38 et, du même, le rapide essai, I castelli medievali, un problema storiografico, dans les Quaderni medievali, 5 (1978), p. 110-120. Bon exposé d’ensemble dans Jean-Marie Martin. L’« incastellamento » : mutation de l’habitat dans l’Italie du xe siècle, dans Occident et Orient au xe siècle. Actes du IXe Congrès de la Société des Historiens médiévistes de l’Enseignement supérieur public (Dijon, 2-4 juin 1978), Paris, 1979, p. 235-249.
3 Pour Francesco Schupfer, dans une oeuvre très abondante, on retiendra pour notre propos : Fr. Schupfer, Manuale di storia del diritto italiano. Le jonti : leggi e scienza, 4° éd., Rome, 1908 et id., Il diritto privato dei popoli germanici con speciale riguardo all’Italia, 2e éd., 5 vol., Città di Castello, 1910. Pour Ant. Pertile, Storia del diritto italiano dalla caduta dell’impero romano alla codificazione, 2° éd., 7 vol., 1896-1902 (réimpr. anastat., Bologne, 1965).
4 Dans ses six volumes de texte par exemple, Pertile ne consacre en tout et pour tout que deux pages au problème du castrum : Ant. Pertile, op. cit., t. I, p. 354-355. Très significativement, ces deux malheureuses pages s’insèrent dans le sous-chapitre intitulé : « Della milizia nel tempo della feudalità ».
5 Référence des travaux de Ferd. Gabotto et discussion de ses thèses chez G. Volpe dans son article classique : G. Volpe, Una nuova teoria sulle origine del Comune, dans l’Arch. stor. it. de 1904, réimpr. dans id., Medio Evo italiano, Florence, 1923, p. 41-64 (2e éd. inchangée, Florence 1961, p. 119-140). Dans la même ligne d’intérêt pour les communautés de seigneurs châtelains, voir aussi Fr. Niccolai, I consorzi nobiliari ed il comune nell’alta e media Italia, Bologne, 1940.
6 G. Volpe, Lambardi e Romani nelle campagne e nelle città, dans les Studi storici d’A. Crivellucci, XIII (1904), p. 53-81, 167-182, 241-315 et 369-416, auj. réimpr. sous le titre de fantaisie Origine e primo svolgimento dei Comuni nell’Italia Longobarda, Rome, 1976, qui est en lui-même révélateur de la manière dont, après sa mort, Volpe est aujourd’hui relu par ses fidèles.
7 P. Vaccari, La territorialità corne base dell’ordinamento giuridico del contado medioevale, 2e éd. revue et augm., Milan, 1963. Cet ouvrage comporte également la réédition du précieux article du même auteur, Il « castrum » corne elemento di organizzazione territoriale, publié pour la première fois dans les Rendiconti d. R. Ist. Lombardo di scienze e lettere, 2e série, 56 (1923), p. 678-686 et 57 (1924), p. 453-462.
8 P. Vaccari, La territorialité…, p. 111 (et passim).
9 P. Vaccari, Note sulle condizioni giuridiche del contado nei secoli xii e xiii, dans le Boll. d. Soc. Pavese di Stor. patria, 14 (1914), p. 302-336 (réimpr. dans La territorialité…, p. 133-158). Voir en particulier la p. 149 de la réimpr.
10 F. schneider, Die Entstehung von Burg-und Landgemeinde in Italien. Studien zur historischen Geographie, Verfassungs-und Sozialgeschichte, Berlin 1924 (« Abhandl. z. mittleren u. neueren Gesch. », 68).
11 Voir, par exemple, les articles publiés dans l’entre-deux-guerres par Gian Piero Bognetti, auj. commodément réunis dans G. P. Bognetti, Studi sulle origini del comune rurale, Milan 1978 (« Cultura e storia », 17).
12 G. Luzzatto, Le finanze di un castello nel xiii secolo, dans la Vierteljahrschr. f. Sozial- u. Wirtschaftsgesch., XI (1913), p. 45-128, auj. réimpr. (en même temps que d’autres articles importants de Luzzatto sur l’histoire sociale des Marches aux xiie-xiiie siècles) dans id., Dai servi delta gleba agli albori del capitalismo. Saggi di storia economica, Bari 1966.
13 J. Plesner, L’émigration de la campagne à la ville libre de Florence au xiiie siècle, Copenhague, 1934. Le long et original compte rendu de Plesner par Luzzatto est repris dans le volume Dai servi della g leba…, p. 408-432.
14 Rappelons que le t. I de K.J. Beloch, Bevölkerungsgeschichte Italiens paraît à Berlin en 1937.
15 Voir, par exemple, F. Carli, Storia del commercio italiano, t. I : Il mercato nell’alto Medio Evo, Padoue, 1934 et t. II : Il mercato nell’età del Comune, ibid., 1936.
16 F Cusin Per la storia del castello mediœvale, dans la Rivista storica italiana, série V, IV (1939), p. 491-542.
17 Sans vouloir entrer plus avant dans ce difficile problème, citons simplement G. Tabacco, I liberi del re nell’ Italia carolingia e postcarolingia, Spolete, 1966 et id., Dai possessori dell’età carolingia agli esercitali dell’età longobarda, dans les Studi Medievali, serie 3a, X/1, 1969 (= Mélanges Gius. Ermini), p. 221-268 ainsi que, pour une présentation plus générale, P. Toubert, La liberté personnelle au haut Moyen Age et le problème des arimanni, dans Le Moyen Age, LXXIII (1967), p. 127-144.
18 M. Del Treppo, La vita economica e sociale in una grande abbazia del Mezzogiorno : S. Vincenzo al Volturno nell’alto Medio Evo, dans l’Arch. stor. per le Prov. Napol., n. s. XXXV (1955), p. 31-110.
19 R. S. Lopez, Still another Renaissance ?, dans Amer. Hist. Rev., 57 (1951-1952), p. 1-21 et id. (dir.), The Tenth Century : a Symposium, dans Medievalia et Humanistica, IX (1955).
20 N. Cilento, Le origini delta signoria capuana nella Longobardia Minore, Rome, 1966 (« Studi storici », 69-70).
21 N. Cilento, op. cit., p. 22-25.
22 G. Giacosa, I castelli valdostani, Milan, 1903, p. 21.
23 B. Ebhardt, Der Wehrbau Europas im Mittelalter, Bd I, Berlin 1939 et Bd II, 1-2, Stollhamm 1958 (pour l’Italie, Bd II, 1).
24 G. Fasoli, Feudo e castello, dans Storia d’Italia, V : I documenti, Turin 1973, p. 263-308. On préfèrera consulter, du même auteur, Castelli e signorie rurali, dans le volume d’Actes de la XIIIe Settimana di studio di Spoleto, Spolète, 1966, p. 531-567.
25 Premier aperçu de l’intérêt des fouilles britanniques en Etrurie dans J. Ward Perkins, Etruscan Towns, Roman Roads and Medieval Villages : the Historical Geography of Southern Etruria, dans The Geogr. Journ., 128 (1962), p. 389-405. Pour les fouilles danoises, voir H. Stiesdal, Three Deserted Medieval Villages in the Roman Campagna, dans les Analecta Romand Instituti Danici, 11 (1962), p. 63-100.
26 L’activité des chantiers fait l’objet de chroniques périodiques dans la revue Archeologia Medievale (depuis 1974), d’une excellente tenue.
27 Sur un plan général, voir P. Toubert, Considerazioni generali sul tema : rapporti tra documentazione scritta e dati archeologici, dans Tavola rotonda sulla archeologia medievale, Roma 11-13 marzo 1975, Rome, 1976, p. 31-59 et, plus précisément pour les « castelli » : Aldo A. Settia, La struttura materiale del castello nei secoli X e XI. Elementi di morfologia castellana nelle fonti scritte dell’Italia settentrionale, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXVII (1979), p. 1-70.
28 Voir en particulier Aldo A. Settia, Fortificazioni collettive nei villaggi medievali dell’Alta Italia : ricetti, ville forti, recinti, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXIV (1976), p. 527-617.
29 Voir les nombreuses contributions d’André Bazzana et Pierre Guichard au problème de l’occupation du sol dans le Levante espagnol entre domination musulmane et Reconquête chrétienne.
30 Il semble en effet bien établi aujourd’hui que la date de démarrage du « primo incastellamento », que j’avais fixée pour le Latium au premier quart du xe siècle soit également valable pour l’Italie du Nord (Settia, Bordone, Comba).
31 Il suffit d’évoquer le cas des bastitae et des « terre nuove » communales étudié en particulier par Ch. Higounet, Les « terre nuove » florentines du xive siècle, dans les Stucli… in onore di A. Fanfani, Milan, 1962, t. III, p. 3-17, ainsi que D. Friedman, Le « terre nuove » florentine, dans Archeologia Medievale, I (1974), p. 231-247.
32 Voir Ch. Higounet, Les villeneuves du Piémont et les bastides de Gascogne (xiie-xive siècles), dans les CRAI, 1970, p. 130-139, ainsi que plusieurs travaux du même auteur aujourd’hui réunis dans le volume id., Paysages et villages neufs du Moyen Age, Bordeaux, 1975.
33 Voir par exemple les remarques d’Aldo A. Settia, Castelli e strade del Nord Italia in età comunale : sicurezza, popolamento, « strategia », dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXVII (1979), p. 231-260.
34 Voir en particulier, R. Bordone, L’aristocrazia militare del territorio di Asti : i signori di Gorzano, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXIX (1971), p. 357-447 et LXX (1972), p. 489-544 et id., Paesaggio, possesso e incastellamento nel territorio di Asti fra x e xi secolo, ibid., LXXIV (1976), p. 457-525.
35 G. Morello, Dal « Custos Castri Plociasci » alla consorteria signorde di Piossasco e Scalenghe (secoli xi-xiii), ibid., LXXI (1973), p. 5-87.
36 V. Fumagalli, Le origini di una grande dinastia feudale. Adalberto-Atto di Canossa, Tübingen 1971, ne met pas l’accent sur le problème de l’« incastellamento » dans les terres canossiennes. Voir en revanche Aldo A. Settia, Castelli e villaggi nelle terre canossiane fra x-xiii sec., dans Studi Matildici, n. s. 44 (Deput. di Stor. Patria p. le Ant. Prov. Modenesi), Modène, 1978, p. 281-307.
37 Pour Farfa et Subiaco, voir P. Toubert, Les structures… cit… Le cas de l’« incastellamento » autour du Mont-Cassin a été étudié dans P. Toubert, Pour une histoire de l’environnement économique et social du Mont-Cassin (ixe-xiie siècles), dans les CRAI, 1976, p. 689-702 et id., La terre et les hommes dans l’Italie normande au temps de Roger II : l’exemple campanien, dans le volume Società, potere e popolo nell’età di Ruggero II. Atti delle terze giornate normanno-sveve, Bari, 23-25 maggio 1977, Bari, 1979, p. 55-71. D’autres « casestudies » méritent d’être signalés, comme celui d’Asti, étudié dans les travaux cités ci-dessus de R. Bordone et dans ceux de L. Casto, Il fondamento patrimoniale della potenza vescovile di Asti, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXIII (1975), p. 5-58 et ibid., LXXIV (1976), p. 27-66.
38 Chr. Klapisch-Zuber et J. Day, Villages désertés en Italie. Esquisse, dans Villages désertés et histoire économique (xie-xviiie siècles), Paris, 1965, p. 419-459.
39 Aldo A. Settia, Insediamenti abbandonati sulla collina torinese, dans Archeologia Medievale, II (1975), p. 237-328 et id., Incastellamento e decastellamento nell’Italia padana fra x e xi secolo, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXIV (1976), p. 5-26. Pour les travaux de R. Comba, voir ci-dessous, n. 40.
40 R. Comba, La dinamica dell’insediamento umano nel Cuneese (secoli x-xiii), ibid., LXXI (1973), p. 511-602.
41 Voir en particulier Aldo A. Settia, Fortificazioni collettive… cit. Sur l’habitat à « cascine », voir R. comba, Due cascine del Cuneese nella prospettiva di una storia della casa rurale, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXIII (1975), p. 211-268.
42 C’est ainsi, par exemple, que la dernière livraison (janvier 1980) du Bollettino storico-bibliografico Subalpino permet déjà de bien augurer du développement futur de l’archéologie des sites désertés du Piémont : M. Cortelazzo (et collab.), Un approcio metodologico alla cultura materiale nei siti abbandonati della collina torinese : il caso di Mombello, dans le Boll. stor.-bibliogr. Subalpino, LXXVII (1979), p. 504-546.
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