Chapitre VII. Des Chrétiens au secours des Juifs
p. 145-165
Texte intégral
1Le Midi toulousain, terre d’élection du radicalisme et du socialisme modéré, était dominé avant 1939 par des élites très orientées à gauche ; celles-ci furent privées de leurs moyens d’action et d’expression par l’État français. Pour prendre le relais des notables déchus, il n’y avait guère ici de haute bourgeoisie conservatrice, faute des bases économiques nécessaires à son existence puisque l’industrie privée est indigente et la grande propriété foncière en pleine décadence. Avec Vichy, le seul pouvoir qui subsistait à l’échelle de la région, c’était donc celui de l’Église catholique (avec l’appoint du corps pastoral dans les zones protestantes). Église choyée par le régime qui a un besoin vital de son appui. Ces seuls notables régionaux qui aient conservé prestige, crédit et une certaine liberté d’expression, ce sont donc les hauts dignitaires ecclésiastiques. Certains d’entre eux vont utiliser ces atouts avec éclat, au service non du maréchal, mais des Juifs déportés ou menacés de déportation : action courageuse de vaste portée.
2Il serait faux en effet d’imaginer un Midi toulousain sourd aux voix du clergé, la région n’a pas été totalement déchristianisée par la prédication radicale de La Dépêche. Nous y avons fait allusion dans le premier chapitre. Bien des « pays » sont restés des chrétientés où la grande majorité des habitants fréquente la messe dominicale et fait ses Pâques : le Lot presque en entier, une moitié du Tarn, du Tarn-et-Garonne et du Gers, de nombreux cantons ruraux de la Haute-Garonne sont dans ce cas. Mais les indifférents ou les anticléricaux d’avant-guerre entendent aussi cette voix qui résonne d’autant plus fort que le silence est général. Catholiques et protestants devraient se sentir concernés par le sort des Juifs puisque leur foi s’enracine dans la tradition juive. Les plus lucides des chrétiens savent aussi que l’antisémitisme a des racines religieuses. Peut-on rester indifférent au sort de ces frères séparés ? Non sans doute, et pourtant que d’ambiguïté dans l’attitude initiale du clergé et du corps pastoral protestant.
3En fait, on ne saurait évoquer une attitude, mais bien plusieurs qui soit coexistent, soit se succèdent, faisant passer les chrétiens de l’indifférence à l’engagement clandestin en faveur des Juifs, du silence à la protestation la plus vive, le tournant se situant au moment des grandes déportations de Tété 1942.
Le temps des indifférences
4Publié le 3 octobre 1940, le premier statut des Juifs ne suscite pas chez les chrétiens du Midi toulousain de réactions particulières ; leur attitude ne se distingue guère de celle de l’ensemble des Français : l’indifférence est de règle.
5Cette indifférence peut étonner si Ton songe que depuis longtemps déjà, puisant ses informations dans la Documentation catholique, qui consacre beaucoup de place à la persécution religieuse en Allemagne, la presse d’inspiration démocrate-chrétienne ou catholique sociale1, critique l’anticatholicisme et l’antisémitisme des nazis. Certes, cette presse touche peu le clergé et moins encore la grande masse des fidèles, mais relayée par les journaux régionaux, par les bulletins diocésains et les feuilles paroissiales, elle a véhiculé des thèmes qui ont pu ne pas être ignorés totalement. De plus, les nouvelles équipes françaises2 ont dénoncé clairement le nazisme dans leurs conférences ; elles fonctionnent à Toulouse, animées par les juristes Bye et Hauriou, et dans le Tarn, sous la direction de Charles d’Aragon. Dès 1933, les autorités religieuses catholiques manifestent, on l’a vu, leur réprobation face à la persécution des Juifs en Allemagne : ainsi, le 12 avril 1933, au Capitole, dans un rassemblement contre le régime nazi, Mgr Saliège, archevêque de Toulouse, souligne avec force, les liens qui unissent le christianisme au judaïsme3. L’enseignement du pape Pie XI, dans l’Encyclique Mit brennender Sorge4, les réflexions des quelques jésuites théologiens, les pères Chaillet, de Montcheuil, Fessard et de Lubac dénoncent la gravité du racisme antisémite répandu par le nazisme. Les protestants quant à eux, ont eu connaissance, par le biais des mouvements de jeunesse, par l’influence de jeunes pasteurs, par la presse religieuse aussi, de la lettre de Karl Barth5, qui, en décembre 1939, appelle à la mobilisation contre le paganisme hitlérien.
6Face à toutes ces mises en garde, à toutes ces interventions, comment expliquer l’indifférence quasi générale des chrétiens ? Tout un faisceau de phénomènes joue. D’abord, la politique réelle menée par le régime de Vichy est souvent méconnue : on connaît peu les mesures et surtout leurs effets rétroactifs, on en voit mal les résultats concrets. Ensuite, la prise de conscience ne s’effectue que très lentement : au synode de l’Église réformée qui se tient à Montauban les 27 et 28 février 1940, même si une partie des travaux sont consacrés à la fidélité au message évangélique, ni le rapport du président Boegner, ni les débats, ne portent sur la menace que représente le nazisme pour l’humanité et la foi chrétienne. Enfin, dans le Midi toulousain, le désarroi devant la défaite, les problèmes matériels provoqués par l’afflux massif des réfugiés, le soulagement de voir la région non occupée par les Allemands occultent toutes les autres préoccupations et expliquent l’unanimité assez large que réalise le nouveau régime.
7La hiérarchie catholique elle-même garde le silence lorsque paraît le premier statut des Juifs. Les évêques adhèrent aux thèses de la Révolution nationale, et par delà le loyalisme — traditionnel dans l’Église — envers le pouvoir établi, les plus tièdes d’entre eux ont le souci de préserver l’enseignement privé, l’Action catholique, les mouvements de jeunesse. La plupart se montrent pétainistes ; même Mgr Théas, évêque de Montauban, dont on connaît le courage ultérieur, entonne les louanges du Maréchal, en qui il voit un sauveur : « Que Dieu bénisse le chef de l’État français ! La providence lui a confié la magnifique mission de redresser une nation défaite. Qu’elle lui accorde en abondance des grâces de lumière, de conseil, de force ! » proclame-t-il encore en janvier 19426. Ce ralliement au maréchal Pétain entre dans la logique des choses, puisque la défaite de 1940 est analysée comme châtiment divin, signe des temps envoyé par Dieu pour que la France déchristianisée et infidèle puisse retrouver sa mission chrétienne. Cette affirmation de culpabilité est perceptible depuis quelques années déjà, et elle se développe encore, par exemple, lorsque Mgr Saliège écrit en juin 1940 :
« Pour avoir chassé Dieu de l’école, des prétoires de la nation, pour avoir supporté une littérature malsaine, la traite des Blanches, pour la promiscuité dépravante des ateliers, des bureaux, des usines, Seigneur, nous vous demandons pardon.
Quel usage avons-nous fait de la victoire de 1918 ? Quel usage aurions-nous fait d’une victoire facile en 1940 ?7 »
8Outre le ralliement des évêques au régime de Vichy, outre leur dénonciation de la culpabilité collective, le silence a des causes plus profondes. Les évêques sont alors marqués d’un antisémitisme latent à la fois politique et nationaliste, enraciné dans l’antijudaïsme religieux, et doublé d’une réaction anticapitaliste. Mgr Saliège lui-même admettait en 1938 que la question juive présentait des aspects économiques, politiques, sociaux, dont le règlement appartenait à l’État8. Rappelons que, avant la mise en place du statut des Juifs, une réunion de l’Assemblée des cardinaux et archevêques se tient en zone libre9 le 31 août 1940, à laquelle participent entre autres les archevêques de Toulouse, Auch et Albi, et l’évêque d’Agen. Il y a été question des Juifs, et le secrétaire de séance — très probablement Mgr Guerry — a inscrit dans son rapport que « des dispositions graves seront sans doute décidées prochainement contre les Juifs ». Sa note énumère les principes qui doivent inspirer l’attitude chrétienne :
« D’une part le fait de l’existence d’une communauté juive internationale à laquelle sont rattachés les Juifs de toutes les nations et qui fait que ceux-ci ne sont pas des étrangers ordinaires accueillis dans un pays, mais des gens inassimilés, peut obliger un État à prendre des mesures de protection au nom même du bien commun. D’autre part cependant, un État ne peut chasser brutalement des Juifs sans distinction de leurs activités, leur dénier les droits qu’ils tiennent de la nature dans l’ordre individuel ou familial. En résumé, il peut paraître légitime de la part d’un État d’envisager un statut légal particulier pour les Juifs (comme l’avait fait la papauté à Rome). Mais ce statut doit s’inspirer des règles de justice et de la charité, ne pas être animé d’un esprit de haine ou de vengeance politique, et tendre à ce double objectif : sauvegarder les droits de la personne humaine, tout en empêchant tout mode d’activité susceptible de nuire au bien commun du pays »10.
9On voit que l’attitude des évêques réunis à Lyon est ambiguë : l’État peut imposer un statut restrictif aux Juifs afin de protéger ses nationaux, pourvu que ce statut s’inspire des règles de la justice et de la charité...
10La réprobation envers la législation sociale de Vichy peut exister chez les prêtres ou dans la hiérarchie catholique, mais elle est discrète et personnelle, ou elle s’exprime indirectement et peut alors revêtir des formes provocatrices : ainsi à Toulouse, l’abbé René de Naurois prêche le dimanche à la chapelle des Sœurs du Cénacle dont il est aumônier ; il lui arrive de rappeler la naissance juive de la Vierge Marie11. De même, reçu à l’Académie de Montauban, le 7 janvier 1941, Mgr Théas rend un hommage appuyé au philosophe Henri Bergson, « homme du plus profond génie, âme lumineuse de charité »12. Quelques mois plus tard, Bergson encore est cité pour définir le patriotisme traditionnel de la France par le recteur de l’Institut catholique de Toulouse, Mgr Bruno de Solages, qui prononce une conférence dans le grand amphithéâtre de la faculté des lettres13. N’y a-t-il pas provocation encore de la part de Mgr de Solages lorsque, le 14 mai 1942, à la cathédrale de Montauban, dans une allocution sur le pape, il rappelle les principes chrétiens de la vie internationale :
« Sur quoi s’appuie le pape [...] pour affirmer ce devoir d’organisation pacifique de la communauté des Nations ? Sur les vérités religieuses les plus fondamentales du christianisme : sur l’égalité naturelle et surnaturelle de tous les hommes — Juifs ou païens, Grecs ou barbares, disait Saint Paul, et donc Français ou Allemands, Italiens ou Anglais, Noirs ou Blancs, tous fils du même Père qui est dans les deux »14
11L’archevêque de Toulouse, Mgr Saliège, montre également sa prévention envers la politique antisémite dès 1941 ; le jour où la France et le diocèse sont consacrés au Sacré Cœur de Jésus, c’est pour les Juifs qu’il fait prier : « Cœur Sacré de Jésus, ayez pitié de tous ceux qui souffrent, quelle que soit leur race, leur religion et leur nationalité [...] Ne permettez pas que la dignité de la personne humaine et les droits qu’elle tient de son Créateur disparaissent d’une terre d’où votre règne serait banni »15. Recevant le père Merklen au mois d’août 1941, l’archevêque de Toulouse exprime son analyse du mouvement anti-juif et ses réserves16.
12L’attitude des autorités protestantes paraît plus pragmatique que celle d’une partie de la hiérarchie catholique. Le pasteur Boegner mène une politique de présence à Vichy ; il y accomplit des démarches auprès de plusieurs ministres et des collaborateurs les plus proches du maréchal17. Réuni à Lyon fin 1940, puis à Nîmes en mars 1941, le Conseil national de l’Église réformée charge son président d’écrire au grand rabbin de France et à l’amiral Darlan, vice-président du conseil. Datées du 26 mars, ces deux lettres n’étaient pas destinées à la publication, mais le journal anti-sémite Au Pilori fit paraître la première : largement répandue en zone occupée, elle est alors perçue comme la première manifestation d’indignation des chrétiens contre les lois raciales. À la suite de cette lettre, les réactions des protestants ont été diverses. Si une majorité approuve, une minorité ne veut y voir qu’une initiative discutable du pasteur Boegner ; ceux qui en font partie ne masquent pas leur colère, ainsi plusieurs laïcs du Lot-et-Garonne. Dans ces deux lettres, quelques thèmes méritent d’être soulignés : l’Église réformée tient à exprimer son émotion devant l’introduction de la nouvelle législation et sa sympathie pour les Juifs. En effet, les protestants ont eux aussi connu autrefois les souffrances des persécutions ; de plus, protestants et juifs ont un héritage commun, « la Bible des Patriarches, des Prophètes et des Psalmistes, l’Ancien Testament, dont Jésus de Nazareth a nourri son âme et sa pensée »18. L’existence du problème de l’immigration étrangère est évoquée, et une distinction établie entre Juifs français et Juifs étrangers, mais la loi du 3 octobre est critiquée :
« Ceux qui parmi nous pensent qu’un grave problème a été posé devant l’État par l’immigration massive d’un grand nombre d’étrangers, juifs ou non, et par des naturalisations hâtives et injustifiées, ont toujours exprimé la conviction que la solution de ce problème doit s’inspirer du respect de la personne humaine, de la fidélité aux engagements de l’État, des exigences de la justice dont la France n’a jamais cessé d’être le champion. Ils n’en sont que plus émus par l’application rigoureuse d’une loi qui, frappant exclusivement les Israélites, frappe indistinctement les Israélites français depuis de longues générations et souvent depuis des siècles et les naturalisés d’hier »19.
13Cette restriction peut paraître d’autant plus surprenante que, au même moment, une organisation protestante apporte son aide aux Juifs.
Les secours dans les camps
14En effet, depuis plusieurs mois déjà, les Juifs sont assistés, non pas en tant que tels, mais parce qu’ils appartiennent au groupe plus vaste des internés. Bien avant les lois raciales, les camps sont en fait des camps juifs20. Les internés reçoivent l’aide de catholiques en particulier des aumôniers, mais surtout de protestants par l’intermédiaire du Comité intermouvements d’aide aux évacués, ou CIMADE. Créée par des Mouvements de jeunesse protestants, les Éclaireurs et éclaireuses unionistes, les Unions chrétiennes de jeunes gens et de jeunes filles et la Fédération des associations chrétiennes d’étudiants pour venir en aide aux repliés d’Alsace-Lorraine évacués de la zone frontière en septembre 1939, vers des départements méridionaux, cette organisation n’a plus de fonction lorsque, après mai-juin 1940, ces réfugiés rentrent chez eux ou se dispersent pour trouver du travail. La CIMADE décide alors de pénétrer dans les camps.
15Madeleine Barot a expliqué les buts et les étapes de l’action de la CIMADE :
« Les arrestations et les camps d’internement se multipliaient. Tout racisme est inadmissible du point de vue chrétien. Il fallait donner des signes tangibles de cette conviction, alerter l’opinion publique, protester auprès des autorités responsables, mobiliser les forces protestantes et surtout aider ceux qui souffraient le plus »21.
16Gurs est alors le camp le plus important en zone sud. L’installation de la CIMADE dans ce camp servira à la fois d’essai et de modèle pour les autres camps :
« Les Unions chrétiennes de jeunes gens (YMCA) pourtant connues pour leur travail auprès des prisonniers de guerre et des internés civils pendant la Première Guerre mondiale s’étaient vu interdire les camps par Vichy. Nous décidâmes donc de ne pas faire de demande officielle, mais d’aller à deux dans un village voisin et de nous faire admettre peu à peu »22.
17Les premiers contacts sont alors établis avec les internés protestants ; la présence de la CIMADE dans le camp de Gurs nécessite un travail et une vie en équipe. Dès 1941, les camps se multiplient ; de nouvelles équipes se créent et s’installent à Rivesaltes, Brens, Le Récébédou, Nexon « utilisant le précédent de Gurs sans que jamais leur situation fût tout à fait claire »23. Pourtant, depuis le mois de février, Marcel Peyrouton a déclaré accepter désormais le concours d’associations étrangères de secours pour le ravitaillement et la gestion des camps ; ces œuvres privées qui appartiennent au Comité de Nîmes sont américaines (les Quakers, le Joint...) ou helvétiques (Croix-Rouge, Secours suisse).
18L’aide apportée par la CIMADE et par les autres organisations est à la fois morale et matérielle. Sur le plan matériel, elle se révèle indispensable, car le soutien financier de l’État est tout à fait insuffisant pour assurer la survie des internés : l’hiver 1940-1941 fut terrible dans tous les centres, en raison du froid, de l’insuffisance de la nourriture, du manque d’hygiène. La plupart des internés, nous le savons, souffrent de très grandes carences alimentaires. Jeanne Merle d’Aubigné se souvient comment, avec les fonds du Conseil œcuménique de Genève que lui envoyait M. Barot, elle parcourait à bicyclette les villages avoisinant Gurs pour acheter des vivres. Mais les difficultés ambiantes, le marché noir font grimper les prix : le curé en appelle alors à ses ouailles du haut de la chaire... et les prix sont ramenés à de plus justes proportions24. Sur une plus large échelle, c’est le Secours Quaker qui fait venir du ravitaillement dans les camps.
19Les conditions d’hébergement étant particulièrement dures, les diverses associations de secours et les aumôniers font aussi parvenir aux internés des vêtements chauds, chandails ou chaussettes, des couvertures, de la layette.
20Mais l’assistance se veut aussi morale et spirituelle : des bibliothèques fonctionnent, des conférences et des auditions se déroulent dans le cadre sordide des baraquements. Des cercles d’études bibliques réunissent les diverses communautés : « Les textes de l’Ancien Testament, en particulier les Prophètes et les Psaumes, étaient les plus connus de tous. C’était un lien entre nous et les Juifs, qui venaient à l’un ou l’autre de nos cultes ou aux études bibliques. Il y eut même des rabbins participant à telle série d’études bibliques, qui nous faisaient partager leur compréhension des textes »25. Cette vie spirituelle et culturelle n’est pas sans poser des problèmes, en particulier celui des baptêmes : par exemple, à Gurs, au début de l’été 1942, des Juifs de plus en plus nombreux demandent le baptême, espérant éviter les déportations ; le grand rabbin demande alors avec insistance d’éviter les conversions qui ne s’appuient pas sur des convictions profondes.
21L’aide matérielle et spirituelle fournie aux Juifs par les organisations confessionnelles de secours se met en place également dans les centres d’accueil. Ouverts par des œuvres, l’UGIF ou les Églises, ces centres n’ont pas le même statut que les camps ; ceux qu’ils reçoivent sont en principe protégés par l’internement. À Villemur (Haute-Garonne), à Cazaubon (Gers), à Lourdes (Hautes-Pyrénées) existent de tels centres ; celui de Vabre (Tarn) héberge, sous l’autorité de la CIMADE, et grâce à l’aide financière de la Suède et du Conseil œcuménique, des vieillards, des femmes ayant de jeunes enfants et des malades. « Ce fut une étape joyeuse malgré la pauvreté des moyens dont nous disposions » souligne Madeleine Barot26, pourtant la situation des centres d’accueil est ambiguë, et la frontière qui les sépare des camps d’internement très floue, comme vont le montrer les événements de l’été 1942.
22Les difficultés de l’hiver 1941, le retour de Pierre Laval aux affaires (16 avril 1942), l’annonce de la relève (22 juin 1942) provoquent la perte des illusions de bon nombre de Français. Mais ce sont surtout les grandes rafles de l’été 1942 qui entraînent des réactions officielles et font sortir notamment les autorités religieuses de leur réserve.
La force du verbe
23Alors que, depuis les premières mesures visant les Juifs, l’Église catholique est restée paralysée, les arrestations massives de Juifs à Paris, puis en août, la livraison des Juifs étrangers de zone non occupée à l’Allemagne par les autorités de Vichy suscitent des protestations. Elles émanent d’abord de la zone occupée où cardinaux et archevêques, quelques jours après la rafle du Vel’ d’Hiv, rédigent une brève note remise au maréchal Pétain par Mgr Chappoulie ; affirmant « les droits imprescriptibles de la conscience humaine », la missive invite le gouvernement à respecter « les exigences de la justice et les droits de la charité ». Il s’agit là d’une initiative privée, comme le sont aussi la lettre adressée au maréchal au nom de tous les archevêques de la zone non occupée par le cardinal Gerlier, les démarches du nonce V. Valeri auprès de Pierre Laval (23 août) et celles de Mgr Chappoulie. Le 20 août déjà, le pasteur Boegner a fait parvenir un message au maréchal Pétain, diffusé ensuite par les radios américaines et britanniques et non dépourvu d’ambiguïtés :
« [...] Le christianisme avait, jusqu’à présent, inspiré aux nations, en France en particulier, le respect du droit d’asile. Les Églises chrétiennes, quelles que soient les diversités de leur confession, seraient infidèles à leur vocation première si elles n’élevaient, devant l’abandon de ce principe, leur douloureuses protestations I...1 La « livraison » de ces malheureux étrangers s’est effectuée en maints endroits dans des conditions d’inhumanité qui ont révolté la conscience des plus endurcis et arraché des larmes aux témoins de ces mesures. Parqués dans des wagons de marchandises, sans aucun souci d’hygiène, les étrangers désignés pour partir ont été traités comme du bétail [...] Le conseil de la Fédération protestante en appelle à votre haute autorité pour que des méthodes entièrement différentes soient introduites dans le traitement des étrangers juifs de race, chrétiens ou non de religion, dont la livraison a été consentie. »27
24Ce sont par contre des protestations publiques que font entendre deux archevêques et un évêque du Midi toulousain : Mgr Saliège à Toulouse, Théas à Montauban, Moussaron à Albi28. Le premier, Jules-Géraud Saliège, archevêque de Toulouse, fait lire une lettre contre les persécutions datée du 23 août 1942, texte rédigé en grande partie par ses collaborateurs Mgr de Courrèges et le chanoine Jèze :
« Il y a une morale chrétienne. Il y a une morale humaine qui impose des devoirs et reconnaît des droits. Ces devoirs et ces droits tiennent de la nature humaine. Ils viennent de Dieu. On ne peut les violer. Il n’est au pouvoir d’aucun mortel de les supprimer. Que des enfants, que des femmes, des pères et des mères soient traités comme un vil troupeau, que des membres d’une même famille soient séparés les uns des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle. Pourquoi le droit d’asile de nos Églises n’existe-t-il plus ? Pourquoi sommes-nous des vaincus ? Seigneur ayez pitié de nous. Notre Dame priez pour la France. Dans notre diocèse des scènes d’épouvante ont lieu dans les camps de Noé et de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes et contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos frères comme tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier. France, patrie bien-aimée, France qui porte dans la conscience de tous les enfants la tradition du respect de la personne humaine, France chevaleresque et généreuse, je n’en doute pas, tu n’es pas responsable de ces horreurs. »29
25Le préfet régional Cheneaux de Leyritz considère la publication de ce texte comme un « acte d’indiscipline » et s’efforce d’en arrêter la diffusion (rapport du 3 septembre 1942).
26Rédigée quelques jours plus tard, le 26 août, la protestation de Pierre-Marie Théas a été distribuée par les soins d’un petit groupe de catholiques animé par Mlle M.R. Gineste. Celle-ci, sachant que la poste ne distribuerait pas le texte de la déclaration, parcourut en toute hâte le département à bicyclette afin de distribuer la lettre de l’évêque à tous les curés du Tarn-et-Garonne — sauf à la poignée d’entre eux qu’elle jugeait peu sûrs —. Les prêtres du diocèse lurent donc un texte très ferme où l’évêque de Montauban n’hésitait pas à s’engager personnellement :
« Des scènes douloureuses et parfois horribles se déroulent en France, sans que la France en soit responsable.
À Paris, par dizaines de milliers, des Juifs ont été traités avec la plus sauvage barbarie. Et voici que dans nos régions on assiste à un spectacle navrant ; des familles sont disloquées, des hommes et des femmes sont traités comme un vil troupeau, et envoyés vers une destination inconnue, avec la perspective des plus graves dangers.
Je fais entendre la protestation indignée de la conscience chrétienne et je proclame que tous les hommes, aryens ou non aryens, sont frères parce que créés par le même Dieu ; que tous les hommes quelle que soit leur race ou leur religion, ont droit au respect des individus et des États.
Or les mesures antisémites actuelles sont un mépris de la dignité humaine, une violation des droits les plus sacrés de la personne et de la famille.
Que Dieu console et fortifie ceux qui sont iniquement persécutés. Qu’il accorde au monde la paix véritable et durable, fondée sur la justice et la charité. »30
27La proximité des dates de publication des deux lettres épiscopales peut laisser supposer une concertation entre l’archevêque de Toulouse et l’évêque de Montauban. Le style des protestations est toutefois bien différent : les phrases courtes et percutantes de Mgr Saliège ont une grande vigueur ; « néanmoins, il y a chez Mgr Théas une fermeté doctrinale dans le raisonnement et même des mots d’une précision qu’on cherchera en vain dans les autres actes épiscopaux »31. L’influence de Toulouse sur Montauban ne saurait toutefois être niée : La Semaine catholique, bulletin religieux du diocèse de Toulouse, est lue dans toute la zone non occupée ; les déclarations de Mgr Saliège et ses « menus propos » sont repris dans la plupart des Semaines religieuses de la région. Mgr Bruno de Solages, recteur de l’Institut catholique de Toulouse, exerce son autorité spirituelle sur ce que le Midi toulousain peut compter de démocrates-chrétiens et de catholiques sociaux ; et ce sont des prêtres de ce courant social qui animent les activités de résistance dans le diocèse de Montauban32. Le diocèse de Montauban, celui de Toulouse, sont alors activement travaillés par les équipes qui diffusent Témoignage chrétien ; la publication clandestine est distribuée à Toulouse par Marie-Hélène Dupeyroux et ses amis, mais aussi à Tarbes (par les soins du journaliste Pierre Dumas), à Agen (où ils arrivent chez Georges Maury), à Foix (grâce à l’abbé Blanchebarbe, Lorrain réfugié), à Albi (où l’abbé de Villeneuve reçoit les cahiers)33. Or le journal vient de publier un numéro double contre l’antisémitisme nazi.
28Enfin, on peut se demander s’il ne faut pas voir, derrière les protestations épiscopales régionales une présence lyonnaise. Depuis longtemps déjà, à Lyon, le père de Lubac souffrait du silence des autorités religieuses françaises ; il écrivait dans une lettre adressée à ses supérieurs :
« Ne nous y trompons pas : l’antisémitisme actuel n’est pas celui qu’ont pu connaître nos pères ; outre ce qu’il a de dégradant pour ceux qui s’y abandonnent, il est déjà de l’antichristianisme. C’est à la Bible qu’on en veut, c’est à l’Évangile aussi bien qu’à l’Ancien Testament, c’est-à-dire à l’universalisme de l’Église »34.
29Le père de Lubac est justement venu à Toulouse au mois d’août 1942, à la demande du père Chaillet, rédacteur clandestin de Témoignage chrétien, pour rencontrer Mgr Saliège35. Dans un ouvrage récent, Henri de Lubac a rappelé que le père Chaillet lui demanda de visiter l’archevêque de Toulouse, mais sur la sollicitation de l’archevêque de Lyon, Pierre Gerlier, ce dernier souhaitant préparer une concertation de l’épiscopat français pour donner plus d’efficacité à une protestation publique36. La protestation de J.G. Saliège ne serait donc plus le cri solitaire d’un prélat rebelle, mais une action concertée dont l’initiative reviendrait à Pierre Gerlier37.
30Le courage et la lucidité de Mgr Saliège n’en font pas un gaulliste. En effet, devant les réactions du préfet et l’article du Grand Écho du Midi qui critiquait sa déclaration, le prélat toulousain tint à préciser qu’il demeurait fidèle au maréchal. Il publia en effet dans la Semaine catholique de Toulouse (27 septembre 1942) un texte où il déplorait l’usage politique qui avait été fait de la lettre pastorale. Il affirmait qu’il demeurait fidèle au gouvernement et concluait que « l’affirmation d’un principe chrétien n’a jamais impliqué la négation d’un autre principe chrétien ». D’autre part l’attitude fraternelle envers les Juifs d’un grand nombre de prêtres du diocèse de Toulouse ne doit pas faire croire que l’archevêque était approuvé par l’intégralité de son clergé. Certains ecclésiastiques de Haute-Garonne étaient très réticents devant le philosémitisme de leur évêque. Toutefois le cas de l’abbé Sorel, collaborationniste extrême, capable de se joindre aux partisans de Bucard pour présenter un film nazi, est sans doute tout à fait exceptionnel.
31La réaction des protestants se fait attendre un peu plus longtemps, et le pasteur Boegner s’en est expliqué :
« À l’assemblée du musée du Désert, nos collègues m’avaient pressé de faire en sorte que la voix des Églises protestantes fût entendue sans retard. Mais, outre qu’il est moins facile à un corps de quatorze membres de se réunir pour parler à l’Église ou au nom de l’Église qu’à un évêque de publier un mandement, j’ai toujours pensé qu’avant de protester devant nos fidèles ou la nation contre les fautes d’un gouvernement, il fallait aller dire d’abord à qui de droit ce que nous pensions. »38
32Le pasteur Boegner a donc poursuivi ses démarches auprès de Pierre Laval, auprès de l’amiral Platon... Le 22 septembre toutefois, malgré les efforts que font parfois les autorités préfectorales pour saisir le document, le message de protestation du Conseil national de l’Église réformée est lu en chaire par un bon nombre de pasteurs :
« Une Église chrétienne aurait perdu son âme et sa raison d’être si elle ne maintenait, pour la sauvegarde même de la nation au sein de laquelle Dieu l’a placée, la loi divine au-dessus de toutes les contingences humaines. Et la loi divine n’admet pas que des familles voulues de Dieu soient brisées, des enfants séparés des mères, le droit d’asile et sa pitié méconnus, le respect de la personne humaine transgressé, et des êtres sans défense livrés à un destin tragique.
Quels que soient les problèmes que l’Église n’a pas à résoudre, mais dont il est de son devoir d’affirmer qu’ils ne sauraient être résolus contre la loi de Dieu, l’Évangile nous ordonne de considérer tous les hommes sans exception comme des frères pour qui le Sauveur est mort en croix. Comment l’Église pourrait-elle jamais oublier d’ailleurs que c’est dans le peuple dont les Juifs sont les enfants selon la chair qu’est né le Sauveur du monde ? ».
Le virage de l’opinion (été-automne 1942)
33Quoi qu’il en soit de leur genèse, les protestations de J.G. Saliège et de P.M. Théas ont, alors qu’elles sont diffusées sous forme de tracts ou à la radio de Londres, un grand retentissement sur l’opinion. L’opinion ? — une province de l’histoire difficile à explorer en raison de sa complexité, et qui exige la mise au point de méthodes spécifiques. Mais grâce aux travaux de P. Laborie, nous disposons désormais dans ce domaine, de bases sûres et de résultats solides confirmés par les documents que nous avons consultés39. Deux points essentiels peuvent être précisés : l’évolution de l’état d’esprit à l’égard du régime et l’apparition de la compassion envers les Juifs, qui varient tantôt dans le même sens, tantôt en sens contraire.
34L’indifférence envers les Juifs prédominait largement avant les grandes déportations. On peut néanmoins remarquer qu’un certain antisémitisme s’exprimait dans la population régionale au cours des années 1940, 1941 et dans les premiers mois de 1942. Les textes du CGQJ en font état, souvent fondés sur le contrôle postal et téléphonique40. Les RG, les rapports des préfets vont dans le même sens41. Cette méfiance se fonde avant tout sur le stéréotype classique du Sémite, homme d’argent aux doigts crochus. Une autre image intervient : celle d’un groupe mystérieux, insaisissable qui agit dans l’ombre de manière concertée. Ces préjugés très anciens sont ravivés par les difficultés du ravitaillement et la hausse des prix. Les Juifs sont donc accusés de faire du marché noir et même d’être les responsables majeurs du trafic illicite. Certains leur attribuent aussi la flambée des prix, en particulier autour des camps, où la demande accrue de produits alimentaires entraînée par leur présence, assortie de moyens financiers prétendument importants, seraient à l’origine de l’inflation. En outre, dans les centres de résidence assignée comme Luchon, on met en cause leurs loisirs forcés : les Sémites ne font rien, alors que les Aryens travaillent42 ! Les agents de l’antisémitisme d’État se font naturellement les échos d’un état d’esprit dont ils se félicitent, et ils tentent, sans grands moyens, de l’utiliser dans leur propagande.
35Cet accord temporaire de l’opinion (ou plutôt d’une partie de celle-ci) avec les thèmes de Vichy ne signifie pas que le régime est accepté. En effet, après l’enthousiasme du début, le chef de l’État sent se lever un « vent mauvais » dénoncé par son discours de 194143. C’est au cours de cette année 1941 que « le malentendu » entre Vichy et les Français commence à s’épaissir. Détachement envers la collaboration et les notables du régime épargnant le maréchal en qui beaucoup conservent confiance et respect.
36Ce désaccord naissant entre Vichy et la population s’accroît brusquement au moment des déportations de Juifs de l’été 1942 : les déclarations des évêques sont alors le facteur décisif d’un véritable virage. L’opinion publique se montre particulièrement troublée car les réactions épiscopales « brisent la complicité du silence ». Elles s’ajoutent à l’émotion provoquée par le spectacle des rafles, des transports, des séparations entre enfants et parents ou par les images et les récits qui en sont répandus. La population est choquée, souvent bouleversée44 : quels que soient les torts qu’on leur attribuait, les malheureuses familles juives ne méritaient pas un sort aussi atroce.
37Des consciences assoupies se réveillent, des réactions courageuses se produisent même dans des cercles jusque là fidèles vis-à-vis du régime. Ainsi le directeur de La Dépêche, Maurice Sarraut, refuse-t-il de publier dans son journal un article rappelant les traditions antisémites de l’Église catholique45. Ce texte, d’inspiration officielle qui tentait de justifier les déportations fut en revanche utilisé dans des journaux régionaux de moindre diffusion46.
38Les fonctionnaires chargés de tâter le pouls de la population se rendent compte très vite de l’ampleur du phénomène et les rapports des préfets s’en font l’écho. Les uns tentent d’atténuer le constat pour ne pas déplaire à l’autorité (Tarn), d’autres sont d’une franchise totale (Tarn-et-Garonne, préfecture régionale). Les conséquences politiques de ce choc seront considérables et temporairement bénéfiques pour les persécutés, nous les évoquerons dans le chapitre suivant. Il est toutefois vraisemblable que l’immense compassion suscitée par les malheurs des Juifs, s’effaça un peu en 1943 et 1944, car les Français furent alors sollicités par d’autres problèmes : le STO au premier chef. Mais la mutation de 1942 suscita chez beaucoup une attitude fraternellement efficace qui se maintint jusqu’à la Libération. On la rencontre en particulier chez ceux qui se situent dans la mouvance des Églises chrétiennes.
Les essais de sauvetage des Juifs
39À la suite des grandes rafles et des premières déportations, les organisations confessionnelles de secours poursuivent leur action matérielle et spirituelle dans les camps. Mais les données du problème ont désormais complètement changé : il faut éviter absolument l’envoi vers l’Allemagne des Juifs de nationalité étrangère résidant dans le Midi toulousain. Les centres d’accueil sont donc, chaque fois que c’est possible, évacués, et leurs membres dispersés. On s’efforce surtout de faire sortir des convois de déportation tous ceux qui peuvent avoir des motifs d’exemption, ce qui n’est pas sans poser de douloureux cas de conscience, par exemple pour les jeunes militants de la CIMADE :
« Dans un premier temps, les équipes installées dans les camps jouèrent le rôle qu’on leur assignait, mais étaient de plus en plus écrasées par l’ambiguïté de la situation. Réunir des dossiers, interroger, plaider pour les cas d’exception, c’était comme accepter, être complice de ce qui se passait. Arracher l’un au départ signifiait y condamner un autre. »47
40Des prêtres tentent aussi de faire libérer des internés, tel le chanoine Freycinet de Carmaux au camp de Saint-Sulpice48. À Albi, l’abbé de Villeneuve affuble un dentiste juif allemand d’une soutane pour lui permettre de fuir après son évasion du camp de Bram49.
41Protéger les Juifs de la déportation implique de les cacher : couvents, écoles et foyers constituent des lieux privilégiés. Le rôle de certains membres de la hiérarchie catholique s’avère alors déterminant. Le message de protestation de Jules Géraud Saliège incite le père de Lubac et Charles Lederman, directeur du centre médico-social de l’OSE de Lyon, à organiser une rencontre entre l’archevêque de Toulouse et Georges Garel, afin qu’ils réfléchissent au sauvetage des enfants juifs. Grâce à la recommandation de Mgr Saliège, des internats, des établissements religieux ou laïques ouvrent leurs portes et offrent une cachette sûre, en Haute-Garonne et dans les département limitrophes, où d’autres évêques apportent leur soutien à l’opération, par exemple, Mgr Théas ou Mgr Moussaron, à Albi ; ce dernier accueille des Allemands, persécutés raciaux. À Toulouse, un foyer fondé par un jésuite, destiné en principe aux jeunes délinquants, reçoit pour des séjours plus ou moins longs, une trentaine de jeunes Juifs, avant de les faire passer en Espagne50. La bibliothèque de l’Institut catholique permet à Ernst Kamitzer de trouver une retraite sûre, Georges Friedman, Vladimir Jankelevitch s’y côtoient. Dans le diocèse de Montauban, des communautés ont accepté de secourir des Juifs, ainsi par exemple les sœurs de l’Ange gardien de la Molle, les sœurs du « Refuge », les Dames noires de Saint-Maur, les Bénédictines de Mas-Grenier ; à la maison de retraite de la Bastiolle, les Jésuites hébergent jusqu’à la Libération deux Juives ; Léo Hamon y séjourne. Selon le récit de Michel Debré, l’évêque de Montauban, Pierre-Marie Théas, couvre « tous les religieux qui aidaient réfugiés et pourchassés... Ainsi du couvent de Grisolles où pendant quelques mois dramatiques vécut ma grand-mère, fille et femme de grand rabbin »51. On pourrait multiplier les cas semblables. Les moyens mis en œuvre pour faire disparaître quelques temps les enfants touchent au spectaculaire à Saint-Val, petit village du Gers : au centre des Gahets, d’abord simple relais vers les établissements religieux, puis véritable lieu de refuge, on imagine, lors des alertes, de faire grimper les enfants dans des nacelles suspendues aux branches des chênes, à plusieurs dizaines de mètres du sol52 ! Il peut arriver aussi que des Juifs soient accueillis là où les autorités n’auraient pu avoir l’idée de venir les appréhender : Mgr Choquet évêque de Tarbes et Lourdes — qui pourtant se montre pétainiste et même vichyssois jusqu’à la Libération — cache un Juif au châlet épiscopal de la cité mariale. Il faut ajouter enfin que si des communautés acceptent de participer à la protection des Juifs, des familles le font aussi53 : à la campagne, on peut avoir pour quelque temps un jeune ouvrier agricole supplémentaire, ou un gamin dont les parents vivent en ville, sur lesquels les voisins ne posent pas trop de questions...
42Héberger des Juifs pose bien des problèmes et l’entraide est souvent nécessaire entre catholiques et protestants : à Montauban, P. M. Théas demande au docteur Simone Schmidt (de religion réformée) d’aller chercher des enfants juifs à la gare et de les conduire dans un couvent de la ville54. Mais la principale difficulté reste toutefois d’ordre religieux ou spirituel : il s’agit du prosélytisme chrétien sur les enfants juifs, souvent facilité par leur intégration aux institutions chrétiennes. À Toulouse, le père Braun, aumônier général adjoint des camps d’internement et des formations de travailleurs étrangers, refuse que l’on dispense un enseignement chrétien aux enfants juifs — suivant en cela la décision des évêques qui interdisent le baptême d’enfants juifs sans l’accord des parents —55. Il est à regretter que d’autres n’aient pas eu une telle rigueur... Un problème du même ordre s’est présenté au directeur d’un internat protestant qui a accepté de recevoir de jeunes Juifs, mais à condition qu’ils se convertissent au protestantisme ; ils n’eurent pas à le faire, ayant trouvé un autre refuge56.
43Cacher, héberger, ne suffit pas ; il faut très vite préserver ceux qui risquent à tout moment d’être interpellés. Des certificats de baptême sont alors établis, où identité, lieu de naissance, de résidence sont faux. L’abbé Bourdette, professeur à Saint-Pé de Bigorre (Hautes-Pyrénées), falsifie les registres57. On fabrique aussi des tickets d’alimentation, des laissez-passer, des cartes d’identité : ainsi à l’automne 1943, un certain monsieur D, venu de Lyon, livre à l’évêché de Montauban, une sorte de planche à pain, qui recèle de faux cachets58 : dans les bureaux du secrétariat social de la ville, la fabrication des « faux » prend alors des proportions inconnues jusque-là. La meilleure solution consiste à faire passer ceux qui sont menacés en Suisse ou en Espagne. La filière suisse est privilégiée, pour des raisons religieuses évidentes, par les protestants : de nombreux récits montrent que des enfants ou des adultes cachés quelques mois dans le Midi toulousain sont ensuite évacués — le plus souvent accompagnés par des assistantes sociales, vraies ou supposées — vers la frontière helvétique59. Les catholiques utilisent plutôt la filière espagnole : la région dispose de nombreux points de passage possibles, dans les Hautes-Pyrénées, la Haute-Garonne, l’Ariège. Des prêtres servent parfois de passeurs tel l’abbé Samaran, curé d’Estaing (Hautes-Pyrénées)60.
44Dans la montagne tarnaise où protestants et catholiques sont mêlés, les Juifs reçurent un accueil particulièrement chaleureux. De nombreuses familles fuyant Toulouse ou Lacaune (centre de résidence assignée) s’y fixèrent longuement y trouvant un abri... et un ravitaillement abondant fourni avec libéralité, ce qui, à l’époque, n’était pas négligeable. Dans les villages, comme Saint-Pierre-de-Trivisy, dans les bourgades comme Vabre, les familles juives étaient immédiatement connues de la population ; elles ne furent jamais dénoncées. Bien au contraire une complicité générale s’établit entre Tarnais d’occasion et autochtones dans une commune détestation de l’occupant. Le bourg de Vabre, où la CIMADE ouvrit discrètement un centre d’accueil, a un peu joué, avec moins d’ampleur, le même rôle de refuge que le Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire, haut lieu de la Résistance à l’antisémitisme. Parmi de nombreux noms qu’il faudrait citer, choisissons celui du maire de Vabre, Pierre Gourc, huguenot fervent, très attaché aux principes républicains, qui conserva son poste de 1927 à 1952 ; Gourc était un peu le chef d’orchestre discret qui organisait avec autorité le camouflage des clandestins, leur fournissant cartes d’identité et cartes d’alimentation, comme il le fit pour les réfractaires au STO. Les Juifs qui trouvèrent une cachette à Vabre ou dans ses environs, se refusent aujourd’hui à faire une distinction entre catholiques et protestants qui se montrèrent également fraternels avec eux. Il n’est pas douteux, toutefois, que la présence des réformés a joué un rôle moteur dans la naissance d’un état d’esprit favorable aux persécutés de Vichy. Cultivant de génération en génération le souvenir des persécutions subies par leurs ancêtres sous la monarchie, les protestants se sentaient d’emblée des affinités avec les Juifs, à qui les liait aussi leur familiarité avec l’Ancien Testament, entretenue par la prédication pastorale. Les calvinistes du Tarn entraînèrent avec eux non seulement leurs voisins catholiques, mais aussi les fonctionnaires venus de l’extérieur, les gendarmes et même, selon quelques témoins, les notables pétainistes61.
45Cacher des Juifs, leur fournir des faux papiers, les faire passer à l’étranger, autant d’actes silencieux, spectaculaires ou non, collectifs ou individuels, qui se poursuivent dans le Midi toulousain jusqu’à la Libération : certains chrétiens, catholiques ou protestants, se sont consacrés à cette tâche de sauvetage, en tant que chrétiens. Il est bien difficile de déterminer leur nombre, et de préciser dans quelle mesure ils séparent, dans leur activité clandestine, celle qu’ils mènent en tant que chrétiens de celle qu’ils accomplissent en tant que résistants, ou en tant qu’hommes soucieux de leur liberté. Il est tout aussi délicat de déterminer leurs motivations exactes, car nous avons déjà souligné combien l’aide aux Juifs peut être ambiguë, sauvant les uns en condamnant les autres, n’étant pas toujours exempte de prosélytisme. Il serait injuste enfin de dresser une sorte de palmarès ; pourtant la Haute-Garonne, le Tarn, le Tarn-et-Garonne, le Gers semblent s’être montrés dynamiques dans leur entreprise de secours aux Juifs.
46Passée l’émotion des grandes rafles de l’été 1942, et bien que l’action de sauvetage se soit poursuivie dans l’ombre jusqu’à la fin de l’été 1944, les catholiques et les protestants, simples fidèles ou autorités ecclésiastiques, sont confrontés à d’autres problèmes : les difficultés de plus en plus grandes de ravitaillement, la lourdeur de l’Occupation, le problème du Service du travail obligatoire. Deux attitudes coexistent alors vis-à-vis des Juifs : l’indifférence renaît, on l’a déjà dit, chez le plus grand nombre, inséparable d’un certain attentisme qui conduit chacun à s’occuper de ses problèmes personnels... mais l’indifférence peut aussi signifier silence, donc non-dénonciation. Pour une minorité au contraire, le soutien apporté aux Juifs ne faiblit pas, mais il se distingue de moins en moins d’une résistance globale : « Il devenait de plus en plus clair pour nous, explique Madeleine Barot, qu’il ne peut y avoir d’action neutre, apolitique, pour un chrétien qui se veut pleinement engagé dans le milieu où il vit. Si les structures de la société ne permettent pas à tous de vivre, et condamnent certains à la mort brutale ou lente, ces structures sont mauvaises et doivent être changées, ou comme pis-aller provisoire, ignorées, tournées »62.
47Pourquoi de jeunes protestants, inspirés par les écrits de K. Barth, des adeptes du christianisme social, qu’ils soient membres de l’Église réformée ou catholique, se sont-ils engagés ainsi en faveur des Juifs dans le Midi toulousain ? Comme ailleurs en France ou dans l’Europe occupée par les forces hitlériennes, ils ont senti leurs convictions menacées par le national-socialisme et leur action s’est enracinée « dans une pitié profondément évangélique, dans une grande exigence spirituelle »63. Quant à la hiérarchie, nul ne peut mieux expliquer les interventions que Pierre-Marie Théas affirmant à la Libération : « [...] J’ai simplement accompli un devoir de fidélité chrétienne et française. La Sainte Écriture condamne les chefs qui sont des “chiens muets qui ne savent pas aboyer” » (Isaïe, LVI, 10). Je n’ai pas voulu être un chien muet, devant le danger, j’ai aboyé. Mon silence eût été trahison »64.
***
48Les événements de 1940-1944 ont été un extraordinaire révélateur, a-t-on dit, de ce que l’homme porte en lui pour le meilleur et pour le pire. L’homme, et aussi le chrétien, qu’il soit catholique ou protestant, pratiquant ou non.
49Ce bref tableau de l’attitude des Églises chrétiennes face à la persécution des Juifs dans le Midi toulousain permet de dégager quelques éléments ; les réactions ont suivi un rythme varié tout au long de la période considérée : l’aide matérielle et morale aux victimes de la persécution raciale de Vichy paraît constante, née dès l’arrivée des premiers réfugiés et poursuivie jusqu’à la Libération. Les grandes rafles et les premiers convois de déportation, ont fait l’effet d’une onde de choc : l’été 1942 constitue donc une rupture. Ces réactions se sont produites « à plusieurs vitesses » : des prêtres, des pasteurs, des fidèles sont intervenus tout de suite et longtemps ; les autorités ecclésiastiques, même si elles avaient déjà exprimé à leurs proches une certaine réprobation, ont attendu août 1942 pour briser publiquement le mur du silence. Le Midi toulousain s’est-il distingué des autres régions françaises ? Le grand centre de la résistance chrétienne fut la ville de Lyon et la région qui l’entoure ; mais au moins pour ce qui est des protestations épiscopales, le Midi toulousain a eu un rôle capital : cinq membres de la hiérarchie catholique ont élevé la voix contre la persécution des Juifs, trois d’entre eux se trouvaient à la tête de diocèses de la région. Par ailleurs, il convient de ne pas trop majorer le secours accordé aux Juifs, qui fut réel, mais ne saurait évidemment faire oublier les milliers de déportés que l’on ne revit jamais. Il ne faut pas non plus oublier que certains prélats, l’archevêque d’Auch, l’évêque de Pamiers demeurèrent silencieux et que l’évêque de Cahors afficha jusqu’en 1944 des convictions pétainistes très marquées.
50Par delà ces constatations très simples, il convient de souligner enfin que l’aide apportée aux Juifs a cristallisé — alors que la vie religieuse prenait une allure très démonstrative, comme l’indique le développement dans l’Église catholique du thème de la croisade du Grand retour — une foi profonde, intériorisée, s’exprimant dans toute la vie de certains catholiques et protestants :
« Au départ, écrit l’un d’entre eux, nous croyions aider des êtres dans la détresse et nous avons découvert que c’étaient eux qui venaient à notre secours, nous obligeant, par leur présence et leur attente inéluctable, à sortir de nous-mêmes, de nos conforts et de nos lâchetés, de nos silences et de nos complicités. »65
51Ce renouveau de la foi, cet engagement en faveur des Juifs de certains chrétiens qui jusque là se côtoyaient peu, a aussi d’une certaine manière, ouvert la voie à l’œcuménisme, même si les premières tentatives, par exemple à Montauban aux lendemains de la Libération, ont vite avorté.
Notes de bas de page
1 Paul Christophe, 1939-1940, Les Catholiques devant la guerre, Éditions Ouvrières, 1989.
2 Fondées en novembre 1938 au Deuxième congrès du journal l’Aube.
3 Jean-Louis Clément, Mgr Saliège, archevêque de Toulouse, 1929-1956, thèse de doctorat, Paris IV, 1990, publiée chez Beauchesne, 1994.
4 Publiée en mars 1937.
5 Pierre Bolle, « L’influence du barthisme dans le protestantisme français », in Églises et chrétiens dans la Seconde Guerre mondiale, CNRS, PUL, 1982, pp. 59-67.
6 Sylvaine Guinle-Lorinet, Pierre-Marie Théas, un évêque à la rencontre du xxe siècle, AGMGRHI, Tarbes, Toulouse, 1993.
7 La Croix, 28 juin 1940.
8 Jean-Louis Clément, op. cit., et Semaine catholique de Toulouse.
9 François Delpech, « L’épiscopat et les Juifs d’après les procès verbaux de l’aca », in Églises et chrétiens..., op. cit., pp. 281-293.
10 Ibid.
11 Jean-Louis Clément, op. cit.
12 Recueil de l’Académie de Montauban, 1941.
13 Mgr de Solages, Discours interdits, Spes, 1945.
14 Mgr de Solages, op. cit., p. 87.
15 Jean-Louis Clément, op. cit., p. 265 et SC de Toulouse, 29 juin 1941.
16 Ibid., p. 265.
17 Pasteur Boegner, « Le combat de l’Église à Vichy », in Les Clandestins de Dieu, cimade 1939-1945, Labor et Fidès, 1989.
18 Pierre Bolle, « Les protestants et leurs Églises », in G. Wellers, A. Kaspi et S. Klarsfeld, La France et la question juive, 1940-1944, S. Messinger, 1981.
19 Ibid.
20 Voir à ce propos, dans cet ouvrage, le chapitre d’Éric Malo concernant les camps.
21 Madeleine Barot, in Les Clandestins de Dieu, op. cit., p. 31.
22 Ibid.
23 Ibid.
24 Jeanne Merle d’Aubigné, in Les Clandestins de Dieu, op. cit., pp. 62-76.
25 Ibid.
26 Madeleine Barot, in Les clandestins de Dieu, op. cit.
27 Pasteur Boegner, in Les clandestins de Dieu, op. cit.
28 La plupart des lettres épiscopales furent publiées à la Libération dans La Documentation catholique, (janvier 1945).
29 Témoignage de Mlle Gineste.
30 L’original de cette lettre est toujours en possession de Mlle Gineste.
31 André Latreille, « Un évêque résistant, Mgr Pierre-Marie Théas, évêque de Montauban, 1940-1946 », Revue d’histoire ecclésiastique, vol. LXXV, no 2, Louvain, 1980, pp. 284-321.
32 Pascal Caïla, Le Clergé catholique du diocèse de Montauban pendant la Seconde Guerre mondiale, mémoire de maîtrise, utm, 1989. Il faut aussi signaler que Mgr Saliège avait reçu fin mai 1942 une lettre secrète du général de Gaulle (Adam Rayski, Le Choix des juifs sous Vichy, p. 137).
33 Renée Bédarida, Les Armes de l’esprit. Témoignage chrétien (1941-1944), Les Éditions Ouvrières, 1977.
34 Henri de Lubac, Résistance chrétienne à l’antisémitisme, Fayard, 1988.
35 Renée Bédarida, Pierre Chaillet, témoin de la résistance spirituelle, Fayard, 1988.
36 Henri de Lubac, op. cit.
37 Jean-Louis Clément, op. cit.
38 Pasteur Boegner, in Les Clandestins de Dieu, p. 23.
39 Il ne peut pas être question ici de reprendre l’ensemble des thèmes développés par Pierre laborie. Nous n’en donnons qu’un résumé simplifié. On trouvera dans la bibliographie une liste des travaux de cet auteur.
40 CDJC XVII-12-54 ; Archives nationales AJ 38 295 ; AJ 38 296. Certains de ces dossiers montrent que les Juifs sont parfois accusés de faire du marché noir en 1943, après les déportations de l’été 1942.
41 En particulier documents cités par Serge Klarsfeld dans Vichy-Auschwitz, t.1, p. 387 et suivantes.
42 Archives nationales AJ 38 1090 ; archives départementales HG 1960-11 G.
43 P. Laborie, L’Opinion française sous Vichy, Le Seuil, 1990, p. 248.
44 AD HG 1960-117 ; Pierre Laborie, op. cit., p. 279. Rapports préfectoraux cités par Klarsfeld, op. cit, t. 1 en particulier p. 387 et suivantes.
45 P. Laborie, « 1942 et le sort des Juifs, quel tournant dans l’opinion ? », Annales, Économie Société Civilisations, mai-juin 1993, p. 662.
46 Ibid., p. 662. Voir en particulier l’article du Grand Écho du Midi, signé Saint-Julien du 3 septembre 1942.
47 Madeleine Barot, in Églises et chrétiens, op. cit., p. 302.
48 Témoignage de M. Steiner à Jean Estèbe, tournage du film En Étrange pays.
49 Charles d’Aragon, op. cit., p. 122.
50 Témoignage de Mme Petitgirard à Jean Estèbe.
51 Michel Debré, Mémoires, t. 1, Combattre.
52 Roger Boussinot, Des enfants dans les arbres, R. Laffont, 1985.
53 Témoignage de Mme Vandenberghe, Montauban.
54 Témoignage du docteur Simone Schmidt, Castres.
55 Sabine Zeitoun, Ces enfants qu’il fallait sauver, Albin Michel, 1989.
56 AN AJ 38 1090, 31 décembre 1942 et 8 janvier 1943.
57 Témoignage de Jacques Longué, Tarbes.
58 Témoignage de Mlle Gineste.
59 Sabine Zeitoun, op. cit.
60 Témoignage de Jacques Longué, Tarbes.
61 André Armengaud, Vabre village d’Occitanie, Vent Terrai, Valdariès, 1985, pp. 152-159.
62 Madeleine Barot, Les Clandestins de Dieu, op. cit., p. 37.
63 Madeleine Barot, in Églises et chrétiens, op. cit., p. 64.
64 P.M. Théas, La Documentation catholique, 15 octobre 1944.
65 Georges Casalis, Les Clandestins de Dieu, op. cit., p. 203.
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