Introduction
p. 15-32
Texte intégral
1Comment comprendre l’existence et l’importance, dans une société aussi aristocratique que l’est la société romaine sous la République, d’une assemblée politique, l’assemblée tribute, où tous les citoyens romains votent, quels que soient leurs niveaux de fortune et quelles que soient leurs origines ? Comment comprendre ensuite, après la mort d’Auguste, la quasi disparition du rôle politique des assemblées tributes, et pourtant la conservation des trente-cinq tribus dans lesquelles sont toujours recensés les citoyens romains, dans toutes les régions de l’empire ?
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2Bien des informations, que l’on tient des textes de la tradition, invitent à s’interroger sur les très anciennes sources d’inspiration politiques et religieuses auxquelles ont pu puiser Auguste, le fondateur du Principat, et ses successeurs immédiats. Ainsi, Auguste se voulait le Restaurateur de la République ; mais le roi Servius Tullius, dont le nom revient avec tant d’insistance dans la littérature de l’époque augustéenne, n’en était-il pas tenu pour le « Père », pour en avoir voulu l’établissement1 et pour avoir laissé, par testament politique, le modèle des plus importantes des institutions républicaines2 ?
3De tels héritages ne sont pas ignorés des Modernes, et pas davantage niés.
4Ainsi, en 1957 et 1960 paraissaient les deux volumes de l’ouvrage de F. Taeger, Charisma. Le premier était consacré aux honneurs rendus au souverain hellénistique. Dans le second, F. Taeger analysait les formes revêtues en Occident par le culte impérial romain : c’était tout aussitôt pour s’interroger sur la place d’un héritage qui appartenait au plus lointain passé, celui de Rome aussi bien que celui des peuples d’Italie ; sur la place, aussi, des apports reçus depuis des temps très anciens des peuples du bassin méditerranéen que Rome devait annexer, après avoir assuré sa domination sur l’ensemble de la péninsule italienne3.
5Le culte impérial et plus largement la religion, insistait F. Taeger, participait de croyances et de conceptions du monde qui, héritières de tout le passé de Rome et des peuples d’Italie, étaient nécessairement différentes de celles des Grecs. Si les peuples d’Italie n’avaient pas eu l’équivalent d’un âge mycénien, ils avaient en revanche très tôt noué des relations, avec les Grecs sans doute, dans le Sud de la péninsule italienne, mais aussi avec les Étrusques dans le Nord et dans le Centre ; ils avaient été en contact avec les peuples de l’Occident méditerranéen aussi bien qu’avec ceux de l’Orient, et la conquête de l’empire ne pouvait que rendre ces relations plus étroites : le fait est que Rome, mise en présence d’apports très divers, devait les assimiler tous, selon des processus fort complexes qu’a ignorés le monde grec, et qui intéressent au premier chef le « culte impérial ». En particulier, c’est en raison de cela – insistait F. Taeger – que toute tentative pour rendre compte du culte impérial par une cause unique a toujours été vouée à l’échec4.
6De la sorte, tout au long de cet exposé des faits et des données, la reconnaissance de l’héritage du passé, composé d’apports divers accumulés au long des siècles, apparaît pour l’analyse comme un fil conducteur.
7F. Taeger cependant, tout en attirant l’attention sur l’importance d’un héritage venu du plus lointain passé de Rome et des peuples d’Italie, ne croyait pas qu’on en puisse véritablement percevoir les composantes dans les textes de la tradition : pour lui, la réalité était enfouie sous la légende5, et les récits d’un Tite-Live ou d’un Pline l’Ancien6 ne renseignaient pas plus sur les hauts faits de Camille que sur un Manlius Capitolinus, voire sur les événements rapportés à la deuxième guerre punique7.
8Ces convictions, F. Taeger les partageait alors avec nombre d’historiens. Or, trente ans plus tard, les perspectives ouvertes à la recherche sont devenues bien différentes. Il n’est peut-être pas inutile de rappeler brièvement l’histoire des débats qui, surtout depuis le début du XVIIe siècle, ont mis en cause l’historicité des récits de la tradition – jusqu’à aboutir, chez certains savants, à un scepticisme radical.
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9En 1624, paraissait, sous la signature de Philippus Claverius, une analyse critique des récits que l’on tenait des Anciens sur les siècles archaïques de Rome : l’auteur tenait que ces récits ne pouvaient s’appuyer sur aucune documentation de première main, et que donc rien ne pouvait en être retenu. Sur ce thème se trouvait ouverte une discussion appelée à de larges développements – et qui n’est toujours pas close.
10En 1738, Louis de Beaufort relança le débat, avec sa Dissertation sur l’incertitude des cinq premiers siècles de l’Histoire romaine. De ce moment, et au cours des décennies suivantes, la critique des récits de la tradition devait se faire de plus en plus sévère ; et à la fin du siècle dernier, les études d’E. Pais8, après celles de B. G. Niebuhr et de Th. Mommsen, manifestaient un scepticisme à peu près radical9.
11Pour cela, les arguments ne manquaient pas.
12Sur les premiers siècles de Rome en effet, on n’imaginait guère que les informations pouvaient venir d’ailleurs que des textes littéraires – ceux que l’on tenait, pour l’essentiel, de Cicéron, de Diodore, de Tite-Live, ou de Denys d’Halicarnasse. Or, entre ces auteurs et les commencements de la Ville, près de huit siècles avaient passé : quand ils écrivaient, certainement très peu de documents subsistaient des premiers siècles de la République, et moins encore de l’époque royale. C’est que, pensait-on, l’incendie de Rome par les Gaulois, en 390 av. J.-C, avait anéanti toute la documentation qui avait pu être accumulée jusque là ; alors avaient disparu, de l’aveu même des Anciens, les témoignages les plus probants10. Sans doute, on avait procédé par la suite à leur reconstitution ; et l’on avait aussi commencé de rédiger et de conserver des archives – en particulier les archives pontificales11 – qui auraient pu constituer un fonds documentaire de première main. Mais les Anciens, pensait-on, ne se préoccupaient guère de consulter les documents12. De surcroît, un Cicéron13, ou un Tite-Live14, mettaient en garde leurs lecteurs contre les falsifications que les familles dominantes avaient pu à tout moment y introduire, faussant jusqu’aux dates – consulaires – de faits importants, pour grandir la gloire de leurs ancêtres et celle de leurs propres lignées. Pourquoi même n’auraient-ils pas introduit aussi des ancêtres fictifs, dans les listes des magistrats dont les pontifes avaient la garde ?
13Les Anciens ne disposaient donc, pensait-on, d’aucun des moyens d’investigation nécessaires à la mise en œuvre de la science historique ; et de toute façon, le respect des règles formelles et le désir de plaire inspiraient leur écriture, beaucoup plus que la volonté de retrouver véritablement l’histoire du passé15.
14Cependant, dès la fin du siècle dernier, les travaux d’un G. Boni sur le forum romain16, et ses découvertes archéologiques, devaient provoquer les débuts d’un véritable renversement des perspectives. Par une curieuse coïncidence, tandis qu’en 1898 paraissait la Storia di Roma d’E. Pais, qui anéantissait presque entièrement la tradition, la découverte l’année suivante du Lapis Niger, portant une inscription où il était question du roi, prouvait – contre E. Pais – qu’au VIe siècle av. J.-C., Rome était régie par des institutions politiques et religieuses stables et évoluées, sous l’égide d’un roi, en conformité avec ce que disait la tradition ; celle-ci s’en trouvait revalorisée d’autant – même si la récente découverte n’allait pas jusqu’à confirmer la liste canonique des sept rois qui, disait-on, s’étaient succédé entre 753 et 50917. L’inscription, selon toutes probabilités, remontait au VIe siècle av. J.-C. ; elle montrait – contre les critiques récentes – qu’au plus tard à ce moment on connaissait à Rome l’usage de l’écriture18, que le latin y était la langue officielle, et l’on peut penser que c’était aussi celle de la plus grande partie de la population.
15D’autres découvertes allaient suivre ; mais pendant plusieurs décennies, elles devaient donner prétexte à des débats où les préoccupations « scientifiques » n’étaient pas nécessairement au rendez-vous19 ; débats politiques, débats idéologiques, où en particulier les passions nationalistes prendraient l’habit des « traditionnalistes », contre ceux qui, au nom de l’objectivité, restaient fidèles aux méthodes et aux conclusions de l’école hypercritique.
16Il convient toutefois de citer ici G. De Sanctis qui, dans sa Storia dei Romani20, tentait de suivre une « voie moyenne » ; ainsi, cet auteur soulignait que les falsifications des noms dans les fastes consulaires n’étaient peut-être pas aussi aisées qu’on l’avait dit, et que la destruction totale de tous les documents, en 390 av. J.-C, était fort peu vraisemblable. Il admettait que les Anciens, au Ie siècle av. J.-C., avaient encore sous les yeux, comme ils le disaient, des monuments fort anciens, témoins des siècles archaïques : ainsi ils pouvaient voir, dans le temple de Diane de l’Aventin, inscrits sur une stèle de bronze, les termes du traité qui sous Servius Tullius avait lié entre elles et à Rome les cités de la ligue latine, et ils pouvaient y lire les noms de ces cités21 ; dans le temple de Dius Fidius se trouvait le traité passé par Tarquin le Superbe avec Gabii22 ; le texte du foedus Cassianum, de 493, était écrit sur une colonne de bronze encore placée derrière les rostres au temps de Cicéron23 ; les Anciens connaissaient aussi la lex Furia-Pinaria de 47224 ; la loi de lotissement de l’Aventin, promulguée en 455, était conservée dans le temple de Diane de l’Aventin25...
17Mais G. De Sanctis pensait que la plus grande partie de la documentation avait été perdue. De plus, les erreurs de transcription gâchaient irrémédiablement les listes des magistrats, auxquelles on ne pouvait faire aucun crédit26.
18Dans les décennies qui suivirent la seconde guerre mondiale enfin, les recherches sur les premiers siècles de Rome allaient prendre un tour nouveau27, et renouveler profondément les données28.
19Ce fut pour une part du fait de fouilles archéologiques menées, dans toute la mesure du possible29, de façon plus systématique que par le passé, et non seulement à Rome, mais dans tout le Latium30. Elles allaient mettre en évidence le développement décisif des villes31 à partir de la fin du VIIe siècle32. Dans l’aire sacrée de S. Omobono, des inscriptions étrusques ont été mises au jour : elles attestent la présence dans les parages, à la fin du VIIe siècle, de personnages sans doute de haut rang, venus de villes étrusques. Et ces données confirment – contre les détracteurs de la tradition, au moins pour les temps les plus anciens – que dans les dernières décennies du VIIe siècle, les Romains connaissaient l’écriture – comme les Grecs et les Étrusques, de qui d’ailleurs ils la tenaient. Les contacts qu’ils avaient eus avec ces peuples dès une époque très reculée se trouvaient par là même démontrés, et l’on était fortement tenté de les mettre en relation avec ce que disaient les Anciens de l’arrivée à Rome d’un certain Lucumon, riche personnage qui venait de Tarquinies, qui était fils de Démarate – un Grec originaire de Corinthe-, et qui, sous le nom de Tarquin l’Ancien, succéderait au roi Ancus Marcius33.
20À ces découvertes se sont ajoutés des progrès considérables, en philologie, en linguistique, en épigraphie ; de nouvelles inscriptions ont été découvertes ; d’autres, anciennement connues mais jusque-là mal comprises, ont pu être relues ; et la confrontation des textes de la tradition romaine avec des sources grecques, ou étrusques, est venu confirmer l’authenticité de personnages que l’on avait déclarés mythiques ou légendaires34.
21Ainsi, en 1939, sur le territoire de l’antique Véies, dans le sanctuaire de Menerva – la Minerve étrusque-, une inscription votive était mise au jour ; or, elle portait le nom d’Avile Vipiennas, et l’on était conduit à la dater des environs de 580 av. J.-C., en d’autres termes de l’époque à laquelle la tradition à Rome plaçait les frères Vibenna : l’hypothèse de l’authenticité de ces personnages trouvait là une singulière confirmation. Elle contribuait aussi à poser en termes nouveaux la question de l’historicité du roi Servius Tullius dont Claude dit, dans son discours de 48 ap. J.-C.35, qu’il était « selon les Étrusques le plus fidèle compagnon (sodalis) de Caelius Vibenna et compagnon de toutes ses aventures » et « qu’il s’appelait en étrusque Mastarna »36 : ce sont encore ces mêmes personnages que l’on trouve, désignés par leurs noms, dans le décor peint de la tombe François à Vulci37 ; ils y figurent comme les protagonistes d’un combat opposant Aule et Caile Vipinas, avec leur compagnon Macstrna, à un Cneue Tarchunies Rumach qui pourrait être « Tarquin le Romain »38.
22Parmi les découvertes les plus spectaculaires de ces dernières années, je citerai deux exemples encore.
23En 1969 J. Heurgon39, dans un ouvrage ouvert aux découvertes les plus récentes, rejetait, comme le voulait l’opinion apparemment la plus sage, l’authenticité des premiers collèges consulaires de la République : ces collèges étaient, écrivait J. Heurgon, « composés de personnages empruntés à la légende de la chute des Tarquins, Brutus, Tarquin Collatin, Sp. Lucretius, auxquels se mêle la figure non moins légendaire de P. Valerius Publicola ». Or, en 1980, était mise au jour à Satricum une dédicace faite à Mars par les sodales d’un Publius Valerius, et les découvreurs étaient conduits à dater l’inscription des environs de 500 av. J.-C.40. Peuton reconnaître Publius Valerius Publicola, dans le Publius Valerius de l’inscription de Satricum ? Les avis sont partagés. Mais on tend à reconnaître dans ce personnage un représentant de l’aristocratie romaine, plutôt qu’un notable local. Et ce qui maintenant paraît indiscutable, c’est l’importance à Rome des Valerii, à la fin du VIe siècle. De la sorte, le caractère imaginaire, légendaire, d’un Publius Valerius Publicola devient beaucoup moins assuré qu’il y a encore quinze ans.
24Je rappellerai d’autre part l’histoire de Mézence, roi de Caéré, dont la tradition faisait le plus farouche des adversaires d’Énée et de son fils41. Mais en dehors de ce personnage, et dans ce récit, le nom de Mézence était totalement inconnu, à Caéré comme dans toutes les autres cités étrusques : il apparaissait donc certain que le personnage de Mézence, et plus largement les relations entre Étrusques et Latins que la tradition décrivait pour une haute époque, étaient le pur produit de l’imagination des Anciens. Or, le réexamen mené par F. Gauthier et D. Briquel42 d’un petit vase que possède le musée du Louvre depuis 186343, est venu bouleverser ces certitudes.
25Cette coupelle hémisphérique à haut pied, haute de 9 cm et fabriquée au tour, porte une inscription qui a été incisée après cuisson sur le vase renversé. Aujourd’hui, on en ignore la provenance exacte, mais nombre d’indices orientent vers Caéré44. En particulier, par la forme et les procédés de fabrication, il rappelle fortement des objets de céramique trouvés précisément dans des tombes de Caéré, dans des contextes datables de la première moitié du VIIe siècle45. Ce petit vase porte une inscription difficile à lire, et l’on avait renoncé à la comprendre. D. Briquel, qui en a repris l’analyse46, y a reconnu une inscription non pas osque, comme on l’avait supposé, mais « indéniablement étrusque », et inspirée d’une formule courante : c’est une marque de possession, comportant le prénom Laucie suivi du gentilice Mezentie qui est « l’équivalent exact du latin Mezentius ». On ne saurait évidemment affirmer que le Mézence évoqué par cette inscription est celui de la légende. Mais on admettra, à la suite de D. Briquel47, « l’existence, avec ce Lautie Mezentie, d’une famille de Mézence(s) dans la Caéré de la première moitié du VIIe siècle av. J.-C. Ce sera autour de la personnalité d’un des membres de cette gens qui aura exercé le pouvoir royal dans cette cité étrusque, et sera intervenu à ce titre dans le Latium voisin, à une époque plus ou moins proche de cette date, que se sera formulée la figure du Mézence légendaire... ».
26Les recherches des trente dernières années ont, en définitive, largement contribué à réhabiliter une tradition qu’avaient fort malmenée les études hypercritiques des décennies précédentes. On dispose aujourd’hui de connaissances beaucoup plus précises et plus étendues qu’il y a quinze ou vingt ans encore. Sans doute, certaines découvertes sont-elles venues apporter aux récits des Anciens un certain nombre de démentis ; mais très souvent aussi, elles en attestent la justesse et en précisent le sens. Il apparaît de plus en plus aujourd’hui qu’il convient de les accueillir avec prudence sans doute : on ne saurait trouver, dans les écrits de Tite-Live ou de Denys d’Halicarnasse, mois après mois et année après année, l’exposé détaillé des événements qui ont pu marquer l’histoire de Rome : on ne saurait construire d’après eux une « histoire événementielle ». Mais il convient aussi de les accueillir sans scepticisme excessif : ces hauts faits que les Anciens célèbrent, ces épisodes qu’ils racontent, ne relèvent pas nécessairement de la pure invention ou de la falsification délibérée48 – même si l’on peut déceler dans un certain nombre de cas des redoublements ou des déplacements chronologiques, destinés à accroître la gloire de certaines familles. Surtout, derrière les faits et par les faits racontés, se dessinent des évolutions économiques, sociales, politiques, ou institutionnelles, et cela, sur le temps court comme sur la longue durée.
27De la sorte, les connaissances récemment acquises dans des domaines aussi divers et complémentaires que l’épigraphie, la linguistique ou l’archéologie ouvrent de nouvelles voies aux recherches en histoire économique, sociale, religieuse, institutionnelle...49 Et pour les plus sceptiques, resteraient encore la profonde cohérence interne des récits d’un Tite-Live ou d’un Denys d’Halicarnasse, et l’attachement qu’ils manifestent à retrouver ces traces du passé. Là sans doute se révèlent les représentations que, au moins à la fin de la République et à l’époque augustéenne, on se faisait de l’histoire des siècles passés, et qui pourraient rendre compte, comme le soulignait F. Taeger, des processus de légitimation du principat d’Auguste ; des représentations qui mêlent étroitement le politique et le religieux, et qu’il convient de tenter de retrouver, par delà les non-dits de récits destinés à des hommes pour qui certaines « évidences » n’avaient pas besoin d’être énoncées. Elles reposaient sur une « connaissance » du passé romain – avec toutes les distorsions, conscientes et inconscientes, que l’on pourra imaginer – qui n’avait pas alors besoin d’être exprimée dans sa totalité.
28Selon toute vraisemblance, les textes les mieux informés ne livrent aujourd’hui de cette idéologie, de façon explicite, qu’une part. Comment alors en retrouver les éléments constitutifs, sans prendre en compte, de quelque manière, le contexte historique dans lequel la tradition les faisait naître, et où ils prenaient leurs premières significations ?
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29À la fin de la République, et encore sous Auguste, la vie politique paraît gouvernée à Rome par un ensemble de principes et de règles qui est hautement paradoxal.
30Au IIe siècle av. J.-C, Polybe, qui appartenait à l’entourage de Scipion Emilien, pensait trouver dans la constitution politique romaine le secret de sa puissance grandissante ; mais il avouait sa perplexité50 :
« Les trois sources de l’autorité politique dont j’ai parlé plus haut avaient leur place dans la constitution romaine », écrit-il. « Toutes les activités de l’État, dans chacun des domaines où elles s’exerçaient, étaient organisées et réglées sous la direction de ces trois pouvoirs de façon si équitable et si judicieuse que personne, pas même un citoyen romain, n’aurait pu dire avec certitude si cette constitution était, à tout prendre, aristocratique, démocratique, ou monarchique. Et Ton avait quelque raison d’être perplexe. À qui, en effet, portait toute son attention sur les pouvoirs des consuls, elle apparaissait comme un régime entièrement monarchique, avec toutes les caractéristiques de la royauté. À qui considérait le Sénat, elle apparaissait comme une aristocratie. Et si Ton observait les pouvoirs du peuple, il apparaissait à l’évidence qu’il s’agissait d’une démocratie ».
31Salluste un siècle plus tard, lorsqu’il expose l’histoire de Marius et de la Guerre de Jugurtha qui, au sens large, couvre les années 116 à 105 av. J.-C., tient des propos bien différents.
« Dans la paix comme dans la guerre », écrit-il, « c’est l’arbitraire d’une oligarchie qui décidait de tout ; les mêmes mains disposaient du trésor public, des provinces, des magistratures et des triomphes ; au peuple était réservé tout le poids du service militaire, et l’indigence [...] »51.
32L’on ne peut guère douter en effet, pour le temps de Marius aussi bien que de Salluste, de la grande puissance d’une aristocratie au sein de laquelle quelques familles jouissaient d’une suprématie à peu près sans partage, dans tous les domaines. Qu’est-il donc advenu du « pouvoir du peuple » évoqué par Polybe ? Faut-il admettre qu’il y avait eu depuis Polybe, en quelques années à peine, une évolution sociale et politique telle que l’équilibre savant des trois pouvoirs avait été ruiné, et qu’une oligarchie avait pris le pouvoir ? Resterait à expliquer alors pourquoi et comment.
33Les propos tenus par Cicéron dans son plaidoyer Pour Caecina, ou encore dans son traité sur Les Lois, orientent vers d’autres analyses. Il y apparaît que la citoyenneté romaine s’identifie d’abord avec une libertas dont elle est indissociable : « La tradition est la même dans l’un et l’autre cas », affirmait Cicéron dans son plaidoyer en faveur d’A. Caecina52, « et, le droit de cité une fois perdu, la liberté ne saurait être conservée. Comment en effet peut-on être libre en vertu du droit des Quirites, quand on ne compte pas parmi les Quirites ? ». Et comme nul ne peut être privé de cette liberté, même sur ordre du peuple53, nul ne peut être privé non plus de sa citoyenneté : « Tu n’apportes aucune raison » – disait encore Cicéron à son adversaire – « pour établir que, si la liberté ne peut être enlevée en aucune façon, le droit de cité puisse l’être »54.
34La citoyenneté romaine et les droits qu’elle comportait étaient donc garantis pour tous, mais des devoirs y étaient attachés. Faute de les respecter et de les remplir – par exemple s’il ne se faisait pas recenser pour échapper aux obligations militaires-, un citoyen romain s’excluait de lui-même de la citoyenneté : l’incensus perdait sa qualité de citoyen romain, de façon en quelque sorte « volontaire »55 ; il la perdait encore s’il allait, en tant que colon, participer à la fondation d’une colonie latine, ou encore s’il partait pour l’exil : mais dans tous ces cas56, c’était de lui-même qu’il abandonnait la citoyenneté romaine, pour en prendre une autre ; « car personne », précisait Cicéron, « d’après notre législation, ne peut appartenir à deux cités »57. Les garanties étaient bien respectées.
35Or, cette libertas et cette citoyenneté romaine allaient de pair avec un droit de vote qui était tout aussi imprescriptible.
36Ainsi Tite-Live, rapportant le conflit qui, en 168 av. J.-C, avait opposé Caius Claudius Pulcher et Tiberius Sempronius Gracchus, les deux censeurs, sur l’inscription des citoyens romains, et tout particulièrement des nouveaux citoyens – les libertini – dans les circonscriptions de vote que sont alors les tribus, exposait58 :
« Claudius déniait à un censeur le droit d’enlever à quelqu’un [...] le droit de suffrage sans l’ordre du peuple. Ce n’était pas en effet parce qu’il pouvait exclure d’une tribu [...] qu’il pouvait exclure de toutes les tribus, c’est-à-dire enlever le droit de cité et la liberté ».
37Ce droit de voter contribuait donc à fonder la citoyenneté romaine comme la libertas par excellence. Mais il convient d’ajouter : ce droit de voter dans l’assemblée tribute, avec la tribu où tout citoyen, qu’il Tait été de naissance ou qu’il le soit devenu, était nécessairement inscrit.
38Polybe cependant, dans sa description du « pouvoir du peuple »59, ne faisait aucune mention de l’existence de deux assemblées du peuple romain – tribute et centuriate – dont les rôles étaient pourtant bien différents. Mais peut-être était-ce au prix d’un tel silence qu’il pouvait soutenir l’idée d’un caractère démocratique de la constitution romaine, en mêlant en un tout indissociable ce caractère avec ses aspects monarchiques et ses aspects aristocratiques.
39Car la « liberté » du peuple ne signifiait pas nécessairement « démocratie ». Ainsi, à propos de la fondation de la République et de la création des tribuns de la plèbe en 493 av. J.-C., Cicéron disait aussi60 :
« [...] Ou bien il ne fallait pas chasser les rois, ou bien il fallait donner la liberté au peuple, réellement, et non pas en paroles. On la lui a donnée mais dans des conditions telles que, grâce à de nombreuses et excellentes mesures, elle devait être amenée à céder devant l’autorité des Grands ».
40Tite-Live ne tenait pas des propos très différents, lorsqu’il évoquait l’organisation centuriate que, disait-on, l’on devait à Servius Tullius, et lorsqu’il lui en rendait grâce61 : ce roi en effet, disait-il,
« rompant avec l’usage établi par Romulus et conservé par tous les rois, ne garda pas le suffrage universel où chaque voix a la même valeur et les mêmes droits indistinctement ; il établit des degrés qui, sans paraître exclure personne du vote, mettaient toute la puissance aux mains des hautes classes ».
41Pour établir cette opposition – insidieuse, qui ne s’avoue pas toujours aussi clairement – de l’apparence et de la réalité dans la vie politique romaine, on pourrait invoquer bien des textes. Et le fonctionnement de l’assemblée centuriate où ne votent guère, avec les hommes de l’élite – nobles et chevaliers romains –, que les citoyens de la première classe62, en est une éloquente illustration. Cela devient beaucoup moins clair, si Ton considère l’assemblée tribute : dans cette assemblée, à la seule condition de se trouver à Rome un jour de vote63, tout citoyen avait le droit de participer.
42Reste donc, en dépit de tout, ce droit de vote imprescriptible, et l’obligation faite aux censeurs d’inscrire dans les tribus tous les citoyens, qu’ils soient citoyens de souche, ou qu’ils le soient devenus.
43Le principe d’ouverture de la cité romaine qui se révèle là, et qui était à vrai dire aussi ancien que la Ville, a provoqué l’adhésion sans réserve d’un Denys d’Halicamasse64 : sa mise en œuvre, décidée par Romulus et scrupuleusement observée par la suite, explique un accroissement de puissance tel « que le peuple romain finit par égaler en nombre les nations réputées les plus populeuses » ; et Denys d’Halicamasse de poursuivre en stigmatisant « l’attitude hautaine » – inverse de celle des Romains – des Lacédémoniens, des Thébains ou des Athéniens, une attitude qui « bien loin de leur valoir le moindre profit, leur a causé les pires dommages ».
44Et Rome a accordé le droit de cité – avec le droit de vote dans les assemblées du peuple – à un nombre de plus en plus grand d’étrangers65. Comment comprendre cette diffusion du droit de cité ? Comment une telle ouverture a-t-elle pu aller de pair avec les caractères éminemment aristocratiques de la cité et de sa vie politique ? À quelles nécessités répondait-elle ? Car indéniablement, Rome a été une cité « ouverte », depuis les premiers temps de son existence : les Anciens en faisaient volontiers honneur à Romulus, qui avait su intégrer dans le corps civique ceux qu’il combattait encore la veille, et par exemple les Sabins de Titus Tatius66 ; quant aux rois qui lui avaient succédé, ils n’avaient pas mené des politiques différentes, s’il faut en croire la tradition.
45Sans doute, au VIIe siècle av. J.-C., cette ouverture n’était-elle pas exceptionnelle en Italie : partout dans l’Italie péninsulaire, dans les cités étrusques, grecques, ou latines, les inscriptions dont on dispose, et qui livrent des noms, révèlent une mobilité géographique et sociale des personnes qui ne laisse pas d’être impressionnante, et qui donne aux récits de la tradition67 d’étonnantes confirmations68.
46Cependant, toutes les cités d’Italie – cités grecques, cités étrusques – paraissent s’être fermées aux étrangers dans les premières décennies du Ve siècle69.
47Rome, où se manifeste au Ve siècle un repliement sur soi, est ensuite redevenue une cité ouverte ; et à ceux à qui elle a accordé la citoyenneté romaine, elle a accordé le droit de voter dans les assemblées, comme un droit imprescriptible qui fondait véritablement la citoyenneté romaine en liberté par excellence.
48Sans doute, le vote était-il de fait interdit aux plus pauvres dans l’assemblée centuriate ; mais dans l’assemblée tribute, chaque citoyen, quelles que fussent sa fortune et sa place dans la hiérarchie sociale, avait le droit de voter.
49De sorte que l’histoire des tribus est inséparable de l’histoire de la citoyenneté romaine et du droit de vote qui lui était attaché ; inséparable aussi de l’histoire de la conquête romaine et de la romanisation des peuples vaincus, avec l’octroi, à des individus ou à des communautés entières, des droits du citoyen romain.
50Ces tribus, qui devaient devenir des cadres essentiels pour l’activité politique de citoyens dont le nombre grandissait avec la conquête, et pour des assemblées dont le rôle n’allait cesser de croître tout au long de la République, ont connu à partir du VIe siècle av. J.-C., une évolution complexe.
51Elles n’étaient pas les plus anciennes : dans les premiers temps de son histoire, le peuple romain avait déjà été réparti entre trois tribus, qui existaient toujours au VIe siècle av. J.-C. Quel rôle jouaient-elles alors ? On le saisit mal. La tradition unanime attribuait en tout cas au roi Servius Tullius la création de quatre nouvelles tribus, sur le territoire de la ville, pour servir de cadres pour le recensement de ceux qui avaient là leur résidence ; peu après, cinq autres devaient être créées qui couvriraient, autour de l’espace urbain, l’ager Romanus antiquus. Dès le premier siècle de la République, douze tribus allaient encore voir le jour, au temps même où, selon la tradition, se développait la lutte de la plèbe contre le patriciat.
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52À quelles nécessités la création de ces tribus – au nombre de neuf selon toute vraisemblance – par le roi Servius Tullius a-t-elle dû et pu répondre ? Quand, comment et pourquoi douze autres furent-elles créées dans le courant du Ve siècle, et en 387 av. J.-C., quatre encore ? Quand, comment, et pourquoi ces tribus devinrent-elles les cadres d’assemblées politiques dont les compétences ne devaient pas cesser de grandir, tout au long de la République ? C’est à ces questions que je voudrais tenter de répondre, dans les pages qui vont suivre.

CARTE GENERALE DE L’ITALIE : quelques repères
Notes de bas de page
1 Tite-Live, I, 48, 9 : « Malgré cela, même cette autorité, pourtant si douce et si modérée, était celle d’un seul homme ; aussi avait-il l’intention de s’en démettre, d’après certains auteurs [...] » : Id ipsum tam mite ac tam moderatum imperium tamen, quia unius esset, deponere eum in animo habuisse quidam auctores sunt [...]. (texte et trad. CUF 1975).
2 Tite-Live, I, 60, 3 : « On nomma alors deux consuls dans les comices par centuries convoqués par le préfet de la ville d’après le manuel politique de Servius Tullius [...] » : Duo consules inde comitiis centuriatis a praefecto urbis ex commentariis Ser. Tulli creati sunt [...]. (texte et trad. CUF 1973).
3 F. Taeger, Charisma. Studien zur Geschichte des antiken Heerscherkultes, II : Rom, Stuttgart, 1960, pp. 3-5.
4 F. Taeger, Charisma..., pp. 3-5.
5 F. Taeger, Charisma..pp. 34-35.
6 Tite-Live, V, 23 et 28 ; Pline, N.H. XXXIII, 7 etc.
7 F. Taeger, Charisma..., pp. 34-35, avec les références.
8 E. Pais, Storia di Roma, Turin, 1898-1899.
9 On trouvera un exposé de l’historiographie sur les origines de Rome, jusqu’aux discussions les plus récentes, dans le livre de A. Grandazzi, La fondation de Rome, Paris, 1991 (avec la bibliographie adjointe aux notes, pp. 287-322). Pour une discussion des prises de positions « hypercritiques », invalidant les informations données par les Anciens pour les quatre premiers siècles de l’histoire de Rome, cf. en particulier J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu’aux guerres puniques, Paris 1969, pp. 378-379 ; M. Pallottino, Le origini di Roma : considerazioni sulle scoperte e sulle discussioni più recenti, Aufstieg und Niedergang der r^mischen Welt II, Berlin New York, 1972, pp. 22-47 (et la bibliographie).
10 Ainsi Tite-Live, VI, 1, 2, qui parle de la rareté des témoignages écrits, non seulement parce qu’on n’y recourait encore assez peu, mais aussi « à cause de la destruction dans l’incendie de la ville de la plupart de ceux qu’avaient pu contenir les registres des pontifes et autres documents publics et privés » : [...] etiam si quae in commentariis pontificum aliisque publicis priuatisque erant monumentis, incensa urbe pleraeque interiere (texte et trad. CUF 1966) ; pour une analyse de cette explication, cf. en particulier les mises au point critiques de M. Torelli, Il sacco gallico di Roma, et de F. Coarelli, La stratigrafia del Comizio e l’incendio gallico, dans I Galli e l’Italia, Roma 1979, pp. 226-230.
11 B. W. Frier, Libri Annales Pontificum Maximorum. The Origins of the Annalistic Tradition, Rome 1979.
12 Sur cela, C. Ampolo, La Storiografia su Roma arcaica e i documenti, Tria Corda. Scritti in onore di Arnaldo Momigliano, Cosme 1983, qui aboutit, pp. 17-24, à des conclusions autrement nuancées : l’intérêt pour les documents est manifeste chez Caton, et plus encore chez Licinius Macer ; si Tite-Live et Denys d’Halicarnasse recopient apparemment ceux qui les ont précédés – sans toujours se rendre compte qu’ils mêlent des interprétations différentes – les antiquaires en revanche – Varron, Verrius Flaccus – tiennent le plus grand compte des inscriptions anciennes pour construire leurs thèses.
13 Cicéron, Brutus, 62.
14 Tite-Live, VIII, 40,4, ou encore XXII, 31, 8.
15 Sur la valeur des sources littéraires, les mises au point sont très nombreuses et dispersées ; on se reportera en particulier à C. Ampolo, La nascita della città, Storia di Roma I, Roma in Italia, Turin, 1988, pp. 153-180 ; C. Ampolo, La città riformata e l’organizzazione centuriata. Lo spazio, il tempo, il sacro nella nuova realtà urbana, Storia di Roma I, Roma in Italia, Turin, 1988, pp. 203-240 (avec la bibliographie) ; F. Coarelli, I santuari, il fiume, gli empori, Storia di Roma I, Roma in Italia, Turin, 1988, pp. 127-151 ; F. Coarelli, Demografia e territorio, Storia di Roma I, Roma in Italia, Turin, 1988, pp. 318-339 (avec la bibliographie) ; E. Gabba, Studi su Dionigi da Alicarnasso, Athenaeum, 38, 1960, pp. 175-225 ; E. Gabba, Studi su Dionigi da Alicarnasso, Athenaeum, 39,1961, pp. 98-121 ; E. Gabba, Considerazioni sulla tradizione letteraria sulle origini della Repubblica, Entretiens XIII, Fondation Hardt, Vandoeuvre-Genève, 1966, pp. 135-169 ; A. Momigliano, Roma arcaica, Florence 1989 (qui rassemble les études de cet auteur sur les origines de Rome) ; D. Musti, Tendenze nella storiografia romana e greca su Roma arcaica. Studi su Livio e Dionigi d’Alicarnasso, Quaderni Urbinati di Cultura Classica, X, 1970, en particulier p. 56-60 ; D. Musti, I Greci e l’Italia, Storia di Roma, I, Roma in Italia, pp. 39-51 ; D. Musti, Lotte sociali e storia delle magistrature, Storia di Roma, I, Roma in Italia, pp. 367-395 (avec la bibliographie) ; D. Musti, La tradizione storica e i documenti, La grande Roma dei Tarquini, Rome, 1990, pp. 9-15.
16 Sur la grande valeur des travaux de G. Boni en tant qu’archéologue (en contraste avec celle de ses interprétations), cf. F. Coarelli, Il Foro Romano, I..., pp. 3-5.
17 En dernier lieu, M. Pallottino, Per una immagine di Roma arcaica, La Grande Roma dei Tarquini, Rome, 1990, pp. 3-6.
18 Les caractères du Lapis Niger correspondent à la description que l’on tient des Anciens, et en particulier de Denys d’Halicarnasse, II, 54, 2 ; sur cela, F. Coarelli, Il Foro Romano, I..., pp. 161-188 ; la liste des documents écrits datant des VIe-Ve siècle, et aujourd’hui connus, a été dressée par G. Colonna, L’aspetto epigrafico, Lapis Satricanus. Archeological, epigraphical, linguistic and historical aspects of the new inscription from Satricum, Archeologische Studiën van het Nederlands Institut te Rome, Scripta Minora V, s’Gravenhage, 1980, pp. 53-69.
19 F. Coarelli, Il Foro Romano, I..., pp. 3-5 (et la bibliographie).
20 G. De Sanctis, Storia dei Romani, Florence 1907-1957 (2e éd. Florence, 1979).
21 Denys d’Halicarnasse, IV, 26.
22 Denys d’Halicarnasse, IV, 58.
23 Cicéron, Pro Balbo, 23, 53 ; Tite-Live, II, 33, 9 ; Denys d’Halicarnasse, VI, 95 ; Festus 216 L.
24 Varron apud Macrobe, Sat. I, 13, 21.
25 Denys d’Halicarnasse, X, 32 ; Tite-Live, III, 31.
26 La liste des documents qui existaient encore au Ie siècle av. J.-C. a été dressée par C. Ampolo, La storiografia su Roma arcaica..., p. 15 ; on ajoutera aux documents cités par G. Colonna, Appendici : le iscrizioni strumentali latine del Vf V seculo a.l., Lapis Stricanus. Archeological, epigraphical, linguistic and historical aspects of the new inscription from Satricum, Archeologische Studiën van het Nederlands Institut te Rome, Scripta Minora V. s’Gravenhage 1980, pp. 53-69, p. 53-69 : les tables de bronze où se trouvait transcrit le premier traité entre Rome et Carthage (Polybe, III, 22 et 26, 1), et qui étaient placées dans Yaerarium des édiles, près du temple de Jupiter Capitolin ; le foedus Ardeatinum conclu en 444 (Licinius Macer, fr. 13 Peter,apud Tite-Live, IV, 7, 10 ; Denys d’Halicarnasse, XI, 62) ; l’inscription de la cuirasse de lin de Tolumnius, dédiée par Cornelius Cossus dans le temple de Jupiter Férétrien en 437, 428, ou 426, et qu’Auguste avait lue (Tite-Live, IV, 1, 7) ; la lex uetusta relative au praetor maximus et au rite de plantation du clou (Tite-Live, VII, 3, 5,) ; l’inscription ex Cassia familia datum, sur la statue consacrée à Cérès après la condamnation à mort, en 486, de Spurius Cassius ; enfin l’inscription du Lapis Niger.
27 P. G. Gierow, The Iron Age of Latium (2 vol.), Lund 1964 et 1966 ; E. Gjerstad, Early Rome (6 vol.), Lund 1953 à 1973 ; H. Müller-Karpe, Vom Anfang Roms (op. cit.) ; H. Müller-Karpe, Zur Stadtwerdung Roms, Heidelberg, 1962 ; catalogues d’exposition : Civiltà del Lazio Primitivo, Rome, 1976 ; La grande Roma dei Tarquini, Rome, 1990.
28 Cf. depuis 1970, les actes des colloques qui rendent compte des découvertes dans le Latium et à Rome, sous le titre Archeologia Laziale (Quaderni del Centro di Studio per l’archeologia et rusco-italica).
29 Sur l’état des connaissances – très lacunaires, en particulier du fait des destructions dans les villes modernes (Rome, qui a connu une extension considérable dans les dernières décennies, en offre un exemple des plus frappants) : cf. par exemple Bietti Sestieri et De Santis, Indicatori archeologici di cambiamento nella struttura delle comunità laziali nell, 8e sec. A. C., Dialoghi di Archeologia (3ème serie, 3), 1985, 1, p. 35.
30 C. Ampolo, Su alcuni mutamenti nel Lazio tra l’VIII e il V secolo, Dialoghi di Archeologia, V, 1970-1971, pp. 37-68 et pp. 69-100 ; A. P. Anzidei, A. M. Bietti Sestieri, A. De Santis, Roma e il Lazio dall’età della pietra alla formazione della città, Roma 1985.
31 M. Pallottino, Per una immagine..., p. 4.
32 Sur les questions de chronologie opposant une datation « haute, », une datation « basse », et une datation « intermédiaire » cf. M. Pallottino, Le origini di Roma (loc.cit.), en particulier pp. 30-31 ; aucune démonstration n’est décisive, en faveur de la datation « haute » ou « basse » ; la datation « intermédiaire » est quant à elle, mieux que les deux autres, en accord avec les données littéraires : à la suite de la plupart des spécialistes des siècles archaïques de Rome, c’est celle que je suivrai ici.
33 Ainsi Tite-Live, I, 34,1 ; sur Démarate, cf. Ampolo, 1976-1977.
34 Cf. G. Dumézil, La religion romaine archaïque, Paris 1966, pp. 19-27, qui commençait son étude avec des considérations sur la fabrication des légendes par les Anciens, et sur leurs supercheries ; Idem, Mythe et épopée, Paris 1968, p. 432.
35 CIL XIII, 1668.
36 M. Pallottino, Servius Tullius à la lumière des nouvelles découvertes archéologiques et épigraphiques, Comptes-Rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres (CRAI), 1977, pp. 216-235 ; F. Coarelli, Le pitture della tomba François a Vulci : una proposta di lettura, Dialoghi di Archeologia, 2, 1983, pp. 43-69 ; M. Pallottino, Per una immagine, p. 5. ; pour un exposé des diverses interprétations, C. Ampolo, La nascita delta città, pp. 208-210.
37 La tombe est connue depuis 1837 ; on la date aujourd’hui du milieu du IVe siècle, deux siècles seulement après le règne de Servius Tullius, ce qui invite à accorder une certaine crédibilité aux événements ainsi évoqués et une certaine authenticité aux personnages qui y sont mêlés ; sur de telles questions, cf. M. Pallottino, Le origini di Roma : considerazioni..., pp. 22-47, et particulièrement sur cela pp. 41-46.
38 Cf. le Catalogue de l’exposition La Tombe François di Vulci, Cité du Vatican (20 mars-17 mai 1987) ; pour une nouvelle lecture : F. Coarelli, Le pitture..., qui discute A. Alföldi, Early Rome and the Latins, Ann Arbor 1965, pp. 224-225.
39 J. Heurgon, Rome et la Méditerranée, p. 267.
40 Sur cette inscription : C. M. Stibbe, G. Colonna, C. De Simone, H. S. Versnel, Lapis Satricanus. Archeological, epigraphical, linguistic and historical aspects of the new inscription from Satricum, Archeologische Studiîn van het Nederlands Institut te Rome, Scripta Minora V, s’Gravenhage, 1980.
41 Ainsi Tite-Live, I, 2, 3.
42 F. Gauthier et D. Briquel, Réexamen d’une inscription du Musée du Louvre : un Mézence à Caeré au VIIe siècle av. J.-C., Comptes rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, janvier-mars 1989, pp. 99-13,1989.
43 La première édition, due à E. Pottier, date de 1897.
44 F. Gauthier et D. Briquel, Réexamen..., pp. 99-104.
45 F. Gauthier et D. Briquel, Réexamen..., p. 101.
46 F. Gauthier et D. Briquel, Réexamen..., pp. 106-113.
47 F. Gauthier et D. Briquel, Réexamen..., p. 113.
48 Comme le voulait encore A. Alföldi, Early Rome..., ou G. Dumézil, La religion.
49 M. Pallottino, Le origini di Roma : considerazioni..., pp. 22-24 – qui formait des voeux pour le développement de recherches inter-disciplinaires.
50 Polybe, VI, 5, 11. (trad. D. Roussel, 1970).
51 Salluste, Bellum Jugurthinum, XLII, 7.
52 Cicéron, Pro Caecina, XXXIII, 96 : Nam et eodem modo de utraque re traditum nobis est, et, si semel ciuitas adimi potest, retineri libertas non potest. Quid enim potest iure Quiritium liber esse is qui numero Quiritium non est ? (texte et trad. CUF 1961).
53 Cicéron, Pro Caecina, XXXIII, 96 : l’exemple montre qu’à l’intérieur de la Cité, un citoyen romain ne peut être réduit en esclavage ni par un particulier, ni même par ordre du peuple.
54 Cicéron, Pro Caecina, XXXIII, 96 : Nihil rationis adfers quam ob rem, si libertas adimi nullo modo mossit, ciuitas possit. (texte et trad. CUF 1961).
55 Cicéron, Pro Caecina, XXXIII, 99.
56 On y ajoutera le cas, très particulier, de ceux enfin qui sont vendus par le chef des Fétiaux ; Cicéron, Pro Caecina, XXXIII, 98-100.
57 Cicéron, Pro Caecina, XXXIII, 100 : [...] cum ex nostro iure duarum ciuitatum nemo esse possit [...].
58 Tite-Live, XLV, 15, 3-4 : [...] negabat Claudius suffragii lationem iniussu populi censorem cuiquam homini, nedum ordini universo adimere posse. Neque enim, si tribu mouere possit, quod sit nihil aliud quant mutare iubere tribum, ideo omnibus quinque et triginta tribubus eripere posse, id est ciuitatem libertatemque eripere, non, ubi censeatur, finire, sed censu excludere.
59 Polybe, VI, 5, 11-18.
60 Cicéron, De Legibus, III, 25 : Quam ob rem aut exigendi reges non fuerunt, aut plebi re, non uerbo, danda libertas. Quae tamen sic data est, ut multis institutis praeclarissimis adduceretur, ut auctoritati principum cederet (texte et trad. CUF, 1968).
61 Tite-Live, I, 43, 10 : Non enim, ut ab Romulo traditum ceteri seruauerant reges, uiritim suffragium eadem ui eodemque iure promisce omnibus datum est ; sed gradus facti, ut neque exclusus quisquam suffragio uideretur et uis omnis penes primores ciuitatis esset [...] (texte et trad. CUF, 1975).
62 Sur cela, cf. Cl. Nicolet, Rome et la conquête du monde méditerranéen. I, Les structures de l’Italie romaine, Paris, 1977, pp. 342-345.
63 Ce qui peut, il est vrai, opposer un obstacle insurmontable à la participation, pour ceux qui résident loin de Rome et sont, de surcroît, dépourvus de moyens économiques suffisants : cf. les observations de L. R. Taylor, Roman Voting Assemblies from the Hannibalic war to the dictatorship of Caesar, Ann Arbor, 1966, en particulier p. 67.
64 Denys d’Halicarnasse, II, 16-17 (trad. Fromentin et Schnabele, coll. La Roue à Livres, Paris 1990) ; deux siècles plus tôt déjà, en 214, Philippe V de Macédoine, dans sa lettre aux Larisséens, avait tenu des propos semblables : IG IX, 517 = SIG3, 543, 11, pp. 29 sq ; sur cela, cf. Ph. Gauthier, « Générosité » romaine et « avarice » grecque sur l’octroi du droit de cité, Mélanges W. Seston, Paris 1974, pp. 207-215 ; A. Fraschetti, A proposito di ex-schiavi e della loro integrazione in ambito cittadino a Roma, Opus, I, 1982, pp. 97-103.
65 Sur cela, infra, chap. V.
66 Sur la question des Sabins à Rome, cf. M. Pallottino, Le origini di Roma : considerazioni..., p. 40 (avec la bibliographie de la question) ; pour une analyse sensiblement différente, cf. J. Poucet, Les origines de Rome. Tradition et histoire, Bruxelles 1985, en particulier p. 143 : l’auteur ne croit pas à une présence importante des Sabins aux origines de Rome, et pense qu’à tout le moins on n’a aucune preuve réelle d’une telle présence.
67 Je me bornerai à rappeler ici les exemples donnés par Claude, dans le discours qu’il prononça devant les sénateurs, en 48 ap. J.-C. : en vertu des exemples du passé, le Princeps cherchait à obtenir d’eux l’ouverture du Sénat à l’élite gauloise ; CIL XIII, 1668.
68 M. Torelli, Rome et l’Étrurie à l’époque archaïque, Terre et paysans dépendants dans les sociétés antiques, colloque international (Besançon, 2-3 mai 1974), Paris 1979, pp. 251-299 = Tre studi di storia etrusca, I, Dialoghi di Archeologia, VIII, 1974, pp. 3-53.
69 C. Ampolo, La nascita..., p. 174 ; Torelli, « Le popolazioni dell’Italia antica : società e forme del potere », Storia di Roma, I, Roma in Italia, Turin, 1988, pp. 53-74, et particulièrement ici p. 67.
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La république des tribus
Ce livre est cité par
- Stewart, Roberta. (2012) The Encyclopedia of Ancient History. DOI: 10.1002/9781444338386.wbeah20132
- Smith, Christopher. (2017) The Fifth-Century Crisis. Antichthon, 51. DOI: 10.1017/ann.2017.14
- Machajdíková, Barbora. Buzássyová, Ľudmila Eliášová. (2021) Vowel deletion before sibilant-stop clusters in Latin: issues of syllabification, lexicon and diachrony. Journal of Latin Linguistics, 20. DOI: 10.1515/joll-2021-2005
- Helm, Marian. (2017) A Troubled Beginning: Rome and its Reluctant Allies in the Fourth Centurybc. Antichthon, 51. DOI: 10.1017/ann.2017.13
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