Avril
p. 511-521
Texte intégral
11er avril. De retour de Berlin, Mackensen remet le procès-verbal du Brenner. Il n’est pas dans le style télégraphique des autres procès-verbaux de Schmidt. C’est un résumé assez bref. Il paraît qu’Hitler a fait quelques difficultés pour m’en concéder la copie29. L’ambassadeur, sur ordre de Ribbentrop, parle à nouveau des relations italo-russes et demande, un peu contraint car il est personnellement en désaccord avec son patron, que notre presse publie des articles « presque élogieux sur les Soviets ». Je refuse catégoriquement. On ne peut pas faire des pirouettes aussi impudentes et le discours de Molotov n’est certes pas un document qui justifie un tel geste de notre part30. Le Duce approuve et conclut « que ce que l’on peut faire avec la Russie, c’est de se taire. Et c’est déjà beaucoup ».
2Après la lecture du procès-verbal, Mussolini répète qu’il est dans son intention d’écrire à Hitler afin de le dissuader de tenter l’offensive terrestre qui correspond à tout jouer sur une seule carte. J’encourage ce geste du Duce, car soit Hitler attaque tout de même et Mussolini en sera fâché et aura, grâce à Dieu, un autre prétexte pour s’en détacher, soit Hitler n’attaque pas et la guerre, d’ici quelques mois, finira en queue de poisson31. Ceci nous conviendra dans un cas comme dans l’autre. Mais Mackensen et notre ambassade à Berlin sont d’accord pour affirmer que l’offensive aura lieu et peut-être d’ici peu.
32 avril. Violent coup de barre dans un sens belliciste : ce matin, le Duce voulait brûler les étapes qui nous séparent encore du conflit si la France et l’Angleterre entendent véritablement, comme cela est annoncé, resserrer les mailles du blocus. Comme Goering, lors d’un entretien avec le colonel Teucci, avait dit comprendre l’attitude italienne, Mussolini a télégraphié afin que l’on dise à Goering qu’il se préparait à accélérer l’intervention. Et pourtant personne ne lui demandait de le faire ! Le Duce me communique avoir rédigé un mémoire concernant notre plan d’action politico-stratégique. Il m’en donnera une copie et fera samedi une réunion des sept personnalités qui auront connaissance du document. Même en Conseil des ministres, il s’exprime dans un sens belliciste. Il débute en disant que la guerre pourra avoir lieu à n’importe quel moment, en excluant de « faire la putain avec les démocraties », ce qui du reste nous mettrait en conflit avec les Allemands, mais également de rester neutre, ce qui « déclasserait l’Italie comme grande puissance pour un siècle et comme régime fasciste pour l’éternité », concluant que nous marcherons avec les Allemands pour nos propres objectifs. Il parle d’empire méditerranéen et d’accès à l’océan. Il croit aveuglément à la victoire allemande et dans la parole d’Hitler en ce qui concerne notre part de butin. Mais même en acceptant la victoire allemande comme un fait accompli – idée que je repousse nettement –, est-ce absolument sûr qu’Hitler, qui n’a jamais tenu parole avec quiconque, la tiendra avec nous ?
43 avril. Rien de nouveau.
54 avril. Rien de nouveau.
65 avril. Hier soir, j’ai assisté à la projection d’un film allemand sur la campagne de Pologne. J’avais refusé une première invitation de ce genre et si je m’étais abstenu encore hier, mon absence aurait brillé d’une lumière trop équivoque. Le film est bien fait si les Allemands désiraient seulement donner l’image de la force brute, mais il est mauvais s’ils pensent en tirer des avantages de propagande. Même le public d’hier soir – composé en partie de germanophiles de bureau et en partie de souteneurs volontaires – n’est pas allé au-delà de la limite de la courtoisie dans la manifestation de son approbation.
7En revanche, j’ai une impression de faiblesse des Alliés ce matin, lors de l’entretien avec Dingli, avocat de notre ambassade de Londres et ami de Chamberlain. Grandi faisait grand cas de cet homme qui m’est apparu de seconde importance. Il portait un message inutile et général du Premier ministre, un de ses messages de goodwill32 destinés dès le départ à rester sans suite. Mais plus que tout, le ton déprimé de l’homme était important, sa recherche inquiète du compromis, son manque de confiance en la victoire. Si ceci est véritablement le moral anglais, le destin de l’Europe sera tragiquement fixé. Mais je ne crois pas que ce soit ainsi.
8Sumner Welles a envoyé son ambassadeur me dire que toute cette histoire de carte géographique n’a pas de fondement et que Reynaud ne lui a jamais parlé de nouveaux aspects territoriaux européens33.
96 avril. J’ai eu du Duce une des huit copies du document secret qu’il a rédigé pour faire le point de la situation et tracer le programme militaro-politique pour l’avenir. C’est un document mesuré où il arrive à la double conclusion que l’Italie ne peut pas faire volte-face, ni rester neutre jusqu’à la fin du conflit sans tomber du rang de grande puissance. Aussi, la guerre aura lieu aux côtés de l’Allemagne avec nos objectifs et quand les conditions seront favorables. Action militaire : défensive sur tous les fronts et offensive vers Djibouti, offensive aéronavale de grande envergure34. Mais le duc d’Aoste, que j’ai vu ce matin, me déclare que, selon lui, non seulement il est impossible de lancer une offensive, mais également extrêmement problématique de maintenir les positions actuelles car les Franco-Anglais sont désormais bien équipés et prêts à l’action alors que les populations, parmi lesquelles la rébellion sévit encore, s’insurgeraient à la moindre sensation que nous sommes en difficulté. J’ai parlé de ceci au Duce, et j’ai encore une fois répété, autant que cela puisse servir, que l’Italie est unanime à détester les Allemands.
10J’ai brièvement informé Mussolini de mon entretien avec Dingli. Il a souhaité qu’en son nom, je lui conseille de tenter une paix de compromis.
117 avril. Une année est passée depuis le débarquement en Albanie. Voici une journée dont je me souviens avec émotion. À propos de l’Albanie, le général Favagrossa a refusé ce matin le minimum requis pour l’exécution du programme édilitaire. Avec la meilleure volonté du monde, il ne peut donner ce qu’il n’a pas. Je fais avec lui un rapide tour d’horizon du secteur des réserves métalliques. Résultats très tristes. Les marchés extérieurs se sont fermés peu à peu, et même le peu d’or dont nous disposons ne suffit pas à acquérir les métaux dont nous aurions besoin. Les ressources internes sont maigres et nous avons déjà mis la main sur les dernières possibilités. Casseroles de cuivre, grilles de fer, tout est parti. La réalité est qu’aujourd’hui nous sommes dans un état plus mauvais qu’en septembre du point de vue des réserves. Nous avons de quoi faire à peine quelques mois de guerre. Voici ce que déclare Favagrossa. Est-il raisonnable de penser à notre intervention dans ces conditions ?
12Je parle avec Dingli et je lui dis que si Chamberlain est prêt à proposer des conditions crédibles, nous pourrons faire l’intermédiaire de ses propositions et faciliter un compromis. Sinon, aucune illusion : l’Italie sera aux côtés de l’Allemagne. Dingli est satisfait de sa mission et se prépare à retourner à Londres pour en référer. J’ai la vague impression que je n’entendrai plus parler de lui, homme de peu de relief.
138 avril. Alarme à Budapest. Teleki a mandaté à Rome monsieur Baranyai35 pour informer d’une démarche36 faite par l’état-major allemand auprès de l’état-major hongrois. Estimant prochaine une attaque russe de la Bessarabie, l’Allemagne entend occuper la zone pétrolifère roumaine et demande le libre passage en Hongrie. Prix de l’assentiment : la Transylvanie. Un problème surgit pour les Hongrois : laisser passer les Allemands ou bien s’y opposer, même par les armes. Dans un cas comme dans l’autre, la liberté hongroise serait terminée. L’acceptation éviterait massacres et ruines, le combat serait sûrement plus douloureux mais préparerait la future résurrection. Villani et monsieur Baranyai inclinent pour la lutte et espèrent un secours italien. Je l’ai accompagné chez le Duce. Il a réservé sa réponse mais la ligne de conduite a été de conseiller l’acceptation. Même à eux, il a répété qu’il est totalement solidaire de l’Allemagne et qu’il s’apprête à combattre les Franco-Anglais. Nous avons envoyé un télégramme à Berlin pour savoir ce qui est vrai de ce qu’ont dit les Hongrois. Nous ne savons rien et, jusqu’à maintenant, les Allemands ont assuré exactement le contraire. Mais l’expérience prouve que cela compte bien peu.
149 avril. Les Allemands n’ont pas marché en direction de la Roumanie. À 2 heures du matin, un secrétaire de l’ambassade allemande est arrivé, porteur d’une lettre de Mackensen demandant une audience pour 7 heures. Rien d’autre. Il est arrivé à 6 h 30, pâle et fatigué. Il a communiqué la décision d’Hitler d’occuper le Danemark et la Norvège, ajoutant que cette décision s’était désormais traduite en actes37. Je n’ai pas fait de commentaire mais il s’est associé à moi lorsque j’ai dit que la réaction des neutres, et spécialement des Américains, serait violente. Puis nous sommes allés chez le Duce pour lui remettre un message écrit d’Hitler38. La lettre habituelle, le style habituel pour annoncer un coup déjà accompli. Mussolini a dit : « J’approuve de tout cœur cette action d’Hitler. C’est un geste qui peut avoir des conséquences incalculables et c’est ainsi que se gagnent les guerres. Les démocraties ont été battues en rapidité. J’ordonnerai à la presse et au peuple italien d’applaudir sans réserve à l’action de l’Allemagne. » Mackensen est sorti rayonnant du palais de Venise.
15Puis, nouvelle rencontre de Mussolini avec les Hongrois. Attolico a démenti les bruits d’une attaque sur la Roumanie. Le Duce a cependant conseillé le calme et la modération aux Hongrois et, pour terminer, d’accéder à la demande allemande. Ce n’était pas la réponse attendue et espérée par les Hongrois. Ils ont fini par demander si, en cas de résistance militaire, ils pourraient compter sur l’aide de l’Italie. Mussolini a souri : « Comment cela pourrait-il arriver puisque je suis l’allié d’Hitler et entends le rester ? »
16Restés seuls, le Duce a parlé de la Croatie. Désormais, l’envie le démange. Il entend accélérer le rythme, profitant du désordre qui règne en Europe. Mais il n’a pas donné de précision sauf qu’il est convaincu qu’une attaque de la Yougoslavie ne nous mettrait pas à dos la France et l’Angleterre. Mais si ce n’est pas le cas, serions-nous prêts à la lutte ? Balbo et le duc d’Aoste m’ont parlé ces jours-ci de leurs secteurs respectifs en des termes qui ne laissent guère d’illusion39.
17Les premières nouvelles imprécises des combats et de la résistance arrivent de Norvège. J’espère que cela soit vrai, en premier lieu pour les réactions que suscitera dans le monde une lutte si inégale, en second lieu pour la preuve qu’il existe encore des peuples qui savent combattre pour sauvegarder la dignité humaine.
1810 avril. Les nouvelles de l’action allemande dans le Nord ont eu un écho favorable dans le peuple qui, comme dit Mussolini, « est une putain qui va avec le mâle qui gagne ». Plus que la rapidité allemande, ce qui surprend est l’absence de réaction des Franco-Anglais qui répondent au succès militaire d’Hitler par une offensive de discours et d’articles absolument inutiles40.
19François-Poncet, revenu de Paris, était ce matin très abattu, attitude qui contraste avec son tempérament vivace et presque provocateur. Il a parlé de « laisser du temps au temps », de « batailles perdues et de guerres gagnées », des « États-Unis qui ne permettront pas la victoire de Hitler ». D’accord, mais je voudrais voir une activité plus décidée. Désormais, tous les Français ou presque sont convaincus que l’Italie se prépare à aller contre eux, mais rien ne sera fait qui puisse provoquer ou accélérer cette décision italienne. Ils veulent nous laisser l’entière responsabilité : personnellement, Poncet présentait les dangers de précipiter la situation.
20Mackensen a trouvé un prétexte pour venir me voir. Il voulait connaître nos réactions ultérieures aux événements actuels. Je l’ai couvert de félicitations et d’éloges car désormais il n’y a rien d’autre à faire, même si je reste immuablement d’avis que le dernier mot n’a pas été dit et que nous pourrions assister à un retournement de situation, peut-être d’ici peu.
2111 avril. Message urgent d’Hitler pour le Duce. Nous sommes allés avec Mackensen à la villa Torlonia à 11 heures du soir où Mussolini, contrairement à ses habitudes, nous avait attendus alors qu’il est habituellement couché. Il était très enrhumé, fiévreux et fatigué, mais content de recevoir le message d’Hitler. Ce matin, il a préparé une réponse chaleureuse. Dans celle-ci, il explique qu’à partir de demain la flotte sera prête, que la préparation aérienne et terrestre se déroule à un rythme accéléré et, en concluant, attire l’attention d’Hitler sur l’attitude ambiguë de la Roumanie, puis confirme sa volonté de sauvegarder la paix dans ce secteur de l’Europe41. Hitler a reçu Attolico et a pris acte avec satisfaction du message du Duce42. Il a donné des informations optimistes sur le cours actuel de la bataille aéronavale. Je demeure sceptique43. Seul le temps prouvera si le Führer a agi en stratège ou s’il est tombé dans un piège dangereux.
22Ce matin, Mussolini est sombre. Il revient d’un entretien avec le Roi qui ne lui a pas donné satisfaction. Il a dit : « Le Roi voudrait que nous intervenions uniquement pour recoller les pots cassés44. D’abord, il ne faudrait pas qu’on nous les casse sur la tête. Et puis, il est humiliant de rester les mains dans les poches pendant que les autres écrivent l’histoire. Peu importe qui gagne. Pour faire un grand peuple, il est nécessaire de le mener au combat, y compris à coups de pied au cul. C’est ainsi que je ferai. Je n’oublie pas qu’en 1918, il y avait 540 000 déserteurs. Si nous ne saisissons pas cette occasion pour mesurer notre marine à la marine franco-britannique, pourquoi avoir 600 000 tonnes de navires ? Il suffirait d’avoir des gardes-côtes et des yachts pour promener les demoiselles. »
2312 avril. Je me mets au lit avec une sacrée grippe et j’y reste jusqu’au samedi 20.
24Malade, le comte Ciano ne tient pas son Journal jusqu’au 20 avril.
2520 avril. Ma maladie a donné lieu à beaucoup de ragots. On a parlé de maladie diplomatique et Rome est pleine de bruits concernant ma démission. Naturellement, les succès allemands ont provoqué de nombreuses défections dans les rangs des soi-disant amis. Inversement, celui qui a pris une position courageuse est un vieil antifasciste, Alberto Giannini45, qui a écrit au Duce afin de le conjurer de ne pas m’éloigner car cela achèverait de désorienter le pays. Mussolini a réagi avec sympathie à mon égard : d’abord, il a dit qu’il entend faire quelque chose pour couper court aux rumeurs, puis a réaffirmé à Buffarini et Muti que je suis l’homme qui jouit de sa pleine confiance.
26Durant ces jours d’absence, aucune nouveauté à l’intérieur si ce n’est l’arrivée d’une lettre d’Hitler afin de faire le point de la situation. Naturellement, elle est optimiste. Envers le Duce, il use de paroles qui lui vont droit au cœur et produisent leur effet46. Hesse m’a parlé hier soir d’une offensive éminente et a raconté qu’Hitler accuse le mauvais temps de l’avoir empêché de fêter son anniversaire à Paris47.
27J’ai retrouvé Mussolini, après dix jours, plus guerrier et germanophile que jamais, mais il dit qu’il ne fera rien avant fin août, après avoir amélioré la préparation et après les récoltes. Trois mois qui laissent encore quelques possibilités et espérances.
2821 avril. Le discours48 qu’a fait le Duce depuis le balcon du palais de Venise est sobre et mesuré, à l’inverse de celui qu’il a prononcé à l’intérieur du palais aux représentants des Confédérations49, qui est extrémiste et en faveur de l’Axe à cent pour cent. Mais, tout de suite après, il m’a demandé d’atténuer les éventuels échos auprès du corps diplomatique car « jusqu’à la seconde moitié d’août, il n’est pas question de parler de guerre ».
2922 avril. Ce matin, l’échéance de notre intervention a été à nouveau repoussée : printemps 1941 car, selon le Duce, la Scandinavie a éloigné le centre et la solution du conflit. Naturellement, cela ne signifie pas qu’il y ait le moindre changement dans son état d’esprit. Il a eu, semble-t-il, un entretien un peu vif avec le Roi durant lequel il a déclaré que « l’Italie d’aujourd’hui est déjà une colonie britannique et que quelques Italiens seraient disposés à la faire devenir de jure une Malte multipliée par 1 million ». Il a ajouté : « J’ai vu le vieux pâlir. » Mais, hélas, le Roi, qui est pourtant si opposé à la guerre, ne peut rien faire pour la conjurer.
30J’ai vu François-Poncet. Il était à la fois excité et déprimé. Il parlait d’actions italiennes prochaines, tellement proches qu’elles devraient avoir lieu d’un jour à l’autre. Je l’ai un peu mis au courant et il est sorti mieux informé sur notre politique et plus serein. J’ai fait de même avec l’ambassadeur d’Amérique qui se révèle toujours plus amical et gentilhomme, et avec quelques ambassadeurs de moindre importance.
3123 avril. J’exerce également une action apaisante envers le chargé d’affaires anglais qui, quoique de nature mesurée, n’est pas resté indifférent à l’offensive de bruits alarmants qui a eu lieu ces dernières semaines et dont le point de départ est ma maladie. Je répète que l’Italie est solidaire avec l’Allemagne mais que jusqu’à nouvel ordre, elle n’entend pas rendre sa solidarité plus concrète, ce qui veut dire qu’elle n’entend pas faire tonner les canons (peu nombreux) de Badoglio à la différence des canons de papier de Gayda50. Il me semble que les Français et les Anglais devraient se contenter de cette situation et je crois que, tant qu’elle dure, ils sont contents.
32Renzetti m’a récemment parlé de ce que l’on pourrait appeler la tragicomédie du Collier de Goering. Il parait que le cœur du gros maréchal51 est encore affligé de la même douleur qu’en mai dernier, lorsqu’il vit pendre au cou de Ribbentrop la chaîne en or de l’Annonciation ! J’en parle au Duce : il n’est pas nécessaire de faire souffrir plus longtemps le volumineux quasi-dictateur du Reich. Mussolini, qui a un sentiment de mépris pour ces honneurs, m’autorise à écrire au Roi une lettre-supplique pour exposer le cas pitoyable du tendre Hermann, privé de son légitime pendentif, et pour proposer qu’un Collier lui soit offert, le 22 mai, triste anniversaire de l’alliance. Nous espérons que le Roi accepte la proposition car en matière de Collier, il est très circonspect et mesuré.
3324 avril. François-Poncet m’a apporté une lettre cachetée de Paul Reynaud pour le Duce. Il était plutôt piqué à vif que lui, ambassadeur de France, soit porteur d’un pli dont il ignorait à cent pour cent le contenu et a décoché quelques flèches envers son gouvernement pour dire finalement du bien de Reynaud : « C’est un homme qui a toujours eu le courage de dire l’ingrate vérité mais qui a tous les défauts des hommes qui font moins de 1,60 mètre. Il se met en avant de peur de ne pas être pris au sérieux. » Mussolini a lu la lettre avec satisfaction et mépris. En réalité, c’est un étrange message, un peu mélancolique et un peu gascon, qui reflète bien, je crois, le tempérament de son auteur52. Il conclut avec une demi-invitation pour une rencontre avant que les deux peuples ne croisent le fer. Mussolini se propose de répondre par un refus, ajoutant quelques paroles afin de dédramatiser la vision des choses selon Reynaud. Naturellement, la première pensée du Duce a été d’en envoyer une copie à Hitler.
34Mackensen vient me voir, de retour de Berlin. Il parle de la proposition hongroise d’une conférence à trois à laquelle il est opposé. Mauvaise idée de l’inquiet comte Csáky. Au retour du palais de Venise, en voiture, il fait une allusion à la position d’Attolico. Je l’invite à parler et me dit alors qu’on en désire désormais le rappel. C’est normal : c’est un Italien et un gentilhomme. Hitler pense à Farinacci ou à Alfieri comme successeur. J’écarte le premier et je m’arrête sur le second. Je suis certain que Mussolini accèdera au désir allemand.
3525 avril. Je parle au Duce de la question de l’ambassadeur en Allemagne. Mussolini accepte sans difficulté la nomination d’Alfieri53 que j’accompagne au palais de Venise. Le Duce lui donne tout de suite quelques instructions sur sa prochaine mission en Allemagne. Il réitère la fidélité à l’alliance mais en ce qui concerne la guerre, il lui dit qu’il « n’y rentrera seulement que lorsqu’il aura une certitude quasi mathématique de la vaincre ». Alfieri sort de la salle de la Mappemonde avec la conviction qu’il devra adopter une position d’attente en Allemagne. À la Chambre, Giunta54 a fait un discours inconsistant et mal élevé, à caractère nettement germanophile et avec une tonalité si absurde qu’il a gelé la Chambre. Mussolini, qui avait approuvé les premières phrases, est resté frappé par l’atmosphère froide que l’adoration désordonnée de l’Allemagne de la part de Giunta a créée dans l’hémicycle. Inversement, Pavolini, qui a débuté comme ministre, a obtenu un beau succès.
3626 avril. Le journaliste Barzini fils a été arrêté. D’après un des documents prélevés comme d’habitude à l’ambassade britannique, il résulte qu’il est allé informer les Anglais du fait que nous avons un service de contrôle qui opère efficacement dans le milieu de l’ambassade même. Il avait dit que « Mussolini est un fou » et que les journalistes italiens détestent chaque ligne de ce qu’ils sont obligés d’écrire. Le Duce est furieux et parle de le traîner devant le Tribunal spécial.
37La réponse pour Reynaud est prête. Une lettre froide, âpre, dédaigneuse. Demain, je la remettrai à François-Poncet et ce soir une copie à Mackensen. J’ai cherché à la rendre moins âpre, au moins dans la forme, mais mes efforts n’ont eu qu’un modeste résultat. Il est clair que la lettre du Duce permettra à Reynaud de prouver notre extrémisme provocant aux partisans français d’une politique pro-italienne55. Le Duce a également envoyé un bref message téléphonique à Hitler pour lui conseiller de tenir Narvik à tout prix56.
38J’obtiens du Duce la nomination d’Attolico auprès du Saint-Siège57. Je ne voulais pas donner le sentiment aux Allemands qu’il suffisait d’un pouce baissé pour liquider un de nos hommes qui a très bien fait son devoir. Sinon, qui sait où cela finira et qui sera la prochaine victime sur l’autel nazi.
3927 avril. Au fond, François-Poncet n’est ni surpris, ni amer de la réponse de Mussolini à Reynaud. Il ne connaissait pas le texte de la lettre française et je le lui ai montré. Tout en louant l’esprit et la forme du document, il a dit qu’il avait été évidement écrit par quelqu’un qui ne connaissait pas Mussolini, croyant le prendre par le côté sentimental. Grave erreur de laquelle Poncet a cherché, depuis longtemps et en vain, à éloigner son gouvernement qui y est maintenu par des italophiles comme Laval, encouragés parfois par Guariglia lui-même. La lettre de Mussolini, qu’il a définie comme étant « sèche », viendra dissiper beaucoup d’équivoques.
40Je communique à Attolico la torpille hitlérienne : il prend les choses avec beaucoup de dignité et conclut que pour lui, c’est un honneur de terminer ainsi sa mission. Il est heureux d’aller au Vatican : du diable à l’eau bénite. Il confirme de manière synthétique son jugement sur la situation allemande : « Guerre brève, victoire du Reich. Guerre longue, victoire alliée. » Il me dit que Ribbentrop ne cache pas son aversion contre moi car il me considère comme le responsable de la non-intervention italienne. J’en suis fier. Ribbentrop fait à Berlin quelques déclarations annoncées comme étant extraordinaires sur la question norvégienne. Après une première lecture, il me semble que, comme d’habitude, la montagne a accouché d’une souris.
4128 avril. Encore une lettre d’Hitler au Duce pour le mettre au courant de ses succès militaires en Norvège. Ce sont, en général, des lettres de peu d’importance mais Hitler est un bon psychologue et sait que ses courriers trouvent un fort écho dans l’âme de Mussolini58.
42Le Pape a envoyé une lettre au Duce : il rend hommage aux efforts accomplis pour sauver la paix et formule des vœux pour qu’à l’avenir, l’Italie se maintienne hors du conflit. L’accueil de Mussolini a été sceptique, froid et sarcastique59.
4329 avril. Le Roi – me raconte Mussolini – a été très défavorable à la concession du Collier à Goering mais il finira par le lui donner. Inversement, il aurait fort approuvé la réponse à Reynaud. D’après les récits du Duce, il est clair que les entretiens entre lui et le Roi sont tout sauf cordiaux : c’est une discussion polémique continuelle au cours de laquelle l’un affirme avec l’impétuosité et la violence de sa nature la nécessité de la politique qu’il poursuit et l’autre, avec la prudence que sa position et son caractère lui imposent, s’ingénie à en mettre en évidence tous les dangers. Mais dans l’ensemble, Mussolini tient peu compte du jugement du Roi et tient pour négligeable la force effective de la monarchie. Il est convaincu que le peuple le suit et lui seul. Ce matin, il a rendu hommage à Blum qui, dans un article du Populaire60, avait plus ou moins dit la même chose.
44Long entretien avec Helfand qui désormais joue mal et petitement le germanophile officiel. Je lui ai donné quelques informations de caractère général et j’ai évité toute allusion politique qui puisse faire évoluer la situation entre les deux pays. Du reste, beaucoup d’Allemands sont toujours très réservés vis-à-vis de Moscou. Même Bismarck61 disait hier qu’il est nécessaire de s’en méfier pour deux raisons : ils sont bolcheviques et ils sont russes, et plus pour la seconde que pour la première.
4530 avril. Rien de nouveau.
Notes de bas de page
29 Hitler redoutait que le compte rendu ne tombe dans les mains des services alliés. Aussi mettait-il de la mauvaise volonté à en fournir un exemplaire à Mussolini : « Au cours des jours suivants, Mussolini fit réclamer le papier à plusieurs reprises par l’ambassadeur allemand, de sorte que Hitler finit par se décider à l’envoyer. Comme très souvent en pareille occasion, il rédigea personnellement un résumé à l’adresse de Mussolini. » Dans Schmidt Paul, Sur la scène internationale, op. cit., p. 243-244.
30 Dans son discours du 29 mars, Molotov a comparé l’attaque soviétique contre la Finlande à l’annexion de l’Albanie par l’Italie, ce qui a vivement irrité à Rome. À la requête allemande concernant la presse, Ciano explique « que la presse italienne avait été dernièrement complètement bridée, mais que l’idée de faire davantage et d’adopter un ton amical n’était actuellement pas si facile à réaliser, parce que le dernier discours de Molotov contenait deux passages offensants pour l’Italie, auxquels la presse n’a pas réagi grâce uniquement aux consignes qui lui avaient été données ». Dans Les Archives secrètes de la Wilhelmstrasse. IX : Les années de guerre. Livre I (18 mars – 10 mai 1940), Plon, Paris, 1960, doc. no 33, p. 74.
31 En français dans le texte.
32 Bonne volonté. En anglais dans le texte.
33 La presse italienne a publié une carte géographique que Reynaud aurait présentée à Sumner Welles et sur laquelle l’Italie est amputée des territoires obtenus après la Première Guerre mondiale. Dans son Journal, Goebbels précise à la date du 4 avril 1940 que « L’Illustration publie une photo montrant Reynaud devant une carte sur laquelle l’Allemagne est en morceaux et l’Italie divisée ». Dans Goebbels Joseph, Journal. 1939-1942, op. cit., p. 112.
34 Ce mémorandum daté du 31 mars 1940 exclut une grande offensive allemande à l’ouest, qui serait trop risquée pour le Reich. L’Italie doit entrer dans la guerre au moment qu’elle jugera le plus opportun pour ses intérêts : « L’Italie ne sera vraiment une nation indépendante que lorsqu’elle arrivera à briser les barreaux de sa prison méditerranéenne, la Corse, Bizerte et Malte, et à atteindre les murs de cette prison, Gibraltar et Suez. Une fois le problème de ses frontières terrestres résolu, l’Italie doit résoudre le problème de ses frontières maritimes si elle veut être une puissance vraiment mondiale ; la sécurité même de l’Empire est liée à la solution de ce problème. L’Italie ne peut rester neutre pendant toute la durée de la guerre, sans renoncer à son rôle, sans se disqualifier, sans se réduire au niveau d’une Suisse multiplié par dix. » Dans Mussolini Benito, Opera omnia. XXIX, p. 365-366.
35 Léopold Baranyai est président de la Banque de Hongrie.
36 En français dans le texte.
37 Le 2 avril, l’opération Weser, qui consiste à occuper la Danemark et la Norvège, est finalisée par Hitler. Désireux d’éviter une intervention alliée en Norvège et soucieux de préserver les voies de ravitaillement du fer suédois, Hitler occupe le Danemark le 9 avril et, le même jour, des troupes allemandes débarquent en Norvège, à Oslo, Kristiansand, Stravenger, Bergen, Trondheim, Narvik.
38 Dans son courrier, Hitler explique l’action allemande en Norvège par les risques d’une anticipation britannique : « Ces jours derniers, les renseignements reçus de nos agents montraient qu’au cours de la semaine, les Britanniques entreprenaient de débarquer des troupes à deux endroits importants de la côte norvégienne. » Au terme de la missive, le Führer affirme que les deux hommes se retrouveront tôt ou tard côte à côte dans le combat : « Je suis fermement convaincu, Duce, que la Providence nous a choisis tous deux pour la même mission. » Dans Les Archives secrètes de la Wilhelmstrasse. IX : Les années de guerre. Livre I (18 mars – 10 mai 1940), op. cit., doc. no 67, p. 122-124.
39 Italo Balbo et le duc d’Aoste sont respectivement gouverneur de Libye et vice-roi d’Éthiopie.
40 À la fin de la journée du 9 avril, un Conseil suprême allié se tient à Londres. Le lendemain, Reynaud déclare à la Chambre que « la route permanente du minerai de fer suédois vers l’Allemagne est et restera coupée ». Si la Royal Navy réagit rapidement et inflige de lourdes pertes à la flotte allemande, l’effort terrestre est plus lent à se mettre en place. Les premiers contingents franco-britanniques débarquent à 50 kilomètres au nord-ouest de Narvik le 14 avril.
41 Dans Les Lettres secrètes échangées entre Hitler et Mussolini, op. cit., p. 60-61.
42 Outre les opérations en Norvège, dont le déroulement est jugé satisfaisant par le Führer, l’entretien a également porté sur la situation dans les Balkans, où Rome comme Berlin souhaitent maintenir le calme en surveillant particulièrement la Yougoslavie et la Roumanie. Dans Hillgruber Andreas, Les Entretiens secrets de Hitler, op. cit., p. 112.
43 Les doutes de Ciano sont légitimes. Le 13 avril, la flotte britannique coule huit torpilleurs et un sous-marin allemands dans la rade de Narvik.
44 En français dans le texte.
45 Exilé en France pour antifascisme, Alberto Giannini rentre en Italie lors de la guerre d’Éthiopie en 1936. Il est l’auteur en 1941 du livre Memorie di un fesso (Mémoires d’un fêlé).
46 Cette lettre détaille l’ensemble des opérations militaires et se termine par un passage destiné à toucher la sensibilité guerrière de Mussolini : « Ce que ces opérations signifient pour nous, et spécialement pour moi, un seul homme au monde en dehors de moi l’a compris ; cet homme, c’est vous Duce. Vous qui avez eu un jour le courage d’entreprendre votre action en Abyssinie sous les canons anglais. Jusqu’à présent, ma situation n’a pas été très différente ; j’ai décidé moi aussi, dans ces heures les plus difficiles, de ne pas prêter l’oreille à ce que l’on appelle le bon sens, mais d’avoir recours à la puissance de l’honneur, au sens du devoir, et en fin de compte à mon cœur. » Dans Les Archives secrètes de la Wilhelmstrasse. IX : Les années de guerre. Livre I (18 mars – 10 mai 1940), op. cit., doc. no 137, p. 246.
47 Hitler est né le 20 avril 1889.
48 Discours traditionnellement prononcé pour la célébration de la fondation de Rome : « La célébration d’aujourd’hui a une signification particulière et solennelle. Celle-ci se résume dans ce mot d’ordre : travail et armes. Je suis sûr que ceci est le mot d’ordre de tout le peuple italien des Alpes aux mers d’Afrique. » Dans Mussolini Benito, Opera omnia. XXIX, p. 378.
49 Il s’agit des confédérations nationales des corporations syndicales fascistes : « Pour aller en Afrique, nous devons passer par un canal dont le contrôle ne nous appartient que pour une part infime, comme pour se rendre sur l’océan nos navires doivent passer sous le rocher de Gibraltar. Hier, un citoyen britannique me disait que Rome pouvait être bombardée depuis la mer. J’aimerais voir un cuirassé à proximité de Fiumicino pour voir ce qu’il ferait ! » Dans Ibid., p. 379.
50 Directeur du Giornale d’Italia depuis 1926, Virginio Gayda passe pour le porte-parole officieux du ministère des Affaires étrangères italien.
51 Goering est fait maréchal (Feldmarschall) le 4 février 1938.
52 Voici un extrait de la lettre de Reynaud : « Je crois dans la démocratie. Vous croyez dans le fascisme. Mais, ni l’un ni l’autre, nous ne renions notre passé en affirmant par des actes que ce sont là deux formes glorieuses d’une civilisation méditerranéenne qui demeure digne, aujourd’hui comme hier, d’inspirer l’avenir du monde. Et cette civilisation c’est d’abord sur nos deux pays qu’elle repose. » Dans I documenti diplomatici italiani, nona serie (1939-1943), vol. IV (9 aprile – 10 giugno 1940), Libreria dello Stato / Istituto poligrafico dello Stato, Rome, 1966, doc. no 166, p. 135.
53 À la suite de son départ du ministère de la Culture populaire en octobre 1939, Dino Alfieri est nommé ambassadeur près le Saint-Siège.
54 Député fasciste depuis 1921, Francesco Giunta est sous-secrétaire d’État à la présidence du Conseil du 21 décembre 1927 au 20 juillet 1932.
55 « Vos considérations au sujet des rapports entre démocratie et fascisme et sur la nécessité d’un équilibre européen nécessiteraient un long discours qu’il n’a pas lieu de faire ici. » Dans I documenti diplomatici italiani, nona serie (1939-1943), vol. IV (9 aprile – 10 giugno 1940), op. cit., doc. no 219, p. 184.
56 L’effort militaire franco-britannique, confirmé par le Conseil suprême interallié du 26 avril à Londres, se concentre autour de Narvik où les forces allemandes sont sérieusement accrochées.
57 Attolico fait sa visite de congé à Hitler le 9 mai.
58 Comme dans les lettres précédentes, Hitler détaille les succès allemands en Norvège. Dans Les Archives secrètes de la Wilhelmstrasse. IX : Les années de guerre. Livre I (18 mars – 10 mai 1940), op. cit., doc. no 167, p. 286-288.
59 Dans I documenti diplomatici italiani, nona serie (1939-1943), vol. IV (9 aprile – 10 giugno 1940), op. cit., doc. no 232, p. 195. Si, dans sa lettre, le pape Pie XII demande instamment à Mussolini de ne pas étendre la guerre et d’épargner l’Italie, le Duce ne laisse que peu d’espoir au souverain pontife : « Je comprends, Très Saint Père, Votre désir qu’il soit donné à l’Italie d’éviter la guerre. C’est ce qui est arrivé jusqu’à aujourd’hui mais je ne puis en aucune manière garantir que cela durera jusqu’à la fin. Il faut aussi tenir compte de la volonté et des intentions des tiers. » Dans Blet Pierre, Pie XII et la Seconde Guerre mondiale, d’après les archives du Vatican, Perrin, Paris, 1997, p. 51.
60 Journal de la SFIO, Section française de l’Internationale ouvrière.
61 Otto von Bismarck est conseiller d’ambassade à Rome. Il est le petit-fils du chancelier.
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