Le concept d’éducation dans l’Histoire de l’éducation dans l’Antiquité1
p. 67-78
Texte intégral
« En règle générale, le philosophe n’est jamais plus proche de la bête que lorsqu’il veut, en toute confiance, être Dieu ;
de même pour les calculs assurés du perfectionnement du monde. » J.G. Herder, Auch eine Philosophie der Geschichte, III, § 557
1Nous avons hérité du xixe siècle une image de la Grèce ancienne qui, si elle nous paraît aujourd’hui dérisoire, n’en reste pas moins, dans sa banalité même, une image dominante : si les Grecs sont dignes d’admiration c’est parce qu’ils sont à l’origine d’un processus ascendant dans lequel l’esprit humain s’est engagé depuis la nuit des temps. Parce qu’ils ont pressenti, eux, par opposition aux Orientaux, un certain nombre de vérités condamnées, certes, par leur précocité à ne rester que des bribes, des ébauches, mais destinées à se perfectionner au fil du temps avec le progrès de la civilisation occidentale. C’est ainsi que l’on pourrait résumer la mise en perspective de la civilisation grecque dans un régime d’historicité où tout retour au passé est synonyme de régression : le monde grec n’ayant plus le statut d’un paradigme universel (celui que lui assigna l’historia magistra vitae), il est, au contraire, perméable à la relativité canonique qu’impose au temps de l’histoire le concept de progrès.
2Nous mettrons ici en parallèle deux alternatives à ce savoir stéréotypé, mises en place en France au cours de notre siècle : celle d’Henri-Irénée Marrou et celle d’une Grèce décolonisée grâce à l’anthropologie historique, inspirée des travaux de Lévi-Strauss ; décolonisée parce qu’enfin le cordon ombilical qui nous reliait à elle a été coupé, par la reconnaissance de son altérité constitutive. Et ce n’est certainement pas un hasard si c’est au sortir de la Seconde Guerre mondiale, en 1952, que Claude Lévi-Strauss explique, dans Race et Histoire, pourquoi l’idée de progrès est inadéquate, quatre ans tout juste après la parution de l’Histoire de l’éducation, dont le progrès est justement une des bêtes noires : il est clair qu’au sortir de la Guerre il était pour le moins inconvenant de parler de progrès.
3Dans la brève préface que Marrou a écrite en 1964 pour la sixième édition de son livre, il y a trois points sur lesquels nous voudrions attirer l’attention :
- L’auteur assume volontiers le fait que l’historien en tant que sujet est imprégné des événements de son temps2. La subjectivité historique intervient ainsi dans le récit, elle est là d’entrée de jeu.
- Pour illustrer son parti pris, il choisit un exemple, celui de l’éducation spartiate et de son usage funeste par les nazis, contre lequel il s’insurge. Il n’est pas sans intérêt de rappeler que, dans la conjoncture historique des années quarante, cet usage vient masquer même ce qui fut un enjeu capital dans l’histoire de l’instruction publique en France : n’oublions pas que pendant la Révolution, le modèle éducatif « spartiate » de Michel Lepelletier fut présenté par Robespierre contre le projet de Condorcet.
- Le progrès est donc rejeté tout d’abord sur un critère empirique : parce que le sujet/historien prend acte de la réalité de son temps. En regardant autour de lui, il ne voit que barbarie et désolation.
4Ceci étant, le progrès est aussi rejeté pour une autre raison qui, cette fois-ci, ne dépend nullement de la conjoncture ; Marrou, le théologien de l’histoire, se donne la tâche de révéler « la vraie portée de la notion de “progrès3”: la “scène du monde” », l’objet de l’histoire profane, comme on disait jadis, se présente aux yeux de l’historien comme « un drame aux acteurs innombrables et aux péripéties multiples ; leurs actes, leurs gestes, leurs paroles ne donneront qu’une impression confuse, celle du grouillement confus d’une multitude désordonnée, tant qu’on ne se placera pas, pour contempler cette scène, selon le point de vue en fonction duquel elle a été conçue – le point de vue de Dieu4 ». C’est pourquoi les philosophies modernes sont dans l’erreur5, puisqu’elles ont naïvement cru « pouvoir interpréter l’histoire du point de vue temporel, terrestre – au niveau de la terre6 ». La distinction donc s’impose entre progrès « spirituel » et progrès « technique », qui seul est à la portée des hommes et, par conséquent, historiquement intelligible.
5Cette problématique est absolument centrale pour la compréhension à la fois des orientations épistémologiques de Marrou et de sa pratique d’historien. L’opposition radicale entre la théologie de l’histoire et les philosophies de l’histoire telles que nous les connaissons depuis la fin du xviiie siècle est à plusieurs égards du même ordre que le débat ayant opposé, dans les années trente, Étienne Gilson et sa notion de philosophie chrétienne à Émile Brehier et son histoire de la philosophie. C’est dans la perspective de la théologie de l’histoire qu’il faudrait peut-être situer également le combat que Marrou a mené à la fois contre le positivisme et ses héritiers et contre ce qu’il appelle le relativisme, incarné principalement par Lucien Febvre7. Pour comprendre cette double polémique, en apparence contradictoire, il faut tenir compte de deux principes fondamentaux de sa pensée : tout d’abord du constat que « l’histoire est inséparable de l’historien » (c’est la manière dont s’articulent chez lui la subjectivité historique et la conscience individuelle de l’historien, est c’est aussi la manière dont Marrou a fait sienne la réflexion de Dilthey)8. Puis, il faut aussi tenir compte de la vérité constituante et non pas constituée d’une théologie de l’histoire qui se superpose à l’individualité, à la conscience subjective, car elle est justement au delà de celle-ci, elle la surplombe et la détermine, un peu comme, pour saint Augustin, le temps de la cité de Dieu (civitas Dei) est entrelacé à celui de la cité des hommes, de la cité terrestre (civitas terrena), « si bien que seul le regard de Dieu peut les distinguer9 ». Autrement dit : contre le positivisme, critiqué, voire raillé tout au long de l’œuvre théorique de Marrou, l’auteur dresse le sujet historien, a priori ancré dans sa propre temporalité10 ; contre le « relativisme », il brandit la Vérité de la vision chrétienne du monde, composée d’une histoire des valeurs, des axiologa, dont le contenu est par définition diachronique11.
6C’est le cas de certaines valeurs qu’engendre, l’exemple n’est pas pris au hasard, l’éducation ancienne une fois arrivée à son apogée, à l’époque hellénistique.
SENS DE L’ÉDUCATION
7Soit donc l’éducation, « concept d’ambition proprement universelle », pour suivre la classification du De la connaissance historique12. Marrou lui-même, malgré sa certitude inébranlable que « le monde méditerranéen antique a bien connu une éducation classique, un système d’éducation cohérent et déterminé13 », se pose tout de même la question de la pertinence, dans la partie peut-être la plus féconde de sa grande fresque, lorsqu’au tout début il s’interroge sur le rôle de la pédérastie en Grèce. Qu’est-ce donc que l’éducation ? Quel est le rapport entre la paideia et l’éducation telle que nous la concevons aujourd’hui ? « Lorsqu’un moderne parle d’éducation », écrit-il, « il pense en premier lieu à l’école (d’où l’acuité, par moment excessive, que revêtent chez nous les problèmes relatifs au statut de l’enseignement) ; c’est là, en Occident, un héritage et une survivance médiévales : c’est dans les écoles monastiques des Âges Obscurs qu’un lien intime s’est établi entre le maître et le directeur spirituel14.»
8On trouve une définition on ne peut plus claire du concept dans l’introduction de l’ouvrage : « L’éducation est la technique collective par laquelle une société initie sa jeune génération aux valeurs et aux techniques qui caractérisent la vie de sa civilisation […] Cela suppose évidemment un certain décalage dans le temps : il faut d’abord qu’une civilisation atteigne sa propre Forme avant de pouvoir engendrer l’éducation qui la reflétera »15. Commence alors une attente longue de cinq siècles avant que l’on puisse vraiment parler d’éducation en Grèce, puisque ledit « décalage » engloutit les époques archaïque et classique. Ainsi l’éducation dans l’Athènes classique est « archaïque par rapport à ce que devait être la forme définitive de l’éducation classique16 ». C’est peut-être dans ce décalage qu’il faut chercher aussi la raison pour laquelle les Grecs se sont privés de terme équivalent au nôtre : en effet, paideia ne répond pas exactement à la définition du concept : « Paideia ! Il faut méditer sur l’ambiguïté essentielle de ce mot, qui désigne à la fois éducation et culture17.»
9Voici maintenant le sens que Marrou donne à l’histoire de l’éducation grecque : à en croire son introduction, celle-ci pourrait se résumer en la longue transition d’une culture de nobles guerriers vers une culture du Livre18. Quant à l’étude du modèle éducatif proposé par les Anciens, son sens serait, pour nous autres modernes, de réapprendre ce que signifie le mot Sagesse19.
10Au lieu de « sens » nous devrions dire plutôt « direction », « orientation » dans le premier cas, « signification », « contenu », dans le second. Pour ne pas répondre avant Marrou et à sa place à la question angoissée, angoissante du sens de l’histoire20.
11Et pourtant : si l’on relie ces deux petites phrases de l’introduction, on obtient quelque chose qui ressemble bien à un énoncé de philosophie de l’histoire, dont la clef de voûte, aussi paradoxal que cela puisse paraître, est l’historia magistra vitae21. Cette histoire n’est pas un compte rendu de l’aléatoire ou de l’arbitraire, comme celle des « relativistes », elle est une éducation en soi. Étudier l’histoire d’une éducation grecque à la recherche du « Livre », c’est apprendre la « Sagesse ». Pour expliquer leur prémonition sans avoir directement recours à un projet divin qui leur eût été imposé, Marrou parle longuement de l’antécédent oriental, de ces civilisations de scribes palatiaux, sources inépuisables d’inspiration pour les Grecs. Mais cela a bien un prix : pour qu’il n’y ait pas de rupture mais continuité dans le cours de cette histoire qui, considérée à travers le prisme de la théologie de l’histoire, n’est qu’une manifestation du vaste projet divin, Marrou est d’une certaine manière obligé d’oublier la Cité et l’invention par les Grecs d’un usage nouveau de l’écriture dans un espace nouveau de publicité22. Pour que l’écriture du scribe aboutisse à l’Évangile, en passant par la Crète préhellénique, par Mycènes et enfin par la Grèce classique puis hellénistique, il fallait que les Grecs renoncent à leur stupéfiante originalité : celle d’avoir mis l’écriture es meson, comme le pouvoir politique. Le grand absent de l’histoire de l’éducation c’est précisément la politique.
PÉDÉRASTIE
12L’incompréhension profonde qui frappe les amours initiatiques pour des paides grecs est le résultat, nous semble-t-il, de cette interprétation. En refusant d’accorder à la pédérastie toute sa place dans la culture grecque, Marrou regarde les kaloi et leurs amants adultes un peu comme il regarde Ulysse, comme une curiosité dont il convient de se méfier : le préféré d’Athéna n’est à ses yeux qu’une « louche figure d’aventurier levantin23 ». Son refus d’une lecture anthropologique de la pédérastie, lecture dont il était potentiellement capable, vu la profondeur de sa connaissance de la documentation et de l’historiographie sur le sujet, ce refus est pleinement assumé dans la préface de 1964. L’anthropologie historique lui est étrangère au point de déclarer que les Spartiates prenaient soin « d’entraîner la jeunesse à la dissimulation, au mensonge et au vol ». Il est assez amusant de le voir renvoyer24 à la cryptie telle que Jeanmaire la décrit sans tenir compte de cet élément.
13Pour comprendre les raisons de cette impasse intellectuelle il ne suffit pas de penser que la métis ou l’homophilie répugnent naturellement à un Marrou profondément chrétien. Il est trop grand historien pour fermer les yeux devant les documents ; il a d’ailleurs reconnu, in fine, après la publication, en 1969, des Paides e Parthenoi d’Angelo Brelich, que des rituels archaïques d’initiation ont bien survécu tant à Sparte qu’à Athènes à l’époque classique, et qu’il faut bien en tenir compte25. Cette impasse est d’abord le produit de l’aversion qu’il ressent vis-à-vis de l’érudition allemande inventrice d’un Indogermanisch-nazionalismus. Car en fait l’homophilie grecque remonte bien à ces Aryens haïs, Marrou le reconnaît à contre cœur et à demi-mot quand il renvoie, en 1964, au détestable Karl Otfried Müller. De plus, c’est un usage bien grec et non point « importé » par les envahisseurs doriens, comme le soutenait Bethe en 190726. En fait, Marrou se bat sur deux fronts à la fois : d’un côté contre les érudits allemands et de l’autre contre les héritiers des sociologues, ces « anthropologues » qu’il refuse d’ailleurs d’appeler autrement que « sociologues » ou « ethnographes ». Jeanmaire, par exemple, trouve bien sa place, dans les notes complémentaires, mais une bien curieuse place : Couroi et Courètes, qui date tout de même de 1939, est convoqué contre « l’imagination morbide des sociologues » qui voient dans la flagellation du sanctuaire d’Orthia un rite ancien, mais l’auteur est fustigé, neuf notes plus loin, pour avoir soutenu que la pédérastie était un « rite de passage27 ». Dans son compte rendu critique de l’interprétation anthropologique de la pédérastie, il ne voit que majorations obscènes du témoignage des sources, dues à la mauvaise volonté, à l’aveuglement, pire encore, aux refoulements obscurs et peut-être à l’inversion non assumée des « sociologues28 ». C’est là l’expression d’une profonde méfiance vis-à-vis de l’anthropologie en tant qu’héritière de la sociologie durkheimienne, méfiance qui s’explique assez bien par la tradition bergsonienne et péguyste dont Marrou se réclame volontiers29 et qui trouve aussi une formulation théorique dans le De la connaissance historique, où il explique que les « culturologistes », comme il les appelle, s’amusent à jouer à un puzzle totalement arbitraire en cherchant l’unité là où il n’y a que disparité30.
14C’est pourquoi la seule attitude possible est de balayer d’un revers de main toute la problématique, comme relevant d’autres domaines que celui de l’histoire : « Mais étudier la technique de l’inversion, la proportion d’homosexuels dans la société grecque n’intéresse guère que la psychiatrie ou la théologie morale ; le véritable intérêt humain n’est pas là : il réside dans la conception de l’amour (que depuis le xiie siècle nous avons appris à approfondir au-delà de la libido, au sens biologique du terme) et de son rôle dans la vie31.»
15Car Marrou ne semble pas avoir l’ombre d’un doute là-dessus : « L’essence de la pédérastie ne réside pas dans les relations sexuelles […] : elle est d’abord une certaine forme de sensibilité, de sentimentalité, un idéal misogyne de virilité totale32.» Par un artifice christiano-freudien, Marrou nous propose sa propre interprétation du rapport pédagogique instauré entre éraste et éromène, en faisant bien entendu référence à Platon : « Chez l’aîné se développait un sentiment complémentaire (c.-à-d. à celui de l’éromène) : la théorie socratique est illustrée, dans la tradition, d’une abondante série d’anecdotes symboliques ; répondant à cet appel, l’aîné sentait naître en lui une vocation pédagogique, il s’instaurait maître de son aimé, s’appuyant sur ce noble besoin d’émulation. On décrit trop souvent l’éros grec comme une simple aspiration de l’âme, éperdue de désir, vers ce qui lui manque ; du côté de l’amant, l’amour antique participe pourtant aussi à l’agapè par cette volonté d’ennoblissement, de don de soi, par cette nuance, pour tout dire, de paternité spirituelle33. Ce sentiment, si minutieusement analysé par Platon, s’éclaire à la lumière d’une analyse freudienne : c’est évidemment l’instinct normal de la génération, le désir passionné de se perpétuer dans un être semblable à soi, qui, frustré par l’inversion, se dérive et se défoule sur ce plan pédagogique. L’éducation de l’aîné apparaît comme un substitut, un Ersatz dérisoire d’enfantement : “L’objet de l’amour (entendez : pédérastique) est de procréer et d’engendrer dans le Beau34. ” »
16Détournement heureux de la libido, puisque la pédagogie en est le bénéficiaire, mais détournement accidentel. Car en fait tout ceci n’est qu’accident : l’amour pédérastique ne fut rendu possible que grâce à une faille du système. Il n’y avait pas d’études secondaires, par conséquent les enfants restaient inoccupés après la fin de leurs études primaires : « C’était une période creuse, l’âge trouble où l’on s’initiait aux sales amours35.» Otium et reges prius et beatas perdidit urbes…
17Voilà comment la pédérastie grecque contribue, à travers de « monstrueuses aberrations36 », à l’accomplissement du projet divin. L’amour pour les garçons connaissait bien évidemment des débordements d’ordre purement charnel, ce serait naïf de le nier, comme le faisait l’historiographie pudibonde d’avant Bethe37, mais, à la vérité, l’objectif était louable et, par conséquent, les moyens par lesquels on y parvenait n’ont que très peu d’importance : « Le rapport de maître à disciple restera toujours, chez les Anciens, quelque chose du type d’amant à aimé ; l’éducation était moins, en principe, un enseignement, un endoctrinement technique, que l’ensemble des soins dépensés par un aîné plein de tendre sollicitude pour favoriser la croissance d’un cadet brûlant du désir de répondre, en s’en montrant digne, à cet amour38.»
LE DOUBLE PROJET
18Marrou est lui-même passionné de pédagogie. Il suffit de regarder l’attention qu’il prête aux questions de méthode d’enseignement et à des lectures théoriques, comme celle de Piaget. Cependant, si le souci pédagogique est omniprésent dans l’ouvrage, l’Histoire de l’éducation est animée par un double projet, à la fois politique et pédagogique, et nous n’entendons pas séparer ces deux volets. Politique donc, mais en quel sens ? Tout d’abord l’aspect politique est clairement énoncé à divers endroits où l’auteur, conscient de la subjectivité historique, s’explique sur son manque de « calme » scientifique et signe ses anachronismes et ses comparaisons, dans des pages aussi fortes que celle des « illusions perdues » qui terminent le chapitre sur l’éducation spartiate et auxquelles nous avons déjà fait allusion39. L’objectif est de renverser les « idoles » néo-païennes dressées par les différents avatars du fascisme de l’entre-deux-guerres, idoles dont le socle est bien souvent le prétendu idéal de « l’esprit sain dans un corps sain40 », ainsi que l’admiration coupable de ces mêmes milieux pour l’autoritarisme décadent de Sparte. En ce sens, il s’agit de faire, en quelque sorte, une « histoire du présent ».
19Mais le problème politique majeur que sa vision du monde grec nous pose maintenant vient du fait qu’en inscrivant le concept d’éducation antique dans son projet d’ensemble, autrement dit, en l’inscrivant dans une historicité qui lui soit adéquate, Marrou est obligé, d’une certaine manière, d’évacuer la politique grecque. L’historien ne voit rien d’exceptionnel dans la politique des Grecs, Athènes étant pour lui une république (p. 70) dont l’évolution présente « des parallélismes avec celle de la France moderne » (p. 73), au point que Cimon peut être qualifié de « chef de la vieille droite aristocratique » (p. 72) qui lui paraît par ailleurs, dans la hargne et la stérilité de son opposition à la démocratie, ressembler à « une véritable émigration de l’intérieur », lorsqu’elle véhicule le mirage spartiate (p. 52). En fait, Marrou n’a d’yeux que pour l’exceptionnelle spiritualité des Grecs, qui prépare le terrain aux Apôtres. Pour lui, la seule véritable cité étant celle de Dieu, les cités des hommes se ressemblent. À la virtù machiavélique du héros homérique répond l’idéal chrétien du Moyen Âge occidental, et le nationalisme des Modernes n’est que le retour de la fragmentation dans un monde occidental ne reconnaissant que la seule autorité de l’Église. Lorsqu’il parle, dans la Théologie de l’histoire, de la naissance du concept d’état souverain, il évoque la vieille idole païenne de l’État souverain41. L’éthique de la cité antique est une éthique totalitaire, puisque l’individu y est entièrement assujetti à la communauté, à un appareil politique qui ressemble à une ruche (p. 126, 335). Sparte ne diffère pas énormément d’Athènes sur ce point et, à l’époque archaïque, Marrou pense même qu’elle ne diffère pas du tout.
20L’aspect pédagogique de son projet se développe à la fois autour du volet politique, qu’il s’agit d’étayer par une démonstration scientifique, et autour d’une idée plus vaste, concernant l’idéal éducatif des Anciens, qui, en progressant vers sa forme définitive, a conduit la culture grecque du domaine de la guerre à celui du Livre, des origines indo-européennes tant vantées par les racistes à son véritable accomplissement, qui est en fait sa rencontre féconde avec le Judaïsme. Éduquer c’est apprendre à lire et à écrire ; cela tombe bien, car c’est ainsi seulement qu’on accède aux Écritures. Le cheminement qui va de la rencontre avec l’Autre fondamentalement différent, c’est-à-dire de la rencontre, déjà dès la période archaïque, du monde grec avec l’Orient des scribes jusqu’à la période hellénistique et romaine où l’Autre s’intègre dans le Même pour donner naissance à la civilisation occidentale et chrétienne, ce long cheminement passe obligatoirement par une phase archaïque. Et cette phase archaïque coïncide, en matière d’éducation, avec la période classique, avec la période de la cité, par exemple d’Athènes. L’univers de la cité grecque est ainsi une étape nécessaire mais pas plus significative que le haut archaïsme dans l’élaboration du modèle. C’est là que l’on se trouve devant les limites du concept d’éducation. Pour les Athéniens du ve siècle, éduquer cela se fait dans l’Agora aussi bien que chez le cithariste. Et le « difficile métier d’homme42 » s’apprend ailleurs que dans l’école, réduite à l’apprentissage des bases de l’écriture ou de la musique.
21Certes il y a les palestres qui véhiculent toujours, et pour longtemps encore, le vieil idéal guerrier de l’homme capable de faire face à l’ennemi, mais le citoyen athénien et même l’homme politique de la fin du ve siècle, quand il n’est pas un aristocrate comme Périclès mais un homme nouveau, comme Cléon, est ex agoras, c’est-à-dire formé sur le tas43.
22D’Homère aux sophistes, qui, pour Marrou, étaient les « premiers professeurs d’enseignement supérieur44 », tout ce qui a pu se passer en Grèce en matière d’éducation n’est en fait que balbutiements. Nos sympathiques collègues, les sophistes, n’étaient que des techniciens du politique, pas des philosophes, de vulgaires relativistes, non des subjectivistes. Des professeurs tenant boutique qui enseignaient à leurs disciples comment faire pour « avoir, en toute circonstance, toujours raison45 ». Il faudra attendre Platon pour que le cadre éducatif dépasse les besoins de la Cité classique à plusieurs reprises qualifiée de totalitaire, pour devenir quête d’une « Sagesse contemplative d’ordre personnel46 ». Et pour Marrou, pour nous, Chrétiens du xxe siècle, c’est bien cette sagesse contemplative qui compte, bien plus que le joyeux désordre de l’Agora d’Athènes. Dans sa Paideia, Jäger faisait de la République platonicienne une métaphore de la psychè et, du système politique qui y était proposé, une métaphore de l’éducation. Pour Marrou aussi, la philosophie commence là où la politique s’arrête. Le cadre institutionnel de la cité antique est un carcan pour l’âme qui cherche à s’affirmer, et c’est seulement au prix du politique qu’elle peut accéder à une existence qui lui soit propre. Dans le vieux dilemme entre Sparte et Athènes, Marrou tranche le débat en décrétant la victoire définitive d’Alexandrie. C’est ainsi que l’Hellenismus, cette brillante découverte de Droysen, se transforme en civilisation de la paideia, étape intermédiaire entre la civilisation de la polis et celle de la Théopolis, la cité terrestre de Dieu telle qu’elle se développe au Moyen Âge47.
23Sommes-nous partis d’un a priori faisant des Athéniens un peuple éduqué pour et par la démocratie ? Peut-être. Mais en tout cas pour Marrou, l’éducation, la vraie, la seule qui mérite ce nom, puisqu’elle a un programme, des structures concrètes, un personnel professionnel, et surtout un objectif dans lequel l’homme moderne puisse se reconnaître, cette éducation est histoire, puisqu’elle se réalise à travers l’étude d’objets appartenant au passé. À l’école hellénistique on n’étudie pas Callimaque…
24Revenons, pour conclure, au constat initial, celui portant sur le refus de la notion de progrès, qu’il faudra, au bout de ce cheminement, nuancer en nous posant la question suivante : certes, la Grèce de Marrou n’est pas « nôtre » en tant qu’enfance d’un organisme qui ne fait que croître depuis la nuit des temps. Mais, à l’intérieur de cette conception chrétienne de l’histoire dont le véritable protagoniste n’est autre que Dieu, lorsque Marrou se penche sur l’« histoire profane » de l’éducation, ne le fait-il pas dans l’intention de donner un sens à ce mouvement ayant amené la Grèce de la guerre aux Écritures48 ? Et le sens de ce mouvement n’est-ce pas, d’une certaine manière, celui d’une linéarité progressive ? Car, en fait, si le monde grec suit, lui, un mouvement en forme de cloche, allant de la genèse à l’acmè, puis à la décadence49, l’éducation, quant à elle, évolue progressivement jusqu’au moment où elle atteint sa forme définitive : celle à laquelle elle parvient à l’ère hellénistique. C’est à partir de ce moment qu’elle se transmet comme une valeur diachronique, comme un axiologon, comme une trouvaille, une invention que les Grecs auraient faite et dont l’humanité ne saurait se séparer, comme elle ne peut se séparer du Parthénon. Au moment où la « courbe » de l’évolution de l’éducation grecque rencontre celle, légèrement décalée, de la civilisation grecque, Marrou situe la fin (télos-skopos) du mouvement de l’éducation, puisqu’à partir de là elle se fige en éducation classique pour se transmettre jusqu’à nous. Mais là se situe également la fin de la cité classique. On peut discuter des détails chronologiques, mais le fait est que, pour Marrou, le tournant crucial est Platon, qui affranchit l’homme grec de sa servitude communautaire pour l’éduquer en soi.
25Voici une tentative pour représenter la courbe de l’histoire grecque dans sa relation « décalée » avec celle de l’éducation, d’après Marrou :
Notes de bas de page
1 Avant que nous le relisions, Marrou s’est souvent relu lui-même. Dans une brève préface qui porte, à côté de la signature, la date du 1er juillet 1964, on trouve des renvois à des publications de 1969 (Brelich), voire de 1971 (Lemerle). Nous utiliserons dans cette contribution une réimpression (Collection ‘Points, Histoire’, Seuil, Paris, 1981) de la 6e édition (1964).
2 Histoire de l’éducation, p. 10 (cité dans l’intermezzo ci-dessus, p. 61), et p. 51-54.
3 « Ce qui est révélé, ce qui pour le chrétien est un donné, une certitude, objet de foi autant que d’espérance, c’est le progrès spirituel de l’humanité. Ce qui d’âge en âge, grandit, mûrit, s’approche insensiblement de son achèvement c’est l’Église, la Jérusalem céleste », H.-I. Marrou, L’ambivalence du temps de l’histoire chez saint Augustin, Montréal et Paris, Institut d’Études médiévales et Vrin, 1950, p. 25-26. C’est Pierre Vidal-Naquet qui a attiré notre attention sur cette conférence de Marrou, exposé extrêmement clair et concis de sa pensée.
4 Ibid., p. 27-28.
5 Pour Marrou, les philosophies de l’histoire ne sont d’ailleurs que des mauvaises contrefaçons de la théologie (Théologie de l’histoire, Paris, Seuil, 1968, p. 25-27), et il est même possible de les dater avec précision : « Qu’il soit entré beaucoup d’illusions dans leur philosophie du progrès n’est aujourd’hui que trop évident : ces hommes [c.-à-d. les libéraux de 1789 à 1914] croyaient peu au péché originel, et cette ignorance délibérée d’un des éléments essentiels à l’analyse de la condition humaine explique bien des échecs de leur part, des positions fausses » ibidem, p. 180. Cf. p. 45, 49, 53 et passim.
6 L’ambivalence du temps de l’histoire, l.c.
7 Contre le « relativisme » de Lucien Febvre : De la connaissance historique, Paris, Seuil, 1954, « Points Histoire », 1975, p. 141-142, 257-258 etc. De l’autre côté, il faut dire que pour Marrou, « l’humiliation actuelle [c.-à-d. de l’histoire en tant que discipline] est aussi le résultat d’une réaction à l’hubris qui l’avait précédée et que le positivisme, tout comme l’idéalisme, avaient favorisée et alimentée » (Valdino Tombolato, Storia, Ragione, Fede. Saggio sul pensiero di Henri Irénée Marrou, Padoue, 1977, p. 60-61 ; cf. ibid., n. 13). E. Gilson, L’esprit de la philosophie médiévale, Paris, 1944, p. 370-376, montre que « surtout à partir de Condorcet et de Hegel, la “philosophie de l’histoire” apparaît comme une transposition sur le plan naturel des concepts de base hérités de la théologie chrétienne, telle que le Moyen Âge l’avait héritée de saint Augustin » ; L’ambivalence du temps de l’histoire, op. cit., p. 15.
8 De la connaissance historique, p. 47-63 ; Histoire de l’éducation, p. 10, 52-54. Voici ce qu’écrit V. Tombolato, op. cit., p. 52 : « Meglio di Heidegger, del cui pensiero non ha la tonalità “paterica” comune del resto a larga parte del pensiero esistenzialista, Dilthey ha saputo analizzare i nessi strutturali che rendono la storia inseparabile dallo storico ; ne ha intuito i limiti di autonomia, di indipendenza, perchè […] è tra tutte le discipline la più vicina alla vita ». Dilthey fut connu en France grâce à Raymond Aron, Essai sur la théorie de l’histoire dans l’Allemagne contemporaine, Paris, Gallimard, 1938.
9 Cité de Dieu, I, 35 avec les commentaires de Marrou, Théologie de l’histoire, p. 49-52, et L’Ambivalence du temps de l’histoire, op. cit., p. 78, d’où vient le passage cité ci-dessus.
10 De la connaissance historique, p. 141-142.
11 Ibid., p. 306-311.
12 Ibid., p. 142-147.
13 Histoire de l’éducation, p. 13.
14 Ibid., p. 62.
15 Ibid., p. 13-14.
16 Ibid., p. 69.
17 Ibid., p. 294.
18 Ibid., p. 15.
19 Ibid., p. 18-19.
20 On trouvera la réponse la plus explicitement formulée dans l’Ambivalence du temps, op. cit., p. 18 : « Oui, disions-nous, l’histoire a un sens : le pèlerinage suivi par l’humanité à travers la durée peut être représenté par une trajectoire unique et cette marche est ascendante […] Il ne s’agit de rien d’autre que de la réalisation d’un dessein grandiose, voulu par Dieu pour sa création, réalisation compromise par le Péché et assurée à nouveau, et de façon plus merveilleuse, par l’intervention du Verbe incarné dans le tissu même de l’histoire, par l’œuvre de la rédemption. »
21 Ibid., p. 19 : « […] l’exemple antique peut utilement nous aider à retrouver » le sens du mot Sagesse. Marrou se réclame d’ailleurs de l’historia magistra vitae : De la connaissance historique, p. 261-262, et critique, dans la Théologie de l’histoire, les penseurs chrétiens qui ont cru voir dans le Moyen Âge la réalisation de la Cité de Dieu. Pour que l’histoire puisse être vraiment magistra il faut que l’historien soit toujours conscient de l’inintelligibilité de la Cité de Dieu.
22 Voir, sur le fond, J. Svenbro, Phrasikleia, Paris, La Découverte, 1988 ; M. Detienne (éd.), Les savoirs de l’écriture en Grèce ancienne, Lille, Presses universtaires de Lille, 1988 ; id., « L’espace de la publicité : ses opérateurs intellectuels dans la cité », ibid., p. 29-81.
23 Histoire de l’éducation, p. 35.
24 Note complémentaire 27, p. 352.
25 Voir ibid., p. 10, note 1, où il reconnaît qu’il y a là une lacune dans son ouvrage. C’est le signe d’une évolution importante dans la réflexion de Marrou sur la Grèce.
26 Die Dorier, Breslau 1844, p. 289-298, référence qu’on trouve dans la note 1 du chapitre sur la pédérastie, p. 353. E. Bethe, « Die dorische Knabenliebe, ihre Ethik, ihre Idee », Rheinisches Museum, 62, 1907, p. 438-475, cité dans la note 7 et âprement critiqué en même temps que Jeanmaire dans la note 10, p. 356. Pour un exposé du développement de la réflexion moderne sur la pédérastie allant de Müller à Dover et à Sergent, en passant par Marrou, voir A. Schnapp, Le chasseur et la cité. Chasse et érotique dans la Grèce ancienne, Paris, Albin Michel, 1997, p. 126-133. Sur le cas spartiate, cf. P. Cartledge, « The Politics of Spartan Pederasty », Proceedings of the Cambridge Philological Society, 207, 1981, p. 17-36.
27 Ibid., n. 31, p. 353, puis n. 10, p. 356. Voir, pour une discussion sur le fond de la thèse de Marrou, Eva Cantarella, Selon la nature l’usage et la loi, Paris, 1991, p. 17-23. Dans l’Histoire de l’éducation, Marrou ne fait pas vraiment la différence entre une anthropologie « évolutionniste » et celle d’inspiration structuraliste.
28 « Les modernes, à l’encontre [scil. de Strabon], ont tenu à surenchérir de ce côté [c’est-à-dire du côté de la sexualité] : ils ont voulu que le rite d’initiation, l’intégration à la communauté mâle, ait été non pas la liaison prise en général, mais très précisément l’acte anormal ; l’humeur virile réalisant de façon matérielle et brutale la transmission de mâle à mâle de la vertu guerrière. À la vérité, cela dépasse de beaucoup les données de nos textes : il s’agit là d’une de ces majorations obscènes auxquelles les sociologues modernes ont si souvent soumis les rites et les légendes considérés comme “primitifs” : de telles hypothèses relèvent d’une psychanalyse élémentaire, tant de refoulements ingénus se dissimulent dans l’âme des savants !… ».
29 Auguste Comte et Emile Durkheim sont critiqués pour avoir plombé les ailes de la sociologie naissante par leurs a priori, « par l’amoncellement de spéculations méthodologiques qu’ils lui offrirent en guise de berceau » (De la connaissance historique, p. 26). L’ascendant intellectuel de Péguy est revendiqué ibid., p. 95, 190-193, contre la philosophie de l’histoire qui veut imposer ses calculs à une réalité qu’elle ne prend pas la peine de palper. Mais avant tout, Marrou se veut évidemment l’héritier de Dilthey (ibid., p. 16-20) et l’élève du « sophiste napolitain » (ibid., p. 21), c’est-à-dire de Benedetto Croce, avec qui il discute à chaque page presque du De la connaissance historique. Cf. V. Tombolato, op. cit., p. 49 et, sur Dilthey, p. 41-57.
30 « Nos théoriciens de la civilisation, les “culturologistes”, ne sont pas les seuls à avoir abusé de cette hypothèse unitaire : les ethnographes de leur côté ont bien souvent péché eux aussi, ceux par exemple qui ont défendu la notion de “cycles culturels”, civilisations “primitives” définies par l’association (d’après eux empiriquement constatée, mais en un sens aussi nécessaire) de techniques variées […] Ce mythe, car c’est un mythe, de l’unité structurale des civilisations est une des formes de la grande tentation idéaliste que doit surmonter l’historien : sans cesse il risquera de conclure de la juxtaposition de fait à l’unité hypothétique, à l’“esprit” d’une civilisation, au “génie” d’un peuple, au Zeitgeist », De la connaissance historique, p. 167. C’est le même état d’esprit, qu’il qualifie lui-même de nécessaire « recherche de la vérité », qui éloigna Marrou de l’anthropologie structurale et de la réflexion historiographique des années 70. Voir ibid., p. 296-311. Cf. Théologie de l’histoire, p. 66 : « Il n’est pas d’idole plus dangereuse que l’hypothèse qui postule entre les différentes manifestations contemporaines de la vie une unité plus ou moins comparable à celle d’un organisme vivant. Ce témoignage de praticien est l’avertissement solennel que l’historien adresse à son frère le philosophe ; nous devons, plus que jamais, le lancer avec force car la tentation d’adorer cette idole renaît, de génération en génération, comme le phénix de ses cendres : ne voyons-nous pas, en ce moment même, le structuralisme à la mode rechausser allègrement les bottes de Spengler ? » Puis, dans la note 1 de la même page : « Il n’est pas sans signification de voir le nom de ce maître d’erreurs sombres, de ce précurseur du nazisme, apparaître comme naturellement sous la plume de Michel Foucault, au moment d’achever les Mots et les Choses, Paris, Gallimard, 1966, p. 345 et 382 (bis !) ».
31 Ibid., p. 55-56. Le psychiatre sera encore une fois appelé à observer la sexualité des Grecs dans le cas de Sapho, autre exemple, symétrique du premier, « d’instinct sexuel dévié » (ibid., p. 66).
32 Histoire de l’Éducation, p. 60.
33 Il s’agit là d’un artifice rhétorique digne de Gorgias : l’agapè dont Marrou nous assure que la pédérastie participe n’existe pas en Grèce. Elle ne fera son apparition qu’avec les Chrétiens. Les Grecs étaient incapables d’aimer collectivement, si ce n’est dans des figures de style du genre « être amoureux du peuple ».
34 Ibid., p. 60-61, terminant par une citation de Platon, Banquet, 206e.
35 Ibid., p. 158.
36 Ibid., p. 61.
37 « Ainsi, je me suis aperçu un jour de ce fait majeur que la littérature historique antérieure dissimulait par pudibonderie, à savoir que la pédérastie avait joué un rôle de premier plan dans la pédagogie de la Grèce antique », De la connaissance historique, p. 307. Cf. la critique amusée de la thèse d’une pédérastie « pure » dans l’Histoire de l’éducation, p. 55 et note complémentaire 4, p. 354.
38 Ibid., p. 62.
39 Ibid., p. 52-54.
40 Ibid., p. 79-81.
41 Théologie de l’histoire, p. 172.
42 Nous empruntons cette expression à la Théologie de l’histoire, p. 183
43 Ex agoras est une expression d’Aristophane qui qualifie le Charcutier, protagoniste et alter ego de Cléon, dans les Guêpes, v. 181.
44 Histoire de l’éducation, p. 87.
45 Ibid., p. 89.
46 Note complémentaire 20, p. 367, à la suite de W. Jäger, Paideia, II, p. 271-278, 353-357.
47 Histoire de l’éducation, p. 150-154.
48 V. Tombolato, op. cit., p. 183, nous apprend que : « La teologia della storia appartiene più all’ordine pratico che all’ordine teoretico ». Il n’empêche que la conclusion de l’Histoire de l’éducation grecque pose, à la place des Anciens, la question angoissante « à quoi, à Qui se consacrer », maintenant que « l’admirable capital humain » s’est enfin affranchi des contraintes de la cité totalitaire et a pu s’éduquer en tant que tel et non plus « en tant qu’élément au service d’un appareil politique » (p. 335).
49 Histoire de l’éducation, p. 13-15.
Auteurs
Université de Toulouse II-Le Mirail
Université de Toulouse II-Le Mirail
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