L’historiographie latine
Dans l’Europe de l’An Mil
p. 389-405
Texte intégral
1On entend par historiographie la façon dont, à une époque donnée, on a écrit l’histoire. Encore faudrait-il être d’accord sur ce que nous entendons par histoire. Un siècle et demi d’histoire « scientifique » nous a amené à distinguer une histoire authentique, élaborée selon des méthodes critiques, histoire savante soigneusement distinguée de la « petite histoire », de la légende ou de la fable. Du côté de la légende ou de la fable les promoteurs de l’histoire critique ont rejeté l’hagiographie, écrits sur les saints trop enrichis de légendaire, et l’épopée qui, par sa forme poétique, rejoindrait la fable.
2Pour l’Europe de l’An Mil, que peut-on entendre par historiographie ? Comme nous, ceux qui alors écrivaient l’histoire entendaient bien donner un récit vrai de ce qui était passé : narratio rei gestae. Le temps qui s’est écoulé est le principe organisateur d’une réflexion et d’une écriture qui rapporte des faits et les explique. Nous avons pris l’habitude de distinguer un certain nombre de genres historiographiques : histoires universelles et histoires ecclésiastiques, histoires nationales et histoires de peuples, annales, histoires locales et histoires d’institutions, d’évêchés et de monastères en particulier1.
3En examinant les écrits relevant de ces genres historiographiques, nous nous apercevrons qu’il n’est pas possible de les distinguer radicalement de l’hagiographie, qui est l’histoire des hommes les plus remarquables, ni de l’épopée, qui est la forme supérieure de toute écriture et – pourquoi pas ? – de l’écriture de l’histoire.
4Quant à l’appréciation par nos devanciers de la qualité de l’historiographie latine dans l’Europe de l’An Mil, nous retrouvons des débats qui ont déjà été évoqués à propos d’autres domaines de l’histoire. Nous serions dans une période de médiocrité générale : pour certains, il n’y aurait pas eu d’historien digne de ce nom entre Paul Diacre († v. 799) et Orderic Vital (v. 1075 – ap. 1143)2. Plus précisément, le xe siècle aurait été, dans ce domaine aussi, un « siècle de fer » après l’éclat de la Renaissance carolingienne et avant une reprise de l’historiographie postérieure à l’An Mil. Pour modifier ces appréciations, je voudrais ouvrir ici les dossiers des différents genres historiographiques au xe et dans la première moitié du xie siècle.
5Dans la tradition historiographique occidentale, depuis l’Antiquité tardive, il convient de distinguer les « histoires » et les « chroniques ». Eusèbe de Césarée au ive siècle avait rédigé une Histoire ecclésiastique traduite en latin par Rufin d’Aquilée et une chronique, simple table chronologique, traduite en latin par saint Jérôme. Ces deux ouvrages restent des modèles et comme les deux extrêmes épistémologiques de l’écriture de l’histoire : d’une part l’histoire ecclésiastique – catholique c’est-à-dire universelle – donnant les clés pour comprendre le monde et l’action de Dieu dans le monde ; d’autre part la simple table chronologique, avec un minimum d’information3.
6Aux xe et xie siècles, cette distinction reste fondamentale entre les histoires d’une part et les annales de l’autre. L’histoire serait en nette régression et les annales auraient disparu, tandis qu’un troisième genre, intermédiaire en quelque sorte, se développe : les histoires locales et les histoires d’institutions connues sous le nom de gesta.
7La « crise » des genres traditionnels n’est certainement pas aussi nette et nous voudrions montrer aussi que l’histoire reste présente là où l’on n’a pas voulu la voir : du côté de l’hagiographie ; et qu’elle est présente là où l’on n’a guère su la voir : du côté de l’épopée. Il nous restera alors à apprécier « l’essor » de l’activité historiographique au xie siècle en la comparant à celle de la période précédente.
I. UN EFFACEMENT DE L’HISTOIRE AU Xe SIÈCLE ?
8La dernière histoire universelle4 du haut Moyen Âge sur le continent est l’ouvrage connu sous le nom de Chronique de Réginon de Prüm, achevée au monastère Saint-Maximin de Trèves en 908 et menée jusqu’à l’année 906. Elle a été ensuite sommairement continuée jusqu’en 967 par Adalbert qui devint archevêque de Magdebourg5. Il s’agit bien d’une histoire universelle, c’est-à-dire perpétuelle, depuis le Christ « jusqu’à nos jours ». Le livre I, de tempore dominicae incarnationis, couvre le temps, de la naissance de Jésus à l’année 740. Le livre II, de gestis regum francorum, traite des rois et empereurs carolingiens jusqu’au dernier vivant, Louis l’Enfant († 911).
9En Francie de l’Ouest, on ne peut signaler que le Chronicon Vedastinum, modeste chronique de Saint-Vaast d’Arras écrite à la fin du xe siècle pour servir d’introduction aux Annales de Saint-Vaast (Annales Vedastini, 874-900). Le Chronicon Vedastinum va de la Création du monde à 8996.
10En Angleterre, on observe un essai d’histoire universelle vers la fin du xe siècle, avec l’ouvrage connu sous le nom de Chronique d’Aethelweard7, ce dernier étant un noble du Wessex, mort en 998. Son histoire va de la création du monde à 975. Bien que rédigée en Angleterre, elle est, comme celle de Réginon de Prüm, élaborée dans un contexte impérial : elle est en effet dédiée à l’abbesse Mathilde de Essen-Werden, en liaison avec le fait que le futur empereur Otton Ier avait épousé en premières noces Égide († 946) sœur du roi Aethelstan Ier (925-939).
11Si l’on n’écrit à peu près plus d’histoires universelles au xe siècle, écrit-on des histoires « nationales » ? Posons la question avec toutes les réserves qu’il convient de faire sur cette désignation après les travaux de Walter Goffart et de Martin Heinzelmann qui ont montré que les histoires « nationales » de Jordanès, de Grégoire de Tours, et même de Bède et de Paul Diacre ont une dimension universelle8.
12La seule grande histoire nationale du xe siècle en Francie de l’Est n’échappe pas à cette ambivalence du national et de l’universel. Les Trois livres sur les gestes des Saxons (Rerum gestarum Saxonicarum libri III)9 que rédigea pour la plus grande partie vers 968 Widukind de Corvey ne comportent qu’une brève histoire des origines du peuple saxon, descendant de l’armée d’Alexandre le Grand (les 14 premiers chapitres du livre I) et en vient rapidement à Charlemagne et surtout à la famille saxonne et au roi Henri Ier. Le livre II est consacré aux dix premières années du règne d’Otton Ier (936-946). Le troisième est mené jusqu’en 973. Il s’agit en fait d’inscrire les Saxons dans la tradition franque et dans la tradition chrétienne. Henri Ier et Otton Ier sont les successeurs de Charlemagne qui, en apportant le christianisme aux Saxons, leur a permis de manifester le génie de leur race et de relayer les Francs à la tête de la chrétienté.
13En Francie de l’Ouest, Richer, moine de Saint-Remi de Reims, a rédigé dans les années 990 Quatre livres d’histoire que seul un éditeur et traducteur français a osé appeler Histoire de France10. Ces quatre livres d’histoire traitent en fait du dernier siècle : il s’agit d’un ouvrage d’histoire contemporaine. Rappelons en la composition. Comme beaucoup d’ouvrages d’histoire, depuis Orose au moins, celui de Richer commence par un tableau géographique du monde, suivi d’un panorama ethnologique de la Gaule. Puis, en quatre phrases, il résume l’histoire de ceux qu’il appelle « les Gaulois » des origines à la fin du ixe siècle. Païens, ils étaient déjà victorieux dans leurs entreprises. Ils furent baptisés par saint Remi, et Clovis fut leur premier roi. « Après lui, poursuit Richer, leur état fut gouverné par une suite d’imperatores éminents jusqu’à Charles (III le Simple, 893-922) qui marque le point de départ de notre histoire11.» Rien ici de l’ambitieuse recherche sur les origines des Saxons par Widukind. L’intérêt est ailleurs. Le découpage des quatre livres se fait selon la chronologie des règnes des rois récents. Le livre I va de l’avènement d’Eudes (888) à la mort de Raoul de Bourgogne (936). Le livre II est entièrement consacré au règne de Louis IV (936-954) et le livre III à celui de Lothaire (954-986). Le livre IV s’ouvre sur l’avènement de Louis V en 986 et il donne une large place à l’avènement d’Hugues Capet en 987. À la fin du texte sont mentionnés la mort d’Hugues Capet (996) et le départ de Gerbert pour Ravenne (998).
14L’ouvrage de Richer est de fait une histoire des rois de Francie occidentale du dernier siècle, associée à une histoire des archevêques de Reims. Il est très attentif aux événements de Lotharingie, le contrôle de cette région ayant été l’enjeu d’une lutte entre les deux Francies, de l’Ouest et de l’Est. Cet ouvrage d’histoire contemporaine s’achève en histoire du temps présent.
15Par son attention à l’histoire contemporaine et immédiate, on peut rapprocher de Richer l’historien lombard Liutprand qui devint évêque de Crémone en 961. En 956, il avait rédigé une histoire de son temps sous le titre d’Antapodosis (représailles ou rétribution) où il retrace les événements de 888 à 949, distribuant éloges et blâmes et réservant l’essentiel de sa vindicte au roi Bérenger II dont il avait été le chancelier. Les trois premiers livres reposent sur des sources et les trois suivants sur les souvenirs personnels de l’auteur. Cet ouvrage resta inachevé. Liutprand ayant accompagné Otton Ier à Rome, ce dernier lui demanda en 964-965 de rédiger un rapport qui justifie la politique saxonne en Italie (Liber de rebus gestis Ottonis magni imperatoris) et en 968, il l’envoie en mission à Constantinople d’où il rapporte une féroce Relatio de legatione Constantinopolitana qui n’est plus vraiment un ouvrage d’histoire au sens où nous l’entendons jusqu’ici12.
16En Espagne chrétienne, on ne connaît pas d’histoire après la chronique du roi Alphonse III des Asturies (866-910)13.
17D’une façon générale, les histoires universelles ont disparu au xe siècle mais des histoires « nationales » existent. L’Histoire des Saxons de Widukind de Corvey tranche sur les autres par son ampleur et son ambition. Liutprand de Crémone et Richer de Reims nous donnent d’intéressants ouvrages d’histoire contemporaine, ce dernier dans les années qui précèdent immédiatement l’An Mil.
II. DISPARITION DES ANNALES ?
18Les annales ont été le grand genre historiographique cultivé aux viiie et ixe siècles dans le monde carolingien14. À la limite, les annales ne sont pas de l’histoire mais de simples notes factuelles ordonnées selon la chronologie, année par année. En ce sens on peut les opposer à l’histoire en reprenant la distinction entre histoire et chronique issue d’Eusèbe. Mais l’époque carolingienne avec ses Annales royales (Annales regni Francorum, 741-829) continuées dans les royaumes francs de l’Est et de l’Ouest en Annales de Fulda (Annales Fuldenses, jusqu’en 887 et 901) et Annales de Saint-Bertin (Annales Bertiniani jusqu’en 881) en ont fait un véritable genre historiographique, dépassant la simple chronologie pour exprimer des intentions et introduire des éléments d’interprétation à la gloire des princes15.
19Or nous constatons aussi un effacement de ces grandes annales, après la mort de l’archevêque Hincmar de Reims (881), dernier des rédacteurs des Annales de Saint-Bertin. Au xe siècle pourtant, à Reims encore, le chanoine Flodoard, reprend la pratique et donne des Annales développées qu’il tient à jour de 922 à sa mort en 966. Elles ont l’ampleur des précédentes mais sont originales, puisqu’elles ne sont plus une production anonyme mais bien l’œuvre d’un auteur16.
20D’une façon générale cependant, les annales changent de registre en Francie occidentale : souvent écrites en marge de tables pascales, elles ne traitent plus guère que d’histoire locale ou régionale. Elles se multiplient à partir du milieu du xe siècle dans les monastères, en particulier dans le Nord et l’Est où elles se développeront aux xie et xiie s. Parmi le annales reprises et continuées, on peut citer notamment les Annales de Saint-Germain-des-Prés, commencées au ixe siècle et continuées sous diverses formes jusqu’en 114617 ; les Annales de Fleury, compilées au ixe siècle et complétées jusqu’en 106018. Parmi les annales inaugurées à l’approche de l’An Mil, citons les Annales nivernaises, écrites à la cathédrale de Nevers, menées jusqu’en 118819, ou encore les Annales de Reims20. Des Annales de Saint-Bénigne de Dijon21 reprennent des Annales de Cologne dans la seconde moitié du xe siècle. L’écriture d’annales, de « petites annales » par rapport aux « grandes annales » carolingiennes, non seulement n’a pas été interrompue en Francie de l’Ouest autour de l’An Mil mais elle s’est développée, du moins dans le Nord et l’Est du royaume car on n’en connaît pas dans le Sud et l’Ouest.
21Des annales brèves ont aussi été rédigées dans un certain nombre de monastères ou d’évêchés de Francie de l’Est : Lorsch (936-978), Cologne (898-964), Trèves, Einsiedeln, Reichenau, Salzbourg (725-956). Presque toutes ces annales s’arrêtent au cours du xe siècle, avant le dernier quart. Mais dans le royaume de l’Est où l’Empire a été restauré, des annales plus ambitieuses réapparaissent : de grandes annales sont rédigées en Saxe et concernent en particulier les pays de mission slaves. Ainsi des Annales de Hersfeld, puis au début du xie siècle les Annales de Quedlimbourg et, un peu plus tard, les Annales d’Hildesheim22.
22Des annales ont aussi été tenues en Irlande et en Angleterre, mais elles ne nous sont connues que par des textes postérieurs. On peut faire la même observation semble-t-il en Pologne. Pour le Royaume d’Italie, on ne connaît pas d’annales alors qu’on en connaît dans les duchés lombards du sud de la péninsule : Annales de Bari, Annales de Bénévent et deux versions d’Annales du Mont-Cassin23.
23Les grandes annales nous apparaissent comme liées à l’Empire, carolingien d’abord, ottonien ensuite. Nous ne relevons pas d’inflexion majeure dans le volume de production autour de l’An Mil mais nous assistons à une certaine translation d’Ouest en Est. Notons pourtant que même les plus ambitieuses de ces annales tendent à régionaliser leur champ d’intérêt, rejoignant ainsi les préoccupation des petites annales et des annales brèves. Cette régionalisation de l’histoire, centrée sur un monastère ou un évêché, nous la retrouvons dans un genre historiographique inauguré à la fin du viiie siècle et au ixe siècle, toujours pratiqué au Xe et en plein développement au xie siècle : les gesta episcoporum et gesta abbatum.
III. DÉVELOPPEMENT DES GESTA24
24Gesta episcoporum et gesta abbatum constituent un genre mixte, intermédiaire entre histoire et annales. De la première ils ont l’ambition de donner le sens des événements de l’Église dont ils traitent. Des secondes ils ont la modestie de rester au plus près des faits et de la chronologie, scandée par le catalogue des évêques ou des abbés. Ce genre est aussi un genre carolingien et impérial. Après une première rédaction d’ensemble, des origines à la date de rédaction, beaucoup de ces textes sont repris et continués.
25Paul Diacre avait esquissé le premier pour Metz en 78425. Le genre a connu des réalisations majeures au ixe siècle à Naples, Ravenne, Le Mans et Auxerre pour les gesta episcoporum26 ; à Fontenelle (Saint-Wandrille) pour les gesta abbatum27. Au Mans comme à Auxerre, ces textes sont continués au xe siècle et au-delà de l’An Mil.
26L’école carolingienne d’Auxerre dans la seconde moitié du ixe siècle a été illustrée par les moines de l’abbaye Saint-Germain, Haymon, Heiric et Remi28. Mais c’est à la cathédrale que deux chanoines, Alagus et Rainogala, en relation sans doute avec le moine Heiric comme le suggère la dernière édition du texte, ont rédigé entre 873 et 876, des Gesta pontificum autissiodorensium29. L’ouvrage ne prétend pas faire remonter l’Église d’Auxerre jusqu’au Christ ou aux apôtres, mais seulement aux persécutions.
27À la fin du siècle, vers 893, l’évêque Foulques de Reims, pour restaurer les écoles de sa cité fait appel au savant Remi d’Auxerre et au moine Hucbald de Saint-Amand qui avait été élève d’Heiric à l’école d’Auxerre. La culture auxerroise donne un nouvel élan à l’école de Reims dont le grand Hincmar (845-881) avait jeté les bases. Et c’est à cette école que se forme le chanoine Flodoard qui, entre 848 et 852, écrit son Histoire de l’Église de Reims30, la réalisation la plus achevée de gesta episcoporum en Occident31.
28Auparavant, Hucbald avait participé à la réforme du monastère de Saint-Bertin. Ce monastère de la province de Reims reçoit un oblat du nom de Folcuin qui donne en 961 des Gesta abbatum sancti Bertini Sithiensium32. Quatre ans plus tard, en 965, le même Folcuin, devenu abbé du monastère de Lobbes dans le diocèse de Cambrai, rédige des Gesta abbatum pour cette abbaye33.
29Parmi les moines de Lobbes, disciples de Folcuin, se trouve Heriger qui lui succède comme abbé. C’est à Heriger que l’évêque Notger de Liège (972-1008) passe commande de gesta episcoporum pour sa cité. Son travail est repris plus tard, au temps de l’évêque Wazon (1042-1048), par Anselme, un autre moine de Lobbes, qui dédie son ouvrage à l’archevêque Annon de Cologne, dont Liège est suffragante34.
30L’évêché de Cambrai appartient à la province ecclésiastique de Reims et l’abbaye de Lobbes est dans sa juridiction. L’évêque Gérard Ier y fait rédiger des gesta episcoporum vers 1024-102535. Ce Gérard est originaire de la région de Liège. Il est le neveu de l’archevêque Adalbéron de Reims et il s’est formé à l’école cathédrale de Reims où il est devenu chanoine. Nous restons donc dans le même cercle culturel et politique.
31Pour revenir à l’école d’Auxerre, elle a entretenu des relations étroites avec le monastère de Fleury-sur-Loire. À partir de la dernière décennie du xe siècle, on constate dans ce monastère un brusque essor de l’historiographie sous l’impulsion d’Abbon (989-1004) qui donne un résumé du Liber pontificalis romain, et surtout grâce à son disciple Aimoin qui compose après 1007 des Gestes des abbés de Fleury qui ne nous sont pas parvenus mais dont on peut penser qu’ils s’inspiraient, dans leur composition au moins, du Liber pontificalis abrégé par Abbon et des Gestes des évêques d’Auxerre36.
32Un autre ensemble de gesta episcoporum apparaît en Saxe, à l’extrême fin du xe siècle, que l’on peut mettre en relation avec la restauration impériale ottonienne. Les premières rédactions connues de Gesta episcoporum d’Halberstadt et de ceux de Magdebourg sont des années 1020, mais il est établi que des éléments existaient dès la fin du xe siècle37. Autour de 1080, apparaissent les gesta d’Hildesheim et de Hambourg38. Ces évêchés saxons sont de fondation impériale carolingienne et leur histoire met en valeur cette origine impériale. Le prologue des Gesta de Magdebourg précise que la cité doit son extraordinaire prospérité à trois empereurs : Jules César qui l’aurait fondée, Charlemagne qui l’a amenée à la foi et Otton le Grand qui en a fait un archevêché. Les Gesta des évêques d’Hildesheim donnent, parallèlement à la liste des évêques, celle des empereurs carolingiens puis ottoniens. Dans ce développement saxon de l’histoire locale, le rôle d’Halberstadt semble capital : on remarque en effet que l’archevêque Adalbert Ier de Hambourg (1043-1072), celui qui fait rédiger les gesta de ses prédécesseurs avait été formé à Halberstadt. Il était venu à Hambourg dans la suite d’Herimann, doyen d’Halberstadt devenu archevêque de Hambourg en 1032. Il faut invoquer aussi ici l’influence de la Chronique de Thietmar de Mersebourg (v. 1012-1018) sur laquelle nous revenons dans notre dernière partie.
33Pas de rupture donc dans la production de gesta autour de l’An Mil : le mouvement inauguré au ixe siècle se maintient et s’amplifie. Mais notons qu’il est géographiquement limité à la moitié Nord de l’Europe et à l’Italie, terre d’origine du prototype : le Liber pontificalis romain.
IV. INTENSITÉ DE LA PRODUCTION DE VIES DE SAINTS
34Les Vies de saints, textes hagiographiques dans nos catégories modernes, n’auraient pas relevé d’un exposé sur l’historiographie il y a vingt ou trente ans. La Vie de Charlemagne par Eginhard (v. 829), la Vie de Robert le Pieux par Helgaud de Fleury (1033, complétée en 1041) ou la Vie de Conrad II39 par Wipon (v. 1040-1046) en auraient relevé parce qu’il s’agit de biographies « laïques » et non de Vies de saints. On mesure aujourd’hui ce que la distinction a de fragile et il n’est plus pensable d’omettre les Vies de saints dans une étude de l’historiographie.
35On peut distinguer d’abord un certain nombre de vies de saints rois et de saintes reines écrites autour de l’An Mil. La Vie de saint Edmond, roi d’Eastanglia mort en luttant contre les Danois en 869, est écrite par Abbon de Fleury lors de son séjour à Ramsey en 987/98840. En 983, avait été écrite à la demande d’Otton II, la Vie et passion de saint Wenceslas, roi de Bohême assassiné en 929 ou 93541. Odilon de Cluny rédige l’Epitaphium d’Adélaïde, épouse d’Otton Ier morte en 999, puis les deux Vies de la reine Mathilde (épouse d’Henri Ier)42. On peut rapprocher de ces Vies de saints grands personnages la Vie de Géraud, comte d’Aurillac, qu’avait écrite Odon de Cluny vers 92543.
36Dans l’Empire ou proche de lui on écrit des Vies de saints évêques : Vie de Brunon de Cologne (†965), frère d’Otton Ier, par son disciple Ruotger en 966-96744 ; Vie d’Ulrich d’Augsbourg (†973) par le prévôt Gérard entre 982 et 99345 ; deux Vies d’Adalbert de Prague, martyr en Prusse en 997, de part et d’autre de l’An Mil46.
37Des Vies de saints abbés réformateurs aussi : Vie de Jean de Gorze († 974) par Jean de Saint-Arnoul de Metz († 984)47 ; vies de saints abbés de Cluny : Vie d’Odon (942) par Jean de Salerne et Vie de Maïeul (994) par le moine Syrus, reprise en une Vita brevior anonyme à la veille de l’An Mil48 ; Vie de Caddroë († 978), moine irlandais ayant séjourné à Fleury, réformateur des abbayes lorraines de Waulsort et de Saint-Clément de Metz49. Ajoutons encore la Vie de Gérard de Toul écrite en 1027 par Brunon, le futur Léon IX, et la vie de ce dernier par Wigbert de Toul juste après sa mort en 105450.
38En Angleterre des Vies de trois saints personnages sont rédigées vers l’An Mil : les deux Vies de saint Dunstan, abbé de Glastonbury devenu archevêque de Cantorbery († 988)51 ; la Vie d’Oswald d’York († 992) ; et les deux Vies d’Aethelwold, évêque de Winchester (963-984), écrite pour la première en 996 par Wulfstan, cantor à Winchester et pour la seconde en 1006 par son disciple Aelfric52.
39Revenons en Francie de l’Ouest dans la première moitié du xie siècle : l’abbaye de Fleury produit la Vie d’Abbon par le moine Aimoin (avant 1010), la Vie de Robert le Pieux déjà mentionnée (1030-1041) et la Vie de Gauzlin, abbé de Fleury puis archevêque de Bourges, mort en 1030 écrite par André en 104253. À peu près au même moment (v. 1044), Raoul Glaber écrivait la Vie de Guillaume de Volpiano, son maître et ami54.
40Si l’on esquisse une géographie des lieux de production hagiographique aux alentours de l’An Mil, une place importante revient une nouvelle fois à l’Empire et à la moitié Nord de la Francie, étendue jusqu’au Limousin au xie siècle. L’Angleterre est également riche mais le midi de la Francie, la Péninsule ibérique reconquise et l’Italie restent en retrait, avec tout de même de grands centres comme Bobbio ou Naples.
41Les alentours de l’An Mil nous apparaissent donc comme particulièrement fertiles en Vies de saints qui remplissent une fonction historiographique et sont donc un grand genre historiographique de ce temps.
42Il faudrait ajouter ici les nombreux textes hagiographiques en vers, souvent des Vies en prose mises en vers, tant en Saxe qu’en Francie ou en Angleterre. Citons par exemple le Breviloquium vitae beati Wilfridi, composé entre 948 et 958 à la demande de l’archevêque de Cantorbery, dans lequel un certain Fredegaud, peut-être originaire de Brioude, met en 1396 hexamètres la Vie de saint Wilfrid (évêque de Ripon puis archevêque d’York † 709) écrite en prose au début du viiie siècle par Eddius Stephanus55. On pourrait citer bien d’autres exemples en Allemagne du Sud ou à Trèves autour de l’An Mil, en Lotharingie et en Flandre. Ces textes poétiques nous introduisent à notre cinquième rubrique.
V. POÉSIE ET ÉPOPÉE PARTICIPENT À L’HISTORIOGRAPHIE
43De même que les historiens ont eu tendance à écarter l’hagiographie des genres historiographiques, de même ils en ont écarté les carmina et autres textes en vers en raison cette fois de leur forme.
44Dans l’œuvre de Flodoard, les 20 000 vers de son De triumphis Christi (entre 925 et 937) ont été désignés de façon méprisante par les historiens comme « poèmes hagiographiques » (double handicap par rapport à l’historiographie), alors que les historiens ont toujours apprécié les Annales et l’Histoire de l’Église de Reims du chanoine historien. Or, si l’on y regarde de plus près, on s’aperçoit que l’œuvre pour laquelle Flodoard fait la preuve aussi bien d’une grande connaissance des ouvrages d’histoire que d’une véritable réflexion sur le sens de l’histoire est bien ces Triomphes du Christ, qu’il faut considérer comme la grande épopée du xe siècle56.
45Ces Triomphes du Christ se déploient en trois parties et dix-neuf livres, de la Palestine des origines du christianisme à Antioche, puis à Rome : c’est en fait l’histoire de l’Église depuis ses origines qui est évoquée. L’Église commence avec le Christ est les apôtres. Elle gagne progressivement les divers lieux fondateurs de la chrétienté où elle suscite des martyrs. Puis elle se centre sur Rome avec saint Pierre et saint Clément. Elle connaît les grandes persécutions jusqu’à la conversion de Constantin (et de nouveau sous Julien l’Apostat) et son histoire se déroule ensuite jusqu’au temps de la composition de l’œuvre, scandée par les règnes des papes et les innombrables miracles des saints, qui sont les triomphes du Christ.
46Historique dans son propos, l’épopée de Flodoard met à contribution les classiques de l’historiographie chrétienne : l’Histoire ecclésiastique d’Eusèbe/Rufin, l’Histoire Tripartite de Cassiodore/Epiphane, l’Histoire contre les païens d’Orose, le Liber pontificalis romain bien sûr et quantité de textes hagiographiques. C’est dans ces Triomphes du Christ que Flodoard montre sa culture d’historien. C’est en écrivant cette épopée qu’il est devenu historien. Il n’avait été jusque là qu’annaliste57.
47Dans le royaume de l’Est, juste après la restauration de l’Empire, il nous faut faire place à l’œuvre de Hrotsvita de Gandersheim, récemment réétudiée et traduite par Monique Goullet58. Les spécialistes de la littérature ont privilégié son théâtre mais elle nous intéresse ici pour ses carmina historica. Elle donne en effet des Gesta ottonis, panégyrique de la famille de l’empereur Otton Ier, écrit entre 965 et 967. Il s’agit de montrer comment le plan divin se réalise à travers le règne des Ottons qui sont comparés à David et Salomon : nous sommes dans le registre épique. De même pour les Commencements de l’abbaye de Gandersheim (Primordia coenobii Gandersheimensis), œuvre étroitement rattachée à la précédente, qui sur le ton épique présente la fondation du monastère et ses premiers temps (852-919), les trois premières abbesses étant de la famille des Liudolfinger dont sont issus les Ottons. La prospérité de l’abbaye est présentée comme le gage de leur réussite et de la piété féminine tandis qu’est affirmée son indépendance face à l’évêque d’Hildesheim.
48Un peu plus tard le moine Purchard donne des Gesta de l’abbé Witigowo de Reichenau (985-997), sous forme d’un dialogue en vers qui fait l’éloge de son gouvernement des âmes et critique son activité séculière au service d’Otton III59.
49Des œuvres en vers, épopées, poèmes ou Vies de saints métriques participent donc aussi de l’activité historiographique autour de l’An Mil.
VI. UNE REPRISE DE L’HISTOIRE APRÈS L’AN MIL ?
50Deux flambeaux, Adhémar de Chabannes et Raoul Glaber, illuminent le paysage historiographique de la Francie de l’Ouest dans la première moitié du xie siècle par l’ampleur de leur œuvre et l’intérêt que, de Michelet à Duby, les historiens leur ont porté, à propos des « terreurs de l’An Mil » en particulier dont Sylvain Gougenheim a récemment fait définitivement justice60.
51Mais tout ce qui a été dit plus haut, tant à propos de annales que des gesta ou de la production de vitae et même de carmina historica, indique que c’est dans l’Empire que se situe une part importante de la production historiographique de la première moitié du xie siècle, sans solution de continuité avec la période précédente. Pour la région des bouches du Rhin, Alpert de Metz dédie vers 1021-1022 à Burchard de Worms un Libellus de nostrorum dierum hominibus ou de diversitate temporum libri II, qui est une histoire contemporaine de la région entre 997 et 101861. En Saxe, Thietmar, évêque de Mersebourg, donne sa Chronique entre 1012 et 101862. C’est en grande partie une histoire de l’Église de Mersebourg écrite pour ses successeurs. Mais, inscrivant cette histoire dans une perspective théologique, il présente les événements de l’histoire de l’Empire depuis les années 980, apportant en particulier un témoignage important sur le règne de l’empereur Henri II dont il fait l’éloge.
52En Francie de l’Ouest, la chronologie nous invite à visiter d’abord l’abbaye de Fleury-sur-Loire où, autour d’Abbon, qui était abbé en l’An Mil, s’est développée une importante école historiographique étudiée par Robert-Henri Bautier et ses élèves ainsi que par Marco Mostert63.
53Abbon de Fleury, qui avait fréquenté Reims au temps de Gerbert est d’abord un canoniste et un grammairien qui fit de son abbaye « le torrent des arts libéraux » et « la palestre de l’école du Seigneur », dit de lui André de Fleury un demi siècle plus tard. Mais il s’était intéressé à l’histoire pour constituer sa collection canonique et avait donné un résumé du Liber Pontificalis64. Il avait d’autre part écrit la Vie de saint Edmond, roi d’Eastanglia, déjà signalée.
54Mais c’est avec son disciple Aimoin que Fleury devient « le grand centre de l’historiographie française » (R.-H. Bautier). Peu avant l’An Mil, il rédige une histoire des trente premiers abbés de Fleury jusqu’à Abbon, sur l’ordre duquel il entreprend une Historia Francorum65. Il en interrompt la rédaction à l’année 654 (16e années du règne de Clovis II) après le récit d’une assemblée tenue par Clovis II et la mention des fondations des monastères de Jouarre, Rueil, Rebais et Solignac, sans doute en raison de la mort brutale d’Abbon, assassiné en 1004. Il entreprend immédiatement un Vita abbonis et complète une peu plus tard les livres des Miracles de saint Benoît à la demande de l’abbé Gauzlin (1004-1030), successeur d’Abbon66.
55L’Historia francorum est un grand ouvrage d’histoire. Elle s’ouvre comme il est de règle par une présentation géographique de la Germanie et de la Gaule et un tableau des coutumes des peuples de ces régions. Les quatre livres s’organisent selon un plan chronologique à partir des origines troyennes des Francs. Ils traitent ensuite de la royauté mérovingienne jusqu’à la mort de Clovis, puis du partage de son royaume en 511 jusqu’à la mort de Clothaire en 561, du nouveau partage et de la réunification par Clothaire II en 613, et le récit s’interrompt en 654 comme il a été dit plus haut. L’histoire de la papauté et même celle de l’Italie et de Byzance ne sont pas absentes de cette œuvre. Aimoin rassemble pour cela un grand nombre de sources s’efforçant de « réunir en un seul ouvrage et sous une forme latine plus correcte l’histoire de la nation franque et de ses rois, dispersés dans bien des livres et écrite dans une langue grossière », dit-il dans sa dédicace à Abbon.
56Ce texte est immédiatement recopié, complété, transmis avec des ajouts jusqu’en 1015 pour un manuscrit, jusqu’en 1031 pour un autre. Il parvient à Saint-Germain-des-Prés et de là dans d’autres monastères dont Saint-Denis où il deviendra une des sources majeures des Grandes Chroniques de France.
57Aimoin, mort sans doute en 1010, ne fut pas sans successeur dans son monastère. Le moine Helgaud, gardien des reliques et du trésor de l’abbaye et préchantre, écrit en 1031 l’Epitoma vitae regis Roberti Pii, Vie de Robert le Pieux déjà signalée. En 1041, le moine André ajoute quatre livres aux trois livres de Miracles de saint Benoît déjà composés (le livre I par Adrevald, les livres II et III par Aimoin) et surtout il donne la Vie de Gauzlin. Au-delà du milieu du xie siècle, d’autres productions historiographiques importantes sont issues de Fleury : l’Abbreviatio gestorum regum francorum et le Chronicon anonymi Floriacensis67. Mais le meilleur représentant de cette école est au-delà de la période ici considérée : c’est Hugues de Fleury (ou de Sainte-Marie) qui, après diverses compilations d’histoire universelle, donne des Gesta Romanorum imperatorum que l’on désigne habituellement sous le nom d’Historia ecclesiastica, achevée en 1109, puis un Liber modernorum regum achevé sans doute en 112768. Nous sommes alors loin de l’An Mil et dans un autre contexte.
58En relation avec Fleury peu après l’An Mil, il faut citer l’Historia Francorum Senonensis, rédigée à Sens après 1015 qui résume des annales puis des Gesta episcoporum de Sens aujourd’hui perdus69.
59Pour la Normandie peu après, Dudon de Saint-Quentin donne son De moribus et actis primorum Normaniae ducum70, qu’il dédie à Adalbéron de Laon. C’est le début d’une historiographie des Normands illustrée dans la seconde moitié du siècle et au début du xiie par Guillaume de Poitiers, Guillaume de Jumièges et surtout Orderic Vital71 qui, comme Hugues de Fleury, nous introduisent dans un tout autre contexte.
60À Conques, on se doit d’évoquer dans les mêmes années (1013-1020) les Miracles de sainte Foy, rédigés par Bernard d’Angers et dédiés à Fulbert de Chartres72. Non loin d’Angers est composée dans les années 1060 la Chronique de Saint-Florent de Saumur, appellation traditionnelle mais fautive pour l’Historia eversionis sancti Florentii veteris monasterii a Britonibus et Normanis qui retrace des événements du ixe siècle à 106173. Un peu avant à Nantes, un chanoine vigoureusement réformateur avait donné un Chronicon Namnetense dont l’événement le plus récent est le concile de Reims tenu par le pape Léon IX en 104974.
61Avant d’en venir à Adhémar de Chabannes on peut signaler que parmi les sources qu’il met en œuvre se trouvent des chroniques angoumoises dont l’une aurait été l’œuvre d’Hugues de Jarnac, évêque d’Angoulême à la fin du xe siècle et une autre la biographie du comte Guillaume IV Taillefer († 1028)75. On y trouve aussi des miracula dont les Miracula beatae Valeriae Lemovicensis martyris écrits en 985 et une Translatio beati Martialis de Monte Gaudio qui relate la translation de 997 destinée à mettre fin au mal des ardents76.
62Tout cela témoigne d’une continuité de l’activité historiographique autour de l’An Mil, au moment où Adhémar devient oblat à Saint-Cybard d’Angoulême (995), puis moine au monastère de Saint-Martial de Limoges auquel il reste fidèle jusqu’à sa mort en Terre Sainte, en 1034. On lui doit une Commemoratio abbatum Sancti Martialis, ouvrage bref, soigneusement chronologique, qui donne les concordances des abbés avec les évêques de Limoges, les rois de France et des princes séculiers, dans la tradition des gesta abbatum. On lui doit surtout son Chronicon qui veut être une histoire des Francs depuis les Troyens77. Jusqu’au milieu du ixe siècle, il compile entre autres la Chronique de Frédégaire et les Annales royales auxquelles il ajoute des informations plus régionales comme les origines de l’Église d’Angoulême ou la donation de Pépin le Bref à Saint-Martial, ou encore des informations plus générales comme la récupération de la Vraie Croix par l’empereur Héraclius ou la mort de Bernard d’Italie. Il donne aussi une curieuse généalogie intellectuelle qui relie les modestes moines de la région d’Angoulême à Bède le Vénérable en passant par les savants carolingiens.
63Au-delà commence ce que les historiens appellent la partie « originale », celle qu’a traduite Edmond Pognon78. Elle traite d’histoire générale : l’avènement d’Otton Ier, le siège de Poitiers par Henri II, la destruction du saint Sépulcre ou les incursions normandes en Pouille et en Sicile, tels qu’un moine de Limoges pouvait les percevoir. Mais elle est surtout intéressante comme témoignage sur le monde dans lequel vit Adhémar : les vicomtés limousines et le comté d’Angoulême ; l’Église et les pratiques comme l’investiture laïque ; les pèlerinages et le culte des reliques ; les assemblées de paix et bien des événements de la vie quotidienne.
64L’autre vedette de l’historiographie du xie siècle écrit un peu plus tard et cette fois en Bourgogne. Radulfus Glaber commence à écrire ses Histoires79 à la demande de Guillaume de Volpiano, donc avant la mort de ce dernier en 1030, et il les dédie à l’abbé Odilon de Cluny vers 1044-1049. Formé à Saint-Germain d’Auxerre, il a fréquenté de nombreux monastères (Champeaux, Saint-Bénigne de Dijon, Cluny, Réomé, Bèze, Moutiers) et il a accompagné Guillaume de Volpiano en Italie. Il affirme que « depuis Bède et Paul Diacre, il ne s’est trouvé personne qui ait laissé la moindre œuvre d’histoire… : chacun fait l’histoire de sa propre race ou de son propre pays ». Son ambition est donc de rassembler tout ce qui s’est déroulé depuis l’année 900 dans « le monde romain », entendons dans le monde chrétien, bien au-delà de la Bourgogne.
65Raoul Glaber avait presque raison : plus d’histoire universelle et des histoires « de races ou de pays », mais des histoires tout de même. Manifeste dans l’Empire, la continuité de l’activité historiographique l’est aussi en Francie : moins de dix ans séparent l’achèvement des Quatre livres d’histoire de Richer de Reims (996) du début de l’Historia francorum d’Aimoin de Fleury (1004). Sans doute le deux ouvrages ne sont pas exactement de même nature mais ils relèvent bien l’un et l’autre d’une volonté d’écrire l’histoire. Nous avons montré qu’il y a bien d’autres entreprises dans la première moitié du xie siècle, dont celles de Thietmar de Mersebourg, d’Adhémar de Chabannes et de Raoul Glaber. Elles prennent dignement la suite de Widukind de Corvei, de Richer de Reims et de Liutprand de Crémone.
66Si nous envisageons les annales, nous avons montré qu’elles changent en partie de nature mais l’activité annalistique est continue, tandis que gesta episcoporum et gesta abbatum se multiplient. Si nous acceptons de considérer les Vies de saints comme relevant de l’historiographie, l’An Mil est au centre d’une période de production intense. Et si nous prenons en compte épopées et carmina historica, ce constat est confirmé. Tout cela sans rapport avec l’An Mil, qui n’a pas de signification particulière pour l’histoire de l’histoire (non plus).
Notes de bas de page
1 Sur l’historiographie aux xe et xie siècles, nous avons plus particulièrement tiré parti des travaux suivants : R.-H. Bautier, « L’historiographie en France aux xe et xie siècle (France du Nord et de l’Est) », dans La Storiografia altomedievale (Settimane del Centro italiano di Studi sull’alto medioevo, 17), Spolète, 1970, p. 793-850 ; E.-R. Labande, « L’historiographie en France de l’ouest aux xe et xie siècles », ibid., p. 751-791 ; F.-L. Ganshof, « L’historiographie franque sous les Mérovingiens et les Carolingiens », ibid., p. 631-685 ; et surtout H. Hoffmann, « Profil der lateinischen Historiographie im Zehnten Jahrhundert », dans Il secolo di ferro : mito e realtà del secolo X, (Settimane del Centro italiano di Studi sull’alto medioevo, 38), Spolète, 1991, p. 837-915 ; Id., « Artikulationformen historischen Wissens in der lateinischen Historiographie des hohen und späten Mittelaters », dans La littérature historiographique des origines à 1500, (Grundriss der romanischen litteraturen des Mittelalters XI/1/2), Heidelberg, 1994. Et bien sûr le grand classique sur l’historiographie médiévale : Bernard Guenée, Histoire et culture historique dans l’Occident médiéval, Paris, 1980, réed. 1991.
2 Très représentatif de cette orientation : Henri Leclercq, « Historiens du christianisme », Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie, t. 6, Paris, 1924-25.
3 B. Guenée, Histoire… (cité n. 1), p. 203 et s. Voir aussi, Robert M. Grant, Eusebius as Church Historian, Oxford, 1980, et H. Zimmermann, « Ecclesia als Objekt der Historiographie. Studien zur Kirchengeschichtsschreibung im Mittelater und der frühen Neuzeit », dans Sitzungsberichte des Österreichische Akademie der Wissenschaften, phil.-hist. Klasse, t. 235, 4, Vienne, 1960.
4 Sur le genre, voir K.H. Krüger, Die Universalchroniken, (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 16), Turnhout, 1976.
5 Reginonis abbatis Prumensis chronicon cum continuatione Treverense, R. Rau éd. et trad. allemande (Quellen zur karolingischen Reichsgeschichte, t. 3), Darmastadt, 1969. Continuatio reginonis, a. 907-967, A. Bauer et R. Rau éd. et trad. allemande, (Quellen zur Geschichte der sächsischen Kaiserzeit), Darmastadt, 1977, p. 187-231. Voir J. Laudage, « Regino » dans Lexikon des Mittelalters, t. 7, 1994.
6 Annales Vedastini, R. Rau éd. et trad. allemande, (Quellen zur Karolingischen Reichsgeschichten t. 2), Darmstadt, 1969. Pour le Chronicon, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 13, p. 244 et s.
7 A. Campbell éd., Chronicon Aethelweardi. The Chronicle of Aethelweard, Londres, 1962. Voir C.N L. Brooke, « Historical Wrigting in England between 850 and 1150 », dans La Storigrafia… (cité n. 1).
8 W. Goffart, The narrators of barbarian history, Jordanes, Gregory of Tours, Bede and Paul rhe Deacon, Princeton, 1988. M. Heinzelmann, Gregor von Tours (538-594) Zehn bücher Geschichte » : Historiographie und Gesellchaftskonzept im 6. Jahrhundert, Darmastadt, 1994.
9 A. Bauer et R. Rau éd. et trad. allemande, (Ausgewälte quellen zur Deutschen Geschichte des Mittelalters, t. 8), Darmstadt, 1971. Voir G. Althoff, « Widukind von Corvey », dans Lexikon des Mittelalters, t. 9, 1998.
10 Richer, Histoire de France, éd. et trad. R. Latouche, (Les classiques de l’histoire de France au Moyen Âge), Paris, 1930, réimp. 1967. Voir H. H. Kortüm, Richer von Saint-Remi, Studien zu einem Geschichtschreiber des 10. Jahrhunderts, Stuttgart, 1985, et M. Sot, « Richer de Reims a-t-il écrit une Histoire de France ? » dans Y.-M. Bercé et P. Contamine éd., Historiens de France, historiens de la France, (Actes du colloque international de Reims, 14 et 15 mai 1993), Paris, 1994, p. 47-58.
11 Richer, Histoire… (cité n. 10), livre I, § 3.
12 A. Bauer et R. Rau éd. et trad. allemande, (Ausgewälte quellen zur Deutschen Geschichte des Mittelalters, t. 8), Darmstadt, 1971. Voir G. Arnaldi, « Liutprando e la storiografia contemporanea nell’Italia centro-settentrionale », dans La Storiografia… (cité n. 1).
13 J. Prelog, Die Chronik Alfons’III. Untersuchung und kritische Edition der vier Redaktionen, (Europäische Hochschulschriften, III/134), Francfort-sur-le-Main / Berne, 1980.
14 Sur le genre : M. McCormick, Les Annales du haut Moyen Âge, (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 4), Turnhout, 1975.
15 Annales regni Francorum, F. Kurze éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores rerum germanicarum in usum scholarum, Hanovre, 1895. Annales Fuldenses, R. Rau éd. et trad. allemande, (Quellen zu Karolingischen Reichsgeschichte), t. 3, Darmstadt, 1969, p. 20-177. Annales Bertiniani, F. Gras, J. Vieillard et S. Clémencet éd., introd. et notes de L. Levillain (Société de l’Histoire de France), Paris, 1964.
16 Flodoard, Annales (919-966), Ph. Lauer éd., (Collection de textes pour servir à l’étude et à l’enseignement de l’histoire), Paris, 1906.
17 Annales Sancti Germani minores, G. H. Pertz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 4, 1841, p. 3-4. Annales Sancti Germani, ibid., t. 3, 1839, p. 166-168. Voir sur ces annales : L. Delisle, « Chroniques et annales diverses » dans Histoire littéraire de la France, t. 23, 1898, p. 241-243.
18 Annales Floriacenses, A. Vidier éd., L’historiographie à Saint-Benoît-sur-Loire, 1965, p. 217-220.
19 Annales Nivernenses, G. Waitz éd, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 13, 1881, p. 88-91.
20 Annales Remenses, ibid., p. 81-82.
21 Annales Sancti Benigni (Chronicon Sancti Benigni Divionensis ad cyclos paschales), G. Waitz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 5, 1884, p. 38-50.
22 Voir H. Hofmann, « Profil… » (cité n. 1), p. 844, avec les références en note.
23 Annales Barenses (605-1043), G.H. Pertz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 5, 1844, p. 51-56. Annales Beneventani monasterii S. Sophiae, O. Bertolini éd., Bulletino dell’Instituto storico italiano per il Medio Evo, t. 47, 1923, p. 101-159. Annales Casinates (914-1010, 1042), dans Bibliotheca Casinensis, t. I, 1873, p. 92 et s. ; Annales Casinenses ex Annalibus Montis Cassini antiquis et continuatis excepti (990-1018), G. Schmidt éd., dans Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 30/2, p. 113-137. Il faudrait mentionner aussi ici la Chronique de Salerne, Chronicon Salernitanum, G.H. Pertz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 3, 1831, p. 470-559. - Sur l’ensemble, voir N. Cilento, « La storiografia nell’Italia meridionale », dans La Storiografia… (cité n. 1).
24 Sur le genre, R. Kaiser, « Die Gesta episcoporum als Genus der Geschichtsschreibung » dans A. Scharer et G. Scheibelreiter, Historiographie im frühen Mittelalter, (Veröffentlichungen des Instituts für Osterreicische Geschichtsschreibung 32), Wien-München, 1999, p. 459-480, et M. Sot, Gesta episcoporum, gesta abbatum, (Typologie des sources du Moyen Âge occidental 37), Turnhout, 1981.
25 Pauli Warnefridi liber de episcopis mettensibus, G. H. Pertz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 2, 1829, réimp. 1925, p. 260-270. Voir en dernier lieu : M. Sot, « Le Libellus de episcopis mettensibus dans l’histoire du genre gesta episcoporum », dan P. Chiesa éd., Paolo Diacono, uno scrittore fra tradizione longobarda e rinnovamento carolingio, (Convegno Internazionale, Cividale del Friuli-Udine, 6-9 mai 1999), Udine, 2000, p. 527-549.
26 Gesta episcoporum Neapolitanorum, G. Waitz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 4, 1841. Liber pontificalis ecclesiae Ravennatis, O. Holder-Egger éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores Rerum Langobardicarum, 1878. – Actus pontificum Cenomannis in urbe degentium, G. Busson et A. Ledru éd., (Société des archives historiques du Maine), Le Mans, 1902. Gesta pontificum Autissiodorensium, L.-M. Duru éd., (Bibliothèque historique de l’Yonne, t. 1), Auxerre, 1850. Nouvelle édition, introduction et traduction sous la dir. de M. Sot., Les gestes des évêques d’Auxerre, (Les classiques de l’histoire de France au Moyen Âge 42), Paris, 2002.
27 Nouvelle édition, traduction et commentaire : Frère P. Pradié, Chronique des abbés de Fontenelle (Saint-Wandrille), (Les classiques de l’histoire de France au Moyen Âge 39), Paris, 1999.
28 D. Iogna-Prat, C. Jeudy, G Lobrichon, L’école carolingienne d’Auxerre, de Muretach à Remi (830-908), Paris, 1987.
29 M. Sot dir., Les gestes…, cité n. 24.
30 Nouvelle édition par M. Strattmann, Flodoardus Remensis Historia Remensis Ecclesiae, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 38, Hannover, 1998.
31 Voir M. Sot, Un historien et son Église au xe siècle, Flodoard de Reims, Paris, 1993.
32 B. Guérard éd., Cartulaire de l’abbaye de Saint-Bertin, (Collection des documents inédits de l’histoire de France), Paris, 1841. Gesta abbatum S. Bertini Sithiensium, O. Holder-Hegger éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 13, 1881.
33 G.H. Pertz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 4, 1841.
34 Gesta episcoporum Leodiensium, R. Koepke éd., ibid.
35 Gesta episcoporum Cameracensium, G. Bethmann éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 7, 1846. Voir E. Van Mingroot, « Datering van de Gesta episcoporum Cameracensium », dans Revue belge de Philologie et d’Histoire, 53, 1975, p. 281-332.
36 Parmi les nombreux travaux de R.-H. Bautier consacrés à l’historiographie de Fleury : « La place de l’abbaye de Fleury-sur-Loire dans l’historiographie française du ixe au xiie siècle », dans Études ligériennes d’histoire et d’archéologie médiévales. Semaine d’études médiévales de Saint-Benoît-sur-Loie, 1969, Auxerre, 1975 et Id., « L’école historique de Fleury, d’Aimoin à Hugues de Fleury » dans Y.-M. Bercé et P. Contamine éd., Historiens de France, historiens de la France, (Actes du colloque international de Reims, 14 et 15 mai 1993), Paris, 1994, p. 59-72.
37 Gesta episcoporum Halberstadtensium, L. Weiland éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 13, 1874. - Gesta archiepiscoporum Magdeburgensium, G. Schum éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 14, 1883. Voir K.U. Jäschke, Die älteste Halberstädter Bischofschronik, Cologne-Vienne, 1970. Plus récemment : D. Schlochtermeyer, Bistumschroniken des Hochmittelalters. Die politische Instrumentalisierung von Geschichtsschreibung, Paderborn, 1998.
38 Chronicon Hidesheimense, G.H. Pertz éd, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 7, 1846. Gesta Hammaburgensis ecclesiae pontificum, G. Waitz éd., ibid.
39 Gesta Chuonradi imperatoris, H. Breslau éd., Die Werke Wipos, Monumenta Germaniae Historica, Series Rerum Germanicarum in usum scholarum, 1915, p. 3-62.
40 Passio sancti Edmundi (bhl 2392), M. Winterbottom éd., dans Three Lives of English Saints, Toronto, 1972, p. 67-87.
41 On connaît en fait deux Vies de saint Venceslas : Vita et passio s. Venceslavii (bhl 8821-2) à laquelle nous faisons référence, et Passio ss. Venceslavii et Ludmillae aviae ejus (bhl 8825) par Christian de Prague dont la date de rédaction n’est pas établie (fin xe ou xiie s.). Voir H. Hofmann, « Profil… », cité n. 1, p. 868.
42 Epitaphium Adelaidae (bhl 63-4) et Vita Mathildis (bhl 5683-4). Voir P. Corbet, Les saints ottoniens. Sainteté dynastique, sainteté royale et sainteté féminine autour de l’an Mil, Sigmaringen, 1986.
43 Vita s. Geraldi Aureliacensis (bhl 3411), édition de la Bibliotheca Cluniacensis (1614) accessible dans J.-P. Migne, Patrologie latine, t. 133, col. 639-704. Trad. G. Vauzac, Revue Haute-Auvergne, t. 43, Aurillac, 1972. Voir J.-C. Poulin, L’idéal de sainteté dans l’Aquitaine carolingienne d’après les sources hagiographiques (750-950), Laval (Québec), 1975.
44 Vita Brunonis (bhl 1468), I. Ott éd., Monumenta Germaniae Historica, Series rerum germanicarum, t. 10, 1951.
45 Une Vita Udalrici (BHL 8359) est écrite par Gérard, prévôt de la cathédrale d’Augsbourg entre 982 et 993. Elle est remaniée dans son style par l’évêque Gebhard d’Augsbourg († 1000) (bhl 8361). Elle est reprise et complétée par l’abbé Bernon de Reichenau au xie siècle (bhl 8362). Voir K. Schnith, « Gerhard von Augsburg », dans Lexicon des Mittelalters, t. 4, 1988.
46 On connaît en fait trois textes relatifs à saint Adalbert. La Vita I (bhl 37-39), écrite à Rome juste après 997, peut-être par Jean Canaparius, abbé de Saint-Alexis-et-Boniface sur l’Aventin où Adalbert avait séjourné ; la Vita II (bhl 40), écrite par Bruno de Querfurt dans les années 1000 ; la Passio s. Adalberti, d’auteur inconnu. Voir G. Labuda, « Adalbert Vojtech », dans Lexicon des Mittelalters, t. 1, 1977.
47 La Vie de Jean, abbé de Gorze, présentée et traduite par M. Parisse, Paris, 1999, reprend l’édition de G.H Pertz, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 4, 1841.
48 Vita sancti Odonis (bhl 6292-5), Vita Maioli (bhl 5177-9), Vita brevior (bhl 5180), dans J.-P. Migne éd., Patrologie Latine, t. 133. Voir D. Iogna Prat, « Agni Immaculati » : recherches sur les sources hagiographiques relatives à Saint Maieul de Cluny (954-994), Paris, 1988.
49 (bhl 1494).
50 La Vie du pape Léon IX (Brunon, évêque de Toul), texte présenté et édité sous la dir. de M. Parisse, trad. M. Goullet, (Les classiques de l’histoire de France au Moyen Âge), Paris, 1977.
51 Les deux Vies de saint Dunstan (bhl 2342 et 2343) sont éditées par W. Stubbs, (Rolls Series, t. 63), 1874.
52 Les deux vies de saint Aethelwold (bhl 2647 et 2646) sont éditées par M. Winterbottom, Three Lives of English Saints, Toronto, 1972. Réed. et trad. anglaise de la Vita II : M. Lapidge et M. Winterbottom, Wulfstan de Winchester ; The Life of S. Aethelwold, (Oxford Medieval texts), Oxford, 1990.
53 La Vie d’Abbon par Aimoin doit faire l’objet d’un nouvelle édition par R.H. Bautier et G. Labory. On dispose de l’édition de Mabillon, reprise dans J.-P. Migne, Patrologie latine, t. 139, c. 387-414. Helgaud de Fleury, Vie de Robert le Pieux, R.-H. Bautier et G. Labory éd. et trad., Paris, 1965. André de Fleury, Vie de Gauzlin, abbé de Fleury, éd. R.-H. Bautier et G. Labory, Paris, 1969.
54 Vita domni Willelmi abbatis, N. Bulst éd., dans N. Bulst et J. France éd., Radulfus Glaber Opera, (Oxford medieval Texts), Oxford, 1989.
55 Vita Wilfridi par Eddius Stefanus (bhl 8889). Breviloquium (bhl 8891-2). A. Campbell éd., Frithegodi Monachi Breviloquium Vitae Beati Wilfredi et Wulfstani Cantoris Narratio metrica de Sancto Swinthuno, Zürich, 1950.
56 En attendant l’édition annoncée par P.C. Jacobsen, le De Triumphis christi est accessible dans J.-P. Migne, Patrologie latine, t. 135, qui reprend l’édition de Mabillon. Voir la remarquable étude de P.C. Jacobsen, Flodoard von Reims. Sein Leben und seine Dichtung « De Triumphis Christi », Mittellateinische Studien und Texte 10, Leyde, 1978.
57 Voir M. Sot, Un historien… (cité n. 31), partie I, chap. 3 : « L’apprentissage du métier d’historien », p. 83-110.
58 Hrotsvita, Opera (théâtre), texte établi, traduit et commenté par M. Goullet (auteurs latins du Moyen Âge), Paris, 1999. Ead., Oeuvres poètiques, présentation et traduction par M. Goullet, Grenoble, 2000.
59 K. Strecker éd., Monumenta Germaniae Historica, Poetae, t. 5/1, 1937, p. 260-279.
60 S. Gougenheim, Les fausses terreurs de l’An Mil, Paris, 1999, fondé sur une remarquable bibliographie critique.
61 G. H. Pertz éd., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. 4, 1841, p. 697-723.
62 Thietmarii Chronicon, W. Trimlich éd. et trad. allemande, (Ausgewälte Quellen zur deutschen Geschichte des Mittelalters, t. 9), Darmstadt, 1957. Voir G. Althoff, « Thietmar von Merseburg », dans Lexicon des Mittelalters, t. 8, 1996.
63 Voir plus haut, n. 36 et 53, pour les travaux de R.H. Bautier et G. Labory – M. Mostert, The political theology of Abbo of Fleury, Hilversum, 1987. Id., The library of Fleury. A provisional list of manuscrpts, Hilversum, 1989. Sur l’école de Fleury et Abbon voir aussi l’importante introduction d’A. Guerreau-Jalabert à son édition et traduction de : Abbo Floracensis, Quaestiones grammaticales, (Auteurs latins du Moyen Âge), Paris, 1982.
64 Epitome de XCI Romanorum Pontificum Vitis, J.-P. Migne éd., Patrologie latine, t. 139, col. 535-570.
65 Seule édition disponible, ibid., col. 627-798. Cette Historia Francorum a donné lieu à une thèse de l’École des Chartes, contenant une « excellente édition » selon R.-H. Bautier, mais qui n’est pas parvenue à publication : Ch. Le Stum, Aimoin de Fleury, Historia Francorum, thèse soutenue en1976. Voir aussi K.F. Werner, « Die literarischen Vorbilder des Aimoin von Fleury und die Entstehung seiner Gesta francorum », dans Medium Aevum vivum, Festschrift für W. Bulst, Heidelberg, 1960, p. 69-103.
66 Miracula Sancti Benedicti, livres II et III, dans Les Miracles de saint Benoît, E. de Certain éd., Paris, 1858, p. 90-172.
67 Voir R.H. Bautier, « L’école historique… », p. 69, cité n. 36.
68 Ibid., p. 70-72. L’Historia ecclesiastica est publiée par G. Waitz, Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. IX, 1851, p. 376-395, qui ajoute des interpolations au texte original.
69 G. Waitz éd., ibid., p. 354-369.
70 J. Lair éd., (Mémoires de la Société de Antiquaires de Normandie, 23), Caen, 1865.
71 The Gesta Normannorum Ducum of William of Jumièges, Orderic Vitalis and Robert de Torigni, E.M.C. Van Houts éd., (Oxford Medieval Texts), 2 vol., Oxford, 1992-1995.
72 Bernardus Andegavensis scholasticus, Miracula beatae Fidis, A. Bouillet éd., Paris 1897. Trad. dans A. Bouillet et L. Servières, Sainte Foy, vierge et martyre, Rodez, 1900.
73 E.-R. Labande, « L’historiographie… », cité n. 1, p. 768.
74 Chronicon Namnetense, R. Merlet éd., (Collection de textes pour servir à l’étude et à l’enseignement de l’Histoire), Paris, 1896, p. 1-141.
75 Etabli par Jacques Boussard dans son édition l’Historia pontificum et comitum Engolismensium (Bibliothèque elzévirienne), Paris, 1957.
76 Edition des Miracula beatae Valeriae dans Annalecta Bollandiana, t. 8, 1889, p. 278-284.
77 La commemoratio abbatum est acessible dans H. Duplès-Agier, Chroniques de Saint-Martial de Limoges, Société de l’Histoire de France, Paris, 1874, p. 1-8 (avec continuations, p. 9-27). L’éditions de référence pour la Chronique est désormais : Ademari Cabannensis Opera Omnia, Pars I, Chronicon, P. Bourgain éd., avec la collab. de R. Landes et G. Pon, (Corpus christianorum, Continuation mediaevalis, 129), Turnhout, 1999.
78 E. Pognon, L’an mille, (Collection de mémoires relatifs à l’histoire de France), Paris, 1947.
79 Deux éditions de référence : J. France et N. Bulst, Rodulfus Glaber opera (Oxford Medieval texts), Oxford, 1989 ; G. Cavallo et G. Orlandi, Chronache dell’anno mille (Fondazione Lorenzo Valla), 1989. Reproduction de cette édition, présentation et trad. par M. Arnoux, dans Raoul Glaber, Histoires, Turnhout, 1996, avec une solide introduction.
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