10. contradictions et paradoxes : l’aide canadienne en Amérique latine
p. 313-341
Texte intégral
PROBLÉMATIQUE DU DÉVELOPPEMENT
1La région de l’Amérique latine1 jouit de multiples avantages économiques, mais souffre aussi d’importantes contraintes. Il en découle que, paradoxalement, de nombreux pays latino-américains sont à la fois les partenaires économiques de pays donateurs d’aide et de grands bénéficiaires d’aide internationale. Au cours de la dernière décennie, la récente stabilité des institutions démocratiques des pays latino-américains – mis à part les cas d’exception que sont Haïti, Cuba et la Colombie – donne de fausses impressions sur les réalités socioéconomiques de la région. On retrouve dans ces pays d’importantes disparités socioéconomiques intraétatiques et régionales, des degrés extrêmes de pauvreté dans la plupart d’entre eux, ainsi que plusieurs zones très vulnérables d’un point de vue économique et environnemental. La croissance économique observée dans la région depuis la dernière décennie est loin de compenser le déclin de la précédente : 40,6 % des Latino-Américains vivent encore dans la pauvreté, dont 16,8 % dans l’extrême pauvreté (voir Figure 10.1). Cette réalité se traduit par des conditions de vie très difficiles des populations rurales défavorisées, l’exclusion des communautés indigènes et des femmes.
2Malgré une apparente homogénéité linguistique (l’espagnol et le portugais sont les langues officielles prédominantes de la région), la grande région latino-américaine, qui compte plus de 562 000 000 d’habitants, se compose d’une multitude de cultures, d’ethnies, de religions et de langues : des populations créoles des Caraïbes ou Garifunas d’Amérique centrale aux populations Shuar d’Amazonie, la dynamique identitaire dans la région est en constante évolution2. En fait, la région latino-américaine a comme principal défi de composer avec son pluralisme culturel. Cette hétérogénéité culturelle façonne également les dimensions sociales et politiques de ses relations internationales. En effet, selon les indicateurs socioéconomiques classiques de l’indice de développement humain (IDH) du PNUD3, l’Amérique latine appartient au tiers-monde. Toutefois, la région appartient également au monde occidental, d’où proviennent ses conquérants, ses immigrants et ses langues dominantes. Voilà pourquoi cette région semble à la fois étrangère et proche d’un pays tel le Canada, qui a été érigé sur des bases historiques similaires.
3Sur le plan économique, après avoir connu une importante période de croissance de 6 % en moyenne par année, pour les années 1970, la région sera aux prises avec une importante crise économique imputable en grande partie au poids de la dette extérieure et aux programmes d’ajustement structurel imposés par la communauté internationale dans les années 1980. Encouragés par l’accès facile au crédit international et par des taux d’intérêt relativement bas dans le cadre de programmes d’ajustement structurel, les pays de la région se sont particulièrement endettés, ce qui a causé une crise financière sans précédent. Les programmes d’ajustement structurel ont ainsi été, pour certains, la cause même de la pauvreté, ou à tout le moins l’un des principaux facteurs des inégalités socioéconomiques observées dans la région, particulièrement chez les populations rurales, les communautés indigènes et les femmes (Easterly, 2003 ; Ball, 2004). La récession internationale du début des années 1980, la réduction des importations par les pays industrialisés et la hausse des taux d’intérêt auront également eu un sérieux impact sur les finances publiques latino-américaines. Les effets de cette conjoncture difficile auront obligé tous les pays de la région à avoir recours, de façon plutôt paradoxale, au refinancement du Fonds monétaire international (FMI) pour pouvoir payer les intérêts de leur dette. Conséquemment, l’inflation aura atteint, par mois, plus de 100 % au Brésil et 200 % au Pérou et en Argentine durant cette période. Aujourd’hui encore, l’impact des ajustements structurels se fait sentir dans la plupart des pays. On observe aussi une augmentation générale du nombre de personnes vivant dans la pauvreté. Pour l’année 2002, on comptait 21 000 000 de pauvres de plus qu’en 1990 (Couffignal, 2006). L’écart entre les riches et les pauvres existe également sur le plan de l’accès aux soins de santé, à la terre et à l’éducation. Certains pays connaissent, de plus, des taux élevés d’analphabétisme. C’est particulièrement le cas en Haïti (45 %), au Nicaragua (31,9 %) et au Guatemala (28,2 %). Le taux d’analphabétisme enregistré dans l’ensemble de la région s’avère, toutefois, relativement bas, soit 9,5 % de la population dans l’ensemble. Enfin, certaines tendances sexospécifiques se remarquent aussi en Amérique latine. Les femmes sont, en effet, tous pays confondus, celles qui souffrent des plus hauts taux d’analphabétisme, de chômage et de pauvreté (ECLAC, 2005).
FIGURE 10.1. ÉVOLUTION DU POURCENTAGE DE LA POPULATION VIVANT DANS LA PAUVRETÉ EN AMÉRIQUE LATINE

Source : ECLAC, 2005.
4Le contexte économique difficile, la dégradation environnementale dans les zones rurales ainsi que les politiques autoritaires de certains pays auront contraint des millions de Latino-Américains à s’exiler des campagnes vers les grandes villes, puis éventuellement à s’expatrier. Le premier effet de cette tendance a été le déclenchement d’un des plus importants phénomènes d’urbanisation jamais observés à la suite de l’exode rural massif. Alors qu’en 1950, 41 % de la population vivait dans les zones urbaines, cette proportion est maintenant de 77,6 % (2005) et devrait atteindre 81 % en 2015, soit des niveaux équivalents à ceux de l’Amérique du Nord et de l’Europe (Cerruti et Bertoncello, 2003 ; ECLAC, 2005). Cette urbanisation rapide génère de sérieuses complications pour le développement des villes qui doivent gérer une croissance démographique sans précédent. La plupart des grandes villes latino-américaines n’ont simplement plus les moyens d’offrir des services de base à la population. Cette situation cause des problèmes d’aménagement urbain, une augmentation du nombre de bidonvilles, une diminution de la couverture d’eau potable et d’assainissement, en plus des problèmes liés à la gestion des déchets. Bien que ces problèmes d’urbanisation accélérée touchent un bon nombre de pays latino-américains, la situation ne devrait pas être généralisée à l’ensemble de la région. En effet, certains pays très pauvres dont les économies sont encore fortement orientées vers l’agriculture, sont toujours peu urbanisés. C’est le cas de la Guyana (38,5 %), d’Haïti (41 %) et du Honduras (47,9 %).
5Le deuxième effet remarqué est celui de l’émigration internationale. Des centaines de milliers de personnes ont effectivement quitté leur pays d’origine pour se rendre principalement aux États-Unis et, dans certains cas, au Canada et en Europe. Cet exode touche principalement la classe moyenne et les élites qui tendent à émigrer plus que les autres strates de la population (ECLAC, 2005). En parallèle de cet exode, on observe une croissance des envois de ressources financières des émigrants vers leur famille restée dans le pays d’origine4. La Banque interaméricaine de développement (BID) estime que la diaspora latino-américaine vivant aux États-Unis a envoyé dans ses pays d’origine approximativement 30 milliards de dollars US en 2004. Elle estimait de plus que les sommes transmises devaient atteindre 45 milliards de dollars US en 20065. L’importance des remises financières est considérable et dépasse les montants totaux de l’aide internationale pour la région. L’impact de ces transferts est particulièrement important pour les petites économies. Au Salvador, 28 % de la population bénéficie de ces sommes transmises. C’est aussi le cas de 24 % de la population guatémaltèque et de 16 % de la population hondurienne. On sait par ailleurs que ces remises ont une utilité socioéconomique sans équivoque : plus de 80 % des sommes transmises servent à acquitter des besoins de base tels que le paiement du loyer ou l’éducation des enfants (Suro, 2003).
6Sur le plan politique, la décennie 1980 a marqué l’échec des régimes militaires établis dans les années 1960 et 1970. En effet, avant la vague de démocratisation qui soufflera sur la région à partir de 1978, les régimes autoritaires règnent dans la plupart des pays latino-américains. Les années 1980 verront se multiplier dans toute l’Amérique du Sud les démocraties représentatives : en Équateur (1979), au Pérou (1980), en Bolivie (1982), en Argentine (1983), au Brésil (1984), en Uruguay (1985) et, plus tard, au Paraguay et au Chili (1989). Les retombées et impacts de cette démocratisation n’ont pas été les mêmes pour tous les États de la région. Par exemple, si certains pays comme le Nicaragua et la Bolivie ont su consolider leurs institutions démocratiques, d’autres comme le Pérou, la Colombie et le Venezuela ont vu les leurs ébranlées au cours de la dernière décennie6.
7En Amérique latine, les régimes démocratiques perdurent, mais sont instables. Depuis les 15 dernières années, on compte une douzaine de présidents élus qui n’ont pas terminé leur terme, souvent forcés de quitter le pouvoir avant la fin de leur mandat. La confiance populaire envers les institutions démocratiques est loin d’être acquise. Selon les données présentées dans le Latinobarometro de 2005, seulement une personne sur trois est satisfaite de la démocratie telle qu’elle est pratiquée dans la région, et plus de 80 % des individus n’ont pas confiance en leurs institutions démocratiques (Corporación Latinobarometro, 2005).
8Depuis quelques années, plusieurs États latino-américains ont pris une nouvelle orientation politique. Effectivement, le rôle des États-Unis est fragilisé par l’apparition récente de gouvernements de gauche (Venezuela, Équateur, Brésil, Argentine, Chili, Uruguay, Bolivie et Nicaragua)7. Ce vent de changement régional est indéniable et s’expliquerait en partie par la dégradation des conditions de vie de la dernière décennie (Montecino, 2006). L’explication derrière cette tendance est liée à la relation entre les États-Unis et la région latino-américaine qui aura toujours été cruciale et semble être à son plus bas depuis la fin de la Guerre froide (Hakim, 2006). Il faut toutefois éviter de généraliser ce virage, puisque la gauche latino-américaine n’est certainement pas unifiée d’un pays à l’autre, allant du socialisme autoritaire castriste au populisme de Chavez, en passant par la social-démocratie chilienne. Toutefois, ce virage à gauche est perçu par plusieurs comme étant une véritable conversion sociale d’une Amérique latine fatiguée de l’inefficacité des relations bilatérales politico-économiques avec les États-Unis et blâmée pour la large disparité économique qui caractérise la région.
HISTORIQUE DES RELATIONS ENTRE LE CANADA ET L’AMÉRIQUE LATINE
9Les relations entre le Canada et la région latino-américaine ont réellement pris de l’ampleur au début des années 1970. À l’époque, et sous l’impulsion du premier ministre Trudeau, l’Amérique latine semblait pouvoir constituer un partenaire économique potentiel, ce qui devait permettre de remédier à la dépendance économique et commerciale du Canada envers les États-Unis.
10Stevenson identifie trois éléments qui auront déterminé historiquement le style de la politique étrangère du Canada vis-à-vis de la région8, soit le déclin relatif de l’influence américaine, en particulier depuis la fin de la Guerre froide ; la croissance des relations économiques régionales avec, entre autres, la Communauté du bassin des Caraïbes (CARICOM) et la Communauté économique des pays de l’Amérique du Sud (Mercosur) ; et finalement, l’émergence d’une politique étrangère canadienne centrée sur les organisations de la société civile (Stevenson, 2000)9. Parallèlement, on a constaté un changement dans la nature des relations du Canada avec la région. D’une philosophie internationaliste s’appuyant sur un cadre orthodoxe et néolibéral classique, la politique étrangère du Canada en Amérique latine s’est orientée progressivement vers les quatre piliers de la politique internationale canadienne, soit la défense, la diplomatie, l’aide et le commerce.
11Malgré les récentes indications de l’actuel gouvernement conservateur, dont une annonce du premier ministre Harper selon laquelle le Canada recentrerait ses relations étrangères vers les Amériques, force est de constater que cette région n’est pas prioritaire pour le Canada10. Mis à part le Mexique, le Canada ne s’y est jamais réellement investi et la situation risque peu de changer (Daudelin, 2003). En fait, le Canada ne possède pas d’orientation stratégique clairement établie pour l’Amérique latine. La politique canadienne par rapport à cette région s’articule plutôt autour d’une multitude d’intérêts divers et d’importance secondaire, particulièrement si l’on tient compte des intérêts rattachés à des régions, telles que l’Afrique et le Moyen-Orient, qui semblent plus prioritaires, au moins financièrement.
12En fait, les intérêts du Canada pour la région latino-américaine sont essentiellement de trois ordres : économique, politique et, dans une moindre mesure, humanitaire. Sur le plan économique, les ententes de libre-échange se multiplient. C’est avec le Chili, en 1997, que le Canada a entamé sa série de pourparlers avec des pays latino-américains en vue d’établir des liens commerciaux formels. Les deux pays ont alors conclu un accord de libre-échange (ALECC) ainsi que des accords de coopération parallèles dans les domaines de l’environnement (ACECC) et du travail11. En 1998, le Canada et le Mercosur ont convenu d’une entente de coopération en matière de commerce et d’investissement (ECCI). D’autres exemples incluent l’accord établi en avril 2001 entre le Canada et le Costa Rica (ALECCR), ainsi que les pourparlers entre le Canada et la CARICOM12. En juin 2007, le gouvernement conservateur minoritaire a également entrepris des pourparlers en vue de nouveaux accords de libre-échange avec la Colombie, la République dominicaine et le Pérou13.
13Le Canada a, entre autres, des intérêts miniers dans la région. En Amérique du Sud, 200 sociétés minières canadiennes sont en activité, une centaine au Mexique et environ 75 en Amérique centrale et dans les Caraïbes. Plus précisément, on compte plus de 100 projets miniers au Venezuela et au Chili, 75 en Bolivie et plus de 50 en Argentine, au Brésil, en Équateur, en Guyane et au Pérou (Ressources naturelles Canada, 2006). En plus des intérêts miniers, la région latino-américaine est le sujet d’importants investissements manufacturiers (Honduras, Guatemala) et touristiques (Cuba, République dominicaine, Jamaïque, Mexique).
14Sur le plan politique, les relations entre le Canada et la région comportent plusieurs aspects et pourraient faire l’objet d’une recherche distincte. Mentionnons seulement que la communauté d’origine latino-américaine et des Caraïbes compte pour plus de 2 % de la population canadienne, avec environ 600 000 personnes (Statistiques Canada, 2001). Cette présence culturelle relative a des implications politiques importantes afin de répondre aux intérêts de cette diaspora. Mais au-delà de ces intérêts politiques internes, le principal défi du Canada dans la région restera toujours celui de tirer son épingle du jeu et d’influencer la région malgré la forte présence américaine. La tendance actuelle dans la région, qui semble vouloir se fermer aux États-Unis, laisse un espace libre dans l’architecture régionale dont le Canada doit profiter.
15Sur le plan humanitaire, la fin des années 1960 – l’Agence canadienne de développement international (ACDI) est créée en 1968 – a marqué le début des premières réelles opérations dans la région (Guyana, 1956 ; Bolivie, 1967 ; Pérou, 1968 ; Colombie, 1969 ; Nicaragua, 1971). Toutefois, avant 1980, la région n’était qu’une préoccupation secondaire de la politique d’aide étrangère du Canada (Thérien, Mace et Roberge, 2004). C’est seulement au début des années 1980 que le Canada développera une politique d’aide stratégique pour cette région. À cette époque, le programme s’orientait davantage vers une collaboration avec des organismes canadiens travaillant en Amérique latine, essentiellement les ONG, les programmes de la coopération volontaire et les relations et échanges entre étudiants. Les ONG ont joué un rôle primordial et influé sur la politique internationale canadienne en Amérique latine (Stevenson, 2000). Aujourd’hui encore, plusieurs centaines d’ONG canadiennes sont actives en Amérique latine. Le Conseil canadien pour la coopération internationale (CCCI) est également impliqué dans le Groupe d’orientation politique pour les Amériques qui effectue un travail d’éducation, de sensibilisation et de lobby sur la politique canadienne dans les Amériques (CCCI, 2006). Notons également qu’à cette époque, les coopérants religieux ont eu une influence marquante dans la région, notamment en Amérique centrale lors du conflit au Nicaragua et à travers le mouvement de la théologie de la libération14.
16Parallèlement, en raison d’un rapprochement géographique et politique entre les mouvements de gauche au Canada et dans les pays du Sud, une solidarité singulière s’est développée entre les groupes des sociétés civiles canadienne et latino-américaine. Ces liens ont façonné les partenariats de l’aide canadienne d’aujourd’hui dans la région (Nicaragua, Guyane, Chili, Haïti, etc.) avec, entre autres, l’arrivée de réfugiés politiques au Canada.
17Les relations économiques entre le Canada et la région transcendent la politique d’aide dans les différents pays d’Amérique latine. Au-delà des motivations humanitaires et des nobles discours politiques, les intérêts du Canada dans la région sont principalement basés sur le potentiel des exportations des pays latino-américains. À cet effet, le Comité permanent des Affaires étrangères et du Commerce international indique que :
(1) pour produire des avantages économiques pour le Canada, forger une politique étrangère bien canadienne, dynamiser le projet de Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) et servir de position de repli en cas d’échec, le gouvernement du Canada cherche vigoureusement à conclure des accords bilatéraux de commerce et d’investissement avec des pays, ainsi qu’avec des groupes de pays, de l’Amérique latine et des Caraïbes. […] Et que (2) le Canada noue des alliances avec les pays et les régions de l’hémisphère aux vues semblables aux siennes en vue d’encourager les pays réticents à participer plus activement aux efforts d’intégration économique et de dissuader les signataires potentiels d’un accord sur la ZLEA de recourir à des mesures protectionnistes15.
18Paradoxalement, en tentant de nuire au protectionnisme, le Canada peut nuire à l’essor des pays aux économies marginales de la région et vient donc freiner leur développement. En fait, outre les États-Unis et le Mexique, l’Amérique latine est la région qui constitue le plus grand potentiel économique pour le Canada. Elle est d’ailleurs celle qui connaît la plus grande croissance annuelle en termes d’exportations canadiennes16.
QUE FAIT LE CANADA DANS LES AMÉRIQUES AUJOURD’HUI ?
19Officiellement, la stratégie actuelle d’aide aux Amériques de l’ACDI s’articule autour d’un :
programme à la concentration géographique et sectorielle plus marquée, qui met l’accent sur la gouvernance, une croissance économique reposant sur de larges assises et le développement social (enfants, santé, éducation). L’Agence continuera également à travailler avec les pays en crise, et appuiera les organismes régionaux et infrarégionaux […]17.
20Dans son initiative de concentration géographique, à la suite de la Déclaration de Paris prônant l’amélioration de l’efficacité de l’aide, l’ACDI a identifié initialement 2 pays prioritaires dans les Amériques (sur un total de 25). Ce nombre est toutefois rapidement passé à quatre, soit la Bolivie, le Honduras, le Nicaragua, et la Guyane18. Ce choix peut sembler discutable, d’autant plus qu’aucuns pourparlers officiels auprès de partenaires canadiens ou latino-américains n’ont été entrepris pour l’identification de ces priorités régionales. Néanmoins, il s’agit de quatre pays parmi les plus pauvres des Amériques avec lesquels le Canada est en relation depuis près d’un demi-siècle. Par ailleurs, cette concentration géographique n’a pas encore eu d’impacts significatifs ou notables, ne semble pas immuable, mais au contraire risque d’être révisée selon le rendement et la situation sociopolitique des pays à « partenariat renforcé » et en fonction des intérêts canadiens. Ces choix varieront probablement au gré des administrations politiques et de l’évolution des intérêts canadiens dans la région, ainsi qu’en fonction de la volonté des pays bénéficiaires de bien vouloir accepter l’aide canadienne et se soumettre aux conditions des donateurs.
TABLEAU 10.1. Pays d’Amérique latine bénéficiaires de plus de 10 000 000 $ CA, 2004 et 2005
Pays | Aide canadienne totale 2003-2004 (millions de $) | Aide canadienne totale 2004-2005 (millions de $) | Part de l’assistance bilatérale canadienne reçue en proportion avec les autres pays du CAD |
Haïti | 27,5 | 109,0 | 17,9 % |
Honduras * | 20,7 | 30,2 | 2,9 % |
Pérou | 18,6 | 22,3 | 3,1 % |
Bolivie * | 25,7 | 21,9 | - |
Nicaragua * | 16,7 | 17,5 | - |
Brésil | 19,9 | 17,5 | |
Jamaïque | 13,3 | 14,5 | - |
Colombie | 11,0 | 14,0 | - |
Guatemala | 14,0 | 12,7 | - |
Guyane * | 14,9 | 12,5 | - |
Grenade | 2,0 | 12,5 | |
Cuba | 10,3 | 12,2 | - |
Équateur | 8,6 | 11,5 | |
Mexique | 7,6 | 10,0 |
* Pays prioritaires en date du 1er août 2007.
Source : ACDI, 2005 ; 2006a.
21Par ailleurs, certains autres pays d’Amérique latine jouissent d’un statut privilégié même s’ils ne font pas partie de cette liste. Il s’agit du Pérou, de la Jamaïque, du Brésil et de la Colombie. Ces pays font l’objet d’une aide particulière, pour des raisons liées à l’histoire de l’aide canadienne, ou à l’importance de la diaspora. Un autre cas s’illustre. La très importante aide du Canada en Haïti, bien que plus que justifiée, déroge également à la politique canadienne de concentration géographique. Des déboursements canadiens de 520 000 000 $ répartis sur une période de cinq ans (de 2006 à 2011) devraient permettre à Haïti de passer du douzième au deuxième rang des pays bénéficiaires de l’APD canadienne. Même avec les nouveaux fonds dirigés vers Haïti, on constate tout de même une assez grande dispersion des activités de coopération canadiennes dans la région. Au total, 39 pays sont bénéficiaires de l’aide canadienne dans l’hémisphère (incluant le Mexique, le Brésil et la Grenade, des pays à revenu intermédiaire), dont une douzaine recevant moins de 4 000 000 $ par année.
22On constate aussi que les stratégies et priorités sectorielles de développement sont plutôt arbitraires et se traduisent plus souvent en projets ad hoc qu’en un investissement à long terme et une vision du développement précise : les programmes d’aide sont constamment en révision, les relations entre l’ACDI et les partenaires canadiens sont rarissimes et unidirectionnelles et les projets bilatéraux sont souvent le résultat de processus à huis clos établis sur des intérêts relativement obscurs. Enfin, les résultats à court terme des projets semblent positifs tandis que l’impact à long terme est souvent insignifiant pour les pays bénéficiaires.
Régionalisme
23L’approche de l’aide canadienne dans la région des Amériques est le théâtre d’un affrontement historique entre les approches continentaliste et multilatéraliste. D’une part, le Canada a renforcé son engagement envers le continentalisme par l’entremise de la ratification de l’Accord de libre-échange nord-américain en 1994. D’autre part, le Canada s’est également montré en faveur d’un multilatéralisme régional, en investissant massivement en Haïti, en devenant membre de l’Organisation des États américains (OEA) et en participant activement aux négociations pour la création de la Zone de libre-échange des Amériques (Thérien, Mace et Roberge, 2004).
24En ce qui concerne l’OEA, la plus vieille organisation régionale (fondée en 1890), le Canada n’en fait partie que depuis 1990. Avant d’y adhérer, le Canada s’était montré peu intéressé au panaméricanisme et semblait croire que les coûts d’une adhésion complète au système interaméricain seraient plus élevés que les bénéfices pouvant en être tirés (Thérien, Mace et Roberge, 2004). Depuis les dernières années, les investissements du Canada à l’OEA sont en baisse, se limitant à 18 000 000 $ US en 2004-2005. Malgré son implication dans plusieurs dossiers régionaux, le rôle et le pouvoir de l’OEA sont toutefois limités. Entre autres, les États-Unis continuent, de manière unilatérale, de jouer un rôle prépondérant sur le plan sécuritaire dans la région, notamment en Colombie et en Haïti. Ceci relègue l’OEA à un rôle secondaire en ce qui concerne la sécurité régionale.
25L’influence canadienne par l’intermédiaire de l’OEA semble donc très limitée. Pourtant, l’énoncé de politique internationale du Canada souligne l’importance de l’Organisation des États américains en tant que :
principal forum hémisphérique permettant de défendre les intérêts du Canada au sein des Amériques, comme le développement démocratique, les droits de la personne, la bonne gestion des affaires publiques, la sécurité régionale et humaine, la sécurité publique, l’équité économique et le développement durable ainsi que de relever aussi les défis de la gouvernance démocratique et des États défaillants dans la région mécanisme de promotion de la démocratie et du respect des droits de la personne dans la région19.
26Par contre, en raison de leur importance grandissante, les Sommets des chefs d’État et de gouvernements des Amériques et le processus de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA) sont des tribunes qui contribueront de manière croissante à l’influence du Canada dans la région (Thérien, Mace et Roberge, 2004).
27Le Canada a aussi su exercer un leadership et assurer une présence diplomatique active dans la région au-delà de l’OEA. On notera, entre autres, ses relations politiques et économiques avec Cuba depuis les années 1960, ainsi que son action dans la gestion des conflits en Amérique centrale dans les années 1980. Le Canada a également été l’hôte de plusieurs événements importants pour le régionalisme panaméricain, dont le troisième Sommet des Amériques à Québec en 2001, en plus de participer activement au programme des villes viables dans la région.
Multilatéralisme
28Sur le plan des mécanismes de transfert de fonds dans la région, le multilatéralisme est favorisé. Même si les ententes bilatérales existent avec la quasi-totalité des pays où le Canada est présent, celui-ci consacre environ le tiers (33 % en 2004-2005) de ses investissements dans les organisations multilatérales, particulièrement les différentes agences des Nations Unies, la Banque interaméricaine de développement et la Banque mondiale. De plus, le Canada a mis en place des mécanismes permettant de rendre multilatérale l’aide dite bilatérale. L’aide initialement bilatérale et calculée comme telle est redirigée une fois décentralisée dans le pays hôte, à travers des institutions multilatérales. L’un des meilleurs exemples est celui du Honduras, où un programme nommé Promesas et mis en place en 2001 a toutefois constitué un échec retentissant. Le Fonds du programme Promesas d’un total de plus de 30 000 000 $ était réparti entre six secteurs, soit l’agriculture, la foresterie, l’environnement, la santé, l’assainissement des eaux et l’éducation. De 2002 à 2007, ce programme visait à faire transiter des fonds par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) afin de permettre la mise en œuvre de projets locaux. Ce programme semblait viable en théorie et laissait aux autorités locales une marge de manœuvre importante pour la prise en charge de leur développement. Le programme n’a toutefois pas atteint ses objectifs. Une évaluation externe du programme Promesas indique qu’il :
était mal géré et […] qu’un cadre supérieur qui devait superviser l’élaboration et la mise en œuvre d’un protocole pour orienter les futurs investissements dans l’innovation à l’ACDI n’avait pas été développé. La vérification a aussi permis de conclure que l’application du cadre de politique générale de l’ACDI n’atteindrait pas les objectifs stratégiques qui y sont énoncés à moins qu’une orientation et des attentes opérationnelles ne soient clairement définies et communiquées20.
29De plus, ce programme ne permettait pas d’intégrer les opinions et initiatives des partenaires canadiens travaillant au Honduras. Les programmes bilatéraux de Cuba et de la Bolivie sont également en voie d’être soumis à cette forme de multilatéralisation au travers des activités du PNUD.
30Un autre exemple de programme multilatéral mis sur pied par le Canada dans la région est le Programme de partenariat avec les peuples autochtones (PPPA). Ce dernier vise à permettre l’établissement de partenariats et l’échange de connaissances entre les groupes autochtones du Canada, de l’Amérique latine et des Caraïbes. Ce programme permet d’impliquer les populations indigènes canadiennes dans la coopération internationale, tout en favorisant la création de liens synergiques avec les peuples autochtones des Amériques. Cependant, ce mécanisme d’aide n’implique que de modestes sommes (parfois inférieures à 100 000 $ pour un projet), ce qui limite l’ampleur des projets. De plus, seules les organisations autochtones peuvent se prévaloir de ce programme. Celles ayant une expertise internationale sont néanmoins peu nombreuses, ce qui a énormément ralenti le démarrage du PPPA et en a limité les initiatives.
L’AIDE BILATÉRALE CANADIENNE EN AMÉRIQUE LATINE
31Malgré la tendance au multilatéralisme et au continentalisme, le Canada entretient des liens étroits avec plusieurs pays d’Amérique latine. Mis à part le cas haïtien, ces relations bilatérales particulières s’appuient grandement sur une approche diplomatique ou le passé de la coopération internationale, plutôt que sur d’amples programmes de transfert de fonds et d’aide humanitaire.
Le Canada dans les Caraïbes
32Il apparaît clair que la plus grande difficulté du Canada en matière d’aide étrangère tient à l’établissement de relations durables. L’engagement du Canada auprès des pays de l’Amérique latine devrait persister dans le temps, dépasser l’aide internationale et se construire sur un cadre de développement intégré.
Le cas haïtien
33Après plusieurs décennies d’indécision, le Canada a finalement décidé, en juillet 2004, d’accorder plus de 180 000 000 $ sur deux ans à Haïti, confirmant ainsi sa décision de s’engager dans ce pays de manière durable. L’aide à Haïti a récemment été reconduite avec l’annonce faite par le Canada en juillet 2006 de l’octroi de 520 000 000 $ à la reconstruction et au développement d’Haïti pour la période de 2006 à 2011. Si Haïti reçoit ces nouveaux fonds, c’est parce qu’il est aujourd’hui classé par le Canada dans la catégorie des pays fragiles et en déroute, une catégorie d’États récipiendaires priorisés dans l’Énoncé international du Canada en 2005 (ACDI, 2005). Le Canada se classe donc au deuxième rang des grands donateurs de fonds à Haïti, devançant la France. Ces 520 000 000 $ serviront à appuyer le Cadre de coopération intérimaire (CCI) que le gouvernement haïtien a présenté aux bailleurs de fonds internationaux en 200421. De ce montant, l’ACDI accordera 485 000 000 $ pour consolider la gouvernance politique, pour la reconstitution de l’État, la relance économique et pour l’accès de la population aux services de base. À part certains programmes de maintien de la paix mis en œuvre par le passé, il s’agirait de l’un des programmes d’aide les plus importants jamais annoncés par le gouvernement canadien pour un seul pays.
34Haïti est donc le dossier prioritaire pour le Canada dans la région. L’intérêt du Canada pour ce pays repose essentiellement sur trois phénomènes, soit la situation humanitaire dramatique qu’on y retrouve, l’importante diaspora haïtienne vivant au Canada et enfin, les dizaines d’ONG canadiennes essentiellement francophones œuvrant en Haïti (Audet, 2003a).
35Les interventions du Canada en Haïti sont multiples. Récemment, sous la pression d’un mouvement de sympathie de la part d’une frange de la population canadienne, le gouvernement canadien, par l’intermédiaire du CCI, a créé un précédent en demandant la participation accrue de la diaspora haïtienne au processus de reconstruction. Paralèllement, c’est par l’intermédiaire de la mission de paix des Nations Unies en vigueur dans la région, soit la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), que le Canada tente d’influencer le programme de reconstruction de ce pays en déroute. La présence canadienne en Haïti compte également une centaine de policiers de la GRC au sein de la MINUSTAH.
36Toutefois, la lenteur du processus de reconstruction du pays ainsi que le degré d’insécurité alarmant qui y règne freinent les initiatives humanitaires et nuisent gravement à l’efficacité du programme d’aide canadien en Haïti. Il est néanmoins encore trop tôt pour évaluer les impacts de ce nouvel afflux de fonds massif. Dans le contexte actuel de remise en question des fondements mêmes de l’aide internationale, les risques sont toutefois élevés pour le Canada. En cas de succès, l’expérience du Canada en Haïti pourrait lui permettre de reprendre une place de choix sur l’échiquier régional et international et servir de précédent pour d’autres interventions. En cas d’échec, le Canada risque d’isoler davantage Haïti en alimentant le pessimisme qui règne par rapport à ce pays.
L’expérience cubaine
37Les relations diplomatiques ininterrompues entre Cuba et le Canada datent de 1945 et sont l’une des relations diplomatiques les plus durables de la région. La politique d’ouverture canadienne envers Cuba a toujours contrasté avec les politiques hostiles des États-Unis envers le pays de Fidel Castro. L’approche canadienne pour Cuba, inspirée des politiques du premier ministre Jean Chrétien de 1994, cherche à entretenir une « relation constructive » avec les Cubains. Cette approche implique l’appui de la transition politique, le respect des droits de la personne, la libéralisation de l’économie et la réintégration régionale. Les relations diplomatiques sont au cœur même du programme d’aide canadienne. Cette « diplomatie humanitaire » permet ni plus ni moins à Cuba de faire valoir sa présence régionale et internationale en utilisant le modèle canadien comme un exemple à suivre. C’est cette direction que prend le programme d’aide canadienne envers Cuba :
Réintégration de Cuba comme pays bénéficiaire éligible [sic] à l’aide canadienne au développement à travers des ONG ainsi qu’une augmentation de l’aide humanitaire d’urgence ; support aux entreprises canadiennes établies ou désireuses d’établir des relations d’affaires à Cuba ; faire la promotion de Cuba pour sa réintégration au sein de l’OEA et de sa participation aux Sommets des Amériques. (Warren, 2003)
38La nomination de Lloyd Axworthy à titre de ministre des Affaires étrangères en 1996 consolida encore plus les relations du Canada avec Cuba. Pour Axworthy, c’était l’occasion d’appliquer sa vision à long terme du rôle du Canada comme moyenne puissance dans l’hémisphère. Les efforts du Canada envers Cuba allaient aussi à l’encontre de l’embargo américain et de la Loi Helms-Burton visant à pénaliser les compagnies étrangères commerçant avec Cuba.
39C’est en 1997 que le Canada signait une entente qui établissait le cadre des relations bilatérales entre les deux pays. Selon Cristina Warren (2003), le rôle des ONG dans la mise en œuvre de l’aide canadienne a toujours été central pour la présence canadienne à Cuba afin de pouvoir contourner les problèmes de la bureaucratie. Ainsi, le financement de l’aide par l’intermédiaire d’ONG évitait des négociations ardues avec le gouvernement cubain. Ainsi, OXFAM Canada, l’Institut urbain canadien, CARE Canada, WWF et d’autres ONG canadiennes ont joué et continuent d’exercer un rôle crucial dans les relations canado-cubaines. À la suite des problèmes diplomatiques récents survenus avec l’Union européenne, puis entre la Suisse et Cuba, le Canada joue un rôle de premier plan dans le pays. L’aide canadienne atteint maintenant environ 10 000 000 $ par année (ACDI, 2006b). L’aide reçue par Cuba se distingue, par ailleurs, de celle de ces voisins. Elle est, en effet, moins orientée vers les programmes subvenant aux besoins de base comparativement aux autres pays de la région. Cela s’explique entre autres par le niveau de développement social particulièrement élevé du pays22. L’aide canadienne cible, entre autres, les secteurs économique, financier et industriel afin d’appuyer la stratégie cubaine de modernisation et de réingénierie de l’État, la transition économique du pays, le renforcement de l’administration publique et de la gestion économique, une gestion environnementale durable, et la modernisation des secteurs industriels et agroindustriels. Les relations se sont particulièrement intensifiées entre les deux pays en 2002, traduisant l’importance des Canadiens dans l’économie touristique cubaine, ainsi que l’avènement de nouvelles formes de coopération industrielle, entre autres dans les secteurs de l’énergie, des mines, de la construction et en biotechnologie (Warren, 2003)23. De 2001 à 2002, cela s’est traduit par une augmentation de l’aide publique au développement pour Cuba d’environ 30 %.
40Les relations du Canada avec Cuba n’ont toutefois pas toujours été sans tensions. Par exemple, durant les années 1990, le Canada a été contraint de protester contre les violations des droits de la personne signalées à Cuba. Ce fut le cas, en particulier, après l’arrestation de quatre dissidents cubains. Ces événements ont d’ailleurs contraint Jean Chrétien à revoir la politique d’aide bilatérale envers Cuba en 1999 en renforçant les accords bilatéraux. La politique de relation constructive s’est cependant poursuivie grâce à la présence des ONG canadiennes qui ont, pour la plupart, poursuivi leurs opérations en sol cubain.
L’aide canadienne et l’Amérique centrale
41Les relations entretenues entre le Canada et la région centraméricaine ont entre autres été établies par la présence des coopérants volontaires et des missionnaires actifs dans les années 1960. Cette présence canadienne en Amérique centrale a permis d’exercer une certaine pression sur le gouvernement pour y maintenir des programmes d’aide (Pearson et Draimin, 1995). Les principaux partenaires étaient alors le Nicaragua, le Costa Rica, le Guatemala et le Salvador ; chacun de ces pays jouissait de programmes bilatéraux traditionnels pour lesquels les ONG canadiennes agissaient comme partenaires privilégiés. C’est plus tard, au cours des années 1980 et 1990 que l’ACDI a décentralisé son personnel sur le terrain pour réduire la bureaucratie et surtout pour éviter d’utiliser les ONG canadiennes dans la mise en œuvre des projets (Pearson et Draimin, 1995).
42Deux de ces programmes bilatéraux ont aujourd’hui été abandonnés, soit ceux du Salvador et du Costa Rica. Malgré cela, ce dernier a reçu plus de 5 800 000 $ d’aide canadienne en 2004-2005, alors que le Salvador est devenu le bénéficiaire d’un programme de transfert technologique propre qui lui aura permis de profiter de plus de 7 000 000 $ au cours de la même année (ACDI, 2006b). L’abandon de programmes d’aide bilatéraux ne freine donc pas nécessairement la canalisation d’aide vers un pays. On pourrait expliquer cette problématique par une analyse des intérêts du Canada dans la région centraméricaine. Jean Daudelin précise à ce sujet que l’aide canadienne dans la région centraméricaine n’est pas contrainte à des intérêts importants et que, par conséquent, elle peut sembler « désintéressée » (Daudelin, 2003). Conséquemment, cela implique une certaine liberté d’action de la part des responsables de la politique étrangère et des fonctionnaires de l’ACDI, générant paradoxalement une multitude d’intérêts de moindre importance qui justifient les investissements désordonnés dans la région.
43Mis à part celui du Guatemala, tous les budgets des pays centraméricains sont en hausse ; pour le Honduras, plus de 30 000 000 $, et pour le Nicaragua, 17 500 000 $. L’action canadienne en Amérique centrale tend à prioriser quelques domaines-clés. Depuis plusieurs années, l’une des stratégies privilégiées du Canada dans la région est l’appui aux petits producteurs agricoles. Les cultures dominantes tels le café et le sucre monopolisent l’économie rurale et laissent peu de marge de profit aux petits propriétaires agricoles qui sont à la merci d’intermédiaires, également appelés coyotes24. La diversification des cultures, l’amélioration de la production et un appui à la commercialisation des produits prennent alors tout leur sens. Plusieurs projets sont en cours dans la région, dont un projet d’aide aux producteurs de sésame qui vise à accroître le rendement de l’industrie du sésame au Nicaragua en aidant les petits exploitants et leur famille à améliorer leur productivité et leur compétitivité. Dans le cadre d’autres projets, le Canada fournit une aide aux producteurs de café au Honduras, ainsi qu’aux producteurs de cardamome et de pois mangetout du Guatemala.
44L’autre secteur prioritaire est sans contredit la gestion par bassins versants25. La géographie montagneuse de la région est particulièrement adéquate pour ce genre de projet et répond à la problématique criante de déforestation puisqu’elle favorise la protection du territoire. Le cadre de programmation de la région maintient ces programmes depuis plusieurs années. Il existe des projets d’appui à la gestion de bassins versants au Honduras et au Nicaragua qui visent à freiner la déforestation, à promouvoir l’agroforesterie et l’utilisation de techniques agricoles moins dommageables pour l’environnement et à maintenir le contrôle des ressources naturelles par les populations locales en assurant une exploitation intégrée des ressources ligneuses et de l’eau. Enfin, le Canada s’est aussi impliqué dans la résolution du conflit guatémaltèque dans les années 1990. L’aide canadienne a, entre autres, cherché à appuyer le retour des populations déplacées victimes du conflit, particulièrement dans les régions à forte concentration autochtone près de la frontière mexicaine.
Le Canada en Amérique du Sud
La Colombie
45La crise en Colombie, seul conflit encore en cours dans la région, a un impact dramatique sur les populations civiles. La lutte pour les territoires colombiens de production de coca et la présence de pétrole génèrent un grand intérêt tant en Colombie même que sur le plan international. L’implication étrangère en Colombie n’a donc pas uniquement des visées humanitaires. Pour les États-Unis, la Colombie représente une plateforme de lancement pour l’action américaine en Amérique latine (Audet, 2003b). La Colombie est effectivement l’un des derniers points d’ancrage des États-Unis, compte tenu du virage à gauche de la région. La réélection en 2005 du président Alvaro Uribe, indéfectible allié des États-Unis, a donc été un soulagement pour le gouvernement Bush. Dans ce contexte, il est facile de constater que les États-Unis mettront toutes les ressources nécessaires pour poursuivre leur action unilatérale dans le pays à travers le plan Colombia, et pour s’assurer que la situation chaotique se poursuive afin de justifier leurs efforts de lutte au narcoterrorisme dans la région26. De son côté, l’Union européenne adopte une approche diplomatique visant le dialogue et la paix et favorisant le financement des agences onusiennes multilatérales. Entre ces deux approches contrastées, le Canada propose, de son côté, une alternative. En effet, dans le cadre de la révision par le MAECI et l’ACDI en mai 2002 de la politique étrangère canadienne en Colombie, le Canada s’est dissocié complètement des manœuvres américaines liées aux efforts de lutte antidrogue ou de lutte contre le narcoterrorisme (Augustine, 2002).
46Bien que très modeste comparativement à l’aide octroyée par les États-Unis et l’Europe, le Canada consacre tout de même une part de son enveloppe d’aide à la résolution du conflit en Colombie et à la consolidation de la paix par l’entremise de projets sur le développement socio-économique, le renforcement du respect des droits de la personne, la protection des enfants soldats. Le Canada fournit également une aide aux quelque 3 000 000 de personnes déplacées, et ce, par l’intermédiaire de plusieurs organisations colombiennes et internationales.
47L’action canadienne préconise clairement le recours aux institutions internationales et non étatiques à titre de vecteur des rapports entre le Canada et la Colombie. Concrètement, le Canada implique les organisations internationales, dont l’Organisation des Nations Unies, ainsi que certaines ONG canadiennes et colombiennes au détriment de l’aide bilatérale dont pourrait bénéficier directement le gouvernement colombien (Audet et McAllister, 2005). Notons que la présence d’ONG canadiennes en Colombie dépend de leur bon vouloir puisque les fonds finançant leurs activités proviennent essentiellement de fonds privés ou de la direction du Partenariat canadien, lesquels sont relativement modestes27. Les fonds bilatéraux restent donc limités et pratiquement inaccessibles aux ONG. Dans tous les cas, des entrevues réalisées récemment avec les responsables de la coopération canadienne indiquent que le programme d’aide du Canada pour la Colombie durera tant que le conflit persistera.
La Bolivie
48Bien que le Pérou ait été le partenaire privilégié du Canada dans les Andes au cours des années 1980 et 1990, la Bolivie le déclassera dans les années suivantes. Pour la période de 2003 à 2007, le Canada planifiait y investir 50 000 000 $28. Par contre, quoique la Bolivie ait été promue au statut de partenaire privilégié, rien n’indique qu’il y aura une augmentation du financement. Les fonds ne semblent pas accessibles aux partenaires canadiens en place ou encore aux ONG boliviennes. La majorité des budgets sera canalisée à travers les mécanismes multilatéraux du genre SWAp (Sector Wide Approaches) et PRSP (Poverty Reduction Strategy Paper)29. Ce processus nécessite de longues négociations avec le nouveau gouvernement bolivien, d’où la lenteur de la mise en place du programme d’aide canadien. Le gouvernement bolivien favorise, en effet, une aide budgétaire directe. Il tente donc, de son côté, de faire pression sur les donateurs pour qu’ils canalisent les fonds vers son administration.
49Dans tous les cas, la situation en Bolivie commande une aide. Il s’agit du pays le plus pauvre d’Amérique du Sud : 63 % des Boliviens vivent sous le seuil de pauvreté, alors que la moyenne régionale se situe à 36 %. Les priorités sectorielles de l’action canadienne en Bolivie sont l’eau, la santé, ainsi que la consolidation des réformes politiques et économiques afin de moderniser l’appareil étatique30. Le Canada investit également dans le renforcement des institutions responsables du contrôle et de la réglementation de l’industrie pétrolière et gazière. Le choix de la Bolivie comme partenaire privilégié cache aussi une autre réalité : celle des ressources minières du pays. Les intérêts économiques du Canada dans le domaine minier sont bien connus31. Il existe actuellement plus de 75 projets d’extraction minière en cours par des sociétés canadiennes en Bolivie32. L’aide canadienne dans ce pays est donc un bon moyen d’assurer des relations fructueuses avec le gouvernement bolivien, et ainsi de permettre aux intérêts miniers canadiens de pouvoir poursuivre leur extraction.
50Malgré l’optimisme engendré par la nomination de la Bolivie à titre de partenaire privilégié, le Canada semble encore hésiter à s’engager plus à fond, entre autres en ce qui a trait aux besoins de la population, victime de crises humanitaires répétées au cours des dernières années à la suite d’aléas climatiques. Il n’existe également aucun engagement auprès des ONG canadiennes œuvrant depuis plusieurs décennies dans ce pays.
Le Brésil
51Même s’il ne fait pas partie de la région du Cône Sud, le Brésil est un membre significatif du Mercosur ainsi que l’acteur économique principal de la région. Le Brésil est un partenaire économique important du Canada. C’est le pays qui bénéficie de la plus importante part des exportations canadiennes en Amérique latine, et ce, malgré des relations diplomatiques mises à l’épreuve par des disputes commerciales. Nonobstant son économie forte et ses ressources naturelles importantes, le Brésil fait toutefois face à une vaste polarisation économique : 21 % de sa population, soit 54 000 000 de personnes, gagnent moins de 2 $ par jour (UNDP, 2006).
52Pour tenter de répondre à cette situation, mais aussi pour encourager les échanges économiques, le Canada a toujours maintenu son aide étrangère au Brésil (Jubany, 1999). Depuis 1968, le Canada a affecté 170 000 000 $ au Brésil à titre d’aide au développement33. En effet, l’aide publique au développement accordée par le Canada au Brésil dans le cadre d’arrangements bilatéraux et de programmes de la Direction générale du partenariat canadien de l’ACDI totalise environ 11 000 000 $ par année. Elle a même pendant un certain temps atteint 31 000 000 $ vers la fin des années 1990 (Dosman et Frankel, 2002). L’un des principaux programmes de l’aide canadienne qui totalisait plus de 17 000 000 $ en 2004-2005 est le Fonds de transfert de technologie (ACDI, 2006b)34. L’ACDI revoit actuellement son programme d’aide au Brésil qui doit se terminer en 201035.
53L’aide canadienne dans la région latino-américaine traduit les paradoxes et l’hétérogénéité qui caractérisent cette région, soit une zone économique relativement stable mais vulnérable, des indicateurs de pauvreté extrêmement variables, et une large disparité entre les classes. Malgré une certaine constance budgétaire, l’aide canadienne accordée à cette région n’apparaît pas prioritaire, représentant moins de 15 % de l’enveloppe totale distribuée dans 34 pays. L’aide est également principalement liée aux intérêts politiques et économiques, particulièrement dans les secteurs minier, touristique, manufacturier et aéronautique. Haïti, le Honduras, le Nicaragua et la Bolivie semblent être des partenaires de choix, bien que la Colombie et le Guatemala continuent de recevoir une aide financière liée à l’instabilité de leur situation sociopolitique respective.
54Lors du Sommet du 8 juin 2007, le premier ministre Harper a affirmé qu’il désirait recentrer l’aide en Amérique latine. Ce discours semble aller à l’encontre des politiques actuelles par rapport à l’Amérique latine36. S’agit-il d’une nouvelle orientation d’aide à la région ou d’une stratégie politique ? Dans tous les cas, les attentes pour la région restent nébuleuses. Plusieurs phénomènes ont fait perdre de sa crédibilité au Canada dans cette région : le rôle et l’influence du Canada ont souvent été compromis par un manque de ressources financières, par le transfert de ces ressources vers d’autres continents (Afrique et Asie du Sud-Est), ou par une marge importante entre le financement nécessaire et les promesses faites. Il va toutefois sans dire que les liens historiques et culturels entre la société civile canadienne et latino-américaine, le défi des changements climatiques à venir pour tout le continent et les besoins humanitaires toujours criants de certains pays forcent le Canada à y maintenir une assistance à long terme.
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Notes de bas de page
1 Les auteurs tiennent à remercier Marie-Christine Tremblay, chargée de projet pour l’Amérique latine à CARE Canada, pour la relecture, les critiques et commentaires.
2 La région latino-américaine est reconnue pour son imaginaire politique, qui s’est développé par la fusion du politique et du religieux, encouragée, entre autres, par de nombreux leaders politiques charismatiques et populistes. Voir, à titre d’exemple, les ouvrages d’André Corten, dont André Corten et al., 2006.
3 Voir, entre autres, le site du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) : <http://hdr.undp.org/en/reports/global/hdr2007-2008/>, page consultée le 18 juin 2008.
4 Le terme anglais remittances est souvent utilisé.
5 Les remises totales pour la région pourraient atteindre 60 milliards de dollars en incluant tous les Latino-Américains expatriés (Banque interaméricaine de développement, 2006). Pour plus de détails, voir le site de la BID, <http://www.iadb.org/news/articledetail.cfm?Language=En&parid=2&artType=PR&artid=3348>, page consultée le 18 juin 2008.
6 De plus, sous l’égide américaine, cette démocratisation s’est accompagnée, dans certains cas, de politiques néolibérales opposées au protectionnisme. Un protectionnisme qui, selon plusieurs organisations locales, aurait probablement été nécessaire pour démarrer leur industrie.
7 Les relations entre les États-Unis et la majorité des pays latino-américains ont toujours été cruciales et auront contribué au positionnement des États-Unis dans le monde, ceux-ci ayant même été montrés du doigt pour leur rôle dans certains coups d’État. Aujourd’hui, cet état de fait est moins évident avec l’arrivée de nouveaux gouvernements de gauche dans la région (Couffignal, 2006).
8 Il est à noter que la majorité des échanges commerciaux du Canada continuent, encore aujourd’hui, d’être avec ses partenaires nord-américains, les États-Unis et le Mexique, par l’entremise de l’ALENA. En effet, en 2001, les États-Unis et le Mexique recevaient plus de 87 % du total des exportations du Canada, comparativement à seulement 1,7 % pour les pays d’Amérique latine et des Caraïbes. Dans une moindre mesure, l’investissement canadien à l’étranger suit la même tendance puisque l’Amérique du Nord reçoit 64 % des flux d’investissements canadiens (dont 51 % pour les États-Unis à eux seuls) comparativement à 5,4 % % pour la région d’Amérique centrale et du Sud. Voir le site du gouvernement du Canada : <www.international.gc.ca/eet/pdf/FDI-Inward-Stocks-Country-2005-fr.pdf>, page consultée le 18 juin 2008.
9 Fondée en août 1973, la CARICOM représente la communauté des Caraïbes et réunit 15 pays et territoires associés : Antigua-et-Barbuda, les Bahamas, la Barbade, le Belize, la Dominique, la Grenade, la Guyane, Haïti, la Jamaïque, Montserrat, Saint-Christophe et Nievès, Saint-Vincent et les Grenadines, le Suriname, et Trinidad et Tobago. Même si elle ne regroupe qu’une population modeste, le nombre des États qui la composent lui donne un poids significatif dans l’Organisation des États américains (OEA). Le Mercosur, quant à lui, comprend l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela. Le Canada a signé une entente de libre-échange bilatérale en 1998 avec ce groupe. La Déclaration de Cuzco en 2004 prévoit la fusion entre le Mercosur et la Communauté andine (Venezuela, Colombie, Équateur, Pérou et Bolivie) et éventuellement l’intégration du Chili, de la Guyane et du Suriname. En 2000, le Canada a exporté des biens d’une valeur de 347 000 000 $ auprès de la CARICOM et en a importé pour 540 000 000 $. Pour en savoir plus sur les relations entre le Canada et le Mercosur, voir, entre autres, l’analyse de la Fondation canadienne pour les Amériques (FOCAL) : <http://www.focal.ca/pdf/Mercosur05.pdf>, page consultée le 18 juin 2008.
10 Lors du Sommet du G8, le premier ministre Harper a indiqué que son gouvernement désirait recentrer l’aide canadienne vers les Amériques. Voir la manchette en ligne : <http://www.theglobeandmail.com/servlet/story/RTGAM.20070608.wg8africa08/BNStory/International>, page consultée le 18 juin 2008.
11 Pour en savoir plus sur la relation entre le Canada et le Chili, voir le texte de Philip Oxhorn (2001).
12 Pour en savoir plus sur les relations entre le Canada et la CARICOM, voir l’évaluation du programme de l’ACDI dans la région de la CARICOM qui laisse entendre des résultats mitigés, <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/REN-218131553-PFP>.
13 Voir le discours du ministre David Emerson en ligne : <http://w01.international.gc.ca/minpub/Publication.aspx?isRedirect=True&publication_id=385206&language=E&docnumber=2007/23>, page consultée le 18 juin 2008.
14 La théologie de la libération est un mouvement de pensée religieux et politique né au sein de l’Église catholique et fondé en Amérique latine en 1972. Ce mouvement s’inspire du communisme et prône la libération des peuples.
15 Gouvernement du Canada, document en ligne : <http://cmte.parl.gc.ca/Content/HOC/committee/371/fait/reports/rp1032216/03-cov2/03-cov2-F.pdf>, page consultée le 13 mai 2007.
16 Sur le site du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, <http://www.international.gc.ca/eet/research/TPR-2005/TPR-2005-FR_Chapitre_02_-_IDRC-DC.pdf>, page consultée le 18 juin 2008. Également d’intérêt, le texte d’Eugène Beaulieu, Shenjie Chen et Erica Pohjola intitulé «Les déterminants de l’investissement direct canadien à l’étrange», disponible en ligne : <http://www.international.gc.ca/eet/research/TPR-2005/TPR-2005-FR_Chapitre_06_-_Beaulieu_et_al.pdf>, page consultée le 18 juin 2008.
17 Tiré du site Internet de l’ACDI, <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/JUD-112912039-MY2?OpenDocument>, page consultée le 18 juin 2008.
18 La Déclaration de Paris, énoncée en mars 2005, vient consacrer l’amélioration de l’efficacité de l’aide comme étant l’un des enjeux fondamentaux de l’aide au développement. Le premier chapitre du présent ouvrage présente la Déclaration de Paris en détail. Voir également le site de l’OCDE à ce sujet : <http://www.oecd.org/document/18/0,2340,fr_2649_3236398_35401554_1_1_1_1,00.html>.
19 Site du ministère des Affaires étrangères et Commerce international du Canada, <http://geo.international.gc.ca/latin-america/latinamerica/canada_americas/history-fr.asp>, consulté le 18 juin 2008.
20 Voir le document d’évaluation en ligne : <http://www.acdi-cida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/Honduras/$file/FINALE-FRANCAIS.pdf>, page consultée le 1 juin 2008.
21 Voir les détails du CCI en ligne : <http://haiticci.undg.org/index.cfm?Module=ActiveWeb&Page=WebPage&s=introduction>, page consultée le 18 juin 2008.
22 Par exemple, en 2005, Cuba se situait au 52e rang du classement sur le développement humain (IDH), juste au-dessus du Mexique (53e).
23 En 2005, plus de 600 000 touristes canadiens ont visité Cuba et les exportations canadiennes vers Cuba ont atteint 327 000 000 $ (2004) ; voir « Canada-Cuba Relations Fact Sheet, Foreign Affairs Canada », <http://geo.international.gc.ca/latin-america/latinamerica/country_info/cuba_relations-en.asp#4>, page consultée le 18 juin 2008.
24 Le terme coyote est généralement utilisé pour identifier les intermédiaires informels qui contrôlent le cours de la production agricole (café, maïs, sucre, etc.) et restreignent la diversification commerciale des petits producteurs en monopolisant les filières de distribution et de vente pour le bénéfice des exportateurs.
25 Le bassin versant désigne un territoire délimité par les lignes de partage des eaux de surface sur lequel toutes les eaux s’écoulent vers un même point appelé exutoire. La gestion par bassin versant de l’eau inclut autant les activités naturelles que les activités humaines. En ce sens, les sols, la végétation, les animaux et les êtres humains font partie d’un bassin versant. Cette gestion est généralement opérée par des organisations de base locales.
26 Le plan Colombia est un vaste programme qui combine l’aide humanitaire à la lutte au narcotrafic. Ce programme relègue la Colombie parmi les trois principaux bénéficiaires de l’aide américaine dans le monde.
27 Le programme de partenariat canadien appuie essentiellement les organisations non gouvernementales canadiennes. Voir le chapitre 1 pour plus de détails.
28 En 2004-2005, la Bolivie a bénéficié d’une aide financière de 22 000 000 $ (ACDI, 2006b).
29 Les SWAp et les PRSP sont des processus généralement initiés et gérés par la Banque mondiale pour l’ensemble des pays bénéficiaires d’aide internationale qui visent à coordonner l’aide budgétaire directe et l’imposition de certaines conditions. Pour en savoir plus, voir le chapitre 1 de cet ouvrage.
30 Cadre de programmation pour la Bolivie (2003-2007), en ligne : <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/NIC-22312131-MYH>, page consultée le 18 juin 2008.
31 Voir, entre autres, le discours de Pierre Pettigrew à l’époque où il était ministre du Commerce international : <http://w01.international.gc.ca/MinPub/Publication.aspx?isRedirect=True&publication_id=377973&Language=F&docnumber=2000/S.O>, page consultée le 17 mai 2007.
32 Ressources naturelles Canada (2006), L’industrie canadienne des minéraux et des métaux, Commission géologique du Canada, géologie du Canada. <http:// mmsd1.mms.nrcan.gc.ca/efab/canIndCanMM_f.asp>, page consultée le 17 mai 2007.
33 . Section « Brésil » du site Internet de l’ACDI : <http://www.acdi-cida.gc.ca/bresil>.
34 Ce programme de transfert technologique a récemment fait l’objet d’une évaluation relativement positive. Voir le document en ligne : <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/REN-218131619-PFX>, page consultée le 18 juin 2008.
35 Canada’s Cooperation Strategy in Brazil 2005-2010, Canadian International Development Agency, tiré de <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/En/NIC-22312535-N32>, page consultée le 18 juin 2008. Pour en savoir plus sur la relation entre le Canada et le Brésil, voir le texte de Valdemar Laeo Neto (2006).
36 Voir le site Internet <http://www.theglobeandmail.com/servlet/story/RTGAM.20070608.wg8africa08/BNStory/International>, page consultée le 18 juin 2008.
Auteurs
Actuellement chef de la délégation régionale de l’océan Indien pour la Croix-Rouge canadienne. Auparavant, il a travaillé comme directeur régional des programmes pour CARE Canada. Il a participé à plus d’une centaine de missions humanitaires et d’appui technique, dont en Colombie, à Haïti, et dans la région du Darfour. Titulaire d’une maîtrise en sciences de l’environnement, il complète actuellement son doctorat en science politique à l’UQAM, dans le cadre duquel il étudie les enjeux de l’aide humanitaire et la coopération internationale canadienne. Il a travaillé plusieurs années en Amérique latine et en Asie du Sud-Est pour le compte du Centre canadien d’étude et de coopération internationale (CECI) en tant que chef des projets d’aide humanitaire et d’urgence. Ses intérêts de recherche portent particulièrement sur les enjeux de l’efficacité de l’aide, sur la sécurité humaine et les interventions humanitaires complexes.
Candidate au doctorat et chargée de cours au Département de science politique de l’Université de Carleton. Elle possède une maîtrise en Arts in International Affairs de la Norman Paterson School of International Affairs (NPSIA), qu’elle a obtenue à la suite d’études en anthropologie à l’Université McGill. Elle a travaillé comme analyste principale à la Fondation canadienne pour les Amériques au sein de la direction des Andes et également comme agente de recherche au Centre de recherches pour le développement international (CRDI). Elle est auteure de plusieurs publications et d’analyses politiques portant sur les enjeux sociaux et de développement touchant la région des Andes, et coauteure de Elusive Peace : International, National and Local Dimensions of the Conflict in Colombia (Palgrave Macmillan, 2005). Ses recherches actuelles portent sur la citoyenneté et la responsabilité sociale en Amérique latine.
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