Introduction générale. Aide canadienne au développement : état présent et tendances récentes
p. 11-42
Texte intégral
1Dans un ouvrage bien connu, Cranford Pratt décrivait l’évolution de l’aide canadienne en ces termes :
Durant la période 1951-1968, les actions du Canada en matière d’aide internationale étaient intimement liées aux intérêts commerciaux [du Canada]. De la création de l’Agence canadienne de développement international (ACDI) en 1968 jusqu’à 1978, l’aide canadienne revint à ses motivations d’origine, soit les besoins humanitaires et en termes de développement des pays bénéficiaires. Enfin, la période suivante [de 1978 à la publication de son ouvrage en 1995], les actions de l’ACDI furent à nouveau influencées par les intérêts commerciaux et économiques canadiens. (Pratt, 1996 : 5 ; trad. des auteurs)
2Si ce portrait de l’aide laisse sous-entendre une certaine continuité, de grands changements s’annonçaient toutefois vers la fin de la période étudiée par Pratt. En effet, les grandes transformations sur le plan de l’aide au cours des années 1990 allaient constituer, pour de nombreux analystes, « la fin d’une ère » (Pratt, 1996 : 6). Les questions soulevées quant aux intérêts sous-jacents et quant à l’efficacité de l’aide, ainsi que les réformes qui allaient être mises sur pied, auront, jusqu’à un certain point, remis en question les fondements et la structure de l’aide canadienne au développement1. Les impacts de ce processus ont été importants tant sur le plan des politiques d’aide proprement dites pour les différents ministères impliqués, que sur celui de la structure et du mode de fonctionnement des organisations et entreprises mettant en œuvre les programmes d’aide au développement (Boulanger, 2003)2.
3Alors qu’une ère prenait fin, une autre débutait donc à l’aube du XXIe siècle. Amorcé sous le signe de l’efficacité, ce nouveau cycle a donné naissance, au Canada, à une politique internationale plus bureaucratisée et à une gestion axée sur les résultats, transformant complètement les opérations d’aide internationale canadienne. Du même coup, les mécanismes d’attribution de l’aide, le choix des pays partenaires et les orientations sectorielles ont également été complètement revus. Le récent scandale des commandites, mis à jour en 2003, n’est pas non plus étranger à la gestion plus serrée de l’administration de l’aide canadienne.
4Ces tendances sur la scène canadienne s’inscrivaient toutefois dans un cadre plus large. Le règne de l’efficacité de l’aide est également né de tendances internationales, et tout particulièrement d’une prise de conscience quant aux lacunes des précédents modèles d’aide et à l’ampleur de la tâche à accomplir. Encore aujourd’hui, plus de la moitié de la population mondiale gagne moins de 2 $ US par jour et plus d’un milliard d’individus vivent dans une pauvreté extrême (moins d’un dollar par jour)3 ; 815 000 000 de personnes sont sous-alimentées, et ce nombre continue de croître dans les régions les plus vulnérables comme l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud4. Devant des besoins si pressants, une nouvelle vision était nécessaire à l’échelle de la planète, une vision s’articulant autour du nouveau principe d’efficacité de l’aide. Si toutefois la tendance est acclamée par de nombreux analystes, le virage vers l’efficacité de l’aide continue d’en effrayer également un bon nombre d’autres. Ce nouveau modèle d’aide alimente les discussions entre ses tenants et ses opposants.
5Ce chapitre vise à introduire la thématique de l’aide canadienne en présentant les plus récents débats et tendances. Nous discuterons tout d’abord du débat international actuellement en cours sur l’efficacité de l’aide. Nous traiterons ensuite des principales conséquences du virage vers l’efficacité pour l’aide canadienne, en particulier de la révision de l’approche multilatérale canadienne et de ses effets sur l’architecture de l’aide canadienne. Avant de conclure, ce chapitre analysera les composantes budgétaires, sectorielles et régionales de l’aide canadienne, tout en tenant compte des intérêts et motivations du Canada quant à son action à l’international.
À L’ÈRE DES REMISES EN QUESTION : EFFICACE, L’AIDE AU DÉVELOPPEMENT ?
6Il ne suffit pas d’allouer des fonds pour réussir à enrayer la pauvreté ou augmenter le niveau de vie des plus pauvres de la planète. Ainsi, au cours des 50 dernières années, les transferts de fonds d’aide internationale effectués par le gouvernement du Canada et les pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) ne semblent pas avoir eu les résultats escomptés. Dans certains cas, l’acharnement humanitaire et l’aide au développement ont même généré des relations déséquilibrées entre les États riches et pauvres, allant jusqu’à créer une dépendance des pays récipiendaires envers leurs créanciers5. Cette réalité a suscité une vaste réflexion sur l’efficacité de l’aide. Étant donné l’ampleur du débat actuel quant aux effets de l’aide et son impact sur la politique étrangère canadienne, il est fondamental d’en décrire les principaux enjeux.
7Ce sont les travaux de Boone (1996) qui ont amorcé le débat sur l’efficacité de l’aide. Utilisant des théories d’économie moderne et des modèles de calculs de régressions économétriques, Boone conclut que l’aide n’a pas d’effet sur la croissance des pays bénéficiaires (Boone, 1996). Ces résultats remettaient donc en question des décennies d’importants transferts d’aide, en plus de confirmer l’échec d’approches jusque-là employées, dont les programmes d’ajustement structurel6. La thèse de Boone allait donc à contre-courant du point de vue de multiples acteurs concernés. Il n’en fallait pas plus pour qu’une multitude de chercheurs, principalement des économistes, se lancent dans de nouvelles recherches pour confirmer ou infirmer les conclusions de Boone. La réponse la plus remarquée fut sans contredit celle de Craig Burnside et David Dollar. À l’inverse de Boone, ces auteurs maintenaient que l’aide a un effet bénéfique : dans des conditions favorables, incluant une bonne gouvernance, l’aide contribue à la croissance des pays en développement (Burnside et Dollar, 1997). Cette publication a influencé la grande majorité des bailleurs de fonds internationaux et donné une seconde vie au principe de conditionnalité, une approche invitant fortement les pays bénéficiaires à souscrire à certaines politiques administratives et fiscales afin d’obtenir un financement.
8Se rapportant aux travaux de Burnside et de Dollar, William Easterly estima pourtant simpliste et naïf d’appliquer catégoriquement les conclusions d’une étude économique sans chercher à les approfondir (Easterly, 2003). Ainsi, selon lui, les conclusions des travaux de Burnside et Dollar ont été employées sans nuances par l’Organisation des Nations Unies (ONU), la Banque mondiale, la Maison-Blanche, le Department for International Development (DFID) britannique, l’Agence canadienne de développement international et The Economist. Toujours selon Easterly, l’ACDI ainsi que bien d’autres bailleurs de fonds ont construit leurs politiques d’aide internationale en se basant sur des conclusions économétriques qui, à ce jour, n’ont toujours pas été vérifiées et continuent d’être défendues parce qu’aucune solution de rechange crédible n’a encore été proposée.
9Plus de 10 ans après la parution des travaux de Boone, le débat sur l’efficacité de l’aide est loin d’être résolu. En fait, les résultats de plus d’une centaine de publications portant sur l’efficacité de l’aide ont été compilés. Les conclusions de ces analyses s’avérant souvent contradictoires, aucun consensus n’a été atteint. La relation entre l’octroi d’aide et son impact n’est en effet pas simple. Entre les positions plus tranchées sur l’efficacité et l’inefficacité de l’aide, il existe une multitude de points de vue. Certains considèrent que l’aide est efficace lorsqu’on l’analyse sur le plan des rapports entre l’aide et la croissance, mais qu’elle est inefficace si on l’évalue sur le plan de l’investissement (Doucouliagos et Paldam, 2006a). En d’autres termes, l’aide a un impact sur la croissance des pays bénéficiaires, mais n’en a pas sur leur capacité d’investir. Selon d’autres analystes, l’aide peut même être dommageable pour la situation économique d’un pays, tel que l’indiquent certaines études qui traitent de l’impact de l’aide sur l’épargne des pays bénéficiaires (Doucouliagos et Paldam, 2006a ; 2006b ; 2006c). Qui plus est, ces études sur l’efficacité oublient souvent que l’aide extérieure peut, dans le meilleur des cas, servir de catalyseur pour le développement, mais ne peut se substituer aux efforts et à la responsabilité des communautés et des gouvernements locaux. En fait, l’aide internationale n’est pas une fin en soi, mais un des multiples moyens mis en place pour tenter de rééquilibrer la richesse globale.
Une trop grande dispersion de l’aide
10Plus qu’un débat théorique, l’importance attribuée à l’efficacité de l’aide aura fait évoluer les politiques et les mécanismes de financement de nombreux pays du CAD, dont le Canada. Le premier effet observé au Canada a été la révision de son approche multilatérale en termes d’octroi d’aide. Selon certains auteurs, depuis la Deuxième Guerre mondiale, le Canada a généralement choisi d’être un membre actif de réseaux et d’institutions multilatérales, ainsi qu’encouragé de manière enthousiaste le respect des canaux et des normes multilatérales sur la scène internationale (Bátora, 2005 ; Keating, 2001)7. Si pour d’autres auteurs le soutien actif promulgué par le Canada envers les institutions et réseaux multilatéraux a été moins manifeste, et même a été plus ponctuel que constant (Holloway, 2006 ; Keenes 1995), il n’en demeure pas moins que le Canada est devenu au fil des années membre d’un très grand nombre d’organisations et de réseaux internationaux, allant de petits regroupements régionaux ou thématiques, par exemple, aux plus grandes institutions internationales telles que l’ONU8. Ce membership canadien au sein d’une multitude de forums internationaux a influé sur l’agenda de l’aide canadienne au développement. En effet, une bonne part de l’aide canadienne s’est vu canalisée vers des organisations multilatérales, afin qu’elles se chargent de la redistribution des fonds canadiens.
11Cette multilatéralisation de l’aide, combinée à la multiplicité d’enjeux et d’intérêts auxquels le Canada souhaite répondre par l’entremise de son aide, a longtemps été la cause de la dispersion de l’aide canadienne, tant sur le plan géographique que sectoriel. En fait, cette tendance a servi à canaliser l’aide vers de multiples acteurs, secteurs et pays9. Les agences nationales d’aide, telles que l’ACDI, sont selon le CAD présentes dans un trop grand nombre de pays, œuvrent dans trop de secteurs et entre tiennent des liens avec trop de partenaires. Le CAD indiquait également que ces agences étatiques ont un nombre d’objectifs démesurément élevé10. Pour remédier à cette situation, des recommandations ont été élaborées en vue d’améliorer l’efficacité de l’aide. Les plus récentes se trouvent dans la Déclaration de Paris de 2005, laquelle a été endossée par plus d’une centaine d’États à travers le monde11. L’une des principales recommandations consiste à encourager les agences bilatérales et les organisations multilatérales à se limiter davantage quant au choix de leurs partenaires et à se concentrer de façon sectorielle (concentration géographique et sectorielle). La Déclaration de Paris encourage également les donateurs à mieux coordonner leurs activités afin de limiter le dédoublement des efforts et permettre une approche concertée avec les pays bénéficiaires. Les approches de coordination proposées devraient donc se fonder sur les capacités spécifiques des pays donateurs et leurs champs de spécialisation, ainsi que sur l’orientation de leurs programmes respectifs (Nestmann et al., 2002).
12Parmi tous les pays donateurs membres du CAD, le Canada a longtemps été un de ceux dont l’aide était la moins concentrée. À titre d’exemple, en 1999-2000, les 15 pays bénéficiaires en tête de liste du programme canadien d’aide ne recevaient que 15,8 % de l’aide publique au développement (APD)12 totale du Canada, le reste allant à une multitude d’autres pays récipiendaires. La moyenne des autres pays donateurs s’élevait à 25 % pour leurs 15 principaux bénéficiaires. En fait, à l’époque, aucun autre donateur ne donnait moins de 20 % de son aide à ses 15 pays bénéficiaires de base, à part le Canada (ACDI, 2002).
Mise en place de la politique de concentration géographique et sectorielle
13Afin de répondre aux critiques du CAD quant à l’efficacité de l’aide et, plus récemment, aux recommandations de la Déclaration de Paris quant à une plus grande concentration de l’octroi de l’aide, le Canada a choisi de recentrer géographiquement l’allocation de son aide. Ainsi, au début de l’année 2003, il a établi une liste de pays prioritaires avec lesquels il espère renforcer ses liens. Comprenant d’abord 9 « partenaires du développement », la liste s’est rapidement allongée à 25, dont 14 pays d’Afrique, 6 d’Asie, 4 d’Amérique latine et 1 d’Europe de l’Est (Pistor, 2005)13. Officiellement, le choix des pays prioritaires s’est fait sur la base des critères de pauvreté et du revenu par habitant. L’ACDI justifiait également son choix de partenaires selon leur aptitude à répondre aux critères suivants :
la détermination à assurer l’efficacité du développement, concrétisée par les efforts pour améliorer la gouvernance, garantir la prise en charge locale des stratégies de réduction de la pauvreté, mettre fin à la corruption et utiliser les fonds d’aide de manière efficace […] exercer un leadership au niveau régional et [la possibilité de renforcer] les partenariats. (ACDI 2002)
14Le choix de ces partenaires signifie également qu’avec le temps, l’aide bilatérale devrait se concentrer de manière croissante en Afrique subsaharienne, conformément à l’engagement pris par le gouvernement dans son budget de 2005. Le gouvernement canadien prétend vouloir doubler, d’ici 2009, l’aide destinée à l’Afrique (ACDI, 2005a).
15Il est toutefois à prévoir qu’à moyen terme, le climat national et international ait un impact sur la politique canadienne de concentration géographique. L’expérience démontre que le gouvernement canadien s’efforce de répondre de manière ponctuelle aux pressions et aux demandes de la population canadienne et de ses partenaires internationaux, qu’il s’agisse de pays ou d’organisations. Les partenaires prioritaires et les régions privilégiées déterminées par le Canada risquent donc de changer au fil de l’évolution de la démographie canadienne, mais également au fil des réalignements politiques et diplomatiques entre le Canada et ses partenaires. Une récente annonce faite par le gouvernement conservateur de se recentrer vers les Amériques en est un exemple. Lors du Sommet du G-8 en juin 2007, le gouvernement canadien annonçait en effet un intérêt renouvelé pour l’Amérique latine devant s’accompagner d’une réorientation d’une part de l’aide canadienne vers cette région.
16Par ailleurs, dans les faits, il semble que cette concentration géographique au bénéfice d’une vingtaine de pays ne soit pas encore opérante. On constate que, malgré cette nouvelle politique, le nombre de pays partenaires et bénéficiaires de l’aide canadienne est toujours important. Bien que l’ACDI indiquait que, pour l’année 2005-2006, 76 % des fonds de son programme géographique ont été octroyés à 20 pays partenaires, dans l’ensemble plus de 70 pays ont bénéficié de fonds bilatéraux provenant de ce programme et plus de 140 pays bénéficiaient de fonds bilatéraux canadiens d’une forme ou d’une autre au cours de 2005-2006 (ACDI, 2008). Plus intrigante encore est la tendance à faire de quelques pays privilégiés les principaux récipiendaires d’aide. En 2003-2004, l’Irak et l’Afghanistan étaient les deux premiers récipiendaires de l’aide canadienne. Bien que ne faisant pas partie de la liste des pays prioritaires, ils ont pourtant bénéficié à eux seuls de 28 % du total des nouvelles ressources d’aide canadienne de 2001 à 2004. L’année suivante, soit en 2004-2005, l’Afghanistan et Haïti devenaient les deux pays bénéficiaires les plus importants de l’aide canadienne, tout en n’étant toujours pas inscrits sur la liste des pays prioritaires14. L’Afghanistan et Haïti continuaient d’ailleurs d’arriver en tête du palmarès des récipiendaires d’aide canadienne en 2005-2006 (ACDI, 2008)15.
17Toujours dans une perspective d’efficacité, le Canada a également choisi d’orienter l’allocation de son aide en fonction de secteurs d’intervention clés. Officiellement, les objectifs stratégiques du Canada 2005-2006 s’articulaient autour de quatre thématiques générales, 1) la santé, 2) l’éducation de base, 3) la gouvernance et 4) le développement du secteur privé, ainsi qu’autour de deux thèmes transversaux, soit l’égalité des sexes (genre) et le développement durable (ACDI, 2005a). Ces vastes thématiques devaient donc permettre de s’attaquer à des enjeux aussi variés que l’eau et l’assainissement, la lutte contre la désertification, la gestion des ressources naturelles, l’appui à la production et la commercialisation agricoles, le respect des droits de la personne, la réforme du secteur public et la bonne gouvernance, la prévention des conflits et la réconciliation, ou encore le renforcement des organisations et institutions locales (ACDI, 2005a).
TABLEAU 0.1. Ventilation des investissement d’aide canadienne, 2004-2005

Source : ACDI, 2006a ; 2006b.
18Si les concepts de concentration géographique et sectorielle sont théoriquement valables et logiques, ils comportent néanmoins chacun leur lot de risques. Le premier risque est celui d’un désengagement trop rapide de la part du Canada envers les pays bénéficiaires n’étant pas retenus comme partenaires prioritaires. Ce désengagement ne doit pas précipiter inutilement la fin des projets et freiner les initiatives en cours. Néanmoins, une redirection de l’aide vers certains pays cibles comporte le risque de voir certains pays et projets être délaissés, annonçant le non-renouvellement de certains projets, mettant en péril certaines initiatives en cours, et signifiant une pression accrue sur les partenaires locaux et canadiens travaillant à ces initiatives et projets pour trouver des sources alternatives de financement.
19Le deuxième risque potentiel est l’incapacité (ou la capacité limitée) des nouveaux pays bénéficiaires et des organismes et institutions chargés de la livraison de l’aide de gérer l’arrivée de fonds substantiels supplémentaires. De manière générale, une opération de type dumping de l’aide canadienne risque de survenir afin de pouvoir respecter les exigences de décaissement et les promesses politiques. Or, la capacité de gestion et d’absorption d’un pays bénéficiaire est limitée. Un afflux important d’aide peut s’avérer difficile à gérer – du moins à court et moyen termes – pour des pays dont les infrastructures, la logistique et les ressources humaines et de gestion d’aide sont limitées. Le problème se pose également pour l’ACDI. En fait, la structure administrative actuelle de l’ACDI, avec ses nombreux bureaux décentralisés, ne permet pas une gestion efficace de l’aide dans un nombre réduit de pays. Pour réussir à gérer l’influx fort important de nouveaux fonds au sein de certains partenaires privilégiés, l’ACDI devra mettre en place des équipes locales spécialisées afin d’assurer l’absorption des fonds supplémentaires16.
20Il ne faudrait pas non plus que la stratégie de concentration géographique nuise à la capacité du gouvernement canadien de réagir aux crises humanitaires, qu’il s’agisse de catastrophes naturelles ou de conflits dans des pays non ciblés, nécessitant un appui rapide. Ceci représente le troisième risque. Il faudrait éviter que les fonds dirigés pour l’aide humanitaire soient restrictifs et s’assurer que, peu importe le pays, la région ou la population, les victimes d’une crise puissent bénéficier d’une aide canadienne17.
21Le quatrième risque, une perte de contrôle accrue des fonds de l’aide canadienne de la part des organisations de la société civile (OSC) canadienne, est à prévoir. L’augmentation de l’aide canadienne dans les pays de concentration s’effectue, en effet, essentiellement au travers d’institutions multilatérales ou par l’entremise de fonds d’aide décentralisée18. Le Conseil canadien de la coopération internationale (CCCI) a déjà constaté un net recul de la participation des organisations de la société civile dans la mise en œuvre des programmes de l’ACDI. À titre d’exemple, de 1999-2000 à 2002-2003, la part de gestion des projets de l’ACDI par les OSC est passée de 28,7 à 16,6 % de l’APD (CCCI, 2004). Les conséquences à prévoir de ce retrait des OSC dans la livraison de l’aide sont que celles-ci n’auront que difficilement accès au financement canadien.
22Enfin, un dernier risque est lié à l’influence croissante des priorités d’aide établies par le gouvernement canadien sur les partenaires canadiens du développement, particulièrement les organisations non gouvernementales (ONG). Ainsi, la plupart des organisations non gouvernementales (ONG) et les entreprises d’aide internationale ont l’obligation d’adopter les priorités de l’ACDI, si elles souhaitent obtenir un financement. De fait, on constate une perte d’identité chez ces organisations dans une perspective de survie institutionnelle. Autrement dit, la survie institutionnelle, qui passe par l’adoption de priorités déterminées par les grandes agences de développement, dépend de cela au détriment d’évaluations individuelles des besoins sur le terrain effectuées de manière participative par les communautés, les organisations de base ou les ONG.
Changement dans les mécanismes d’allocation de l’aide
23La quête d’efficacité s’est aussi accompagnée d’une révision des mécanismes d’attribution de l’aide. Dans le cadre de cette révision, les gouvernements partenaires sont encouragés à fonctionner par l’intermédiaire de ce qui est appelé approches sectorielles, ou de Sector-Wide Approach (SWAp). Afin de favoriser l’ownership du processus d’aide de la part du pays partenaire et de permettre d’éviter les contradictions et dédoublements associés aux approches fonctionnant par projets individuels, un SWAp permet de canaliser tous les fonds attribués à un secteur (l’éducation ou la santé, par exemple) au développement et au soutien d’une politique cohérente s’appliquant à l’ensemble du secteur et d’un programme de dépenses agencé aux spécificités du secteur. Ainsi, les pays récipiendaires sont invités à établir une liste de besoins clairs pour chacun de leurs ministères devant bénéficier d’aide. Les différents donateurs coordonnent alors leurs réponses et allouent des fonds en tenant compte de cette liste de besoins déterminée de manière spécifique par chaque secteur19.
24Si les SWAp se veulent une nouvelle approche ciblée d’allocation de l’aide, la communauté des donateurs emploie également un nouveau type de cadre national d’allocation de l’aide. Il s’agit d’un document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP), mieux connu sous son nom anglophone, Poverty Reduction Strategy Paper (PRSP). Mis en place par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international,
[l]es documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP) sont établis par les gouvernements des pays à faible revenu selon un processus participatif dans lequel s’impliquent à la fois les parties prenantes au niveau national et les partenaires extérieurs du développement, dont le FMI et la Banque mondiale. Le DSRP décrit les politiques et les programmes macroéconomiques, structurels et sociaux qu’un pays mettra en œuvre pendant plusieurs années pour promouvoir la croissance et réduire la pauvreté ; il expose aussi les besoins de financement extérieur et les sources de financement connexes20.
25Cinq grands principes guident les DSRP. Les DSRP sont d’abord et avant tout pilotés par le pays récipiendaire ; ce sont, par ailleurs, des outils mettant l’accent sur l’obtention de résultats ; ce sont des approches globales qui conçoivent la pauvreté sous ses différentes facettes ; ils favorisent l’élaboration de partenariats ; et, finalement, ils adoptent une perspective à long terme de réduction de la pauvreté21. Annoncés comme étant une panacée devant permettre de favoriser l’appropriation du processus d’aide par les acteurs nationaux ainsi qu’une plus grande participation de la société civile locale, plus de 60 pays ont emboîté le pas et mis de l’avant un DSRP22. Plusieurs pays d’Afrique, tels que le Mozambique, la Tanzanie et le Zimbabwe, de même que des pays d’Amérique latine, comme la Bolivie et le Honduras, sont parvenus à réunir la quasi-totalité de leurs donateurs sous le chapeau d’un seul canal d’allocation de ce type (White, 2001).
26Un fonctionnement par SWAp et DSRP laisse entrevoir bien des avantages pour des agences telles que l’ACDI. En effet, selon l’ACDI, « [l]a prolifération des programmes de faible envergure, visant des secteurs ou des pays, réalisés par les donateurs suppose une coordination plus poussée et des frais plus importants pour les pays bénéficiaires » (ACDI, 2002). Ce mode de fonctionnement par projets et programmes ne permet donc pas, selon l’ACDI, de faire des économies d’échelle en termes de frais de gestion et de frais généraux (ibid.)23. Pour l’agence canadienne, en permettant une plus grande concertation entre donateurs, ainsi qu’une concentration de l’aide, les SWAp et DSRP pourraient favoriser une gestion plus efficace de l’aide24. Ces nouvelles approches permettraient la réduction des frais de gestion par l’entremise de transferts de sommes plus élevées aux agences multilatérales et directement aux pays bénéficiaires (aide budgétaire directe).
27Si la popularité de ce cadre d’allocation de l’aide croît – tel que le confirme, entre autres, son adoption par l’ACDI –, de plus en plus d’auteurs commencent néanmoins à soulever de sérieuses critiques quant aux DSRP. Un nombre croissant d’analystes doutent de leur capacité réelle à faire du pays récipiendaire le principal agent du processus de développement, ainsi qu’un partenaire réel–et non pas un client–des pays donateurs (White, 2001 ; Mouelhi et Rückert, 2007). À titre d’exemple, Ian Smillie juge cette approche paternaliste et peu apte à favoriser la prise en charge locale du processus d’aide (Smillie, 2004). Ainsi, selon Smillie, les bailleurs de fonds comme le Canada opèrent sous la direction de la Banque mondiale, une organisation au sein de laquelle les pays bénéficiaires n’ont qu’un pouvoir bien relatif de faire valoir leur point de vue. Il illustre cette stratégie à l’aide d’une métaphore : dans le cadre des DSRP, le « pays bénéficiaire occupe effectivement le siège du chauffeur […] et les bailleurs de fonds les sièges arrière, avec la carte routière et la carte de crédit » (Smillie, 2004). Dans ce modèle d’aide, le processus d’attribution des fonds continue donc de s’appuyer sur une approche top-down de financement extérieur. Le financement et la prise de décision sont principalement effectués par des organisations internationales en dehors des structures gouvernementales des pays bénéficiaires. Les décisions sont souvent imposées à partir « d’en haut », sans considérer les organisations de base et la population « en bas ». En d’autres termes, les pays bénéficiaires ne sont pas encouragés à être autosuffisants et à développer des mécanismes internes de financement, mais plutôt à poursuivre leur dépendance financière envers les pays donateurs.
28Fait également à noter, en raison du processus DSRP, les fonds publics, normalement attribués à l’aide bilatérale et accessibles aux organisations et entreprises canadiennes, sont de plus en plus transférés vers les organisations des Nations Unies ou vers des programmes multilatéraux décentralisés25. Bien que les coûts et dédoublements liés à l’administration de programmes bilatéraux soient alors réduits, il n’en reste pas moins que les agences multilatérales impliquent elles-mêmes des coûts de gestion importants et fonctionnent par l’entremise de lourdes bureaucraties. Les économies d’échelle pouvant être obtenues par un tel mode de fonctionnement, ainsi que l’efficacité de canaliser l’aide par l’intermédiaire des bureaucraties multilatérales demeurent encore à démontrer.
LE BUDGET ET LA STRUCTURE DE L’AIDE CANADIENNE
29Depuis le budget de 1991, les dépenses de l’ACDI proviennent de l’enveloppe de l’aide internationale (EAI) du gouvernement canadien qui constitue une large part de l’APD du pays. L’administration de l’EAI est majoritairement assurée par l’ACDI (82 %, soit plus de 2 862 millions de dollards sur une enveloppe totale de plus de 3 498 millions). D’autres ministères et organes gouvernementaux canadiens, dont le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) et le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), se partagent l’essentiel de la part résiduelle, soit environ 18 % (636 millions de dollards) (ACDI, 2008)26. En plus de l’EAI, d’autres ressources financières sont disponibles et gérées par d’autres ministères. Ainsi, certains fonds tels que les bourses octroyées aux étudiants étrangers venant étudier au Canada (82 920 000 $) et les coûts des réfugiés au Canada pour la première année (211 650 000 $) sont également pris en compte dans le calcul de l’aide canadienne (ACDI, 2008). L’APD canadienne pour une année donnée tient donc compte tant des montants de l’EAI que des fonds d’aide provenant de sources autres que l’EAI (CCCI, 2005a).
30Après avoir atteint un sommet vers la fin des années 1970 et au début des années 1980, l’aide canadienne a chuté dramatiquement au cours des années 1990, et ce, malgré les déclarations de l’ACDI à l’effet qu’elle souhaitait augmenter le ratio d’APD par rapport au PIB à 0,7 % pour l’an 200027. Au contraire, de 1991 à 2001, le budget de l’APD du Canada a été réduit de 34 %. La tendance s’est néanmoins renversée au cours des dernières années. Depuis le budget de 2001, les engagements du Canada ont augmenté considérablement au chapitre de l’APD. Cette hausse est survenue à la suite d’engagements financiers pour la reconstruction de l’Afghanistan, de la création du fonds du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), de la réponse au tsunami de 2004 et des engagements pour la reconstruction de l’Irak et d’Haïti28. Ainsi, au cours des dernières années, l’enveloppe de l’aide internationale canadienne a connu une croissance de 12,4 %, passant de 3 237 000 $ en 2004-2005 à 3 637 000 $ en 2005-2006 (CCCI, 2005b)29. Il est toutefois à noter que l’annulation de certaines dettes bilatérales – environ 300 000 000 $ pour l’Irak et 350 000 000 $ pour le Cameroun en 2004 – explique une large part de ce changement30. Le remboursement de la dette de l’Inde estimée à 430 000 000 $ (2005) a également eu son rôle à jouer. Sans ces facteurs, l’aide canadienne se serait plutôt chiffrée à 0,29 % du PIB, au lieu du 0,34 % pour l’année 2004-2005, pourcentage obtenu en comptabilisant l’annulation et le paiement de ces dettes (CCCI, 2005b).
TABLEAU 0.2. Ventilation de l’aide canadienne par région pour l’année 2004-2005 (en millions de dollars)

Source : ACDI, 2006b
31Les nouveaux fonds d’aide canadiens sont répartis à travers les cadres d’aide canadienne. La coopération multilatérale a bénéficié d’augmentations substantielles au cours des dernières années. Elle s’est accrue de 29 % de 2003 à 2006. Toujours pour cette même période, les engagements envers les grandes banques internationales ont également augmenté de 18 %31. Les programmes régionaux (aide bilatérale) ont quant à eux aussi connu une augmentation (16 %), bien que l’Afrique et le Moyen-Orient aient obtenu plus de 52 % des décaissements prévus et que l’Amérique latine et l’Asie aient vu leurs budgets diminués d’environ 3 % au cours de la période (2004-2005)32.
FIGURE 0.1. Pourcentage de l’investissement de l’aide canadienne totale par région (2004-2005)

Source : ACDI, 2006b.
32Il est intéressant de noter que le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international se voit octroyer de nouveaux fonds de plus de 260 000 000 $, totalisant 11 % de l’APD, afin de mettre en œuvre une série de projets liés à la sécurité, dont 15 000 000 $ pour le renforcement de la capacité de lutte contre le terrorisme, 20 000 000 $ en appui aux opérations de paix dans le monde et 40 000 000 $ pour un fonds de prévention des conflits33. Alors que l’ACDI avait jusqu’ici tenu les cordons de la bourse, voilà que l’on assiste maintenant à un important transfert des fonds de l’APD vers le MAECI. Celui-ci devient donc un joueur-clé dans la mise en place des programmes d’aide, un rôle qui n’est pas étranger aux nouvelles approches coopératives de gestion des crises internationales, tel le 3D : « développement, défense et diplomatie » et plus récemment l’approche pangouvernementale (whole-of-government)34. L’approche pangouvernementale est une stratégie de coordination de l’action à l’étranger d’un État amenant ses ministères aux fonctions internationales, par exemple les Affaires étrangères, l’agence chargée de la coopération internationale, l’organe chargé du commerce international, et même le ministère de la Défense, à harmoniser leurs politiques et activités. Il s’agit d’une approche de plus en plus populaire. Le CAD de l’OCDE en fait la promotion pour l’action internationale envers les États fragiles35. Suivant les recommandations du CAD, le Canada a décidé d’implanter une approche pangouvernementale pour son action à l’étranger. Il a d’ailleurs créé le Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction (GTSR) au sein du MAECI36. Le GTSR a été créé pour élaborer la politique d’intervention interministérielle nationale. Il travaille de pair avec ses partenaires-clés, soit l’ACDI, le ministère de la Défense nationale (MDN), la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et le Bureau du Conseil privé. Le gouvernement canadien a doté le MAECI du Fonds pour la paix et la sécurité mondiales (FPSM) se chiffrant à plus de 500 000 000 $ sur cinq ans pour, entre autres, appuyer le GTSR. Il est toutefois à noter que les montants alloués au FPSM ne sont généralement pas comptabilisés dans l’APD canadienne.
FIGURE 0.2. Évolution du ratio APD/PNB ( %) de l’investissmeent de l’aide canadienne

Source : ACDI, 2006a.
FIGURE 0.3. IMPORTANCE RELATIVE DES PRINCIPAUX PROGRAMMES DE L’ACDI, BUDGET 2004-2005

Source : ACDI, 2005b.
L’architecture actuelle de l’aide canadienne au sein de l’ACDI
33L’architecture des structures administratives de l’aide canadienne a évolué au fil des décennies. Aujourd’hui, trois divisions administratives (programmes) de l’ACDI se partagent l’essentiel de l’aide canadienne, soit : 1) les programmes géographiques, 2) les programmes du partenariat et 3) les programmes multilatéraux (ACDI, 2006b). On retrouve également un certain nombre de programmes de petite envergure, tels que le programme de cohérence des politiques et celui de l’engagement des Canadiens. La Figure 0.3 et le Tableau 0.3 détaillent les décaissements pour ces différents programmes, ainsi que l’évolution du financement canadien de 2003 à 2006.
Les programmes géographiques (ou direction bilatérale)
34Ces programmes de l’ACDI s’occupent des relations bilatérales du Canada avec les récipiendaires de l’aide canadienne. Les programmes géographiques jouent un rôle crucial comme vecteur des relations entre le Canada et ses pays partenaires du Sud. À ce titre, ces programmes jouissaient, jusqu’à un récent scandale gouvernemental, d’une certaine souplesse administrative et donc pouvaient répondre à certaines initiatives des partenaires. En partie en raison de cette souplesse, l’aide canadienne a pu être versée à plus de 161 pays (ACDI, 2006b). Bien que la gestion de ces programmes ait été resserrée depuis, les fonds alloués à la direction bilatérale ont néanmoins été augmentés en 2005-2006. Ils représentaient alors 1 399 000 $ du budget d’aide canadienne, soit 46 % du budget de l’ACDI.
TABLEAU 0.3. Évolution des dépenses des principaux programmes de l’ACDI de 2003 à 2006
2003-2004 | 2004-2005 | 2005-2006 | |
Programme géographique bilatéral | 1 201 000 000 | 1 248 000 000 | 1 399 000 000 |
Programme de partenariat | 296 000 000 | 276 000 000 | 273 000 000 |
Programme multilatéral | 992 000 000 | 1 652 000 000 | 1 280 000 000 |
Cohérence des politiques | 56 400 000 | 55 700 000 | 67 970 000 |
Engagement des Canadiens | 24 600 000 | ||
Total de l’ACDI | 2 573 100 000 | 3 255 200 000 | 3 073 430 000 |
Source : ACDI, 2005b ; 2006b.
35L’aide bilatérale est généralement gérée à partir du siège social de l’ACDI et peut être acheminée directement à un pays bénéficiaire, faire l’objet d’appels d’offres, ou être canalisée à travers des partenaires privés canadiens chargés de faire la mise en œuvre de projets. Aujourd’hui, l’aide bilatérale est toutefois attribuée essentiellement par l’intermédiaire d’appels d’offres permettant aux entreprises privées, aux organisations sans but lucratif et aux institutions universitaires de se faire compétition pour l’octroi de contrats37. Il est à noter qu’antérieurement, ONG et partenaires privés disposaient d’un espace pour créer des initiatives non sollicitées en fonction des besoins des communautés locales. Ces initiatives sont maintenant rarissimes.
Les programmes du partenariat canadien (Direction de générale du partenariat canadien)
36Les programmes du partenariat canadien de l’ACDI appuient les initiatives d’organisations de la société civile canadienne en collaboration avec les pays bénéficiaires sur une base de coûts partagés nécessitant une contribution en fonds propres des ONGs. Ce type de programme, créé pour laisser l’initiative aux ONG, vise surtout à appuyer l’action des ONG canadiennes en fournissant un financement gouvernemental additionnel à leurs projets ou en encourageant l’envoi de volontaires. Selon l’ACDI, les programmes de partenariat canadiens se veulent donc un moyen de favoriser l’engagement de la population canadienne dans le développement international, tout en « souten[ant] les partenariats Nord-Sud et promouv[ant au sein du pays partenaire] le renforcement des capacités de la société civile et des groupes du secteur privé qui peuvent alors travailler à la réduction de la pauvreté et au développement durable à l’échelle locale38. » En 2005-2006, ce programme a subi des compressions budgétaires importantes. Malgré ces coupes, il représentait tout de même 273 000 000 $, soit 9 % du budget de l’ACDI (ACDI, 2006b).
37Par l’entremise de ce type de programme ont pu être créés des liens entre les sociétés civiles, les organisations de base et les mouvements sociaux du Canada et de l’étranger. Ces partenariats sont souvent à l’origine de nouvelles relations entre le Canada et les pays bénéficiant de l’aide canadienne. Entre autres, des milliers de Canadiens ont profité des programmes de coopération volontaire d’organismes tels que CUSO, CECI, EUMC, SUCO et OXFAM Québec39. Ce type de programme a également permis le développement d’initiatives originales, certaines même révolutionnaires, en termes d’aide internationale. Entre autres, par le programme de partenariat canadien, l’ACDI soutient des organismes tels qu’Équiterre, qui font la promotion du commerce équitable40. À travers différentes organisations, l’ACDI finance également d’autres microprojets qui visent à créer des relations commerciales plus justes entre les nations, telles que le projet Mettre les marchés au service des pauvres41. En contrepartie, cette direction est certainement responsable d’une partie de l’éparpillement géographique et sectoriel dont souffre l’aide canadienne. Ce fait est sans doute à la source des restrictions budgétaires subies par les programmes de partenariat canadien.
Les programmes multilatéraux
38Ces programmes sont responsables des relations qu’entretient le Canada avec les agences des Nations Unies et les institutions financières internationales. Ils recoupent également le financement des programmes humanitaires et des urgences. En 2005-2006, les fonds octroyés à ce type de programme étaient en hausse. Ils représentaient 1 280 000 $ des fonds d’aide canadiens, soit 42 % du budget de l’ACDI.
39L’une des composantes importantes des programmes multilatéraux est l’appui aux différents programmes des Nations Unies. En 2004-2005, le Canada a appuyé plus d’une soixantaine d’agences et d’organismes de l’ONU, par l’entremise, entre autres, de l’octroi de 147 000 000 $ en contributions générales. Les principaux programmes et agences bénéficiant de l’aide canadienne sont présentés au Tableau 0.4.
TABLEAU 0.4. Principaux décaissements du Canada à travers les Nations Unies, 2004-2005
Détails du programme | Montant estimé de la contribution canadienne | |
UNICEF | Le Programme des Nations Unies pour l’aide à l’enfance appuie principalement les activités visant à améliorer le sort des enfants, particulièrement en termes de besoins humains fondamentaux tels que l’accès à l’eau, l’assainissement et le respect des droits de la personne. | 226 000 000 $ |
Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme | Ce fonds regroupe des activités de prévention, de recherche, de traitement et d’aide aux victimes atteintes du VIH/sida, de tuberculose et du paludisme. | 173 000 000 $ |
PNUD | Le Programme des Nations Unies pour le développement joue plusieurs rôles, incluant le financement de projets d’aide humanitaire et de développement, ainsi que la coordination et la préparation d’analyses politiques. | 115 000 000 $ |
40Ces estimations budgétaires sont tirées du budget de l’ACDI 2004-2005 (ACDI, 2006b) et ne tiennent compte que des contributions volontaires canadiennes. Elles excluent les contributions directement octroyées par les bureaux de la coopération canadienne sur le terrain ou les bureaux des agences onusiennes dans les pays bénéficiaires.
41L’aide humanitaire d’urgence est également gérée par le programme multilatéral. Le Programme d’aide humanitaire internationale (PAHI) de l’ACDI est en forte croissance, quoiqu’il ne représente encore que 7 % du budget de l’APD. Il se chiffre à 207 000 000 $ et implique une présence dans 54 pays bénéficiaires (2004-2005)42.
Autres ministères jouant un rôle dans l’aide canadienne
Le ministère des Finances
42D’autres ministères et agences gouvernementales ont un rôle à jouer en lien avec l’APD canadienne. De son côté, le ministère des Finances canadien administre les dettes de pays étrangers encourues au fil des ans envers le Canada. En 2005-2006, il a pardonné un total de 272 000 000 $ de dettes. Il demeurait toutefois le créancier de 27 pays, dont les plus importants sont le Pakistan (447 000 000 $), l’Indonésie (205 000 000 $) et le Sri Lanka (97 000 000 $), totalisant plus de 957 000 000 $ de dettes dues au Canada (ACDI, 2006b).
43Depuis le milieu des années 1990, les pays membres du G-7 ont mis l’accent sur la réduction de la dette des pays du Sud comme activité importante de l’aide internationale. Ceux-ci ont lancé en 1997 une initiative pour éradiquer la dette des pays pauvres très endettés. Cette initiative a été reconduite en 1999. Le Canada, à titre de membre du G-7 a emboîté le pas. En 2000, le Canada, par l’entremise de son ministère des Finances, s’est démarqué en demandant l’élimination des dettes bilatérales de sept pays pauvres très endettés (PPTE)43, soit l’Éthiopie, le Bénin, la Bolivie, le Ghana, la Guyane, le Sénégal et la Tanzanie44. De plus, le Canada a mis fin aux remboursements de la dette du Cameroun, de la République démocra tique du Congo (RDC), de Madagascar, du Rwanda et de la Zambie. D’autres initiatives ont été moins bien acceptées, telle que l’exonération de la dette de l’Irak. Le montant de ce pardon se chiffrait à près de 600 000 000 $ et équivalait, selon les critiques, à la valeur totale des allègements bilatéraux qui auraient pu être concédés à 14 PPTE (CCCI, 2005b).
Le ministère de la Défense
44Récemment, certaines activités liées à la sécurité ont été intégrées au budget de l’APD canadienne en fonction de critères développés par le CAD de l’OCDE45. Les activités de nature sécuritaire tombant sous la bannière de l’APD se rapportent à des situations telles que les opérations de maintien de la paix, la prévention et le règlement des conflits, ou encore la réhabilitation des enfants soldats. Dans de telles situations, il devient alors difficile de séparer l’action humanitaire de l’action sécuritaire46. Les missions comme celle qui est menée en Afghanistan, où les forces armées sont appelées à mettent en œuvre des activités humanitaires en plus de leur action militaire, constituent une autre zone grise de l’aide internationale. Ce type de situation semble d’ailleurs devenir de plus en plus commun. Le Canada envisage d’ailleurs d’autres initiatives de ce type, en Haïti ou au Soudan, par exemple (Simpson et Tomlinson, 2006).
Quand les intérêts dépassent les promesses
45La crédibilité d’un pays dans ses relations d’aide internationale dépend essentiellement du respect de ses engagements envers ses partenaires. Toutefois, les promesses canadiennes ne semblent pas toujours se concrétiser. À plusieurs reprises, le Canada a fait des promesses d’aide qui n’ont pas été tenues. L’un des meilleurs exemples est celui de l’aide à l’Amérique centrale après le passage de l’ouragan Mitch en 1999. Le Canada avait alors annoncé plus de 250 000 000 $ pour la reconstruction des pays dévastés. L’annonce ministérielle faite à l’époque se lisait ainsi : « Le Canada a pris l’engagement de consacrer 260 000 000 $ dans les quatre prochaines années à aider les populations d’Amérique centrale à reconstruire leurs pays »47. L’ACDI avait même incité les organisations canadiennes à se rendre sur place afin d’aider la livraison de l’aide. Six ans plus tard, le budget 2004-2005 de l’ACDI indiquait toutefois que, de cette somme, seulement 111 000 000 $ avaient été versés à l’Amérique centrale. De plus, peu de temps après, les investissements au Honduras, faits quelques mois après l’annonce de fonds de reconstruction pour l’Amérique centrale, ont été réduits pour apporter de l’aide aux victimes du conflit au Kosovo. Tant l’intérêt des médias que celui des politiciens s’était, en effet, porté vers l’Europe de l’Est, l’objet d’annonces de transferts de fonds tout aussi alléchants que ne l’avaient été ceux promis aux victimes de Mitch.
46Le cas d’Haïti peut servir d’exemple plus récent : après les nombreuses crises et catastrophes qui ont frappé ce pays en 2005, le gouvernement canadien lui a promis un généreux programme d’aide. Le Canada devait allouer plus de 180 000 000 $ sur deux ans pour soutenir les efforts de reconstruction et de développement en Haïti. Si le Canada a bel et bien mis de l’avant des fonds pour Haïti, c’est toutefois en allant les récupérer auprès des programmes d’aide pour la Bolivie et le Honduras.
47Dans certains cas, des programmes d’aide bilatérale et multilatérale déjà en cours au sein du pays touché sont récupérés et reconduits vers une urgence. Le Canada, tout comme plusieurs autres pays donateurs, a d’ailleurs déjà annoncé de nouvelles sommes lors d’urgences en incluant dans les sommes annoncées les fonds déjà alloués au pays dans le cadre de programmes réguliers. Les nouvelles sommes réellement canalisées sur le terrain ne constituaient donc par conséquent qu’une maigre part de la somme totale annoncée.
48Il n’existe malheureusement aucun mécanisme de contrôle et de suivi pour mesurer la réalisation des « promesses » d’aide, particulièrement dans le cadre de crises humanitaires. Les annonces sont alors souvent faites « à vif » et se traduisent alors par une récupération et recanalisation de fonds existants. Cette pratique de la part du gouvernement canadien s’explique certainement par le phénomène de surenchère pour répondre aux engagements des autres pays donateurs et préserver certains acquis sur l’échiquier de l’aide internationale. Cette surenchère de l’aide internationale force le gouvernement canadien à exagérer ses promesses, voire à promettre au-delà de ses capacités, ce qui engendre inévitablement de faux espoirs. Ainsi, ces promesses démesurées ne peuvent avoir que des effets néfastes sur l’image que le Canada veut donner de lui-même sur le plan international.
49L’analyse de l’aide canadienne au développement des dernières décennies présente un tableau extrêmement diversifié, où l’on constate quelques échecs, mais également, quelques succès. Le défi à venir pour le Canada est qu’il puisse préserver des acquis, tout en tentant de moderniser ses approches, et ce, malgré qu’il soit prisonnier de ses propres intérêts. Chose certaine, l’aide canadienne n’est pas statique et démontre une forme de dynamisme qui s’active au fil des nouvelles dimensions et enjeux de l’agenda de l’aide internationale, des intérêts changeants du Canada lui-même, mais aussi au gré des catastrophes humanitaires qui frappent des millions de personnes annuellement. Ce sont ces défis et enjeux qui seront analysés dans les chapitres à venir.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Agence canadienne de développement international, ACDI (2002), Énoncé de politique en faveur d’une aide internationale plus efficace, <http://www.acdi-cida.gc.ca/aide-efficace>.
Agence canadienne de développement international, ACDI (2005a), Énoncé de politique internationale du Canada en matière de développement, <http://www.acdicida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/IPS_PDF_FR/$file/IPS-FR.pdf>.
Agence canadienne de développement international, ACDI (2005b), Rapport statistique sur l’aide publique au développement, Année financière 2003-2004, <http://www.acdicida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/stats/$file/RappStat_03-04.pdf>.
Agence canadienne de développement international, ACDI (2006a), Rapport statistique sur l’aide publique au développement, Année financière 2004-2005, <http://www.acdi-cida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/stats/$file/RappStat04-05.pdf>.
Agence canadienne de développement international, ACDI (2006b), Rapport ministériel sur le rendement pour la période se terminant le 31 mars 2006, <http://www.acdi-cida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/Publications3/$file/web-cidaacdi_f.pdf>.
Agence canadienne de développement international, ACDI (2008), Rapport statistique sur l’aide publique au développement, Année financière 2005-2006, <http://www.acdi-cida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/Publications/$file/Rapport-Statistique-Fran%C3%A7ais_%202008-04-29_SM.pdf>.
Association québécoise des organismes de coopération internationale, AQOCI (2006), La coopération internationale depuis 1985 : tendances et perspectives, Montréal, février 2006.
Bátora, Jozef (2005), Public Diplomacy in Small and Medium-Sized States: Norway and Canada, Discussion Papers in Diplomacy, Netherland Institute of International Relations.
10.1016/0014-2921(95)00127-1 :Boone, Peter (1996), «Politics and the Effectiveness of Foreign Aid», European Economic Review, no 40: 289-329.
Boulanger, Suzie (2003), La réforme de la politique d’aide canadienne de 1995 : implications pour les organisations de coopération internationale, mémoire présenté comme exigence partielle de la maîtrise en science politique, Université du Québec à Montréal.
Burnside, Craig et David Dollar (1997), Aid Policy and Growth, Policy Research Working Paper 1977, juin 1997, World Bank, Development Research Group ; également publié dans American Economic Review, vol, 90, no 4 : 847-867.
Comité permanent du Sénat sur les Affaires étrangères et le Commerce international (2007), Overcoming 40 Years of Failure : A New Road Map for Sub-Saharan Africa, <www.senate-senat.ca/foraffetrang.asp>.
Conseil canadien de la coopération internationale, CCCI (2004), Réflexions sur la mise en œuvre des stratégies pour une aide efficace de l’ACDI dans les neuf pays de concentration, <http://www.ccic.ca/f/docs/002_aid_cida_nine_countries_summary.pdf>.
Conseil canadien de la coopération internationale, CCCI (2005a), Le Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction (GTSR) et le Fonds pour la paix et la sécurité dans le monde (FPSM), note d’information du CCCI, novembre 2005, <http://www.ccic.ca/f/docs/002_human_2005-11_gpsf_start_briefing_note.pdf>.
Conseil canadien de la coopération internationale, CCCI (2005b), Budget des dépenses de l’ACDI 2005-2006, Partie III : Rapport sur les plans et les priorités, <http://www.ccic.ca/f/docs/002_aid_2005-06_cida_estimates.pdf>.
10.1007/978-1-349-25902-1 :Cooper, Andrew F. (dir.) (1996), Niche Diplomacy: Middle Powers After the Cold War, Londres, MacMillan.
Cooper, Andrew F., Richard A. Higgott et Kim Richard Nossal (dirs.) (1993), Relocating Middle Powers : Australia and Canada in a Changing World Order, Vancouver, University of British Columbia Press.
Curtis, John M. (2005), Le multilatéralisme : communauté de clubs ou activisme entrepreneurial ? Les choix possibles dans une période de changements, Ottawa, Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international Canada, <http://www.international.gc.ca/eet/research/TPR-2005/TPR-2005-FR_Chapitre_11_-_Curtis_-_club_scene.pdf>.
10.1002/jid.1582 :Doucouliagos, Hristos et Martin Paldam (2006a), Conditional Aid Effectiveness : A Meta Study, Working paper, Aarhus University.
10.1016/j.ejpoleco.2007.06.002 :Doucouliagos, Hristos et Martin Paldam (2006b), Aid Effectiveness on Growth : A Meta Study, Working paper, Aarhus University.
10.1111/j.1467-6435.2006.00326.x :Doucouliagos, Hristos et Martin Paldam (2006c), « Aid Effectiveness on Accumulation : A Meta Study », Kyklos, vol. 59, no 2 : 227-254.
10.1257/089533003769204344 :Easterly, William (2003), «Can Foreign Aid Buy Growth?», Journal of Economic Perspectives, vol. 17, no 3: 23-48.
Goyette, Gabriel C. (2008), Le déliement de l’aide au développement canadienne. Les Cahiers de la Chaire C. A. Poissant, coll. « Recherche » no 2008-01.
Holloway, Steven Kendall (2006), Canadian Foreign Policy: Defining the National Interest, Peterborough, Broadview.
Keating, Tom (2001), Canada and World Order: The Multilateralist Tradition in Canadian Foreign Policy, Londres, Oxford University Press.
10.1177/002070209505000409 :Keenes, Ernie (1995), «The Myth of Multilateralism: Exception, Exemption, and Bilateralism in Canadian International Economic Relations», International Journal, vol. 50, automne: 755-778.
Kegley, Charles W. Jr. (2007), World Politics : Trends and Transformation, 11e édition, Belmont, Thomson Wadsworth.
10.1162/016228803322427983 :Lischer, Sarah Kenyon (2003), «Collateral Damage: Humanitarian Assistance as a Cause of Conflict», International Security, vol. 28, no 1: 79-109.
Mabilais, Régis (2004), Reality of Aid 2004, APD et sécurité, <http://www.coordinationsud.org/IMG/_article_PDF/article_650.pdf>.
Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, MAECI (2005), Énoncé de politique internationale du Canada, Diplomatie, <http://dsp-psd.pwgsc.gc.ca/Collection/FR4-4-2005F.pdf>.
10.1080/02255189.2007.9669206 :Mouelhi, Mia et Arne Rückert (2007), « Ownership and Participation : The Limitations of Poverty Reduction Strategy Paper Approach, » Revue canadienne d’études du développement, vol. 28, no 2 : 71-284.
Nestmann, Thorsten et Beatrice Weder (2002), The Effectiveness of International Aid and Debt Relief : A Selective Review of Literature, Allemagne.
Organisation de coopération et de développement économiques, OCDE (2005), Directives pour l’établissement des rapports statistiques au CAR, Direction de la coopération pour le développement, Comité d’aide au développement, DCD/DAC (2000) 10/ADD1/REV1, 3 mai 2005, <http://www.oecd.org/dataoecd/14/26/31742493.pdf>.
Pistor, Marcus (2005), Les 25 partenaires de l’Agence canadienne de développement international pour le développement, Ottawa, Bibliothèque du Parlement, Division des affaires politiques et sociales, PRB 05-04F, <http://dsp-psd.pwgsc.gc.ca/Collection-R/LoPBdP/PRB-f/PRB0504-f.pdf>.
10.1515/9780773564695 :Pratt, Cranford (dir.) (1996), Canadian International Development Assistance Policies: An Appraisal, Montréal/Kingston, McGill-Queen’s University Press.
Smillie, Ian (2004), ODA : Options and Challenges for Canada, Conseil canadien de la coopération internationale, CCCI, <http://www.ccic.ca/f/docs/002_policy_2004-03_oda_options_smillie_report.pdf>.
Simpson, Erin et Brian Tomlinson (2006), Canada : quelqu’un est à l’écoute ?, Conseil canadien pour la coopération internationale, CCCI, <http://www.ccic.ca/f/docs/002_aid_2006_roa_canada_chapter.pdf>.
Tomlinson, Brian (2005), «Aid Flows, MDGs and Poverty Eradication: More and Better Canadian Aid», Canadian Development Report 2005, Ottawa, Institut Nord-Sud.
10.1002/jid.820 :White, Howard (2001), « Will the New Aid Agenda Help Promote Poverty Reduction? », Journal of International Development, vol. 13, no 7, octobre : 1057-1070.
Notes de bas de page
1 Pour un historique de l’aide canadienne depuis 1985, voir AQOCI 2006 : <http://www.aqoci.qc.ca/ressources/pdf/HistoireCoopCanandienne.pdf>, page consultée le 31 mai 2008.
2 L’un des changements importants de la période a été d’intégrer, pour la première fois, l’aide internationale à l’énoncé de politique étrangère de 1995, Le Canada dans le monde.
3 Banque mondiale, World Development Indicators 2005, <http://devdata.worldbank.org/wdi2005/Section2.htm>, page consultée le 31 mai 2008.
4 Tiré des statistiques sur la sécurité alimentaire de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, <http://www.fao.org/faostat/foodsecurity/MDG/MDG-Goal1_en.pdf>, page consultée le 31 mai 2008.
5 Certains auteurs poussent l’idée des « dangers de l’aide » plus loin et soulèvent l’existence d’un lien entre l’octroi d’aide et l’émergence ou du moins la poursuite de conflits armés. Voir par exemple Lischer (2003).
6 Initiés par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, les programmes d’ajustements structurels ont été lancés dans les années 1980 et largement implantés au cours des années 1990. Ils avaient comme objectifs de contribuer au développement des pays les plus pauvres et à la réduction des inégalités internationales par la libéralisation du commerce et la réduction de la taille de l’État. Pour plus d’informations, voir le site du FMI : <http://www.imf.org/external/np/exr/facts/fre/esaff.htm>.
7 En relations internationales, un État pratique le multilatéralisme lorsqu’il agit sur la scène internationale – que ce soit pour réaliser ses intérêts et ses objectifs ou encore pour résoudre des problèmes mondiaux – par l’entremise d’une coopération institutionnalisée avec d’autres États. Le contraire du multilatéralisme est l’unilatéralisme. L’unilatéralisme est la politique selon laquelle un État agit seul, sans consulter d’autres États (Kegley, 2007). Selon bon nombre d’auteurs, une participation active de la part du Canada aux forums multilatéraux est bénéfique pour le pays. Selon Curtis, par exemple, le Canada est l’un des pays les plus ouverts parmi les pays industrialisés sur le plan économique. Un système multilatéral fonctionnel et des institutions financières efficaces sont donc tout à son avantage (Curtis, 2005 : 236). Les avantages d’une approche multilatérale pour les puissances moyennes, comme le Canada, ont d’ailleurs été l’objet de plusieurs ouvrages au cours des années 1990. Voir, par exemple, Cooper, 1997, et Cooper, Higgott et Nossal, 1993.
8 Bien que le Canada ait établi beaucoup de liens multilatéraux, une bonne part de sa politique internationale s’articule autour de relations bilatérales avec des partenaires privilégiés. Il arrive même que le Canada agisse de manière unilatérale sur la scène internationale. Ses démarches récentes quant à la défense de sa souveraineté dans l’Arctique en sont un exemple.
9 Cette dispersion transparaît encore fortement dans le nombre de maîtres d’œuvre de l’aide canadienne : on compte plus de 750 organisations canadiennes (ONG et institutions universitaires), des centaines d’entreprises privées et plusieurs dizaines d’agences onusiennes dans 161 pays se chargeant de l’octroi de l’aide au développement du Canada (ACDI, 2006b).
10 Voir l’évaluation par les pairs du Canada fait par le CAD en 2002. CAD, OCDE, en ligne : <http://www.oecd.org/document/61/0,3343,en_2649_33721_2409533_1_1_1_1,00.html>, page consultée le 30 novembre 2007.
11 Voir la Déclaration de Paris : <http://www.oecd.org/document/18/0,2340,en_2649_3236398_35401554_1_1_1_1,00.html>, page consultée le 18 juin 2008.
12 Le CAD définit l’APD comme étant les sommes qui sont transférées « aux pays en développement et aux regroupements multilatéraux par des organismes publics (gouvernementaux) qui répondent aux critères suivants : a) elles sont administrées dans le but principal de promouvoir le développement économique et le bien-être des pays en développement ; b) elles sont consenties à des conditions de faveur et conservent un caractère de subvention d’au moins 25 % » (OCDE, Rapport sur la coopération pour le développement de 2005 : 2).
13 Voir le document de l’ACDI en ligne : <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/JER-324115437-MU7>, page consultée le 18 juin 2008.
14 En 2004-2005, parmi les 30 principaux bénéficiaires de l’aide canadienne, on retrouvait cinq pays, dont la Pologne et la Chine, qui recevaient 9,4 % de l’ADP totale et qui ne sont pas sur la liste des pays prioritaires.
15 Il est à noter que pour 2005-2006, en tenant compte du pardon de la dette irakienne, l’Irak arrivait en tête des récipiendaires de l’aide canadienne, avec plus de 465 millions de dollars. Voir le Rapport statistique sur l’aide publique au développement – Année financière 2005-2006 de l’ACDI disponible en ligne à : <http://www.acdi-cida.gc.ca/INET/IMAGES.NSF/vLUImages/Publications/$file/Rapport-Statistique-Fran%C3%A7ais_%202008-04-29_SM.pdf>, page consultée le 30 mai 2008.
16 Un rapport récent du Comité permanent du Sénat sur les Affaires étrangères et le Commerce international qui traite de l’inefficacité de l’aide canadienne évoque lui aussi ce risque de la canalisation de fonds en trop grande quantité, sans toutefois présenter des solutions de rechange valables (Comité permanent du Sénat sur les Affaires étrangères et le Commerce international, 2007).
17 Un autre problème de l’aide humanitaire est la possibilité de voir son octroi (ou non-octroi) être lié à des questions économiques, politiques ou de sécurité, et cela, malgré la norme d’impartialité qui guide généralement l’action humanitaire.
18 L’aide est dite décentralisée lorsque l’ACDI permet à ses bureaux sur le terrain de choisir avec une certaine autonomie ses partenaires et ses canaux de décaissement, à savoir le bilatéral ou le multilatéral.
19 L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) indique qu’un SWAp se caractérise par une coopération « (i) dont la majeure partie des fonds publics alloués au secteur vont au soutien d’une politique sectorielle unique ; (ii) qui est pilotée par le gouvernement ; (iii) dans le cadre de laquelle des approches communes sont adoptées dans l’ensemble du secteur par tous les donateurs ; (iv) qui favorise une progression vers le contrôle gouvernemental de l’octroi et de la gestion de l’ensemble des fonds publics » (traduction libre), <http://portal.unesco.org/education/fr/ev.php-URL_ID=10319&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html>, page consultée le 31 mai 2008.
20 Voir le site du FMI, <http://www.imf.org/external/np/exr/facts/fre/prspf.htm>, page consultée le 31 mai 2008. À ce sujet, voir également le site de la Banque mondiale, <http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/TOPICS/EXTPOVERTY/EXTPRS/0,,menuPK:384207~pagePK:149018~piPK:149093~theSitePK:384201,00.html>, page consultée le 31 mai 2008.
21 <http://www.imf.org/external/np/exr/facts/fre/prspf.htm>.
22 Pour une liste récente des pays ayant développé un DSRP, voir le site de la Banque mondiale : <http://siteresources.worldbank.org/INTPRS1/Resources/boardlist.pdf>, page consultée le 31 mai 2008.
23 La gestion de multiples contrats avec des partenaires canadiens augmente le nombre de fonctionnaires-gestionnaires par contrat.
24 Dans le cadre de son Énoncé de politique en faveur d’une aide internationale efficace, l’ACDI soutenait les DSRP en ces termes : « Le plan de l’ACDI en faveur d’une aide internationale plus efficace est fermement ancré dans la nouvelle vision de la coopération au développement qui s’est instaurée au cours de la dernière décennie. L’ACDI gère des programmes dans un grand nombre de pays qui participent maintenant au processus des DSRP, et elle axe de plus en plus sa programmation sur les priorités établies par les gouvernements dans leurs DSRP » (ACDI, 2002).
25 Le cas du programme Promesas au Honduras est un bon exemple. Voir, entre autres, le chapitre portant sur l’Amérique latine pour plus de détails.
26 Ce chiffre inclut les fonds du Centre de recherches pour le développement international (CRDI), soit 107 000 000 $ en 2005-2006.
27 Voir, entre autres, Parlement du Canada, 2007, <http://www.parl.gc.ca/information/library/PRBpubs/prb0710-f.htm>, page consultée le 18 juin 2008.
28 Dans le cadre du Plan d’action du G8 pour l’Afrique et lors du Sommet du G8 à Kananaskis, le Canada a participé à l’instauration du NEPAD, qui permettra de soutenir le développement de l’Afrique, notamment par l’entremise du secteur privé. Pour plus de détails, voir le chapitre de Stephen Brown dans ce volume.
29 Les chiffres du CCCI diffèrent de ceux fournis par l’ACDI même, en raison de l’emploi d’une méthode de comptabilisation différente.
30 En utilisant les méthodes actuelles de calcul de l’aide publique, le montant total pardonné de la dette compte comme APD pour l’année de son annulation, sans tenir compte de l’échéancier de remboursement. Ce modèle de calcul implique que les montants finaux de l’aide font un bond pour l’année de l’annonce, malgré le fait que la grande majorité de la dette ne sera remboursée que plus tard (Tomlinson, 2005).
31 Les principales institutions financières sont la Banque mondiale, le FMI, et les banques régionales, telles que la Banque interaméricaine pour le développement.
32 Si bon nombre d’augmentations sont à noter, certaines réductions importantes ont également été effectuées. À titre d’exemple, le budget de l’ACDI pour le Programme du partenariat canadien qui vise à appuyer les organisations non gouvernementales canadiennes est réduit de 2 2 000 000 $ par rapport au budget de 2004-2005 (CCCI, 2005b). Par ailleurs, il est à noter que le nouvel intérêt du Canada envers l’Amérique latine ne transparaissait pas encore dans ces chiffres, puisque annoncé en 2007.
33 Voir, entre autres, le site du MAECI : <http://geo.international.gc.ca/cip-pic/ips/ips-diplomacy6-fr.aspxm>, page consultée le 18 juin 2008.
34 L’approche 3D a été développée pour permettre une intervention gouvernementale intégrée. Voir le chapitre d’Eric Marclay pour plus de détails.
35 À ce sujet, voir le site de l’OCDE :<http://www.oecd.org/dataoecd/52/40/38120688.pdf>.
36 Pour en savoir plus sur le GTSR, voir le site du groupe : <http://www.international.gc.ca/fac/START-GTSR/start-structure-gtsr.aspx?lang=fr&menu_id=48&menu=>.
37 On considère que l’aide bilatérale canadienne est encore très liée, c’est-à-dire qu’elle est octroyée presque essentiellement à des organisations et entreprises canadiennes. Avant que la nouvelle politique sur l’aide liée et déliée ne soit approuvée en 2002, la majorité de l’APD fournie par l’ACDI était conditionnelle à l’achat au Canada de biens et services dont le contenu devait être majoritairement canadien. L’ancienne politique de 1987 prévoyait un taux de déliement de l’APD de seulement 33 %. Le déliement de l’aide visait essentiellement à permettre l’approvisionnement en biens et services dans les pays bénéficiaires pour encourager l’économie locale. Même si l’approvisionnement dans d’autres pays industrialisés était permis, le déliement ne devait pas excéder 10 % et n’était utilisé que s’il était impossible de se procurer les biens ou services sur le marché local ou canadien. Cependant, malgré la tendance observée du déliement de l’aide, un ralentissement de cette tendance a été observé depuis 2003. Pour en savoir plus sur le sujet du déliement de l’aide canadienne, voir Goyette, 2008.
38 Tiré du site de l’ACDI : <http://www.acdi-cida.gc.ca/CIDAWEB/acdicida.nsf/Fr/JUD-11291243-N24>, page consultée le 2 juin 2008.
39 Voir le chapitre de Dominique Caouette. Notons que plusieurs professionnels, fonctionnaires et spécialistes de l’aide canadienne sont issus de ces programmes volontaires. Parmi les autres bénéfices de ce programme, notons également que cet appui aux ONG leur permet d’avoir un poids plus important dans l’orientation de la politique internationale canadienne.
40 <http://www.equiterre.org/>, page consultée le 11 juin 2007.
41 En anglais Making market works for the poor. Voir, entre autres, le document en ligne de CARE Canada à ce sujet : <http://care.ca/userfiles/SoumissionalaCommissionUNDPDec2003.pdfm>, page consultée le 18 juin 2008.
42 Pour plus de détails, voir le chapitre d’Yvan Conoir dans ce volume.
43 Le FMI et la Banque mondiale ont engagé avec une quarantaine de pays l’initiative PPTE en 1996 afin de s’assurer qu’aucun pays ne doive faire face à un endettement excessif. Voir, entre autres : <http://www.fin.gc.ca/news00/data/00-095_1f.html>, page consultée le 18 mai 2007.
44 Le ministère des Finances canadien procède au pardon d’une dette à travers les grandes banques et le FMI.
45 Pour plus de détails, voir le chapitre d’Eric Marclay.
46 Par exemple, dans les activités de construction de la paix, l’aide est comptabilisée à condition que les destinataires des fonds ne soient ni membres du personnel militaire ni fonctionnaires d’un ministère de la Défense. Toutefois, l’aide consentie peut être utilisée indirectement par des organisations de la société civile pour financer la participation du personnel du ministère de la Défense (OCDE, 2005). Cette dernière situation se complique davantage pour les opérations d’unité militaire à caractère humanitaire du genre DART, une unité militaire canadienne conçue pour être déployée rapidement à travers le monde, dans le cadre de crises allant de catastrophes naturelles aux urgences humanitaires complexes. Voir les détails en ligne : <http://www.forces.gc.ca/site/Newsroom/view_news_f.asp?id=301>, ou le chapitre d’Yvan Conoir dans cet ouvrage.
47 L’annonce de l’ACDI de 1999 concernant le Honduras n’est plus disponible en ligne.
Auteurs
Chef de la délégation régionale de l’océan Indien pour la Croix-Rouge canadienne. Auparavant, il a travaillé comme directeur régional des programmes pour CARE Canada. Il a participé à plus d’une centaine de missions humanitaires et d’appui technique, dont en Colombie, à Haïti, et dans la région du Darfour. Titulaire d’une maîtrise en sciences de l’environnement, il complète actuellement son doctorat en science politique à l’UQAM, dans le cadre duquel il étudie les enjeux de l’aide humanitaire et la coopération internationale canadienne. Il a travaillé plusieurs années en Amérique latine et en Asie du Sud-Est pour le compte du Centre canadien d’étude et de coopération internationale (CECI) en tant que chef des projets d’aide humanitaire et d’urgence. Ses intérêts de recherche portent particulièrement sur les enjeux de l’efficacité de l’aide, sur la sécurité humaine et les interventions humanitaires complexes.
Professeure adjointe à l’École de développement international et mondialisation de l’Université d’Ottawa. Elle est spécialiste des questions de sécurité des pays en voie de développement. Plus particulièrement, elle étudie les crises politiques et conflits civils, les enjeux identitaires, les relations entre l’État et la société, ainsi que la fragilité étatique. Ses publications incluent : « Demos and Ethnos : Dangerous Democratisation in Pre-Genocide Rwanda », Central European Journal of International and Security Studies (vol. 1, no 1, 2007) et « Quand justice et réconciliation ne font qu’un : les juridictions Gacaca au Rwanda », dans Yvan Conoir et Gérard Verna, Faire la paix : concepts et pratiques de la consolidation de la paix (Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2005). Elle détient un doctorat de l’Université de Toronto et une maîtrise de l’Université York.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
L'éducation aux médias à l'ère numérique
Entre fondations et renouvellement
Anne-Sophie Letellier et Normand Landry (dir.)
2016
L'intégration des services en santé
Une approche populationnelle
Lucie Bonin, Louise Belzile et Yves Couturier
2016
Les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé
Jean-Christophe Bélisle Pipon, Béatrice Godard et Jocelyne Saint-Arnaud (dir.)
2016
La détention avant jugement au Canada
Une pratique controversée
Fernanda Prates et Marion Vacheret (dir.)
2015
La Réussite éducative des élèves issus de l'immigration
Dix ans de recherche et d'intervention au Québec
Marie McAndrew (dir.)
2015
Agriculture et paysage
Aménager autrement les territoires ruraux
Gérald Domon et Julie Ruiz (dir.)
2014