1. Les revues : champs, acteurs et pratiques
p. 21-50
Texte intégral
1Le système de communication scientifique et, en particulier, le rôle que les revues savantes y jouent, connaissent une période de bouleversement. De ce constat, plusieurs souligneront l’urgence de la situation.
2La question peut être abordée sous l’angle de la pertinence de ce mode de communication scientifique, en mettant en cause la revue comme vecteur particulier de diffusion des résultats de recherche. Avant d’accepter cette conclusion, il faudrait dresser un bilan qui exigerait beaucoup de nuances. À ce jour, le mode d’existence et le format des revues se renouvellent, mais leur place tend à se confirmer dans le processus de validation et de transmission des résultats de la recherche1. En même temps, l’univers de la communication scientifique change radicalement, ce qui impose à chacune de ses composantes une mise en situation et des interactions nouvelles.
3L’acuité du problème posé par les revues passe aussi, sous une forme exacerbée, par la spirale inflationniste des prix des abonnements des revues, qui met en difficulté les institutions universitaires et de recherche. Avec des ressources qui stagnent, ces dernières font face à une vertigineuse croissance des prix, bien au-delà de l’inflation et de l’évolution des paramètres qui caractérisent les revues. Ce cercle vicieux est bien étudié et on peut en observer les effets2.
4Il faut aller plus loin que ce simple constat, car, pour comprendre le milieu des revues, les imageries simplificatrices ne sont pas de grande utilité. En effet, la notion de revue est une notion imprécise car, par ce vocable, on désigne des réalités qui se distinguent significativement selon les communautés scientifiques. De même, pour tenir compte des conditions de diffusion et de commercialisation des revues, il est utile de caractériser les structures sociales et économiques dans lesquelles s’inscrivent les revues. Ce n’est que de cette façon que l’on peut aborder certaines manifestations comme la variation dans les augmentations de prix pratiquées selon les types d’éditeurs, le contraste frappant dans le taux de croissance des prix selon les secteurs de la connaissance, ou le fait que les tarifs d’abonnement les plus élevés connaissent une croissance des prix nettement plus forte3. Au-delà de ces exemples, il est clair que des distinctions s’imposent, à la fois pour saisir les tenants et aboutissants de ce milieu et pour inspirer une action conséquente.
UN MONDE FORTEMENT STRUCTURÉ
5Le monde des revues savantes est fortement structuré, et cela au moins de deux points de vue. D’abord, les réseaux de communication scientifique sont institutionnalisés et épousent une hiérarchie selon laquelle, un ordre de préséance et de statuts est établi entre les revues, ce qui leur confère, à des degrés différents, une validité, une légitimité, un rayonnement et un impact. Cette structuration des réseaux de communication n’est pas homogène selon les secteurs. Dans les sciences humaines et sociales, là où les paradigmes, souvent en concurrence, ne sont pas solidement établis, cette structuration est plus poreuse alors qu’à l’inverse, dans les secteurs des sciences, des techniques et de la médecine, cette structuration est beaucoup plus dense et impérative. Cela permet sans doute de comprendre pourquoi, dans ces derniers secteurs plus particulièrement, les grandes revues qui font autorité (qualité de la recherche, reconnaissance institutionnelle, rayonnement) s’imposent en dépit d’autres considérations.
6Ensuite, l’univers structuré et structurant, c’est celui de l’organisation économique et corporative qui supporte l’édition universitaire. De grands oligopoles jouent un rôle dominant dans la production et la diffusion des revues, particulièrement dans les secteurs où la hiérarchisation des réseaux de la communication scientifique est la plus compacte. Selon certaines estimations, les éditeurs commerciaux contrôlent 40 % des 6 771 revues scientifiques aux États-Unis, mais jouissent d’un poids nettement plus considérable, si on tient compte des ventes. Les sociétés savantes produisent le quart des revues alors que les presses universitaires et les organismes de recherche (publics ou privés) publient les 35 % qui restent (on verra plus loin la répartition des revues dominantes dans huit disciplines)4. Or, les prix pratiqués par les grands oligopoles leur permettent de faire des affaires très lucratives, au point où les publications universitaires constituent l’un des segments les plus profitables de l’ensemble de leurs opérations. Dans le domaine, la plus grande concentration des activités par fusions d’entreprises a été accompagnée de hausses substantielles des prix des abonnements5. La mesure des prix administrés peut être révélée par l’étude de Wyly6 qui prend l’année 1997 comme référence. Il établit que si Reed Elsevier, Wolters Kluwer et Plenum Publishing s’étaient limités à pratiquer une marge nette de profit sur les ventes, comparable à la médiane dans la branche de la publication des périodiques, dans le seul domaine des publications universitaires, les clients auraient épargné quelque 240 millions de dollars américains.
7Les deux niveaux de structuration ont des effets cumulatifs permettant à certaines grandes compagnies de toucher une rente de situation particulièrement importante, ce qui exacerbe la crise financière des bibliothèques et fragilise les modes actuels de communication scientifique. Par ailleurs, si certaines sociétés savantes éditrices sont aussi en mesure de toucher une rente de situation pour leurs propres revues et d’en tirer des bénéfices pour leur vie organisationnelle, on comprendra que généralement les organismes sans but lucratif, qui oeuvrent dans le domaine de l’édition universitaire, n’en tirent pas profit et ont une politique de recouvrement des coûts avec, dans le meilleur des cas, une faible marge excédentaire7.
8Les gisements de richesse et les marges bénéficiaires confortables sont bien étrangers à la plupart des acteurs autres que les grands oligopoles de l’édition universitaire et ne sauraient caractériser le secteur en général. Pour y voir plus clair, il faut situer la revue savante dans le système de communication scientifique afin d’en souligner la mission spécifique. Partant de là, il convient de cibler les attaques contre les prix administrés et de mettre en situation la discussion sur les structures de coût de l’édition savante. La cherté des abonnements tient sans aucun doute à la structure de coûts de la publication, mais surtout, pour une part appréciable, aux marges que peuvent toucher les oligopoles. La comparaison des pratiques des differents types d’éditeurs fournit une excellente indication de ce deuxième aspect. Ces considérations permettent de dépasser le niveau macroscopique, général et imprécis, donc trompeur, et de proposer une stratégie d’action partant des structures existantes.
LES REVUES ET LES MODÈLES DE COMMUNICATION SCIENTIFIQUE
9Plusieurs caractéristiques reliées au fonctionnement des chercheurs sont propres aux disciplines des sciences ou des sciences humaines et sociales8. Ces distinctions expliquent les modèles développés dans le passé de même que les nouveaux systèmes de communication émergents.
Structuration sociologique des disciplines
10Sans compter les distinctions d’ordre méthodologique, de mobilité ou d’initiation des jeunes chercheurs, l’interaction sociale et les modes de communication de la communauté en sciences et de celle en sciences humaines et sociales justifient l’existence de systèmes distincts de diffusion des résultats de la recherche.
11Les collèges invisibles en sciences ont une importance cruciale dans l’échange continuel d’informations, de prépublications et de rapports de recherche. Le haut ratio « problème-chercheurs » crée une grande compétition. La demande (et l’offre) de rapports fréquents sur les progrès est forte, nécessitant des voies rapides (et larges) de communication, que ce soit par la voie des conférences (plus nombreuses et plus courues qu’en sciences sociales), des prépublications ou des revues. Ces dernières ont de plus courtes durées d’arbitrage des articles, et l’on retrouve quelques hebdomadaires au nombre des revues scientifiques qui sont souvent parmi les plus citées, dont Science9 et Nature10. Toutefois, l’échange de prépublications est le mode de communication privilégié et les visites entre collègues sont très fréquentes et permettent d’obtenir les réactions immédiates et l’échange de détails qu’on ne publie pas.
12La langue des sciences est également un facteur différenciateur. Hacking11 fait la démonstration de l’inaccessibilité de certains textes scientifiques en citant un extrait d’un article en neurophysique : « If postsynaptic adrenergic neurons in neonatal rats were chemically destroyed with 6-hydroxyudopamine [...] the normal development of presynaptic ChAc activity was prevented. » La compréhension de cette phrase par un lecteur non-initié se limite à l’analyse grammaticale.
13Dès qu’on quitte le noyau dur des sciences et au fur et à mesure qu’on se déplace vers l’application et les sciences sociales, la pression des courtes périodes avant publication diminue12. La fréquentation des conférences internationales est moins grande et sert davantage à témoigner une solidarité sociale entre chercheurs d’une même discipline. Le chercheur est plutôt au courant des développements de sa discipline par la lecture des publications des collègues. Il n’est pas rare que la publication d’un article de revue prenne une année et celle d’un livre jusqu’à deux ans.
14Cet aperçu, qui trace des tendances, ne témoigne pas d’une situation immuable ; on observe le mimétisme de quelques disciplines des sciences humaines et sociales, notamment la psychologie et les sciences économiques, à l’égard du domaine des sciences, des techniques et de la médecine.
Différents modèles de communication scientifique
15Bien avant Internet, la communication scientifique se faisait selon plusieurs modèles. A fortiori, les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont multiplié les modèles d’échange d’information.
16Les chercheurs des disciplines scientifiques confirment l’importance des collèges invisibles et des communications personnelles par l’utilisation du courriel et des serveurs de prépublications. Avec les serveurs de prépublications, les collèges invisibles se voient démocratisés, ce qui change radicalement les règles de diffusion de la recherche. Ce modèle, proposé par Ginsparg13 et implanté avec un succès retentissant dans la communauté des chercheurs en physique, passe outre le rattachement des revues à une école ou un courant particulier, mais peut se faire reprocher son effet centralisateur14. Dans la même veine, d’autres serveurs de prépublications sont mis en place, y compris en sciences humaines et sociales15. La notion de prépublication peut connaître plusieurs usages. Elle peut être définie comme un document qui n’a pas été arbitré par des pairs — contrairement aux procédures suivies par les revues savantes —, mais elle est aussi présentée comme solution d’autoarchivage et de diffusion mises en place par les auteurs16 ou de Skywriting17, en référence à la libre circulation des résultats de la recherche pour toutes les personnes ayant accès au Web.
17Le Crosnier note à juste titre : « [...] dans certaines communautés, quand l’urgence de la publication prime, quand le réseau scientifique est peu étendu et bien structuré, les prépublications gardent une place centrale pour la reconnaissance »18. Cela n’empêche pas les chercheurs qui diffusent leurs textes sur ces serveurs de les acheminer, la plupart du temps, vers des revues pour une édition plus formelle et validée. Car, à part l’exemple de Los Alamos pour la communauté des chercheurs en physique, « les serveurs des autres disciplines ne contiennent qu’une minuscule portion du corpus annuel d’articles publiés »19. De plus, la création de Los Alamos n’a pas eu d’impact négatif sur la revue Physical Review, dont les champs d’intérêts recoupent largement ceux des prépublications déposées sur le serveur20. C’est dire que les auteurs valorisent les revues scientifiques comme mode de validation et de reconnaissance de leurs travaux qui va au-delà de la communication entre chercheurs21. Car, à ce jour, une prépublication n’est pas une publication, notamment en ce qui a trait à la reconnaissance des auteurs par les pairs et à l’importance des publications arbitrées dans le processus de promotion des professeurs et des chercheurs. Ajoutons que le contrôle de qualité ainsi que l’archivage des documents déposés sur ces serveurs posent généralement problème, puisque les fichiers sont conservés tels que les auteurs les ont transmis et sans conversion des textes et des données vers un format normalisé22. D’où la reconnaissance de la différence et de la complémentarité de mission avec les revues.
18Price, faisant l’historique de la communication scientifique de la lettre au livre imprimé, du livre à l’article de revue et de la revue aux bases de données bibliographiques, conclut par ce constat : « Au total [...] les vieux mécanismes ont été préservés, mais les progrès techniques ont modifié le système dans son ensemble et provoqué de nouvelles réactions et de nouvelles forces23. » Dans ce domaine comme dans plusieurs autres, les transformations, aussi majeures qu’elles soient, procèdent rarement suivant le mode de la « table rase », mais bien plutôt à la fois par renouvellement des pratiques ainsi que reconfiguration de l’ensemble, et par sédimentation des éléments constitutifs. C’est ce processus complexe qui est à l’œuvre dans la communication scientifique. La véritable question est celle d’une cohabitation des prépublications et des revues. Ce n’est pas parce qu’une nouvelle technologie ou une nouvelle forme de communication émerge qu’elle doit nécessairement remplacer celle qui était utilisée auparavant. La communication de messages sonores ou textuels par satellite entre les capitaines des bateaux a eu raison du code Morse mais on utilise aujourd’hui le téléphone et la messagerie vocale sans penser que le courriel seul suffit.
19L’objectif premier des serveurs de prépublications est la communication des résultats de recherche des correspondants, sans filtrage à l’entrée, par la diffusion des textes dans l’état où ils sont déposés sur ces serveurs. Ce qui distingue la communication de la publication, c’est que cette dernière existe en raison du processus d’ensemble de sélection, de traitement, de mise en forme, de diffusion, d’institutionnalisation des forums, de reconnaissance et d’archivage des textes soumis. Les revues sont sur ce dernier terrain.
20Les communications facilitées par le courriel et les serveurs de prépublications transforment les modèles de publication et d’édition de la littérature universitaire autant d’un point de vue technologique que par les modes de diffusion. Toutefois, comme le fait remarquer justement l’éditeur de D-Lib : « Aujourd’hui, les publications et les bibliothèques numériques donnent aux auteurs plusieurs options : des rapports de recherche aux prépublications jusqu’aux revues numériques. S’il est clair que ces nouveaux modes de communication scientifique sont largement utilisés, peu d’études systématiques portent sur leur utilisation selon les disciplines24 ».
STRUCTURATION DES REVUES AU SOMMET DE LA PYRAMIDE
21Pour bien définir les stratégies d’action, il convient préalablement de cerner les positions relatives des acteurs de l’édition de revues savantes. Dans un premier temps, les principales revues à l’échelle internationale font l’objet de notre attention, afin, par la suite, de prendre en compte la situation des revues dans les infrastructures nationales de la diffusion de la recherche.
22Selon cette démarche, la caractérisation du sommet de la pyramide dans le milieu des revues s’appuie sur la prise en compte de la réalité dans des disciplines représentatives, soit quatre disciplines des sciences naturelles et quatre des sciences sociales. De là, il sera possible d’identifier les éditeurs, de saisir leurs pratiques commerciales et de jauger leur poids relatif dans les canaux de communication scientifique. Les données sur le facteur d’impact des revues servent d’outil pour établir l’échantillon de revues et rendre compte de l’importance relative des revues dans la communauté des chercheurs25. Par la suite, il sera possible d’enchaîner en faisant l’état des lieux pour les revues en France et au Canada, deux sociétés qui n’exercent pas d’hégémonie dans les réseaux scientifiques, mais qui participent à ceux-ci de façon tout de même active.
Caractérisation sommaire de la place des revues
23La mise en évidence des caractéristiques concernant la place des revues dans les disciplines passe par l’introduction d’éléments de classification. La typologie de Becher26 distingue quatre types de champs disciplinaires, soit le hard pure, le hard applied, le soft pure et le soft applied. À chaque type, deux disciplines ont été associées. Dans le premier cas (hard pure), nous retenons la chimie et la physique, dans le deuxième (hard applied), le génie électrique et la science des matériaux, dans le troisième (soft pure), la science politique et la sociologie, et, dans le quatrième (soft applied), les sciences de l’éducation et le travail social. Pour chaque champ disciplinaire, les 25 revues ayant eu en 2000 le facteur d’impact le plus élevé, selon le SCI Journal Citation Reports et le SSCI Journal Citation Reports, ont été sélectionnées.
24Le facteur d’impact doit être utilisé avec prudence. Dans notre contexte, cette mesure a permis de sélectionner les revues qui auraient une position dominante dans les disciplines et d’établir un échantillon qualifié pour chacune27.
25Partant de la domination des oligopoles de l’édition commerciale dans la vente des revues scientifiques, une image simplifiée en est dégagée. Le cliché veut que les grands groupes privés accaparent l’essentiel du terrain occupé par les meilleures revues à l’échelle internationale, que cette position privilégiée permet de toucher une rente de situation particulièrement avantageuse et que les institutions publiques (notamment les bibliothèques) n’ont d’autre choix que de souscrire à ces pratiques commerciales car les revues en cause sont les plus importantes et les plus en demande par les spécialistes28. En d’autres termes, on pourrait conclure que tout ce qui est important dans le monde des revues est approprié par les oligopoles de l’édition. Partant de constats maintes fois renouvelés, on assiste à une généralisation qui, d’une part, gomme une partie significative de la réalité éditoriale des revues et, d’autre part, fait l’impasse sur de riches perspectives d’action pour que la communauté de chercheurs s’approprie les voies actuelles de la communication scientifique par les revues.
26Au-delà du cliché, il faut discerner la position relative et les pratiques des acteurs parmi les plus importantes revues à l’échelle internationale. Ce sera le point d’entrée pour s’intéresser ensuite aux revues canadiennes et françaises, qui ne sont généralement pas au sommet de la pyramide.
Éditeurs des revues dominantes
27Dans les secteurs scientifiques, représentés par la chimie, la physique, le génie électrique et la science des matériaux, les presses universitaires sont pour ainsi dire absentes : une seule revue du groupe, l’Israel Journal of Chemistry, est éditée par une presse universitaire, celle du Wizemann Science Press of Israel. Les revues se partagent donc dans les termes suivants : 55 % sont éditées par des sociétés savantes et 44 % par des éditeurs commerciaux, et ces deux groupes présentent des facteurs d’impact moyens légèrement décalés (respectivement 3,44 et 2,83)29.
28La situation est quelque peu différente dans les sciences sociales, représentées par la sociologie, la science politique, l’éducation et le travail social. Le bassin des revues dominantes de ces disciplines est partagé également par le secteur sans but lucratif (sociétés savantes [30 %], presses universitaires [20 %] des revues) et par les éditeurs commerciaux (50 % des revues).
TABLEAU 1. Poids relatif et facteurs d’impact selon le type d’éditeur, 2000
* La présence d’une seule presse universitaire est trop marginale pour la faire intervenir dans les calculs par la suite. Elle ne peut à elle seule représenter un secteur.
29Les facteurs d’impact moyens sont de 1,35 pour les sociétés savantes, de 1,07 pour les presses universitaires et de 0,88 pour les éditeurs commerciaux.
30Les éditeurs commerciaux publient la moitié, ou un peu moins, des revues dominantes des champs étudiés, tant dans les sciences que dans les sciences sociales. Les presses universitaires, lorsqu’il y a lieu, et les sociétés savantes se partagent le reste de l’édition savante, ce qui laisse une bonne place aux éditeurs du secteur sans but lucratif.
Coûts des abonnements
31Le prix moyen30 des revues en sciences est près de cinq fois plus élevé qu’en sciences sociales, avec des valeurs respectives de 1309,82 $ et de 276,15 $31. Cette différence s’atténue quand on observe les médianes, qui se situent plutôt à 802,50 $ et 195,00 $ respectivement, portant le rapport à 4 :1 environ.
32Les bibliothécaires ne seront pas surpris de constater que les prix moyens des revues dominantes, lorsque considérés sous l’angle du type d’éditeur, sont particulièrement disparates : si le coût moyen des revues en sciences publiées par les sociétés savantes est de 899,91 $, celui des revues éditées commercialement grimpe à 1969,14 $, soit plus du double. Plus encore, ce rapport passe à un peu moins du triple quand on compare les médianes, qui sont respectivement de 625,00 $ et de 1689,50 $32.
33Le tableau est semblable pour les sciences sociales, même s’il faut tenir compte d’une dynamique à trois groupes : les presses universitaires étant cette fois beaucoup mieux représentées. Ces dernières se retrouvent sensiblement dans les mêmes tarifs d’abonnement que les sociétés savantes, avec respectivement des moyennes de 145,39 $ (presses universitaires) et de 128,32 $ (sociétés savantes), et des médianes de 125,00 $ et de 118,00 $. Encore une fois, les revues publiées par des éditeurs commerciaux ont des tarifs plus élevés selon un facteur d’environ 3, si l’on considère la moyenne (411,25 $) ou la médiane (358,00 $) des prix de l’abonnement. La situation est donc assez semblable à celle des secteurs scientifiques, mais dans un ordre de prix différent33.
tableau 2. Prix des abonnements de revues, selon le type d’éditeur, 2000
34On aurait pu tenir compte du poids relatif des revues, en ce qui concerne le gabarit, la complexité et la périodicité. Certaines sont publiées une fois l’an, d’autres douze fois ou plus, certaines comptent quelques centaines de pages annuellement, d’autres sont imprimées en petits caractères sur plusieurs milliers de feuillets de papier bible. Il reste qu’en comparant des revues dans un nombre restreint de disciplines et avec un statut similaire, ces différences s’annulent à l’intérieur des grands champs ; elles reprennent de leur pertinence lorsque vient le temps d’apprécier avec précision la justification de l’écart des prix entre les grands champs et ne comptent vraisemblablement que pour une partie de l’explication. D’autres études similaires à la nôtre, mais plutôt concentrées sur un champ particulier en science, ont livré des résultats semblables. Par exemple, le Scripps Institution of Oceanography Library a établi, pour 1996, le coût moyen par page pour chacun des éditeurs dans le champ de l’océanographie et concluait que « les sociétés savantes et les presses universitaires tendent à avoir un prix plus bas par page que les éditeurs commerciaux, mais il y a des exeptions34. » La situation n’a pas changé.
Fréquence d’utilisation et impact
35On prétend souvent que les revues publiées par les grands éditeurs commerciaux sont choisies par les bibliothécaires et les universitaires en raison de leur grande consultation et de leur importance dans le domaine. Cette affirmation n’est pas sans susciter quelque scepticisme.
36Pour sa part, Wilder soutient que les publications commerciales représentent 75 % des titres de la bibliothèque de chimie de l’University of Illinois (Urbana-Champaign), mais seulement 42 % de l’utilisation (mesurée par le nombre de fois qu’un titre était mis en circulation ou replacé sur les tablettes), tandis qu’avec seulement 25 % des titres, les associations sans but lucratif obtenaient 58 % de l’utilisation. La mesure des citations des revues commerciales de chimie auxquelles la Louisiana State University est abonnée donne des résultats semblables. Pour 78 % des titres, les périodiques d’éditeurs commerciaux recueillent à peine 50 % de l’ensemble des citations attribuées à des périodiques auxquels cette bibliothèque est abonnée35. La conclusion de Wilder est plutôt lourde, lorsqu’il souligne qu’en mettant la collection en santé et technologie au cœur de leur politique d’acquisition, les bibliothèques universitaires ne peuvent échapper aux charges onéreuses, d’autant plus que les titres ayant une faible utilisation accaparent une large proportion du budget des périodiques en santé et technologie. Cette conclusion est peut-être hasardeuse si l’on tient compte du fait que les données sur l’impact des revues en chimie sont caractérisées par une asymptote particulièrement abrupte, illustrant l’importante concentration des citations dans un petit nombre de publications. La simple présence d’un éditeur commercial à la première position de la liste aurait modifié considérablement ses calculs et remis en cause cette conclusion.
37Quoi qu’il en soit, en gardant à l’esprit la démonstration de Wilder et dans le but d’établir une mesure de la position relative des revues au sein de la communauté des chercheurs selon le type d’éditeur, nous avons testé l’affirmation, généralement admise, voulant que les revues dotées des plus forts indices soient concentrées chez les grands éditeurs commerciaux.
tableau 3. Pointage moyen des revues en fonction de leur impact selon le type d'éditeur, 2000
38Nous avons procédé à l’établissement d’un pointage moyen des revues pour les types d’éditeur. Chacune des revues s’est vu attribuer un pointage correspondant à l’inverse de son classement dans son champ de spécialisation. Avec un total de 25 revues par champ, les revues qui se retrouvent au premier rang des facteurs d’impact de leur champ ont obtenu 25 points contre un seul point pour la vingt-cinquième revue.
39On constate que les différents types d’éditeurs ont une propension à se disperser à peu près également autour de la moyenne, tant dans les sciences sociales que dans les sciences naturelles. En d’autres termes, les grands éditeurs commerciaux ne présentent pas un avantage particulier pour ce qui est de l’impact relatif de leurs revues dans la communication scientifique.
Mais le prix de l’impact ?
40Dans la mesure où le coût des abonnements est beaucoup plus élevé chez les commerciaux et que leur indice d’impact ne se différencie pas de celui des autres types d’éditeurs, il en découle que le coût financier de l’acquisition de périodiques des premiers est nettement plus onéreux que celui des seconds.
41On peut l’illustrer de la façon suivante. Si une institution était abonnée à toutes les revues de l’échantillon, les trois quarts du budget d’acquisition en sciences sociales et les trois cinquièmes en sciences seraient canalisés vers des éditeurs commerciaux pour des revues ne représentant respectivement que 42 % et 36 % des citations dans les divers domaines. Le coût des revues rattachées à des éditeurs sans but lucratif est de toute évidence beaucoup plus modeste, compte tenu de leur rayonnement.
42Tout en étant qu’indicatives, ces données font ressortir que, peu importe la méthode de calcul, les revues publiées par des éditeurs commerciaux, à qualité égale, coûtent beaucoup plus cher que les revues éditées par des sociétés savantes ou des presses universitaires, tant en sciences naturelles qu’en sciences humaines et sociales36. Il en ressort également que les revues des éditeurs commerciaux ne se positionnent pas plus avantageusement que leurs concurrentes sans but lucratif, dans les huit champs que nous avons explorés simultanément.
tableau 4. Proportion des citations en regard de la proportion du budget d’acquisition des 200 revues de l’échantillon, 2000
Le sans but lucratif
43Les distinctions entre les pratiques des éditeurs aident à avoir une vision plus circonstanciée de la place des éditeurs en fonction des augmentations de coûts et de la spirale inflationniste qui mine l’accès à l’information scientifique, de même qu’elles soulignent le caractère hasardeux voire dangereux de généralisations abusives. Elles permettent également de faire ressortir les rapprochements entre les pratiques des éditeurs sans but lucratif (sociétés savantes comme presses universitaires).
44Les grands éditeurs commerciaux ont pris le contrôle de revues majeures dans les divers secteurs et ont élaboré, à partir d’une position oligopolistique, une stratégie de commercialisation leur permettant à la fois d’imposer leur panier de revues et de pratiquer des prix extravagants. Cette force commerciale ne doit pas occulter la présence plus que significative (majoritaire de fait) des acteurs sans but lucratif ; de plus, elle met certainement en relief l’éclatement des modes d’organisation de la publication scientifique chez ces derniers acteurs. Tout en se démarquant des pratiques oligopolistiques, des stratégies de réseautage à différents niveaux permettraient au secteur sans but lucratif de gagner en cohésion et de mieux contrebalancer les pratiques des grands groupes commerciaux.
45Les rôles remplis par les différents acteurs ne sont pas incrustés sous une forme organisationnelle immuable. Les lieux de publication, qui ont pris la forme de revues indépendantes (de sociétés savantes ou d’institutions de recherche) orchestrant toutes les opérations, ou encore de maisons d’édition universitaires ou, plus récemment, de services associés aux bibliothèques, ont connu des formes organisationnelles diverses. Dans le contexte actuel, ces formes se renouvellent au gré des innovations et des initiatives. L’édition et la publication se renouvellent dans leur mission et dans les pratiques, mais occupent toujours une place capitale dans la communication scientifique. Avant d’y venir, jetons un coup d’œil sur les particularités des infrastructures nationales de diffusion de la recherche.
INFRASTRUCTURES NATIONALES DE DIFFUSION DE LA RECHERCHE
46Les discussions, qui prennent pour cadre de référence les structures mondiales ou américaines de la communication scientifique, jettent un éclairage particulièrement précieux pour jauger les enjeux actuels et les tendances dans l’évolution de ce secteur. Cependant, outre la situation des revues au sommet de la pyramide internationale, on doit porter attention aux revues dans les sociétés nationales, qui généralement n’occupent pas la même position dans la pyramide internationale de la diffusion de la recherche. L’étude des conditions particulières d’existence et de diffusion de ces dernières revues est instructive.
47Pour fin d’illustration, le Canada et la France représentent des sociétés dotées d’infrastructures de recherche appréciables. Il n’y a rien de péjoratif à considérer que les revues dirigées au Canada ou en France, par exemple, ne constituent généralement pas le centre des circuits ou la pointe de la pyramide mondiale dans la communication scientifique, sachant que, malgré tout, dans une perspective d’ensemble, elles y occupent une place enviable. La caractérisation de la situation des revues doit comprendre des données essentielles sur plusieurs dimensions : l’environnement international (qui conditionne les milieux canadien, québécois et français), la présence relative dans les champs disciplinaires, le cadre organisationnel et la structure éditoriale, l’importance relative des revues dans la communication scientifique et leur contexte financier37. Partant de là, il est plus facile de saisir la capacité d’agir sur certaines variables et sur l’impact prévisible de certaines actions.
Lieux et secteurs de publication : entre la dispersion et le regroupement
48Toute une série de facteurs devraient être ajoutés pour rendre compte de façon satisfaisante du phénomène de dispersion des lieux de production des revues. Nous allons illustrer le phénomène qui est présent tout autant au Québec, au Canada et en France. Le contexte général est difficile et attise la précarité des revues, moins comme institutions intellectuelles, que comme organisations devant assurer leur viabilité économique. Ce contexte général produit des effets propres au Québec, alors qu’il s’agit d’une petite société (démographiquement parlant) dont la langue d’expression et de communication n’est pas la langue prépondérante dans les réseaux internationaux.
49D’entrée de jeu, constatons que, dans les sociétés retenues, les éditeurs sans but lucratif sont proportionnellement très présents et que la position relative des sciences sociales est très grande. Au Canada, un total de 201 revues d’importance ont été répertoriées38 et près des trois quarts publient en sciences humaines et sociales. Au Québec, des 52 revues répertoriées39, 65 % sont en sciences humaines et sociales et 25 % en arts et lettres ; il reste une place minime pour les sciences biomédicales, naturelles et le génie. En faisant un relevé semblable pour la France à l’aide des données du CNRS, près de 90 % des 150 revues recensées sont en sciences humaines et sociales. C’est dire que les interlocuteurs premiers pour une intervention auprès du milieu des revues sont composés massivement de directeurs de revues en sciences humaines et sociales, voire en création et en arts.
50À l’échelle canadienne, on sait que les trois quarts des revues sont éditées et produites par de petits éditeurs non professionnels, comme les unités d’enseignement (36 %) et les sociétés savantes (38 %). Les presses universitaires publient 16 % des revues et les éditeurs privés seulement 5 % (les éditeurs des autres revues n’ont pu être identifiés clairement). En somme, au moins 90 % des éditeurs sont des organismes sans but lucratif. Pour ce qui est des éditeurs privés (commerciaux), on peut aussi bien trouver, à un bout du spectre, Elsevier Science Ltd et Kluwer Academic Publishers et, à l’autre bout, les Éditions Bellarmin ou les Éditions Saint-Martin, qui sont aux antipodes concernant leur structure commerciale et leur gabarit. Au Québec, cet éclatement des lieux d’édition et la place marginale des grands éditeurs commerciaux sont frappants ; compte tenu du bassin total de revues, le plus important éditeur universitaire québécois en la matière (les Presses de l’Université de Montréal), avec six revues, ne peut se comparer avec l’University of Toronto Press qui a 27 revues et la Wilfrid Laurier University Press, qui en publie 13.
51Du côté français, les petits éditeurs indépendants représentent plus de la moitié (55 %) des éditeurs ; ajoutés aux presses universitaires, les éditeurs sans but lucratif réuniraient environ les deux tiers des revues. Les PUF, qui sont le principal éditeur de revue, ont été considérées comme un éditeur privé en raison de son statut déjà atypique auparavant et de la restructuration récente. Un autre éditeur privé a une forte présence, L’Harmattan, avec une quarantaine de revues. Pourtant, on ne peut pas dire qu’ils aient la physionomie des éditeurs oligopolistiques. Davantage de revues françaises, que canadiennes, participent aux grands groupes oligopolistiques, mais cela ne constitue pas une caractéristique dominante. Ce qui est sans doute plus distinctif, c’est que l’édition universitaire est réalisée pour une part significative par des éditeurs privés commerciaux qui en ont fait leur mission éditoriale, tout en ayant une fortune commerciale souvent incertaine.
52De façon générale, en matière de coût d’abonnement, on pratique une tout autre échelle de prix que celle des grandes revues (à plus forte raison celles des grands groupes commerciaux). Tous éditeurs confondus, l’abonnement à la revue canadienne en sciences coûte en moyenne 175 $ US et, en sciences sociales, 40 $ US. En France, le prix moyen d’une revue en sciences humaines et sociales est de 55 $ US. On se rappellera que le prix des abonnements des revues sans but lucratif des revues dominantes en sciences humaines et sociales était de 120 $ US (et 358 $ pour les commerciaux). En tout état de cause, ces acteurs sont manifestement en retrait et constituent même un contrepoids à la spirale inflationniste.
53Cette dispersion s’exprime par la distance entretenue entre et par les éditeurs et les directions de revue. Les éditeurs universitaires ont certainement considéré le secteur des revues comme un secteur difficile et coûteux et qu’il valait mieux se concentrer sur le secteur des livres dans lequel l’éditeur joue plus pleinement son rôle, partant de la sélection des manuscrits jusqu’à la diffusion auprès du lectorat. Cette distanciation a rencontré une méfiance, plus ou moins justifiée de la part des directions de revue qui, d’une part, tenaient, de bon droit, à leur autonomie éditoriale, et, d’autre part, pouvaient bénéficier de certains services ou revenus autonomes permettant de financer la fabrication et d’assurer la vente de la revue. De plus, la rencontre de l’éditeur et de la direction de revue pouvait être évitée, parce que les politiques publiques et universitaires l’ont rendue non nécessaire.
54Dans certaines universités, on a mis à la disposition des revues des services de production et de diffusion, soit directement, soit par l’intermédiaire d’instituts, de centres ou de facultés. Les programmes de subvention, qui ont assuré des revenus aux revues (programmes indispensables pour donner des ressources à des organes de diffusion scientifiques, particulièrement dans une petite société), ont pu favoriser la production maison de la revue. Cela a été le cas au Québec alors que le Fonds FCAR, y voyant sans doute là une source d’économie, a supporté l’achat d’équipement pour préparer la mise en page, voire la préparation des prêts-à-photographier par les soins d’une secrétaire de rédaction de revue. L’octroi de prêts de service est pratique courante en France, alors que les secrétariats de rédaction sont souvent composés du personnel régulier du CNRS. C’est la principale contribution en valeur distribuée aux revues, l’aide monétaire étant beaucoup plus modeste.
Nombreuses entités indépendantes
55La conséquence de cette dispersion, c’est que, dans de nombreux cas, chaque revue, sur une base individuelle, se transforme en petite entreprise s’occupant de l’ensemble du processus d’édition, de publication et de diffusion, en répétant dans divers lieux, et sans économie d’échelle ou transfert de savoir-faire, les mêmes opérations, que ce soit la préparation de la copie, la mise en page, la négociation avec les fournisseurs, la mise en place d’un service d’abonnement ou la négociation avec une agence, l’organisation de la distribution en librairie, etc. Ce morcellement représente un coût qu’il est difficile d’évaluer de façon précise, mais il compte tout au long de la chaîne de publication et de diffusion pour la version imprimée. Ce coût apparaît nettement lorsque vient le temps d’envisager la publication numérique : une publication de qualité, ainsi qu’une diffusion conséquente, étant souvent hors de portée, en raison du manque de ressources.
56Par ailleurs, ce morcellement provoque des contraintes sociales à l’introduction de changements ; il faut en tenir compte lorsqu’on aborde les conditions sociales de la transition vers le numérique. En incitant les directions de revues à investir dans les tâches plus techniques de la production de l’imprimé (acquisition d’équipement pour la mise en page et la préparation des prêts-à-photographier), les politiques antérieures ont produit des effets structurants sur les pratiques sociales, à telle enseigne que la « routinisation » de pratiques de fabrication ainsi induite est susceptible de créer des contraintes à la mise en place d’une forme de regroupement de services, telle une infrastructure de publication et de diffusion s’adressant à l’ensemble des revues.
57Les équipes éditoriales demeurent assez légères et comptent, pour une large part, sur des contributions non rémunérées et sur un personnel à temps partiel ou en prêt de service (avec compensation monétaire ou non) d’un centre, d’un institut, d’une association ou d’une faculté. Ces structures éditoriales assez légères bénéficient d’un financement assuré par des subventions publiques, éventuellement, par l’institution universitaire ou par la société savante de rattachement, et par le revenu des ventes de la revue. Ces structures éditoriales ont été précarisées ces dernières années par l’effet, souvent cumulatif, de politiques de restrictions budgétaires de la part des organismes subventionnaires et des universités, pour ne pas parler de la baisse des revenus d’abonnements dans plusieurs cas. Tous ces éléments ont résulté en une pression plus forte sur les équipes éditoriales, alors qu’elles n’étaient déjà pas bien pourvues40.
58L’étude globale de l’état des revenus et des dépenses d’un échantillon de revues en sciences humaines et sociales au Canada41 permet de constater que près de 41 % des revenus des revues proviennent de la vente d’abonnements et, pour une portion congrue, de la vente au numéro. Le soutien financier des deux organismes subventionnaires majeurs représente 47 % des revenus (en parts quasiment égales entre le Fonds fcar et le crsh). Le reste est assez diversifié, allant de la contribution monétaire des universités ou associations jusqu’aux revenus de publicité. En moyenne, les revues enregistrent un déficit de 3 700 $. Cette représentation ne prend pas en compte la contribution en nature ou en services des institutions ou associations, qui n’est pas moins présente42. Par ailleurs, sans considérer cette dernière contribution, environ les trois quarts des dépenses servent à supporter la structure éditoriale et organisationnelle de la revue, ainsi qu’à préparer la première copie. Les coûts afférents au support papier, en ce qui concerne l’impression, la reliure, l’affranchissement et l’expédition, correspondent au dernier quart. Ce montage fragile, qui est reconduit d’une année à l’autre par les directions de revue, souvent avec une grande dose d’imagination, illustre la précarité des organisations et leur manque endémique de ressources.
59La pertinence de la mise à contribution des technologies de l’information dans le milieu des revues nécessite la prise en compte de ces conditions.
Des incubateurs ? Vraiment...
60En prenant prétexte des remarques précédentes, il peut apparaître de bon ton d’identifier les revues dans ces sociétés nationales à des incubateurs pour jeunes chercheurs. Il est sous-entendu qu’il s’agit là de véhicules mineurs dans la communication scientifique à la fois par le contenu, le rôle et le rayonnement. Cette identification n’est pas justifiée, tout au moins pour le rôle que ces revues jouent et la qualité de leur contenu.
61L’observation la moindrement attentive permet de constater que les directions de revues ont une action qui vise à pratiquer les meilleurs standards de qualité dans leur travail éditorial, à se situer à la fine pointe de l’évolution de leur discipline ou secteur à l’échelle mondiale et à participer aux principaux forums internationaux de la discipline ou du secteur. L’indice d’impact des articles publiés est certainement plus faible que pour les grandes revues internationales dans ces mêmes secteurs. La question de la langue (pour les publications en français) n’est pas sans importance à ce sujet et la notion d’indice d’impact peut être contestée. La question n’est pas là pour l’instant Pour le moment, il faut souligner que les chercheurs établis publient à l’étranger, mais, en sciences humaines et sociales, publient aussi dans ces revues « nationales ». En d’autres termes, ces revues n’ont pas été désertées par les chercheurs en pleine ascension ou établis. Il est question surtout de pondération dans le choix des véhicules de diffusion des résultats de la recherche et dans la manière de rejoindre le plus efficacement le public visé. Quant à eux, les jeunes chercheurs sont portés, le plus rapidement possible, à procéder de la même façon et à donner une place à des organes « internationauxnaux » de diffusion. En contrepartie, il est fréquent de lire des auteurs étrangers dans les revues « nationales ».
62Le qualificatif « national » associé à la revue n’est pas adéquat. L’intérêt manifesté pour les nouvelles technologies de l’information par de nombreuses directions de revue est assez révélateur de la conception et de la projection qu’elles nourrissent pour leur revue. Elles y voient l’occasion de renouveler la revue de recherche et d’accroître son rayonnement, considérations qui ne sont pas le propre d’une conception régionale ou nationale et peu ambitieuse de leur mandat. Cet intérêt va plutôt de pair avec une détermination à valoriser le statut et accroître le rayonnement de la revue, avec une attitude volontaire quant aux moyens à prendre pour y arriver. De fait, elles sont conscientes que leur revue joue un rôle essentiel dans la communication scientifique, et ce n’est pas que présomption. D’où l’intérêt qu’il faut porter aux meilleurs moyens pour accroître la diffusion de ces revues et de leur contenu.
Un rôle essentiel et le problème de la diffusion
63Ces revues ont, pour plusieurs d’entre elles, une histoire déjà fort longue (relativement à l’histoire de la constitution de la communauté scientifique). Pour le Québec et le Canada, on parle de vingt-cinq, trente-cinq ou cinquante ans d’existence, et souvent davantage pour la France. Elles constituent des institutions majeures dans la structuration de la communauté scientifique, ont une réputation de rigueur et sont des lieux de validation, de légitimité et de reconnaissance des résultats de recherche. Sauf exception, elles n’occupent pas une place dominante dans la structure mondiale des réseaux de communication scientifique et ce, de deux points de vue : elles n’occupent pas une place de premier rang parmi les revues les plus influentes dans leur secteur respectif et ne sont pas intégrées dans les grands oligopoles internationaux d’édition commerciale. Cela étant, leur présence outre-frontières est loin d’être négligeable.
64Trois coups de sonde permettent d’en faire l’illustration pour les revues québécoises et canadiennes. Pareils développements pourraient être faits pour la France ; ils mettraient en évidence le rôle et le rayonnement des revues comme vecteur de diffusion de la connaissance scientifique.
65D’abord, une étude montre que, pour la période récente (1991 à 1996), les auteurs québécois qui publient dans l’une ou l’autre des 52 revues répertoriées au Québec sont minoritaires (46 %) et, par voie de conséquence, que les auteurs étrangers (37 %) et canadiens (13 %) y occupent une place importante43. L’origine des auteurs varie beaucoup : les trois quarts des collaborations viennent de 10 pays. Outre la France, qui vient nettement en tête, on retrouve par ordre d’importance les États-Unis et la Belgique, puis la Grande-Bretagne et d’autres pays européens. Les collaborations canadiennes sont principalement ontariennes, avec l’Université d’Ottawa, l’University of Toronto, la York University, la Queen’s University, la McMaster University, notamment. Ajoutons que le quart des textes est écrit en collaboration avec des auteurs de l’extérieur du Québec et davantage avec des auteurs étrangers. Ce phénomène est à la hausse. Certes, les chercheurs établis publient à l’étranger, mais ils publient aussi dans les revues québécoises et canadiennes. Si ces dernières attirent les chercheurs étrangers, elles n’ont pas été désertées par les chercheurs « nationaux ».
66Ensuite, publiées surtout en français ou lui donnant une large place, les revues québécoises sont des acteurs majeurs qui participent à la diffusion des connaissances, principalement dans ce sous-ensemble linguistique des réseaux scientifiques, dont on sait qu’ils sont plus polymorphes en sciences humaines et sociales. On pourrait espérer une diffusion plus soutenue de ces publications dans le monde francophone. Indépendamment de la valeur intrinsèque des revues, cette diffusion se bute à des contraintes et obstacles liés aux circuits commerciaux conventionnels. Cela ne doit pas conduire à sous-estimer l’importance relative des abonnements étrangers, venant d’institutions surtout, ce qui témoigne de la pertinence des revues dans les milieux spécialisés. On sait, pour notre échantillon de revues québécoises, que plus de 30 % des abonnements viennent de pays étrangers au total, cela compte pour un peu moins de la moitié des revenus d’abonnements, ce qui est loin d’être négligeable44. Dans l’état actuel des choses, et compte tenu des embûches rencontrées, ce niveau d’abonnements étrangers, surtout institutionnels, constitue une reconnaissance de la qualité du travail éditorial et de la participation des revues québécoises aux principaux forums internationaux des disciplines ou secteurs.
67Enfin, dans une étude encore inédite45, nous avons tenté d’évaluer la présence des revues canadiennes dans les réseaux de recherche aux États-Unis. Un échantillon de 53 revues a été retenu et 24 grandes bibliothèques de recherche des universités américaines ont été étudiées. On constate qu’en moyenne, les bibliothèques sont abonnées à 30 % des revues canadiennes, qu’un peu plus de revues en sciences humaines et sociales qu’en sciences (12 contre 10) sont présentes dans plus de la moitié des bibliothèques étudiées. Par ailleurs, en prenant l’ensemble des revues canadiennes recensées (plus de 200 revues), la moitié est répertoriée dans Current Content et les revues sont en moyenne répertoriées dans 14 abstracts, sans compter Current Content. Nous n’avons pas distingué les revues québécoises, mais on peut estimer qu’elles ne seraient pas atypiques, surtout si on considère des indices de diffusion rendant justice à la langue de communication utilisée, le français.
68La diffusion de la version papier des revues, comme organes de communication scientifique, se bute au fonctionnement des circuits commerciaux conventionnels. La diffusion numérique pourrait éviter ces contraintes et obstacles (sans pour autant devoir supprimer l’imprimé) et intensifier la présence dans les milieux scientifiques extérieurs au pays. Ce n’est pas un argument essentiellement technique, dans la mesure où cette intensification de la présence n’est possible qu’en raison de la qualité et de l’universalité du contenu des revues ; ces derniers attributs sont déjà attestés par l’importance relative des abonnements institutionnels étrangers à de nombreuses revues, qui sont autant de témoignages de leur pertinence dans les milieux spécialisés. Pour les revues des « sociétés nationales », la diffusion est l’un des grands défis des prochaines années : elles se doivent d’occuper une place de plus en plus significative dans les réseaux de communication scientifique, notamment dans le sous-ensemble francophile, et le numérique est une voie de passage obligée.
Notes de bas de page
1 Tenopir, Carol et Donald W. King, « Designing Electronic Journals With 30 Years of Lessons from Print ». The Journal of Electronic Publishing [en ligne] vol. 4, no 2, 1998, <http://www.press.umich.edu/jep/04-02/king.html>.
2 Serials Price Increase Alerte, University of Southern California, <http://www. lib.use.edu/ffischeiber/price.htm>; Price Comparaison of /STM Journals, mensuel, <http://www.harrassowitz.de/top_ reports/index.html>; Case, Mary M., ARL Promotes Competition Through SPARC: The Scholarly Publishing & Academic Resources Coalition,
<http:www.arl.org/newsltr/196/sparc.html>. Pour la France, voir le tableau synthétique sur l’« évolution du coût moyen des abonnements aux périodiques en bibliothèque universitaire », présenté dans Chartron, Ghislaine et Jean-Michel Salaün, « La reconstruction de l’économie politique des publications scientifiques », Bulletin des bibliothèques de France, L 45, no 2,2000, p. 33.
3 Comme on le verra plus loin, une revue publiée par un éditeur sans but lucratif coûte plusieurs fois moins cher par caractère qu’une revue publiée par les groupes commerciaux dans une même discipline. De même, on sait que les fusions de grandes entreprises d’édition commerciale de revues entraînent une augmentation sensible des prix. « University-Press Group to Study Whether Books in Some Fields Are Disappearing; Non-Profit Journals Are Found to Be More Cost-Effective Than Commercial Ones », The Chronicle of Higher Education, vol. 46, 1999; McCabe, Mark J., « The Impact of Publisher Mergers on Journal Prices: An Update », ARL Bimonthly Report, 207, juillet 2001; <http://www. Arl.org/newsltr/207/jrnlprices.html>.
4 Abate, Tom, « Publishing Scientific Journals Online ». BioScience, vol. 47, no 3,1997. <http://www.aibs.org/latitude/IatpubIications.html>.
5 McCabe, Mark J., « The Impact of Publisher Mergers on Journal Prices: An Update » juillet 2001, ARL Bimonthly Report, 207, juillet 2001; <http://www.arl.org/newsltr/207/jrnlprices.html>.
6 Wyly, Brendan J., « Competition in Scholarly Publishing? What Publisher Profits Reveal ». ARL Newsletter of Research Library Issues and Actions, no 200, 1998; <http://www.arl.org/newsltr/200/wyly.html>.
7 Keller, Michael, « Innovation and service in scientific publishing requires more, not less, competition », Nature, Webdebates, <http://www.nature.com/nature/debates/e-access/Articles/keller.html>.
8 Becher, Tony, « The Disciplinary Shaping of the Profession », dans Burton R. Clark (dir.), The Academic Profession: national, disciplinary, and institutional settings, Berkeley, University of California Press, 1987, p. 271-303.
9 <http://www.sciencemag.org/>.
10 <http://www.nature.com/nature/>.
11 Hacking, Ian, « The Disunities of the Sciences », dans Galison, Peter et David J. Stump (dir.), The Disunity of Science: Boundaries, Contexts, and Power. Stanford, Stanford University Press, 1996, p. 37-74.
12 Becher, Tony, « The Disciplinary Shaping of the Profession », dans Burton R, Clark (dir.), The Academic Profession: national, disciplinary, and institutional settings, Berkeley, University of California Press, 1987, p. 285.
13 <http://arXiv.org/>.
14 Blumenstyk, Goldie et Vincent Kiernan, « Idea of On-Line Archives of Papers Sparks Debate on Future Journals: Proposai by the nih director infuriates some and inspires others », Chronicle of Higher Education, 9 juillet 1999, p. A25.
15 Voir : Index national des prépublications de mathématique en France <http://www-mathdoc.ujf-grenoble.fr/prepub.html/> ; CH Working Papers <http://www.kcl.ac.uk/humanities/cch/chwp/submit.html> ; arXiv. org e-Print archive <http://xxx.lanl.gov> ; RePEc (Research Papers in Economies) <http://www.repec.org/> ; CogPrints <http://cogprints.soton.ac.uk/> ; GrayLIT Network <http://graylit.osti.gov/> ; MathNet.preprints, <http://mathnet.preprints.org/>.
16 Van de Sompel, Herbert et Carl Lagoze, « The Santa Fe Convention of the Open Archives Initiative. » D-Lib Magazine, vol. 6, no 2, 2000. <http://www.dlib.org/februaryoo/vandesompel-oai/02vandesompel-oai.html>.
17 Harnad, Stevan, « Free at Last: The Future of Peer-Reviewed Journals », D-Lib Magazine, vol. 5, no 12, 1999. <http://www.dlib.org/dlib/december99/12harnad.html>.
18 Le Crosnier, Hervé. Avons-nous besoin des journaux électroniques ? Communication présentée aux Journées SFIC-ENSSIB, Une nouvelle donne pour les journaux scientifiques, Villeurbanne, 20 novembre 1997 ; <http://www.info.unicaen.fr/herve/pub97/enssib/enssib.html>.
19 Harnad, Stevan, « Free at Last: The Future of Peer-Reviewed Journals. » D Lib Magazine, vol. 5, no 12,1999. Traduction des auteurs. <http://www.dlib.org/dlib/december99/12harnad.html>.
20 Smith, Arthur P., « The journal as an overlay on preprint databases » Learned Publising, vol. 13,2000, p. 43-48.
21 Sur cette question, voir l’article de Rowland où on identifie quatre fonctions fondamentales de la revue savante : communication de l’information, contrôle de la qualité, archivage canonique et reconnaissance par les pairs. <http://www.ariadne.ac.uk/issue7/fytton/intro.html>.
22 Rowland, Fytton, « Print Journals: Fit for the Future? » Ariadne, no 7, 1997. <http://www.ariadne.ac.uk/issue7/fytton/>.
23 de Solla Price, Derek John, « Communication in Science: The Ends-Philosophy and Forecast », dans Anthony De Reuck et Julie Knight (dir.), Communication in Science: Documentation and Automation, Londres, J. & A. Churchill, 1967, p. 201. Nous traduisons.
24 Arms William Y. « Scholarly Communication, Digital Libraries, and D-Lib Magazine ». D-Lib, vol. 5, no 4, 1999. Nous traduisons. <http://www.dlib.org/dlib/april9g/o4editorial.html>.
25 Institute for Scientific Information, Science Citation Index. Journal Citation Reports, 1997 et Social Sciences Citation Index. Journal Citation Reports, 1997.
26 Becher, Tony, « The Disciplinary Shaping of the Profession », dans Burton R, Clark (dir.J, The Academic Profession: national, disciplinary, and institutional settings, Berkeley, University of California Press, 1987, p. 271-303.
27 Les facteurs d’impact des revues des sciences sociales sont beaucoup moins élevés que ceux des secteurs scientifiques, et présentent également une disparité moins grande. Pour toutes les disciplines rattachées aux sciences (physique, chimie, science des matériaux et génie électrique), les facteurs d’impact médians étaient toujours supérieurs à 1,6, ce minimum étant occupé par la physique et le maximum étant représenté par la chimie avec 3,0. La médiane pour toutes les disciplines se situe à 2,0, tandis que la moyenne se situe à 3,2. La situation est très différente en sciences sociales (sociologie, science politique, travail social et éducation), où le facteur d’impact médian le plus fort se situe à 1,3 (sociologie), et le minimum s’affiche à 0,46 (travail social), la médiane globale étant de 0,97. La moyenne globale se situe pour sa part à 1,1. L’écart type est de 0,49, ce qui est significativement plus faible que pour le groupe des disciplines scientifiques (2,41).
28 Cette lecture de la réalité est souvent prise comme une évidence et une fatalité à laquelle on ne peut se soustraire, même de la part de personnes qui en déplorent les conséquences. Par exemple, Whisler, Sandra et Susan F. Rosenblatt, The Library and the University Press: Duo Vicias of the Costs and Problems of the Current System of Scholarly Publishing, communication présentée au colloque Scholarly Communication Technology, Emory University, avril 1997. <http://www.arl.org/scomm/scat/rosenblatt.html>.
29 Ces proportions sont comparables à celles qu’Abate rapporte : 40 % des revues scientifiques étant produites par des éditeurs commerciaux tandis que les presses universitaires ainsi que les agences gouvernementales publient ensemble 60 % de ce genre de publication. « Publishing Scientific Journals Online », BioScience, vol. 47, no 3,1997 ; <http://www.aibs.org/latitude/latpublications.html>. En 1997, nos données présentaient la répartition suivante : Les revues des sociétés savantes représentaient 55 % des revues et celles des éditeurs commerciaux, 44 %. Boismenu, Gérard et Guylaine Beaudry, « Publications électroniques et revues savantes : acteurs, rôles et réseaux », Documentaliste. Sciences de l’information, vol. 36, no 6, novembre/décembre 1999, p. 292-305 et Documentation et Bibliothèques, vol. 45, no 4, octobre-décembre 1999, p. 149-159.
30 Le coût sur lequel nous basons nos calculs est celui d’un abonnement institutionnel d’une durée d’un an pour un établissement américain, en devises américaines. Le coût de l’abonnement à la version papier sert de mesure de référence lorsque l’éditeur permet de choisir entre un abonnement à la version papier, à la version électronique ou aux deux.
31 Ces données sont comparables aux résultats publiés par Library Journal en avril 1999.
32 Notons que la plus coûteuse des revues de notre échantillon éditées par une société savante coûte près de 6 020 $ par an (Journal of Physics A Mathematical and General de l’American Institute of Physics), tandis qu’il faut compter un peu plus de 8 630 $ pour la plus coûteuse des revues commerciales (Physics Letters B, publiée chez North-Holland/Elsevier).
33 À nouveau, les éditeurs commerciaux détiennent la palme de la revue la plus chère (1310 $ pour la revue Child Abuse & Neglect, également un produit Elsevier), suivis des sociétés savantes (365 $ pour American Political Science Review, de l’American Political Science Association) et des presses universitaires (295 $ pour British Journal of Social Work et Health Education Research de Oxford University Press).
34 Brueggemant, Peter, Cost per Page for 1996 subscriptions costing over $ 500 atsioLibrary. 1996, Site Web de la Scripps Institution of Oceanography Library. <http://scilib.ucsd.edu/sio/guide/prices/perpage.html>.
35 Wilder, Stanley J., « Comparing Value and Estimated Revenue of SciTech Journals », arl Newsletter of Research Library Issues and Actions, no 200, 1998, <http://www.arl.org/newsltr/200/wilder.html>.
36 Dans le même sens, voir : Adler, Kraig et Wally Olsen, « Journals Pricing », Learned Publishing, vol. 12, no 2, 1999, p. 137-139, et « University-Press Group to Study Whether Books in Some Fields Are Disappearing; Non-Profit Journals Are Found to Be More Cost-Effective Than Commercial Ones », The Chronicle of HigherEducation, vol. 46, no 6, 1999, <http://chronicle.com/weekly/v46/io6/o6ao2401.htm>.
37 La discussion dans ce chapitre s’appuie sur l’étude de données de base, plus développées pour le Canada, sur notre participation à la communauté universitaire et les nombreux échanges que nous avons eus avec les directions de revues, et sur notre implication dans l’édition des revues depuis quelques années. En ce sens, il s’agit d’une analyse basée sur la compilation de données, ainsi que sur l’observation et l’expérience reliées à notre présence dans le milieu.
38 En comptabilisant toutes les revues financées par les organismes publics (crsh, crsng et Fonds fcar), ainsi que celles qui sont répertoriées dans des bases de données secondaires telles sci, ssci et ahci.
39 Par la Banque de données sur les revues savantes québécoises. Godin, B., E. Archambault, F. Vallières, « La production scientifique québécoise : mesure basée sur la BRSQ », Argus, vol. 29, no 1, 2000, p. 15-23.
40 Les prêts de service pouvaient avoir une visibilité institutionnelle très forte ou, au contraire, faire partie de zones d’ombre, en termes budgétaires. Avec les restrictions budgétaires dans les institutions universitaires, plusieurs acquis sont remis en cause, notamment ces passerelles entre les institutions et les organisations des revues. La disparition ces dernières années de la subvention du crsh pour soutenir le fonctionnement des sociétés savantes a eu une incidence sur l’appui apporté à leur revue. La diminution du nombre de subventions accordées par le Fonds fcar au dernier concours et, de façon générale, la baisse du plafond des subventions, associée au redressement des plus faibles, ont réduit les ressources disponibles pour plusieurs revues. Tous ces éléments ont résulté en une pression plus forte sur les équipes éditoriales des revues, alors que l’on ne peut présumer ou postuler qu’elles étaient déjà bien pourvues, au contraire. Si on compare avec la France, le cnrs apporte à près de 200 revues un soutien financier, mais surtout un soutien en service, soit en secrétariat de rédaction. Nous ne sommes pas dans le même ordre de grandeur, même si le niveau des abonnements est souvent semblable.
41 Échantillon de 27 revues subventionnées par le crsh ayant leurs bureaux administratifs au Québec. Données fournies par le crsh et compilées par nos soins. Les données se rapportent à l’année 1998.
42 L’Association canadienne des revues savantes évaluait récemment que cette contribution représente entre 5 000 et 10 000 $ par année, selon les institutions. <http://calj.icaap.org/>.
43 Godin, B., E. Archambault, F. Vallières, « La production scientifique québécoise : mesure basée sur la brsq », Argus, vol. 29, no 1, 2000, p. 15-23 ; Godin, B., « Les revues savantes québécoises : entre impact national et visibilité internationale », Recherches sociographiques, à paraître.
44 Données compilées à partir d’un échantillon du Conseil de la recherche en sciences humaines du Canada (CRSH).
45 Boismenu, Gérard et Guylaine Beaudry, Pénétration des revues savantes canadiennes dans les universitésaméricaines. Texte polycopié, 2001, 20 p
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