4. Drogues et questions criminelles : l’évolution récente des usages et des interventions au Québec
p. 113-138
Texte intégral
UN INTÉRÊT POUR LES DROGUES QUI A TARDÉ À APPARAÎTRE
1Très rapidement après son apparition sur terre, l’être humain a cherché à modifier ses états de conscience, dans le but de mieux communiquer avec des puissances supérieures, de se surpasser ou, tout simplement, de se détendre. Ce n’est toutefois que depuis un siècle que le contrôle pénal intervient pour aider à gérer les abus dans la consommation des substances psychoatives. Ce type de contrôle a, dans la seconde moitié du XXe siècle, intéressé les spécialistes de la justice pénale et les criminologues de différentes façons. Ainsi sont apparues des études sur les effets criminogènes des drogues et, plus tard, sur les relations drogue-crime. L’efficacité des lois pour contrôler l’usage de drogues ayant été mise en doute, une plus grande attention fut portée sur les interventions susceptibles d’aider les toxicomanes à sortir de leur délinquance.
2Ce n’est que depuis moins de 20 ans que les drogues constituent un élément de préoccupation dans le paysage scientifique québécois. Auparavant, les chercheurs étaient peu nombreux et disséminés dans les universités du Québec (Concordia, Laval, McGill-Douglas et Montréal) ou appartenaient au Groupe de recherches sur les sciences appliquées (GRAP). Sans réel budget d’infrastructure et sans véritable programme de recherche, ils suivaient diverses pistes. Prenant en compte certaines recommandations du rapport Bertrand publié en 1990, le ministère de la Santé et des Services sociaux a décidé de créer au Québec deux équipes de recherches en toxicomanie dotées d’une véritable infrastructure et d’un programme de recherche. Afin de stimuler la recherche et, plus spécialement, de susciter des études menées en partenariat avec les milieux de pratique et de décision, il a confié au Conseil québécois de recherche sociale (CQRS) le mandat de mettre sur pied ces deux équipes. Ainsi sont nées deux équipes de recherche, l’une en psychoéducation (Groupe de recherche sur l’inadaptation psychosociale chez l’enfant – GRIP) et l’autre en criminologie (Recherche et intervention sur les substances psychoactives, Québec – RISQ), toutes deux rattachées à l’Université de Montréal. Ces deux équipes étaient constituées de chercheurs appartenant à plusieurs disciplines, mais, concentrant une partie de leurs efforts sur les déviances, elles ont fortement contribué au développement des connaissances dans le domaine de la criminologie.
3Ce chapitre fera le point sur l’état des connaissances sur les relations de la drogue avec le crime. Plus spécialement, nous tenterons de répondre aux questions suivantes : Qui sont les consommateurs (sections 1 et 2) ? Comment se présentent les relations drogue-crime (section 3) ? Les pratiques pénales ont-elles vraiment un effet dissuasif sur les contrevenants toxicomanes et quelles pourraient être les solutions de rechange (sections 4 et 5) ?
LES JEUNES ET LA CONSOMMATION DE SUBSTANCES PSYCHAOCTIVES : ENTRE EXPÉRIMENTATION ET DÉFONCE
4Au tournant de l’an 2000, le Comité permanent de lutte à la toxicomanie (Cousineau et Schneeberger, 2001) a mené une consultation nationale auprès des personnes (parents, intervenants, gestionnaires…) s’intéressant aux questions liées à la toxicomanie au Québec. La consultation a révélé que la principale préoccupation des répondants concernait la consommation des jeunes, laquelle se ferait de plus en plus tôt, serait de plus en plus régulière, toucherait un vaste éventail de produits englobant les drogues dures et un certain nombre de nouvelles drogues (dont on connaît encore mal les effets), prises souvent de manière concomitante. Les répondants à l’enquête s’inquiétaient en outre de l’accessibilité de plus en plus grande des produits. Il n’était toutefois pas facile d’obtenir des chiffres sur la prévalence de la consommation d’alcool et de drogues chez les jeunes.
5Les grandes enquêtes nationales de consommation de substances psychoactives (Institut de la statistique du Québec, 1998, et Santé Canada, 1997, en particulier) présentent deux limites importantes en ce qui concerne les jeunes : 1) le groupe des jeunes comprend seulement les 15-24 ans, alors que la consommation d’alcool et de drogues licites ou illicites débute pour bon nombre d’entre eux entre 13 ans et 14 ans, selon Vitaro, Dobkin, Janosz et Pelletier (1997) ; et 2) ces enquêtes ne rejoignent pas, ou rejoignent mal, certaines populations de jeunes particulièrement touchées par l’alcool et les drogues (jeunes décrocheurs, jeunes de la rue, jeunes membres de gangs, jeunes en centre de réadaptation). Afin de remédier à ces lacunes, notre équipe a fait passer un questionnaire unique à 995 élèves ou étudiants, à 139 décrocheurs et à 239 contrevenants. Nous présentons dans les sections qui suivent les principaux résultats de cette enquête portant sur les habitudes de consommation des jeunes et nous décrivons la situation dans laquelle se trouvent placés les trois échantillons de jeunes interrogés.
Les jeunes en milieu scolaire
6Près des trois quarts des jeunes en milieu scolaire disent avoir consommé au moins une fois de l’alcool au cours de leur vie, plus de 40 % admettent avoir pris au moins une fois du cannabis, 12 % ont fait l’essai d’hallucinogènes et pas plus de 10 % ont eu un contact avec les autres types de drogues.
7La prévalence de consommation de substances psychoactives au cours de la dernière année ressemble beaucoup à la prévalence sur la durée de la vie : les deux tiers des jeunes admettent avoir consommé de l’alcool au cours de cette période, et autour de 40 % disent avoir pris du cannabis. Pour les autres drogues, les pourcentages sont en deçà de 10 %.
8Les prévalences de consommation des garçons et des filles à vie et au cours de la dernière année sont à peu près les mêmes pour la consommation d’alcool et pour celle des drogues illicites autres que le crack et le cannabis, qui paraissent être légèrement plus prisés par les garçons.
9Environ 15 % des usagers d’alcool admettent en consommer quotidiennement, et 12 % estiment en être dépendants. Ces proportions sont plus importantes chez les consommateurs de cannabis : tout près de 40 % pour la consommation journalière et 25 % pour le sentiment de dépendance. Dans le cas des autres drogues, les proportions varient grandement.
10Il y a une assez forte corrélation entre l’importance de la consommation de substances psychoactives − que celle-ci soit évaluée en fonction de la nature des substances consommées ou en fonction de l’intensité de la consommation − et la manifestation d’actes de violence chez les jeunes en milieu scolaire.
11Pour les jeunes en milieu scolaire, c’est donc plutôt entre expérimentation et consommation occasionnelle que se situe le modèle de consommation.
Les décrocheurs
12Les résultats recueillis dans l’étude montrent une prévalence de consommation plus élevée chez les jeunes décrocheurs que chez les jeunes en milieu scolaire, et ce, à tous les points de vue. Ainsi, la presque totalité (plus de 98 %) des jeunes décrocheurs, garçons et filles, ont consommé au moins une fois dans leur vie de l’alcool ou du cannabis. La prévalence de la consommation d’alcool et de cannabis au cours des 12 mois est aussi très élevée tant pour les garçons (89,2 %) que pour les filles (86,5 %) de ce sous-groupe. Le tiers des jeunes décrocheurs consommateurs d’alcool (31,7 %) admettent en consommer quotidiennement, et 22 % estiment en être dépendants. Ces proportions sont plus importantes chez les consommateurs de cannabis. Elles s’établissent à 66 % pour ce qui est de la consommation journalière et à 49 % pour le sentiment de dépendance. Dans le cas des autres drogues, ces proportions varient grandement. Elles touchent 60 % des consommateurs d’héroïne dans les deux cas, 17,2 % des consommateurs d’hallucinogènes, encore ici dans les deux cas, et respectivement 28,6 % et 26,2 % des consommateurs de cocaïne ou de crack, et 10 % et 12,5 % des consommateurs d’amphétamines.
13Pour le plus grand nombre des jeunes décrocheurs, c’est manifestement entre consommation régulière et défonce que se répartit la consommation de substances psychoactives.
Les jeunes contrevenants
14Comme les jeunes décrocheurs, la quasi-totalité des jeunes contrevenants admettent avoir consommé de l’alcool et du cannabis au moins une fois au cours de leur vie. La prévalence de la consommation à vie des autres drogues est moins forte chez les jeunes contrevenants. Cependant elle excède largement celle rapportée par les jeunes en milieu scolaire et même par les jeunes décrocheurs. Ainsi, 69 % des jeunes contrevenants disent avoir déjà pris des hallucinogènes, 56 % avoir fait l’essai des amphétamines, 49 % de la cocaïne, 33,2 % du crack, et 8 % de l’héroïne. Contrairement à ce qui a été observé chez les jeunes des deux autres sous-groupes, les jeunes contrevenants de sexe masculin qui ont rapporté avoir fait l’expérience d’une quelconque substance psychoactive sont toujours proportionnellement plus nombreux que les jeunes contrevenants de sexe féminin.
15La prévalence de consommation au cours des 12 mois précédant l’entrée du jeune dans un centre jeunesse, pour chacune des drogues étudiées, se distribue sensiblement de la même façon que la prévalence à vie, avec seulement un léger écart de pourcentage (jamais plus de 5 %). Plus du tiers (39,6 %) des jeunes contrevenants consommateurs d’alcool admettent en faire usage quotidiennement. Toutefois, moins du quart d’entre eux (23,6 %) estiment en être dépendants. Plus des trois quarts (76,5 %) des jeunes contrevenants consommateurs de cannabis disent en consommer journalièrement, et plus de la moitié (51,2 %) affirment en être dépendants. Plus du quart (27,5 %) des jeunes contrevenants affirment consommer quotidiennement des hallucinogènes, 20,5 % des amphétamines, 12,5 % de l’héroïne. La consommation de cocaïne de crack mérite une mention particulière puisque plus de 40 % (45,2 %) des jeunes contrevenants disent faire un usage quotidien de la cocaïne et que près de 30 % (29,6 %) d’entre eux affirment prendre quotidiennement du crack. Le sentiment de dépendance aux drogues dures ressenti par les jeunes contrevenants paraît varier grandement en fonction de la substance. Il toucherait 19,6 % des consommateurs d’hallucinogènes, 17,3 % des consommateurs d’amphétamines, 46,2 % des consommateurs de cocaïne, 26,8 % des consommateurs de crack et 18,8 % des consommateurs d’héroïne.
16Pour les jeunes décrocheurs comme pour les jeunes contrevenants, on peut donc parler d’une consommation qui se rapproche le plus souvent de la défonce.
17Ces données concordent avec celles de Guyon et Desjardins (2005), tirées des résultats de l’Enquête québécoise sur le tabagisme menée par l’Institut de la statistique du Québec, lequel, contrairement à ce qu’on pourrait penser, s’intéresse aussi aux habitudes de consommation d’alcool et de drogues des adolescents des deux sexes du milieu scolaire. Elles s’accordent aussi avec celles de Toupin et autres (2004) et avec celles de Laventure, Déry et Pauzé (2008), qui concernent les jeunes contrevenants en centre jeunesse. À notre connaissance, aucune étude de ce genre n’a été menée sur les jeunes décrocheurs.
18L’étude de Roy, Haley, Leclerc et Boivin (2005) a, de son côté, permis de suivre une cohorte de 1 013 jeunes de la rue d’âge mineur et de documenter à partir d’un questionnaire préétabli leurs conditions et leurs modes de vie durant une période déterminée. Ces jeunes étaient rencontrés tous les six mois, autant que faire se pouvait, jusqu’à leur majorité. Les résultats de cette étude sont semblables à ceux obtenus par Bellot (2002), lequel utilise une méthodologie différente fondée sur une observation anthropologique d’une durée de trois ans et des entrevues semi-dirigées avec des jeunes sollicités au hasard des rencontres avec le chercheur durant la période étudiée. À cause de leurs conditions d’existence difficiles, les jeunes de la rue ont tendance à commettre des délits pour assurer leur subsistance et leur consommation de substances psychoactives. Ils s’exposent ainsi au phénomène que Bellot a appelé la contraventionnalisation ou simplement à une arrestation en bonne et due forme.
LES ADULTES ET LA CONSOMMATION DE SUBSTANCES PSYCHOACTIVES : ENTRE INTÉGRATION SOCIALE ET DÉVIANCE
La population générale
19Deux enquêtes importantes permettent de connaître la consommation de substances psychoactives dans la population générale du Québec. La première, l’Enquête sociale et de santé 1998, réalisée par l’Institut de la statistique du Québec (1998), fait suite à l’Enquête Santé Québec 1987 et à l’Enquête sociale et de santé 1992-1993. La collecte des données de l’Enquête sociale et de santé 1998 s’est déroulée de janvier à décembre 1998 auprès de 11 986 ménages (représentant 20 773 personnes âgées de 15 ans et plus) de toutes les régions sociosanitaires du Québec, à l’exception des régions habitées par les Cris et les Inuits.
20La seconde, l’Enquête canadienne sur l’alcool et les autres drogues, a été réalisée entre le 7 septembre et le 5 novembre 1994 par Statistique Canada et a été publiée par Santé Canada (1997). La population visée se composait de personnes âgées de 15 ans et plus habitant au Canada, à l’exclusion des résidants du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest et des personnes détenues à plein temps. Pour le Québec, on a obtenu des réponses de 2 225 ménages. Il est donc possible d’analyser certains des résultats de cette enquête pour le Québec. Le tableau de la consommation de substances psychoactives des adultes québécois s’appuie donc sur des données relativement anciennes et l’on sait que les taux de prévalence varient énormément d’une décennie à l’autre.
L’alcool
21Selon l’Enquête sociale et de santé 1998, quatre Québécois sur cinq (81 %) appartiennent à la catégorie des buveurs proprement dit, c’est-à-dire qu’ils indiquent avoir consommé au moins une fois de l’alcool au cours des 12 mois précédant l’enquête (Institut de la statistique du Québec, 1998). Dans cette enquête, comme dans celles qui l’ont précédée, la proportion des buveurs varie en fonction du sexe (hommes = 86 % ; femmes = 77 %) et du groupe d’âge (la proportion la plus élevée de buveurs se retrouve chez les personnes âgées de 15 à 44 ans). En comparant ces résultats avec ceux des deux enquêtes précédentes menées par Santé Québec, on constate que la proportion de buveurs a légèrement augmenté entre les années 1992-1993 (79 %) et 1998 (81 %). Les buveurs de 15 ans et plus au Québec déclarent avoir pris en moyenne près de cinq consommations au cours d’une semaine. Plus précisément, plus du tiers (37 %) affirment ne pas avoir consommé d’alcool durant cette période, un peu plus d’une personne sur trois (38 %) rapporte avoir bu de 1 à 6 consommations, 15 % avoir pris de 7 à 13 consommations et 10 % 14 verres ou plus. Les données de Santé Canada (1997) permettent de constater que la proportion de buveurs au Québec (74 %) dépasse très légèrement la proportion canadienne (72 %). Toutefois, selon le Centre canadien de lutte à la toxicomanie (1999), la quantité d’alcool consommée par personne au Québec par année serait inférieure à la moyenne nationale (7 litres chez les Québécois, comparativement à 7,6 litres pour l’ensemble des Canadiens âgés de 15 ans et plus).
Les médicaments
22L’Enquête sociale et de santé 1998 traite également de la consommation de médicaments psychotropes. Elle indique que les hommes dominent dans la consommation d’alcool alors que les femmes prennent plus de psychotropes licites qu’eux. Ainsi, sur une période type de deux jours et dans la majorité des groupes d’âge, la proportion d’utilisateurs est plus élevée chez les femmes que chez les hommes (5,6 % contre 3,2 %). La comparaison des données actuelles avec celles des enquêtes précédentes révèle que la proportion de Québécois consommateurs de tranquillisants, de sédatifs et de somnifères, toutes catégories confondues, a diminué régulièrement depuis 1987 (4,4 % en 1998 contre 5,1 % en 1987 et 4,5 % en 1992). Les résultats de l’Enquête nationale sur l’alcool et les autres drogues (1994) montrent, de leur côté, que l’usage de tranquillisants semble plus répandu au Québec que dans les autres provinces du Canada (respectivement 6,8 % et 4,4 %). Il serait toutefois hasardeux de comparer les données de ces deux enquêtes, car l’Enquête nationale sur l’alcool et les autres drogues considère uniquement la consommation de médicaments sous ordonnance et l’Enquête sociale et de santé 1998, s’intéresse à la consommation des médicaments obtenus de façon licite ou illicite.
Les drogues illicites
23Selon les données de l’enquête nationale la plus récente, le cannabis constitue la substance psychoactive illicite la plus consommée avec un taux d’usage annuel de 13,5 % (Chevalier et Lemoine, 2001). Moins de 5 % des Québécois rapportent avoir fait usage des autres substances prohibées à au moins une occasion au cours des 12 mois précédant l’enquête. La prévalence de la consommation du cannabis a augmenté plus fortement que celle des autres substances illicites entre 1992-1993 (8,2 %) et 1998 (13,5 %). Bien que les taux de prévalence de consommation aient tendance à fluctuer d’une décennie à l’autre, on observe cependant certaines constantes : un peu plus d’un Québécois sur 10 avoue avoir consommé une substance illicite au cours de l’année précédant l’enquête (Chevalier et Lemoine, 2001). Le cannabis demeure la substance psychoactive illicite la plus consommée par la population québécoise de 15 ans et plus (Chevalier et Lemoine, 2001). C’est la consommation des amphétamines qui a augmenté le plus au cours de la dernière décennie, mais elle demeure très marginale au Québec (Bellerose, Lavallée et Camirand, 1994 ; Chevalier et Lemoine, 2001). La plupart des utilisateurs de drogues prohibées sont âgés de 18 à 24 ans (40 %) et, après la mi-vingtaine, la prévalence de consommation diminue significativement (Chevalier et Lemoine, 2001 ; Adlaf, Bégin et Sawka, 2005).
24La consommation expérimentale de cannabis chez les adolescents est depuis longtemps assez bien acceptée en tant qu’expérience, mais il en va autrement chez les adultes qui ont conservé cette habitude. Ces derniers sont généralement considérés comme des déviants ou des marginaux. Toutefois, une étude récente indique que certains consommateurs réguliers de cannabis pourraient très bien mener une vie « normale », c’est-à-dire exercer un travail et mener une vie sociale active. Cette étude, qui paraîtra sous peu et qui est dirigée conjointement par Pat Erickson, pour le Canada, et les deux auteurs du présent chapitre pour le Québec, s’est inspirée des recherches de Howard Parker sur la normalisation apparente de l’usage des drogues illicites en Grande-Bretagne (Parker, Williams, Aldridge, 2002 ; Parker, 2005). Le cannabis y est vu comme un élément faisant partie d’un style de vie adapté. La consommation de cannabis doit plutôt être considérée comme une affaire de goût, comme une activité de loisir parmi d’autres ; il s’agit d’un risque calculé (Parker, Aldridge et Measham, 1998). Cette manière de voir diffère de l’attitude habituelle qui associe l’usage de drogues illicites à la sous-culture ou à l’affiliation.
Les personnes détenues
25Les personnes contrevenantes sont davantage attirées par la consommation de drogues illicites que l’ensemble de la population et présentent des taux de prévalence de dépendance beaucoup plus élevés (Brochu, 2006). Ainsi, la moitié des détenus adultes incarcérés au Centre régional de réception1, au centre de détention de Montréal2 ou à la Maison Tanguay3 rapportent avoir fait usage de drogues illicites dans les six mois précédant leur incarcération (Pernanen, Cousineau, Brochu et Sun, 2002). Bien plus, près du tiers des personnes incarcérées dans ces lieux de détention affirment avoir été sous l’influence d’une drogue illicite au moment de commettre le crime le plus grave pour lequel elles ont été condamnées. Les drogues les plus fréquemment consommées dans la journée où a eu lieu le crime pour lequel la personne a été arrêtée sont le cannabis et la cocaïne. Parmi les hommes gardés en prison et les femmes détenues à la Maison Tanguay, la consommation de cocaïne (respectivement 24 % et 25 %) est plus fréquemment rapportée que celle de cannabis (13 % et 9 %) au cours de la journée du crime. La situation est quelque peu différente pour les hommes incarcérés au Centre de détention de Montréal, puisque les proportions des consommateurs qui avouent avoir pris du cannabis et de la cocaïne y sont respectivement de 22 % et de 15 %. Ensemble, les autres drogues n’auraient été consommées que par un peu plus de 10 % des détenus rencontrés. Non seulement la moitié des détenus se trouvaient sous l’effet d’une substance psychoactive au moment de la perpétration de leur crime, mais près d’un détenu sur cinq affirme avoir commis celui-ci dans le but de se procurer sa drogue. Les résultats à l’ADS (Alcohol Dependance Scale) et au DAST (Drug Abuse Screening Test) indiquent que près du tiers d’entre eux auraient acquis une dépendance à une drogue illicite, ce qui expliquerait en grande partie leur implication dans des activités criminelles lucratives.
26On pourrait croire que la prison bouscule les habitudes de consommation de drogues illicites des détenus. Plourde et Brochu (2002) ont voulu en savoir davantage en allant interroger 317 détenus dans un pénitencier fédéral du Québec. Ils ont constaté que, pour la grande majorité des détenus, l’incarcération enraye ou réduit l’usage de substances psychoactives. Un certain nombre d’irréductibles, moins du tiers, consomment de la drogue malgré la surveillance dont ils font l’objet et les mesures mises en place par les Services correctionnels du Canada en vue d’empêcher les drogues d’entrer dans les pénitenciers. Bonne nouvelle, les détenus consommateurs de drogues en prennent moins fréquemment que lorsqu’ils étaient en liberté, et en plus petites quantités. La drogue la plus consommée est non pas la cocaïne, comme lorsqu’ils étaient en liberté, mais le cannabis, même s’il se détecte plus facilement en raison de son odeur et de la durée de sa demi-vie dans les urines. Le prix plus accessible du cannabis et ses effets apaisants expliquent en partie cette préférence.
27En somme, quoique des données récentes donnent à penser qu’il est possible de consommer régulièrement certaines drogues illicites tout en étant bien intégré à la société, les études menées sur les détenus montrent clairement que ces derniers sont nombreux à consommer de la drogue et que l’usage de celle-ci est souvent mal géré. Les détenus ne se limitent généralement pas au cannabis et plusieurs éprouvent des problèmes réels de dépendance, ce qui les entraîne parfois dans des conflits avec la loi. Notre manière de voir la consommation de drogues illicites chez les adultes s’est donc nuancée au cours des dernières années. Ainsi, alors que la consommation de drogues illicites était perçue dans le passé comme l’apanage du déviant ou du marginal, on est enclin maintenant à penser qu’elle peut s’intégrer harmonieusement dans un style de vie. Toutefois, le criminologue travaille rarement avec des personnes qui arrivent à bien gérer leur consommation et c’est plutôt ceux qui en éprouvent les conséquences néfastes, les déviants et les marginaux, que nous côtoyons. Ces résultats de prévalence nous amènent à penser qu’il existe une relation entre la consommation de substances psychoactives et la criminalité, et nous tenterons de définir cette relation plus loin. Les travaux menés par notre équipe montrent toutefois qu’il est difficile de cerner avec précision cette relation sans la surestimer ou la sous-estimer (voir Pernanen, Brochu, Cousineau et Sun, 2002).
RELATIONS DROGUES-CRIME
28Il y a 50 ans, peu de personnes s’interrogeaient sur la nature des relations drogues-crime. On considérait tout simplement que l’individu qui enfreignait les lois relatives aux drogues interdites était un criminel. Dans les années 1980, sous l’impulsion de Goldstein (1985), un chercheur américain, la recherche dans le domaine s’est développée. L’analyse des écrits scientifiques sur le sujet permet de distinguer deux grandes conceptions liées à deux époques récentes. À l’instar d’une photographie, le premier type d’explication, le plus classique et le plus global, formulé dans les années 1980 à la suite des travaux de Goldstein, envisage les relations proximales drogues-crime de façon statique. Les relations drogues-crime sont considérées sous trois aspects : 1) l’aspect psychopharmacologique ou d’intoxication ; 2) l’aspect économico-compulsif ou de dépendance ; et 3) l’aspect systémique ou de distribution illicite des drogues. Un deuxième modèle, apparu dans les années 1990, s’intéresse plutôt aux liens distaux qui unissent drogues et crime à un ensemble d’autres facteurs bio-psycho-sociaux, qui correspondent à des facteurs de risque.
29C’est essentiellement à la suite d’études portant sur des adultes qu’ont été élaborées les théories explicatives de la relation drogues-crime, mais à la fin des années 1990, des recherches consacrées aux personnes d’âge mineur nous ont fait progresser dans la compréhension de la relation drogues-crime.
L’aspect psychopharmacologique
30L’intoxication à certaines substances psychoactives produit des altérations de la pensée, des sensations et des perceptions, et conduit parfois à des comportements violents qui n’auraient normalement pas lieu. Certains affirment même que l’intoxication provoque la désinhibition. L’intoxication à l’alcool aurait pour effet de réduire les contraintes internes. Toutefois, il faut bien le dire, les preuves à l’appui de cette thèse sont inversement proportionnelles à sa popularité (Brochu, 1997).
31Ce sont surtout les substances perturbatrices (entre autres le PCP) ou stimulantes (crack, cocaïne, amphétamines) qui sont mises en cause. Cependant, il faut savoir que, parmi toutes ces substances, seul l’alcool est statistiquement associé à la violence (Roth, 1994). Ainsi, depuis des dizaines d’années, la recherche a clairement montré que la consommation d’alcool précède ou accompagne environ la moitié des crimes violents tels que les voies de fait, les agressions sexuelles et les homicides (Brochu et autres, 2001). La recherche a également montré que l’alcool pouvait induire de l’agressivité lorsque les consommateurs étaient dans des situations où ils se sentaient menacés ou provoqués (Pihl et Ross, 1987).
32Une variante de ce type d’explication veut que la personne recherche l’intoxication pour réaliser un but déterminé. Ainsi, un contrevenant pourra s’intoxiquer pour se donner du courage ou calmer sa nervosité avant la perpétration d’un crime déjà planifié. D’autres personnes, étant donné le rôle symbolique et culturel joué par certaines substances, peuvent se servir de l’intoxication comme d’une excuse commode face à un acte socialement réprouvé (Brochu, 2006).
33Dans sa version originale, l’explication psychopharmacologique indiquait que la substance provoque le crime. Dans ses variables plus récentes, l’intoxication constitue plutôt un outil (au même titre qu’une arme ou un déguisement) pour arriver à des fins précises (Brochu, 2006).
L’aspect économico-compulsif
34Au Québec, des drogues telles que la cocaïne et, plus rarement, l’héroïne sont parfois prises de façon compulsive, notamment par voie intraveineuse. De nos jours, un consommateur compulsif peut dépenser facilement près de 2 000 $ par mois pour l’achat de drogues (Brochu et Parent, 2006). Les crimes commis par certains usagers qui ne parviennent plus à gérer leur consommation peuvent s’expliquer par le besoin d’argent résultant d’un usage abusif ou, à tout le moins, excessif par rapport à leurs revenus licites. On peut supposer qu’il existe un lien synergique entre un milieu prohibitionniste qui tend à pousser les prix de certaines drogues à la hausse, une substance (et un mode de consommation) qui incite à un usage compulsif et un utilisateur impécunieux incapable de satisfaire ses besoins en drogue. Ce rapport dynamique favoriserait l’implication dans une criminalité de nature lucrative. On peut penser que les revenus licites de bon nombre de ces consommateurs (généralement moins de 20 000 $ par année) sont insuffisants (Brochu et Parent, 2006). D’ailleurs, la majorité (74 %) des gros consommateurs disent avoir contracté des « dettes de drogue ». Le milieu du trafic de la drogue offre aux consommateurs endettés en quête de gains rapides des moyens illicites leur permettant de rembourser leurs dettes.
35Toutefois, les consommateurs de cocaïne ou d’autres drogues ne s’accrochent pas tous au produit de façon compulsive. Certains ont des revenus suffisants pour satisfaire leur consommation, d’autres trouveront des moyens de restreindre leur usage, utiliseront des substituts moins coûteux ou arrêteront, pendant une période plus ou moins longue, de consommer. La dimension économico-compulsive de la drogue ne touche donc pas tous les consommateurs ni tous les dépendants, même dans un contexte de prohibition (Brochu et Parent, 2006).
36Par ailleurs, les travaux de Brunelle et de ses collaborateurs (2000, 2002 et 2005) montrent que, chez les jeunes consommateurs sans ressources, il n’est pas nécessaire que la dépendance à des drogues coûteuses soit installée pour qu’une forme de criminalité lucrative se manifeste. Une consommation régulière de cannabis ou même d’alcool pourrait suffire.
37Dans une de nos récentes études, nous avons interrogé des jeunes contrevenants de la grande région de Montréal (n = 239) et de Toronto (n = 162) sur leur consommation de drogues et leurs gestes violents. Sur une période typique de 30 jours, les jeunes consommateurs montréalais ont affirmé avoir acheté en moyenne pour 887 $ de drogues alors que les jeunes usagers torontois auraient déboursé en moyenne 1 108 $. Ce sont des somme énormes pour des jeunes qui ont habituellement peu de revenus.
L’aspect systémique
38Parallèlement à la prohibition des drogues interdites et à la répression des consommateurs, un système de distribution de ces substances qui partage (bien inégalement, il faut le dire) les profits de ce commerce illicite s’est mis en place. Ce système de distribution, qui échappe à tout contrôle étatique officiel, engendre de la criminalité du fait de son caractère parallèle. Les consommateurs qui fréquentent le milieu de la drogue sont parfois entraînés à commettre des crimes qui s’expliquent non pas par l’intoxication ou la dépendance, mais plutôt par les exigences du marché clandestin et du milieu de la déviance qui y est associé.
39La vente de drogues donne lieu à des disputes concernant le territoire de vente, la mauvaise qualité de la drogue ou le remboursement d’une dette. À Montréal, parmi les jeunes trafiquants, ce sont les disputes à propos du territoire qui paraissent entraîner le plus de violence (41 % des incidents les plus graves liés au marché de la drogue). Vient ensuite le remboursement des dettes des clients qui est associé à 27 % des incidents violents les plus graves vécus par les jeunes. Enfin, la violence peut être employée pour punir un trafiquant ou se venger à la suite d’un vol de marchandise ou de l’achat d’une drogue de mauvaise qualité, ce qui représente 20 % des incidents violents liés au marché de la drogue.
40Notre étude menée auprès des jeunes contrevenants de la région de Montréal indique que l’aspect psychopharmacologique explique le plus grand nombre d’incidents violents relatés (25 %), suivi de l’aspect systémique (14 %) et de l’aspect économico-compulsif (3 %). Mentionnons qu’une proportion appréciable d’événements violents est liée à plus d’un modèle (intoxication et systémique : 11 % ; intoxication et besoin de se procurer une drogue : 4 % ; systémique et économico-compulsif : 4 % ; et intoxication, recherche d’un moyen d’assurer la consommation et mode d’action violent propre au trafic de la drogue : 9 %).
Les aspects distaux : facteurs de risque et de protection
41Le modèle constitué par les trois types de liens drogues-crime qui viennent d’être décrits, quoique essentiel pour comprendre le phénomène, apparaît trop statique. À la fin des années 1980, Fréchette et Le Blanc (1987) ont montré que les comportements criminels (tout comme l’abus de drogue) étaient inégalement distribués dans la population, puisqu’un petit nombre d’adolescents étaient responsables d’une forte proportion des comportements déviants. Comme on voulait déterminer ce qui différenciait ces jeunes, une série d’études sur les facteurs de risque ont été réalisées. Ainsi, depuis une vingtaine d’années, plusieurs études ont lié l’abus d’alcool ou de drogue et la délinquance à des facteurs de risque (voir notamment : Brochu et Schneeberger, 2001 ; Vitaro, Brendgen, Ladouceur et Tremblay, 2001 ; Vitaro et autres, 2000) d’ordre biologique (hérédité), psychologique (troubles de personnalité, inadaptation scolaire, professionnelle et sociale, etc.), contextuel (milieu familial inadéquat, rupture de liens avec les milieux de socialisation, affiliation à des groupes de déviants, etc.) ou social (pauvreté, chômage endémique, logement insalubre, etc.).
42Ces études présentent une vision beaucoup plus dynamique des liens drogues-crime. Ainsi, on y apprend que les comportements antisociaux se développent en grappes ; entre autres, un adolescent qui s’insère dans une trajectoire de violence aura tendance à commettre du vandalisme et des vols et à faire usage de substances psychoactives (Côté et autres, 2006 ; Nagin et Tremblay, 1999 ; Van Lier et autres, 2009). Les amis ou les « contacts », et surtout les gangs, sont souvent à l’origine des comportements déviants (Gatti, Tremblay, Vitaro et McDuff, 2005 ; Vitaro et autres, 2000).
43Toutefois, il faut être prudent et éviter les généralisations hâtives, car les jeunes qui s’insèrent dans une trajectoire de violence physique ne commettent pas tous des actes de vandalisme ou n’abusent pas tous des substances psychoactives (Van Lier et autres, 2009). Plusieurs jeunes affiliés à un gang n’y demeurent pas longtemps (Craig, Vitaro, Gagnon et Tremblay, 2002 ; Gatti, Tremblay, Vitaro et McDuff, 2005). Il est à cet égard important de bien comprendre la dynamique des facteurs de protection dans ces modèles d’insertion antisociale (Lacourse et autres, 2006). En d’autres termes, l’exposition à des facteurs de risque n’entraîne pas nécessairement l’apparition de comportements déviants :
Il est en effet probable que certains individus ne manifestent pas les difficultés attendues malgré une exposition à un environnement hautement à risque […]. Ces enfants possèdent des caractéristiques personnelles, familiales et sociales particulières qui agissent comme des facteurs de protection. (Vitaro et autres, 2000 : 302)
44En effet, un ensemble d’éléments de protection peuvent faire contrepoids aux facteurs de risque. Ainsi, certaines dispositions et valeurs prosociales, certaines capacités de résolution et de gestion de problème, le développement d’une solide relation affective avec un des parents ou un substitut significatif, ainsi qu’un milieu aidant constituent une toile de fond sur laquelle les facteurs de risque n’ont qu’une faible prise (Vitaro et autres, 2000). À l’instar des facteurs de risque, les facteurs de protection n’ont pas tous le même poids, et certains joueront un rôle plus déterminant que d’autres (Vitaro et autres, 2000).
45L’interaction entre facteurs de risque et facteurs de protection rend la relation dynamique. L’entrée dans la déviance se fait graduellement (Lanctôt, Bernard et Le Blanc, 2002 ; Le Blanc et Loeber, 1998) : les transgressions sont d’abord légères, puis elles deviennent de plus en plus graves. On débute par la désobéissance, on passe ensuite à la tromperie et plus tard à la violence ; la rébellion précède la délinquance contre les biens. La consommation de substances psychoactives illicites survient plus ou moins tardivement selon que l’usage est banalisé ou fortement réprimé. Ainsi, la consommation de cannabis, plus acceptée socialement, précède la consommation d’héroïne, qui fait l’objet d’un tabou social beaucoup plus grand. La consommation de cannabis apparaît généralement plus tôt que les vols par effraction, beaucoup plus réprimés socialement.
46Des études portant spécialement sur les chevauchements des trajectoires de consommation et de criminalité ont montré que la relation drogues-crime n’est pas caractérisée par l’immuabilité (Brochu et Parent, 2006 ; Brunelle, Brochu et Cousineau, 2000 ; Brunelle, Cousineau et Brochu, 2002 et 2005). On observe une modification plus ou moins importante des liens drogues-crime au fil de l’évolution personnelle. Aux différentes étapes de la vie du consommateur, de multiples interactions peuvent influer sur son cheminement et, bien sûr, sur la relation drogue-crime le concernant. Un usager irrégulier de substances illicites peu dépendogènes et peu coûteuses n’entraîne le plus souvent qu’une criminalité qui est liée à la possession de drogues, quand elle ne s’explique pas par un mode de vie antérieur à la consommation. Plusieurs usagers réguliers de drogues coûteuses vont, quant à eux, en faire le trafic afin de réduire les coûts de leur consommation, d’avoir accès à une drogue de qualité supérieure ou de rendre service à leur entourage. Enfin, certains usagers sans ressources dépendants de drogues coûteuses peuvent se livrer à une criminalité lucrative une fois qu’ils ont épuisé tous les autres moyens dont ils disposaient (vendre ses biens, se priver de nourriture, emprunter de l’argent, utiliser des produits substituts moins chers à l’achat, etc.) (Brochu et Parent, 2006).
47Le Blanc (2009) s’est intéressé au phénomène de la persistance des comportements déviants qui ont été acquis pour certains dès la petite enfance et qui se sont maintenus à l’adolescence et à l’âge adulte. S’appuyant sur une importante banque de données longitudinales et se fondant sur la théorie du chaos, il conclut que le développement des comportements déviants suit une courbe en U inversée dont l’ampleur varie selon les individus, mais qui culmine ordinairement au moment de l’adolescence, période au cours de laquelle la consommation de substances psychoactives et la délinquance, notamment, s’influencent mutuellement à des degrés divers suivant l’état de développement des systèmes de contrôle internes et externes qui contribuent à former l’identité de la personne. Tant dans cette étude que dans celle qu’il a menée avec des collègues (Kazeminian, Farrington et Le Blanc, 2009), la consommation, et plus spécialement l’abus de substances psychoactives, apparaît comme un élément significatif, voire comme un des meilleurs prédicteurs connus à ce jour – avec la fréquentation de groupes déviants et les inculpations antérieures – de l’évolution de la « carrière délinquante ».
LES PRATIQUES JUDICIAIRES ET PÉNALES EN MATIÈRE DE DROGUES AU CANADA
48De nombreux rapports indiquent que l’usage des drogues, et particulièrement des drogues illicites, a un impact majeur sur la vie des citoyens. En 2001, la vérificatrice générale du Canada a signalé qu’ils engendrent des coûts économiques et sociaux importants liés notamment aux soins de santé, à la perte de productivité et à la criminalité. Elle précisait qu’en 1999, plus de 50 000 personnes avaient été trouvées coupables pour des infractions liées aux drogues, qu’environ 400 000 comparutions avaient rapport avec ces infractions et que 90 % de celles-ci concernaient la possession ou le trafic de cannabis et de cocaïne. Elle estimait, en outre, à 19 % la proportion des contrevenants dans le système correctionnel qui purgeaient des peines pour des infractions liées aux drogues, et à 60 % la proportion des détenus fédéraux atteints de toxicomanie.
49Dans un Juristat portant sur les tendances des infractions relatives aux drogues déclarées par la police au Canada, Dauvergne (2009) a indiqué que les infractions étaient en hausse depuis 1993 et qu’elles avaient culminé en 2007, avec plus de 100 000, le point le plus élevé en 30 ans. Les taux d’infractions relatives aux drogues déclarées par la police étaient nettement plus élevés en Colombie-Britannique, au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut qu’au Québec et dans les autres provinces du Canada. Il s’agissait essentiellement d’infractions liées à la possession (comptant pour 67,6 %), d’accusations de trafic (représentant 23,3 % de l’ensemble) et d’accusations de production, d’importation et d’exportation (9,1 %). Le Québec et la Colombie-Britannique se distinguent toutefois au chapitre des accusations de production, importation et exportation avec un taux par 100 000 habitants nettement au-dessus de la moyenne nationale (44,4 et 60,3 respectivement contre 27,8 pour l’ensemble du Canada). Les substances en cause sont principalement le cannabis (comptant pour 62,0 % des mises en accusation), la cocaïne (22,7 %), des drogues telles que le crystal meth, l’ecstasy, le LSD, les barbituriques, les drogues de synthèse, etc. (14,4 %), les infractions liées à l’héroïne étant vraiment exceptionnelles (0,8 %). Les jeunes entre 15 et 24 ans constituent une bonne proportion des auteurs présumés de ces infractions et contribuent significativement à la hausse mentionnée plus haut. Dauvergne souligne que les infractions liées aux affaires de drogues peuvent être considérées pour la plupart comme mineures ; le tiers d’entre elles consistent dans le défaut de se conformer à une ordonnance ou un manquement aux conditions de probation. Il faudrait à cet égard envisager la possibilité de revoir les conditions imposées par les juges comme mesures de rechange à l’incarcération, telles que celle qui consiste à s’abstenir de consommer. Dauvergne (2009) signale par ailleurs que la moitié des causes judiciaires d’infractions relatives aux drogues font l’objet d’un arrêt, d’un retrait, d’un rejet ou d’une absolution, dans le cas des adultes inculpés, et d’une mesure autre que la mise en accusation – principalement le recours au pouvoir discrétionnaire du policier pour l’application d’une mesure volontaire ou le renvoi à un programme de déjudiciarisation –, dans le cas des jeunes d’âge mineur pris en défaut. L’auteure note qu’il s’agit là d’un changement d’approche, notamment en ce qui concerne les jeunes, ceux-ci ayant été antérieurement plus susceptibles de faire l’objet d’une mise en accusation (soit 58 % en 1997, comparativement à 38 % en 2007). On ne sait toutefois pas quel effet auraient eu ces changements de pratique sur le taux des infractions liées aux drogues.
50Notons finalement qu’un sondage récent mené auprès d’un échantillon représentatif de la population québécoise (Guay, 2009) a montré que, pour 89 % des Québécois, la consommation de drogues représente un problème social important. Une majorité des répondants (57 %) étaient d’avis que la judiciarisation des personnes en possession de marijuana constituait une mesure propre à « régler le problème des drogues au Québec ». Le sondage a par ailleurs montré que les Québécois étaient peu renseignés sur le problème, et en particulier sur tout ce qui concerne la production de drogues et ses conséquences. La très grande majorité des répondants (87 %) considéraient que la production était liée au crime organisé.
51Il reste donc beaucoup à faire pour mieux connaître et faire connaître les lois, les politiques et les pratiques entourant le contrôle des drogues au Canada.
UN CONTINUUM D’INTERVENTION
52La répression, à elle seule, n’arrivera jamais à enrayer le phénomène de la dépendance à la drogue. Ce constat a tôt fait de stimuler des initiatives préventives et curatives, il y a une cinquantaine d’années, afin d’endiguer les problèmes éventuels d’alcoolisme et de toxicomanie. En fait, les premiers traitements de la toxicomanie ont été mis sur pied bien avant l’apparition des initiatives préventives. Le Québec, à l’époque de ces premiers traitements, appliquait un modèle médico-religieux. On traitait l’alcoolique et le toxicomane comme des êtres impurs ou malades ou on enfermait l’ivrogne dans une cellule pour l’aider à se dégriser. Avec la fin de l’hégémonie catholique sur les institutions de santé et de services sociaux, le modèle de la maladie, soutenu par les mouvements d’entraide (principalement les Alcooliques Anonymes), s’est imposé dans le traitement. Selon ce modèle, la seule réadaptation possible passe par l’abstinence, et l’évaluation de l’efficacité des services offerts utilisait cette seule variable dépendante (Nadeau, 1988).
53Avec les années 1980 est apparu le concept tout à fait révolutionnaire de réduction des méfaits (Brisson, 1997 ; Gillet et Brochu, 2006), qui offrait une solution de rechange à l’objectif suprême d’une vie complètement sobre. En fait, en s’appuyant sur des principes d’humanisme et de pragmatisme, les actions qui découlent de cette manière de voir ont plutôt pour but de réduire au minimum les conséquences négatives de la consommation sans insister sur l’atteinte de l’abstinence. Graduelle ment, plusieurs centres publics de réadaptation pour personnes dépendantes du Québec ont adopté des objectifs de traitement compatibles avec la réduction des méfaits (Landry et Lecavalier, 2003). Toutefois, l’évolution du mode de traitement de la toxicomanie, bien appuyé par des études scientifiques (Orsi et Brochu, 2009), a amené la rupture de l’union qui s’était établie graduellement entre justice et traitement en vue de la recherche d’une solution de rechange à l’incarcération des personnes contrevenantes et toxicomanes (Schneeberger et Brochu, 2000 ; Brochu et Schneeberger, 2001, 2002). En effet, comment un agent de probation peut-il accepter un objectif de consommation modérée de cannabis de la personne dépendante de la cocaïne dont il a la charge ? Ainsi, même si de plus en plus de personnes traitées pour toxicomanie au Québec sont dirigées vers les services concernés par des responsables de la justice ou de la sécurité publique, ces derniers tentent régulièrement d’imposer des objectifs d’abstinence, ce qui va à l’encontre des tendances actuelles en matière de traitement.
54Toutefois, si l’on fait abstraction de ces difficultés de « gestion », il apparaît que les personnes contrevenantes arrivent à régler plusieurs de leurs problèmes, dont celui de la toxicomanie, lorsqu’on leur offre un traitement (Brochu et autres, 2006). La question a donné lieu récemment à un certain nombre d’études qui se sont attachées à cerner la motivation des contrevenants et à définir les moyens propres à établir une relation thérapeutique saine dans un cadre coercitif (Orsi et Brochu, 2009). Ce cadre n’est pas incompatible avec l’établissement d’une saine alliance thérapeutique, mais il demande à l’intervenant des aptitudes spéciales. Le guide fourni par l’entretien motivationnel convient ici parfaitement à ce cadre de traitement « imposé » (Cournoyer, Brochu, Landry et Bergeron, 2007 ; Tétrault et autres, 2007).
55Parallèlement, la prévention a pris son essor dans les années 1980. Dans ce domaine, la pratique a devancé la théorie. D’entrée de jeu, mentionnons que les méta-analyses indiquent clairement que les programmes de prévention contribuent à retarder le début de l’usage et favorisent l’abstinence (Brochu, 2007). Toutefois, les programmes n’ont pas tous la même efficacité. Ainsi, les programmes de prévention les plus souvent appliqués en Amérique du Nord, et au Québec, s’appuient sur le modèle du Drug Abuse Resistance Education, mieux connu sous son acronyme DARE. Ce programme habituellement appliqué par des policiers consiste à présenter de l’information sur les drogues et à inciter les individus à résister à la tentation de consommer. Ces programmes, bien qu’ils améliorent les connaissances des participants concernant les substances les plus consommées se révèlent peu efficaces pour prévenir l’abus des drogues. En effet, la recherche a montré que, pour être efficaces, les programmes de prévention doivent s’appuyer sur la participation active des pairs et sur leur capacité d’influencer de manière positive (Tobler et autres, 2000), ainsi que sur un changement des perceptions et un apprentissage des stratégies concrètes de refus (jeux de rôles, rétroaction, stratégies de résolution de problèmes et renforcement positif de comportements) (Tobler et Stratton, 1997 ; Tobler, 2000 ; Tobler et autres, 2000 ; West et O’Neil, 2004). Ces trois éléments essentiels sont absents des programmes DARE.
56En dépit des multiples analyses démontrant que de nombreux contrevenants, jeunes et adultes, souffrent de problèmes de toxicomanie et que les traitements ont un effet positif sur eux, une faible proportion d’entre eux est détectée et dirigée vers un service approprié. Afin de s’attaquer à cet enjeu majeur, des outils de dépistage ont été mis au point (DEP-ADO/DÉBA-Alcool-Drogues-Jeu) et sont maintenant utilisés par les centres jeunesse du Québec et dans les cours de justice. La mise en œuvre de ces outils ainsi qu’une bonne collaboration entre les chercheurs et les milieux de pratique (écoles, centres de santé et de services sociaux, centres jeunesse, milieux judiciaires, centres privés, semi-privés et publics de traitement de la toxicomanie) ont permis l’établissement, dans plusieurs régions du Québec, d’un réseau intégré de services de détection, d’intervention précoce et de réadaptation, nommé Mécanisme d’accès jeunesse en toxicomanie (MAJT). Les intervenants de première ligne des organismes participants ont appris à utiliser l’instrument de dépistage DEP-ADO et peuvent maintenant diriger les jeunes à risque (les « feux jaunes ») vers un CSSS ou un intervenant social de l’école, et les jeunes toxicomanes (les « feux rouges ») vers un centre de traitement de la toxicomanie. Dans ce derniers cas, un intervenant fera une évaluation complète de la situation du jeune toxicomane et le dirigera ensuite vers le centre de traitement le plus approprié.
57Malgré les progrès importants accomplis au cours des trois dernières décennies au Québec dans le domaine des services, un absent demeure : l’intervention de seconde ligne auprès des personnes à risque de devenir dépendantes. La situation a été résolue grâce à la mise en œuvre du programme Alcochoix+, qui est maintenant offert dans tous les CSLC du Québec. Toutefois, aucun programme équivalent n’est actuellement offert aux consommateurs de drogues illicites à risque. Le contexte prohibitionniste actuel nous empêche peut-être de mettre sur pied un Droguechoix.
58En somme, il est clair que le Québec est en train de mettre sur pied un ensemble de services qui va de la détection précoce, en passant par la prévention, jusqu’aux services de traitement. Dans cet ensemble, le rôle des instances judiciaires est crucial. Le travail en partenariat intégral avec ces derniers doit se faire dans le respect des expertises de chacun et sans chercher à imposer ses propres valeurs ou les restrictions liées à son cadre de fonctionnement.
CONCLUSION
59La recherche criminologique a beaucoup évolué au cours des 50 dernières années. Certains diront que l’évolution était relativement facile puisqu’on est parti de vraiment loin, du néant pour ainsi dire. En fait, l’intérêt pour les drogues existe depuis longtemps en criminologie, mais bien souvent on ne s’intéressait pas suffisamment à celles-ci pour en faire le sujet central d’une étude (voir entre autres Fréchette et Le Blanc, 1987).
60C’est après la réalisation d’études de prévalence qu’on a vraiment commencé à s’intéresser aux drogues. On voulait alors connaître « l’importance des dommages », et les chercheurs ont observé, en allant dans des centres de détention et dans des centres jeunesse, que les drogues occupaient une grande place dans la vie des personnes qui y séjournent. On a voulu ensuite dépasser les liens corrélationnels afin de déterminer en quoi l’usage de substances psychoactives pouvait influer sur la criminalité des contrevenants. On a alors constaté les limites des études quantitatives et on s’est concentré sur les recherches de nature qualitative.
61L’ensemble des études publiées nous indique très clairement que la majorité des jeunes usagers de drogues se limitent à la consommation de cannabis et, pour la plupart d’entre eux, cela demeure une expérience sans conséquences. Rendus à l’âge adulte, une minorité d’entre eux continueront de consommer du cannabis, et la plupart de ceux qui le feront s’intégreront bien au monde des études ou à celui du travail.
62Toutefois, les populations auxquelles s’intéresse la criminologie offrent un tableau très différent. Alors que la normalisation prévaut chez une grande partie des consommateurs québécois, c’est la défonce qui règne chez les clientèles judiciarisées. En fait, un éventail beaucoup plus grand de drogues est consommé tant par les jeunes contrevenants que par les détenus adultes. Non seulement la consommation, mais aussi la dépendance y sont beaucoup plus fortes que dans la population générale. Bien plus, la drogue – par l’intoxication, la dépendance ou le marché illicite qui l’entoure – constitue un facteur important dans le développement de la criminalité tant des jeunes que des adultes.
63Nous avons pu établir un ensemble de facteurs de risque lié à la fois à la criminalité et à l’abus de drogues. Parmi ces facteurs de risque, on trouve la rupture avec les milieux de socialisation. La première institution de socialisation est constituée par la famille. Toutefois, certaines cellules familiales se trouvent dans l’impossibilité de transmettre adéquatement les valeurs sociales communes ; il revient alors à l’école de remédier à cette lacune. Bien sûr, certains jeunes fréquentant l’école consomment des drogues et commettent des gestes délinquants ; on croit même que ces comportements constituent des éléments relativement normaux dans le développement de l’adolescence. Le problème réside plutôt dans l’ampleur des gestes commis et dans nos attitudes face aux comportements déviants bénins.
64L’exclusion ne constitue jamais une réponse adéquate, surtout à des jeunes en mal d’attachement. L’école constitue trop souvent un lieu d’exclusion : certains adolescents sont charroyés d’école en école, ce qui les empêche de former des liens affectifs durables ; d’autres abandonnent à la suite d’échecs et de manifestations d’incompréhension multiples. Quoi qu’il en soit, les études montrent que l’exclusion scolaire constitue, pour bon nombre d’entre eux, une incitation à la déviance. D’ailleurs, l’usage de drogues prend une place beaucoup plus importante dans la vie de ces jeunes que dans celle des autres adolescents. Les temps libres passés en dehors de la famille ou de l’école sont souvent occupés par des activités marginales, pour ne pas dire déviantes. L’exclusion du milieu de socialisation constitue trop souvent une invitation à la déviance. Des occasions de se livrer à des actions criminelles sont alors offertes au jeune en mal de sensations fortes, éprouvant de l’ennui, en quête d’identité ou d’approbation, ou cherchant tout simplement à rembourser ses dettes de drogue. Un capital déviant et parfois même délinquant se forme, et les occasions plus socialement acceptables disparaissent.
65Dans nos études, c’est parmi les jeunes contrevenants que l’on retrouve le plus de consommateurs et de personnes dépendantes de substances psychoactives. Une trajectoire type apparaît. Les jeunes issus de familles où l’on n’est pas parvenu à créer des liens suffisamment forts ou à transmettre des valeurs sociales actuelles peuvent très difficilement être maintenus dans le système scolaire. L’échec et l’abandon scolaire poussent, à leur tour, les jeunes à adopter un mode de vie déviant. Ils incitent l’individu à entrer dans un réseau parallèle.
66Les lois sont toutefois bien impuissantes face à cette trajectoire. La prohibition des drogues et la répression qui l’accompagne constituent parfois des facteurs d’attrait et peuvent contribuer à fixer le jeune dans sa trajectoire déviante. La solution semble résider dans la mise en place de programmes de prévention et de traitement adaptés aux besoins des jeunes. Les programmes qui visent à la réduction des méfaits ont le souci de répondre aux besoins des usagers et se révèlent efficaces pour réduire leurs problèmes de santé et de criminalité. Ainsi, les programmes de prescription médicale d’héroïne aux personnes dépendantes des opioïdes ont fait la preuve qu’ils étaient bien adaptés au contexte québécois (Oviedo-Joekes et autres, 2009) sans pour autant nuire aux habitants du quartier environnant (Lasnier, Brochu, Boyd et Fisher, 2009). Toutefois, certaines attitudes moralisatrices passéistes empêchent encore trop souvent le plein développement de ces programmes. La science demeure encore incapable de faire disparaître des opinions bien ancrées. Lorsqu’il est question de déviance et de criminalité, la punition semble satisfaire bien des gens, même si elle pourrait être remplacée par des moyens plus efficaces et plus légers.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Pénitencier fédéral réservé aux peines de deux ans et plus.
2 Prison pour hommes qui accueille des hommes ayant obtenu des peines de prison de moins de deux ans. Bordeaux prend aussi des prévenus, mais l’étude portait sur les personnes condamnées.
3 Prison pour femmes située à Montréal et accueillant des femmes condamnées à des peines de prison de moins de deux ans.
Notes de fin
1 La bibliographie complète se trouve sur le site Internet des Presses de l’Université de Montréal : www.pum.umontreal.ca
Auteurs
Ph.D. psychologie, Université de Montréal ; professeur titulaire, École de criminologie ; codirecteur, Recherche et intervention sur les substances psychoactives – Québec (RISQ), Université de Montréal.
Ph.D. sociologie, Université de Montréal ; professeure titulaire, École de criminologie, Université de Montréal.
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