2. La Maison l’Escargot : un lieu pour grandir et rêver
p. 36-62
Texte intégral
La Maison l’Escargot accueille des enfants de 3 à 6 ans qui présentent des symptômes associés aux troubles réactionnels de l’attachement. Des situations de carence ou de maltraitance ont considérablement affecté la construction des bases de leur identité : moi corporel, orientation dans le temps et l’espace, gestion de l’anxiété ou capacité à entrer en relation. Des expériences adverses et traumatiques ont aussi entraîné des séquelles de développement. Vécues de façon prolongée, chronique et multiple, le plus souvent dès la petite enfance, ces expériences correspondent à la définition de traumas complexes. Il s’ensuit que des retards importants sont observés dans plusieurs sphères du développement, en particulier sur le contrôle des pulsions, la régulation des affects, les apprentissages sur le plan cognitif, le développement du langage et l’intégration neurosensorielle. Plusieurs enfants souffrent également de problèmes de santé mentale, tels qu’un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité, des troubles anxieux ou un état de stress post-traumatique.
1L’enfant qui arrive à la Maison l’Escargot a souvent connu une discontinuité des liens affectifs avec ses figures parentales. Parfois, on remarque l’absence de contacts significatifs et soutenus avec les parents. D’autres fois, il s’agit d’un enfant qui a déjà vécu plusieurs placements et pour qui il n’existe pas de projet concret et réaliste d’un retour dans sa famille. Pour éviter de souffrir de ces traumatismes relationnels précoces et s’adapter à l’imprévisibilité, l ‘ enfant a mis en place plusieurs mécanismes de défense rigides et coûteux. Il faut donc interrompre les cycles de déplacements à répétition ou d’abandon et proposer un milieu de vie prévisible, sécurisant et contenant. Dans un premier temps, ce milieu doit se distinguer du projet familial, afin d’éviter le poids de trop grandes attentes affectives. À la Maison l’Escargot, tout est mis en place pour garder vivante la capacité d’entrer en relation de l’enfant et lui permettre de faire à nouveau confiance aux adultes. Les conditions sont propices à la reprise du développement. Par la suite, le jeune sera progressivement intégré dans un milieu de vie permanent qui pourra tenir compte de ses besoins, collaborer avec l’équipe de soins et l’accompagner dans ce nouveau projet de vie.
de douloureux constats porteurs de changement
2Comment en sommes-nous venus à créer la Maison l’Escargot ? Il a suffi d’une idée éclair… et de deux ans et demi pour la mettre en œuvre. L’idée s’est imposée le soir de Noël 2003, alors que la directrice de la Protection de la jeunesse et le directeur général du Centre jeunesse de la Montérégie venaient de compléter leur tournée des unités de réadaptation en internat pour saluer les enfants et le personnel. Ils avaient de nouveau été bouleversés de rencontrer des adolescents délaissés par leurs parents et dont une grande partie de la vie s’était déroulée dans le réseau institutionnel. Mais le choc avait été encore plus grand lors de la visite des unités hébergeant les « 6 à 12 ans », où plusieurs jeunes étaient en détresse pour avoir attendu en vain toute la journée des nouvelles de leurs parents. Ce soir-là, l’évidence est devenue insoutenable : si rien de radicalement différent n’était fait pour prévenir de si grandes déceptions, ces enfants de 6 ou 7 ans se retrouveraient, plus tard, dans une unité pour adolescents.
3C’est ainsi que, dès janvier 2004, on ouvre deux fronts d’opérations. Des cliniciens sont interpellés pour concevoir une approche plus adaptée aux besoins des jeunes traumatisés, meurtris, dont on a appauvri presque jusqu’à épuisement le capital d’attachement et de développement dont ils disposaient à la naissance. Le rôle-clé des troubles de l’attachement chez les enfants polytraumatisés est mis en relief. Il faudra travailler le plus précocement possible et offrir aux petits un milieu de vie stable qui pourra les contenir. Ce milieu devra être une ressource très spécialisée, implantée dans la communauté et non dans une institution. Il faudra aussi qu’il soit en lien avec les ressources communautaires. Cela est essentiel pour ces enfants qui devront retourner vivre dans un milieu familial le plus tôt possible, afin d’éviter la marginalisation de leur parcours. Puisqu’un tel lieu n’existe pas au Centre jeunesse de la Montérégie, il faudra le créer.
4Un deuxième front est ouvert avec les gestionnaires responsables des ressources humaines, de l’administration et des finances. Car c’est à eux que reviendra la responsabilité de proposer les aménagements concrets qui permettront d’implanter les approches jugées nécessaires sur le plan clinique. Le projet est clair : offrir des services de réadaptation ultraspécialisés dans un milieu de vie se rapprochant le plus possible d’un milieu familial. Il suppose qu’on sorte des cadres cliniques, administratifs et financiers habituels et qu’on établisse de nombreux partenariats, tant à l’intérieur de l’établissement qu’à l’extérieur.
5Sur le plan clinique, il s’agit de développer un projet novateur, conjuguant le traitement des troubles de l’attachement ou des traumatismes et l’approche éducative qui est déjà utilisée en réadaptation dans les centres jeunesse. Sur le plan de l’administration et des ressources humaines, il faut s’entendre avec les syndicats pour que les conditions et les horaires de travail soient suffisamment flexibles, adaptés au rythme de vie des enfants, et qu’ils offrent la continuité indispensable à leur développement. Sur le plan financier, la Fondation du Centre jeunesse de la Montérégie met rapidement à la disposition du projet une maison dont elle assumera les frais. Les travaux d’aménagement requis pour adapter cette maison aux besoins des enfants sont payés par diverses fondations et donateurs. À l’automne 2005, la Fondation André et Lucie Chagnon décide d’investir, pendant cinq ans, dans la mise en place de services de pointe, la formation du personnel, l’évaluation du projet et la recherche. Il est entendu que les deux derniers volets impliqueront des chercheurs du Centre jeunesse de Montréal-Institut universitaire (CJM-IU).
6De janvier à mai 2006, le projet se matérialise peu à peu. Les bases du programme clinique sont établies et le personnel est recruté de façon rigoureuse, les candidats ayant été convoqués pour toute une journée. À partir d’exercices pratiques et d’entretiens, le processus de sélection mesurée chez eux diverses compétences : connaissance de soi, capacité de travailler en équipe, sensibilité aux comportements d’attachement, capacité d’observer finement des interactions et capacité de s’adapter aux besoins de l’enfant lors d’une intervention. Une fois embauché, le personnel reçoit une formation approfondie sur l’approche clinique adoptée. Le personnel non clinique (la cuisinière, le veilleur de nuit, le préposé à l’entretien, etc.) reçoit également une formation, plus courte, qui décrit en détail les enfants bien particuliers qu’ils seront appelés à côtoyer quotidiennement.
7À l’été 2006, plus de deux ans et demi après que l’idée eut germé, la Maison accueille enfin son premier enfant.
sortir des sentiers battus
8À la Maison l’Escargot, des connaissances de pointe sur le vécu traumatique des enfants ont été intégrées à certaines pratiques qu’on savait probantes. En ce sens, le milieu de vie s’apparente à un centre de « recherche et développement », où des trouvailles récentes qui s’inspirent des neurosciences ou de la nano-observation sont appliquées. Cela dit, le manque de ressources ou la force des habitudes avaient souvent limité par le passé le changement de pratiques. Pour plusieurs intervenants, d’anciens repères institutionnels ont été remis en question. Retirer des enfants si jeunes de leur milieu familial et les confier à une équipe d’éducateurs n’est pas chose courante. Demander à des juges d’ordonner un placement en réadaptation pour des petits de deux ans et demi peut heurter bien des gens. Peu d’intervenants du Centre jeunesse avaient l’expertise requise pour travailler avec des enfants aussi jeunes. C’est pourquoi le milieu d’intervention devait se distinguer par sa compétence. Il fallait mettre sur pied une équipe spécialisée composée entre autres d’ergothérapeutes, d’orthophonistes, de psychoéducateurs et de pédopsychiatres capables de bien évaluer les besoins des enfants et d’apporter des réponses à la fois créatives et appropriées. La théorie de l’attachement a permis de comprendre et de tenir compte des stratégies de survie de chacun des jeunes. C’est de là qu’il fallait partir pour planifier l’intervention.
9Au fil des ans, ces nouvelles connaissances et pratiques ont commencé à essaimer là où elles peuvent profiter à d’autres enfants. En effet, les intervenants de la Maison ont déjà présenté des communications dans différents colloques, forums et milieux de travail. À la Maison même, les visites se sont succédé. C’est ainsi qu’aujourd’hui, quelques centres jeunesse en sont à mettre en branle le processus qui conduira à l’implantation de maisons semblables dans d’autres régions.
corpus fondateur et travaux plus récents
10Les soins spécialisés de la Maison l’Escargot s’inspirent forcément des travaux de nombreux pionniers. Les recherches de Spitz (1968) qui décrivent les réactions des enfants privés du contact affectif de leur mère nous rappellent d’abord l’importance d’exposer les petits à un minimum d’intervenants, toujours les mêmes, pour éviter les symptômes de la carence affective. Par ailleurs, la précieuse théorie de l’attachement de Bowlby (1969) permet de reconnaître l’impact négatif des liens traumatiques précoces sur le développement ultérieur. Les travaux de Lyons-Ruth (2005) traitant de l’attachement désorganisé aident à comprendre et à mieux décoder les patterns de communication affective parentale liés à la désorganisation de l’enfant, notamment les erreurs de communication affective et les confusions de rôle de la mère. Nous observons de tels patterns à profusion, lors des visites supervisées des enfants avec leurs parents.
11Bien sûr, il y a des risques à accompagner de très jeunes enfants en foyer de groupe, car normalement leur place est dans une famille. Mais quand la famille naturelle ne peut en prendre soin adéquatement, et qu’il est trop tôt pour en appeler à une famille d’accueil, il vaut mieux qu’ils soient accompagnés par des éducateurs. C’est pourquoi l’expérience de la pouponnière hongroise de Lóczy, fondée en 1946 par Emmi Pickler (1970) pour accueillir des enfants abandonnés très tôt dans leur vie, nous sert de modèle. David et Appel (1973), de même que Szanto-Feder (2002), nous ont rappelé que, dans cet orphelinat, des jeunes enfants ont pu recevoir des soins de qualité, malgré le fait que le personnel y travaillait en rotation. Les petits de Lóczy ont pu reprendre leur développement sans souffrir de carence affective parce qu’on leur a laissé leur statut de sujet.
12Par ailleurs, Steinhauer (1996) a été un des premiers à traiter des conséquences liées à l’échec du travail de deuil qui fait suite à la séparation parent-enfant. Il a souligné l’importance du besoin de permanence et, si possible, de la coparentalité. Ces travaux nous ont permis de mieux comprendre le rôle du travailleur social, des éducateurs et des différents consultants qui doivent assurer à l’enfant la sécurité et un projet de vie. Pour sa part, Berger (2003, 2008) a montré le grand intérêt qu’il y a à mettre en place un dispositif d’écoute quotidienne des petits. Il nous a invités à soigner la façon d’accompagner l’enfant lorsqu’il rencontre ses parents. En effet, pour cet auteur, les troubles relationnels précoces sont à l’origine d’une indifférenciation entre la pensée de l’enfant et celle de ses parents. Voilà pourquoi des « visites médiatisées » doivent être envisagées, afin de permettre à l’enfant de rencontrer son parent tout en se construisant une pensée différenciée. Autrement dit, en évitant que le jeune demeure prisonnier du passé ou qu’il soit re-traumatisé. Dans le même ordre d’idées, les travaux sur le fonctionnement réflexif de Fonagy et Target (2003) nous ont été très utiles. Pour ces auteurs, la capacité chez l’enfant de considérer les expériences d’autrui, d’explorer leurs émotions, leurs intentions et d’anticiper leurs réactions se développe dans un contexte relationnel, celui de la petite enfance. Au quotidien, nous essayons donc de mettre en œuvre les processus centraux participant au développement de la fonction réflexive qui s’inspirent du vécu d’un parent avec son très jeune enfant.
13Par ailleurs, les travaux de David (2004) et de Rygaard (2005) ont inspiré l’organisation d’un milieu thérapeutique, les modalités d’accompagnement des petits et le soutien professionnel à apporter à l’équipe d’intervenants, mais aussi aux parents et parents d’accueil. Pour contrer les effets des traumatismes relationnels chez les enfants, les travaux d’Archer (2007 ; 2008), Éthier (voir chapitre 10), de même que Blaustein et Kinniburgh (2010) nous ont encouragés à développer le travail en équipe interdisciplinaire. Quant à Cartry (1985 ; 1988 ; 2004), il a bien décrit l’exigeant travail de l’éducateur et son expérience devant un enfant qui souffre.
14Plus près de nous, l’approche thérapeutique du carencé relationnel décrite par le Dr Michel Lemay (1979) nous est apparue toujours d’actualité. En effet, à sa façon, Lemay évoquait déjà, il y a 30 ans, ce qui est maintenant défini comme des troubles de l’attachement. Plus tard, au milieu des années 1990, l’Association des centres jeunesse du Québec (ACJQ) a mis sur pied le Forum abandon, qui regroupait plusieurs collaborateurs. Pendant 10 ans, cette équipe a réfléchi sur les soins à donner aux enfants et aux adolescents abandonnés ou délaissés par leurs parents. Un numéro spécial de la revue PRISME, « Plaidoyer pour les jeunes laissés à l’abandon », a bien résumé en 2004 la démarche et les principaux constats du groupe. Enfin, dans l’élaboration du contenu clinique de la Maison, nous avons tenu compte du programme d’intervention en abandon « Pour chaque jeune, un lien, un lieu pour s’épanouir » du Centre jeunesse de la Montérégie (2005, 2010) et des travaux de Saint-Antoine et Rainville (2004), qui ont fait un travail considérable avec les enfants présentant des troubles sévères de l’attachement au Centre jeunesse de Montréal-Institut universitaire.
une intervention visant à sécuriser l’enfant
15Il est essentiel de bien planifier l’intégration progressive d’un enfant à la Maison l’Escargot, car toute expérience de séparation peut être douloureuse pour lui. Il faut se mettre à la place de l’enfant pour mieux comprendre ses perceptions. Il vit la perte de ses parents, fratrie, grands-parents ou famille d’accueil. Il laisse beaucoup de choses derrière lui, tel un réfugié traversant un processus migratoire. Son jeune âge et ses limites cognitives amènent beaucoup d’incompréhension. Dépendamment des éléments traumatiques en cause, il peut avoir peur de l’inconnu, d’être à nouveau maltraité ou se demander ce qui va arriver à sa famille et s’il va être oublié par ses proches. L’accueil va donc exiger des doses massives et ajustées de « réassurance ». L’enfant sera accueilli avec tout son bagage, les objets qui lui sont chers, ses souvenirs, ses sentiments pour les personnes de qui il est séparé. Il faudra faire une place à ces personnes, car le petit en aura besoin pour grandir. Il doit savoir que malgré tout, il y a du bien là d’où il vient. Enfin, il est important d’être attentif rapidement aux objets qu’il a apportés et qui peuvent jouer un rôle transitionnel.
Un espace accueillant et sécuritaire
16À leur arrivée, les enfants sont accueillis dans une maison de deux étages avec sous-sol, à proximité d’un parc, d’écoles et de plusieurs services. Elle ressemble à un milieu familial avec un salon au rez-de-chaussée, adjacent à une salle à manger. De la cuisine, une grande fenêtre permet de voir jouer les enfants dans la salle de jeux. Pour aider les enfants à s’ajuster sur le plan sensoriel, une attention particulière a été portée aux couleurs et au mobilier de chacune des pièces de la maison. Chaque pièce a une fonction attitrée, comme dans tout foyer. L’espace est aménagé de façon sécuritaire et il permet au personnel de limiter les déplacements, au besoin. Comme la vie du foyer se déroule sur trois niveaux, le groupe peut être fractionné lors des activités quotidiennes. L’espace est organisé en fonction des caractéristiques des enfants et des objectifs principaux de l’intervention, qui sont de reconstruire les bases de l’identité et de favoriser le processus d’attachement. Les chambres sont donc relativement petites et les lits, douillets, ce qui favorise l’impression d’être entouré d’une « enveloppe sécurisante ».
17À l’étage des chambres, les enfants ont accès à la salle magique, une petite pièce polyvalente aménagée pour permettre tantôt de retrouver son calme, tantôt de vivre une rencontre d’accompagnement. D’autres espaces sont destinés plus spécifiquement au travail clinique. Par exemple, la salle d’observation au sous-sol est équipée d’un matériel audiovisuel qui permet de filmer les interactions des enfants entre eux ou lors des rencontres avec les différents spécialistes.
Des objectifs en lien avec de nombreux besoins
18Avec les enfants polytraumatisés, nombreux sont les objectifs à poursuivre et les besoins à combler. Il s’agit globalement de reconstruire les bases de l’identité et de favoriser le processus d’attachement, ce qui peut impliquer :
- la mise en place d’un dispositif d’écoute et d’observation de l’enfant permettant de décoder ses comportements ;
- la création d’un environnement ritualisé, calme et prévisible qui permette de moduler les sources de stimulations ou de stress en fonction des capacités de l’enfant à s’autoréguler1 ;
- le fait de miser sur les capacités adaptatives de l’enfant dans les sphères motrices, sociales, cognitives et affectives, puis de l’intégrer progressivement dans un réseau scolaire et de loisirs ;
- l’accompagnement des parents biologiques, s’ils sont encore présents, pour qu’ils soient moins blessés par le placement et qu’ils réalisent quelle sera leur contribution au projet de vie de l’enfant, s’il y a lieu ;
- la clarification du projet de vie, si cela n’est pas déjà fait, en tenant compte de l’intérêt de l’enfant, de l’engagement manifesté par les parents, de leurs capacités parentales et de leurs intentions ;
- le soutien de l’enfant au quotidien pour lui permettre de penser à ce qu’il ressent (fonction réflexive) ;
- l’intégration, à la fin du séjour, de l’enfant dans un milieu de vie permanent, auprès d’adultes qui sauront l’accompagner et poursuivre l’actualisation de son potentiel ; et
- le soutien aux familles d’accueil qui hébergeront l’enfant pour qu’elles puissent identifier ses stratégies d’attachement et répondre à ses besoins.
Un temps prévisible
19Une attention toute particulière est portée au « temps vécu », indispensable pour asseoir les bases de l’identité. En effet, c’est l’ensemble des expériences conservées qui va permettre aux jeunes de retirer une satisfaction du temps vécu et retrouver peu à peu confiance en leurs capacités. Voilà pourquoi l’horaire quotidien de la maison implique toujours la même séquence d’activités et qu’il varie très peu d’une journée à l’autre. Par exemple, les petits apprennent rapidement qu’après la collation de l’après-midi, ils iront jouer dehors. En répétant chaque jour la même séquence d’activités, pratiquement de la même façon, avec les mêmes règles de vie, on leur permet de prendre confiance dans la prévisibilité de l’environnement. C’est donc avec beaucoup de précaution que tout changement est amorcé, que ce soit à l’égard de la programmation quotidienne, des sorties hors de la Maison, des stratégies d’interventions ou des modalités de contact avec les parents. Chaque changement peut faire vivre un stress important. Il ne faut jamais oublier que les expériences traumatiques qu’ont vécues les enfants sont souvent associées à un monde imprévisible et chaotique sur lequel ils avaient très peu de contrôle. Il faut aussi se rappeler que les enfants vivent dans un temps subjectif, ce qui veut dire que pour eux les heures, les journées, les semaines, les mois et les années n’ont qu’une signification très relative.
20Afin de situer les jeunes dans le temps, divers moyens sont utilisés. Dans la salle à manger, il y a un calendrier mensuel avec des repères visuels. Le matin, un éducateur indique aux enfants la journée et la date actuelle en mettant les repères aux bons endroits. C’est pour lui le moment de dire ce qu’il y a de spécial dans la journée ou de situer les événements à venir. Un calendrier hebdomadaire, avec les photos des éducateurs, indique les moments de leur présence à la Maison. Un repère visuel sur le calendrier indique aux enfants qui va prendre soin d’eux quotidiennement. L’horaire des activités quotidiennes est aussi représenté par des pictogrammes dans la salle à manger.
21Lorsque la dimension temporelle commence à être mieux intégrée, les enfants démontrent plus de sécurité et ils peuvent faire l’expérience d’un horaire plus flexible sans perdre leurs repères. Il devient plus facile pour eux de gérer les transitions sans se désorganiser. En d’autres mots, vivre dans un monde ritualisé et prévisible leur permet de récupérer l’énergie jusqu’alors consacrée à leur survie, et de la consacrer à leur développement.
Une programmation riche en expériences
22Marcel Renou (2005) rappelle que, dans le modèle psychoéducatif, la programmation est l’outil premier de la prise en charge. Elle a pour fonction de développer au maximum le potentiel d’apprentissage des sujets et de leur faire acquérir le maximum de compétences en vue de leur autonomie optimale. La programmation est donc utilisée comme un levier pour stimuler le potentiel d’adaptation de l’enfant. C’est ici que tout le savoir-faire et savoir-être de l’éducateur est mis à contribution dans le vécu partagé (les moments où il faut faire, faire avec, faire faire et laisser faire).
23La programmation de la Maison est en lien avec sa mission. Puisque le but général de l’équipe est de sécuriser les enfants, il faut rendre le monde suffisamment petit pour qu’il soit compréhensible pour eux. Il faut offrir à ces enfants un cadre contenant, à travers des moments de vie routiniers (levers, repas, couchers, etc.), des activités d’apprentissage, des activités de socialisation et des activités de détente. La programmation permet des rituels quotidiens, hebdomadaires, mensuels et annuels. Une importance particulière est accordée à chacun de ces rituels, car c’est à travers eux qu’un jeune se construit, en donnant un sens aux événements. Certains rituels reviennent de façon hebdomadaire. Par exemple, le samedi est la journée réservée aux bonbons. Pour les petits, au fil des semaines, cela devient un marqueur de temps. D’autres rituels permettent d’intégrer les temps forts de l’année, tels que l’anniversaire des enfants, la période des fêtes, la fin de l’année scolaire ou les vacances estivales. La programmation doit se rapprocher le plus possible de ce qu’un enfant vivrait s’il était dans un milieu familial.
24Sur le plan individuel, c’est à travers les plaisirs partagés du quotidien que divers apprentissages sont proposés. Les éducateurs accompagnateurs sont responsables de consigner dans un cartable des plans individualisés précisant les stratégies d’intervention spécifiques. Ces dernières sont alimentées régulièrement par la mise en commun des observations et des évaluations de tous les membres de l’équipe interdisciplinaire. Par exemple, certaines activités quotidiennes vont intégrer les exercices proposés par l’ergothérapeute ou encore l’orthophoniste. Ces exercices sont donc intégrés à la routine des enfants et permettent de contribuer à la reprise de leur développement.
Construction d’historicité et quête de sens
25Les enfants traumatisés sont rarement en mesure de raconter directement leur histoire ou de communiquer clairement leurs besoins. Pour savoir ce qu’ils ont vécu et ressenti, pour comprendre les stratégies souvent « tordues » qu’ils ont mises en œuvre pour survivre et tenter de reconstituer leur histoire, il faut, en quelque sorte, faire un exercice de décryptage. Celui-ci se fait bribe par bribe, en décodant des symptômes, des attitudes et des comportements. Nous avons besoin des parents pour faire ce travail. Les visites supervisées fournissent habituellement tout un matériel qui permet notamment aux enfants de poser des questions sur leurs parents, leur lieu de vie, ce qui a amené la séparation ou ce qui justifie l’absence de tel membre de la famille. Nous demandons aux parents biologiques, comme aux parents d’accueil, de fournir le plus possible d’éléments du vécu antérieur permettant à l’enfant de retrouver certains repères sensoriels (peluches, jouets, photos, vidéos, etc.). Cela permet, par la suite, d’amorcer la reconstruction de l’histoire de vie. Il faut éviter que les parents biologiques puissent aborder seuls cette histoire sans préalablement en avoir discuté avec l’intervenant social, cela pour éviter de replonger les enfants dans des éléments traumatiques.
Un travail sur l’interaction parent-enfant
26Il y a quelque chose de paradoxal dans l’élan des enfants vers leurs parents lorsque ceux-ci les ont maltraités ou ne les ont pas protégés. Du point de vue de l’enfant, le parent est rarement disqualifié. C’est pourquoi nous essayons, lors des visites supervisées, de permettre à l’enfant de se représenter son parent différemment, d’une façon moins angoissante ou moins idéalisée. Il faut aussi lui permettre de se sentir moins vulnérable face à ce dernier. Ce faisant, il ne faut pas confondre le maintien du contact avec le parent et le maintien d’un hébergement chez le parent. Dans la programmation, une attention toute particulière est donc accordée à la visite supervisée comme dispositif d’écoute de l’interaction parent-enfant.
Un code de vie et des valeurs
27La Maison l’Escargot, comme tout milieu d’intervention, véhicule des valeurs et des normes. Il s’agit notamment du respect de soi et des autres, de l’unicité de chaque enfant et du rôle central que celui-ci joue comme acteur de son propre développement. Puisque les enfants qui sont à la Maison vivent des moments de grande fragilité émotive, ils peuvent être amenés à exprimer leurs souffrances par des moyens et comportements peu adaptés, parfois difficiles à comprendre. Tous les comportements des enfants sont vus comme des moyens de s’adapter à l’environnement et de se réguler. Mais il est parfois ardu de comprendre exactement ce qui se passe. C’est en observant l’enfant, en émettant des hypothèses sur ses angoisses et en tentant des interventions, soit directement auprès de lui, soit en transformant une règle de vie ou l’environnement, qu’il est possible de modifier les comportements inappropriés.
28Ainsi, un enfant qui, à la fin du repas, provoque les autres ou dit des vulgarités est possiblement en train d’exprimer qu’il est incapable de vivre ce moment d’attente. Peut-être trouve-t-il difficile de partager l’éducateur avec les autres enfants ? Ou est-ce un moment où il est confronté à un vide intérieur ? Peut-être n’a-t-il jamais appris à meubler l’attente avec son imaginaire. Quoi qu’il en soit, l’intervention tentée devrait permettre au petit de trouver des moyens pour éviter la confrontation avec des moments d’attente. S’il peut vivre des succès dans la gestion de ses comportements et développer une meilleure confiance en lui, il finira par être capable de passer plus de temps de qualité à la table. Il faut être créatif et reprendre les acquisitions qui sont défaillantes. On pourrait, par exemple, accélérer son repas en ne laissant pas de délai entre le repas et le dessert, ou lui permettre d’apporter un jouet à table. Il pourrait être autorisé à faire du coloriage, ce qui pourrait l’aider à se réguler et à tolérer un petit délai. L’important est de lui demander ce qu’il est en mesure de réaliser et de lui en donner les moyens.
29Toute émotion est permise à la Maison. L’enfant est entendu et accueilli. Par contre, certains comportements ne sont pas tolérés et nous le rappelons constamment. Il est notamment interdit de frapper les personnes, d’injurier, de briser les jouets ou les objets. Cela demande un effort d’adaptation constant de la part des éducateurs, qui doivent appliquer le code en fonction du niveau de développement de l’enfant. Celui-ci doit sentir que le contrôle de l’éducateur ne remet pas en cause son intégrité ou ne vise pas à le punir, mais qu’il lui assure une protection. La conséquence de l’acte (par exemple, s’asseoir sur la chaise rouge) reste toujours la même et agit comme un point de repère. Avec le temps, elle aide à comprendre et à accepter les limites. Deux principes fondamentaux nous guident alors : la fermeté, soit la capacité de résister et de ne pas se laisser détruire par l’agir de l’enfant ; l’écoute spécifique, c’est-à-dire la capacité de s’identifier à ce que ressent l’enfant et, si nécessaire, d’adapter l’environnement à ses besoins. L’un ne va pas sans l’autre.
30Pour certains, l’utilisation de la chaise bleue (qui a une forme de coquille, se referme complètement et peut tourner sur elle-même) peut être bénéfique lorsqu’il faut retrouver un état d’équilibre. Pour d’autres, cela peut être un séjour à la salle magique où divers moyens sont proposés afin de réguler ses émotions. D’autres encore vont mieux répondre à une approche impliquant des aspects sensoriels spécifiques. Il faut alors penser en termes d’enveloppes auditives, visuelles ou tactiles. C’est souvent en explorant avec l’enfant que l’éducateur peut identifier les moyens qui l’apaisent.
31Il y a des enfants qui utilisent parfois la violence physique. Il se peut que, malgré le fait que nous ayons enlevé les objets dangereux et tenté différentes interventions, un enfant ait besoin qu’on l’empêche de poser des gestes qui pourraient le blesser, nous blesser ou blesser d’autres petits. C’est avec l’intention de poser un cadre contenant, tout en rassurant l’enfant sur notre capacité à prendre soin de lui, qu’on peut avoir à tenir sa main, son bras et parfois à le maintenir dans nos bras en utilisant des techniques d’intervention non violentes en situation de crise2. Nous voyons cette intervention comme un dispositif ayant pour but d’empêcher qu’une tension interne vécue débouche sur une blessure. Nous avons donc mis en place certains dispositifs pour endiguer la violence, tels que la parole de l’éducateur qui donne à l’enfant une bonne raison de se calmer, le maintien dans les bras si l’enfant le tolère, et la juste sanction.
Activités, médiations et fonctionnement réflexif
32À la maison, toute activité de bricolage ou situation de jeux peut devenir une médiation éducative, pourvu qu’elle tienne étroitement compte des possibilités motrices, sensorielles, relationnelles, cognitives et sociales de l’enfant. C’est ce que Capul et Lemay (1996) appellent la thérapie dans et par l’événement partagé au jour le jour :
[Il faut assurer aux enfants] la continuité inconditionnelle d’un vécu dans le même endroit, au même moment, avec la même personne, et en s’appuyant sur les mêmes objets. L’éducateur devra […] offrir un ensemble d’activités non compétitives présentant un minimum de frustrations. Au moyen du cadre pro posé, il devra minimiser la possibilité des mécanismes de brisures, relier l’image d’un adulte à un lieu donné, à une séquence temporelle précise. Il redonnera à l’enfant la possibilité de devenir agissant sur son entourage, réduira les causes d’échec et les sources de frustration, et permettra aux forces demeurées latentes de s’actualiser dans une création. L’activité qui pourrait paraître banale en elle-même par sa répétition et ses contingences matérielles permettra donc dans le même moment de travailler toutes les bases de l’identité et apportera aussi sécurité et sentiment d’appartenance à un petit groupe. (p. 175-176)
33Certaines activités sont proposées à tous les enfants et prennent la forme de repas, chants, jeux d’expression et jeux musicaux. D’autres, plus spécifiques, peuvent être mises en place sous la recommandation du psychologue, de l’ergothérapeute, de l’orthophoniste, de l’orthopédagogue ou du pédopsychiatre. Tout au long de ces activités, l’éducateur pourra utiliser certaines techniques d’intervention. Sans automatisme, mais plutôt en fonction des caractéristiques spécifiques de l’enfant et des situations typiquement rencontrées, ces techniques constitueront pour l’éducateur une sorte de banque d’attitudes ou de comportements à adopter. Qu’il s’agisse de l’ignorance intentionnelle, de la proximité physique, de l’aide opportune ou de la reformulation, toutes les techniques ont leurs indications et contre-indications, d’où l’importance de bien connaître le jeune et ses besoins.
34Dans ces jeux et activités, les éducateurs seront sensibles aux intentions exprimées par l’enfant à travers ses comportements. En effet, nous avons déjà dit que pour Fonagy le fonctionnement réflexif se développe dans un contexte relationnel. Suivant une trajectoire développementale précise, il prend son origine dans la petite enfance. Pour soutenir le développement du fonctionnement réflexif, l’éducateur tente de permettre à l’enfant de se percevoir comme quelqu’un ayant des motivations internes. Il s’agit ensuite d’associer les comportements à de tels états internes (ou mind states). Puisque le marquage et le reflet des affects constituent des mécanismes intersubjectifs centraux dans le développement de la représentation et de la régulation des affects, il s’efforce d’accueillir et de refléter les affects des enfants.
35Toujours selon Fonagy, le jeu de fantaisie avec les parents a un rôle important dans le développement du fonctionnement réflexif. L’éducateur s’efforce d’utiliser de tels jeux, qui donnent l’occasion de faire semblant, afin de créer un contexte dans lequel l’enfant peut symboliser des pensées. Finalement, les discussions autour de ses émotions et les causes de leur apparition amènent l’enfant à mieux les reconnaître et les comprendre. Cela va permettre à la longue de créer des récits cohérents autour des émotions, lorsque l’éducateur est à proximité de l’enfant. Cela exige beaucoup, car dans un premier temps il faut garder une certaine neutralité pour mieux accompagner les mouvements de l’enfant. En fait, l’éducateur doit toujours se poser la question : « À quelle distance émotionnelle est-ce que l’enfant semble le plus à l’aise et fonctionne le mieux ? » C’est le jeune qui doit décider du rythme et du contexte des rapprochements.
Développer le sens des responsabilités
36À leur arrivée à la Maison, plusieurs enfants démontrent une autonomie qui va bien au-delà de ce qui est habituel pour leur âge. Par exemple, ils insistent pour ramasser leurs dégâts, rincer leur vaisselle et la mettre dans le lave-vaisselle. Ils se mettent en colère lorsqu’on leur propose de l’aide. Il est possible que dans leurs schémas relationnels, ils aient développé ces comportements pour se sentir valorisés par les adultes, ou encore, qu’ils aient été « parentifiés ».
37Dans pareil contexte, confier des responsabilités à un enfant exige une réflexion. En effet, l’objectif est souvent de dé-parentifier l’enfant pour qu’il retrouve une gratification interne à faire des choses pour lui-même. Manger seul, s’habiller, se laver, se brosser les dents, faire son lit ou ramasser sa chambre et ses jouets ne sont donc pas les buts premiers de notre intervention. Au départ, nous ne renforçons pas ces comportements. Nous n’obligeons les enfants ni à faire les choses seuls, ni à les faire avec de l’aide. À la place, nous accompagnons l’enfant et observons ce qu’il fait, tout en proposant notre aide. Après quelque temps, certains jeunes vont jusqu’à nous demander de les faire manger, de les laver et de les habiller. Ils ont besoin d’expérimenter au quotidien le fait que les adultes qui en prennent soin répondent avec sensibilité à leurs besoins. Cela peut prendre plusieurs mois. Il peut y avoir un ralentissement de la progression et parfois même des régressions importantes. Mais le développement finit généralement par reprendre son cours.
38Bien qu’on écoute les enfants et qu’on tente de répondre à leurs demandes d’aide, plusieurs interventions peuvent être faites en fonction des caractéristiques de chacun. Ainsi, pour un enfant qui demande qu’on l’habille, on peut jouer à « tu mets un morceau et je t’aide à en mettre un ». On peut aussi décider de répondre à sa demande et l’habiller en lui reflétant qu’on sait qu’il est capable de le faire, mais qu’aujourd’hui il a envie qu’on prenne davantage soin de lui. Pour certains enfants, il peut être déstabilisant qu’on ne valorise pas au départ leur comportement responsable et parentifié. Certains insistent pour faire des actions qu’on ne demande pas, comme de laver la table après le repas. On ne dira pas à cet enfant qu’il est grand et « bon pour faire le ménage ». On peut, en revanche, lui refléter que cela semble important pour lui que la table soit propre et l’aider à trouver le sens de ce qu’il est en train de faire. Le fait-il pour faire plaisir à l’adulte, pour éviter de se faire réprimander, par rituel obsessionnel ?
39Certaines responsabilités pourront être confiées aux enfants dans le cadre du vécu quotidien et lors de certaines activités structurées. Elles lui sont confiées en tenant compte de ses capacités et des défis qu’elles proposent. Les rôles et tâches confiés à l’enfant lui permettent de développer son sens des responsabilités, tant du point de vue de l’évolution de ses capacités intellectuelles que du point de vue de la conscience morale en émergence. Plus un enfant devient responsable, plus il devient capable de faire ses propres choix et de se prendre en main. Il en est de même pour les parents que nous accompagnons. La plupart du temps, dans leur vie, l’exercice des rôles parentaux a été entravé par de multiples facteurs, ce qui ne leur a pas permis de répondre adéquatement à tous les besoins de leurs enfants. On doit amener ces parents à réaliser ce qu’ils peuvent offrir concrètement à leur enfant et leur permettre d’exercer cette partie de leur rôle parental. Quant aux parents qui se sont vu retirer par le tribunal certains attributs parentaux, ils auront besoin d’être encadrés et accompagnés pour que les rencontres avec leur enfant soient bénéfiques à tous les deux.
Se sentir reconnu
40À la Maison, les stratégies d’intervention visent à amener l’enfant à reconnaître, par lui-même, la valeur de ce qu’il fait. On espère qu’il puisse ainsi construire progressivement l’image la plus réaliste possible de sa valeur intrinsèque et se sentir digne d’être aimé par un adulte. L’éducateur doit donc planifier diverses formes de reconnaissance, soit explicites (par exemple, privilèges reliés à un système d’émulation) ou implicites (félicitations et témoignages de satisfaction). Ainsi, le regard positif que nous portons sur un enfant lui permet, dans une relation-miroir, de s’accorder un sentiment de valeur. L’exemple qui suit en est une illustration. Benoît s’approche d’une petite maison construite en blocs Lego par un autre enfant. L’éducatrice présente pourrait lui dire de ne pas la toucher, pour ne pas la détruire, lui confirmant ainsi une image de destructeur. Par contre, elle pourrait aussi lire dans ce mouvement, un intérêt pour la construction d’une petite maison semblable et le lui refléter. L’enfant ainsi accueilli dans son désir par l’adulte va pouvoir construire sa propre petite maison. Évidemment, il est essentiel de bien doser l’investissement positif, afin de contrer le mécanisme de brisure relationnelle très présent chez ces enfants carencés et traumatisés. Les encouragements seront donc mesurés jusqu’à ce que l’enfant puisse les accueillir sans réagir négativement ou encore chercher à détruire la relation.
Choix d’un projet de vie permanent et accompagnement de la famille d’accueil
41À un certain moment du séjour, va se poser la question du projet de vie permanent de l’enfant. L’intervenante sociale applique alors le processus clinique du programme d’intervention en abandon du Centre jeunesse de la Montérégie (2005, 2010), Pour chaque jeune, un lien, un lieu pour s’épanouir. La présentation du contenu de cet autre programme dépasse les objectifs du présent chapitre. Néanmoins, indiquons qu’il repose sur des principes cliniques et des stratégies d’intervention conçues spécifiquement pour les enfants abandonnés ou à risque d’abandon.
42Afin de bien accueillir l’enfant, une éventuelle famille d’accueil aura besoin d’être soutenue par l’équipe de la Maison l’Escargot. Selon David (2004), il est nécessaire que tous sachent que, dans ce processus de transition, la présence de tensions et de crises est normale ; elles font partie de tout placement familial et il importe de ne pas se laisser désarmer par elles. Si pénibles, fréquentes et inquiétantes soient-elles, elles ne sont pas en soi un critère d’échec. La capacité de l’enfant à progresser à l’issue d’une crise traduit l’efficacité du placement, même si une nouvelle crise paraît démentir momentanément la permanence des progrès. À l’inverse, l’absence de crise et le silence qui l’accompagne ne sont pas forcément des critères de bon placement, car ils peuvent constituer un signe d’enfermement et d’aliénation de l’enfant.
43Pour ces raisons, l’équipe de la Maison reste très présente lors de l’intégration progressive de l’enfant dans son nouveau milieu de vie, et même au-delà. Nous devons mettre autant de rigueur à accompagner l’enfant lorsqu’il quitte la Maison que nous en avons mis pour l’accueillir. Cette transition est possible lorsque nous croyons que l’enfant fait suffisamment confiance aux adultes de la Maison l’Escargot pour pouvoir s’engager de nouveau à long terme avec un adulte. Nous croyons qu’à ce moment-là, il peut bénéficier d’une continuité de prise en charge individualisée, par des figures parentales stables dans un cadre familial. L’enfant peut alors rejouer sur une scène familiale ses conflits du passé, mais bénéficier de réponses différentes, offertes par la famille d’accueil et dont il peut progressivement ressentir les effets réconfortants et réparateurs.
composition et fonctionnement de l’équipe
44À la Maison l’Escargot, tout en utilisant les ressources de la communauté, une équipe de professionnels tissera autour de chaque enfant un réseau de soutien. La sécurité des enfants passera par la permanence des adultes et par leur réponse cohérente.
45Sur le plan clinique, l’équipe est composée d’un chef de service à plein temps, quatre éducateurs à temps complet, un éducateur à quatre jours par semaine et un autre à trois jours. Trois autres éducateurs viennent compléter l’équipe avec une disponibilité d’une journée par semaine.
46Cette équipe est soutenue par un psychoéducateur (ou spécialiste en réadaptation psychosociale) à plein temps, un agent de planification, programmation, recherche (APPR) qui a un rôle de conseiller clinique deux jours par semaine, un intervenant psychosocial à plein temps et un psychologue, une journée par semaine. Le personnel non clinique, mais tout aussi essentiel à la bonne marche du foyer, est constitué d’un cuisinier présent tous les jours, d’un gardien de résidence pendant la nuit et d’un préposé à l’entretien ménager 25 heures par semaine.
47L’éducateur effectue les opérations professionnelles suivantes, qui s’inspirent de l’approche psychoéducative :
- observer, analyser et donner un sens aux comportements des enfants ;
- rédiger et actualiser un plan d’intervention de réadaptation individualisé pour chaque enfant ;
- transiger avec la violence et les situations de crise ;
- organiser, animer et utiliser le vécu partagé à des fins thérapeutiques ;
- travailler en équipe multidisciplinaire et/ou interdisciplinaire ; et
- évaluer continuellement son action et le degré d’atteinte des résultats visés auprès du jeune et de sa famille.
Collaborateurs à l’interne
48Nous bénéficions également d’un certain nombre de collaborateurs à l’intérieur du Centre jeunesse. Ainsi, nous avons accès à un médecin et une infirmière. Tous les dossiers pour l’admission des enfants transigent par le même responsable du service de l’Accès. Tous les enfants voient leur situation révisée par la même personne à la Direction de la protection de la jeunesse. Un intervenant pivot du secteur adoption et du placement en famille d’accueil reçoit les demandes en lien avec le projet de vie extrafamilial des enfants. À l’occasion, nous pouvons compter sur l’aide d’une bénévole, toujours la même, qui est bien connue des enfants.
Collaborateurs à l’externe
49De nombreux partenaires sont essentiels pour mener à bien notre mission. L’équipe a donc intégré un orthophoniste (une demi-journée par semaine), un ergothérapeute (une demi-journée toutes les deux semaines) et un pédopsychiatre (une demi-journée toutes les trois semaines). Par ailleurs, plusieurs autres professionnels de la santé ont été impliqués dans le suivi des enfants au fil des ans : pédiatre, nutritionniste, optométriste, ophtalmologiste, physiatre, neurologue, dentiste, zoothérapeute – cette liste n’est en rien exhaustive. Comme certains des enfants fréquentent l’école, nous travaillons régulièrement avec les directions d’école, les psychologues, les enseignants et les divers spécialistes du milieu scolaire. Finalement, nous coopérons avec le CJM-IU pour effectuer l’évaluation du projet.
Le travail multidisciplinaire
50La Maison dispose d’une équipe stable de personnes engagées, ce qui permet un climat d’équipe favorisant la confiance, le respect mutuel et des échanges riches, et une concertation entre tous les intervenants impliqués auprès de l’enfant.
51L’enfant ne doit pas se retrouver prisonnier d’un seul type de perception et de représentation. Cela le priverait des opportunités que peuvent lui offrir différents regards croisés, capables de saisir ses multiples potentialités. Les observations individuelles des éducateurs et des spécialistes permettent à chacun de formuler des hypothèses, mais c’est le partage de ces observations individuelles, au cours des deux réunions d’équipe hebdomadaires, qui permet de les valider, de les corriger et de les faire évoluer. La mise en commun des points de vue de divers professionnels possédant chacun sa grille d’observation et d’analyse conduit à une vision beaucoup plus complète de l’enfant. N’étant plus l’objet d’une seule perception, il peut alors devenir sujet individuel d’une intervention collective et cohérente. Il s’agit là d’un point extrêmement important du mode d’intervention pratiqué à la Maison l’Escargot. C’est l’observation partagée et la délibération interdisciplinaire, où les points de vue des éducateurs et des spécialistes sont systématiquement confrontés, qui permettent d’assurer les trois ingrédients essentiels à une intervention individualisée :
- le dynamisme du diagnostic, qui doit évoluer et se raffiner constamment s’il veut suivre la progression de l’enfant ;
- l’ajustement continu de l’intervention, pour se moduler à la progression parfois inégale des différentes dimensions de la situation de l’enfant ;
- la cohérence de l’intervention auprès de chaque enfant, les éducateurs et les spécialistes ayant les mêmes informations, véhiculant les mêmes valeurs et visant les mêmes objectifs.
52L’un des éléments-clés de cette approche « individualisée collective » est le dialogue régulier et l’échange de bons procédés qui s’établissent entre les éducateurs et les spécialistes. En effet, les éducateurs, immergés dans le vécu des enfants et très près de ce que ceux-ci ressentent, peuvent faire des observations précieuses à leur sujet. Mais leur contact quotidien avec leur souffrance peut aussi teinter leur compréhension des problèmes. Les professionnels externes, qui rencontrent les enfants sporadiquement, ont un peu plus de recul face à la souffrance ressentie, et peuvent en cela apporter un éclairage plus objectif. Mais leur point de vue reflète un angle analytique, voire un biais propre à leur profession, et leur recul donne parfois lieu à des solutions trop détachées du vécu de l’enfant. C’est pourquoi il est important qu’aucune discipline ne prenne le dessus sur les autres afin que les enfants ne soient pas abordés ou traités toujours sous le même angle, ce qui pourrait aller à l’encontre des besoins particuliers de chacun.
53Les deux rencontres d’équipe hebdomadaires permettent précisément la jonction de toutes ces perspectives. Elles amènent du mouvement dans les points de vue de chacun et rééquilibrent les perceptions développées de part et d’autre, rapprochant ainsi tous les intervenants de l’unicité de chaque enfant qu’il s’agit de comprendre et d’accompagner. Ce dialogue pose un défi important pour l’équipe : tous ses membres doivent tenir pour acquis que les interprétations et les orientations adoptées seront continuellement remises en question, soit pour s’ajuster aux réactions manifestées par les enfants (leurs mouvements régressifs comme progressifs en lien avec les événements de vie auxquels ils sont confrontés), soit pour s’ajuster aux nouvelles connaissances théoriques et cliniques. L’équipe doit apprendre à composer avec l’incertitude qui accompagne le changement constant. L’éducateur accompagnateur doit accepter que sa plus grande proximité avec l’enfant ne lui octroie aucun monopole sur l’intervention mise en œuvre par tous.
54Faire le diagnostic de problèmes aussi profonds et enchevêtrés, dessiner pour chaque enfant une intervention taillée sur mesure, travailler à plusieurs avec un maximum de cohésion, mesurer le travail accompli de manière à l’ajuster constamment à l’évolution de l’enfant sont autant de tâches qui doivent être appuyées par un ensemble de moyens de toutes sortes, exigeant de tous la plus grande rigueur. L’équipe interne et certains collaborateurs ont accès à un programme de formation continue qui conjugue la participation de chacun à des formations extérieures et à des présentations et activités cliniques offertes à l’équipe par des spécialistes qui viennent les rencontrer. D’autres éléments de la programmation s’adressant au personnel sont réalisés sous forme de temps de dégagement pour les rencontres d’accompagnement, de travail administratif, de supervisions professionnelles, de journées d’étude, permettant d’approfondir les notions cliniques, d’analyser l’intervention et de poursuivre la réflexion sur le traitement.
évaluation en temps réel
55Afin d’effectuer une sélection judicieuse des enfants qui seront admis à la Maison l’Escargot et d’assurer par la suite le suivi rigoureux de leurs besoins et de l’intervention, toute une série d’évaluations sont effectuées auprès de l’enfant, de ses parents biologiques ou d’accueil et des éducateurs.
56Les premières évaluations, sous la responsabilité de l’intervenant qui fait la référence, nous permettent de détecter le risque d’abandon (Historique des milieux de vie, Centre jeunesse de la Montérégie, 2007), d’évaluer, en lien avec les capacités parentales, la pertinence d’un projet de vie alternatif à l’extérieur de la famille (Guide d’évaluation des capacités parentales, Centre jeunesse de Montréal, 2006, d’après Steinhauer, 1996), et d’obtenir de l’information sur les difficultés émotionnelles et comportementales de l’enfant (Child Behavior Checklist, Achenbach 1990). L’ensemble permet de garantir l’accès à la Maison aux enfants qui en ont le plus besoin.
57Les trois évaluations suivantes sont effectuées dans le cadre du protocole de recherche établi en collaboration avec le CJM-IU. Elles permettent une meilleure compréhension de l’histoire familiale et des stress parentaux. L’indice de stress parental d’Abidin (1995) s’adresse aux parents ayant un enfant âgé de moins de 13 ans. Il évalue le stress parental selon l’interprétation subjective que le parent a des situations dans lesquelles il exerce son rôle parental. Le Childhood Trauma Questionnaire (Bernstein et al., 1997) permet d’évaluer les expériences de négligence et d’abus physique, sexuel et psychologique vécues par le parent durant son enfance, ce qui permet de faire des liens intergénérationnels. Finalement, le Parental Bonding Instrument (Parker, Tupling et Brown, 1979) évalue les souvenirs du parent par rapport aux soins reçus de son père et de sa mère, ce qui nous donne des indications sur l’attachement parental que nous pouvons mettre en correspondance avec l’attachement de l’enfant.
58Une série de questionnaires permet ensuite de colliger de l’information sur les médicaments prescrits aux enfants, s’il y a lieu, ainsi que sur les divers comportements observables chez ces derniers. Ces questionnaires, remplis par les éducateurs, sont remis pour la recherche.
59Le Profil sensoriel (Dunn, 1999) est un outil standardisé qui permet de reconnaître les particularités sensorielles de l’enfant sur les plans visuel, auditif, tactile, gustatif et vestibulaire. Il est utile pour déterminer si l’enfant est hypo-ou hyper-réactif aux divers stimuli sensoriels et s’il affiche des réponses atypiques lorsqu’on le compare à un échantillon d’enfants dans la norme.
60Les résultats obtenus au tri de cartes d’attachement (Waters, 1995) constituent un instantané de la relation d’attachement de l’enfant avec l’éducateur. Cette « photo » est reprise tous les six mois, afin d’évaluer la progression de l’enfant.
61En lien avec l’attachement, nous remplissons la Grille d’observation des indices de sécurité affective des enfants d’âges préscolaire et scolaire (Bisaillon et al., 2009), afin de tracer le profil de sécurité affective de l’enfant. Même si elle ne constitue pas une évaluation diagnostique, elle permet de voir comment s’exercent certaines compétences spécifiques à l’attachement, notamment les activités partagées, la réaction à l’éloignement et la recherche de proximité. Ces données sont acheminées à l’agent de recherche.
62La psychologue de la Maison l’Escargot fait passer chaque année toute une série de tests aux enfants. Le WPPSI III ou le WISC IV permettent d’évaluer, à l’aide d’un instrument standardisé, une variété d’aptitudes pour rendre compte des différentes facettes de l’intelligence. C’est grâce à eux qu’on peut voir qu’au fil des ans, les enfants reprennent leur développement et que les « énergies débloquées » permettent une meilleure actualisation de leur potentiel cognitif. Cela se traduit parfois par l’apparition chez l’enfant de deux écarts types en deux ans.
63Les Histoires à compléter (Bretherton, Ridgeway et Cassidy, 1990) utilisent les narratifs d’attachement chez l’enfant lorsqu’il est mis en situation d’inconfort ou de détresse (par exemple, la blessure au genou, le monstre dans la chambre, le départ des parents). On retrouve alors un narratif sécurisant, évitant, résistant ou désorganisé. C’est très révélateur, si on l’associe au tri de cartes d’attachement. On utilise la procédure de Cotation du complément d’histoires (Miljkovitch et al., 2003) : la session de jeu est enregistrée sur vidéo et, après avoir visionné la bande, le coteur du CJM-IU et la psychologue répartissent en sept piles 65 propositions écrites sur des cartes. Ces propositions se rapportent autant au contenu des histoires produites qu’aux qualités du narratif lui-même. Ce système permet de résumer en indices (sécurisé, détaché, préoccupé, désorganisé) toute l’information contenue dans le tri d’items. Sur le plan clinique, on trouve alors les enjeux psychiques en lien avec le vécu des visites supervisées ou encore un éclairage sur le lien avec le parent réel ou avec les éducateurs.
64Les autres tests administrés par la psychologue permettent d’explorer le monde interne de l’enfant et servent à des fins cliniques et non pas à la recherche. Le Test Patte Noire (Corman, 1972) met en scènes plusieurs petits cochons, dont l’un s’appelle Patte Noire. L’interprétation des observations relevées pendant le test nous renseigne notamment sur la manière dont l’enfant compose avec l’agressivité et la culpabilité. Le célèbre Rorschach est un outil clinique de type projectif qui consiste en une série de planches comportant des taches symétriques qui sont proposées à la libre interprétation de l’enfant. Il vient complémenter le Patte Noire, car il permet de saisir les réactions de l’enfant devant des stimuli moins construits. Le Test du Bonhomme permet à la psychologue d’étudier le dessin sous l’angle de l’image que l’enfant se fait de son corps. Enfin, le Dessin libre d’une famille nous renseigne sur les angoisses rattachées au vécu familial : le dessin varie beaucoup selon qu’il est fait à l’arrivée de l’enfant, en cours de séjour, ou à la fin du séjour, quand l’enfant s’apprête à quitter la Maison pour une famille d’accueil. Comme la psychologue participe aux réunions d’équipe, tout ce matériel peut être présenté, discuté et comparé aux observations des éducateurs.
***
65Pour le moment, malgré une collecte imposante de données, nous n’avons que très peu de résultats de recherche concrets à communiquer, sauf nos propres observations. Nous constatons que les résurgences traumatiques en lien avec les expériences passées réapparaissent dans le vécu à la Maison. Les enfants, par le biais des divers tests, nous montrent comment ils arrivent, une fois sécurisés, à réorganiser leur pensée et à mieux composer avec ces éléments de leur histoire. En fait, à leur départ, ces jeunes sont capables de parler de leurs émotions, de nommer leurs besoins. Ainsi, un garçon nous a demandé clairement de ne pas souligner son départ de la Maison tant qu’il ne se sentirait pas en sécurité dans son nouveau foyer d’accueil et qu’il n’aurait pas expérimenté la permanence de la situation. Nous avons attendu son signal pendant un an. Nous savons maintenant qu’il est enraciné dans sa nouvelle famille.
66Même s’ils garderont toute leur vie des traces de leur passé, les enfants nous semblent mieux outillés pour faire à nouveau confiance aux adultes. Les manifestations d’attachement relevant de la sécurité sont beaucoup plus fréquentes. Lorsque les adultes qui prennent soin d’eux mettent en place ce qu’il faut pour les sécuriser, on les découvre capables de s’autoréguler et, pour une des premières fois de leur vie, d’être disponibles pour l’apprentissage. Certains enfants arrivent d’ailleurs à fréquenter une classe régulière. Un des enfants qui, pour ne pas souffrir, s’était construit à son arrivée « une bulle autistique » présente aujourd’hui de bonnes capacités relationnelles. La médication de plusieurs enfants a pu être réduite ou arrêtée. Les difficultés de langage – certains enfants ne parlaient pas à l’âge de quatre ans – se sont estompées et la communication verbale s’est enrichie. Les enfants qui nous ont quittés se développent bien dans leur famille d’accueil. Voilà certains des constats qui nous laissent croire que la reprise du développement est bien engagée, et que notre intervention est utile.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Autorégulation : capacité de contrôler et de maintenir, dans des limites confortables, des sentiments, des émotions, des fonctions corporelles et des réactions comportementales. Acquise par la corégulation initiale avec le donneur de soins principal.
2 Une application du protocole du C.P.I. (Crisis Prevention Institute).
Auteur
M.Ps.ed. Psychoéducateur, psychodramatiste. Agent de planification, de programmation et de recherche, Maison l’Escargot, CJM
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Aménager autrement les territoires ruraux
Gérald Domon et Julie Ruiz (dir.)
2014