S’aliéner pour survivre : folie et sacrifice dans Les fous de Bassan d’Anne Hébert et Le ravissement d’Andrée A. Michaud

1Le roman québécois contemporain prend depuis quelques années les airs d’un asile dissimulant entre ses murs (pour mieux les mettre en évidence) des personnages plus marginaux que fous, des alcooliques, des sans-abri, des adolescents égarés et autres originaux et détraqués1. On se rappelle évidemment les personnages excentriques de Nelly Arcan ou ceux un peu fêlés de Marie-Sissi Labrèche ; mais, plus subtilement, des personnages comme celui de Julie dans L’obéissance de Suzanne Jacob ou, encore plus près de nous, ce survenant nouveau qu’est le Barabé du Discours sur la tombe de l’idiot de Julie Mazzieri sont des exemples puissants de la force réciproque qu’appliquent l’un sur l’autre le groupe et l’individu. En effet, qu’ils aient été rejetés par la communauté ou qu’ils s’en soient volontairement retranchés, ces personnages sont porteurs d’un discours, il faut l’avouer, bien souvent biaisé par une franche hostilité ou par un ressentiment imprégné d’envie envers le groupe dont i