Annexe. Les sources de la population chinoise 1700-2000
p. 239-251
Texte intégral
La démographie historique
1Pendant près d’un demi-siècle, deux avancées en histoire de la population et de la famille furent cruciales pour le développement des études sur la population et de l’histoire socioscientifique quantitative1. D’abord, vers la fin des années 1950, les démographes développèrent un corpus de techniques d’analyse connu sous le nom de « reconstitution de la famille » pour calculer les taux démographiques sur la base des registres de mariages, de baptêmes et d’enterrements (Gauthier et Henry, 1958). Puis, à la fin des années 1960, un groupe d’historiens et d'anthropologues proposèrent et vulgarisèrent une série de classifications analytiques de la structure du ménage pour mesurer les changements de sa complexité (Laslett et Wall, 1972). Ces deux ensembles de techniques furent parmi les premières méthodes quantitatives de l’analyse socioscientifique aisément accessibles à presque tous les historiens : leur synthèse inspira plusieurs études historiques de la fécondité et de la mortalité, du mariage et de la migration, de la structure et de la formation du ménage, des cycles individuels et domestiques en Europe. Les résultats ont produit un nouvel ensemble de mesures objectives de la vie occidentale dans le passé. En même temps, ils ont fourni des critères généralisables grâce auxquels on put comparer les expériences historiques des sociétés de différentes parties du monde.
2De telles études ont fortement élargi notre connaissance de l’histoire, même celle du petit peuple et du quotidien. D’une part, l’histoire de la population a défini des modèles de comportement des gens du commun et a renouvelé notre compréhension de plusieurs coutumes sociales et conditions économiques ; d’autre part, l’histoire de la famille a mis en relief les types de ménages courants et leur formation dans le passé ; de plus, elle a jeté une nouvelle lumière sur l’organisation de la production, la transmission de la propriété et l’apparition de l’affect familial. Les historiens européens, en particulier, ont lié de tels changements à la transition du féodalisme au capitalisme. Ils ont montré que ce processus était lié de manière inextricable aux changements des taux démographiques, où la fécondité passe d’élevée à faible, ainsi qu’à des changements dans la fonction du ménage qui, d’unité de production, devint unité de socialisation. En conséquence, une grande part de notre compréhension de la transformation moderne du monde occidental est enracinée dans l’histoire de la population et de la famille.
3Les savants chinois étaient, bien sûr, conscients depuis longtemps du rôle central de la famille et du ménage dans la société chinoise. En Chine, les concepts de famille et de ménage remontent à la préhistoire (Ho, 1975). L’importance de la famille fut réaffirmée par Confucius et développée par Mencius aux Ve et IVe siècles av. J.-C. En fait, Mencius renforça ce rôle essentiel de la famille en affirmant que parmi les cinq relations humaines primordiales, trois sont des relations familiales : celles entre père et fils, entre frère aîné et frère puîné, et entre mari et épouse2. Depuis, les Chinois modelèrent leur comportement sur la base d’une hiérarchie établie entre les enfants, les parents plus âgés et plus jeunes, ainsi que les hommes et les femmes. Les historiens de la Chine ont en conséquence consenti de grands efforts pour définir la structure formelle de la parenté et le système correspondant des normes de comportement dans la société traditionnelle (Freedman, 1966). Mais, en raison du manque de données significatives, on trouve très peu d’études anciennes portant sur la structure formelle de la famille et celle du ménage, même dans la période impériale tardive.
4Les savants chinois reconnaissent aussi depuis longtemps l’importance de l’histoire de la population dans le passé, ne fût-ce qu’en raison du grand nombre de Chinois qui y vécurent. En fait, l’augmentation dramatique de la population, qui passa de 160 000 000 d’individus en 1700 à près de 500 000 000 en 1900, est probablement la contribution que l’on mentionne le plus souvent de la période impériale tardive. En dépit de telles études, nous connaissons cependant encore très peu de choses au sujet des caractéristiques démographiques de cette période. Jusqu’à très récemment, il était juste de dire que les Chinois de cette époque étaient les moins bien connus de toutes les populations historiques majeures.
5Le changement fut soudain. De nouvelles données et de nouvelles méthodes ont commencé à éclairer la démographie historique chinoise. Des progrès majeurs en Chine, comme en Europe, s’inspirèrent de la découverte et de l’analyse des registres nominatifs. Trois types de sources furent particulièrement importantes : les généalogies rétrospectives, les registres des ménages contemporains et les registres de vie continus. En se basant sur ces sources, les historiens démographes purent reconstruire l’histoire d’une population de quelque 500 000 individus de six régions géographiques principales résumée dans le Tableau A.1, soit environ 0,02 % de la population de la Chine d'alors. La recherche sur ces sources a déjà fait avancer notre connaissance du comportement de la population en Chine.
6La plupart des données proviennent des généalogies couvrant de grands territoires, mais ces données sont aussi les plus imparfaites (Telford, 1986)3. Car les généalogies sont les sources qui ont le moins d’information corrélative sur les circonstances historiques des sujets étudiés. Le plus regrettable, c’est que ces données sont rétrospectives et très incomplètes : elles rendent compte davantage des hommes mariés qui ont vécu jusqu’à un âge avancé et dont plusieurs fils ont survécu, que des hommes non mariés ou qui n’ont pas eu d’enfants. Des modèles inconnus de survivance des fils peuvent fausser l’analyse démographique de ces données (Pope, 1989).
7Le deuxième type de sources de données le plus couramment disponible, soit les registres de ménages, offre des renseignements démographiques beaucoup plus complets que les généalogies rétrospectives, soit des informations détaillées sur le métier et une variété d’autres indicateurs. De plus, elles sont les seules sources à fournir des renseignements détaillés sur le contexte familial. À ce jour, la recherche sur les registres de ménages s’est limitée à Taiwan pour la période de 1895 à 1945 et au Liaoning pour la période de 1750 à 19094. Si la découverte et l’étude des registres de Taiwan sont attribuables à l’occupation coloniale japonaise, des registres semblables à ceux du Liaoning existent pour Beijing et pour les provinces du Jilin, du Heilongjiang, de la Mongolie intérieure et du Hebei (Thatcher, 1998). D’autres formes de registres de ménages ont aussi été découvertes, en particulier dans le système d’enregistrement baojia très commun dans la plupart des régions de la Chine proprement dite5. Ces registres portaient habituellement sur des populations paysannes et sont donc probablement plus « typiques » que les sources généalogiques. En même temps, ils exigent un processus beaucoup plus laborieux de classification et de recoupement des données.
8Les archives de l’enregistrement vital de la lignée impériale Qing, la troisième source de données, portent sur la population dont l’enregistrement est le plus complet de l’histoire chinoise et offrent le plus d’informations socioéconomiques6. Elles sont aussi sans aucun doute atypiques, puisque la lignée impériale Qing était une population d’élite dont le seul soutien financier était l’Etat. Fortement contrôlée, elle était cantonnée surtout dans deux grandes villes : Beijing et Shenyang. Quoi qu’il en soit, la lignée impériale Qing fut l’une des plus nombreuses et des plus longues populations longitudinales.
9Aucune de ces populations n’est « typiquement » chinoise. Chacune est liée à son contexte spécifique — âge, classe, climat, culture, ethnie, géographie, histoire, institutions, activité, sexe, type de résidence ou période. Des données sur les populations chinoises représentant la nation entière seront disponibles seulement après l’avènement des recensements et des enquêtes par sondages de la deuxième moitié du XXe siècle (étudiés plus loin). Plusieurs historiens de la population ont étudié la variation significative dans le comportement conjugal et dans la fécondité conjugale en rapport avec la propriété terrienne, le métier ou le statut social (Harrell, 1985 ; A. Wolf, 1985b ; Telford, 1990a ; 1990b ; 1994 ; 1995 ; Lee, Wang et Campbell, 1994 ; Lee et Campbell, 1997). La simple association peut donc être très abusive et non représentative. Les techniques analytiques de l’histoire événementielle sur le plan de l’individu, illustrées dans plusieurs publications récentes, permettent cependant la plupart du temps aux démographes de contrôler ces contextes (Wang, Lee et Campbell, 1995 ; Campbell ; et Lee 1996, 2003).
TABLEAU A.1. Reconstitution des populations historiques chinoises
Période |
Lieu |
Taille de la population |
Type de données |
1000-1749 |
Indéterminé |
4 265 |
Généalogie rétrospective |
1200-1900 |
Jiangnan |
261 420 |
Généalogie rétrospective |
1250-1900 |
Xiaoshan |
6 592 |
Généalogie rétrospective |
1300-1900 |
Suzhou |
6 000 |
Généalogie rétrospective |
1520-1661 |
Anhui |
40 000 |
Généalogie rétrospective |
1600-1920 |
Beijing |
100 000 |
Enregistrement vital |
1600-1900 |
Mandchourie |
5 000 |
Généalogie contemporaine |
1760-1910 |
Liaoning |
50 000 |
Registre de ménage |
1905-1935 |
Taiwan |
50 000 |
Registre de ménage |
Total |
523 277 |
Sources et notes : Indéterminé : la généalogie Wangshi tongpu, reconstruite dans Zhao Zhongwei (1997) ; selon Zhao, les Wang n’avaient aucun lieu de résidence précis.
Jiangnan : 147 956 hommes et 113 464 femmes enregistrés dans 49 généalogies rétrospectives de 12 provinces reconstituées par Liu Ts’ui-jung (1992) : Anhui (3), Fujian (1) Guangdong (5), Hebei (4), Henan (2), Hubei (2), Hunan (3), Jiangsu (9), Jiangxi (3), Shandong (3), Taiwan (1), Zhejiang(13).
Xiaoshan : Les généalogies de lignée des He, Lin, Shi, et Wu, reconstituées par Harrell (1985) et Harrell et Pullum (1995). La généalogie des He, compilée en 1983, traite de 3 078 cas, mais seulement 3 300 d’entre eux ont des événements vitauxdocumentés.
Suzhou : Les généalogies de Shanghai Caoshi zongpu et Dengjiang Fanshi zongpu, reconstruites par Hou Yangfang et Peng Xizhe et rapportées par Hou (1997).
Anhui : 41 généalogies rétrospectives de la préfecture de Tongcheng, transcrites par Telford (1990b).
Beijing : 43 950 fils et 34 765 filles nés dans la lignée impériale et quelque 30 000 épouses inscrits dans les registres de l’état civil des archives du bureau de la lignée impériale. Voir Lee, Campbell et Wang (1993) et Lee et Guo (1994) pour une description détaillée des données et des institutions qui les ont produites.
Mandchourie : La généalogie Niuhulushi reconstruite par Lai Huimin (1991).
Liaoning : Registres des ménages pour 10 populations préservés dans les archives provinciales du Liaoning et rendus publics par l'Utah Genealogical Society. Voir Lee et Campbell (1997, p. 223-237) pour une description de ces données pour une population, celle de Daoyi. Comme chaque individu a en moyenne sept ou huit annotations, le nombre d’enregistrements est beaucoup plus considérable, environ 500 000. Pour Daoyi, nous avons inscrit 114 272 enregistrements individuels. Pour les autres populations, les chiffres sont 29 578 pour Chengnei, 25 378 pour Dami, 100 000 pour Feicheng et Yimian cheng, 37 188 pour Gaizhou, 22 558 pour Gaizhou Mianding Guo Santun, 70 000 pour Niuzhuang Liuerbao Lama Yuan Yuding (70 000 enregistrements pour 10 000 indi vidus), etc.
Taiwan : Registres de ménages en japonais, reconstruits dans Chuang et Wolf (1995). Voir A. Wolf et Huang (1980) pour une description de ces données pour la population de Haishan.
10En outre, les généralisations basées sur des données historiques de ce type sont encore possibles quand ces populations « atypiques » partagent des comportements qui ne sont associés à aucune caractéristique spécifique d’une autre population. Ainsi, quand toutes les populations chinoises, indépendamment du lieu, de la période et des circonstances sociales et économiques, présentent une fécondité conjugale faible et un mariage féminin universel, il est raisonnable de conclure qu’un tel comportement est typique du système démographique chinois. De la même manière, quand des populations différentes manifestent des comportements comparables, liés à des caractéristiques spécifiques, il est aussi raisonnable de conclure que d’autres populations avec cette caractéristique peuvent avoir le même comportement. Par exemple, si les populations d’États qui interdisaient l’émigration avaient généralement des taux d’infanticide féminin élevés et des taux de fécondité conjugale particulièrement faibles, on peut raisonnablement conclure que les populations qui sont moins libres et mobiles exercent aussi plus de contrôle collectif sur leur comportement démographique.
La démographie contemporaine
11À l’opposé de la plupart des matériaux relatifs à la population historique et seulement valables pour des régions données, presque toutes les sources concernant la population contemporaine sont, par définition ou à dessein, nationales ou représentatives à l’échelle nationale. Au cours du dernier demi-siècle, la Chine produisit une abondance de données sociales et démographiques souvent représentatives à l’échelle nationale. La production fut particulièrement rapide au cours des 15 dernières années, en raison de deux avancées méthodologiques et techniques. D’abord, l’utilisation de techniques de sondage aléatoire dans la mise en œuvre de sondages de haute qualité. Ces enquêtes par sondage conçues scientifiquement permettent non seulement de poser des questions plus en profondeur, concernant, par exemple, l’histoire des naissances, mais elles peuvent aussi être souvent reprises à un coût moins élevé. La deuxième avancée, l’usage des ordinateurs pour stocker et analyser les données, a permis un réseautage et une modélisation beaucoup plus sophistiqués des données sur le plan individuel et un examen plus poussé des modèles de comportement démographique passés et présents. De manière générale, les données démographiques chinoises modernes peuvent être classées selon trois sources principales : l’enregistrement de la population, les recensements et les enquêtes par sondage représentatif à l’échelle nationale.
12Jusqu’à une date récente, l’enregistrement de la population était la source principale de données démographiques contemporaines en Chine. À l’exception des recensements de 1953 et 1964, l’enregistrement des données des ménages, jusqu’aux années 1980, était la seule source statistique pour établir des taux de population aussi bien nationaux que régionaux7.À partir de 1949, les efforts fournis par l’État pour intégrer l’enregistrement de la population à la planification économique nationale et l’usage de l’enregistrement comme instrument de contrôle social reposaient sur une tradition séculaire d’enregistrement des ménages8. Depuis la fin des années 1950, le système de l’enregistrement des ménages s’est développé dans une institution nationale dont l'envergure englobe chaque individu9. Le système a permis au gouvernement chinois d'établir et de mettre à jour des profils démographiques annuels qui incluaient non seulement les totaux de la population nationale et régionale, mais aussi des renseignements vitaux systématiques sur des événements comme la naissance, la mort et la migration10.
13L’enregistrement de la population est connu en Chine comme l’enregistrement des ménages, parce que chaque individu est enregistré comme faisant partie d’un ménage résidentiel (jumin hu) ou d’un ménage institutionnel (jiti hu) comme le dortoir d’usine ou l’unité militaire. Chaque individu enregistré se voit aussi assigné un statut d’enregistrement dans un ménage (hukou), qui indique non seulement le lieu géographique, mais aussi l’affiliation agricole ou non agricole11. Ce statut d’enregistrement dans un ménage constituait la base de l’octroi à une personne de ses droits économiques et sociaux comme le rationnement de la nourriture et des tissus, l’allocation de la terre, l’éducation publique et les soins de santé (Cheng et Selden, 1994).
14La deuxième source majeure des données démographiques en Chine contemporaine est le recensement. Celui-ci a été utilisé non seulement pour dénombrer la population de la Chine, mais aussi pour vérifier et mettre à jour les registres de la population établis à partir de l’enregistrement du ménage. Au cours des cinq dernières décennies, la Chine a mené quatre recensements : en 1953, en 1964, en 1982 et en 1990. Avec les années, la couverture de la population s’est améliorée. Les recensements les plus récents comportent aussi beaucoup plus d'informations que les registres de ménages12. L’utilité des données de recensement a aussi beaucoup augmenté à partir de celui de 1982, car les données sur l’individu étaient disponibles sur support d’enregistrement portable13.
15La troisième source de données, les techniques de sondage aléatoire conçues scientifiquement, est particulièrement utile pour la démographie sociale. Le Tableau A.2 donne une liste des enquêtes citées dans cet ouvrage. Ces sources n’ont été accessibles qu’au cours des deux dernières décennies. Reconnaissant les limites des données d’enregistrement des ménages et des recensements, plusieurs institutions du gouvernement chinois et du monde universitaire ont lancé une série d’enquêtes majeures utilisant les techniques de sondage aléatoire nouvellement introduites. À la différence des données d’enregistrement et des recensements, dont la collecte est coûteuse et qui peuvent seulement traiter d’un nombre limité de questions, ces enquêtes ont un rendement plus élevé et sont donc plus appropriées pour poser des questions plus détaillées. En comparaison des recensements chinois plus récents, qui comportaient 21 questions, par exemple, certaines enquêtes nationales récentes en contenaient plus de 100.
16Ces enquêtes par sondage, non seulement fournissent des sources de données démographiques courantes, mais, dans plusieurs cas, permettent aussi la construction d’une histoire démographique nationale représentative du passé récent. Ceci est particulièrement vrai de deux enquêtes nationales sur la fécondité : le Fertility Sample Survey de 1982, aussi connu sous le nom de One-per-Thousand Survey, qui porta sur plus de 300 000 femmes déjà mariées âgées de 15 à 67 ans ; et l’enquête de 1988 sur la fécondité et la contraception, aussi connue sous le nom de Twoper-Thousand Survey, portant sur près d’un demi-million de femmes âgées de 15 à 57 ans. Ces deux enquêtes ont fourni une histoire détaillée de la grossesse, de la naissance et de la contraception pour les femmes chinoises, en remontant jusqu’à la fin des années 1940, permettant ainsi aux chercheurs de retracer le processus et les origines du déclin rapide de la fécondité en Chine (R. Freedman et al., 1988 ; Wang, 1988 ; Lavely et Freedman, 1990 et Zhao Zhongwei, 1998)14.
17L’utilisation de ces données a permis aux démographes de reconstruire les historiques du mariage et de la fécondité en Chine à l’échelle nationale et régionale à partir de 194015. Les résultats de ces reconstructions ont généralement corroboré les conclusions de sources de données plus anciennes et plus localisées, comme le niveau de fécondité (Coale et Chen, 1987) et le comportement de la fécondité (Coale, Li et Han, 1988 ; Wang et Tuma, 1993 ; Wang et Yang, 1996 et Zhao Zhongwei, 1998)16.
TABLEAU A.2. Enquêtes démographiques contemporaines en Chine
Année |
Lieu |
Taille de l'échantillon |
Exemple du contenu |
1982 |
Chine |
1 100 000 femmes déjà mariées |
Historique de la grossesse et de la naissance pour les femmes âgées 15 à 67 ans |
1985 |
Hebei, Shaanxi et Shanghai |
13 300 femmes déjà mariées |
Historique conjugal, de la grossesse, de la naissance et de l’usage des contraceptifs |
1987 |
Chine |
2 500 000 femmes déjà mariées |
Historique de la grossesse, de la naissance et de l’usage de contraceptifs |
1987 |
Beijing, Liaoning, Shandong, Gansu et Guizhou |
36 000 femmes déjà mariées |
Historique conjugal, de la grossesse, de la naissance et de l’usage des contraceptifs |
1987 |
Chine |
1 % de la population nationale-110 000 |
Population courante, mariage, naissance, décès |
1992 |
Chine |
380 000 |
Historique de la naissance et de l’usage de contraceptifs |
1995 |
Chine |
1 % de la population nationale - 120 000 |
Population courante, mariage, naissance, décès, migration |
18En outre, la disponibilité simultanée de trois sources de données fournit aux chercheurs l’occasion de vérifier la qualité des données de chacune d’elles. Par exemple, en utilisant des taux de décès dérivés des ratios de survivance entre les recensements de 1982, 1964 et 1953, ainsi que les taux de fécondité de l’enquête indépendante de 1982 sur la fécondité, Ansley Coale (1984) fut capable de construire une population nationale pour la Chine de 1982 à partir des taux de naissances et de décès. Il compara alors cette population selon l’âge de la population donné par le recensement de 1982. Coale trouva la correspondance entre les deux sources indépendantes de données « extraordinaire » (ibid., p. 21)17.
19Comparées aux sources de données historiques, ces données démographiques contemporaines ont cependant d’importantes limites. Non seulement elles sont par définition moins longitudinales, mais elles sont aussi moins détaillées que les meilleures données historiques. Les enquêtes contemporaines, par exemple, sont généralement incapables d’apporter des renseignements sur des variables socioéconomiques du passé, comme le rendement occupationnel, la composition et la structure du ménage, et les relations de parenté. Les données des enquêtes contemporaines ont donc une utilité limitée pour l’exploration et la compréhension des interactions passées entre le comportement démographique et le contexte social sur le plan de l’individu.
20Les données de ces enquêtes n’en demeurent pas moins très prometteuses pour la recherche à venir. En tenant compte des séries temporelles de données historiques déjà disponibles sur des localités choisies en Chine, il est maintenant possible de combiner les données historiques avec des données d’enquêtes contemporaines établies sur les mêmes populations et de construire des séries de données détaillées et continues pour certaines localités. Ces recherches permettront de raffiner notre compréhension et notre évaluation du comportement démographique chinois.
Notes de bas de page
1 Cet appendice est une expansion de Lee et Campbell (1997, p. 223-237). R. Bin Wong nous a secondés dans cette composition et nous lui sommes reconnaissants de son aide.
2 Les deux autres relations, celles entre prince et ministre et entre ami et ami, sans être explicitement familiales, sont certainement paternalistes.
3 Liu Ts’ui-jung (1978) fut peut-être le premier démographe historien à utiliser les généalogies pour reconstruire l’histoire de la population de la Chine. Voir Telford (1986) pour une description détaillée des types de données présentes dans les généalogies chinoises, et Harrell (1987) et Telford (1990b) pour une évaluation de leur qualité.
4 A. Wolf et Huang (1980, p. 16-33) demeure la meilleure introduction aux registres de ménages de Taiwan en japonais ; Lee et Campbell (1997, p. 223-237) fournissent la meilleure introduction aux données sur le Liaoning.
5 Voir Rozman (1982) pour une analyse de ce type de données sur la population et G. W. Skinner (1986) pour une importante évaluation (qualification) de la complétude et de l’exactitude de ces données.
6 Lee, Campbell et Wang (1993) est la meilleure introduction en anglais aux archives de la lignée impériale Qing. Mais voir aussi les essais dans Lee et Guo (1994).
7 Les chiffres de la population nationale et provinciale de la Chine publiés dans les Annuaires statistiques de Chine jusqu’à 1987 sont tous basés sur l’enregistrement des ménages.
8 Un tel effort commença en 1951 avec la population urbaine, quand le gouvernement émit un décret sur les « Mesures temporaires pour la gestion de l’enregistrement des ménages urbains ». Un nouveau système national d’enregistrement prit forme au milieu des années 1950. En 1955, le Conseil d’Etat chinois émit son « Instruction sur l’établissement d’un système régulier d’enregistrement des ménages ». En 1958, le Congrès national du Peuple approuva les « Règles pour l’enregistrement des ménages dans la République populaire », qui établissent le système moderne d’enregistrement de la population (Zhang Qingwu et Wang, 1997).
9 Comparé aux résultats des recensements de 1964 et 1982, qui comptèrent les populations de l’année précédente, le décompte de la population nationale basé sur le système d’enregistrement de 1963 et 1981 avait une marge d’erreur de seulement 0,8 et 0,1 % respectivement (Zhang Qingwu et Wang, 1997, p. 88). Même si l’augmentation récente de la migration a rendu beaucoup plus difficile l’enregistrement complet des ménages et sa mise à jour, la qualité de celui-ci reste élevée. En 1990, 97,3 % des données du recensement étaient toujours identiques aux données de l’enregistrement des ménages (Sun Jinxin, 1997, p. 6). En outre, au cours des dernières années, la Chine a fait de nouveaux efforts pour mettre à jour et pour améliorer son système d’enregistrement de la population. Un des développements remarquables est l’établissement à travers toute le Chine du système de gestion informatisée de l’information sur les résidents permanents, qui vise à remplacer le système d’enregistrement et de tabulation manuels utilisé au cours du dernier demi-siècle. De 1992 à 1996, 10 119 postes de police à travers le pays mirent sur pied ce système et plus de 240 000 000 de registres personnels sont maintenant « en ligne » (Zhang Qingwu et Wang, 1997, p. 91).
10 L’effort d’utilisation de ces données le plus ambitieux est sans doute la publication dans les années 1980 de la série en 32 volumes La population de la Chine (Lavely, Lee et Wang, 1990).
11 Chaque ménage maintient un livret d’enregistrement qui prévoit un formulaire d’une page pour chaque individu. Les éléments initiaux d’enregistrement formulés en 1958 incluent le rapport avec le chef du ménage, le nom, la date et le lieu de naissance, l’âge au moment de l’enregistrement ou de la compilation, l’origine (normalement le lieu de naissance du père), l’ethnie, la religion, l’appartenance de classe (chengfen), le niveau de scolarité, le statut conjugal, l’activité, le lieu de travail, le statut de service militaire, la date, l’origine ou la destination de la migration. En 1981, l’âge, l’appartenance de classe et le statut du service militaire furent enlevés de l’enregistrement et, en 1985, le type de ménage, le statut militaire, la taille, le groupe sanguin et la justification pour demander une carte d’identité de résident furent ajoutés.
12 Le nombre d’éléments à remplir dans le formulaire passa de 6 en 1953 à 21 en 1990. Le recensement de 1953 ajouta seulement l’adresse du ménage, le nom, le sexe, l’âge, la nationalité et la relation avec le chef du ménage. Plusieurs éléments ajoutés ne furent jamais publiés. L’information sur l’activité ne fut jamais compilée parce qu’il n’y avait pas de rubrique classificatoire. Le recensement de 1982 abandonna l’appartenance de classe mais ajouta le type de ménage, le nombre de membres du ménage, le nombre de naissances dans le ménage l’année précédente, le nombre de décès dans le ménage l’année précédente, le nombre de personnes qui ont quitté le lieu d’enregistrement pour plus d’un an, le statut d’enregistrement du ménage, l’industrie, l’occupation et le statut des membres sans travail, le statut conjugal, le nombre d’enfants nés et vivants et le statut de la grossesse au cours de l’année précédente. Le recensement de 1990 ajouta des questions sur la résidence permanente et les raisons d’émigration.
13 Voir, par exemple, Li Chenrui (1986) pour la documentation et les analyses du recensement de 1982, SSB (1987) et (1993) pour le classement des recensements de 1982 et 1990. Des échantillons des données de recensement sont accessibles au public pour des analyses sur le plan individuel. Voir Banister (1987) et Coale (1984) pour des exemples de leur utilisation.
14 L’enquête de 1982 demanda à chaque répondante âgée de moins de 67 ans de rappeler l’histoire de ses grossesses et de ses naissances ; l’enquête de 1988 recueillit en plus l’historique de la contraception : En conséquence, l’enquête de 1988 fournit des données pour étudier non seulement les changements démographiques au cours de la première moitié des années 1980 (Coale et al., 1991 ; Feeney et Wang, 1993), mais aussi l’historique des grossesses et de l’usage des contraceptifs sans oublier d’autres questions sociodémographiques de la Chine contemporaine (Wang et Tuma, 1993 ; Wang et Yang, 1996 et Wang, à paraître).
15 Coale (1984) présente la construction d’une matrice démographique incluant les tendances établies selon une perspective temporelle de la nuptialité et de la fécondité pour la période 1952-1982, et de la mortalité pour 1953-1964 et 1964-1982. Lavely (1986) fournit des données sur la fécondité conjugale en Chine. Coale et Chen (1987) fournissent des données sur la fécondité par groupes d’âge et sur la durée de la fécondité conjugale sur le plan national et provincial et par type de résidence rurale ou urbaine de 1940 à 1981. Feeney et Yu (1987) calculent la fécondité en Chine par parité et par type de résidence rurale ou urbaine.
16 Coale, Li et Han (1988) et Wang et Yang (1996) analysent les longs intervalles entre les naissances, alors que Wang et Tuma (1993) étudient le comportement du mariage dans le passé. Zhao Zhongwei démontre que même les sous-populations avec les taux de fécondité les plus élevés de la République de Chine exerçaient un contrôle de la fécondité conjugale bien avant la baisse de la fécondité nationale d’aujourd’hui.
17 D’autres utilisations de ces sources multiples incluent Feeney et al. (1989), Coale et al. (1991) et Feeney et Yuan (1994).
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Mythe et philosophie à l'aube de la Chine impériale
Études sur le Huainan zi
Charles Le Blanc et Rémi Mathieu (dir.)
1992
La Chine imaginaire
Les Chinois vus par les Occidentaux de Marco Polo à nos jours
Jonathan D. Spence
2000