La politisation du milieu communautaire au Québec : vers une redéfinition des pratiques de la citoyenneté ?
p. 243-265
Texte intégral
1Au québec, les citoyens interviennent dans le processus politique provincial en dehors des échéances électorales par le biais, notamment, des acteurs sociaux (syndicats et groupes communautaires) qui ont activement participé à la mise en place de l’État social et qui participent aujourd’hui à sa transformation. Les groupes communautaires ont, ainsi, toujours joué un rôle politique important à titre d’acteur dans l’espace public, en étant étroitement associés au processus de décision publique. Il s’agit, dans ce chapitre, de cerner un processus sensiblement different de politisation du milieu communautaire québécois qui a conduit une partie des groupes à investir de nouveaux pôles de la représentation politique, qui les a également amenés à modifier leur répertoire d’actions et de discours et, par ricochet, qui a transformé les relations que ces groupes entretenaient à l’État et au pouvoir.
2Évidemment, la réalité du milieu communautaire est multiple et complexe et plusieurs histoires se côtoient. Nous en privilégions une pour la démonstration, au risque de présenter une image trop polie de la réalité. La première partie propose une grille d’analyse permettant de formaliser l’intuition qu’il existe en pratique plusieurs types de représentation politique alors que la deuxième partie met à l’épreuve cette grille en retraçant les changements observés dans le rapport au politique du milieu communautaire québécois depuis la fin des années 1980.
Le losange de la représentation
3Si de plus en plus d’auteurs s’accordent pour élargir la conception que nous avons de la représentation politique, peu de travaux proposent une formalisation ou une systématisation de ce concept élargi, qui pourrait orienter et guider la recherche empirique. En effet, cet aspect (l’élargissement du champ de la représentation politique) est soit traité du point de vue des organisations (en quoi cet élargissement a-t-il un impact sur le rôle des mouvements sociaux ou sur le rôle des partis politiques ?) ; soit, dans les rares travaux considérant différents acteurs en même temps, les analyses sont posées sur le plan des possibilités de nouvelles complémentarités ou de nouvelles compétitions entre les acteurs1. Il n’y a donc pas, à notre disposition, de cadre d’analyse permettant de poser la question empirique des relations de tous ces acteurs dans le champ de la représentation politique ; autrement dit, et concrètement, de répondre à qui fait quoi, où et comment ? L’utilisation d’un tel cadre aurait pour avantage d’être transposable dans le temps et l’espace et, de ce fait, de permettre une comparaison plus systématique des situations historiques et géographiques. La deuxième dimension « cachée » par l’analyse trop fragmentée du phénomène de transformation des démocraties représentatives est celle de la multiplication des lieux de la représentation politique et l’imbrication de ces lieux. Plusieurs travaux traitent du retour du local, des quartiers comme unité pertinente d’analyse de l’action collective et de la représentation politique ; d’autres analysent le plan mondial comme un nouveau lieu de représentation, mais force est de constater que les liens entre la diversification des lieux et la multiplicité des acteurs impliqués dans le champ de la représentation politique ne sont pas établis2.
4En proposant de travailler dans un cadre global d’analyse faisant intervenir des pôles de représentation, nous espérons pallier, en partie tout au moins, ce manque d’intégration de l’analyse. Nous partons du constat empirique selon lequel il est nécessaire de penser de manière déconnectée les acteurs et les lieux de la représentation, les acteurs pouvant intervenir sur plusieurs lieux en même temps.
5La représentation politique est, ici, considérée comme l’opération d’agrégation-conversion des identités socialement construites et des intérêts socio économiques en intérêts politiques3. Le losange ci-dessous décrit quatre pôles de représentation des intérêts et des identités :
6L’idée originale du « losange de bien-être » consiste à rendre compte du fait que la responsabilité du bien-être a toujours été partagée entre différents secteurs de responsabilité (responsabilité publique, familiale, communautaire ou marchande), qui se caractérisent par des logiques d’intervention spécifiques4. En transposant cette grille à la représentation politique, nous signifions que la responsabilité de la représentation des intérêts et des identités a, elle aussi, toujours été partagée par plusieurs pôles de représentation. Evidemment, l’importance, la prégnance ou la domination de certains pôles sur d’autres varient en fonction des lieux et des époques considérées.
7Chaque pôle se caractérise par un lieu où des acteurs politiques et sociaux entrent en interaction. Plus précisément, cette arène, au sens de Neveu, est un « système organisé d’institutions, de procédures et d’acteurs dans lequel des forces sociales peuvent se faire entendre, utiliser leurs ressources pour obtenir des réponses aux problèmes quelles5 ». Il distingue, entre autres, l’arène électorale, l’arène médiatique et l’arène des conflits sociaux. D’autre part, chaque pôle se définit par une logique de représentation, qui spécifie la forme privilégiée de celle-ci. S’agit-il d’une représentation par délégation de pouvoir ou par participation directe des mandants ; la représentation est-elle plutôt individuelle ou au contraire collective ; l’opération de représentation se fait-elle sur le mode de la confrontation entre les acteurs ou plutôt sur celui de la collaboration ? Le croisement de ces deux éléments permet de distinguer un pôle d’un autre.
8Le pôle « démocratie électorale » se définit par un lieu : l’arène électorale et une logique de représentation fondée sur la délégation de pouvoir des citoyens à un représentant élu. Basé sur la reconnaissance de la souveraineté populaire, ce pôle favorise une représentation des intérêts et des identités des citoyens par agrégation. Cette fonction de représentation au sein des institutions de représentation que sont, généralement, le gouvernement et le parlement, est révocable à chaque fin de mandat électoral.
9Dans nos sociétés, la grande majorité des représentants sont issus des partis politiques. Ceux-ci sont classiquement distingués des autres acteurs collectifs parce qu’ils sont les seuls, en théorie, dont l’objectif final est la conquête du pouvoir et des institutions qui s’y rapportent. Ils sont également les seuls à potentiellement devenir le parti de gouvernement et donc à assurer un accès direct à la puissance souveraine de l’Etat. Toujours selon la présentation classique des manuels de sociologie politique, les autres acteurs collectifs vont chercher, eux, à influencer le pouvoir, mais non à l’exercer. Cette distinction ne tient plus empiriquement, puisque nous voyions depuis quelques années des collectifs non partisans exercer le pouvoir à l’échelle municipale, ou des candidats aux élections se présenter sans bannière partisane. Autrement dit, ce pôle de représentation se définit par la forme de la représentation qu’il propose (une représentation par délégation de pouvoir et agrégation d’intérêts) et non par le média qui en assure, traditionnellement la fonction (les partis politiques).
10Le pôle « néo-corporatisme » propose une représentation collective des intérêts liés à la place des personnes dans la sphère de production (intérêts de classe ou de statuts). Le lieu de la représentation est celui de l’arène des conflits sociaux. La logique de représentation est, quant à elle, multiple : il s’agit d’une agrégation des intérêts, de la construction d’une identité collective et d’une parole collective publique, de confrontation avec le pouvoir politique ou de participation aux décisions et à la gestion publique par le biais de négociations. Cette forme spécifique de représentation met l’accent sur le rôle structurant des acteurs collectifs liés au secteur de production capitaliste dans les processus politiques.
11En pratique, il existe des partenariats privilégiés entre certains acteurs (en règle générale les syndicats et les organisations patronales) et l’État dans la mise en place des politiques publiques. Dans certains cas, les modes de concertation entre l’État et ces acteurs seront très institutionnalisés, dans d’autres, ils seront plutôt de l’ordre de la « pratique politique ». Cela dit, d’autres acteurs que les organisations syndicales et patronales peuvent intervenir dans ce pôle de représentation, comme les partis politiques ouvriers ou les partis politiques proches des organisations patronales, mais aussi les organisations de défense des personnes sans emploi, à cheval entre la mission syndicale et la mission de mouvement social, ou les groupes d’intérêts économiques qui, par le biais du lobbying auprès des personnes détenant le pouvoir politique, tentent d’intervenir dans la décision publique. Là encore, ce n’est pas le médium de la représentation néocorporatiste qui en définit la forme, mais bien le lieu et la logique qui la sous-tendent.
12Le troisième pôle, nommé « démocratie sociale », a également lieu dans l’arène des conflits sociaux, mais n’est pas lié prioritairement au rapport des différents acteurs au système de production. Ce pôle permet la construction d’une représentation collective à partir de la mobilisation des acteurs. Comme le pôle précédent, il est basé sur la participation des militants (ou membres) à l’action politique collective. La forme de la représentation des intérêts qui est privilégiée est celle de la promotion d’intérêts collectifs dont les bénéfices ne sont pas réductibles à un seul groupe ou à une seule catégorie de la population. Comme avec le pôle néocorporatiste, les acteurs impliqués dans la médiation des intérêts sont, potentiellement, dans une relation paradoxale de régulation ou de contestation avec les autres acteurs, et en particulier les acteurs institutionnels. Les acteurs syndicaux en sont un bon exemple. Même si le but premier des syndicats est de défendre la cause des travailleurs (et donc permettre une forme néocorporatiste de représentation), ils opèrent également sur d’autres terrains, se faisant en même temps (et de plus en plus) les porte-parole de la lutte contre les inégalités sociales, la pauvreté, l’exclusion, bref, militant pour un partage plus équitable des ressources au sein des sociétés et entre les sociétés. Les revendications syndicales ne concernent pas uniquement le secteur productif, mais bien l’ensemble de la société. Par ailleurs, acteurs majeurs du jeu politique et interlocuteurs privilégiés du patronat et de l’État, les syndicats occupent également une position pivot dans le champ politique parce qu’ils peuvent servir de ressources pour les autres groupes, de médiateurs entre des groupes et l’État, ou de porte d’entrée vers les institutions publiques. Occupant le terrain de la régulation (voire de la gestion) et celui de la contestation, ils conservent une position particulière au sein des systèmes politiques. Cette position en dehors (contestation) et en dedans (régulation-gestion) a longtemps constitué une spécificité des acteurs syndicaux. Ce n’est plus vrai aujourd’hui, les « partenaires » de l’État s’étant multipliés ces dix dernières années, au Québec en particulier6. Autrement dit, les syndicats comme acteur politique ainsi que les autres acteurs interviennent autour de plusieurs pôles de représentation en même temps (nous verrons que les pôles ne sont pas des vases communicants) ; les pôles de la représentation ne sont pas basés sur une distinction représentation extrainstitutionnelle ou intra-institutionnelle. Ainsi, certaines organisations de mouvements sociaux peuvent utiliser la voie de l’expertise sociale pour accéder à une forme de représentation politique de leurs identités et intérêts collectifs à l’intérieur de l’État (comme certaines organisations du mouvement des femmes au Québec) alors que d’autres groupes de femmes accèdent à la représentation par le biais du rapport de force avec l’État. Là aussi la logique de représentation est multiple : agrégation des intérêts et construction des identités collectives ; négociation-partenariat ; confrontation.
13Cette formalisation peut laisser entendre que les mouvements sociaux (qui sont les acteurs privilégiés de ce pôle, sans en être les seuls) et leurs organisations sont de plus en plus institutionnalisés, c’est-à-dire de plus en plus liés à des organisations durables ayant des liens fréquents avec des institutions publiques7. L’institutionnalisation est certainement vraie pour une partie des mouvements sociaux de plus en plus sollicités par les pouvoirs publics au nom d’une meilleure gouvernance, mais cette affirmation ne peut être généralisée à l’ensemble de ces acteurs. Certains mouvements émergents n’ont aucun lien avec les pouvoirs publics et n’ont pas pour cible d’action les décisions prises par l’État, mais ont pour cible d’autres acteurs sociaux ou politiques et cherchent plutôt à influencer les processus de décisions politiques, sans forcément passer par l’État et ses institutions. D’autres, s’ils entretiennent parfois des relations avec les acteurs publics, peuvent aussi cesser de le faire à d’autres moments, à la fois sous l’impulsion de l’État qui peut décider unilatéralement de rompre ces liens et d’organiser formellement leur mise à la porte, et sous l’impulsion des mouvements eux-mêmes, qui peuvent décider de retourner en dehors de l’État pour tenter de recréer un rapport de force ou pour agir sur une autre scène de représentation (la scène mondiale, par exemple), ou simplement parce que le processus d’institutionnalisation est plus cyclique que linéaire8. Ainsi, les liens entre la représentation politique et l’institutionnalisation des médias de représentation ne sont pas mécaniques. Le réseau de la Marche mondiale des femmes était, par exemple, non institutionnalisé lors des actions entreprises au cours de l’année 2000, mais a joué un rôle très important de représentation des intérêts des femmes du monde9.
14Enfin, le dernier pôle de représentation est celui de la « démocratie de participation ». Le lieu de la représentation, comme pour le pôle de la démocratie électorale, est celui de l’arène électorale et des institutions formelles de représentation des intérêts. Mais, au lieu d’être organisé selon une logique de délégation de pouvoir, le pôle de la démocratie de participation poursuit une logique d’autoreprésentation des citoyens par eux-mêmes par le biais de leur participation directe au processus politique. Ce pôle est distinct du pôle de la démocratie sociale dans la mesure où la pratique de la représentation ne se fait pas au nom de causes sectorielles communes, mais au nom de la citoyenneté, afin de modifier les formes institutionnelles de la démocratie libérale ou d’en proposer une utilisation différente, et parce qu'elle est individuelle et non collective. Les acteurs de ce pôle se retrouvent en porte-à-faux en cas de victoire électorale, parce qu’ils sont amenés à participer à des instances de représentation qui nécessite une logique de délégation, alors qu’ils ont été élus sur la base de la représentation par participation. Mentionnons, par exemple, les regroupements de citoyens qui concourent lors d’élections municipales. Comme le souligne Ion, les actions citoyennes auxquelles nous faisons allusion sont davantage des actions publiques que des actions collectives, dans la mesure où elles sont à la recherche d’une reconnaissance publique sur la base de revendication de citoyenneté10. Ce pôle appréhende le « moment » de l’intervention des citoyens dans l’arène électorale. Ce lieu peut être investi par des acteurs du type regroupements de citoyens, mais également par des partis politiques vantant la participation directe des électeurs aux processus politiques.
15Le fait de considérer le losange nous permet de distinguer les lieux de la représentation des véhicules de celles-ci. Il est ainsi possible de concevoir sur le plan théorique une sociologie des rapports de force à chaque pôle de représentation, mais également entre les pôles, afin de cartographier des configurations d’acteurs à divers moments de l’histoire. Il s’agit de constamment considérer les pôles et les acteurs de manière intégrée, en n’excluant aucune possibilité de combinaison. Sans entrer dans une analyse historique longue, on peut raisonnablement supposer que la période contemporaine n’a pas le monopole du losange et que les quatre pôles de la représentation ont, plus ou moins, toujours été là. Enfin, nous ne prétendons pas à l’exhaustivité des pôles, on peut également imaginer que dans certaines situations historiques d’autres pôles émergent.
16À partir du losange, nous pouvons préciser le sens de notre hypothèse initiale. La politisation du milieu communautaire au Québec traduit le déplacement de cet acteur du pôle de la démocratie sociale vers le pôle de la démocratie de participation et vers celui de la démocratie électorale. Nous allons voir, dans la deuxième partie de ce texte, comment ce changement a pris forme au cours des années 1990, modifiant les relations du milieu communautaire avec les autres acteurs politiques et modifiant, du même coup, les pratiques de la citoyenneté.
Le cas des groupes communautaires au Québec
Des groupes populaires au mouvement d’action communautaire autonome : ta constitution de facteur comme mouvement social
17L’histoire de la construction de l’acteur communautaire comme mouvement social n’est pas l’histoire d’une unification des groupes communautaires, mais celle de la prise de conscience des groupes de leur commune appartenance à un mouvement et celle de la reconnaissance par l’État de l’existence de ce mouvement.
18Dès le début de la période considérée (les années 1960), les actions posées par les groupes communautaires peuvent être qualifiées de « politiques ». Par exemple, dans le domaine de la santé, les cliniques populaires des années 1960 « établies par des comités de citoyens dans certains quartiers démunis et dépourvus de services de santé et de services sociaux correspondant à leurs besoins11 », sont des actions politiques. Elles interpellent l’État dans ses manières de faire et proposent la mise en place de services parallèles et alternatifs à l’État-providence. Dans les années 1970, on voit apparaître les premiers comptoirs alimentaires, les cliniques communautaires, les garderies et les coopératives d’habitation. Ces groupes se veulent tous « des options alternatives aux services offerts par l’État comme par le privé12 ». Cette configuration particulière des rapports entre l’État et les groupes communautaires au Québec va contribuer à faire émerger une première tension, encore présente aujourd’hui. Les groupes, très bien implantés localement, vont se méfier de la « récupération » par l’État de leurs pratiques et vont chercher à préserver la radicalité de leurs actions ; en même temps, les groupes vont chercher à se faire reconnaître par l’État, autant pour assurer leur viabilité financière que pour tenter de pérenniser leurs expériences. Cette tension entre la volonté de diffusion de pratiques alternatives et le souci de ne pas compromettre l’autonomie de la démarche et des acteurs constitue, en quelque sorte, le moteur de l’histoire du mouvement communautaire.
19Au courant des années 1980, le nombre de groupes populaires et communautaires croît de manière vertigineuse : coopératives d’habitation, groupes en éducation populaire, garderies sans but lucratif, maisons de jeunes, centres de femmes, centres de santé, centres d’hébergement, organismes dans le domaine de la santé et des services sociaux, médias communautaires, comptoirs alimentaires et coopératives d’alimentation naturelle font leur apparition. À cela s’ajoutent des coopératives de travail, des entreprises d’insertion sociale, les CDEC (Corporations de développement économique communautaire) et des centres communautaires pour personnes immigrantes13. Parallèlement, des dispositifs de financement public des groupes communautaires se mettent en place dans certains secteurs, ce qui fait dire à plusieurs que le rôle actuel du milieu communautaire au Québec est le résultat d’un compromis social entre l’État et les acteurs concernés, en particulier à partir de l’arrivée au pouvoir du gouvernement péquiste en 197714.
20Les années 1990 se déroulent dans un contexte de compressions budgétaires importantes. Pour les acteurs communautaires, la question de la légitimité du partenariat avec l’État se posera avec plus d’acuité. Après le référendum de 1995, le nouveau premier ministre Lucien Bouchard recherche la formation d’un large consensus social afin de faire valider sa décision d’atteindre le « déficit zéro » en l’an 2000 par la coalition la plus large possible d’acteurs sociaux. Pour se faire, il convoque la conférence socioéconomique de mars 199615 et le Sommet socioéconomique d’octobre et de novembre 1996. Lors du Sommet de novembre, le gouvernement « reconnaît les organismes de ce secteur [communautaire] comme des partenaires à part entière16 ». Une série de mesures découlera de cette rencontre nationale. En octobre 1997 est lancé le Fonds de l’économie sociale visant à financer des emplois de services de proximité dans le secteur de l’économie sociale (financement public et privé). Par ailleurs, à partir de 1997, le Québec mettra progressivement en place les Centres de la petite enfance (CPE) qui permettront un accès universel aux services de garde pour les enfants en âge préscolaire pour un coût modique (5 $ par jour) et le travail des éducateurs de CPE sera, lui aussi, progressivement reconnu statutairement et financièrement17. Malgré ces avancées notoires, les groupes communautaires, en particulier dans le champ de l’intégration à l’emploi, craignent de plus en plus de devenir de véritables sous-traitants de l’État qui n’a plus les moyens d’assurer lui-même les services.
21Parallèlement à cette histoire de reconnaissance par l’État du rôle des acteurs communautaires, se construit au sein du milieu communautaire une revendication commune autour de la question du financement stable des groupes. L’interlocuteur privilégié de cette revendication sera le ministère de la Santé et des Services sociaux18. La question du financement participe pleinement de celle de la construction du mouvement social, parce quelle vient avec celle de l’autonomie des groupes par rapport à leurs bailleurs de fonds, et celle de leur capacité à perdurer dans le temps. La construction de cette revendication va également permettre aux groupes de se croiser, de se mélanger, et, peu à peu, ils vont développer des structures de concertation de tout ordre, toujours en lien avec les actions et réactions de l’État.
22Au cours des années 1980 et 1990, des structures de concertation et de coordination à tous les échelons et dans plusieurs secteurs se mettent progressivement en place. Aujourd’hui, sur le plan local, on retrouve des tables de quartier dans les grands centres urbains, des regroupements dans les petites municipalités, des corporations de développement communautaire. Sur le plan régional, les tables régionales sont des structures de concertation très dynamiques. Enfin, sur le plan national, outre les regroupements provinciaux comme le Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec (MEPACQ) ou les Centres de femmes, on retrouve des coordinations sectorielles (Table des fédérations et des organismes nationaux) et intersectorielles (Coalition des organismes communautaires, Coalition solidarité santé).
23Au cours de ce processus, les acteurs communautaires lient progressivement la question de leur autonomie à celle du financement stable de leur mission. En 1995, le Parti québécois (PQ) élu décide de mettre en place un secrétariat à l’action communautaire, comme inscrit dans son programme électoral. La première tentative échoue parce qu’effectuée sans consultation du milieu. Elle sera rapidement suivie d’une seconde, réussie, avec la création du Secrétariat à l’action communautaire autonome (SACA) et du Fonds d’aide à l’action communautaire autonome. En cours de route, les groupes communautaires auront réussi à placer la reconnaissance de l’autonomie et de la différence entre le bénévolat et l’action communautaire sur le même plan que celle du financement. Finalement, c’est sous la gouverne de Louise Harel, en 2000, que seront mis en place le Comité aviseur du SACA et le Comité interministériel, tous deux responsables de l’application de la loi visant la reconnaissance du milieu19.
24Toutes ces étapes sont le fruit d’une lutte par les groupes pour leur reconnaissance tout autant que le fruit de la volonté politique de l’État de réglementer ses relations avec eux. Les dispositifs de 2000 ont été perçus positivement par un bon nombre d’acteurs communautaires parce que la plupart des demandes du milieu ont été accordées (reconnaissance de l’autonomie, mise en place de mécanismes de financement plus stables et reconnaissance de la légitimité des groupes de défense de droits). En même temps, beaucoup de groupes se méfient de la rigidité et du formalisme qui pourraient en découler (processus de reddition de comptes, rattachement à un seul ministère d’attache pour chaque groupe, flou concernant le financement). Dans tous les cas, les 4 000 groupes évalués par le Comité aviseur du SACA20 jouissent aujourd’hui d’une véritable reconnaissance institutionnelle et ont à leur disposition plusieurs leviers de négociation avec l’État. C’est également le processus ayant conduit à cette reconnaissance qui a permis la construction d’un mouvement communautaire autonome. Ainsi, le mouvement communautaire québécois est aujourd’hui un mouvement social autonome, d’intérêt public, ayant ses propres visées politiques (justice sociale, démocratie, égalité, pluralisme)21.
25Les comités de citoyens étaient des lieux d’appartenance, des lieux de débats, des lieux de démocratisation, des lieux de participation, des lieux de création d’espaces publics en dehors des structures formelles de représentation pour reprendre les termes de Lorraine Guay22. Ainsi, dès les années 1960, les groupes communautaires émergent comme vecteur de sujet-citoyen, investissant déjà le pôle de la démocratie sociale23. Cette caractéristique va perdurer avec l’apparition des groupes de services, qui sont en même temps des groupes portant des revendications. Si nous reprenons notre losange de la représentation, dans les années 1980, il y a une consonance entre les lieux de la représentation et les acteurs de la représentation. Autrement dit, la division du travail politique existe de manière relativement stable. En général, les partis politiques interviennent seuls au sein du pôle de la démocratie libérale, assurent en situation de quasi-monopole la médiatisation des intérêts de leurs électeurs. De la même façon, ce sont les syndicats qui sont les principaux porte-parole des salariés et qui interviennent dans les conflits de travail, alors que les groupes communautaires interviennent essentiellement par secteur (santé – services sociaux – éducation – famille) pour répondre à des besoins et également pour faire exister localement leur parole publique. Même si l’on considère les groupes plus revendicatifs, tels que les associations de défense des droits sociaux, ils véhiculent auprès de l’État une demande de services collectifs (plus de services) et de contrôle populaire sur ces services24. Seul le pôle de la démocratie sociale est ainsi investi, en lien direct avec l’État-providence et son développement25.
26Jusqu’au milieu des années 1990, la principale bataille du milieu communautaire est celle du développement spécifique de l’État-providence ; après cette date, une partie importante du milieu communautaire va élargir le spectre de ses actions, jusqu’à investir, tout récemment, l’arène électorale. C’est à ce glissement vers d’autres terrains d’action qu’est consacrée la deuxième partie de l’histoire du mouvement.
L'acteur politique (en construction) en action
27La deuxième partie de l’histoire est bien sûr liée à la première, mais elle se construit moins en relation avec les institutions étatiques et davantage en relation avec les autres acteurs sociaux et politiques, et en particulier avec les syndicats.
28Les alliances entre les centrales syndicales et le milieu communautaire ne datent pas de la fin des années 1980. Des syndicats ont soutenu le démarrage d’associations de locataires dans les années 1970 et se sont impliqués avec les comités de citoyens dans l’expérience politique municipale du Front d’action politique de 1969 à 1972 à Montréal26. Au début des années 1970, les revendications nationales au Québec vont d’ailleurs servir d’élément « unificateur de toutes les forces progressistes », y compris, bien entendu, les groupes communautaires et les syndicats, qui vont se retrouver côte à côte avec et derrière le Parti québécois27. Néanmoins, la montée en force politique du syndicalisme québécois n’a pas été suivie de manière linéaire par celle des autres groupes. On peut même dire, à la fin des années 1980, que la construction de modalités néocorporatistes de concertation entre les centrales syndicales et l’Etat aura contribué à marginaliser les autres groupes populaires et communautaires28.
29Ce rapport de force entre syndicalisme et milieu communautaire prendra une autre tournure au moment de la formation de la coalition Solidarité populaire Québec (SPQ), première vaste coalition entre des syndicats et des groupes communautaires29. La coalition SPQ regroupe les acteurs sur une base non sectorielle. Fondée en 1986, elle organise au printemps de la même année une commission populaire itinérante sur le désengagement de l’État. Après avoir rencontré plus de 250 groupes, près de 900 personnes et reçu quelque 130 mémoires à la suite des audiences publiques tenues dans huit villes du Québec, SPQ publie un rapport La force des idées, la force du nombre30. Cette première action d’envergure a été marquée par un travail d’éducation populaire important à travers le Québec qui a forcé les groupes à sortir de leur secteur d’intervention et à prendre conscience des dynamiques communes qui les traversaient. Au début des années 1990, cette même coalition a mené des consultations pour bâtir la Charte d’un Québec populaire (1994), à laquelle plus de 350 organismes ont participé. Cette charte a, notamment, abouti à l’affirmation du droit des peuples québécois et autochtones à l’autodétermination (art. 21) et à une prise de position non équivoque pour l’indépendance du Québec31. La coalition, largement financée par les syndicats, souffrait d’un déséquilibre important des rapports de force entre les groupes issus du milieu communautaire et les forces syndicales, dominantes. Pour beaucoup de centrales syndicales (la Fédération des travailleurs du Québec en particulier), le travail politique nécessaire à la réussite d’une coalition, c’est-à-dire le travail de compromis, y compris sur son propre terrain de lutte, était très difficile. L’échec de SPQ au milieu des années 1990 a laissé des séquelles importantes à la fois dans le milieu syndical et dans le milieu communautaire. Cela dit, la coalition fut une première véritable expérience du travail collectif, de la mise en commun des énergies, des revendications, des savoir-faire et des visions du monde.
30Au moment où SPQ diminue son influence et ses activités, le mouvement des femmes prend le relais et se trouve bientôt à l’avant-scène politique. En 1992, des groupes de femmes organisent le Forum pour un Québec féminin pluriel auquel plus d’un millier de femmes participent. Ce forum constitue, pour beaucoup, une reprise en main du leadership féministe, sorte d’« états généraux » du mouvement des femmes. Au printemps 1995, dans la foulée de ce forum, est lancée la Marche des femmes contre la pauvreté, mieux connue sous le nom de marche Du pain et des roses. Si ce sont les femmes qui sont à l’origine de cette marche, leurs revendications rejoignent l’ensemble des travailleurs et des milieux. Au total, neuf revendications sont portées par la Marche (qui vont de l’accessibilité des logements sociaux, en passant par une revalorisation substantielle du salaire minimum, à une demande de perception automatique des pensions alimentaires)32. D’ailleurs, elles obtiennent le soutien actif des syndicats et des autres groupes communautaires qui sont présents à l’arrivée de la Marche dans chacune des villes traversées. La Marche sera un véritable succès, plusieurs des revendications seront satisfaites (en particulier celle concernant le salaire minimum). Le mouvement des femmes a le vent dans les voiles. La marche québécoise sera suivie de la Marche mondiale des femmes contre la pauvreté et les violences faites aux femmes en l’an 2000, où les Québécoises joueront non seulement le rôle d’initiatrices du projet, mais également de principales organisatrices33. Les luttes des femmes du Québec deviennent transnationales.
31Un an plus tard, au moment du Sommet socioéconomique de 1996, les groupes de femmes en lien avec les groupes luttant contre la pauvreté proposeront « la clause d’appauvrissement zéro » pour faire contrepoids à la proposition gouvernementale de « déficit zéro ». Portée au départ par le Carrefour de pastorale en monde ouvrier (CAPMO), soutenue par le mouvement des femmes du Québec, la clause consiste à doter la société d’une loi interdisant l’appauvrissement du cinquième le plus pauvre de la population, indépendamment du statut des personnes (travailleurs, chômeurs, étudiants ou autres)34. Cette proposition a constitué le point d’achoppement du consensus qui prévalait au moment du Sommet. Principale revendication communautaire, la clause a été rejetée dans sa formulation initiale (appauvrissement zéro jusqu’en l’an 2000, année du déficit zéro)35. Plus qu’un échec, cet événement constitue un point de rupture important dans l’histoire politique du mouvement. En effet, à partir de 1996, le milieu communautaire va devenir une véritable force de propositions politiques alternatives, doublant les syndicats sur le terrain de l’innovation politique et de la confrontation. La proposition du CAPMO sera largement reprise après le Sommet, suivie de plusieurs actions politiques grandement médiatisées, et donnera finalement lieu à la formation du Collectif pour une loi sur l’élimination de la pauvreté (dont les syndicats feront partie), devenu aujourd’hui le Collectif pour un Québec sans pauvreté36. L’ensemble de ces mobilisations, qui s’étalent de 1996 à 2002, aboutiront à l’adoption d’une loi-cadre par l’Assemblée nationale du Québec, le 13 décembre 2002, qui institue une « stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale », de même qu’un comité consultatif, un observatoire et un fonds permettant de financer de nouvelles initiatives sociales37. Si le projet final apparaît relativement édulcoré par rapport aux propositions initiales du Collectif, la loi n’aurait jamais vu le jour sans le long processus de mobilisation des acteurs communautaires38.
32Le printemps 2001 constitue un autre moment-clé du processus de politisation du milieu communautaire. En effet, durant le Sommet des peuples des Amériques de Québec39, de larges coalitions d’acteurs vont se former, permettant la construction de nouvelles solidarités entre les centrales syndicales et certains regroupements nationaux, mais également, en dotant l’ensemble des acteurs sociaux québécois d’une dimension transnationale. À titre illustratif mentionnons l’organisation conjointe du Forum populaire, réunissant entre autres la Fédération des femmes du Québec (FFQ), un réseau de désobéissance civile altermondialiste nommé Opération SALAMI, ATTAC Québec et le Syndicat de la fonction publique du Québec. Lors de ce sommet, le rapport à l’État du Québec oscille entre l’opposition franche à un État et un parti traditionnellement en faveur du libre-échange et une indifférence polie à l’égard de la nouvelle rhétorique altermondialiste de certains cadres du Parti québécois. Au total, par le biais de la lutte contre la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) et l’investissement massif des acteurs sociaux de ce nouvel espace politique, émerge un ensemble de forces sociales, de plus en plus autonome de la logique nationaliste fédérative du Parti québécois, de plus en plus impliqué dans la proposition politique, au côté d’autres mouvements sociaux du Nord et du Sud.
33Ce bouillonnement militant des années 2000 donnera d’ailleurs lieu à l’organisation d’un colloque à l’automne 2002 sur le thème « Mouvements sociaux et action politique : de quelle gauche parlons-nous ? ». Françoise David, une figure centrale du milieu communautaire québécois40, lance l’idée d’un mouvement populaire pour contrer les idées de droite, en pleine ascension au Québec41. À la suite de cet évènement, plusieurs personnalités du milieu communautaire (dont plusieurs anciens membres de la FFQ) et des personnalités du milieu artistique lancent un « Appel pour un Québec D’abord Solidaires » qui paraît dans Le Devoir du 28 janvier 2003. Mille quatre cents personnes signifient leur appui au Collectif42. Peu à peu, D’abord Solidaires (DS) deviendra un mouvement citoyen et entreprendra une campagne d’éducation populaire autour des enjeux de la campagne électorale provinciale annoncée pour le printemps 2003. DS se développe comme un acteur non partisan dont la principale tâche consiste à présenter le détail des programmes des partis politiques en lice à partir d’un angle d’analyse, celui du bien commun, afin d’informer le public et de marquer les différences entre les partis politiques. DS ne donnera pas, cependant, de consigne de vote, la question du vote stratégique divisant fortement les membres43. Après les élections et la victoire du Parti libéral du Québec (PLQ), le menu législatif du gouvernement fraîchement élu est passé au crible et suscite de nombreuses réactions au sein du Collectif. L’idée d’appeler à la mise en place d’une coalition nationale de vigilance est alors lancée par Lorraine Guay, militante de DS. En même temps, Vivian Labrie, porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, et le Réseau du forum social de Québec ChaudièreAppalaches (qui regroupe des organismes communautaires) promeuvent la même idée. Un appel collectif à la vigilance est lancé, le Réseau de vigilance est né.
34Le Réseau de vigilance réunit aujourd’hui une soixantaine d’organisations : les principales centrales syndicales sauf une (la Fédération des travailleurs du Québec, qui n’est pas membre mais qui participe à certaines actions), les groupes communautaires incluant les groupes de femmes et les groupes écologistes44. Le Réseau de vigilance fera la rentrée parlementaire en octobre 2003 en posant des actions symboliques en réaction aux propositions gouvernementales. La première année du nouveau gouvernement sera marquée par la confrontation sur la plupart des dossiers, une très forte mobilisation syndicale et une mobilisation sans faille du milieu communautaire45.
35Parallèlement aux actions menées au sein du Réseau de vigilance, le mouvement citoyen D abord Solidaires organise son bilan post-électoral. Lors de la rencontre de l’automne 2003, trois tendances se dégagent au sein du mouvement. Une partie des militants songent à former un mouvement politique qui devrait à terme devenir un parti « de gauche, féministe, altermondialiste et écologiste », d’autres expriment leur volonté de rester un mouvement citoyen non partisan, d’autres, enfin, favorisent l’émergence d’un mouvement plus libertaire tourné vers le réseautage au niveau local et favorisant les actions directes. Lors de la réunion-bilan de novembre, les trois options sont proposées et les trois options sont retenues. D’abord solidaires continue d’exister à titre de mouvement citoyen non partisan, un mouvement politique se crée, Option citoyenne, autour des personnalités de Françoise David et François Saillant, et l’option libertaire se prolonge à Montréal et se fixe comme objectif la création d’un réseau de divers collectifs libertaires autogérés.
36Bien qu’encore très courte, l’expérience d’Option citoyenne mérite qu’on s’y attarde. Dès le printemps 2004, Françoise David et ses proches collaborateurs publient un petit ouvrage, Bien commun recherché : une option citoyenne, dans lequel des pistes de changement sont explorées. Cet ouvrage se veut un outil de dialogue entre Option citoyenne et la population et servira de prétexte à une tournée des régions du Québec durant l’été 2004. La première rencontre nationale d’Option citoyenne a eu lieu les 12, 13 et 14 novembre 2004 et a permis de consolider le cadre de réflexion du mouvement. À la suite des deuxième (avril 2005) et troisième rencontres nationales (octobre 2005), Option citoyenne prévoit de s’unir à l’Union des forces progressistes (UFP) pour devenir un parti politique de gauche.
37De SPQ au Réseau de vigilance et à Option citoyenne, le mouvement communautaire du Québec est passé d’un acteur politique agissant sur le terrain des conflits sociaux à un acteur politique directement impliqué dans l’arène électorale. Ce changement de terrain d’action devient probant à partir de 1995. Progressivement, le milieu communautaire intervient dans le champ de la contestation de masse sur le plan national et en même temps se positionne comme un « proposeur » de politiques publiques. À partir de cette date, les partis politiques et en particulier le Parti québécois n’ont plus le monopole de la réforme sociale. Ce changement de terrain a également eu des répercussions dans les relations du milieu communautaire avec les autres acteurs politiques. En particulier, le changement du rapport de force avec les syndicats apparaît relativement nouveau. De plus en plus, le mouvement d’action communautaire autonome devient la force principale de propositions sociales et politiques tandis que les syndicats sont à la remorque du changement (c’est vrai de la clause d’appauvrissement zéro ; c’est vrai de la Loi contre la pauvreté et l’exclusion sociale ; c’est vrai de la Marche mondiale des femmes porteuse de revendications sur le plan national ; c’est également vrai d’un groupe comme Au bas de l’échelle qui s’avéra un interlocuteur privilégié lors des négociations avec le gouvernement sur les normes québécoises du travail en 2002). En contrepartie, les syndicats semblent avoir de plus en plus de difficultés à investir le terrain politique, même si l’implication de certaines centrales syndicales au moment de la campagne électorale de 2003 (en particulier la Confédération des syndicats nationaux [CSN], qui a toujours défendu farouchement son indépendance vis-à-vis des partis politiques et qui lors de la campagne s’est officiellement prononcée contre l’Action démocratique du Québec, mais pour aucun parti) et leur implication au sein du Réseau de vigilance prouvent que les syndicats demeurent une force d’opposition réelle46. Les centrales syndicales apparaissent néanmoins trop divisées pour devenir une force de proposition politique. Ce changement est également perceptible du côté des partis politiques. Ainsi, l’année 2001 marque la fin de la soumission des groupes communautaires au PQ et à la logique de la solidarité avec la cause de la souveraineté et consomme un divorce entamé quelques années auparavant. Plus fort, le mouvement communautaire est également de plus en plus autonome des autres forces sociales et politiques.
38Ces glissements ont été accompagnés de l’utilisation par le mouvement communautaire de nouveaux répertoires d’actions collectives. Le CAPMO en 1997 organise le Parlement de la rue durant un mois ; les groupes altermondialistes organisent chaque année depuis 2000 le Festival des résistances ; les féministes ont depuis 1995 réinvesti la rue et remis la manifestation comme répertoire d’action collective à l’ordre du jour, au point qu’aujourd’hui, à chaque nouvelle manifestation, les records historiques sont battus (par ex. : le Collectif échec à la guerre peut s’enorgueillir d’avoir fait sortir plus de 200 000 personnes contre le déclenchement de la guerre en Irak, sans parler des manifestations étudiantes du printemps 2005 qui ont rassemblé près de 80 000 étudiants et sympathisants) ; les actions d’éducation populaire portent de plus en plus sur des enjeux de politiques générales comme le budget national ; le collectif D’abord Solidaires est directement intervenu dans la campagne électorale de 2003 ; la formation d’Option citoyenne se veut, entre autres, un outil de transfert de l’expertise du milieu communautaire vers la sphère partisane. Avec ces exemples, nous observons un glissement progressif des actions du mouvement communautaire du pôle de la démocratie sociale vers les pôles de la démocratie de participation et de la démocratie électorale.
39On a là une déconnexion progressive des tâches politiques et des acteurs politiques. La division du travail politique ne suit plus une seule logique ou une seule direction, les acteurs communautaires interviennent en même temps sur plusieurs pôles de la représentation. Quant aux partis politiques, ils perdent de plus en plus le monopole de la médiation des intérêts dans l’arène électorale. Le travail de Jocelyne Lamoureux a permis de mettre en lumière le rapport individuel que les militants du mouvement communautaire autonome entretiennent avec le politique. Elle a bien montré que ce rapport se décline sur un double registre : registre de la naissance du sujet politique, de l’acteur et le registre de l’action citoyenne plurielle (prise de parole publique)47. Selon notre perspective, en considérant non plus les militants ou les membres, mais les groupes et les relations entre les groupes et les autres acteurs du politique, nous sommes en mesure d’identifier d’autres éléments de changement. Ainsi, ce n’est que très récemment (2000) que le mouvement communautaire autonome se pense comme un acteur unifié, porteur d’une identité collective. Plus encore, ce n’est que depuis peu (2002) qu’une partie du milieu est devenue un véritable mouvement politique intervenant sur tous les fronts de la médiation des intérêts.
40Pourquoi ces transformations ont-elles eu lieu à ce moment précis ? À partir de 1998, peu de gains vont être réalisés par le milieu communautaire, en dépit de fortes mobilisations. Celui-ci, à l’exception du projet de loi 112, enregistrera même plutôt des échecs48. Cette conjoncture particulière a probablement participé à ce que les acteurs communautaires quittent le terrain du dialogue avec l’État pour se lancer dans la mêlée du débat politique. Mais cette explication strictement conjoncturelle ne suffit pas. Le déplacement des acteurs communautaires vers de nouveaux pôles de la représentation est lié à des changements internes des autres acteurs politiques. Le PQ joue de moins en moins son rôle progressiste au sein de la société québécoise, parce qu’il doit lui-même faire face à des turbulences fortes sur le plan de son leadership, de son membership et de ses orientations politiques. Les syndicats sont eux aussi occupés à panser leurs plaies internes et à gérer au mieux leurs divisions dans un contexte politique défavorable à la démocratie sociale. Cette transformation est également liée à des changements dans les relations entre ces acteurs et à l’émergence de nouveaux clivages politiques. La présence de l’ADQ et du PLQ, de plus en plus situés à droite sur l’échiquier politique, laisse le champ libre du côté gauche. De même, la redéfinition du projet souverainiste et de la place de la question nationale dans le débat politique québécois permet à certains acteurs de promouvoir un projet alternatif de société orienté d’abord autour des valeurs socialdémocrates avant d’être voué à la nation. Enfin, l’explication du changement est rattachée à des pratiques historiques – l’histoire du mouvement communautaire lui-même-, à des « accidents » de l’histoire (le fait que les revendications de la Marche mondiale des femmes de 2000 n’aient connu aucun succès étatique explique partiellement pourquoi une partie des militantes féministes a décidé d’investir plus directement le champ de l’action politique) et à des évolutions longues comme celle de la question du libre-échange. Plus qu’une explication de ces transformations en bonne et due forme, nous avons voulu faire état de ce changement en utilisant une grille d’analyse souple mais néanmoins suffisamment rigide pour permettre une comparaison dans le temps.
41Ce que nous venons de raconter n’est bien sûr qu’une partie de l’histoire. L’unité du milieu communautaire reste un artefact analytique. D’ailleurs, au moment où le milieu communautaire a réussi à s’ériger en acteur politique d’envergure, au point de jouer le rôle (ou presque) de parti d’opposition, il est aussi dans une situation d’extrême fragilité, malmené de toute part, sansle-sou et sans perspective d’avenir stable. Les divisions au sein du mouvement et les éléments de différenciation entre les groupes sont, ainsi, potentiellement, multiples. Mentionnons également que le processus de politisation décrit ne signifie pas que les membres à la base des groupes sont davantage prêts à considérer l’action communautaire comme une action politique. Notre propos concerne essentiellement certains leaders du mouvement qui donnent des orientations particulières à leurs groupes.
42En proposant de déconnecter les acteurs de la représentation politique, des lieux de la représentation, nous sommes en mesure de comprendre que si les partis politiques traditionnels ne sont plus les véhicules dominants des identités et des intérêts citoyens, cela ne veut pas dire que l’arène électorale n’est plus à la mode. Au contraire, à partir du cas québécois, nous avons vu que l’arène électorale restait un lieu central où se fait la politique ; à tel point que l’ensemble des acteurs semble aujourd’hui s’y confronter. Il ne s’agit pas alors de parler du déclin de la démocratie de type libérale-majoritaire et de son remplacement éventuel par une démocratie participative en confondant les médias de représentation et le pôle de la représentation, mais plutôt de documenter les pratiques multiples de représentation en cours49. De même, il ne s’agit pas de conclure à la différenciation du champ militant par rapport au champ partisan, mais bien de constater le décloisonnement des champs de la représentation politique et la possibilité d’un brouillage accru dans la division des tâches entre les acteurs50. Enfin, raisonner par « pôles de représentation » permet de prendre acte de la normalisation politique de l’action contestataire tout en proposant une lecture de son articulation avec les autres formes d’actions politiques51. Tout le travail politique effectué par le milieu communautaire québécois est alors un travail de redéfinition des pratiques de la citoyenneté : faire « naître » des sujets politiques, organiser une parole publique de citoyens souvent peu présents dans l’espace public52, mais aussi, ces dernières années, représenter sur le terrain électoral des intérêts et des identités nouvelles.
Notes de bas de page
1 Voir par exemple Donatella Della Porta, « Social Movements and the New Challenges to Représentative Democracy: A Perspective from Italy », Politique européenne, n° 4, 2001, p. 73-104 ; et Susan D. Phillips, « Competing, Connecting and Complementing: Parties Interest, Groups and New Social Movements », dans Brian Tanguay et Alain-G. Gagnon (dir.), Canadian Parties in Transition, Toronto, Nelson Canada, 2e édition, 1996, p. 440-457.
2 Richard Morin et Michel Rocherfort, « Quartier et lien social : des pratiques individuelles à l’action collective », Lien social et Politiques, n° 39,1998, p. 103-114 ; Naomi Klein (dir.), Pences and Windows: Dispatches From the Front Line of the Globalization Debate, New York, Picador, 2002.
3 Nous reprenons la définition de Bruno Théret, « La régulation politique : le point de vue d’un économiste », dans Jacques Commaille et Bruno Jobert (dir.), Les métamorphoses de la régulation politique, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1998, p. 24-103, en y ajoutant le concept d’identités, dans le sens donné par Jane Jenson et Susan Phillips dans « Régime Shift: New Citizenship Practices in Canada », International Journal of Canadian Studies, vol. 14, automne 1996, p. 111-136.
4 Adalbert Evers et Ivan Svelick, New Welfare Mixes in Care for the Elderly, Vienne, European Center for Social Welfare Policy and Research, vol. 2, 1991 ; et Adalbert Evers, Marja Pijl et Clare Ungerson (dir.), Payments for care. A Comparative Overview. Vienne, Avebury-European Center, 1994.
5 Erik Neveu, Sociologie des mouvements sociaux, Paris, La Découverte, 2000, p. 16.
6 Deena White, « Quebec State and Society », dans Marcel Fournier, Michael Rosenberg et Deena White, Quebec Society. Critical Issues, Scarborough, Prentice Hall, 1997, p. 17-44.
7 D. Della Porta, 2001 ; Dieter Rucht et Friedhelm Neidhardt, « Towards a Movement Society? On the Possibilities of Institutionalizing Social Movements », Social Movement Studies, vol. I, n° 1, 2002, p. 7-30.
8 Alexandra Dobrowolsky, « The Chrétien Legacy and Women: Changing Policy Priorities with Little Cause for Celebration », Review of Constitutional Studies, vol. 9, n° 1, 2004 ; Rachel Laforest, « The Times they are a Changin’: Quebec Politics under a Liberal Government a New Era? », Communication présentée à la conférence de l’Institute of Intergovernmental Relations, Quebec and Canada in the New Century: New Dynamics, New Opportunities, Kingston, Queen’s University, 31 octobre-1 novembre 2003.
9 Isabelle Giraud, « La transnationalisation des solidarités : l’exemple de la Marche mondiale des femmes », Lien social et Politiques, n° 45, 2001, p. 145-162.
10 Jacques Ion, La Fin des militants ?, Paris, Éditions de l’Atelier, 1997.
11 Deena White, « La santé et les services sociaux : réforme et remises en question », dans Gérard Daigle, Le Québec en jeu. Comprendre les grands défis, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1992, p. 140.
12 Geneviève Chagnon, L’implication du mouvement syndical dans le développement économique communautaire, Mémoire de maîtrise, Département de sociologie, Université de Montréal, 1998, p. 33.
13 Paul Bélanger et Benoît Lévesque, « Le mouvement populaire et communautaire : de la revendication au partenariat (1963-1992) », dans G. Daigle et G. Rocher (dir.), 1992, p. 726.
14 Ibid, et Louis Favreau, Mouvement populaire et intervention communautaire de 1960 à nos jours : continuités et ruptures, Montréal, Éditions du Fleuve, 1989.
15 Initiée par le premier ministre, elle regroupait l’ensemble des partenaires sociaux et économiques du Québec ; tout au moins les partenaires conviés par le gouvernement. Les jeunes, à travers le Conseil permanent de la jeunesse, ont d’ailleurs organisé un sommet parallèle, n’étant pas invités au Chantier de l’économie et de l’emploi. Voir « Le sommet sur l’économie et l’emploi », Forces, n° 114, automne 1996, p. 41.
16 Gouvernement du Québec, « Sommet sur l’économie et l’emploi », Faits saillants, Québec, Secrétariat du Sommet, 1er novembre 1996, p. 5-7.
17 Jane Jenson, « Les réformes des services de garde pour jeunes enfants en France et au Québec : une analyse historico-institutionnaliste », Politique et Sociétés, vol. 17, n° 1-2,1998, p. 183-216.
18 Mais pas le seul, le ministère de l’Éducation sera aussi un important bailleur de fonds des groupes d’éducation populaire.
19 La première proposition de politique avait pour titre : Le milieu communautaire : un acteur essentiel au développement du Québec alors que la politique finalement adoptée a pour titre : L’action communautaire : une contribution essentielle à l’exercice de la citoyenneté et au développement social du Québec, Gouvernement du Québec, Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, septembre 2001.
20 Comité aviseur de l’action communautaire autonome, <www.comavis-aca.org>, mars 2005.
21 Jocelyne Lamoureux, « Marges et citoyenneté », Sociologie et sociétés, vol. 33, n° 2, 2001, p. 29.
22 Lorraine Guay, « Les organismes communautaires et la citoyenneté », Bulletin de la Ligue des droits et libertés, vol. 15, n° 1,1996.
23 J. Lamoureux, 2001.
24 P. Belanger et B. Levesque, 1992, p. 718.
25 A la fin des années 1960, certains Comités de citoyens vont très clairement emprunter la voie de l’action politique et devenir des Comités d’action politique (CAP). Le regroupement des CAP au sein du Front d’action politique (de 1969 à 1972,) donnera lieu à une participation de ce regroupement aux élections municipales de 1970. Cette intrusion directe du communautaire dans le pôle de la démocratie de représentation ne sera, toutefois, que de courte durée, mais donnera naissance à de nouveaux partis politiques sur la scène municipale (L. Favreau, 1989, p. 55).
26 L. Favreau, 1989, p. 18.
27 Ibid., p. 59.
28 Mona-José Gagnon, « La participation institutionnelle du syndicalisme québécois : variations sur les formes du rapport à l’Etat », dans Jacques T. Godbout (dir.), La participation politique. Leçons des dernières décennies, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1991, p. 202-203.
29 Pour cette section et la suivante, je suis grandement redevable à Lorraine Guay, qui m’a accordé une entrevue informelle, afin de partager avec moi sa longue expérience de militante du mouvement communautaire.
30 L. Favreau, 1989, p. 247.
31 Lorraine Guay, Pour un mouvement communautaire citoyen, Saint-Jérôme, QC, Regroupement des organismes communautaires des Laurentides, 1999, p. 44.
32 Lorraine Guay, « La Marche des femmes du Pain et des Roses contre la pauvreté », Du néolibéralisme à l’économie solidaire, Le combat des femmes, Acte du deuxième Séminaire international sur l’économie solidaire tenu à Montréal les 10,11 et 12 juin 1996, p. 22-35.
33 I. Giraud, 2001.
34 Vivian Labrie, « La clause d’appauvrissement zéro. Une jeune idée qui demande à mûrir », Le Devoir, Montréal, 11 novembre 1996, p. A7.
35 Notons que cette interprétation a entraîné le départ de la Fédération des femmes du Québec de la table des négociations ainsi que des responsables de la Coalition nationale des femmes contre la pauvreté et de Solidarité Populaire Québec. Jean Pichette, « Une fausse note dans la messe du consensus », Le Devoir, Montréal, 2-3 novembre 1996, p. A8.
36 Vivian Labrie, « Citoyenneté et lutte contre la pauvreté », dans Yves Boisvert, Jacques Hamel et Marc Molgat (dir.), Vivre la citoyenneté, identité, appartenance et participation, Montréal, Liber, 2000, p. 169-180.
37 Alain Noël, « A Law Against Poverty: Quebec’s New Approach to Combating Poverty and Social Exclusion », Commentaire, RCPP (Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques), 2004, en ligne : <http://www.cprn.org/fr/doc.cfm?doc=183> (page consultée le 15 octobre 2006).
38 Pascale Dufour, « L’adoption du projet de loi 112 au Québec : le produit d’une mobilisation ou une simple question de conjoncture politique ? », Politique et Sociétés, vol. 24, n° 1, 2004, p. 160-182.
39 Les Sommets des peuples des Amériques sont organisés par les acteurs sociaux pour faire contrepoids au Sommet des chefs d’Etat et de gouvernements des Amériques qui sont convoqués tous les trois ou quatre ans : le premier Sommet des Amériques s’est tenu à Miami en décembre 1994 ; le deuxième Sommet, à Santiago du Chili, en avril 1998, tandis que le troisième a eu lieu à Québec en avril 2001.
40 De 1992 à 2000, Françoise David fut la présidente de la Fédération des femmes du Québec.
41 À ce moment, l’Action démocratique du Québec (ADQ) propose sur toutes les tribunes son programme économique ultra-libéral et est crédité de plus en plus d’intentions de vote dans les sondages.
42 D’abord Solidaires, <http://www.dabordsolidaires.ca/>, mars 2005.
43 Certains préférant l’option vote pour le PQ afin de contrer l’ADQ, d’autres favorisant un vote pour un parti de gauche, tel que l’Union des forces progressistes (UFP), nouvellement créée.
44 Jean-Marc Piotte, « Mouvement syndical : un combat incertain », A Bâbord, n° 7, décembre 2004, p 8.
45 Gérard Boismenu, Pascale Dufour et Denis Saint-martin, Ambitions libérales et écueils politiques. Réalisations et promesses du gouvernement Charest, Montréal, Athéna, 2004.
46 Mona-José Gagnon et Thomas Collombat, « Des messages pour le syndicalisme », dans Michel Venne (dir.), L'annuaire du Québec 2004, Montréal, Fides, 2004, p. 640-650.
47 Jocelyne Lamoureux, 2001, p. 36-37.
48 Pensons, en particulier, à l’échec retentissant de la Marche mondiale des femmes sur le plan québécois, le gouvernement de l’époque ne répondant à presque aucune des 10 revendications portées par le mouvement des femmes du Québec.
49 Herbert Kitschelt, The Transformation of European Social Democracy, Cambridge, New York, Cambridge University Press, 1994.
50 Cécile Péchu, « Les générations militantes à Droit au Logement », Revue française de science politique, vol. 51, n° 1-2, 2001, p. 103.
51 Jack A. Goldstone, (dir.), States, Parties and Social Movements, Cambridge, Cambridge University Press, 2003.
52 Que cette parole soit jugée progressiste ou plutôt conservatrice. À ce sujet, voir l’analyse des Comités de citoyens de Caroline Patsias et Cristina Bucica, « Les expériences de conseils de quartier et de comités de citoyens, l’exemple québécois : quel bilan pour la démocratie locale ? », dans Robert Le Duff et Jean-Jacques Rival (dir.), Démocratie et management local, Paris, Dalloz, 2006.
Auteur
Professeure au Département de science politique de l’Université de Montréal. Avec Gérard Boismenu et Alain Noël, elle a publié L’aide au conditionnel. La contrepartie dans les mesures envers les sans-emploi en Europe et en Amérique du Nord (Presses de l’Université de Montréal, 2004). Elle travaille actuellement sur les mouvements sociaux transnationaux.
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