Réinvestissement dans l’État social au Canada et instrumentalisation de la nouvelle gestion publique
p. 215-241
Texte intégral
1Les régimes fédératifs sont un « lieu » d’observation particulièrement propice pour rendre compte de la recomposition territoriale de la citoyenneté sociale1. Ces régimes supposent une gouvernance à niveaux multiples où se pose constamment l’enjeu de la diversité territoriale à travers une instrumentation de la capacité d’agir des pouvoirs publics dans les divers champs des pratiques sociales. Au Canada, le pouvoir de l’État se compose en cascade par et à travers les actions des dix entités subnationales et de l’entité fédérale. Cela suppose la recherche, plus ou moins atteinte, de la conciliation, voire de la réconciliation, des principes et des programmes qui ont une portée régionale et pancanadienne, mais aussi, sinon surtout, la reconnaissance de l’autorité politique d’agir à l’un ou à l’autre siège de pouvoir. Il s’agit là d’un équilibre instable et précaire, parce que traversé de tensions et de remises en question.
2Lorsque cet équilibre instable subit des modifications, par exemple sous l’impact significatif d’une décentralisation ou d’une centralisation, nous parlerons de recomposition territoriale. À la lumière du système des relations intergouvemementales et du cadre constitutionnel au Canada, on comprendra que ces modifications impliquent plus qu’un simple ajustement aux « nouvelles circonstances » qui accompagnent la mondialisation. La division constitutionnelle des compétences gouvernementales propre aux régimes fédératifs et, à plus forte raison, l’interprétation du principe fédéral, compris au Canada sur le plan de la souveraineté législative dévolue à l’un ou l’autre palier gouvernemental, donnent à cet enjeu un caractère hautement significatif, car elles se situent sur le terrain de la capacité politique (de pouvoir) respective et de l’identité de communautés politiques.
3Le domaine de la protection sociale est au coeur de la mêlée. Les transformations structurelles du tissu social et de la donne politico-financière des pays occidentaux, tout autant que la mondialisation, incitent tous les gouvernements à repenser les objectifs et les dispositifs de la protection sociale2. Au Canada, les principaux domaines de la protection sociale – l’éducation, la santé, la sécurité du revenu et l’emploi – relèvent des compétences provinciales. Le rôle du gouvernement fédéral dans ces domaines a donc toujours fait l’objet de contestation de la part des provinces. C’est un espace de tension, voire de conflit entre les deux paliers de gouvernement où se jouent les configurations territoriales de relations sociales à travers des processus de centralisation et de décentralisation des pouvoirs et des politiques.
4L’histoire de la constitution de l’Etat social au Canada dans laquelle le gouvernement central a joué un rôle de premier plan est caractérisée par le foisonnement des accusations d’interférence et d’unilatéralisme à son égard. Ce rôle majeur du gouvernement fédéral dans l’élaboration des objectifs généraux, dans l’établissement des priorités et dans l’alimentation des flux financiers, poursuivait aussi des motivations concernant les enjeux identitaires. Les actions du gouvernement fédéral associées au nation-building dans l’après-Seconde Guerre mondiale ont permis de développer un régime de citoyenneté érigé sur un ensemble de programmes sociaux3. Un modus operandi avait pu voir le jour au terme de plusieurs confrontations avec les gouvernements provinciaux. On comprend d’autant mieux que lorsque le gouvernement fédéral cherche, dans la décennie 1990, à modifier substantiellement et unilatéralement les principes de la politique sociale, ainsi que les formes et le volume du financement, il provoque un conflit avec les provinces, voire une opposition frontale. La réforme du champ de la protection sociale implique beaucoup plus que de simples enjeux sociaux ; le changement de la vision du Canada y occupe en effet une place centrale.
5Au cours des années 1950 et 1960, le gouvernement fédéral se fait le promoteur et le diffuseur d’innovations dans la constitution de l’État social, innovations souvent apparues à l’initiative du gouvernement de l’une ou l’autre province. Les programmes à frais partagés, établis avec les provinces, sont le dispositif de choix pour aller de l’avant dans la création de programmes et la définition d’interventions publiques, qui, avec des initiatives propres, tracent les contours et donnent consistance à une citoyenneté sociale. Par ce dispositif, le gouvernement fédéral apporte un financement à la mise en application de programmes pour autant qu’ils respectent objectifs et normes fortement inspirés, voire dictés par ce même gouvernement. Avec les années 1970, on a assisté à des développements négociés et à la mise en place d’un financement de plus en plus global. Dans le cours des années 1990, le gouvernement fédéral, qui avait tablé pendant des décennies sur la force d’impulsion des programmes à frais partagés, en vient à développer de nouveaux dispositifs alors même qu’il s’engage dans une réduction de ses dépenses. Alors qu’il avait pu bénéficier d’une certaine autorité morale pour ses interventions dans les champs de compétence provinciale, grâce aux transferts financiers aux gouvernements provinciaux, la décision du gouvernement fédéral de réduire les transferts mine fortement sa légitimité et compromet sa capacité d’agir comme leader autoproclamé.
6Cet article examine comment l’univers intellectuel, les catégories et les conceptions du courant de la nouvelle gestion publique sont mis à profit dans le processus de recouvrement de l’initiative politique par le gouvernement fédéral au moment de la recomposition de l’État social, qui entraîne une recomposition territoriale et un bouleversement dans la définition des identités. Nous partirons du repérage des idées-forces de cet univers intellectuel afin de saisir comment il offre un outil d’investissement politique dans cette période charnière pour la définition d’une nouvelle gouvernance à niveaux multiples. Cela permettra de faire le point sur une histoire qui suit son cours et dont le dernier mot n’a pas encore été dit. À tout le moins, il sera possible de comprendre jusqu’à quel point le vocabulaire et la syntaxe ont pu changer. Au préalable, il importe de jeter un éclairage sur les éléments contextuels qui révèlent l’usage stratégique que l’on peut en faire dans la transformation de l’État social au Canada.
Éléments contextuels
7Deux grandes considérations permettent de caractériser la situation dans laquelle s’inscrit la mise en route des transformations de l’État social, à l’initiative du gouvernement central : la fragmentation de l’espace canadien et la crise de légitimité du leadership fédéral.
Fragmentation de l’espace économique et social
8La mondialisation ne s’impose pas en soi : elle est, de plusieurs façons, construite par les États, à travers leur participation aux accords de commerce international, et leur acceptation de la mondialisation comme contrainte politique lourde4. L’acceptation de la « contrainte » mondiale par le gouvernement fédéral canadien comporte un pari majeur, soit d’être en mesure de contrecarrer les fortes tendances à la fragmentation induites par le fonctionnement du libre marché, tendances d’autant plus fortes quelles s’inscrivent dans la géographie économique nord-américaine. Les recettes de l’après-guerre ne sont plus à l’ordre du jour, alors que le néolibéralisme et les politiques de l’offre pourraient conduire vers un laisser-faire qui minerait la capacité du gouvernement fédéral de s’imposer dans la construction de l’entité et de l’identité canadiennes.
9Malgré les tentatives du gouvernement fédéral de reproduire un contrôle centralisé de l’économie, on assiste à la continuation, ou même à l’accélération, de la fragmentation de l’espace économique canadien. Les politiques libre-échangistes et néolibérales ont résulté en une plus grande régionalisation de l’économie canadienne, avec une structuration plus forte de l’axe nordsud. L’Ile-du-Prince-Edouard est la seule province en 1999 qui a encore plus d’échanges commerciaux avec le reste du Canada qu’avec le reste du monde, tandis qu’en 1981, elle partageait cette caractéristique avec cinq autres provinces, dont l’Ontario et le Québec5. Le ratio des échanges internationaux sur les échanges interprovinciaux (valeur des prix de 1992) est passé de 1,30 en 1991 à 2,13 en 1999 (Tableau 1). La progression de ce ratio est le reflet de la croissance spectaculaire des exportations internationales, qui ont doublé au cours de la période 1991-1999, pendant que les échanges interprovinciaux ont augmenté de 23 %. L’importance des échanges interprovinciaux, par rapport à la taille de l’économie, a connu une légère baisse au cours de la décennie, tandis que l’importance des exportations s’est accrue énormément. Cela suggère que l’espace économique distinctif qu’est le Canada voit sa pertinence s’effriter.
10L’intégration nord-sud va au-delà de simples liens commerciaux : elle touche aussi les chaînes de production. Plus encore, cet espace économique se double de pratiques socio-institutionnelles qui tendent à valoriser ces espaces et à leur donner une connotation nettement plus large.
11Les changements significatifs de l’économie politique internationale et de la gestion territoriale de l’État-nation au cours des 25 dernières années ont exercé de nouvelles pressions sur la relation entre le centre et les régions, et sur les processus d’encadrement de cette relation. Le régionalisme a été marqué par deux dispositifs depuis la fin des années 1980 :1) l’interface entre les régions et l’économie internationale a été renforcée, si bien que le régionalisme n’est pas contenu au sein du cadre de l’État-nation ; et 2) le nouveau régionalisme est davantage préoccupé par la gestion de cette interface, étant donné les enjeux de la concurrence internationale6. Les régions sont opposées « les unes aux autres sur le mode compétitif, plutôt que de remplir des rôles complémentaires dans une division nationale de travail7 ». Le cas canadien en est une illustration. D’où le concept émergent d’Etat-région.
12Les Etats-régions font référence à des instances régionales (ou provinciales) de décisions politiques poursuivant résolument une insertion optimale dans l’économie internationale (ou continentale) par la création de « dépendances non commerciales ». Cette construction économique suppose la création d’un réseau dense de liens entre les compagnies, le gouvernement, les associations, les universités et les établissements de recherche, fondés sur le partage de symboles et d’une culture commune. Elle est également politique, concentrant des demandes sociales et politiques sur le plan régional, et misant sur les sentiments de citoyenneté et de solidarité infranationales8.
13Trois axes principaux participent à la construction du phénomène régional au Canada : l’importance accordée à l’interface internationale, non seulement pour les échanges commerciaux, mais aussi dans la gestion des systèmes économiques et sociaux pour faire face à la concurrence internationale ; la création d’un riche réseau de liens entre diverses institutions et associations publiques et privées dont le but d’en arriver à une économie qui tire profit des liens de proximité ; la légitimité du gouvernement régional comme agent d’élaboration des droits, responsabilités et statuts de citoyenneté, surtout dans l’ordre sociopolitique. Les nouvelles stratégies provinciales de développement témoignent du caractère très variable de la présence du modèle de l’État-région. L’Ontario et le Québec semblent avoir fait le plus de chemin sur les trois axes depuis les décennies 1980 et 1990, suivi de l’Alberta et de la ColombieBritannique ; les autres provinces tirent de l’arrière.
14Cette tension entre la fragmentation économique, l’émergence d’Étatsrégions et la volonté de centralisation sociopolitique n’est pas nouvelle, mais elle s’est affirmée dans de nouvelles conditions au cours des dernières années. La compréhension par le gouvernement fédéral de la contrainte de la mondialisation et, en particulier, des formes néolibérales de la mondialisation, a eu l’effet paradoxal à la fois d’augmenter la fragmentation de l’espace économique canadien et de susciter des politiques fédérales cherchant à assurer un rôle prépondérant dans l’intégration de l’espace canadien9. Les tentatives de réponse politique ont, jusqu’à ce jour, rencontré d’importantes résistances de la part des provinces, ou n’ont pas pu contenir la fragmentation. Constatant la fragmentation de l’espace économique, dont il est en partie responsable, le gouvernement fédéral est amené à redoubler d’efforts afin de contribuer à une certaine intégration par les politiques sociales, domaine pour lequel il a joui traditionnellement d’une certaine légitimité, du moins au Canada anglais.
En perte de légitimité
15Mais cette légitimité est mise à mal par l’effet combiné des restrictions dans le financement des programmes, et bientôt par sa politique de lutte au déficit budgétaire fédéral. Alors que le gouvernement fédéral jouait un rôle central dans le financement des programmes sociaux au Canada dans les années de l’après-guerre, y compris dans les champs de compétence provinciale (principalement par le biais des programmes à frais partagés, nous l’avons vu), sa volonté de contrôler puis d’éliminer son déficit budgétaire l’a conduit à réduire ce rôle à partir de 1977 et jusqu’à la fin des années 199010. Les deux dernières décennies du dernier siècle ont de ce fait été marquées par une longue érosion de son leadership moral et finalement par une crise ouverte de légitimité et de confiance.
16Le financement des programmes établis, introduit en 1977, permettait au gouvernement fédéral de prendre ses distances dans le financement des dépenses sociales. À la place des programmes à frais partagés dans les domaines des soins de santé et de l’éducation postsecondaire que cet accord abolit, un transfert global, non plus fonction des dépenses réelles, mais plutôt indexé en fonction de l’inflation et de la croissance de la population est instauré. Ce retrait du gouvernement fédéral a eu pour contrepartie l’allègement des obligations provinciales en matière de reddition de comptes et une flexibilité accrue dans la détermination par les provinces des parts du transfert affectées respectivement à l’éducation postsecondaire et à la santé11.
17La contribution fédérale à l’autre programme majeur à frais partagés, le Régime d’assistance publique du Canada (partage des coûts de l’aide sociale provinciale), est abolie dans le budget de 1995 qui crée un seul transfert global, le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux (TCSPS). Dans l’opération, le financement total des provinces à ces titres est réduit de 33 % pour les quatre années suivantes12. Par cette compression budgétaire brutale, le gouvernement fédéral reporte la gestion de son déficit sur les provinces, en échange d’une plus grande souplesse dans la capacité provinciale d’utiliser l’argent des transferts fédéraux. Il s’agit d’une mesure systémique qui impose unilatéralement aux provinces une politique de restriction budgétaire radicale qui les oblige à procéder à des compressions de dépenses majeures dans leurs propres champs de compétence (la santé, l’éducation et l’aide sociale). Cette action a eu de lourdes conséquences sur les comportements subséquents des provinces13.
18L’autorité morale du gouvernement fédéral à édicter des règles dans ces domaines, qui s’était déjà effritée bien avant 1995, connaît un point de rupture après cette date. La perte de légitimité du fédéral, quant à l’imposition de conditions d’utilisation des transferts, découle largement de la réduction importante de ses transferts fiscaux. Le Graphique 1 illustre bien le choc provoqué en 1995 et, au cours des vingt dernières années, la tendance lourde d’un retrait du financement fédéral eu égard aux dépenses réelles et cela, dans des domaines d’intervention vitaux pour l’État social. C’est dans cette conjoncture que s’est imposée la thématique de l’union sociale qui a donné lieu, après quelques années de discussions, à une entente générale en 1999, entente qui est le produit d’un enchaînement de réactions qui ont poussé successivement les acteurs impliqués dans la gouvernance à niveaux multiples à reformuler leurs attentes. Nous verrons plus loin que cette entente synthétise fort bien les grands paramètres de la nouvelle gestion publique prônée.
19Cette situation s’est aggravée en raison de la position respective occupée par les deux paliers de gouvernement eu égard à l’assiette fiscale et aux dépenses publiques prévisibles. La thématique politique du déséquilibre fiscal est parvenue en très peu de temps au premier plan de la scène publique. Le gouvernement fédéral sort grand vainqueur de la crise financière de l’État canadien, d’abord pour la résorption de son déficit, puis pour sa capacité d’en engranger des surplus, alors que la situation des gouvernements provinciaux est globalement tout autre.
20En très peu de temps, le gouvernement fédéral a procédé à un retournement de situation concernant son budget, en passant d’une situation déficitaire chronique à des surplus importants. Le virage du milieu des années 1990 y est une pièce maîtresse. La combinaison des restrictions budgétaires, de la chute radicale des transferts financiers aux provinces et des surplus imposants de l’assurance-emploi versés dans les fonds consolidés a permis, dans son ensemble, de transformer un déficit budgétaire de 38,6 milliards de dollars pour l’année 1991-1992 en un surplus de 5,3 milliards de dollars en 1998-199914. Sur cette lancée, les perspectives pour les années qui suivent vont dans la même direction, mais avec davantage d’ampleur, alors que parallèlement la situation des gouvernements provinciaux ne s’annonce pas aussi favorable.
21L’écart croissant entre la capacité du gouvernement fédéral et celle des gouvernements provinciaux de financer leurs programmes, interventions et services de tous ordres, a été désigné par la notion de déséquilibre fiscal (verticalfiscal imbalance). Ce déséquilibre a fait l’objet d’études et de projections15. En considérant, comme cela s’impose dans des exercices de prospective, une série de postulats sur la croissance des dépenses et des revenus, sur le maintien de la répartition de l’assiette fiscale et autres éléments concernant par exemple la consommation, la croissance économique — postulats variables selon les auteurs —, on a pu estimer que le gouvernement fédéral était en mesure d’enregistrer des surplus budgétaires de plus en plus considérables, alors même que les gouvernements provinciaux étaient voués à l’accumulation de déficits ou, au mieux, à un équilibre budgétaire précaire16. Le Graphique 2 reprend les principales conclusions de deux études citées.
22Ce déséquilibre creuse l’écart dans l’appréciation qui est faite, selon les milieux, de la capacité, de l’intérêt et de l’opportunité politique que le gouvernement fédéral revendique un rôle de meneur dans les politiques à mettre en oeuvre dans la restructuration de l’État social. Le défi n’en est que plus grand pour un gouvernement qui prétend être en mesure d’incarner et de donner une cohésion d’ensemble à un espace politique, par ailleurs miné par un espace économique fractionné et aux prises avec une structuration d’espaces développant une cohérence régionale, qui se double de considérations nationales pour le Québec. Ce défi s’amplifie si ce même gouvernement, qui avait pu asseoir son leadership sur la canalisation vers les provinces de ressources financières conséquentes, tarit la source, au moment où il apparaît le plus argenté. Le leadership est difficile à exercer lorsque c’est la bonne foi même qui est mise en cause. C’est dans ce contexte que le renouvellement du discours et de la démarche, s’inspirant de la nouvelle gestion publique, prend tout son sens, d’où une instrumentalisation particulière au service de la réorganisation actuelle des capacités respectives d’exercice du pouvoir politique dans le régime fédératif.
Nouvelle gestion publique
23La nouvelle gestion publique et sa rhétorique n’ont rien de singulier au Canada et, inversement, ce pays, comme Etat et société, participe et fait face aux défis que les pays comparables doivent relever. La crise de l’État social et la restructuration des cadres de vie, la mondialisation et la recomposition territoriale qui l’accompagne, et la redéfinition des modèles d’intervention publique vont de pair avec un changement dans la sphère des idées, d’où une prolifération certaine des réflexions sur la gouvernance et la gestion publique.
24Plusieurs gouvernements ont modifié leur processus d’élaboration et de mise en application de politiques et ont adopté de nouveaux outils. L’adoption des notions de « gouvernance » et de nouvelle gestion publique (NGP) (new public management ou NPM) a eu une influence significative tant en Europe qu’au Canada17. Les notions de « gouverner plutôt que de ramer » (steering not rowing), de benchmarking, de meilleures pratiques, de réseaux, de partenariats et ainsi de suite, font partie de ce courant intellectuel. Ces notions ont été adoptées par le gouvernement fédéral dans les années 1980 et 1990. Dans la mesure où elles ont été retenues sérieusement, elles ont aussi suscité une façon de repenser les relations intergouvemementales et donc le complexe de programmes tout autant pancanadiens que spécifiques aux divers espaces provinciaux qui composent l’État social canadien18.
25La nouvelle gestion publique a fourni les balises du cadre de référence mis en place et mis au service de la définition de la stratégie fédérale dans le redéploiement de son activité en matière sociale, au tournant des années 1990 et depuis. En ce sens, le discours de la nouvelle gestion publique participe au désengagement fédéral des dispositifs de l’État social, tel qu’il a été alors défini, et a servi de repère à la recomposition des relations intergouvemementales dans la définition d’un nouvel investissement social de l’État. Dans cette perspective, la nouvelle gestion publique a représenté un outil d’investissement politique dans la régulation sociale et dans la reconfiguration du statut des composantes de l’État canadien et de leurs relations. Cette conception de la gestion publique n’a pas pour objet la transformation du régime fédératif, fût-il canadien, mais elle offre un cadre de pensée qui a servi à la promotion d’une compréhension particulière du fédéralisme par le gouvernement du Canada. La nouvelle gestion publique a été instrumentalisée en renouvelant le discours et les postulats qui supportaient le réinvestissement fédéral dans un État social en transformation, sous l’égide de ce même gouvernement19.
26La nouvelle gestion publique met l’accent sur la définition des objectifs à atteindre et sur le pouvoir de contrôler les résultats. On privilégie moins la légalité et le respect des procédures formelles que la nécessité de mesurer et d’évaluer l'outputàcs politiques publiques. Préoccupé par une certaine prise de distance à l’égard de l’application comme telle des programmes et mesures, il apparaîtra plus indiqué de se concentrer sur la détermination des grands objectifs à atteindre et des cibles visées. D’où l’importance accordée au leadership plutôt qu’à l’autorité formelle, et la préséance de la légitimité sur les droits formels. La deuxième composante essentielle dans l’élaboration des politiques, qui s’ajoute à l’établissement des objectifs et des cibles, c’est l’évaluation de la performance et des résultats. Pour ce faire, la compétition est vue d’un très bon oeil, ce qui rend nécessaire l’utilisation de benchmarks.
27La place accordée à la décentralisation et au réseautage ne signifie pas que les gouvernements centraux perdent tout pouvoir de façonner les actions d’un autre palier de gouvernement : l’établissement de normes, d’objectifs et de cibles explicites, ainsi que l’évaluation de la performance et des résultats des politiques publiques exigent la démonstration d’un leadership politique dans la formulation des politiques et le pouvoir de contrôler les résultats. Les indicateurs de performance peuvent devenir un outil de contrôle a posteriori aux mains des autorités centrales sur les politiques publiques, tout en menant une politique dite de décentralisation20. L’évaluation expost prend le pas sur la planification ex ante détaillée qui était le propre des programmes à frais partagés, par exemple.
28L’utilisation de tels outils mérite une analyse attentive, afin de comprendre leurs conséquences sur la recomposition territoriale, comprise comme la résultante des changements dans le complexe des principes et des programmes localement décidés et « centralement » initiés. La nouvelle gestion publique appelle préférablement une démarche qui retient un fédéralisme collaboratif plutôt qu’un fédéralisme de division des compétences. La transparence, la qualité des services et les besoins des citoyens (clients) plaident pour cette collaboration21. En conséquence, les mécanismes devraient être basés, nous dit-on, sur trois facteurs qui orientent les efforts, soit : la reddition des comptes, l’efficience et l’atteinte des résultats22. Il y a là une instrumentalisation et une logique fonctionnelle des relations de pouvoir dans le régime fédératif qui donne une légitimité au gouvernement fédéral dans sa revendication d’une prééminence dans la « gouvernance stratégique » par laquelle les priorités politiques et les lignes d’action, de même que le contrôle a posteriori de politiques publiques décentralisées, peuvent être déterminées, dictées ou arrêtées au centre, soit au palier fédéral, par opposition aux provinces.
Garder l’initiative
29La rupture introduite à l’initiative du gouvernement fédéral dans le financement de l’État social en 1995 n’est pas restée sans réponse. Sans que les gouvernements ne fassent bloc, plusieurs ont répondu en déniant au gouvernement fédéral toute légitimité dans sa volonté de rester maître du jeu dans le domaine de la protection sociale. Au-delà de la réaction anticipée du gouvernement du Québec qui s’appuyait sur la question du respect du principe fédéral, le gouvernement ontarien a, en 1996, fait connaître une proposition qui mettait de l’avant un modèle dans lequel les provinces prenaient le contrôle presque complet de l’élaboration des programmes sociaux et des normes et conditions partagées23. Pour les provinces qui adoptaient cette position, dont le Québec, une forme d’union sociale semblait offrir une opportunité de garder le gouvernement fédéral éloigné des grandes décisions concernant la protection sociale. Pour le gouvernement fédéral, l’heure était à l’offensive. La réduction radicale des transferts aux provinces et, en contrepartie, l’accroissement de leur marge de manoeuvre dans la reddition de comptes concernant leurs dépenses privaient le gouvernement fédéral de l’outil principal dont il s’était servi, depuis la guerre, pour façonner l’action provinciale ainsi que de l’autorité morale associée à sa capacité de financement. Le déficit fédéral une fois sous contrôle, il devenait nécessaire de reprendre l’offensive, mais avec de nouveaux outils et sur un terrain balisé différemment.
30Après plusieurs péripéties, les négociations débouchent (le 4 février 1999) sur une entente-cadre sur l’union sociale (à laquelle tous les gouvernements, sauf celui du Québec, souscrivent)24. Cette entente, qui permet au gouvernement fédéral de réaffirmer son rôle via un nouveau mode de gestion intergouvememental dans le domaine social, sera l’un des outils, mais non le seul du redéploiement de la gouvernance à niveaux multiples.
31L’entente sur l’union sociale est imprégnée des principes du modèle et du langage de la nouvelle gestion publique. Les gouvernements fédéral et provinciaux y affirment vouloir travailler en partenariat pour l’ensemble des Canadiens, en donnant priorité à la planification concertée, à la coopération, et aux consultations réciproques et avec les citoyens. La notion de partage des compétences, citée d’entrée de jeu, disparaît au profit d’une vision basée sur l’interdépendance fonctionnelle, et le travail en collaboration. Lorsque le gouvernement fédéral utilise son pouvoir de dépenser, il devrait procéder de façon respectueuse des gouvernements provinciaux et de leurs priorités, tout en suivant une démarche coopérative. Une consultation des provinces devrait être entreprise au moins un an avant de modifier de façon importante le financement des transferts sociaux et de nouvelles initiatives exigeraient le consentement de la majorité. La légitimité constitutionnelle et politique des interventions fédérales est énoncée sans réserve ; les consultations préalables évoquées ne changent rien à la chose. La mise en place de procédures pour le règlement des différends est prévue. L’entente-cadre promet aussi d’accroître l’imputabilité des gouvernements, d’où l’idée de l’établissement de critères et d’indicateurs pour mesurer le rendement des programmes. Ce sont en définitive les citoyens et non un partage constitutionnel des pouvoirs que ces articles de l’entente interpellent ; un meilleur partage des informations et une plus grande transparence sont censés contribuer à une bonne gouvernance et, en fait, tous les gouvernements sont invités à faire participer les « tierces parties » aux réseaux politiques25.
32Quelle que soit l’attention portée à l’entente-cadre, celle-ci ne rend pas compte de la stratégie d’ensemble du gouvernement fédéral pour influencer les actions provinciales dans le domaine de la protection sociale. Quand on examine les mesures prises au cours des dernières années, il ressort que quatre types d’actions engagées caractérisent l’investissement social du fédéral dans le remodelage des lieux de pouvoir dans le régime fédératif canadien.
33Le revirement de situation dans les finances publiques fédérales, à la suite des actions que nous avons décrites, permet au gouvernement fédéral de se présenter sous le figure de « l’homme aux écus » avec de l’argent neuf. Car, pour l’essentiel, ce gouvernement refuse l’idée de redresser le financement pour les programmes existants au niveau qu’il aurait dû être. On en viendra à redresser que très partiellement le financement de programmes existants, notamment pour la santé, mais la logique préconisée est celle d’un réinvestissement sur une nouvelle base26. Dans la foulée, le nombre de nouvelles initiatives est assez impressionnant et prend des formes diversifiées. Le Tableau 2 donne un aperçu des actions fédérales depuis 1998 en les répartissant par démarche. Quatre démarches peuvent être caractérisées par le type d’arrangement et la façon de traiter les enjeux.
34Le regroupement de ces actions par cadrans permet de mettre en évidence des logiques d’action différentes, adaptées aux cibles et aux obstacles politiques et institutionnels.
35Le Cadran I retient les ententes fédérales-provinciales qui ont fait l’objet de négociations souvent âpres permettant au gouvernement fédéral d’assurer sa présence dans des champs de compétences réputés être de responsabilité provinciale. En vertu du principe fédéral de division des compétences selon le palier de gouvernement, le gouvernement fédéral devrait investir dans ses propres champs et être en retrait dans ceux associés aux provinces. Si cette logique stricte s’était imposée, l’histoire de la constitution de l’État social au Canada serait à réécrire. Très tôt, le gouvernement fédéral s’est doté d’une responsabilité en matière sociale, d’éducation, de famille, etc. La formule des programmes à frais partagés a permis au gouvernement fédéral de jouer les passe-murailles pour occuper le territoire provincial, mais encore fallaitil négocier ou faire accepter ces initiatives par les provinces, car, in fine, ce sont elles les prestataires de services qui donneront corps aux actions que le gouvernement fédéral veut impulser.
TABLEAU 2. Actions fédérales en matière provinciale, par type d’arrangement, depuis 1998
36Cadran I • Ententes fédérales-provinciales
- Ententes sur la santé (2003, 2004)
- Prestation nationale pour enfant
- Initiatives de développement de la petite enfance
- Nouveau pacte pour les villes et les collectivités
37Cadran II • Prolongement d’une compétence fédérale
- Assurance-emploi : programme des congés parentaux
- Assurance-emploi : programme de la prestation de compassion
38Cadran III • Création de fondations
- Fondation canadienne pour l’innovation
- Fondation canadienne des bourses d’études du millénaire
- Conseil canadien de l’apprentissage
- Programme des chaires de recherche du Canada
39Cadran IV • Expertise et projets pilotes
- Institut canadien de la recherche en santé
- Système canadien d’information sur la santé
- Fonds de recherche et d’évaluation des services pour le personnel infirmier
- Fonds pour l’adaptation des services de santé
- Fonds pour la réduction des temps d’attente
- Conseil canadien de la santé
- Groupe de travail technique sur les rapports de rendement
40L’objet de la négociation change et propose un renouvellement en comparaison avec la période antérieure. Cela reflète la rencontre de plusieurs facteurs. Pensons à la perte de légitimité du gouvernement fédéral et à l’opposition provinciale à se faire imposer des normes nationales assorties de mécanismes tatillons de reddition de compte, en référence à ces normes. Il faut aussi compter sur la volonté fédérale de contourner les obstacles à la négociation en mettant l’accent sur l’imputabilité en référence aux résultats et d’engager l’action publique dans une démarche de nouvelle gestion publique tout en mettant l’accent sur un fédéralisme fonctionnel qui prédispose à naturaliser son action présente et à venir. Le Cadran I, qui regroupe les ententes fédérales-provinciales, pointe sur des initiatives où s’exprime la démarche de la nouvelle gestion publique.
41Le fédéralisme fonctionnel constitue un habillage moderniste et aux allures neutres à une rhétorique politique parfois surprenante. À l’automne 2005, Paul Martin, qui insiste, au nom de l’intérêt national, pour mettre en oeuvre, à son initiative et à marche forcée, des services de garde pour la petite enfance par les provinces, déclare que, même si les garderies relèvent des provinces, elles représentent un intérêt national parce quelles accueillent des immigrants et des Autochtones, deux champs de compétence fédérale ; et de conclure : « La cohésion est de responsabilité fédérale27.» Suivant cette démarche, il ne peut y avoir de compétence provinciale exclusive. Cette démarche est des plus conventionnelles. Elle consiste à affirmer qu’une faible intégration sociale (réelle ou supposée) nécessite un gouvernement central fort qui doit jouer un rôle créateur et autonome pour redresser cette réalité. Cette revendication de mission prépondérante visant le nation-building n’est pas nouvelle : elle fait partie de l’histoire canadienne, c’est la forme discursive et la méthode qui se présentent sous des airs inédits. Avec les initiatives du Cadran I, soit en matière de santé, de soutien au revenu des familles, de développement de la petite enfance, de financement des villes, le gouvernement fédéral cherche à façonner les dépenses des provinces en fixant des objectifs de politique publique à son initiative. Le but est de produire des résultats avec un plan d’action qui, au nom de la collaboration de tous les gouvernements, fait fi des compétences constitutionnelles.
42En raison de l’histoire récente des relations intergouvemementales, la capacité du gouvernement fédéral d’exiger un rapport fidèle et détaillé de la façon dont les transferts fédéraux sont dépensés est mise à mal et n’est plus nécessaire dans la nouvelle conception des choses. La discussion porte sur les résultats vérifiables, ce qui suppose l’établissement de repères ou indicateurs pour mesurer le rendement des politiques publiques. Cette dernière opération signifie l’harmonisation des informations et la valorisation du rôle des experts dans la mesure du rendement ou de l’efficience. Cet exercice fait aussi appel à la désignation de cibles pluriannuelles et débouche sur des rapports annuels sur les progrès réalisés. Le gouvernement fédéral se sert de la reddition des comptes et des exigences d’imputabilité face à la population pour tenter d’infléchir l’action des provinces.
43Cela peut apparaître un mode plutôt indirect et distant de contrôle. A court terme, l’impact d’une telle procédure est différé, car on est davantage occupé à établir les critères et le mode d’harmonisation de l’information nécessaires à la reddition des comptes (d’où, dans le domaine de la santé, la création sur une base multipartite du Groupe de travail technique sur les rapports de rendement), et l’imputabilité basée sur le jugement de la population n’a pas donné tous ses fruits. Il est cependant difficile d’imaginer que la mesure des résultats et de la performance des politiques à mettre en oeuvre n’ait qu’une portée symbolique. Cela ne peut se limiter qu’à une procédure de normalisation a posteriori. Plusieurs éléments conduisent à le penser. La reddition des comptes ne peut être un simulacre d’approbation. Déjà le vérificateur général du Canada, dont la responsabilité est de passer au crible les dépenses engagées par l’administration fédérale, considère que des transferts qui s’avéreraient inconditionnels dans les faits seraient difficilement acceptables à ses yeux ; du moins, à titre préventif, soumet-il dès à présent des critiques et des réserves face à cette éventualité28. Cette crainte est sans doute inutile, car les rapports annuels sur les progrès réalisés ont tout lieu d’être une obligation de substance et non une simple formalité. D’ailleurs, ces rapports de performance prennent à témoin la population en général, mais doivent le plus souvent être adressés à une institution sous le contrôle fédéral, comme c’est le cas, par exemple, pour le domaine de la santé avec le Conseil de la santé.
44La logique fédérale et l’histoire politique au Canada portent à croire que la standardisation et la précision des rapports deviendront un outil de normalisation, car il y a fort à parier que la résistance provinciale à une logique hiérarchique entretenue par le gouvernement fédéral ne sera pas suffisante pour enrayer le processus. C’est là que la joute politique et le rapport de force deviennent de première importance. À ce jour, il n’y a que le gouvernement du Québec qui a cherché, avec un certain succès pour la santé et les services de garde, à échapper à ce processus de normalisation, non sans un certain ressac de l’opinion publique du reste du Canada.
45Le Cadran II regroupe des initiatives récentes par lesquelles le gouvernement fédéral s’engage dans des actions posées comme le prolongement d’une compétence fédérale. L’interprétation extensive, qui est donnée à une compétence fédérale, peut provoquer une opposition venant des provinces, mais aucune négociation ne s’impose, ne serait-ce parce que c’est l’administration fédérale qui veille à l’implantation du programme et est le prestataire de service. En 1940, les gouvernements provinciaux s’entendent pour reconnaître la compétence fédérale en matière d’assurance-chômage, ce qui fait l’objet d’un des rares amendements constitutionnels. Par la suite, le gouvernement fédéral a utilisé le programme de l’assurance-chômage pour introduire les congés de maternité, même si cela peut apparaître incongru que l’on fasse ce rapprochement. Ces dernières années, l’assurance-emploi (nouvelle appellation du programme de l’assurance-chômage) a servi de cadre de rattachement pour introduire une amélioration notable avec le programme de congés parentaux (en 2000) et celui de congés pour personne accompagnant un parent en fin de vie (dits de compassion)29. À ce jour, l’utilisation de la compétence fédérale pour l'assurance-emploi a eu un effet restrictif sur la détermination des cibles et des modes d’action. Il en est ainsi pour les conditions d’admissibilité des personnes qui, avec la transformation du marché du travail, ne se qualifient pas à titre de prestataire d’assurance-emploi ; par exemple, les sans-emploi de longue durée ou les nouveaux arrivants sur le marché du travail sont des laissés-pour-compte de ces mesures.
46La volonté fédérale de s’engager dans de nouvelles formes d’intervention sans s’imposer de nouvelles contraintes politiques explique largement ce rattachement à l’assurance-emploi. La contestation judiciaire des congés parentaux fédéraux par le gouvernement du Québec lui avait donné raison ; la plus haute Cour du Québec a statué que le gouvernement fédéral outrepassait ses compétences et que cette initiative violait la Constitution. La Cour suprême a renversé récemment cette position en promouvant une interprétation évolutive de la Constitution afin qu'elle rende compte des « réalités nouvelles ». Est-ce à dire que ces programmes pourront être étendus aux travailleurs autonomes et aux travailleurs en formation, par exemple ? Cela ouvrirait un champ d’action beaucoup plus important qu’il ne l'est et dispenserait le gouvernement fédéral des ententes fédérales-provinciales dont les contraintes sont beaucoup plus lourdes. Les actions du Cadran II sont, dans cette mesure, susceptibles de connaître un essor au cours des prochaines années.
47Le Cadran III rassemble des initiatives plutôt inédites dans l’histoire canadienne. Au cours des dernières années, le gouvernement fédéral a entrepris de créer des fondations dans des domaines qui, conventionnellement, ne relèvent pas de ses compétences. Ce qui est davantage visé, c’est le secteur de l’enseignement postsecondaire, et particulièrement la recherche universitaire. En créant la Fondation canadienne pour l’innovation, la Fondation canadienne des bourses d’études du millénaire, le Conseil canadien de l’apprentissage et le Programme des chaires de recherche du Canada, le gouvernement fédéral mène une action structurante dans le développement des universités qui sont de la compétence provinciale. Cette immixtion n’est pas en soi nouvelle, car le gouvernement fédéral prétend depuis bien longtemps que l’enseignement postsecondaire, comme la formation professionnelle d’ailleurs, relève au moins autant du développement économique que de l’éducation. Mis à part les sommes consenties en très peu de temps, ce qui caractérise ces initiatives c’est que l’on procède par la création de structures indépendantes qui ne relèvent pas de l’administration publique en tant que telle.
48Avec ces « créatures indépendantes », on réunit des experts, administrateurs, spécialistes et représentants de la société dans une structure qui a ses propres règles de fonctionnement et critères de recrutement pour s’acquitter d’un mandat public avec des ressources publiques. On ne peut pas s’y tromper, à la fois les mandats et les structures de ces « créatures » en font les outils d’une politique gouvernementale, d’autant plus quelles sont dotées de fonds publics pour plusieurs années. Cette nouveauté a provoqué des réactions négatives des gouvernements provinciaux (encore que ce soit assez inégal), mais pour l’essentiel le recours à des agents, à des règles et à des procédures externes à l’administration, recours qui est inspiré par la nouvelle gestion publique sans doute, constitue pour le gouvernement fédéral une façon de se mettre à l’abri des contentieux intergouvemementaux, même si l’intervention est de nature provinciale, et cela permet de viser une dépolitisation des enjeux et une instrumentation de politiques publiques.
49Les mécanismes de reddition de comptes sont ici assez simples. Les récipiendaires de ressources « publiques » venant de ces « créatures indépendantes » sont redevables à ces dernières de l’usage qui en est fait. Il s’agit là de mécanismes stricts de reddition des comptes avec principalement des individus ou des institutions universitaires comme interlocuteurs. Par la suite, les « créatures indépendantes » qui ont vu le jour s’astreignent à une procédure de reddition des comptes auprès de l’administration fédérale. De cette façon, la boucle est bouclée et les politiques mises en oeuvre ont tout lieu de refléter les visées originelles du gouvernement fédéral, avec un maximum de visibilité et sans devoir passer par des négociations avec quelque gouvernement provincial, car, dans le pire des cas, le gouvernement provincial aura pour seul interlocuteur l’administrateur « privé » nommé pour diriger la nouvelle structure « parapublique ».
50Les initiatives regroupées dans le Cadran IV témoignent de ce que le gouvernement fédéral cherche à devenir le dépositaire privilégié de l’expertise en matière de protection sociale et l’interlocuteur compétent de premier plan pour la conception des transformations à venir. La création d’instituts spécialisés et de fonds de recherche et d’étude suscite une demande sociale pour des politiques et identifie les experts et interlocuteurs légitimes avec lesquels le gouvernement se pose en relation. Nous sommes dans le domaine de la construction d’une demande sociale prévisible et autorisée susceptible d’influer sur les priorités politiques et la confection de l’agenda politique. L’expertise scientifique est porteuse de légitimité qui, elle-même, soutient le leadership. Cela se fait à faible coût, car au total les sommes investies n’ont pas la même ampleur qu’un programme de prestation de service s’adressant à la population.
51À ces investissements structurants, se joint le financement des projets pilotes. Par ce biais, le gouvernement fédéral se donne la possibilité d’infléchir la direction générale et la philosophie des programmes existants et de façonner les innovations futures. Cela emprunte de multiples formes qui, là encore, sont peu coûteuses : projets pilotes, initiatives stratégiques, fonds de transition. En se donnant les moyens d’identifier la nature des changements à envisager, les mesures possibles, les idées de réformes, les meilleures pratiques et les idées qui marchent, le gouvernement fédéral se dote du savoir utile pour avoir une influence sur les choix de réformes et de priorités et pour tenter de garder le contrôle sur la nature des réformes auxquelles seront soumis les programmes provinciaux30.
52Ces actions permettent au gouvernement fédéral de « travailler son lealeadership», capital particulièrement important, car il a été fortement compromis au cours des dernières années, mais surtout dans la perspective où on conçoit que le leadership plutôt que l’autorité formelle comptera davantage dans les années qui viennent.
Le terrain brouillé de la recomposition territoriale
53Ce parcours rend compte du fait que la nouvelle gestion publique accompagne le réinvestissement politique du gouvernement fédéral dans une période difficile, qui suit son désengagement brutal. Le vocabulaire, l’argumentaire et les repères ne sont pas nouveaux, mais ils s’expriment avec davantage d’éclat au cours de ces dernières années de remise en selle pour reprendre les rennes dans la direction de la transformation de l’État social. Il s’agit désormais d’un code de communication presque obligé et, dans les cas les plus tendus, du code qui impose une détermination polémique à ceux qui voudraient pourfendre les positions politiques fédérales. Ce code inspire trois modes d’intervention, soit il sert de cadre de négociation des contentieux avec les gouvernements provinciaux, soit il sert d’argutie à des formules d’éviction de l’arène politique d’actions virtuellement ou réellement litigieuses, ou encore il guide la constitution de réseaux d’expertise comme réponse ou contrepoids aux négociations fédérales-provinciales et aux connaissances accumulées par les provinces comme prestataires de service.
54Cet univers discursif alimente le paradigme d’une nouvelle ère qui s’annonce, et qui a un très large horizon, car il embrasse tous les enjeux qui concernent le déploiement de l’État et, dans le cas d’un régime fédératif, les relations intergouvemementales. Cela n’est pas étranger à l’ode à la nouvelle collaboration fédérale-provinciale qui se fait entendre31. Le fédéralisme est d’abord fonctionnel, sous un leadership fédéral non dissimulé et doté de ressources ne serait-ce que pécuniaires, qui mobilise diverses instances et acteurs dont les gouvernements provinciaux. Si, dans un premier temps, le lest jeté du côté des critères et des normes pancanadiennes et les procédures d’une formalisation limitées pour la reddition des comptes peuvent laisser croire à la reconnaissance de l’autonomie provinciale, cette première appréciation semble d’abord l’effet d’un trompe-l’oeil. Le déplacement de la normalisation, des inputs vers les outputs, des normes et critères vers les résultats des politiques, implique logiquement un transfert temporel dont on ne voit pas nécessairement les incidences pratiques dans l’immédiat. Outre le mode d’imputabilité basé sur la sanction de la population, difficile en raison de sa nature, il est probable que cette imputabilité et la reddition des comptes prennent une forme beaucoup plus contraignante. Il est à prévoir que le filet de la reddition des comptes se resserre et que les critères de performance deviennent des outils à portée aussi invasive que pouvaient l’être les anciens mécanismes basés sur la correspondance de critères posés ex ante avec les dépenses faites. En d’autres termes, pour l’observateur de la scène politique canadienne, il y a fort à parier que cette nouvelle collaboration fonctionnelle s’inscrive dans des relations verticales et compétitives entre les gouvernements au sein de la fédération.
55La discussion a été menée jusqu’à maintenant avec une référence passagère, voire accessoire à la problématique québécoise au sein de l’État fédératif canadien. Pour comprendre la dynamique profonde de ce qui se fait, il en vaut mieux ainsi. Le gouvernement du Québec s’est généralement tenu à l’écart des ententes établies plus ou moins à l’arraché jusqu’à ce jour. Mentionnons que le gouvernement du Québec n’a pas souscrit à l’entente sur l’union sociale en 1999, qu’il s’est opposé à la mise en place des fondations — même s’il a cherché a en tirer avantage tout en préservant, au moins formellement, son autonomie politique et administrative —, qu’il a contesté, y compris devant les tribunaux, l’extension de la compétence fédérale en assurance-chômage avec le congé parental, qu’il a négocié une entente particulière pour le financement fédéral de l’assurance-maladie sur la base de l’asymétrie des arrangements intergouvemementaux et qu’il vient de négocier avec le gouvernement fédéral une entente pour le financement de services de garde pour la petite enfance qui fait de nouveau référence à cette asymétrie. Dans ces trois derniers cas, pour lesquels des politiques étaient déjà adoptées ou souvent mises en vigueur par le gouvernement du Québec, l’intervention fédérale faisait office non seulement d’une intervention en matière provinciale, mais d’une duplication assez injustifiable. Ce qui est plus pertinent de noter pour notre propos, c’est que les négociations ont eu pour effet de desserrer les liens de la reddition des comptes et de permettre un usage compatible avec l’initiative fédérale, mais non dicté par celle-ci.
56Plusieurs dimensions restent pourtant en suspens. Le gouvernement fédéral n’a pas abandonné ses prétentions, les sommes ne sont pas transférées par le fédéral sans condition, il n’y a pas eu de transfert d’une part de l’assiette fiscale au Québec (ni à quelque province d’ailleurs) pour qu’il s’acquitte de ses responsabilités ; dans ces conditions, ces ententes ne peuvent être que provisoires et interprétées eu égard à l’économie générale de l’évolution des relations intergouvemementales. On sait que l’entente de l’automne 2004 pour l’assurance-maladie, entente se référant au principe de l’asymétrie, a soulevé un tollé dans l’opinion publique et parmi l’intelligentsia canadienne, que le gouvernement fédéral revenait par là sur une doctrine qui fait partie des canons du fédéralisme canadien, et que les gouvernements provinciaux sont généralement très jaloux de l’idée de l’égalité juridique des provinces. Tous ces éléments portent à penser que ce qui se met en place entre le gouvernement fédéral et les provinces autres que le Québec est susceptible de peser de tout son poids dans la dynamique à venir et qu’une normalisation de la situation déviante du Québec n’est qu’une question de temps. En ce sens, le renouvellement de la gouvernance à niveaux multiples du fédéralisme canadien se fait sans le Québec — au sens où il reste en retrait —, mais est voué à imposer sa logique dans un proche avenir.
57On pourrait imaginer un tout autre parcours, soit celui d’arrangements atypiques à répétition concernant le Québec, ce qui permettrait de conjuguer un fédéralisme collaboratif, suivant une conception fonctionnelle du régime, pour les autres provinces et un fédéralisme de séparation de compétences dans le cas du Québec. Sans que l’on puisse rejeter catégoriquement cette possibilité, il faut admettre que l’idée même apparaît saugrenue lorsqu’on connaît non seulement l’histoire du fédéralisme canadien, mais aussi l’état actuel des prétentions et des conceptions qui prévalent sur les scènes provinciales, abstraction faite du Québec, et sur la scène fédérale. Ce parcours est en effet bien improbable et il sert davantage comme un cas d’école que l’on peut considérer par souci de correction que comme une avenue praticable.
58N’importe comment, le réaménagement de la gouvernance avec le discours de la nouvelle gestion publique, qui prétend à la cohérence et à la limpidité, s’ouvre sur un terrain où le brouillage des pistes devient la règle. Nous avons vu que la politique de restrictions budgétaires et de lutte contre les déficits a connu une impulsion marquée par la baisse abrupte des transferts fédéraux aux provinces, ce qui a permis au gouvernement fédéral de réduire radicalement sa participation aux dépenses. Ce geste, par lequel le gouvernement fédéral s’est désolidarisé des dépenses de l’Etat social, a imposé de façon systémique des restrictions concernant la prestation de services et les transferts aux personnes dont les gouvernements provinciaux sont responsables. Ce sont ces derniers qui, en appliquant pour eux-mêmes une politique d’équilibre budgétaire, ont dû appliquer ces restrictions et faire face en première ligne aux secousses sociales quelles ont provoquées.
59Pourtant, le gouvernement fédéral continue à prendre des initiatives en profitant, après quelques années seulement, du revirement de sa situation financière qui en font désormais le palier de gouvernement le mieux pourvu sur le plan des ressources fiscales. Il est ironique de voir ce gouvernement affronter l’éprouvant défi de gérer ses surplus. Depuis 1997-1998, le gouvernement fédéral enregistre des surplus budgétaires qui ont été systématiquement sous-estimés en début d’année lors de la présentation du budget. La dette représentait 70 % du PIB au milieu des années 1990, 40 % en 2005, et, dans moins de dix ans, elle serait ramenée à 25 %, selon des prévisions conservatrices32. Le projet de loi qui a été déposé en octobre200533 stipule que les surplus non prévus de plus de trois milliards de dollars enregistrés en fin d’année devraient servir de façon égale à réduire la dette, à faire des dépenses prioritaires et à réduire les impôts des particuliers pour l’année en cours. Il s’agit de surplus en fin d’année, une fois que le gouvernement aura bouclé ses opérations, mais auparavant bien des initiatives peuvent être prises, comme en témoignent des dépenses non annoncées au budget de 7,3 milliards de dollars en 2002-2003 et de 21,3 milliards en 2004-2005. Au printemps 2005, le gouvernement fédéral, minoritaire à la Chambre des communes, cherche à gagner un vote de confiance en se ralliant le parti social-démocrate et consent à revoir son budget fraîchement déposé et y ajoute 4,6 milliards de dollars pour diverses mesures sociales, tout en renonçant à réduire les impôts des grandes entreprises. Ces quelques notes soulignent que le gouvernement fédéral possède d’importantes marges de manoeuvre et que son utilisation n’est pas de la plus grande transparence ni de la plus grande prévisibilité. Il est difficile de penser que l’on puisse s’engager dans une restructuration de l’État social avec les principaux prestataires de service et les principaux pourvoyeurs de mesures en matière sociale, de santé et d’éducation, que sont les provinces, sur un terrain aussi occulte.
60Eu égard à la situation financière des provinces, le contraste est frappant, car, mise à part la province de l’Alberta avec sa rente pétrolière, elles sont dans une situation financière exsangue. Malgré tout, par leurs responsabilités constitutionnelles et à titre de principaux prestataires de services et pourvoyeur de prestations monétaires de tous ordres, elles restent non seulement en première ligne, mais également des acteurs indispensables. Paradoxalement, l’instance fédérale, qui possède plus de marge pour prendre des initiatives, n’est pas le maître d’oeuvre, alors que l’instance qui implante et applique les politiques centrales de l’État social est en crise financière larvée. Il reste que les provinces, en raison de la perte de légitimité du gouvernement fédéral à la suite des restrictions budgétaires du milieu des années 1990 et de leur rôle en première ligne, ont su garder, voire étendre pour l’instant leur autonomie administrative en dépit de leurs difficultés financières.
61Contrairement aux principes desquels on se revendique, la transparence, l’efficience et l’imputabilité ne sont pas au rendez-vous de ce jeu de pistes brouillées34. Les choses se présentent sous le jeu politique des relations intergouvemementales à travers lequel le gouvernement fédéral tend à se réinvestir d’une mission centrale en tirant profit d’un déséquilibre fiscal qu’il a en partie provoqué et qu’il entretient. Le volontarisme, les tractations, l’opportunisme, les replis, le multilatéralisme sont autant de facettes qui agrémentent ce parcours. Le terrain va du politique à l’administratif, et inversement, et renvoie à une temporalité mal contrôlée, allant de l’année en cours jusqu’à une prévision de cinq ans. Le réaménagement de la gouvernance à niveaux multiples dans la fédération canadienne s’emploie à se donner des formes nouvelles dont les motivations nouvelles restent par trop conventionnelles.
Notes de bas de page
1 Cet article prolonge des travaux antérieurs conduits en collaboration avec Jane Jenson et Peter Graefe. Maude Chapados m’a appuyé dans la recherche préalable à la présente étude ainsi qu’à sa préparation. Je veux la remercier et souligner la rigueur de son travail. Cette étude a été réalisée dans le cadre de la programmation de recherche qui bénéficie d’une subvention du Conseil de la recherche en sciences humaines (#421-2002-0028) et du Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (#TPI ER-67709).
2 Citons, par exemple, Gøasta Esping-andersen, Duncan Gallie, Anton Hemerijck et John Myles, Why we Need a New Welfare State, Oxford, Oxford University Press, 2002; Giuliano Bonoli, Vic George et Peter Taylor-Gooby, European Welfare Futures: Towards a Theory of Retrenchment, Cambridge, Polity Press, 2000; Jonathan Zeitlin et David Trubek (dir.), Governing Work and Welfare in a New Economy, Oxford, Oxford University Press, 2003.
3 Jane Jenson et Susan Phillips, « Régime Shift: New Citizenship Practices in Canada », International Journal of Canadian Studies, vol. 14, automne 1996, p. 111-136.
4 Bruno Théret, « La mondialisation comme discours organisateur d’une stratégie de l’État : l’exemple du Canada », Les temps modernes, n° 607, 2000, p. 81-82.
5 Thomas J. Courchene et Colin R. Telmer, From Heartland to North American Region State: The Social, Fiscal and Federal Evolution of Ontario, Toronto, Centre for Public Management, 1998, p. 278-279; David A. Wolfe, « The Emergence of the Region State », dans Thomas J. Courchene (dir.), The Nation State in a Global/Information Era: Policy Challenges, Kingston, John Deutsch Institute for the Study of Economic Policy, 1997, p. 205-240.
6 Thomas J. Courchene, Célébrer la souplesse : Essai interprétatif sur l’évolution du fédéralisme canadien, Toronto, Institut C. D. Howe, Conférence des bienfaiteurs, octobre 1995 ; Michael Keating, « Challenges to Federalism: Territory, Function and Power in a Globalizing World », dans Robert Young (dir.), Stretching the Fédération: The Art of the State in Canada, Kingston, Institute of Intergovernmental Relations, 1999, p. 8-28 ; Raoul Blindenbacher et Ronald Watts, « Federalism in a Changing World : A Conceptual Framework for the Conference », dans Raoul Blindenbacher et Arnold Koller (dit.), Federalism in a Changing World: Learning from Each Other. International Conference on Federalism 2002, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2002, p. 7-25.
7 Michael Keating, The New Regionalism in Western Europe: Territorial Restructuring and Political Change, Cheltenham, Edward Elgar, 1998, p. 73.
8 D. A. Wolfe, 1997, p. 205-240 ; T. J. Courchene et C. R. Telmer, 1998 ; J. Rogers Hollingsworth et Robert Boyer, « Coordination of Economic Actors and Social Systems of Production », dans J. Rogers Hollingsworth et Robert Boyer (dir.), Contemporary Capitalism: The Embeddedness of Institutions, Cambridge, Cambridge University Press, 1997, p. 1-47.
9 Ian Robinson, « Neo-Liberal Trade Policy and Canadian Federalism Revisited », dans François Rocher et Miriam Smith (dir.), New Trends in Canadian Federalism, Peterborough, Broadview Press, 2e édition, 2003, p. 197-242 ; François Rocher et Christian Rouillard, « Le processus d’intégration continentale : une redéfinition du lieu de pouvoir au Canada », dans George Hoberg (dir.), La capacité de choisir : le Canada dans une nouvelle Amérique du Nord, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 2002, p. 243-276.
10 Gérard Boismenu et Peter Graefe, « The New Fédéral Tool Belt: Attempts to Rebuild Social Policy Leadership », Analyse de politiques, vol. 30, n° 1, mars 2004, p. 71-89 ; Stephen Laurent et Yves Vaillancourt, « Federal-Provincial Transfers for Social Programs in Canada: Their Status in May 2004 », Documents de travail n° 2004-07, Montréal, IRPP, 2004, en ligne : <www.irpp.0rg/wp/archive/wp2004-07.pdf> (page consultée le 4 octobre 2006).
11 G. Boismenu et P. Graefe, 2004.
12 Provincial and Territorial Ministers of Health. Understanding Canadas Health Care Cost: Final Report, 2000, p. 8, en ligne : <http://www.health.gov.on.ca/english/public/pub/ministry_reports/ptcd/ptcd_doc_e.pdf> (page consultée le 4 octobre 2006).
13 Gérard Boismenu et Jane Jenson, « A Social Union or a Fédéral State? Competing Visions of Intergovernmental Relations in the New Liberal Era », dans Leslie Pal (dir.), How Ottawa Spends 1998-99. Balancing Act: The Post-Deficit Mandate, Ottawa, Carleton University Press, 1998, p. 57-80.
14 Giuseppe C. Ruggieri, « A Federation out of Balance », Paper Prepared for the Western Finance Ministers, 2000, en ligne : <http://www.scics.gc.ca/pdf/850080009e.pdf> (page consultée le 15 octobre 2006).
15 G. C. Ruggieri, 2000 ; Giuseppe C. Ruggieri, « A Federation Out of Balance. Update », Paper prepared for the Western Finance Ministers, 2001, en ligne : <http://www.scics.gc.ca/pdf/86o4300O4.pdf> (page consultée le 15 octobre 2006) ; The Conference Board of Canada, Vertical Fiscal Imbalance, Ottawa, The Conference Board of Canada, juillet 2002.
16 G. C. Ruggieri, 2001 ; The Conference Board of Canada, 2002.
17 B. Guy Peters et Jon Pierre. « Governance without Government? Rethinking Public Administration », Journal of Public Administration Research and Theory, n° 2,1998, p. 223-243 ; B. Guy Peters, The Search for Coordination and Coherence in Public Policy: Return to the Center?, p. 12, en ligne : <www.fu-berlin.de/ffu/akumwelt/bc2004/download/peters_f.pdf> (page consultée le 4 octobre 2006) ; Sherri Torjman et David Minns, « Managing for Results Asks the Small Questions, Managing for Sustainability Asks the Big Questions », Ottawa, Caledon Institute, 2004, en ligne : <http://www.caledoninst.org/Publications/PDF/511ENG. pdf> (page consultée le 4 octobre 2006) ; James Arrowsmith, Keith Sisson et Paul Marginson, « What can benchmarking offer the OMC? », Journal of European Public Policy, vol. II, n° 2, avril 2004 ; François-Xavier Merrien, « La nouvelle gestion publique : un concept mythique », Lien social et Politiques-RIAC, n° 41, printemps 1999, p. 95-103.
18 Richard Simeon et David Cameron, « Intergovernmental Relations and Democracy: An oxymoron if there ever was one? », dans Herman Bakvis et Grace Skogstad (dir.), Canadian Federalism: Performance, Effectiveness, Legitimacy, Don Mills, Ontario, Oxford University Press, 2002, p. 279-280.
19 Herman Bakvis, « New Public Management, and Labour Market Development », in Patrick C. Fafard and Douglas M. Brown (dir.), Canada: The State of the Federation 1996, Kingston, Institute of Intergovernmental Relations, 1996 p. 135-165 ; G. Boismenu et P. Graefe, 2004 ; H. Bakvis et G. Skogstad, 2002.
20 Neil Carter, « Performance Indicators: “backseat driving” or “hands off” control? », Policy & Politics, vol. 17, n° 2, 1989, p. 131-138.
21 R. Simeon et D. Cameron, dans H. Bakvis et G. Skogstad (dir.), 2002.
22 L. Denis Desautels, « La reddition des comptes et les nouveaux modes de prestation de services dans l’administration fédérale : certaines conséquences du partage des responsabilités du gouvernement », dans Susan Delacourt et Donald Lenihan (dir.), Collaborative Government: Is there a Canadian Way?, Toronto, Institut d’administration publique du Canada, 1999, p. 37.
23 G. Boismenu et J. Jenson, 1998.
24 Un cadre visant à améliorer l'union sociale pour les Canadiens, Entente entre le gouvernement du Canada et les gouvernements provinciaux et territoriaux, 4 février 1999, en ligne : <http://socialunion.gc.ca/news/020499_f.html> (page consultée le 4 octobre 2006).
25 G. Boismenu, P. Graefe et J. Jenson, 2003.
26 S. Laurent et Y. Vaillancourt, 2004.
27 Vincent Marissal, « Paul Martin en entrevue à La Presse. Et au diable les provinces », La Presse, 14 octobre 2005, p. A3.
28 L. D. Desautels, 1999.
29 Gérard Boismenu, Pascale Dufour et Denis Saint-Martin, Ambitions libérales et écueils politiques. Réalisations et promesses du gouvernement Charest, Montréal, Éditions Athéna, septembre 2004, p. 152-155.
30 Paul Hobson et France St-Hilaire, « The Evolution of Federal-Provincial Fiscal Arrangements: Putting Humpty Together Again », dans Harvey Lazar (dir.), Canada: The State of the Federation 1999-2000. Towards a New Mission Statement far Canadian Fiscal Federalism, Kingston, Institute of Intergovernmental Relations, 2000, p. 159-188.
31 Stéphane Dion, « Collaborative Federalism in an Era of Globalization », dans S. Delacourt et D. Lenihan (dir.), 1999, p. 60-71.
32 Jean-Robert Sansfaçon, « Les prestidigitateurs des excédents budgétaires », Le Devoir, 8 octobre 2005, p. B4 ; André Pratte, « 1/3,1/3,1/3 », La Presse, 17 octobre 2005, p. A18.
33 Chambre des communes, « Projet de loi C-67. Loi concernant l’affectation des excédents budgétaires imprévus et modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu », Première lecture le 7 octobre 2005.
34 Laurent et F. Vaillancourt, 2004.
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Professeur au Département de science politique de l’Université de Montréal et directeur de l’Institut d’études européennes de l’Université de Montréal-McGill University. En 2004, avec Pascale Dufour et Denis Saint-Martin, il a publié Ambitions libérales et écueils politiques. Réalisations et promesses du gouvernement Charest.
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