Histoire du texte et philologie : Principes et pratique
p. 161-176
Texte intégral
1L’histoire du Huainan zi illustre la nécessité d’adopter, pour bien saisir les sens corrects de cette œuvre, une approche philologique. Par ce dernier mot, nous entendons moins l’herméneutique que la critique textuelle et l’exégèse. Dans la première partie, nous nous pencherons brièvement sur la manière dont le texte a été transmis jusqu’à nous tout au long d’une histoire de plus de deux mille ans. Nous verrons que le texte a souffert d’une corruption cumulative jusqu’aux travaux des grands exégètes chinois des XVIIIe et XIXe siècles et que le travail de reconstruction du texte original est loin d’être terminé. Les vicissitudes du texte sont souvent occultées ou camouflées dans les éditions dites modernes. Le monosyllabisme, la polyvalence grammaticale, l’homonymie et l’absence d’inflexion des signes d’écriture rendent néanmoins les anciens écrits chinois plus vulnérables à la corruption textuelle que, par exemple, les textes de la Grèce ou de la Mésopotamie anciennes. Ceci a été reconnu par les maîtres de la sinologie occidentale, Edouard Chavannes, Paul Pelliot, Henri Maspero et Bernard Karlgren, dont les études critiques demeurent des modèles. La deuxième partie proposera, à l’aide d’exemples concrets, certains principes de critique textuelle particulièrement pertinents pour un ouvrage tel que le Huainan zi.
1. Composition du texte
2D’après les informations fournies par le Shiji et le Han shu , l’ouvrage que nous connaissons sous le titre de Huainan zi fut présenté par l’auteur putatif, Liu An (-179 ? à-122), prince du fief de Huainan, à l’empereur Wu des Han (-141 à-87) en-1391. À cette époque, Liu An était connu comme un lettré distingué, non seulement en raison de la brillante cour qu’il entretenait dans sa capitale de Shouchun , dans l’Anhui actuel, mais surtout en raison de ses œuvres philosophiques et poétiques déjà nombreuses2. On sait que l’empereur Wu, neveu de Liu An, tenait en haute estime les talents littéraires de son oncle et qu’il n’osait pas lui écrire de sa propre main, mais demandait plutôt à son poète de cour, Sima Xiangru (179 ? à-117), de rédiger les lettres qu’il lui destinait3.
3Selon le Han shu, l’ouvrage remis par Liu An à l’empereur Wu s’appelait simplement Neishu . Il comptait vingt et un chapitres et faisait partie d’un ensemble plus vaste qui comprenait aussi un Zhongshu en huit chapitres, et un Waishu en trente-trois chapitres. Si l’on en croit les commentateurs canoniques du Han shu, le Neishu traitait essentiellement du dao , le Zhongshu, de l’alchimie et le Waishu, des écoles de pensée autres que le taoïsme, tels, par exemple, le confucianisme, le mohisme, le légisme, etc.4. Les raisons pour lesquelles seul le Neishu fut présenté à l’empereur Wu ne sont pas claires, mais on peut présumer que cet ouvrage représentait l’essentiel de la philosophie et des conceptions politiques de Liu An et des lettrés de sa cour. Le Waishu et le Zhongshu furent perdus très tôt, sans doute avant l’avènement des Han orientaux (25-220), puisqu’ils ne sont pas cités par Xu Shen (30 ?-124 ?) et Gao You (fl. 205-212), les deux premiers commentateurs du Neishu dont les gloses nous sont parvenues. Il faut cependant noter que des fragments du Zhongshu ont été préservés dans des encyclopédies et des recueils de la dynastie Tang (618-907)5. Quant au Neishu, il fut prisé par l’empereur Wu et placé dans la bibliothèque impériale, bishu 6.
4Moins d’une vingtaine d’années après la parution du Neishu, Liu An fut accusé de haute trahison par la cour impériale. En -122, il se suicida ou fut exécuté, sa famille et sa cour furent éliminées, sa capitale fut saccagée et sa principauté incorporée dans la commanderie de Jiujiang (dans l’Anhui actuel)7.
2. L’édition princeps de Liu Xiang
5Les nombreuses œuvres compilées par Liu An et les lettrés attachés à sa cour furent confisquées par l’inspecteur général Liu Biqiang (-164 à-85), grand-père de Liu Xiang 8. Dans sa jeunesse, Liu Xiang (-79 à-8) fut accusé d’avoir pratiqué l’alchimie et la magie en se servant de certains ouvrages émanant de Huainan que son grand-père avait transportés à la capitale de Chang’an . En -26, Liu Xiang fut mandaté par l’empereur Cheng (-32 à-7) pour éditer, classifier et compléter la collection des documents de la cour impériale. La bibliographie établie par Liu Xiang, le Bielu , fut remaniée par son fils, Liu Xin (-46 à 23), dans le Qilüe, puis servit de base au « Traité bibliographique » du Han shu9. Le Han shu ne comprend pas moins de dix titres d’ouvrages attribués à Liu An et au groupe de lettrés de Huainan. À l’exception de quelques pièces isolées et de fragments, tous ces ouvrages ont été perdus. Seul le Neishu, d’abord édité et classifié par Liu Xiang vers-26, est parvenu jusqu’à nous. Liu Xiang écrivit, semble-t-il, une préface à l’ouvrage, aujourd’hui perdue. Il nous en reste un faible écho dans la préface qu’écrivit le commentateur Gao You plus de deux siècles plus tard et qu’il substitua peut-être à celle de Liu Xiang.
6Quel fut le rôle de Liu Xiang dans l’édition et la classification qu’il fit d’ouvrages tel que le Huainan zi ? Il n’est pas facile de répondre à cette question, faute de témoignages directs. On peut cependant en avoir une idée en examinant la préface de Liu Xiang au Guan zi 10. En voici un extrait :
Le commissaire à la conservation de l’eau pour la région métropolitaine de l’Est et conseiller impérial de première classe, [Liu] Xiang déclare : « Les écrits de maître Guan, que votre serviteur a colligés, comptent 389 pian (« paquets de planchettes ») appartenant au palais, 27 pian appartenant au conseiller de deuxième classe, Bu Gui , 41 pian appartenant au colonel de la garde des archers, Li , et 99 pian appartenant au bureau du grand historien (taishi ), pour un total de 564 pian à l’intérieur et à l’extérieur du palais. En les colligeant, il [Liu Xiang] a éliminé 484 pian de doublets et a établi le texte canonique en 86 pian. Il les a transcrits sur des planchettes de bambou passées au feu afin de pouvoir en effectuer des copies.
7Dans son introduction au « Traité bibliographique » du Han shu, Ban Gu (32-92) nous dit que le travail du grand bibliographe des Han consistait « à établir une répartition des différents chapitres et à préparer un résumé de leur contenu ». Gao You, dans sa préface au Huainan zi, emploie un langage similaire : « Le grand officier Liu Xiang établit un texte critique (basé sur la comparaison des différentes éditions) et en ordonna les parties11. »
8Le travail d’éditeur de Liu Xiang comportait, semble-t-il, quatre aspects. D’abord, il cherchait le plus grand nombre d’éditions possible « à l’intérieur et à l’extérieur du palais ». En deuxième lieu, il comparait les versions, éliminait les doublets et établissait une édition « canonique ». En troisième lieu, il divisait le texte (si ce n’était déjà fait) en chapitres titrés, dont il faisait un résumé. Finalement, il transcrivait le texte sur des planchettes de bambou, de sorte qu’il puisse être facilement reproduit.
9Il est impossible de savoir si Liu Xiang modifia la lettre et l’arrangement du texte du Huainan zi qu’il édita, car, nous ne possédons pas le moindre fragment ou la moindre citation du Neishu avant qu’il ne soit édité par lui. Mais, connaissant le sérieux avec lequel il exécuta son mandat de bibliographe, nous n’avons pas de raison de croire qu’il ne respecta pas scrupuleusement une œuvre qui, de par son mode de composition, représentait sans doute une bien plus grande unité que le Guan zi, par exemple. Sous cet angle, il faudrait plutôt comparer le Huainan zi au Lü shi chunqiu , une autre œuvre dont le texte fut établi par Liu Xiang. L’un des indices les plus révélateurs du respect de Liu Xiang pour le texte du Huainan zi, c’est qu’il n’en modifia pas les nombreux caractères qui reflétaient la culture de Chu et qui étaient difficilement compréhensibles pour les gens du Nord12. Beaucoup plus tard, les grands commentateurs du Huainan zi, tels Xu Shen et Gao You, sentiront le besoin d’indiquer à tout bout de champ l’usage et la signification d’expressions émanant de Chu.
10C’est à Liu Xiang que l’on doit le premier titre bibliographique du Huainan nei (« Écrits internes de Huainan »). Ce titre fut d’abord inscrit dans le catalogue bibliographique que prépara Liu Xiang et qu’il présenta à l’empereur Cheng, le Bielu. Dans ce titre, l’expression « Huainan » joue le rôle de pseudonyme de Liu An et le mot « nei » signifie le dao13. Plus tard, ce même titre sera repris d’abord dans le Qilüe de Liu Xin, puis dans le « Traité bibliographique » du Han shu.
11Notons enfin que cette première édition recensée par la bibliographie officielle est donnée en pian. Ce n’est qu’avec le Qilu (« Sept mémoires ») de Ruan Xiaoxu (479-536) que l’œuvre est donnée en juan (« rouleaux »), mais le nombre de juan et de pian est identique, soit vingt et un.
3. Témoins et commentateurs des deux premières éditions
12Le premier témoin textuel du Huainan zi est Wang Chong (27-100 ?) dans le Lunheng . Les nombreux textes du Huainan zi cités par Wang Chong diffèrent considérablement des éditions reçues. Les variantes textuelles semblent provenir avant tout de la manière assez libre avec laquelle Wang Chong utilise les textes, et pas seulement ceux du Huainan zi. Wang Chong s’intéresse d’abord aux idées et aux faits et ne prétend pas reproduire à la lettre les écrits qu’il passe au crible de la critique. Une comparaison avec les citations de l’édition du Huainan zi utilisée par Xu Shen, contemporain de Wang Chong, dans son commentaire, nous permet de confirmer cette hypothèse.
13C’est à partir de Xu Shen que se pose le problème de l’intégrité textuelle du Huainan zi. Quel est le texte auquel Xu Shen attacha son commentaire ? Il y a de bonnes raisons de croire que ce fut le texte édité par Liu Xiang. Car Liu Xin, continuateur du travail bibliographique de son père, eut un disciple, Jia Kui (30-101), qui fut lui-même le maître de deux célèbres lettrés, Xu Shen et Ma Rong (79-166)14. Or on sait que Xu Shen et Ma Rong écrivirent les deux premiers commentaires sur le Huainan zi15. La tradition exégétique fut continuée par deux disciples de Ma Rong, Yan Du (m. 167) et Lu Zhi (m. 192)16. Celui-ci fut le maître de Gao You, le dernier d’une des plus importantes traditions exégétiques de la Chine ancienne. Excepté quelques citations éparses de Ma Rong et Yan Du, seuls les commentaires de Xu Shen et de Gao You nous sont parvenus, mais non sans avoir subi de substantielles amputations et admixtions, dues en particulier à l’édition préparée par Su Song (1020-1101), qui semble être la plus ancienne édition imprimée. Su Song, sans doute par souci d’économie, fondit en un seul les commentaires de Xu Shen et de Gao You17. Grâce au travail acharné de plusieurs exégètes du XIXe siècle, en particulier Tao Fangqi (1845-1884), on a réussi en partie à défaire le travail de Su Song et à isoler les commentaires respectifs de Xu Shen et de Gao You18.
14Ce travail de démêlage est important pour la raison suivante : les anciennes sources, notamment celles des Tang, lorsqu’elles citent soit le commentaire de Xu Shen, soit celui de Gao You, reproduisent aussi le texte du Huainan zi qui fait l’objet du commentaire. Or, on note de nombreuses variantes textuelles lorsque les mêmes passages du Huainan zi sont cités par Xu Shen ou par Gao You. Ceci nous permet d’affirmer qu’il existait déjà sous les Han deux éditions différentes du Huainan zi.
15Deux hypothèses se présentent à l’esprit pour expliquer ces variantes textuelles. La première, c’est qu’il s’agit de deux textes de départ différents, l’un adopté par Xu, l’autre par Gao. Mais comment expliquer l’origine de ces deux textes de départ ? Nous n’avons aucun document historique qui nous autorise à penser qu’il circulait, au début du premier siècle de notre ère, une autre édition que celle de Liu Xiang. Il faut dire cependant que la chose est loin d’être impossible. Par exemple, il se peut que certains exemplaires de l’œuvre aient échappé à la destruction de Huainan en 122, et que ces exemplaires aient été transmis indépendamment de l’édition préparée par Liu Xiang. La seconde hypothèse suppose une seule édition de départ, sans doute celle de Liu Xiang, commentée par Xu Shen ; cette édition se serait différenciée, à mesure qu’elle était retranscrite de génération en génération au cours du premier siècle de notre ère, jusqu’au temps de Gao You, vers l’an 212. Dans les deux cas, on pourrait expliquer pourquoi Xu Shen et Gao You attachèrent leurs commentaires à des éditions quelque peu différentes du Huainan zi. Les grands exégètes chinois de la dynastie Qing (1644-1911), Wang Niansun (1744-1832), Wang Yinzhi (1766-1834), Yu Yue (1821-1907) et Tao Fangqi, pour n’en nommer que quelques-uns, eurent sans doute en tête l’une ou l’autre de ces deux hypothèses lorsqu’ils accordèrent leur préférence, comme étant plus près du texte original du Huainan zi, à l’édition commentée par Xu Shen.
16Les deux éditions en question évoluèrent parallèlement de la fin des Han jusqu’aux Song du Nord (960-1127), époque où parut la première édition imprimée, entre 1023 et 1063. Nous en reparlerons dans un moment. Les nombreuses citations des lettrés et des encyclopédistes, surtout des Tang, ainsi qu’un long fragment du chapitre XV, préservés au Japon depuis le VIIIe siècle, furent les témoins les plus importants du Huainan zi durant cette période longue de huit siècles. Si l’on colligeait et aboutait ces citations, il serait possible de reconstruire environ les deux tiers du texte actuel du Huainan zi. En raison de leur ancienneté et de leur inclusion dans des œuvres compilées par des lettrés et des scribes chevronnés, ces citations sont souvent plus authentiques que les passages correspondants dans les éditions imprimées qui nous sont parvenues. Dans nombre de cas, il est possible de déterminer si la citation provient de l’édition de Xu Shen ou de celle de Gao You. On peut constater que dès le IVe siècle, chacune des deux éditions dut avoir plusieurs versions, puisque les citations d’un même texte de l’édition, soit de Xu Shen, soit de Gao You, diffèrent selon les sources qui les reproduisent. La différenciation textuelle semble progressive tout au long de la dynastie Tang.
4. Détérioration du tissu textuel
17On peut invoquer plusieurs raisons pour expliquer cette corruption cumulative du texte du Huainan zi. D’abord, la difficulté même du texte, qui utilise un grand nombre de caractères rares et d’expressions binomiales inédites. Plusieurs de ces expressions reflétaient la tradition culturelle de Chu et étaient mal connues dans le Nord. Deuxièmement, l’utilisation généralisée des « faux emprunts » (jiajie ), c’est-à-dire des caractères de sens différents empruntés pour leur valeur phonétique. Troisièmement, les nombreuses interpolations des commentaires ou des annotations personnelles dans le texte principal. Quatrièmement, le Huainan zi n’était pas considéré comme un ouvrage classique ou canonique, tels les treize classiques confucéens ou les trois classiques du taoïsme. Sans compter que les éditions du Huainan zi étaient rares et difficiles d’accès : elles étaient souvent préparées pour le compte de lettrés à titre privé, ce qui limitait sévèrement la collation des éditions, l’engagement de scribes et de copistes compétents et la diffusion des copies. Cette pauvreté des moyens entraîna une détérioration croissante du tissu textuel à mesure que, de génération en génération, l’ouvrage était recopié.
5. Éditions imprimées
18La fluidité du texte, telle que nous l’observons dans les citations, se cristallisa abruptement avec la première édition imprimée, au début du XIe siècle. Su Song, l’éditeur présumé de cette édition dite « en petits caractères », nous dit qu’il compara sept versions du Huainan zi pour établir le texte de sa propre édition19. En rétrospective, il semble qu’il choisit le texte de l’édition de Xu Shen pour les chapitres X, XI, XII, XIV, XV, XVIII, XX et XXI, et le texte de l’édition de Gao You pour les autres chapitres. De plus, Su Song combina, comme nous l’avons dit, les commentaires de Xu Shen et de Gao You, préférant ce dernier dans les cas où le même texte était glosé par les deux commentateurs. Il attribua ce commentaire composite exclusivement à Gao You. La tradition a préservé jusqu’à nos jours la disposition du commentaire établi par Su Song au début du XIe siècle. L’édition de Su Song fut reproduite dans la collection Sibu congkan (1922).
19Quatre siècles après Su Song, vers 1445, parut une deuxième édition imprimée du Huainan zi, dans la collection taoïste du Daozang 20. Cette édition dépend étroitement de l’édition des Song du Nord. Cependant, elle est divisée en vingt-huit chapitres (Juan) au lieu des vingt et un chapitres traditionnels. Mais ceci ne touche en rien l’intégrité du texte, puisque le chiffre 28 est obtenu en divisant en deux chacun des chapitres I-V, VIII et XIII. La raison de cette division n’est pas claire, mais est sans doute à mettre en rapport avec les spéculations taoïstes sur les vingt-huit stations solaires (xiu ). De plus, les auteurs de l’édition Daozang reproduisirent le commentaire composite de l’édition des Song du Nord, mais l’attribuèrent, cette fois, exclusivement à Xu Shen. Il faut sans doute se rappeler que Xu Shen était d’allégeance taoïste et qu’il occupait le poste de « sacrificateur » (jijiu ), dans la hiérarchie taoïste de son temps.
20Les premières éditions imprimées, celle des Song du Nord et celle du Daozang sous les Ming (1368-1644), marquent le stage définitif dans la transmission du Huainan zi. Les éditions subséquentes, tout particulièrement celles des Ming, dérivent principalement de ces deux sources. C’est à partir d’une édition remaniée du Daozang que Zhuang Kuiji (1760-1813) établit son édition critique en 1789. Celle-ci fut à son tour révisée par Tao Fangqi et alii pour devenir le textus receptus de la plupart des impressions modernes, dont celle de Liu Wendian en 1923. Il faut dire que, dans son travail de révision, Tao put se prévaloir des recherches textuelles de plusieurs grands savants des Qing, tout particulièrement celles de Wang Niansun. Les travaux d’exégèse sur le Huainan zi, qui atteignirent un sommet avec ce dernier, continuèrent jusqu’à nos jours avec les recherches de Yu Xingwu , Yang Shuda , Wang Shumin , Zheng Liangshu , Yu Dacheng et Ma Zonghuo , pour ne nommer que les plus importants.
6. Principes de l’exégèse chinoise
21Il nous reste à exposer quelques principes fondamentaux de la tradition exégétique chinoise et d’en montrer, par des exemples, l’application au Huainan zi.
22Comment se produisent les erreurs textuelles ? Comment les dépister ? Comment les corriger ? En 1959, Wang Shumin, un exégète contemporain des textes chinois anciens, dont le Huainan zi, publia un long mémoire sur la critique textuelle dans le bulletin de l’Academia Sinica de Taipei21. Dans cet ouvrage, il s’employa à codifier les principes qui ont guidé le travail d’exégèse des savants chinois depuis le XVIIIe siècle. Il établit une liste présentant non moins de 122 principes qui permettent de dépister, d’expliquer et de corriger à peu près toutes les formes de variantes textuelles erronées.
23Il semble possible de ramener ces principes à un nombre restreint de catégories portant sur quatre aspects méthodologiques distincts du travail d’exégèse : 1) le constat d’une anomalie textuelle ; 2) la recherche des évidences ; 3) les mécanismes d’erreur ; 4) la correction du texte. Arrêtons-nous brièvement à chacun de ces aspects.
24Le constat d’une anomalie textuelle peut être occasionnel ou systématique et se fonde sur les deux aspects essentiels du texte, le contenu et la forme. Le constat d’une anomalie reflète toujours la perception et le point de vue du lecteur et n’est pas en soi la preuve d’une erreur textuelle ; il peut cependant déclencher une recherche des évidences et des mécanismes d’erreur qui conduira à la découverte d’une faute dans le texte. Par contre, une anomalie présumée peut s’avérer illusoire et non fondée à la lumière de la recherche des évidences. Ainsi, les exégètes chinois rejettent fréquemment les corrections textuelles de leurs devanciers et restituent le texte original sur la base de recherches plus poussées. L’anomalie n’était que dans l’œil de l’observateur, non dans le texte lui-même.
25La recherche des évidences constitue le cœur de la critique textuelle de l’exégèse. C’est elle qui nous conduit, par le truchement d’un appareil méthodologique complexe et sophistiqué, à la reconstruction du texte original authentique. On peut comparer la recherche des évidences à une série de cercles concentriques autour du texte soumis à l’examen et qui s’en éloignent graduellement. La recherche des évidence porte essentiellement sur la collation des textes : comparaison avec les lieux parallèles internes et externes ; comparaison avec les sources de l’œuvre en question ; comparaison des éditions ; comparaison des citations, qui sont souvent plus anciennes que les éditions existantes.
26Démontrer l’erreur textuelle à l’aide de preuves objectives ne suffît pas ; il faut encore expliquer pourquoi l’erreur s’est produite, c’est-à-dire mettre en lumière les mécanismes subjectifs de l’erreur textuelle. Car l’erreur textuelle provient presque toujours de l’éditeur, du copiste ou de l’imprimeur. Le cas du faussaire pose des problème particuliers qui ont beaucoup préoccupé les exégètes chinois du XIXe siècle, problèmes qui ne semblent pas toucher le Huainan zi. Parmi les causes habituelles de l’erreur textuelle, on peut mentionner les suivantes : la ressemblance graphique de deux caractères, les emprunts phonétiques, les interpolations, les caractères rares et l’association des caractères en raison du contexte.
27Les exégètes chinois préfèrent indiquer les corrections textuelles dans leurs commentaires, insérés en petits caractères et sur deux colonnes immédiatement après le texte principal qui est sujet de discussion. Ils choisissent une édition ancienne fiable, ordinairement, en ce qui a trait au Huainan zi, celle du Daozang, et indiquent les variantes et les corrections sur la base du textus receptus choisi. Seuls quelques rares exégètes du Huainan zi ont osé corriger les caractères du texte principal, par exemple, Zhuang Kuiji au XVIIIe siècle, Tao Fangqi au XIXe siècle et Liu Jiali au XXe. Cette méthode n’est pas particulièrement prisée par les exégètes chinois, peut-être parce qu’ils sont conscients du caractère souvent hypothétique ou spéculatif des prétendues preuves textuelles, ou bien parce qu’ils craignent de donner un faux air définitif à une recherche qu’ils considèrent devoir se poursuivre collectivement et cumulativement de génération en génération.
28Ce bref aperçu de la critique textuelle en rapport avec le Huainan zi ne nous a permis que de présenter un schéma, sans qu’il nous soit possible d’en approfondir les nombreux éléments. On peut en déduire que très tôt, soit à partir des Song du Nord, les exégètes chinois, s’inspirant de traditions plus anciennes, ont élaboré une méthode de critique textuelle qui répondait aux problèmes particuliers que pose une écriture idéographique. C’est cette méthode qu’il ont appliquée et continuent d’appliquer, comme on pourra le constater dans l’analyse du cas suivant.
7. Une étude de cas
29Comme le laisse voir Rémi Mathieu dans sa contribution « Une création du monde » (supra), le chapitre III du Huainan zi s’ouvre par l’un des passages cosmogoniques les plus importants de la philosophie chinoise ancienne. Sans faire double emploi avec la traduction que propose R. Mathieu, qui s’attarde surtout au contenu philosophique du texte tout en prenant en compte l’aspect textuel, nous tâcherons de montrer qu’il est pratiquement impossible de comprendre correctement le passage en question, tel qu’il nous a été transmis par la tradition écrite chinoise, sans un travail d’exégèse considérable. Nous proposerons d’abord une traduction littérale du texte en tenant compte du commentaire de Gao You, qui accompagne les anciennes éditions du Huainan zi. Dans un deuxième temps, nous proposerons une seconde traduction, assez différente de la première, qui prend en compte les apports de l’exégèse chinoise.
Huainan zi III, 1a. Édition de Zhuang Kuiji (1789), basée sur les plus anciennes éditions (XIe et XVe siècles)
1. |
| Ciel et Terre n’avaient pas encore pris forme |
2. |
| confus et sans forme |
3. |
| profond et obscur |
4. |
| donc, cela s’appelle grande lumière |
5. |
| dao commença par/dans les immensités vides |
6. |
| Les immensités vides donnèrent naissance à l’espace-temps |
7. |
| l’espace-temps donna naissance au(x) souffle(s) |
8 |
| le(s) souffle(s) comportai(en)t une digue [comme ?] la rivière Han. |
30Nous commenterons ligne par ligne, en nous basant sur les principaux exégètes chinois pour proposer, en dernière analyse, une édition et une interprétation critiques du texte.
311. D’après le Shuowen jiezi , di est une forme alternative archaïsante de di (« terre »), qui aurait, selon la tradition, été inventée par Shi Zhou , ministre du roi Xuan (-827 à-781) de la dynastie Zhou) (-1121 à-221) ; d’où le nom de Zhou wen (« écriture de Zhou ») que porte ce premier répertoire de caractères chinois, que les philologues chinois identifient habituellement avec le style da zhuan (« grand sigillaire »). À noter, c’est la seule occurrence de cette graphie archaïque dans le Huainan zi. À notre avis, une raison simple mais importante explique cette utilisation : c’est que le Huainan zi dépend dans ce passage des premières lignes du chapitre « Tianwen » dans le Chu ci , où l’ancienne graphie est utilisée. L’importance de cette dépendance apparaîtra plus loin.
32L’expression wei xing est un leitmotiv du Huainan zi ; elle se réfère à l’état indifférencié, indivis, du monde, avant que les êtres distincts ne se manifestent. Cet état « chaotique » est considéré comme exemplaire dans la traditon taoïste.
332 et 3. Ping ping sans doute ici une fonction onomatopéique, une caractéristique littéraire que le Huainan zi partage avec les ouvrages émanant du pays de Chu, notamment le Zhuang zi et le Chu ci. Dans ces textes, l’onomatopée est souvent utilisée dans les passages cosmogoniques, comme c’est ici le cas. La glose de Gao You n’est pas d’un grand secours puisqu’elle porte sur l’ensemble des lignes 2 et 3, interprété dans le sens d’« un état caractérisé par l’absence de formes ». Or, il se pose ici un problème de cohérence, car ping et yi n’ont, semble-t-il, jamais ce sens dans les anciens écrits chinois. La glose de Gao You est donc douteuse. C’est dans la dépendance littéraire et idéologique de notre texte au « Tianwen » dans le Chu ci qu’il faut chercher, comme nous le suggérions plus haut, des éléments de réponse au problème posé ici. Voici le texte du « Tianwen » (Chu ci III, 2a) :
Qui a transmis le récit des origines lointaines des choses ?
Comment peut-on vérifier ce qu’il y avait avant la formation de l’au-dessus [le Ciel] et de l’au-dessous [la Terre] ?
Quand le jour et la nuit étaient confondus, qui eût pu les pénétrer ?
Quand il n’y avait que la semblance des choses dans un état ping yi qui eût pu en rendre compte ?
34Sur le sens deping yi, les nombreux commentateurs du « Tianwen » recensés par You Guoen (1982, 17-20)22, se rangent grosso modo en deux camps : le premier, à la suite de Wang Yi (89-158), opte pour l’idée de « mouvement rapide, ondulatoire, alternatif » (galop du cheval, battement des ailes) ; le second choisit plutôt l’idée de « plénitude », d’« immensité », de « prolifération », d’« accroissement », d’« abondance ». Nous pensons qu’il faut retenir les éléments des deux interprétations, soit l’idée d’« un mouvement ondulatoire qui remplit tout dans une sorte de débordement ». Wang Yi cite notre passage du Huainan zi comme preuve à l’appui de sa thèse, confirmant ainsi la dépendance du Huainan zi par rapport au Chu ci. De plus, la phrase qui suit immédiatement (ligne 3) dans le Huainan zi implique l’idée de « l’obscurité profonde d’une caverne » et l’« accroissement de l’élément liquide » ; les deux phrases sont en continuité. La traduction se lirait alors comme suit : « Comme une onde qui se propage et va s’accroissant, comme un antre profond et obscur qui se remplit d’eau ».
354. On ne trouve pas dans les textes chinois anciens l’expression tai zhao (« grande lumière ») pour désigner l’origine du monde ; elle fait plutôt référence à un autel sacrificiel (Liji XLVI, 1588A [Couvreur, t. II, 259]). Le contexte ne fait aucune allusion à la lumière, mais plutôt au temps où le Ciel et la Terre n’avaient pas encore pris forme ; le texte originel, soutient Wang Yinzhi, devait lire tai shi (« grand commencement » et non tai zhao. L’erreur serait due à la ressemblance graphique des deux caractères en question. Yu Dacheng, 1969, 73a-b, corrobore l’argument de Wang en citant des textes du Chu ci et du Lie zi. Il faut donc lire : « Voilà pourquoi on appelle cela le grand commencement. »
365. Le texte, pris dans son sens littéral, affirme que « le dao commença par/dans les immensités vides ». Il est étrange, sinon inconsistant, que le dao soit mentionné si tardivement dans le schéma cosmogonique. De plus, la structure de la phrase rompt le parallélisme avec les phrases suivantes. Pour ces raisons philosophiques et littéraires, Wang Yinzhi propose de remplacer dao par tai . Ainsi, le tai shi de la phrase précédente, où il a la fonction d’objet, est repris ici comme sujet de la phrase, structure que l’on retrouve dans les phrases suivantes. De plus, Wang lit sheng (« donner naissance », « engendrer ») au lieu de yu (particule locative ou instrumentale : « à », « dans », « par »). Cette erreur serait due à la ressemblance graphique des deux caractères. Wang Shumin, 1964, 339, et Yu Dacheng, 1969, 73b-74a, corroborent la correction de Wang en s’appuyant sur des citations du passage dans des ouvrages anciens. La ligne 5 se lirait alors comme suit : « Le grand commencement donna naissance aux immensités vides. » Cette phrase forme une paire avec la suivante et se situe au même degré de généralité.
376. Yuzhou est l’une des plus anciennes expressions chinoises pour désigner l’univers. Yu signifie « les trois dimensions (les quatre directions pivotant autour d’un axe central) » et zhou , « la succession des époques, de l’antiquité jusqu’à aujourd’hui » (voir Huainan zi XI, 13b ; cette définition semble remonter au penseur Shi zi [IVe siècle avant notre ère]).
387. Sous l’angle stylistique, on s’attendrait à ce que les phrases 4-8 comptent chacune cinq caractères (cinq pieds), tout comme les quatre premières en ont quatre chacune. Le rythme est brisé. Wang Niansun, s’appuyant sur le Taiping yulan I, 1b, a montré que le texte original lisait yuanqi (« souffle originel ») et non simplement qi . (« souffle »). Cette leçon est corroborée par d’anciennes citations relevées par Wang Shumin, 1964, 339, et Yu Dacheng, 1969, 74b. Le texte se traduirait alors : « L’espace-temps donna naissance aux souffles originels. »
398. Les mêmes sources et les mêmes références citées dans la note précédente lisent, comme on peut s’y attendre, yuanqi et non qi. Le caractère Han (nom propre de rivière) est manifestement fautif (sans doute en raison de la ressemblance graphique) et doit être remplacé par ya (« digue marquant le bord d’un cours d’eau »), comme le notent Zhuang Kuiji et Yu Dacheng, 1969, 74a. Cette phrase doit donc se lire : « Le souffle originel comporta des bornes. »
40Si l’on reprend la traduction du texte en tenant compte des corrections proposées par les exégètes chinois, le passage se lirait comme suit :
Huainan zi III, 1a. Edition révisée par les exégètes chinois
1. |
| Ciel et Terre n’avaient pas encore pris forme |
2. |
| [tout était comme] une onde qui se propage et va s’accroissant, |
3. |
| comme un antre profond et obscur qui se remplit d’eau ; |
4. |
| voilà pourquoi on appela cela le grand commencement. |
5. |
| Le [grand] commencement donna [naissance] aux immensités vides, |
6. |
| les immensités vides donnèrent naissance à l’espace-temps, |
7. |
| l’espace-temps donna naissance aux souffles [originels] ; |
8. |
| or, les souffles [originels] comportaient des bornes. |
41Il serait trop long de montrer que le texte corrigé sur la base des évidences textuelles correspond aux schémas cosmogoniques que l’on retrouve dans les autres chapitres du Huainan zi, en particulier I, 1a-3a, II, 1a-2a, VII, la-3a et XIV, 1a-b. La version « non critiquée », au contraire, nous aurait conduit à une conception du monde incohérente et inintelligible dans le cadre de référence taoïste utilisée par le Huainan zi.
42Le passage étudié n’avait d’autre but que de souligner l’importance de l’exégèse pour comprendre les anciens textes chinois. L’originalité des conceptions chinoises tout autant que les vicissitudes de leur transmission écrite demande qu’on mette pleinement à profit les apports de la critique textuelle chinoise.
Notes de bas de page
1 La date de -139 peut être déduite des biographies parallèles de Liu An dans le Shiji CXVIII, 3082 (Watson, 368) et le Han shu XLIV, 2145.
2 On trouve dans le Han shu dix titres d’ouvrages attribués à Liu An. Voir Han shu XXX, 1703 sq. ; XLIV, 2145 ; et LXIV A, 2777-85.
3 Voir Han shu XLIV, 2145.
4 Voir le commentaire de Yan Shigu (581-645) sur les deux premiers titres dans Han shu XXX, 1741 et le texte de Ban Gu dans Han shu XLIV, 2145.
5 L’un des chapitres du Zhongshu intitulé Wan bi shu (« Livre des dix mille charmes ») a été reconstruit par des savants de la dynastie Qing. Voir Ma Guohan , Yuhan shanfang jiyishu.
6 Voir Han shu XLIV, 2145.
7 Les témoignages du Shiji, du Han shu et d’autres sources anciennes sont présentés de façon critique par Zheng Liangshu (1964). Voir aussi Benjamin Wallacker (1972), 36-49.
8 Voir Han shu XXXVI, 1926 sq.
9 Se référer à Charles S. Gardner (1938), 33 sq.
10 On trouve la préface de Liu Xiang dans la plupart des éditions du Guan zi ; voir, par exemple, l’édition du ZZJC.
11 Pour ces deux citations, voir Han shu XXX, 1701 et préface de Gao You, 2a (édition de Liu Wendian).
12 On peut supposer que Liu Xiang comprenait cette langue, puisqu’il était originaire du pays de Chu (Jiangsu actuel), comme l’indique le Han shu XXXVI.
13 Sur l’utilisation de « Huainan » comme pseudonyme de Liu An, voir Fayan V, 14, et Lunheng LXXXIV, 286 (Forke, t. I, 75-6). Le commentateur Yan Shigu explique « nei » dans le titre Huainan nei comme signifiant « dao » (Han shu XXX, 1741).
14 Sur cette filiation, voir Hou Han shu XXXVI, 1234 et 1237 (Liu Xin et Jia Kui) ; LX A, 1972 (Jia Kui et Ma Rong) ; LXXIX B, 2588 (Ma Rong et Xu Shen).
15 La première description bibliographique du commentaire de Xu Shen (et tout aussi bien de Gao You) se trouve dans le Qilu de Ruan Xiaoxu. Cette importante bibliographie fut plus tard incorporée dans le « Traité bibliographique » du Sui shu XXXIV, 1006. Le commentaire de Ma Rong est mentionné dans sa biographie, Hou Han shu LX A, 1972.
16 Voir Hou Han shu LXIV, 2103 et 2113.
17 Su Song décrit avec précision son travail d’éditeur dans « Jiao Huainan zi tixu (« Préface à l’édition critique du Huainan zi »), in Su Weigong wenji LXVI, 7a-8b.
18 L’ouvrage le plus important sur ce sujet est celui de Tao Fangqi, 1882 : Huainan zi Xu Shen zhu yitong gu (« Examen critique des variantes du commentaire de Xu Shen sur le Huainan zi »).
19 Voir supra note 17 (sur Su Song).
20 On connaît peu de choses sur les origines de cette édition. Outre l’édition des Song du Nord qui servit de base, l’éditeur utilisa d’autres éditions, aujourd’hui perdues. L’édition du Daozang fut le textus receptus des éditions critiques du Huainan zi, des Ming à nos jours.
21 Wang Shumin, Jiaochouxue (« La critique textuelle »), Nankang (Taipei), Academia Sinica, 1972.
22 You Guoen, 1982.
Auteur
Directeur du Centre d’études de l’Asie de l’Est de l’Université de Montréal. Ses recherches portent sur les courants intellectuels des Han occidentaux (-206 à +8). Outre ses articles, il a publié Huai-nan Tzu. Philosophical Synthesis in Early Han Thought (Hong Kong University Press, 1985) et, avec Susan Blader, Chinese Ideas about Nature and Society. Studies in Honour of Derk Bodde (Hong Kong University Press, 1987).
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Mythe et philosophie à l'aube de la Chine impériale
Études sur le Huainan zi
Charles Le Blanc et Rémi Mathieu (dir.)
1992
La Chine imaginaire
Les Chinois vus par les Occidentaux de Marco Polo à nos jours
Jonathan D. Spence
2000