Chapitre 5. Communication et mondialisation : un défi pour les politiques publiques
p. 133-168
Texte intégral
1Dans la confusion et le chaos entourant les négociations menées par l’Organisation mondiale du commerce à Seattle en 1999, la représentante commerciale américaine, Charlene Barshefsky, souligna que « la seule véritable menace au système du commerce multilatéral était l’absence d’un soutien public »1. Au Canada, l’absence d’un soutien public pour le projet de l’omc fut palpable. Le Comité permanent des Affaires étrangères et du Commerce international de la Chambre des communes révéla, dans un rapport datant du mois de juin 1999, que les Canadiens considéraient la protection de leur identité culturelle et de la diversité culturelle comme étant une question prioritaire2.
2En fait, cette attitude correspondait à une tentative historique du Canada pour apaiser les tensions entre le commerce et la culture au moyen d’une politique des communications. Toutefois, cette position est devenue de plus en plus difficile. Par exemple, le long conflit opposant le Canada et les États-Unis sur la question de l’accès au marché publicitaire canadien pour les magazines américains a été réglé lorsque le Canada accepta de modifier une partie de sa législation en échange du retrait des procédures judiciaires entamées par les États-Unis auprès de l’omc3.
3Cette querelle, hautement médiatisée, n’est qu’une illustration des nouvelles restrictions imposées à la souveraineté nationale par la nouvelle économie mondiale. À vrai dire, ces dernières mettent peu à peu en évidence certains problèmes que plusieurs acteurs sociaux se sont efforcés d’aborder. De son côté, le gouvernement canadien a toujours défendu son droit de poursuivre des objectifs non économiques dans ses politiques publiques, et cela malgré son adhésion à des ententes commerciales internationales et à de nouvelles structures de gouvernance telles que l’alena et l’omc. Mais la nature de ces nouvelles dispositions ou structures, dans lesquelles le Canada est un participant actif et auxquelles les négociateurs canadiens contribuent énormément, ne permet pas de poursuivre facilement certains objectifs sociaux et culturels. Cela soulève la question de savoir comment on peut développer des politiques publiques valables dans un contexte marqué par le transfert des décisions nationales à un niveau transnational ou mondial.
4Au moment même où cet article est rédigé, un environnement politique de facto pour la communication mondiale a été mis en place4. Actuellement, cet environnement évolue selon sa propre logique, ses propres exigences, ses propres protocoles et règles, alors que plusieurs intervenants cherchent à l’influencer le mieux qu’ils peuvent. Mais l’élargissement de la sphère des politiques de la communication au niveau mondial a ses propres limites et sa propre dynamique, en ceci que les débats nationaux sur cette question ne sont pas seulement réorientés par le développement des politiques mondiales, mais également enrichis par celles-ci. Dès lors, il faut envisager la mondialisation comme un défi politique plutôt que comme une « fin des politiques », ainsi que le soutient le discours néolibéral de la déréglementation, qui se sert de cet argument comme d’un leitmotiv.
Pourquoi la communication ?
5Les mass médias, les industries culturelles, ainsi que les technologies de l’information et des communications, sont devenus les principaux catalyseurs de l’activité culturelle, de la consommation de masse et de la participation à la vie publique. Ils constituent de plus en plus la base des communications directes à travers l’espace et le temps. Dans ces conditions, l’accès aux ressources de la communication peut être envisagé comme un des éléments fondamentaux pour édifier la citoyenneté. On est dès lors en présence d'un phénomène qui soulève des questions politiques capitales pour le développement de la société civile.
6Les technologies de l’information et de la communication, qui par elles-mêmes sont de peu d'intérêt, jouent un rôle décisif dans les efforts d’intervention économique aussi bien que dans la sphère culturelle. Les enjeux de ces politiques de la communication relèvent de ceux qui feront usage de ces technologies et détermineront les conditions dans lesquelles elles seront utilisées, en vue de certains projets et dans la défense de certains intérêts. D’un point de vue conceptuel, la « communication » est une façon parmi d’autres de décrire l’espace technologique qui se situe dans l’interface de la mondialisation économique et de la mondialisation culturelle. Cet article a pour objet d’examiner les implications politiques de ce qui se produit dans cet espace.
7La communication a toujours été liée aux luttes démocratiques ; elle est de plus en plus déterminante dans des questions aussi fondamentales que le rôle de l’État ou les droits de l'homme5. Aujourd’hui, compte tenu de la situation particulière de la communication dans le contexte de la mondialisation, les questions qui s’y rapportent ont des répercussions importantes sur une grande quantité de problèmes6. Le cadre de travail des politiques mondiales en matière de communication devient donc une composante structurelle clé du nouveau cadre de travail touchant la gouvernance mondiale.
8Afin de bien comprendre la réalité de ces phénomènes, nous devons dissocier le mécanisme de la mondialisation et l’idéologie néolibérale. Même s’il est vrai que nous nous dirigeons vers une société globalisante, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a plus de place pour la loi et les réglements. L’approche néolibérale en matière de gouvernance mondiale est un choix politique, non logique : le développement de la mondialisation économique, en effet, n’évacue pas la nécessité d’une réglementation. À vrai dire, l’approche pragmatique néolibérale reconnaît une nécessité de cet ordre et cherche constamment des nouveaux mécanismes de réglementation favorisant l’avancement de son projet politique et les intérêts qui en dépendent. D’autre part, en matière de politiques démocratiques, il faut commencer à réfléchir à ce que signifie une « politique publique mondiale » et aux moyens de délimiter et de définir un intérêt public mondial7.
9Par exemple, quels types de mécanismes transnationaux doit-on mettre en place pour permettre aux autorités locales (nationales) de réglementer les ressources en fonction de l’intérêt public ? Que doit-on faire pour atteindre les objectifs politiques historiques qui ont évolué jusqu’à maintenant au niveau national ? Pour résoudre les différences culturelles dans un contexte d’inégalité économique et de développement inéquitable8 ? Ces questions doivent maintenant être abordées dans une optique transnationale, en ayant à l'esprit que les politiques mondiales sont développées selon des normes globales, alors que les politiques nationales s’appuieront sur des principes favorisant l’expression de valeurs sociales et culturelles particulières9.
10Un des éléments clés de la mondialisation est l’intégration systématique des industries privées transnationales dans les processus décisionnels, et la mise à l’écart des forces de la société civile. En ce sens, le nouveau système de gouvernance mondiale défait les caractéristiques démocratiques mises en place dans différentes sphères d’activités à l’intérieur de pays comme le Canada, où il y a au moins une transparence, une participation minimale et une possibilité de faire des gains10. De plus en plus d’acteurs commencent à utiliser l’expression société civile mondiale, même si bien peu d’individus ont conscience des exigences politiques que requiert, au niveau des communications, le système démocratique de gouvernance mondiale qu’ils imaginent. Pour y parvenir, nous pouvons nous inspirer de l’expérience des efforts nationaux et historiques qui ont cherché à orienter les communications vers des objectifs d’intérêt public.
11Au point de départ, je suis d'accord avec Robin Higham pour dire que les questions touchant la communication et les politiques culturelles constituent un secteur de « superposition horizontale des politiques, une politique des politiques ». À mon avis, « ce sont là des objectifs dont il faut tenir compte, de la même manière que nous tenons compte aujourd’hui des questions environnementales, des droits de l’homme et de la justice dans les prises de décisions des gouvernements et de la société civile »11.
12Selon Higham, « le conflit politique opposant le commercial et le culturel est probablement, aux yeux de la population canadienne, le point névralgique le plus apparent où s'affrontent les priorités de l’économique et du développement humain »12. Cette visibilité prend de l’importance pour notre projet dans la mesure où toute intervention de l’État cherchant à renverser les tendances de la mondialisation nécessitera une mobilisation étendue des différentes factions politiques13. À l’échelle mondiale, la contradiction entre culture et commerce apparaît comme un des principaux clivages du XXIe siècle, comme un leitmotiv de la mondialisation. Au Canada, nous avons constaté son importance depuis longtemps ; c’est pourquoi nous sommes sensibles à ses symptômes et avons acquis une vaste expérience pour affronter les problèmes qui l’accompagnent14. À maints égards, pour le Canada, c’est une question de survie, non « en tant que nation », mais plutôt dans la façon dont nous définissons chacun à notre manière ce qui nous distingue. La question des politiques communicationnelles est directement liée à la politique identitaire ; en ce sens, elle est liée aux inquiétudes portant sur la cohésion sociale.
13Les politiques en matière de communication doivent également s’attaquer à tout un ensemble de questions touchant le développement culturel. Dans une étude de 1993, une équipe de recherches, comprenant l’auteur de cet article, a défini le développement culturel comme étant « le processus par lequel les êtres humains s’approprient les ressources individuelles et collectives nécessaires à leur participation à la vie publique »15. Durant notre période de réflexion, nous avons remarqué que « la clé pour faire face aux défis du développement culturel dans le nouveau contexte mondial consiste à repenser le rôle de l'État et des politiques publiques »16. Il y a quelques années, on considérait comme novateur le fait de souligner la nécessité pour le Canada de pratiquer des politiques nationales culturelles et communicationnelles dans un contexte de mondialisation. Sur le terrain, cependant, des changements spectaculaires s'amorçaient.
14En 1993, nous avons constaté que les pratiques culturelles traditionnelles, les mass médias et certaines sphères d’activités comme l’éducation étaient interpénétrées « par des réseaux de communication et d’information, qui s’avéraient fondamentaux pour le commerce mondial »17. Cette tendance s’est poursuivie et s’est accentuée avec les années. Dès lors, il est important de comprendre l’évolution de ce phénomène, ses racines historiques, son apparition au XIXe siècle en tant que régime de gouvernance internationale, dans le domaine des technologies de l’information et des communications. De voir aussi comment se sont établies les institutions multilatérales réglementant les relations internationales dans ces secteurs et de discerner comment ont été définis les paramètres du nouvel environnement mondial des communications.
15Étant donné que les gouvernements nationaux sont toujours des éléments clés de ce nouvel environnement, il est crucial également de comprendre la montée et le déclin de l'intervention politique nationale en matière de communications, surtout si on considère que le Canada fournit l’un des exemples historiques les plus intéressants. L’expérience canadienne, en effet, nous permet d’apprécier des approches politiques « mixtes » au sein des sphères nationales et transnationales, tout en cherchant à encadrer le terrain des politiques dans le domaine des communications mondiales.
16Cet article va donc esquisser brièvement l’arrière-plan historique de l’apparition de la mondialisation des communications, autant au Canada que sur le plan international. Mais il est essentiel de procéder immédiatement à quelques observations préliminaires.
La mondialisation et les communications
17La notion sémantique de « mondialisation » n’est pas récente18. Aux yeux des élites européennes du XVIe siècle, cette expression aurait pu tout aussi bien décrire l’élargissement des frontières que la nouvelle conscience que l’on s’en faisait peu à peu. Les populations autochtones de l’hémisphère occidental auraient pu choisir un autre terme pour décrire le processus qui commença en 1492, mais le saut que leur conscience aurait eu à subir appelle une comparaison. D’un point de vue théorique, la « mondialisation » peut être vue comme un processus où l’introduction d’éléments externes transforme le contexte dans lequel une collectivité a toujours évolué.
18Par-delà la notion d’horizon élargi, le terme « mondialisation » renvoie également aux processus d’intégration. Le colonialisme et le développement du capitalisme marchand ont ajouté de nouveaux liens à l’économie mondiale embryonnaire née du commerce de la soie et des épices. Cette économie fut rendue possible par les premières technologies de la communication et se développa avec chaque nouveau progrès technologique. Du slogan « le soleil ne se couche jamais sur l’empire britannique » on passa à la notion de « guerre mondiale », puis au concept de « village mondial », l'idée s’imposant d’un monde de plus en plus petit et de plus en plus interconnecté. Il s’agit donc d’une longue histoire vécue par la culture occidentale.
19Mais peut-on dire alors qu’il y a quelque chose de nouveau dans l’expression « mondialisation » que nous utilisons aujourd’hui ? Indéniablement, ce terme a pris un nouveau sens par rapport à celui qu’il avait auparavant19. De mon point de vue, cette expression vise à décrire un certain nombre de caractéristiques de notre monde actuel, chacune de celles-ci soulevant un ensemble de questions spécifiques concernant la communication, et plus particulièrement concernant les politiques qui s’y rattachent.
La souveraineté amoindrie des États-nations
20L’apparition du système international des États-nations, ainsi que le système des relations internationales fondé sur les relations entre États, fut une des caractéristiques principales de la première phase de la mondialisation, marquée par la signature du traité de Westphalie en 1648. Pendant près de 300 ans, la souveraineté nationale fut une notion prépondérante, la politique mondiale étant marquée par les conflits entre les États souverains, entre les groupes alliés d’États souverains ou entre les États impériaux et leurs colonies. Au cours des cinquante dernières années du XXe siècle, toutefois, le système Westphalie a été miné par de nombreux facteurs, entre autres par l’instauration du système des Nations Unies fondé en théorie sur la participation égale des États souverains et l’émergence parallèle de plus de cent États postcoloniaux. L’État national demeure encore le mode principal d’organisation et de représentation politiques, aussi bien sur le plan intérieur qu’au niveau international, mais il doit de plus en plus partager sa souveraineté avec d’autres acteurs. Un des principaux défis pour la « mondialisation », en ce début du XXIe siècle, est donc de repenser et d’actualiser notre conception de la souveraineté ainsi que du rôle de l’État.
21Alors qu’ils menaient autrefois des politiques de façon autonome dans tous les domaines d’intérêt public, les États-nations aujourd’hui négocient en tenant compte de leurs électeurs dans les différents forums où les problèmes de politique transnationale sont discutés et réglés. En matière de communications, cela soulève des questions concernant la réglementation, les fonds publics, l’équilibre entre les services commerciaux et les services public, l’accès aux communications, la liberté d’expression et la pertinence de censurer des contenus dangereux, etc. On pourrait dresser des listes de ce genre pour d’autres secteurs d’activités. Mais ce qui caractérise les politiques communicationnelles, c’est que leur mise en œuvre a des répercussions sur le contexte dans lequel vont se développer d’autres secteurs (comme les soins de santé, l’éducation et la formation de la main-d’œuvre). Les infrastructures communicationnelles constituent, en effet, le fondement d’autres activités, phénomène que les politiciens ont de plus en plus de difficultés à cerner. Par ailleurs, savoir dans quelle mesure l’Internet demeure accessible à tous et reste relativement non commercial est une question qui ne peut être réglée que par des accords transnationaux. Pendant ce temps, le monde des affaires va chercher des solutions sans se préoccuper de l’intérêt public. Comme on le voit, les gouvernements nationaux ne peuvent agir seuls pour aborder de telles problématiques. En réalité, les communications sont devenues un des champs de bataille où les États-nations s’efforcent de récupérer ce qu’ils ont perdu de leur souveraineté en matière de culture.
L'intégration accrue de l'économie mondiale
22Une fois encore, ce processus remonte aux temps anciens. La situation actuelle est toutefois sans précédent pour ce qui est de la vitesse et de la portée du phénomène. C’est à la fois une source sans précédent de stabilité et d’instabilité. D’une part, on peut maintenant se procurer une copie unique d’un vase de Murano du XVIIe siècle dans des endroits comme Paris, Tokyo ou Montréal pour pratiquement le même prix. D’autre part, des dizaines de compagnies respectables, comme, par exemple, des fabricants de chaussures, ne sont plus viables dans plusieurs parties du monde. Des régions entières sont exclues de la participation à l’économie mondiale (c’est de cette même façon que, à l’époque précédente, les nouvelles classes sociales sont apparues, à la suite de la naissance de la production industrielle). En même temps, l’économie mondiale se caractérise par le rôle toujours plus grand des entreprises transnationales et par une concentration transnationale du pouvoir économique. Ceci aboutit à un paradoxe. Trois seulement des sept plus grandes multinationales de l’industrie culturelle sont la propriété des Américains (contrairement à ce que l’on croit) ; mais elles ont toutes leur siège social au cœur de Manhattan20. Dans le langage politique, l’intégration économique représente un changement important, car, contrairement à l’État, les politiques démocratiques n’ont pas de prise sur le monde des affaires.
23L’intégration économique mondiale arrive chargée d’une idéologie très séduisante qui se déploie largement dans la sphère de la culture et de la communication. Les industries culturelles mondiales mettent en marché non seulement un ensemble de produits mais également une certaine conception de la vie. Imposées à l’échelle mondiale, toutes les productions culturelles industrielles se réduisent au divertissement, leur valeur étant purement commerciale. À l’intérieur de ce cadre, il n’y a pas de place pour les politiques culturelles nationales, les médias de services publics et communautaires, ni pour les autres formes de communication, à moins qu’elles ne constituent des « exceptions » aux règles du commerce. Dans le cadre de l’alena, par exemple, le Canada a la possibilité de protéger ses industries culturelles, mais il ne peut le faire qu’en encourant des représailles des États-Unis dans d’autres secteurs commerciaux. En revanche, il existe des solutions embryonnaires qui méritent d'être signalées. En 1997, l’Union européenne adopta une mesure reconnaissant le droit aux États membres de continuer à subventionner les services publics de radiodiffusion, malgré les conséquences que de telles subventions pourraient avoir sur les avantages concurrentiels des médias du secteur privé. La justification de l’UE en faveur de cette mesure fut que l’importance de la radiodiffusion publique en tant qu'instrument démocratique est plus grande que les droits économiques des sociétés de radiodiffusion privée. Ce fut le premier cas en matière de communication où la logique politique d’un État était transférée avec succès à un organisme transnational chargé d’élaborer un nouveau régime d’intégration économique sans que soit ajoutée une clause de représailles21 (contrairement à ce qui s’est passé pour l’alena).
Le rétrécissement technologique de l'espace et du temps
24Les nouvelles technologies de communication ont fortement marqué chacune des étapes de la mondialisation. Dans la phase actuelle, toutefois, de nouvelles technologies comme l’Internet donnent l’impression de faire disparaître l’espace et le temps. Des transactions financières importantes ont lieu instantanément en appuyant sur la touche d’un clavier et indépendamment de la distance. Les agents de change de Hong-Kong peuvent désormais jouer au bridge en temps réel avec des coiffeurs de Miami. Pour ce qui est des caractéristiques que nous avons mentionnées précédemment, les technologies de la communication ont contribué à miner le pouvoir débridé des États-nations et à favoriser l’intégration de l'économie mondiale. Mais elles ont aussi donné plus de pouvoir aux nouveaux acteurs sociaux, au point que ces derniers peuvent désormais accéder à ces technologies. En périphérie de la nouvelle idéologie de la société d’information, une nouvelle conception de la société civile prend naissance. Les questions entourant le développement et l’utilisation des technologies de communication sont aujourd’hui — comme elles Font toujours été — au centre des luttes sociales et politiques contemporaines. Alors que les luttes précédentes se concentraient sur la liberté d’expression face à l’autorité de l’État, et plus tard entre les entreprises privées et les services publics, les luttes actuelles ajoutent à ces nouvelles questions des caractéristiques propres à la phase actuelle de la mondialisation. L’Internet, par exemple, a soulevé des questions à propos de la souveraineté nationale, du pouvoir économique, de la liberté d’expression et de l’accès aux moyens de communication. D’une part, une certaine sagesse traditionnelle affirme que les nouvelles technologies de communication comme l’Internet sont ingouvernables ; d'autre part, certains intervenants très puissants, comme Microsoft ou l’Union européenne, cherchent à mettre en place un régime de réglementation mondial régissant l’utilisation et le développement futur de l’Internet.
25Comme chacun le sait, les nouvelles technologies de l'information et des communications s’accompagnent d’une explosion sans précédent des canaux de communication. Toutefois, ces technologies ne fournissent pas le contenu permettant de remplir ces canaux. Savoir qui va s’approprier ces canaux et comment, et avec quel contenu, sera en définitive une source importante de conflit. Le monde des affaires structure l’environnement des nouvelles communications dans une optique expéditive, qui ne permet pas à la majorité de disposer des produits haut de gamme. Cette inaccessibilité crée un déficit démocratique et constitue une faille dans l’idéologie, au demeurant puissante, de la société de l’information : l’explosion des communications ne sert à rien si on n’a pas les moyens d’en profiter. En fait, le marché de l’information donne plus de pouvoir à ceux qui en ont déjà et exclut les autres, créant ainsi un écart toujours grandissant entre l'information des riches et celles des pauvres. Malgré les nouvelles technologies, l’expansion culturelle continue d’être déviée du centre vers les périphéries, du Nord au Sud. D’Atlanta à Ouagadougou, les produits culturels et informationnels voyagent toujours dans une seule direction. Par ailleurs, il est difficile pour quiconque ou pour un pays donné d’échapper à la culture mondiale. Cette situation a des répercussions à la fois positives et négatives. D'une part, les États autoritaires ne jouissent plus du monopole de la connaissance en contrôlant simplement les médias nationaux ou ce qui se trouve sur leur territoire national ; d’autre part, les enjeux du débat sur l’universalisme culturel changent de nature et finissent par aboutir à la célèbre dichotomie de Benjamin Barber « Jihad vs McWorld »22.
La transmission des idées reçues sur l’identité
26Les contradictions de la mondialisation à l’égard des questions de politiques culturelles et identitaires sont plus frappantes dans le domaine des communications. D’une part, la mondialisation crée un seul environnement culturel mondial dans lequel tout le monde a accès aux mêmes messages, réalisés et disséminés à travers un réseau des réseaux centralisé et contrôlé étroitement. D’autre part, la mondialisation — en réponse à cet état de fait — encourage une quête de l’individualité, de la distinction et de l’affirmation des différences. L’affaiblissement de l’aspect « national » en tant que première catégorie de référence pour l’identité est reflété par le renforcement des catégories qui traversent les frontières nationales, tels la religion, l’origine ethnique, la langue, le sexe, les classes sociales et l’orientation sexuelle. Ces changements ont suscité un débat grandissant autour des nouvelles conceptions de la citoyenneté, dans la mesure où la phase actuelle de la mondialisation est marquée par l’émergence de nouvelles « hybridations » culturelles et de communautés diasporiques, ainsi que par une distinction entre les questions culturelles et les territoires géographiques. Certains, comme Samuel Huntington, du Département d’État américain, voient dans ce phénomène les germes d’un « choc des civilisations » géopolitique23.
27Le phénomène politique des « nations sans États » et des formes non nationales d’identification pose un problème spécifique par rapport aux nouvelles formes de gouvernance. Il n'est pas surprenant que ceci se manifeste tout d’abord dans la sphère culturelle. Reconnaissant clairement la ligne très mince qui sépare la nationalité et la souveraineté, des entités politiques comme le Québec ou la Catalogne demandent une représentation à l’unesco plutôt qu’aux Nations Unies, car l’unesco s’occupe des problèmes de diversités culturelles, alors que les Nations Unies ne traitent que des questions qui touchent les États-nations (du moins en théorie). Cependant, il va devenir de plus en plus difficile de distinguer entre les deux, dans la mesure où la politique et la culture s’interpénètrent. De nouvelles pressions vont s'exercer sur les États-nations, de même que sur les corps multilatéraux. Dans ces conditions, la convergence à sens unique entre les médias nationaux et les États nationaux devient également problématique. De nouveaux médias transnationaux prennent vie, afin de s’ajuster aux nouvelles exigences des électeurs dont ils cherchent à obtenir les suffrages. Il convient d’ailleurs de signaler que les médias nationaux traditionnels sont les premiers à souffrir de la disparition des frontières nationales.
L'émergence locale de nouveaux réseaux mondiaux
28La contradiction la plus frappante de la mondialisation telle que nous la connaissons est que tous les phénomènes évoqués ci-dessus ont donné naissance à une capacité extraordinaire de travail en réseau parmi les individus et les groupes de la société civile qui ne voyageaient pas habituellement ou ne communiquaient pas au niveau international. Dans tous les secteurs de la vie sociale, les gens sont maintenant connectés. Certaines de ces connexions ont favorisé l’apparition d’influences transnationales autosuffisantes, d’efforts de recherche et de groupes de pression. La mobilisation internationale contre l’ami, rendue possible grâce à l’Internet, est un cas parmi d’autres. La question qui se pose dorénavant est celle de savoir si tous ces réseaux ont des chances de survie : les réseaux sociaux peuvent-ils se maintenir en ne s’appuyant que sur des liens technologiques, sans recourir à des liens économiques et politiques ? Les technologies d’adaptation vont-elles leur demeurer accessibles ? Entre-temps, les nouvelles ong constituent l’un des trois pôles du nouveau cadre mondial de gouvernance qui prend naissance au niveau politique (avec les États-nations et les multinationales).
29Dans ce contexte, « le droit de communiquer » est devenu une métaphore à la fois de ce qui est possible et de ce qui est problématique en matière de mondialisation. Du reste, certains soutiennent que les problèmes internationaux en matière de communication vont remplacer ceux de l’environnement en tant que focalisation des inquiétudes mondiales et du militantisme de base. Une fois encore, le paradoxe que nous avons souligné plus tôt entre en jeu : la communication devient à la fois l’objet et le moyen des luttes politiques. Les nouveaux réseaux mondiaux de communication se sont constitués autour de groupes de travailleurs dans les radios communautaires, au moyen de la vidéo et des ordinateurs. En fait, ils se concentrent de plus en plus sur les questions politiques mondiales dans la mesure où ils reconnaissent le lien entre la politique qui détermine la nature de la sphère publique mondiale et les activités qu’ils cherchent à entreprendre afin d’y participer. D’une façon générale, on peut affirmer que les militants des réseaux communautaires médiatiques constituent un lien important dans les débats politiques et les pratiques qui redéfinissent la communication24.
Un nouveau cadre de gouvernance mondiale
30Les regroupements régionaux des États, les systèmes multilatéraux, les accords internationaux, les sites de délibération mondiale et de réglementation se multiplient à une vitesse vertigineuse. L’aspect le plus marquant de la mondialisation est sans aucun doute le déclin de la souveraineté nationale et le transfert des lieux de gouvernance à un niveau supranational. Ceci nous oblige à repenser la manière dont les régimes de gouvernance furent utilisés dans les différentes phases de l’histoire humaine et plus particulièrement lors des grandes périodes de changement. C’est un sophisme de prétendre que la mondialisation signifie la fin de l’intervention politique en faveur d’un projet social collectif. C’est plutôt la nature de la collectivité qui doit être repensée et de nouveaux mécanismes qui doivent être inventés. La mondialisation facilite ce processus en mettant de l'avant les nouvelles façons de concevoir l’État et le marché, et en rendant disponibles les moyens techniques qui favorisent de nouveaux modes d’organisation sociale. La nouvelle culture de la communication favorisée par la mondialisation est également un facteur positif.
31Des accords politiques et économiques impliquant divers groupes d’États, comme l’alena, l’Union européenne et le G8 créent de nouveaux régimes supranationaux de réglementation pour régir un ensemble d’activités incluant les communications. Ces regroupements fonctionnent tous d’une façon différente, tous selon leur propre raison d'être. Dans le cas de l’alena, l’accent est mis sur les relations commerciales. L’Europe, de son côté, cherche à développer une économie d’intégration régionale menée selon un même ensemble de règles. (À vrai dire, si les directives d’une « télévision sans frontières », émises par l’UE, visent à protéger l’espace audiovisuel européen et les entreprises culturelles européennes, elles ne protègent pas les États membres les uns des autres.) Le g8, quant à lui, opère en tant que chambre de compensation pour les projets qui vont dans le sens de l’intérêt commun des nations économiquement les plus puissantes. (Il n’est donc pas surprenant que le g8 subventionne l’initiative américaine « Global Information Infrastructure » en vue de créer un système mondial unique de communication (voir ci-dessous).)
32Au niveau mondial, le système multilatéral devient le site de discussions et de débats concernant les questions de politiques communicationnelles. La Déclaration des droits de l’homme des Nations Unies fournit des balises pour les questions concernant le droit à la communication ; à cela s’ajoute le fait que l’onu doit s’occuper régulièrement de problèmes reliés aux médias dans le cadre de solutions à des conflits et du développement humanitaire. Un travail plus concret se fait dans les agences spécialisées telles que l’Union internationale des télécommunications (uit) et l’unesco. Ici encore, les États-nations constituent la base délibérative et décisionnelle, mais les multilatérales et les ong sont de plus en plus présentes. La réforme attendue de ces agences multilatérales annonce le nouveau système de gouvernance mondiale. Pendant ce temps, les traités internationaux discutés dans le cadre de ces organisations deviennent les fondements législatifs du nouveau système. C’est le cas notamment de l’omc, dont l’accord de 1997 sur les télécommunications a ouvert aux investissements étrangers le marché des télécommunications de quatre-vingt-dix pays. À cet égard, il faut noter que les négociations concernant l’ami ont été menées au sein de l’ocde, organisation bien plus sélecte, qui regroupe les trente pays les plus riches du monde.
33En résumé, l’apparition d’un système de gouvernance mondiale soulève des questions importantes quant aux possibilités des interventions politiques futures au niveau mondial. Nous en examinerons quelques-unes dans la dernière section de cet article.
Les politiques canadiennes en matière de communication
34Chaque pays dans le monde fait face, actuellement, aux mêmes questions concernant l’information et la communication25. Les réponses obtenues varient d’un cas à l’autre, selon les circonstances politiques, économiques, sociologiques, culturelles et historiques. Mais les problèmes restent les mêmes. Il est par conséquent important d’examiner le contexte dans lequel les politiques sont élaborées, du moins si on désire comprendre les défis politiques que pose à ces pays, et au Canada, la mondialisation en matière de communication.
35Les politiques en matière de communication furent un des thèmes dominants du discours social canadien dès les débuts de la radio. La communication fut perçue très tôt, au Canada, comme un moyen de renforcement de l’unité nationale, tout autant que comme un véhicule du développement social et un instrument d’affirmation culturelle. En même temps, les initiatives politiques ont cherché à promouvoir le développement économique des industries canadiennes des communications. Ce qui représentait un singulier paradoxe. Cela provoqua des tensions en sens divers entre les préoccupations économiques et la culture, beaucoup plus qu'en Europe ou qu’aux États-Unis où l’un des deux pôles a traditionnellement prévalu.
36Pour illustrer ce que nous venons de dire, considérons les étapes importantes de l’histoire de la communication au Canada. En 1932, le gouvernement fédéral introduisit une législation à la suite du rapport de la Commission royale Aird sur la radiodiffusion. Un des intervenants clés à l’audience du comité parlementaire sur la Loi canadienne sur la radiodiffusion fut la Canadian Radio League, l’un des groupes de pression d’intérêt public les plus remarquables de l’histoire du Canada (une vaste coalition englobant les différences de langues, de classes et de régions). Cette League avait entrepris une campagne vigoureuse afin que le Parlement adopte les lignes directrices du rapport Aird ; au cours de l’audience, son porte-parole, Graham Spry, réaffirma que la radio devait être considérée comme une affaire publique :
[...] la position de la Canadian Radio League est que, quelles que soient la puissance et l’utilité qu’une agence de communication peut avoir pour des objectifs nationaux très larges, elle devrait appartenir au peuple, être administrée par lui et ne pas être adaptée aux messages publicitaires et à la propagande des compagnies irresponsables qui ne sont soumises à aucune réglementation ni à aucun contrôle26.
37Le Canada avait besoin d’une politique et d'un programme pour le développement de la diffusion, soutenait Spry. Le rapport Aird fournissait un cadre pour un tel programme, proposant la création d’un système de radio-diffusion à grande échelle appartenant au public. Spry et la crl appuyèrent cette proposition, en insistant sur l’urgence d’une telle initiative.
38Cette urgence était motivée par la tenue d’une convention internationale sur la radio qui devait avoir lieu à Madrid en septembre 1932, réunion au cours de laquelle on attribuerait des fréquences radio aux nations participantes, qui les redistribueraient chez elles selon les politiques nationales mises en place. L’intérêt national du Canada était en jeu, soutenait la crl, dans la mesure où les groupes commerciaux américains comme rca considéraient le Canada comme une partie de leur territoire. (De leur côté, les gouvernements européens avaient constitué des monopoles nationaux chargés d’occuper les ondes.) Qu’arrivera-t-il au Canada, demanda Spry, s’il ne fait rien, coincé comme il l’est entre les groupes compétitifs des nations européennes et un groupe dominant américain ? Sans programme, sans politiques, comment le Canada pourra-t-il réclamer sa part27 ? Le Canada avait un choix, qui était clair, comme le fît remarque Spry au comité parlementaire : « C’est un choix entre les intérêts commerciaux et les intérêts du peuple. C’est un choix entre l’État et les États-Unis »28.
39Cet argument, depuis lors, a inspiré les politiques du Canada en matière de communication. Les politiques canadiennes sur ce point ont toujours été liées à la délimitation, à la protection et à la promotion des intérêts nationaux face aux pressions internes et externes de la fragmentation et face au contexte de la mondialisation29. Pour le Canada, chercher à se distinguer des États-Unis est moins un réflexe de repli qu’une tentative pour s’ouvrir au reste du monde à ses propres conditions.
Les services publics face au marché
40Un bref aperçu historique des efforts canadiens en matière de politiques communicationnelles et culturelles révèle les contradictions de la mondialisation telles qu’elles sont apparues dès les premières interventions de l’État canadien. Le Canada adopta la Loi de la radiotélégraphie en 1905, deux ans après la première conférence internationale sur la réglementation de la télégraphie sans fil, qui eut lieu à Berlin. Laquelle fut suivie d’une autre Loi de la radiotélégraphie englobant la radiotéléphonie, en 1913. L'entrée de l’État canadien dans la sphère de la radiodiffusion fut ralentie par un conflit avec certaines provinces, plus particulièrement avec le Québec, qui réclamait une compétence exclusive dans ce domaine.
41Les premiers développements de la radiodiffusion canadienne furent fortement influencés par les deux modèles dominants de l’époque, à savoir le modèle commercial américain et le modèle britannique des services publics. La radiodiffusion au Canada se développa comme un compromis entre les deux. Toutefois, si le Canada fut interventionniste et innovateur quant à la protection et à la promotion du contenu canadien, il le fut plus en théorie qu’en pratique. Malgré tout, de nombreuses initiatives permirent au Canada de figurer à une place enviable sur le plan mondial, tels les quotas de contenu canadien à la radio et à la télévision, les efforts pour garder le contrôle sur la distribution des films, la réglementation des avoirs étrangers et les divers programmes de subvention combinés au soutien des institutions culturelles publiques, comme la Société Radio-Canada et l’Office national du film.
42Une nouvelle stratégie canadienne pour le déploiement des fonds publics et des politiques vit le jour durant les années 1980. Elle visait non pas tant le développement des services publics que l'expansion industrielle. La création en 1993 de Téléfilm Canada en est un bon exemple. Cette société, constituée comme un secteur de production indépendant, qui visait non seulement le marché intérieur mais peu à peu les marchés internationaux, reçut des fonds qui, jusque-là, étaient réservés à la src. L’industrie du câble fut ciblée comme étant le meilleur véhicule de la radiodiffusion canadienne, un grand nombre de chaînes canadiennes payantes et de services spécialisés étant accrédités dans cette optique. Depuis lors, quoi qu’en dise la rhétorique nationaliste, les politiques culturelles canadiennes ont cherché à donner aux entreprises culturelles de ce pays des avantages concurrentiels sur le marché mondial. Cela a fait du Canada un partenaire tourné vers la libéralisation des marchés, la déréglementation et la concentration industrielle, au grand dépit des négociateurs commerciaux américains qui voient « l’exception » culturelle insérée dans l’alena comme une forme de protectionnisme peu subtile qui n’a rien à voir avec la culture.
43Ce bref aperçu révèle aussi le fait que les politiques sont le résultat de l’interaction entre des intérêts particuliers, représentés par les organisations de la structure politique (l’État, les partis politiques, les bureaucraties, etc.), l’économie (les secteurs privés et publics et leurs institutions respectives) et la société civile (des groupes organisés ou non et des individus qui interviennent dans le processus politique).
44Les débats contemporains sur la politique du Canada en matière de communication se sont attachés à ce modèle. Nous avons pu constater l’interaction de ces intérêts dans plusieurs documents et procédures récents, dans des initiatives de développement politique particulières30, dans le lobbying et dans les campagnes de relations publiques, dans les discours des représentants de l’État, dans les déclarations ministérielles, dans les représentations au g8, à l’omc, dans les négociations au sein de 1'alena et dans d’autres forums. Nous avons observé plusieurs intérêts en jeu à l'intérieur même du Canada, dans les relations bilatérales entre le Canada et d'autres pays sur la scène mondiale, et au niveau géopolitique où le Canada (son élite mais également ses citoyens) participe de concert avec les grandes puissances de ce monde à la création et à l’exploitation du nouvel environnement mondial des communications.
45Mais ceci ne doit pas camoufler le fait que, durant la mise en place d’une tradition d’intervention politique pour les objectifs socioculturels en matière de culture et de communication, le Canada a bâti un ensemble important de pratiques institutionnelles dans ce domaine. Parmi celles-ci se trouve le principe selon lequel les infrastructures en matière de communication constituent une pierre angulaire de l’héritage culturel canadien. Celui-ci, qui est l’instrument principal pour élaborer des politiques dans les domaines de la culture et des communications correspond à un système mixte d’industries privées et publiques, la participation des groupes sociaux étant une partie centrale du processus décisionnel politique. À cet égard, le Canada fournit un modèle de processus pour l’élaboration des politiques de la communication, qui est imité dans plusieurs parties du monde.
Un « nouveau » débat ?
46Comme cela se passe dans plusieurs autres pays, un ensemble d’entreprises canadiennes se sont questionnées au sujet de l’évolution récente des communications dans le monde, particulièrement à propos des nouvelles infrastructures de l’information et de la convergence des technologies de communication et de radiodiffusion. Mais y a-t-il vraiment quelque chose de nouveau dans la manière dont le débat est engagé ? En un certain sens, tout cela renvoie aux annés 1960 et à la création du ministère fédéral des Communications, au lancement d'un programme national de satellites relais et à la décision d’élaborer des politiques de la communication dans une perspective à la fois culturelle et économique. Le développement national et le développement industriel devaient constituer les deux pôles des politiques de la communication après 1969. La pierre angulaire des politiques culturelles canadiennes était le système de radiodiffusion, administré comme un modèle mixte du secteur privé et public. Ce système était réglementé par une agence indépendante, le crtc, dans le but d’assurer à la fois une présence canadienne à la radio ou à la télévision et un développement des industries nationales de production et de distribution. Au même moment, certaines politiques ont cherché à mettre en place des infrastructures de communication, à l’aide notamment de satellites, s’efforçant d’exporter au nord du 49e parallèle les problèmes du développement national, dans la sphère... plus confortable de l’espace intergalactique !
47En février 1969, Eric Kierans, prenant la parole à la Chambre des communes à l’occasion d’un débat sur la loi créant le ministère des Communications, affirma, dans le jargon du temps, que le nouveau ministère serait concerné « par le médium et non par le message »31. Ceci s’est avéré juste jusqu’à ce jour, mais comme tous les spécialistes le savent, les deux fonctions — média et messages, matériel et logiciel, contenant et contenu, technologie et culture — sont interreliées et interdépendantes.
48Selon le ministre, toutes ces activités allaient être regroupées dans une politique nationale de la communication. Pour reprendre les mots mêmes d’Éric Kierans, « tout comme la Confédération avait été édifiée sur des kilomètres de rails à travers le pays », la Confédération allait être renouvelée par « un système de communication répondant aux besoins de tous les Canadiens »32. Le point de vue du ministre reflétait une confiance aveugle ; nous savons aujourd’hui que les choses ne se sont pas vraiment passées ainsi. En fait, nous attendons toujours ces fameuses politiques33.
49En 1993, on assiste à la fermeture du ministère des Communications et au regroupement de ses activités au sein du nouveau ministère du Patrimoine canadien et au sein du ministère de l’Industrie. C’était la fin d’un processus qui avait duré vingt-cinq ans en vue de consolider la nation par l’élaboration d’une politique des communications. Les vieilles légendes décrivant le Canada comme une société de l’information devaient dorénavant être revues et corrigées. Après des décennies de débâcles organisationnelles, d’échauffourées ministérielles et de priorités politiques abandonnées, le projet canadien de « l’autoroute de l’information » fut mis en branle. La seule raison de cette initiative fut la concurrence des États-Unis et l’avènement de la mondialisation ; par là, on voulait démontrer que la force principale de la version 1990 de la société de l’information reposait, comme aux États-Unis, sur « les affaires et seulement les affaires ». Lorsque le processus fut relancé, ce fut dans un nouveau contexte politique où les décisions concernant les politiques des communications, des télécommunications et des infrastructures étaient dorénavant prises à l’intérieur de l’industrie, les secteurs mous du développement culturel, comme la radiodiffusion, étant assignés au domaine du Patrimoine, dont la responsabilité principale était la promotion de l’unité nationale et de la cohésion sociale34.
50C'est dans ce contexte que le gouvernement libéral actuel prit le pouvoir en 1993. Emboîtant le pas du vice-président des États-Unis, Al Gore, qui demandait aux nations industrialisées de fournir de l’aide pour l’édification d’une infrastructure informationnelle mondiale, les libéraux annoncèrent en 1994 la mise sur pied d’une autoroute canadienne de l’information35 Dans le débat qui s’ensuivit, une nouvelle conception de la communication fut élaborée.
L'accès à la communication
51Au Canada comme ailleurs, la notion d'intérêt public sert à légitimer l’intervention de l’État face aux initiatives des entreprises commerciales. Terme vague et polysémique, l’intérêt public est défini différemment selon les cadres de travail et selon celui qui contrôle la définition. Dans le domaine des politiques traditionnelles en matière de radiodiffusion et de télécommunication, l’intérêt public fut conceptualisé autour de deux modèles distincts de communication et, plus particulièrement, autour de deux conceptions séparées de l’accès public. Dans le modèle de la radio-diffusion, l’accent est mis sur le destinataire actif et sur le libre choix, l’accès renvoyant à l’ensemble des produits offerts. Dans le modèle des télécommunications, l’accent est mis sur l’envoyeur et sur la capacité à transmettre un message, l’accès renvoyant aux moyens de communication. L’autoroute de l’information propose de faire converger ces modèles et de travailler dans le sens d’une unification du cadre de travail pour l'action communicationnelle, combinant les modèles de la radiodiffusion et des télécommunications afin que chacune des conceptions de l'intérêt public soit intégrée au projet. Les politiques qui sont actuellement en vigueur détermineront la forme et la structure d’un nouveau modèle hybride de communication, qui aura à combiner les objectifs sociaux, culturels, économiques, de la radiodiffusion et des télécommunications.
52Cela doit nous remettre en mémoire que, par-delà les modèles opérationnels de radiodiffusion et de télécommunications, il y a une question plus fondamentale qui concerne l’accès aux politiques canadiennes des communications, à savoir la question de l’accès au processus politique lui-même. Si le rôle des politiques est d’intervenir sur la manière dont la société est organisée, alors l’accès aux interventions politiques est un moyen pour les citoyens d’influencer les arrangements institutionnels et organisationnels qui structurent la vie de tous les jours. C’est une des pierres angulaires de la démocratie. Au Canada, ce principe a constitué une partie importante de l’élaboration des politiques depuis la Commission Aird : les audiences publiques sont toujours une exigence légale dans les procédures du crtc, fournissant une voie d’accès importante aux négociations politiques pour ceux qui ne jouissent pas du privilège d’avoir une position de premier plan en raison des groupes de pression industriels ou patronaux36. En fait, l’érosion des consultations publiques est un des aspects les plus frappants de la phase actuelle de la mondialisation. Elle prend des proportions dramatiques si on replace ce phénomène dans le contexte de l'apparition du cadre politique mondial, où les citoyens du monde n’ont aucun accès direct à la mécanique politique. Paradoxalement, les nouvelles technologies des communications pourraient faciliter la participation démocratique à l’élaboration des politiques à une échelle sans précédent, si la volonté politique de l’organiser était présente. Dans cette perspective de réflexion sur la gouvernance démocratique mondiale, les politiques en matière de communication deviennent un lieu décisif de lutte politique.
Une politique mondiale des communications
53D’un point de vue historique, on ne peut parler de la communication au niveau mondial que depuis très peu de temps ; en revanche, du point de vue du sens commun qui considère la mondialisation comme un phénomène récent, il est possible de retracer une évolution sur un siècle et demi, plusieurs des premières questions étant toujours débattues aujourd’hui37.
54On peut dire que la question des politiques en matière de communication commence à Paris en 1863 à l'occasion de la conférence préparatoire à la fondation de l’Union postale universelle. Pendant les 130 années qui suivirent, les relations internationales dans le domaine des communications se limitèrent essentiellement à la gestion des ressources de la communication utilisées au niveau national, selon les objectifs et les capacités des États-nations, les problèmes transfrontaliers étant réduits à la portion congrue. Des questions telles que l’harmonisation des standards techniques, l’élaboration d’un système tarifaire unifié, l’allocation des fréquences radio et les positions des satellites géostationnaires furent abordées avec le présupposé que la communication était une affaire nationale exigeant un minimum de coordination internationale.
55Entre-temps, une première organisation intergouvemementale mondiale, l’Union internationale des télécommunications, fut mise sur pied en 1865 pour fournir un cadre de développement aux services internationaux de télégraphie et de télégrammes38. Le traité de Berne en 1875 donna naissance à l’Union postale universelle ; il fut suivi quelques années plus tard (1886), toujours à Berne, d’une convention internationale sur les droits d’auteur. Au début du XXe siècle, on assista à l’apparition de nouvelles technologies de communications rendant possibles les communications directes entre réseaux et entre individus. Une première conférence internationale sur la réglementation de la télégraphie sans fil eut lieu à Berlin en 1903 ; toutefois, il fallut attendre 1927 pour que la Conférence sur la radio tenue à Washington propose un ensemble de règles internationales. Une seconde conférence se tint à Madrid en 1932, où fut reconnue la nécessité d’une convergence des technologies radio et télégraphiques par la création de l’UIT, aujourd’hui connue sous le nom d’Union internationale des télécommunications39.
Un monde divisé
56Les conférences de Madrid et de Washington répartirent le monde en une série de régions et attribuèrent un ensemble de fréquences radio à chacune d’elles. Par la suite, une série de conférences régionales distribuèrent ces fréquences, chaque État assurant la surveillance de l’utilisation de celles-ci. Par conséquent, plusieurs modèles de radiodiffusion virent le jour dans différentes parties du monde durant les années 1930. Cependant, un modèle de base fut établi, qui subsiste encore aujourd’hui, à savoir une distribution initiale des ressources et l’établissement de mécanismes minimaux de coordination au niveau mondial, la souveraineté passant avant les conditions d'utilisation de ces ressources au niveau national. Partout dans le monde, les autorités nationales ont établi une forme de système qui réglemente l'utilisation des ondes radio sur leur territoire.
57Une nouvelle ère dans les communications internationales débuta à la fin de la Seconde Guerre. L’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme souligna le droit à l’information. L’unesco, créée en 1946, entreprit une série d’activités qui s’avérèrent décisives pour la compréhension des liens entre la communication et la culture, et pour le développement de l’être humain. De nouveaux corps régionaux, comme le Conseil de l’Europe, inclurent la communication dans leur sphère d’intérêts, par le biais d’informations périodiques sur des questions et des thèmes spécifiques40.
58Au même moment, des questions touchant la communication et la culture commencèrent à se manifester à la veille du nouveau multilatéralisme économique qui résulta des accords de Bretton Woods et de la création d’institutions comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Le premier Accord général sur les tarifs et le commerce [en anglais General Agreement on Tariffs and Trade (gatt)], en 1947, fut l’occasion d’un débat vigoureux qui aboutit, malgré la philosophie de libéralisme sous-jacente à l’Accord, à l’acceptation de quotas d’importation des films étrangers. Depuis lors, les négociations commerciales multilatérales et régionales ont toujours pris en considération le fait que les « produits » culturels constituent un type spécifique de biens et de services exigeant leur propre ensemble de règles commerciales internationales.
Vers un nouvel ordre mondial
59La question de la souveraineté nationale en matière de communication prit une nouvelle dimension dans le contexte politique et technologique des années 1960 et 1970, avec l’apparition d’une douzaine de nouveaux États postcoloniaux et la mise au point de technologies par satellites rendant possible la transmission d’images et de sons par-dessus les frontières nationales. La quantité inégale de contenu informatif du Nord vers le Sud et l’importance accrue des ressources techniques conduisit, d’un point de vue conceptuel, à la formulation de la thèse de l’« impérialisme culturel », et politiquement, aux efforts visant à créer un « nouvel ordre mondial de l’information et des communications »41. Ces questions furent soulignées par la publication en 1980 du rapport de la commission de l’unesco présidée par le juriste irlandais et militant pour les droits de l’homme Sean MacBride (unesco 1980) et par le retrait de l’unesco des États-Unis, du Royaume-Uni et de Singapour42. Entre-temps parut le rapport un peu moins tonitruant de l’Union internationale des télécommunications (uit) sur la même période démontrant la distribution inégale des ressources techniques dans le domaine de la communication mondiale43.
60L’unesco a depuis adopté une stratégie de communication plus discrète, mettant l’accent sur la nécessité de former des professionnels de la communication et de développer des institutions médiatiques dans les États « transitionnels » de l’Europe centrale, de l’Afrique et de l’Asie44. Toutefois, en 1995, une commission mondiale sur la culture et le développement de l'onu/unesco publia un important rapport qui remit à l’ordre du jour plusieurs des débats précédents45. Un des résultats concrets de ce rapport fut la Conférence intergouvemementale sur les politiques culturelles pour le développement tenue à Stockholm en 199846.
61La chute du mur de Berlin fut l'occasion de concevoir un système mondial de communications sous l'égide de l’alliance occidentale. À partir de ce moment, les biens et services culturels furent de plus en plus intégrés aux accords commerciaux internationaux des années 1990, malgré la résistance d’un petit nombre de pays, dont le Canada. Sous les auspices de l’omc, un marché mondial des télécommunications a commencé à se former. Situation paradoxale, alors que le marché se développe, les fusions se multiplient et le nombre d’intervenants diminue47. La propriété étrangère et la réglementation des contenus sont de plus en plus attaquées et menacées de disparition par des projets comme celui de l’ami. Des questions refont surface qui ne pourront être traitées qu’au niveau mondial.
Un projet impérialiste
62Le monde eut son premier aperçu des politiques communicationnelles mondiales au mois de février 1995 à l’occasion d’une rencontre des ministres de l’Information du g7 à Bruxelles. Rédigé en grande partie à Washington, le plan établissant « une infrastructure informationnelle mondiale » (Global Information Infrastructure (Gii)), adopté par le g7 lors de cette rencontre, représentait un triomphe impérialiste sans précédent. En effet, il imposait une vision, un programme et un cadre politique uniques aux technologies de la communication, concevant celles-ci comme un moyen d’atteindre une société mondiale idéale conduite par les forces du marché des capitaux transnationaux. L’aspect caricatural de ce prétendu projet, soutenu par les nations les plus puissantes, échappa à la plupart des observateurs, chose d’autant plus étonnante que, pour la première fois, les représentants des ong avaient été admis à la rencontre du g7.
63Un an plus tôt (1994), ce projet avait déjà été proposé par le vice-président américain Al Gore à l’assemblée de l’uit à Buenos Aires. En fait, il s’agissait du projet Agenda for action concocté par l’administration Clinton, en vue de créer une nouvelle infrastructure informationnelle nationale (National Information Infrastructure (nii)) définie comme « le regroupement national des réseaux, des ordinateurs, des logiciels, des ressources informationnelles, des programmeurs et des producteurs »48. Le nii fut l’objet de débats vigoureux aux États-Unis, durant lesquels furent soulignées les contradictions existant entre le développement de l’intérêt public et celui de la vocation commerciale49. Toutefois, au niveau mondial, ce projet fut présenté comme un plan innocemment non problématique pour la mise en place d’une utopie communicationnelle et informationnelle.
64Comme les Américains le firent remarquer, le projet GII embrassait un ensemble de points qui reliait les objectifs publics et l’entreprise privée en mobilisant des concepts comme le libre-échange, le développement industriel, la modernisation et le progrès technologique. Après Buenos Aires, la stratégie des Américains fut d’amener les différents partenaires à conclure une alliance entre les pays capitalistes avancés sous leur leadership. Ayant proposé et obtenu une rencontre des ministres du g7 à Bruxelles, les États-Unis s'efforcèrent ensuite de gagner des appuis aux cinq principes de base annoncés dans le plan du gii : les investissements privés, la concurrence, une réglementation flexible, un accès ouvert et universel, une définition claire des « actions politiques » permettant la mise en application de ces principes.
65À Bruxelles s’est établie une dynamique politique plus complexe, reflétant la gamme des intérêts spécifiques importants des différents membres du g7. Le besoin de parvenir à un positionnement favorable pour leurs propres représentants nationaux à la table des capitaux internationaux, ainsi que d’aller dans le même sens que les politiques nationales (et dès lors aller dans le sens de l’opinion publique intérieure) exigeait la négociation d’un programme modifié. La version américaine des cinq points du premier gii fut donc élargie par des références à l’accès équitable, à la diversité des contenus et à la coopération internationale. Le nouveau gii de huit points indiquait une plus grande attention aux questions potentiellement explosives, comme la menace à la diversité culturelle et linguistique, la justice sociale, et l’écart entre les nations riches et pauvres50.
66Le rôle de médiateur joué par le Canada mérite d’être mentionné, tant les attitudes de celui-ci furent contradictoires, les représentants du ministère du Patrimoine et ceux de l’Industrie ayant présenté des points de vue sur les politiques communicationnelles diamétralement opposés. Pendant que le ministre du Patrimoine, Michel Dupuy, se faisait l’allié des membres européens du g7 sur la question de l’accès équitable, de la diversité culturelle et de la coopération internationale, le ministre de l’Industrie, John Manley, rappelait à l’assemblée la position pro-marché adoptée par le Canada concernant l’autoroute de l’information. La scission fut emblématique de l’ambiguïté historico-politique du Canada en matière de commerce et de culture, essayant de ménager les approches politiques américaines et européennes, aussi bien que les contradictions inhérentes aux efforts séculaires du Canada pour les concilier.
67En matière de gouvernance mondiale, la rencontre de Bruxelles représenta un changement majeur : pour la première fois sous les auspices du g7, les entreprises multinationales se rencontrèrent autour de leur propre table, avec un statut officiel51. Pendant ce temps, des groupes représentant la société civile étaient relégués au rang d’observateurs, rappelant étrangement le sort des masses qui se trouvaient dans la rue de la cité médiévale et bien peu le partenariat social qui aurait pu être imaginé par une lecture naïve du texte du projet gii52.
68Le cadre de l’accord auquel on parvint à Bruxelles s'inscrivait directement dans la ligne des politiques américaines de la communication concoctées depuis les cinquante dernières années, dont la rhétorique était de mettre l’accent moins sur le libre mouvement de l’information que sur le libre échange des biens et des services. À tous égards, l’infrastructure informationnelle mondiale est un signe avant-coureur d’un certain système de réglementation mondiale et d’un futur système de gouvernance mondiale. C’est un projet impérialiste qui a d’énormes conséquences pour l’avenir de la démocratie et des droits de l’homme, dans la mesure où il repose sur des décisions politiques prises à un niveau où il n’y a aucun compte à rendre, où il y a autonomie des capitaux privés et une exclusion formelle des institutions de la société civile. Au niveau des relations internationales, il restreint la dépendance de ceux que l’on appelle les pays moins développés. En tant que projet social, il situe le développement humanitaire comme un bénéfice potentiel de l’investissement économique, plutôt que comme un but en soi. En tant que défi, il représente une occasion unique d’imaginer un rôle différent pour la communication dans la société mondiale et de créer politiquement un cadre dans lequel une telle mesure peut être accomplie.
Conséquences et recommandations politiques : vers un espace public mondial
69Comme nous l’avons vu dans cet article, le Canada joue un rôle important, mais ambivalent, dans l’évolution du nouveau système de gouvernance mondiale, en ceci qu’il essaie de minimiser les coûts et de maximiser les bénéfices de la mondialisation, défendant des valeurs autres que celles du marché et cherchant en même temps à promouvoir les intérêts de ses industries53. Cette contradiction évidente révèle la nécessité qu’il y a de situer plus clairement les dimensions culturelles et sociales de la communication dans le cadre du développement politique mondial. Faute de quoi, toute intervention en faveur des politiques culturelles sera dénoncée comme une forme de protectionnisme économique reposant sur une rhétorique nationaliste.
70Le multilatéralisme est sans aucun doute une des tendances principales de la gouvernance mondiale, mais, les différents intervenants ayant des intérêts contradictoires, cela requiert une nouvelle stratégie d’intervention face à un système politique fondé sur des relations multilatérales. Selon Sylvia Ostry (1999), le Canada fut très engagé dans la création de l’omc durant l’Uruguay Round de 1993-1994. Sylvia Ostry souligne que des pays de taille moyenne comme le Canada sont favorables à un nouveau système en matière de gouvernance internationale, qui combine les règles internationales et la souveraineté nationale, mais beaucoup moins à un système qui repose sur le pouvoir économique ou militaire54. Les règles peuvent ainsi fournir une base pour la préservation et l’amélioration de la souveraineté nationale. Les grandes puissances, de leur côté, voient les choses différemment au sein du système multilatéral, leur préférence étant d'asseoir leur pouvoir et d'affirmer leur prépondérance immédiate sur leurs partenaires.
71Toutefois, même les grandes puissances reconnaissent la nécessité d'une coordination et d’une réglementation mondiales afin de créer un certain ordre qui favorise leurs intérêts. Ainsi, l’Union européenne et les États-Unis ont chacun proposé un cadre formel de réglementation pour régir les communications mondiales55. Le problème surgit lorsqu’il est question de déterminer la nature de ce cadre, comme cela s’est produit avec l’infrastructure informationnelle mondiale. D’un point de vue démocratique, aucun programme de réglementation mondiale des communications ne vaut la peine d’être mis sur pied si le processus n’est pas élargi pour y inclure la participation de la société civile. C’est incontestablement le défi le plus important du nouvel environnement : ouvrir les espaces à la participation de la société civile. De tels espaces n'existent pas encore.
72Il est indispensable d’en prendre conscience, car le Canada continue de lutter contre la situation engendrée par le régime de l’omc, qui est incompatible avec la position consensuelle historique visant à protéger le développement culturel des caprices du marché56. Il est, par conséquent, important de souligner le rôle joué par le Canada dans la création d’un « nouvel instrument international » pour compenser les initiatives de l’omc dans le domaine des politiques culturelles. C’est ce qu’a proposé un comité constitué par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et qu’ont confirmé plusieurs documents politiques gouvernementaux57. Le nouvel instrument envisagé établirait les principes des politiques culturelles et commerciales et permettrait aux différents pays de maintenir leurs politiques en faveur des industries culturelles ; il chercherait également à susciter un consensus international visant à encourager l’expression culturelle autochtone et s’assurer par des mesures législatives la promotion de la diversité culturelle et linguistique ; il servirait, en outre, de modèle pour la diversité culturelle et le rôle de la culture dans un environnement mondial ; il soulignerait enfin l’importance de la souveraineté culturelle.
73Cette proposition correspond aux prises de position du ministère du Patrimoine canadien depuis la Conférence intergouvemementale sur la culture et le développement organisée par l’unesco à Stockholm en 1998. La conférence adopta un « plan d’action pour les politiques culturelles du développement » et recommanda une série d’objectifs politiques aux États membres de l’unesco, en maintenant la position philosophique selon laquelle les ressources communicationnelles constituent une part du « patrimoine mondial »58. Reconnaissant que « dans un cadre démocratique, la société civile prendra une place de plus en plus grande dans le domaine de la culture », la conférence entérina une douzaine de principes comprenant le droit fondamental à la vie culturelle, ainsi que le droit politique d’établir des structures culturelles et de maintenir les ressources nécessaires « à la création d’un environnement propice à l’épanouissement humain »59.
74Depuis cette conférence, le Canada a exercé un leadership indéniable, en favorisant la création du Réseau international sur la politique culturelle (ripc) dont le but est d’« attirer l’attention et d’accroître l’appui à la diversité culturelle en cette époque de mondialisation et de changements technologiques [...] ; de promouvoir la culture en tant que composante clé du développement [...] ; de placer la culture au centre des projets politiques internationaux [...] ; de renforcer les politiques culturelles afin que les gouvernements, de concert avec la société civile, puissent créer un environnement qui valorise la diversité identitaire, la créativité et la liberté »60.
75Le rôle avoué du réseau est « de s’assurer que la culture est présente dans les forums internationaux, directement ou indirectement, afin que les ministres 1) puissent faire prendre conscience de l’importance de la diversité culturelle ; 2) puissent s’assurer que les questions culturelles sont prises en considération lors des négociations internationales ; 3) et de montrer le lien entre les objectifs culturels nationaux et le développement international »61.
76Cette expérience peut être considérée comme un modèle embryonnaire servant à établir de nouvelles bases pour une politique mondiale de la communication. Si un mécanisme approprié pouvait être mis en place, une approche politique mondiale publique en cette matière serait donc en mesure d'aborder un ensemble de questions qui ne trouvent actuellement aucun forum pour s’exprimer. Ainsi, cela permettrait :
- d’établir une réglementation des activités commerciales dans un intérêt public, afin de garantir un accès équitable et les services de base ;
- d’assurer un appui financier et institutionnel à la création et au maintien des services publics et des autres médias ;
- de poser des limites au contrôle des entreprises résultant de la concentration transnationale de la propriété dans les nouveaux et les anciens médias, ainsi que dans les télécommunications ;
- de garantir un accès aux canaux médiatiques disponibles en prenant en considération l’intérêt public ;
- de favoriser la mise en place de codes et de standards universels pour restreindre l’étendue des contenus abusifs ;
- de faciliter le travail en réseau aux organismes à but non lucratif, par le moyen des technologies de communication ;
- d’introduire des clauses sur les espaces publiques de communication pour la résolution des conflits et le dialogue démocratique sur les questions d’ordre mondial.
77Pour illustrer ce que nous venons de dire, considérons une seule question importante, à savoir celle de la réglementation de l’Internet. Cette puissante technologie remet à l’ordre du jour d’anciens problèmes liés aux politiques communicationnelles nationales et en introduit de nouvelles sur le plan mondial. Paradoxalement, les réglementations nationales vont dans le sens d’un abandon de toute forme de réglementation de l’Internet, alors que les questions mondiales qu’il soulève appellent désespérément une sorte d’intervention supranationale dans la réglementation62. Ces questions ont été longuement développées dans un article de deux chercheurs de l’Université de New York, John R. Mathiason et Charles C. Kuhlman. Cette analyse énumère une liste de problèmes 31 résultant des caractéristiques technologiques de l’Internet qui, selon eux, montrent que cette technologique « a atteint aujourd’hui un niveau politique important où une forme de gouvernance est désormais nécessaire ». Le problème, comme ils le montrent bien, est « de déterminer de quelle politique tel ou tel aspect de l’Internet sera l’objet »63.
78Mathiason et Kuhlman indiquent trois approches possibles de réglementation de l’Internet : un marché autorégulateur, une réglementation nationale, un régime international. D’une manière générale, chacun de ces modèles a de sérieuses limites. Il est bien établi que la réglementation du marché, bien qu’efficace pour réaliser certains objectifs économiques, ne permet guère d’atteindre des buts non économiques. Pour ce qui est de la réglementation nationale, nous avons pu tout au long de cet article constater ses limites. La tendance actuelle dans tous les secteurs de la communication est celle d’un protocole international ; toutefois, il faudrait parvenir à une représentation qui dépasse le cadre actuel des institutions multilatérales, inspirées essentiellement, comme nous l’avons vu plus haut, par les États membres et les grandes entreprises.
79Ces auteurs proposent une « convention-cadre internationale » prévoyant des normes de gouvernance de l’Internet et établissant un mécanisme de surveillance de celles-ci en même temps qu’une possibilité d'effectuer des changements ultérieurs. Cette convention-cadre serait différente d'un régime basé sur un traité comme celui qui se rapporte au commerce sous les auspices de l’omc. Sa tâche serait de délimiter les rôles et les responsabilités des différents acteurs nationaux, internationaux et privés impliqués dans la mise au point de cette « technologie mondiale ». Cette convention devrait être négociée, selon les auteurs, en partant du fait que l’Internet fait partie du patrimoine mondial64.
80Ce type de proposition dépend largement d’un vaste consensus sur la nature de la communication et présuppose que les technologies des communications seront reconnues comme un bien public. Autrement dit, le point de vue normatif que l’on peut adopter concernant l'Internet est plus important dans la détermination des limites et des possibilités des politiques que si on se réfère à la nature de la technologie ou à la capacité politique de l’État. Les débats entourant la définition normative des technologies des communications sont, par conséquent, une condition préalable à toute tentative d'élaboration politique. Ces débats devraient être aussi ouverts et globaux que possible, afin que les positions adoptées par les gouvernements nationaux au niveau mondial reflètent une sorte de consensus social.
81Sur le plan international, un vaste débat est entamé autour de la question de l’intérêt public dans les communications mondiales65. La prochaine étape sera désormais de créer un forum démocratique permanent pour l’élaboration des politiques appropriées.
82L’urgence d’un tel projet se manifeste presque chaque semaine par de nombreuses initiatives. Au mois de septembre 1999, les pdg des entreprises de communication les plus importantes au monde se rencontrèrent à Paris afin de discuter de la réglementation mondiale du commerce électronique. Si on s’en tient au communiqué de presse qui suivit la rencontre, un consensus fut atteint. Le Global Business Dialogue on Electronic Commerce (gbde) « invita les gouvernements et les organisations internationales » à les rejoindre afin de développer le potentiel extraordinaire du commerce en ligne : « un médium mondial comme l’Internet nécessite une approche politique mondiale », affirma le président du gbde, Thomas Middlehoff, également président et pdg d’une des plus grandes maisons d’édition, Bertelsmann AG. Selon ce dernier, « la position consensuelle du gbde rappelle qu’une réglementation nationale temporaire conflictuelle privera les consommateurs des avantages économiques d’un marché innovateur et sera une source d’insécurité pour eux ». Le gbde presse donc les gouvernements et les organisations internationales de coordonner leurs efforts pour réglementer le commerce électronique66.
83Il n’est pas exagéré de dire que pas une seule semaine ne se passe sans qu’une histoire comme celle-ci ne fasse la une des magazines d’affaires, sans parler de tout ce qui se passe en coulisses. Ce regroupement n’est qu’un exemple de l’environnement naissant des communications mondiales que j’ai évoqué dans cet article. Cet univers évolue dans un régime politique dispersé dont aucun centre n’est perceptible, bien que, de toute évidence, les grandes entreprises y jouent un rôle important et que d’autres acteurs soient « cordialement invités » à y prendre part.
84J’ai tenté de montrer que cette situation représente un défi important pour la réflexion sur les politiques de la communication et, d’une façon générale, sur les politiques publiques. Nous devons être préoccupés par les politiques de la communication en raison du rôle décisif joué par le nouvel environnement communicationnel dans la structuration d’à peu près tous les autres secteurs des politiques publiques dont l’État s’occupait traditionnellement. Par ailleurs, il est absolument faux de soutenir — l’exemple du gbde le montre bien — que la mondialisation de la communication signifie la fin des politiques. Ce sont plutôt les sites politiques qui ont changé, verticalement, du national au supranational, et, horizontalement, de l’État aux municipalités. L’influence du cadre mondial dans lequel la communication évolue doit donc être traitée comme un objectif stratégique crucial pour la communauté politique.
85On devra également accorder plus de crédit à l’idée selon laquelle l’environnement mondial de la communication, des ondes radio traditionnelles à l’espace, est une ressource publique qui doit être organisée, administrée et réglementée dans l’intérêt public mondial. Un accès élargi exigera des mécanismes de réglementations transnationaux appropriés, de même que des mécanismes de distribution équitable des bénéfices commerciaux mondiaux. Il faut également qu’ait lieu une appropriation internationale d’une partie de l’air et de l’espace extraterrestre, pour que soit distribuée en dehors du pays d’origine les produits créatifs viables qui n’ont actuellement aucun accès à la nouvelle agora mondiale, laquelle pourtant figure en bonne place dans tous les discours utopiques sur les nouvelles technologies de l’information.
86La convergence des technologies de la communication exigera une convergence parallèle des programmes et des politiques, de même qu’une invention de nouveaux modèles, de nouveaux concepts et une philosophie générale de la communication. Il s’agit là d’un projet politique global. Si la mondialisation signifie que les États-nations doivent redéfinir leur manière de procéder et que les capitaux transnationaux doivent être contrôlés au fur et à mesure qu’ils deviennent une force déterminante, cela signifie aussi que les agents démocratiques de la société civile devront s’organiser et se mobiliser par-delà les frontières, selon de nouveaux axes identitaires, des buts communs et en faisant appel à la solidarité. Cela a déjà commencé un peu partout dans le monde, notamment dans les réseaux communautaires et chez les praticiens et utilisateurs des nouveaux médias67.
87Les politiques de la communication menées par les entreprises ont été en tous points « mondialisées », mais celles-ci cherchent désormais une base légitime qu’elles ne peuvent recevoir que des États-nations, des organisations internationales et, en ultime instance, de la société civile. Autrement dit, il y a actuellement un espace politique dans lequel les politiques communicationnelles sont débattues par plusieurs intervenants. De nouvelles règles s'écrivent chaque jour. La question clé devient donc : de quelle manière la participation à ce nouvel environnement politique peut-elle être élargie ?
88La reconnaissance de l’importance de la communication pour le développement humain met l’accent sur l’importance d’un régime de gouvernance mondiale en matière de communication. À vrai dire, l’objet de cette discussion doit être vu essentiellement comme une question politique, faisant partie des efforts de démocratisation du nouveau système de gouvernance mondiale. La communication est essentielle au développement de ce que le théoricien politique David Held appelle « la démocratie cosmopolite »68.
89Tout cela souligne le besoin de concevoir des mécanismes démocratiques pour garantir l’accès au processus politique en matière de communication sur le plan mondial, sans quoi il sera bientôt impossible de promouvoir l’intérêt public au moyen d’interventions politiques dans n’importe quel secteur influencé par la communication.
90Actuellement, il existe quatre modèles (au moins) de réglementation de l’accès aux communications :
- Modèle libertaire, qui refuse toute réglementation. C’est l’approche dominante adoptée par la plupart des législations nationales (y compris le crtc canadien — l’Australie étant une importante exception) concernant les technologies numériques comme l’Internet. La raison en est que ces pays ne savent pas quoi faire ou comment le faire. Cette approche est également encouragée par les militants qui bénéficient grandement de ce système de communication ouvert. Mais l’histoire des technologies de la communication montre que, sans réglementation, ces moyens ne seront pas viables. Le modèle libertaire de gouvernance de l’Internet mènera finalement à des portes closes, à des accès restreints et à une communication limitée.
- L'autoréglementation. C’est généralement l’approche la plus favorisée par les magnats de l’industrie et la plus encouragée par la réglementation nationale. Elle est actuellement proposée comme une solution aux contenus abusifs et à la protection des droits, en se fondant sur l’argument que les consommateurs réagiront s’ils ne sont pas satisfaits. Mais comme nous l’avons vu avec l’exemple de la gbde, même les partisans de l’autoréglementation reconnaissent le besoin d’un cadre structurel mondial pour les activités communicationnelles, à l’intérieur duquel l’autoréglementation industrielle prendrait place.
- Le club fermé ou modèle institutionnel à géométrie variable. On retrouve cette approche dans des organisations telles que l’ocde, le g8 ou l’omc ; elle est également présente dans certaines institutions issues du monde des entreprises, à la suite du vacuum causé par le retrait des gouvernements à propos de la réglementation. Une de ces organisations, dont nous entendrons parler dans l’avenir, est l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (icann), créée à l’initiative du gouvernement américain en 1998 dans le but de diriger le trafic sur Internet.
- La longue marche à travers les institutions. Ce processus est lié au très vaste projet de démocratisation de la gouvernance mondiale, que l’on retrouve dans certaines des initiatives de la réforme des Nations Unies et dans les notions de « démocratie cosmopolite ». L’accès aux négociations politiques mondiales est encouragé de la même manière par d'importantes initiatives provenant d’agences multilatérales telles que l’unesco et l’uit, qui ont manifesté une certaine ouverture face aux préoccupations de la société civile et à l’inclusion de représentants des ong dans leurs activités.
91Compte tenu de l’analyse globale de cette étude, il semble que la dernière voie soit la plus indiquée. L’expérience canadienne en la matière est fondée sur la transparence et la participation publique, certaines des plus importantes réalisations au Canada étant le produit d’initiatives de la société civile. Ce sont là des valeurs qu’il faut pouvoir promouvoir sur le plan international.
92L'accent mis sur le rôle social et culturel des communications pourrait également fournir une base normative aux propositions que le Canada a tenté de développer dans les forums multilatéraux, comme c’est le cas pour le « nouvel instrument international » qui aurait pour objet de réduire l’impact du système omc sur la culture.
93Finalement, une approche politique globale selon cette ligne conductrice permettrait de redéfinir le rôle de l’État en matière de communication, autant sur le plan intérieur que transnational, tout en mettant davantage l’accent sur des questions spécifiques qui ne sont pas vraiment au programme actuellement.
94Dans le contexte présent de la mondialisation, la communication peut être la locomotive du développement humain ou n’être simplement qu’une autre technologie de pouvoir et de domination. Ce qu’elle sera n’est pas encore déterminé. C’est pourquoi les enjeux des débats politiques actuels sont si grands.
Notes de bas de page
1 Cité dans « Free Trade under Fire », in Financial Times, 11 octobre 1999, 1.
2 Voir Canada, Chambres des communes, Le Canada et l'avenir de l'Organisation mondiale du commerce. Pour un programme du millénaire qui sert l’intérêt public, Rapport du Comité permanent des Affaires étrangères et du Commerce international, Ottawa, Services du gouvernement du Canada, 1999.
3 Patrimoine Canada, Projet de loi C-55 : le rappel historique, Communiqué : « Le Canada et les États-Unis signent l’entente sur les périodiques », Ottawa, le 4 juin 1999. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.nlc-bnc.ca/6/24/S24-1011-f.html>
4 Une « liste brève » des secteurs problématiques et des sites qui définissent les politiques mondiales de la communication est incluse dans l’Appendice B.
5 Voir M. Raboy, « Communication Policy and Globalization as a Social Project », in A. Calabrese et J.-C. Burgelman (dir.), Communication, Citizenship, and Social Policy : Rethinking the Limits of the Welfare State, Lanham (MD), Rowman et Littlefield, 1999 ; et M. Raboy, « Global Communication Policy and the Realization of Human Rights », in R. G. Noll et M. E. Price (dir.), A Communications Cornucopia : Markle Foundation Essays on Information Policy, Washington (DC), Brookings Institution Press, 1998.
6 À cet égard, nous pouvons dire que les questions touchant la gouvernance de la communication sont des questions de « métagouvemance », c’est-à-dire des questions dont le résultat a des conséquences non seulement sur le secteur en question mais également sur d’autres secteurs.
7 Voir W. H. Reinicke, Global Public Policy : Governing without Government ?, Washington (DC), Brookings Institution Press, 1998.
8 Pour un tableau du problème et la manière dont il touche les politiques canadiennes, voir I. Bernier et R. Collins, « Politiques culturelles, intégration régionale et mondialisation », in Cahier-Médias, Québec, Centre d’Études sur les médias, 7 (juillet 1998).
9 Voir W. H. Reinicke, Global Public Policy, sur les stratégies de mise en place d’un mécanisme de « retrait » national dans le développement des politiques mondiales.
10 Pour une étude du déroulement de ce processus dans les politiques de diffusion canadiennes, voir M. Raboy, « Influencing Public Policy on Canadian Broadcasting », in Canadian Public Administration 38, 3 (1995), p. 411-432 ; et M. Raboy, « The Role of Public Consultation in Shaping the Canadian Broadcasting System », in Canadian Journal of Political Science, 28, 3 (1995), p. 455-477.
11 K. R. Higham, « The Politics of Culture in Canada : Creating an Environment for Maximising Human Development », article présenté à la rencontre du Canadian Cultural Research Network, Ottawa, 4 juin 1998, 8.
12 Ibid., p. 9.
13 Ce secteur est couvert par R. Deibert dans le chapitre 4 du présent ouvrage.
14 Dans les années 1960, le guru des communications, M. McLuhan — véritable apport canadien en matière de mondialisation s’il en fut —, parodia l’utilisation de technologies des communications par la défense militaire dans le nord canadien, en déclarant que le Canada était un système d’avertissement à distance, avant-coureur des tendances sociales et culturelles mondiales. Voir M. McLuhan et B. R. Powers, The Global Village, Toronto, Oxford University Press, 1989 ; et M. McLuhan (dir.), The McLuhan dew Line, New York, Human Development Corporation, 1968-1970.
15 Cette étude est le fruit d’une initiative du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (crshc) et du ministère fédéral des Communications (maintenant le Patrimoine canadien), intitulée « Le développement culturel dans le contexte d’une économie ouverte ». Voir M. Raboy, I. Bernier, F. Sauvageau et D. Atkinson, Développement culturel et mondialisation de l'économie : un enjeu démocratique, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1994.
16 M. Raboy, I. Bernier, F. Sauvageau et D. Atkinson, « Cultural Development and the Open Economy : A Democratic Issue and a Challenge to Public Policy », in Canadian Journal of Communication, 19, 3/4 (1994), p. 291-315.
17 Ibidem.
18 Les différentes références pour cette section sont : A. Appadurai, « Disjuncture and Difference in the Global Cultural Economy », in M. Featherstone (dir.), Global Culture : Nationalism, Globalization and Modernity, Londres, Sage Publications, 1993 ; D. Archibugi et D. Held, Cosmopolitan Democracy : An Agenda for a New World Order, Cambridge, Polity Press, 1995 ; M. Castells, La société en réseaux, Paris, Fayard, 2001 ; N. Chomsky, Year 501 : The Conquest Continues, Montréal, Black Rose Books, 1993 ; R. Falk, On Human Governance : Toward a New Global Politics, Cambridge, Polity Press, 1995 ; M. Featherstone (dir.), Global Culture : Nationalism, Globalization and Modernity, Londres, Sage Publications, 1993 ; H. H. Frederick, Global Communication and International Relations, Belmont, Wadsworth, 1993 ; J. Nederveen Pieterse, « Globalisation as Hybridisation », in International Sociology, 9, 2 (1994), p. 161-184 ; R. Robertson, Globalization : Social Theory and Global Culture, Londres, Sage Publications, 1992 ; I. Wallerstein, Geopolitics and Geoculture : Essays on the ChangingWorld-System, Cambridge, Cambridge University Press, 1991.
19 Une recherche effectuée sur le terme « mondialisation » ou « mondial » pour la période 1971-1995 par l’économiste de la Banque mondiale et auteur, Wolfgang H. Reinicke, n’a donné aucun résultat ; en 1995, Reinicke a produit 1200 occurrences. Voir Reinicke, Global Public Policy.
20 Ces statistiques proviennent d’un article de l'Economist de 1998. Les sept entreprises étaient Time-Warner (É.-U.), Disney (É.-U.), Viacom (É.-U.), Sony (Japon), Bertelsmann (Allemagne), News Corp. (G.-B./Australie) et Seagram (Canada). TimeWarner est depuis devenu aol-TimeWarner, et Seagram a été absorbé par Vivendi (France), mais l’idée de base de l’article de l'Economist demeure inchangée. Cf. E. Duncan, « Wheel of Fortune : A Survey of Technology and Entertainment », in The Economist, 21 (novembre 1998), p. 11.
21 Conseil de l’Union européenne, « Traité d’Amsterdam », Protocole sur le système de radiodiffusion publique dans les États membres, Bruxelles. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.europa.eu.int/eur-lex/en>
22 Voir B. Barber, Jihad vs. McWorld : mondialisation et intégrisme contre la démocratie, Desclée de Brouwer, 1996.
23 Samuel P. Huntington, Le choc des civilisations, Paris, Éditions Odile Jacob, 2000. Ces observations ont pris un nouveau sens, plus urgent, après les événements du 11 septembre 2001.
24 Voir, par exemple, la Conférence virtuelle « Le droit à communiquer et la communication des droits », présidée par Videazimut, 11 mai au 26 juin 1998. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <http://commposite.uqam.ca/videaz>
25 À moins d’indication contraire, les détails de cette section sont tirés de M. Raboy, Occasions ratées : Histoire de la politique canadienne de radiodiffusion, Montréal/Québec, Liber/Presses de l’Université Laval, 1996.
26 Ibid., p. 39.
27 Ibidem.
28 M. Raboy, Occasions ratées, p. 40.
29 Le cas des magazines à tirage dédoublé auquel on se référait au début du chapitre n’est qu’un exemple récent de ce phénomène.
30 Voir, par exemple, la littérature abondante sur le débat canadien autour des « politiques sur l’autoroute de l’information ». Quelques années après le lancement officiel de ce débat par le gouvernement, beaucoup de choses ont été dites ; il reste beaucoup de choses à lire, mais le Canada fonctionne toujours dans un vacuum politique quant aux objectifs et quant à l'orientation du développement de l’infrastructure en matière de communication.
31 Cité dans M. Raboy, Occasions ratées, 193.
32 Ibidem.
33 Le plus près auquel nous soyons parvenus pour le moment est la réponse du gouvernement au rapport préliminaire du Conseil consultatif sur l’autoroute de l’information (ccai). Ce document indique une orientation générale et plusieurs voies spécifiques que les politiques canadiennes de la communication pourraient prendre dans l’avenir ; mais il ne constitue pas le type de politiques globales qu’on attendait depuis longtemps. Les politiques nationales en matière de communication, comme dans bien d’autres secteurs, continuent de se faire sur une base ad hoc, souvent en réponse à une crise ou à des besoins conjecturaux. Voir Industrie Canada, La société canadienne à l'ère de l’information. Pour entrer de plain-pied dans le XXIe siècle, Ottawa, Ministère des Approvisionnements et des Services, 1996 ; Conseil consultatif sur l’autoroute de l’information, Rapport final du comité consultatif sur l’autoroute de l'information, Ottawa, Ministère des Approvisionnements et des Services, 1995 ; Conseil consultatif sur l'autoroute de l’information, Preparing Canada for a Digital World, Ottawa, Industrie Canada, 1997.
34 M. Raboy, « Cultural Sovereignty, Public Participation and Democratization of the Public Sphere : The Canadian Debate on the New Information Infrastructure », in Communications et stratégies, 21 (1996), p. 51-76 ; B. D. Abramson et M. Raboy, « Policy Globalization and the “Information Society” : A View from Canada », in Telecommunications Policy, 23, 10/11 (1999), p. 775-791.
35 A. Gore, « The Global Information Infrastructure : Forging a New Athenian Age of Democracy », in InterMedia, 22, 2 (1994), p. 4-6.
36 M. Raboy, « Influencing Public Policy on Canadian Broadcasting », in Canadian Public Administration, 38, 3 (1995), p. 411-432 ; M. Raboy, « The Role of Public Consultation in Shaping the Canadian Broadcasting System », in Canadian Journal of Political Science, 28, 3 (1995), p. 455-477.
37 Les détails de cette section sont tirés de C. J. Hamelink, The Politics of World Communication, Londres, Sage Publications, 1994 ; A. Mattelart, La mondialisation de la communication, Paris, Presses Universitaires de France, 1996.
38 Une clause fut élaborée pour la participation du secteur privé à la seconde conférence de l’organisation à Vienne en 1868 ; les membres non gouvernementaux, représentant les entreprises, furent admis dès 1871.
39 L’uit est composée actuellement de 184 pays participants et de 375 membres appartenant au secteur privé. Selon l’ancien directeur général, Pekka Tarjanne, le rôle du secteur privé dans l’uit est peut-être la seule question stratégique importante à laquelle elle doit faire face. Voir P. Tarjanne, « The Limits of National Sovereignty : Issues for the Governance of International Telecommunications », in W. H. Melody (dir.), Telecom Reform : Principles, Policies and Regulatory Practices, Lyngby, Technical University of Denmark, 1997, p. 41-50.
40 Voir, par exemple, le Conseil de l’Europe, The Media in a Democratic Society, Draft Resolutions and Draft Political Declaration, 4e Conférence ministérielle européenne sur la politique des communications de masse, Prague, 7-8 décembre 1994, mcm-cdmm (94) 3 prov. 1, Strasbourg, Conseil de l’Europe, 1994.
41 Voir J. Tomlinson, Cultural Imperialism : A Critical Introduction, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1991 ; J. Galtung et R. C. Vincent, Global Glasnost : Toward a New World Information and Communication Order?, Cresskill (NJ), Hampton Press, 1993.
42 unesco, Voix multiples, un seul monde, rapport de la Commission internationale d’étude sur les problèmes de la communication, présidée par Sean MacBride, Londres, Kogan Page, 1980.
43 Voir uit/unesco, The Right to Communicate : At What Price? Economic Constraints to the Effective Use of Telecommunications in Education, Science, Culture and in the Circulation of Information, Paris, itu/unesco, 1995. Cette étude mixte se demande dans quelle mesure les objectifs de société peuvent rejoindre les interventions commerciales sur le plan des télécommunications. Le rapport de l'agence représente un effort louable pour réduire l'écart entre les aspects techniques et socioculturels des politiques communicationnelles internationales.
44 unesco, « Nouvelle Stratégie des communications », adoptée par la conférence générale à sa 25e session, Paris, 1989. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.unesco.org>
45 unesco/onu, « Notre diversité culturelle créative », Rapport de la Commission mondiale pour la Culture et le Développement, présidée par Javier Pérez de Cuéllar, 1995.
46 unesco, « Action Plan for Cultural Policies for Development », adopté à la Conférence intergouvemementale sur les politiques culturelles pour le développement, Stockholm, 30 mars-2 avril 1998. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.unesco-sweden.org/conference>
47 En 1999, les fusions et acquisitions dans le domaine des télécommunications incluaient Deutsche Telekom/Telecom Italia (Europe), Bell Atlantic/gte (USA), at&t/TCI (USA), Ameritech/Bell Canada (US-Canada), at&t Canada/Metronet (Canada), BCTel/Telus (Canada), et les quatre compagnies de l’Atlantique (Canada).
48 Voir B. Kahin, « The Internet and the National Information Infrastructure », in B. Kahin et J. Keller (dir.), Public Access to the Internet, Cambridge (MA), mit Press, 1995, p. 3-23 ; onu, « The Global Information Infrastructure : Agenda for Cooperation », Washington, 1994. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) :
www.iitf.nist.gov/documents/docs/gii/giiagend.html
United States Information Agency, Toward a Global Information Infrastructure : The Promise of a New World Information Order, Washington (DC), usia Pamphlet Series, 1995.
49 Voir P. Aufderheide, Communications Policy and the Public Interest : The Telecommunications Act of 1996, New York, Guilford Press, 1999 ; W. Drake (dir.), The New Information Infrastructure : Strategies for U.S. Policy, New York, Twentieth Century Fund Press, 1995.
50 Conclusions de la conférence ministérielle des pays du G7, réunis les 26 et 27 février 1995 à Bruxelles. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) :
<http://www5conf.inria.fr/fich_html/slides/panels/Panel8/cadoux.html> et <http://www.internet.gouv.fr/txt/international/sommaire.html>
51 Les compagnies transnationales principales qui s'occupent des technologies de l'information et des communications ont, depuis, fondé la Global Information Infrastructure Commission (GIIC) (unilingue anglaise), afin de poursuivre leurs intérêts communs dans ce secteur. Parmi ces compagnies, on retrouve Mitsubishi, Motorola, Viacom, Time-Warner, Olivetti, Sprint, at&t, Nokia, Oracle, nec, Alcatel Alsthom, Teleglobe Canada, Nippon Telegraph and Telephone. Voir M. Venne, « Le secteur privé s’interroge : où mènent les inforoutes ? », in Le Devoir (Montréal), 12 février 1995.
52 Les organisations de la société civile ont toutefois joué un rôle de surveillance crucial envers le iim, assistant de manière périphérique aux rencontres comme celles de Bruxelles, faisant circuler de l’information et cherchant à se manifester par n’importe quel medium disponible. Voir, par exemple, Alain His (dir.), Communication and Multimedia for People : Moving into Social Empowerment over the Information Highway, Paris, Transversales Science Culture, 1996.
53 Cette impression est renforcée par la tendance à l’égard du développement du secteur privé dans le domaine des politiques culturelles. La plus récente avalanche de décisions du crtc concernant la télévision, publiées au mois de mai-juin 1999, confirme de manière univoque cette tendance. Cf. crtc, Avis public crtc 1999-97, « La politique télévisuelle du Canada : misons sur nos succès », crtc, Ottawa, 11 juin 1999. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.crtc.gc.ca>
54 Ceci est conforme au modèle de W. H. Reinicke qui touche la souveraineté interne et externe. W. H. Reinicke, Global Public Policy.
55 Au mois de septembre 1997, le Commissaire des télécommunications européennes, Martin Bangemann, auteur d’un modèle réputé pour la libéralisation de la communication, qui porte d’ailleurs son nom, demanda une « Charte internationale » en vue d’édifier un nouvel ordre mondial de gouvernance en matière de communications. En quelques jours, ces remarques furent adoptées par le conseiller de la Maison-Blanche, Ira Magaziner, qui affirma que les États-Unis croyaient à la nécessité d’un accord international sur la question des politiques informationnelles, « dont certaines doivent être des accords formels, d’autres des accords informels et des approches communes ». Cf. Suzanne Perry, « U.S. May Back Internet Charter, Not Formal Body », ZDNet News Channel (Reuters), 2 octobre 1997. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.zdnet.com>
Ce projet, qui conduira peut-être à un accord mondial sur la gouvernance en matière de communication, s'est développé lentement mais sûrement, et toujours derrière des portes closes. Nous avons là un autre exemple du besoin de transparence politique et de mécanismes démocratiques.
56 L’appui de l’opinion publique canadienne à cette prise de position fut confirmé en juin 1999 par le rapport du comité des Affaires étrangères de la Chambre des communes, auquel on s’est référé au début de ce chapitre. Cf. Canada, Chambre des communes, Le Canada et l'avenir de l'Organisation mondiale du commerce. Pour un programme du millénaire qui sert l'intérêt public, Rapport du comité permanent des Affaires étrangères et du Commerce international, Ottawa, Travaux publics et services gouvernementaux Canada, 1999.
57 gcsce (Groupe de consultations sectorielles sur le commerce extérieur), La culture canadienne dans le contexte de la mondialisation, Ottawa, février 1999. Disponible sur Internet (17 décembre 2001) : <www.dfait-maeci.gc.ca/tna-nac/canculture-f.asp>
58 Les propositions présentées à la conférence de Stockholm s’appuyèrent en grande partie sur le rapport remis en 1995 par la Commission mondiale de la culture et du développement. unesco/onu, « Notre diversité culturelle créative », Rapport de la Commission mondiale pour la Culture et le Développement présidée par Javier Pérez de Cuéllar, 1995 ; et unesco, Plan d'action sur les politiques culturelles pour le développement.
59 unesco, Plan d’action.
60 Le réseau fut la conséquence directe d’une rencontre des ministres responsables de la culture de près de vingt pays convoqués par la ministre du Patrimoine, Sheila Copps, à Ottawa en juin 1998 ; il avait pour but d'explorer les stratégies de négociations d'une exception culturelle générale dans les accords commerciaux internationaux. Voir Réseau international sur la politique culturelle, « Bienvenue au ripc ». Disponible sur Internet (29 janvier 2002) : <http://64.26.177.19/index_f.shtml>
61 Ibidem.
62 Incluant le Canada. Voir crtc, Radiodiffusion crtc 1999-84/Télécom crtc 99-14 du 17 mai 1999 intitulé Rapport sur les nouveaux médias. Dans cet avis public, le législateur canadien en matière de communication proclamait fièrement qu’il ne légiférerait pas sur les nouvelles activités médiatiques d’Internet.
63 Incluant, entre autres, le problème de la préservation des cultures nationale, régionale et locale. Mathiason et Kuhlman citent la question de l’assignation des noms de domaines comme se situant « entre les questions techniques de la gestion de l’Internet et les questions économiques et sociales qui en découlent ». John R. Mathiason et Charles C. Kuhlman, « An International Communication Policy : The Internet, International Regulation and New Policy Structures » (inédit, New York University, 1999), 12.
64 Ibidem.
65 Javnost/The Public, M. Raboy, « Global Media Policy : A Symposium on Issues and Strategies », 5, 4 (1998).
66 PR Newswire, « gbde Paris Meeting World Business Leaders for the First Time Agreed on the Fundamental Principles of Global Electronic Commerce », 13 septembre 1999. Disponible sur Internet (15 septembre 1999) : <www.prnewswire.com>
67 Des exemples de tels réseaux sont : l’Association for Progressive Communication, qui réunit les militants de l’Internet ; Videazimut, une ong internationale de ceux qui pratiquent la vidéo ; et amarc, la World Association of Community-Oriented Radio Broadcasters. La People’s Communication Charter, pour prendre un autre exemple, a enregistré des milliers de membres depuis son lancement en 1993 (www.pccharter.net). En 1999, une nouvelle initiative mondiale fut lancée, ayant pour objectif de construire ce que son slogan appelait « A Global Movement for People’s Voices in Media and Communication in the 21st Century » (www.comunica.org/v21>) (17 décembre 2001).
68 Voir D. Archibugi et D. Held, Cosmopolitan Democracy.
Auteur
Marc Raboy enseigne au département des communications de l’Université de Montréal, où il dirige le Laboratoire de recherche sur les politiques des communications depuis 1993. Il est l’auteur d’une douzaine de livres consacrés aux médias, parmi lesquels on peut citer Missed Opportunities : The Story of Canada’s Broadcasting Policy (Montréal, McGill-Queen’s University Press, 1990) et Public Broadcasting for the Twenty-first Century (Luton (G.-B.), University of Luton Press, 1996). Il est aussi chercheur associé au Programme d’études comparées sur le droit et les politiques relatifs aux médias de l’Université d’Oxford. Ancien président de l’Association canadienne de communication, il a été consultant auprès de la Commission mondiale sur la culture et le développement de l’UNESCO, de l’Institut européen pour les médias et de la Japan Broadcasting Corporation, ainsi qu’auprès d’organisations des secteurs public et privé au Canada. Son dernier livre, Global Media Policy for the New Millennium (Luton, University of Luton Press) est paru en 2002.
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