Postface
p. 187-188
Texte intégral
1La pertinence d’une nouvelle théorie est souvent difficile à évaluer, et il est toujours risqué d’en prédire les conséquences à long terme. Cela est vrai dans tous les domaines, les mathématiques et l’informatique ne faisant pas exception. En présentant les principes du calcul souple, je me suis donc concentré sur des concepts généralement reconnus et sur des techniques éprouvées, me tenant résolument éloigné du dernier engouement à la mode.
2Quelquefois, je me suis senti submergé par les innombrables articles, livres et exposés présentés dans des conférences partout dans le monde sur le sujet. Mais cette abondance même a servi à me rassurer, car la raison qui explique un si grand nombre d’approches différentes, de techniques spéciales, de solutions partielles, de nouvelles idées, est sans doute qu’une théorie définitive (si tant est qu’elle existe) n’a pas encore été trouvée.
3Pour comparer le calcul souple et le calcul classique, le tableau suivant (incomplet) peut être utile :
Le calcul classique | Le calcul souple |
•a besoin d’un programme préalable | •peut apprendre son propre programme (réseau de neurones) |
•utilise une logique bivalente | •utilise une logique polyvalente (logique floue) |
Le calcul classique | Le calcul souple |
•déterminisme | •incorpore des éléments aléatoires (algorithmes génétiques) |
•traite les données exactes | •peut traiter les données ambiguës (logique floue et réseau de neurones) |
•calcul séquentiel | •calcul en parallèle (a.g., r. de n.) |
•des réponses précises | •des réponses approximatives (I.f.) |
4Une des caractéristiques propre à la logique floue, aux réseaux de neurones et aux algorithmes génétiques est la dépendance de ces techniques visà-vis des calculs massifs et rapides. Malgré l’importance des théories mathématiques sous-jacentes, la théorie à elle seule est de peu d’utilité sans le calcul à haute vitesse qui sert à sa mise en pratique. Le rôle des merveilles technologiques autres que les ordinateurs (les détecteurs, les spectroscopes, etc.) dans la mise en oeuvre des théories ne saurait être ignoré.
5Les trois approches non classiques du calcul dont j’ai discuté dans ce livre ne sont pas les seules à être utilisées et développées. On peut considérer les algorithmes génétiques comme un cas spécial d’un domaine plus large et encore mal défini appelé l’informatique évolutionniste. Les deux autres possibilités sont l’informatique biochimique, qui se sert des protéines comme de portes logiques et pour le stockage de l’information, et l’exploitation du chaos—une théorie bien à la mode il y a dix ans—qui est artificiellement générée.
6J’espère ne pas avoir laissé la fausse impression que les mathématiques traditionnelles ne sont pas à la hauteur ! Un nouveau domaine où les mathématiques (précises, exactes) sont actuellement employées avec succès en informatique est la construction de programmes, où il y a un intérêt croissant pour les méthodes formelles, basées sur les mathématiques, dans la conception des algorithmes et dans la création et la vérification des logiciels.
7Actuellement (c’est-à-dire en 1997), il y a une tendance vers ce qu’on appelle les systèmes hybrides, qui combinent les avantages de deux ou plusieurs techniques. Il s’agit là d’une bonne nouvelle. J’ai rencontré trop souvent des chercheurs convaincus qu’une seule méthode (la leur, évidemment) détenait la clé des mystères de l’univers. Les scientifiques seraient bien avisés encore une fois d’imiter la nature et de profiter des possibilités fournies par la diversité des approches et des méthodes. Ce faisant, ils permettraient de résoudre un plus grand nombre de problèmes, et cela dans l’intérêt du plus grand nombre de gens.
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