60. La nécessaire autonomie des commissions scolaires
1962
p. 495-505
Résumé
Plaidant en faveur de l’autonomie des commissions scolaires, définies comme les mandataires directes des parents, réitérant la nécessité de préserver la confessionnalité du système d’éducation, la Fédération des commissions scolaires s’inspire d’une conception dualiste de la gestion de l’éducation. D’une part, l’État doit assumer un « rôle prépondérant dans l’attribution des sommes d’argent nécessaires à l’éducation, et dans la surveillance de l’utilisation des fonds publics ainsi votés par te Parlement ». Mais, d’autre part, la responsabilité académique et pédagogique n’est pas vraiment du ressort de l’État : cela appartient aux parents, à l’Église et aux éducateurs qui doivent ensemble « définir une philosophie de l’éducation, en définir la politique, orienter les études et prendre les décisions académiques ». La Fédération n’envisage donc nullement la création d’un ministère de l’éducation. Un peu comme les Ligues du Sacré-Cœur, elle craint que « les interventions grandissantes de l’État risquent de nous plonger dans l’étatisme ». Aussi la Fédération veut-elle préserver et accroître les compétences des comités catholique et protestant du Conseil de l’instruction publique qui « détiendront l’autorité réelle et formeront le rôle législatif de l’enseignement. Ils seront, en somme, les seuls à orienter l’éducation dans la province ». Un service exécutif tiendrait lieu de ministère et appliquerait les décisions des comités confessionnels. Au vu des positions d’un organisme comme la Fédération des commissions scolaires, on apprécie mieux la force des oppositions qu’a dû surmonter le gouvernement pour créer un ministère de l’éducation.
Note de l’éditeur
Source : Mémoire, p. 17-19, 22-23, 31-41, 56-57.
Texte intégral
RÔLE DES COMMISSIONS SCOLAIRES
Nature et importance de ce rôle
1Comment les parents peuvent-ils s’acquitter de leurs obligations ? Devant l’État qui possède les moyens voulus pour exercer ses droits, comment les parents peuvent-ils défendre les leurs ?
2Il est évident que l’État, même s’il a été mandaté par le peuple, ne représente pas directement les parents dans ce domaine. Car nous venons de voir que les parents et l’État possèdent en éducation, des droits et des devoirs bien distincts.
3Les parents ont donc besoin, pour faire entendre leur voix, d’un organisme bien à eux, qu’ils seront seuls à constituer et à contrôler. Cet organisme existe, dans notre Province, sous la forme de commissions scolaires locales. Leur rôle, parce qu’il est intimement lié à celui de la famille, est donc d’une extrême importance.
4Si nos pères n’avaient pas déjà eu la prévoyance de créer le système actuel de commissions scolaires, la recommandation la plus urgente de notre mémoire aurait été aujourd’hui, d’en réclamer l’établissement.
5Tous les parents peuvent et doivent concourir à l’élection des commissaires d’écoles, qui, étant censés être les plus sages de la communauté, reçoivent des parents le mandat de veiller à l’éducation des enfants. La commission scolaire devient donc le corps intermédiaire indispensable entre, d’une part, les parents qu’elle représente et, d’autre part, l’autorité administrative qui impose des lois ou conseille les parents dans l’exercice de leurs fonctions.
6C’est encore en vertu des obligations inaliénables des parents que les commissions scolaires doivent être établies d’abord au niveau de la communauté locale ; car c’est le seul niveau qui permette une action efficace au plus grand nombre possible de parents.
7Ainsi, la décentralisation administrative en matière scolaire repose d’abord sur le droit des parents et sur la volonté d’association de la communauté locale. De sorte qu’en attribuant une forme juridique et des pouvoirs d’ordre public à cette association, la législature ne fait que reconnaître un droit naturel et lui fournir la possibilité de l’exercer civilement.
Les écoles appartiennent aux parents
8Nous tenons à faire noter ici que les écoles relevant des commissions scolaires n’appartiennent aucunement à l’État. Ce sont des écoles publiques, relevant du droit commun, et dont la propriété repose entre les mains des parents de la communauté locale.
9Juridiquement, l’État n’a pas à se mêler plus de l’administration de nos écoles qu’il n’aurait droit d’intervenir dans la construction d’un hôtel de ville ou dans les affaires d’une municipalité. Dans un cas comme dans l’autre, l’État provincial ne peut exercer de contrôle que dans la seule mesure où on l’appelle à verser des subsides. (Nous le verrons, d’ailleurs, un peu plus loin en examinant la question de l’autonomie.)
10Ainsi, les commissaires d’écoles, élus par une population locale pour administrer les écoles de la communauté locale, constituent un gouvernement aussi authentiquement démocratique que le gouvernement municipal et que le gouvernement provincial. Ce « gouvernement scolaire » lève des impôts et utilise l’argent des contribuables pour fonder et maintenir des écoles qui deviennent de fait et en loi la propriété des parents de la communauté locale.
11S’il fallait que l’État provincial, versant des subsides, utilise son droit de contrôle de manière à anéantir la liberté des commissions scolaires, il agirait de façon abusive et violerait les droits fondamentaux des parents.
Autonomie des commissions scolaires
12De tout ceci, il découle que les commissaires d’écoles, élus par les parents d’une localité bien déterminée, doivent, devant eux, répondre de leur mandat. Or, puisque les commissaires doivent ainsi rendre des comptes, il faut leur reconnaître une certaine liberté d’action, qui correspond, d’ailleurs, aux droits des parents en éducation. Telles sont les bases sur lesquelles nous fondons le droit des commissions scolaires à leur autonomie envers le pouvoir central.
13[...]
14Dans la conjoncture actuelle, au moment où l’aide financière de l’État est plus nécessaire que jamais au progrès de l’éducation, il devient impérieux de rappeler que celle-ci relève en premier lieu des parents et, par extension, des commissions scolaires, en autant qu’il s’agisse des cours primaire et secondaire.
15C’est dire que, tout en obligeant l’État à une aide financière considérable, on doit également obtenir de lui qu’il la fournisse de manière à ne pas diminuer (ou le moins possible) l’autonomie administrative des commissions scolaires.
16[...]
LA STRUCTURE ADMINISTRATIVE
17Les cadres administratifs de notre système d’enseignement doivent correspondre le mieux possible aux droits respectifs de ceux qui sont responsables de l’éducation des enfants. Le contraire serait illogique et injuste.
18Ce principe vaut toujours, mais la difficulté consiste à l’interpréter convenablement dans un contexte social en pleine évolution.
19[...]
Confessionnalité
20Ces institutions, ou ces structures, nous demandons qu’elles soient confessionnelles. D’ailleurs, elles le sont déjà : nous voulons qu’elles le demeurent.
21Pour commencer, tel est le vœu de l’immense majorité des citoyens de cette province. À preuve, le témoignage que nous inscrivons ici comme étant la volonté des parents catholiques qui nous ont nommés commissaires d’écoles. Ces parents forment, évidemment, la très grande majorité de la population civile et leur voix, à elle seule, devrait suffire à indiquer dans quel sens le Parlement devra légiférer. Au surplus, nous croyons bien que les parents protestants partagent nos sentiments.
22Ceci étant dit, rien n’empêche qu’un enseignement non confessionnel puisse être établi en marge de l’enseignement confessionnel. Nous reconnaissons aux parents qui le désirent le droit de faire élever leurs enfants hors des groupes confessionnels. Et nous ne posons aucune objection à ce que des écoles privées, subventionnées par l’État, soient mises à la disposition de ces enfants, pourvu qu’ils soient assez nombreux pour en justifier l’existence. Mais tant qu’ils resteront une infime exception, ils ne pourront blâmer personne ni faire autrement que d’être traités comme des cas exceptionnels.
23Il y a beaucoup plus : Nous tenons au caractère confessionnel des structures de l’enseignement, parce que nous avons la conviction que l’éducation d’un enfant, tient surtout à son développement moral. Or, il est infiniment plus facile d’atteindre à ce développement si l’on est en mesure de l’asseoir sur des principes religieux — par conséquent, d’envisager l’enseignement sous le signe confessionnel.
Rôle des responsables
24Nous devons laisser à l’État un rôle prépondérant dans l’attribution des sommes d’argent nécessaires à l’éducation et dans la surveillance de l’utilisation des fonds publics ainsi votés par le Parlement. C’est, d’ailleurs, sa responsabilité propre et, donc, son droit de le faire — d’autant plus évident que l’aide financière à l’éducation peut représenter le tiers du budget gouvernemental.
25Par ailleurs, il revient surtout aux parents, à l’Église et aux éducateurs de définir une philosophie de l’éducation, d’en établir la politique, d’orienter les études et de prendre les décisions d’ordre académique.
26Mais nous croyons que le rôle prépondérant des uns et des autres, selon le cas, doit toujours appeler la collaboration de la partie minoritaire. De manière à ce que l’État participe d’une certaine manière à l’orientation pédagogique, comme les autres devront participer à l’établissement et à la surveillance du budget.
Notre suggestion (en résumé)
27Comme conclusion logique de ce qui précède, nous proposons l’adoption des mesures suivantes :
28 a. — Maintenir, au centre du système, le Comité catholique et le Comité protestant. Ils détiendront l’autorité réelle et ils formeront le côté législatif (pris au sens large) de l’enseignement. Ils seront, en somme, les seuls à orienter l’éducation dans la Province et à décider des mesures administratives qui seront nécessaires pour atteindre les fins qu’ils auront eux-mêmes définies.
29Modifier leur composition actuelle pour que, au Comité catholique, les neuf dixièmes des membres soient les représentants des parents, de l’Église et des éducateurs ; confier à l’État (dans sa branche exécutive) la nomination du dernier dixième de la représentation.
30Créer un Comité de l’enseignement spécialisé, groupant les écoles que l’État dirige déjà dans divers ministères. Donner à l’État la moitié de la représentation au sein de ce Comité ; en confier la seconde moitié aux délégués des autres Comités, des associations patronales et ouvrières, ainsi que des instituteurs de l’enseignement spécialisé.
31Limiter le temps pendant lequel les membres des Comités exerceront leur mandat.
32Subdiviser les Comités (sauf celui de l’enseignement spécialisé) selon la culture française ou anglaise. Simplifier leur tâche en confiant à des corps subalternes (commissions et sous-commissions) les décisions de routine.
33Changer le nom du Conseil de l’Instruction Publique en celui de « Conseil de l’Éducation ». Donner comme fonction essentielle à ce Conseil d’agir comme organisme de liaison et de coordination générales. Son président (remplaçant le Surintendant actuel) et ses membres représenteront les trois Comités et seront, eux aussi, nommés pour une période de temps déterminée.
34 b. — Créer, au même palier que les Comités, un « Service exécutif » chargé d’appliquer les décisions émanant des Comités, en tant que ces décisions touchent l’aspect technique (non pédagogique) et financier de l’éducation.
35Confier au Service exécutif les pouvoirs que le Ministre de la jeunesse et le Département de l’Instruction Publique détiennent actuellement dans ce domaine.
36Demander au Gouvernement de nommer la moitié des membres du Service exécutif. Attribuer l’autre moitié aux délégués des Comités.
37 c. — Garder les universités hors des cadres administratifs officiels, mais inviter l’Association provinciale des collèges et des universités à déléguer des représentants au Conseil de l’éducation.
38[...]
Autorité pédagogique et autorité exécutive
39L’autorité pédagogique est exercée par les Comités (catholique et protestant), où le Gouvernement ne groupe qu’un dixième des membres. L’autorité exécutive, sauf en matières pédagogiques, est assumée par le Service exécutif, où le Gouvernement nomme la moitié des membres.
40Ainsi, du côté pédagogique, l’État peut faire valoir ses points de vue et surveiller les progrès de l’éducation, tout en demeurant impuissant à diriger le système à lui tout seul.
41Par contre, dans l’administration des fonds publics qu’il reçoit du Parlement, la branche exécutive de l’État obtient une voix majeure ; ce qui n’empêche pas les intéressés de faire entendre la leur.
42De cette manière, l’État ne peut pas instaurer seul une politique de l’éducation ; quoiqu’il ait beaucoup de facilité pour bloquer celle qui ne lui conviendrait pas. En cas de conflit, le problème serait donc immédiatement porté devant l’opinion publique.
Rôle et composition du Conseil
43Le Conseil ne joue surtout qu’un rôle de coordination entre, d’une part, les travaux pédagogiques des Comités et, d’autre part, l’application par le Service exécutif des projets décidés par les Comités.
44Nous lui confions, de plus, le soin de représenter les Comités auprès de la Chambre qui peut, lorsque cela lui plaît, siéger en Comité parlementaire et entendre le président ou les autres membres du Conseil de l’éducation.
45Le Conseil doit aussi définir les normes générales de l’enseignement et se charger des travaux de recherche. Il a encore comme tâche celle de sanctionner l’existence des nouvelles universités et des écoles, neutres ou multi-confessionnelles, qu’il y aurait lieu d’établir, éventuellement — comme de diriger l’enseignement qui serait donné dans ces écoles.
46C’est enfin au Conseil que revient le droit exclusif de nommer et de rétribuer, à même son budget, les fonctionnaires affectés à son service, comme à celui des Comités et des corps qui en dépendent.
47[...]
Rôle et composition des Comités
48Les Comités sont, avec le Service exécutif, le centre nerveux de tout le système. Les Comités, suivant des normes émanant du Conseil et à l’élaboration desquelles ils auront participé, établissent une philosophie de l’enseignement et en définissent l’orientation sur une base confessionnelle.
49Les Comités agissent par l’entremise de leurs sous-comités, commissions et sous-commissions dont les décisions, chacune dans leur domaine, sont finales à moins que le Comité ne les désavoue dans une période limitée (maximum d’un mois).
50Les Comités ont juridiction sur l’ensemble de l’enseignement public, primaire et secondaire. Leur juridiction s’étend aussi sur les écoles privées de même niveau, mais uniquement pour « reconnaître », par l’entremise d’une sous-commission appropriée, qu’elles se conforment à certaines normes essentielles ; ce qui permettrait à ces écoles de recevoir des octrois au même titre que les écoles publiques.
51[...]
Rôle du Service exécutif
52Dans notre esprit, ce Service joue le rôle de, ou remplace, ou simplement désigne l’actuel ministère de la Jeunesse. Il en conserve toutes les attributions, sauf celles qui ont trait à l’aspect pédagogique de l’enseignement (v.g. les recherches). Le ministre lui-même pourrait fort bien continuer à le diriger.
53Comme son nom l’indique, le Service exécutif est chargé d’exécuter la politique et les décisions des Comités — dont les résolutions lui parviennent formellement par l’entremise du Conseil et, officieusement, par celle des délégués de l’État au sein des Comités.
54Étant donné que l’exécution d’une politique générale de l’éducation oblige l’État à des octrois considérables, il est plus normal que jamais qu’il préside lui-même à leur distribution et en surveille l’utilisation.
55C’est à cause de cela que nous reconnaissons au Cabinet, ou au Ministre responsable de l’éducation, le droit de nommer la moitié des membres du Service exécutif. Pour une part, celui-ci recevra donc ses instructions du Conseil de l’éducation ; pour une autre, ce sera directement du Cabinet.
56Il revient encore au Service exécutif la tâche d’établir le budget général de l’éducation ; puis de le soumettre à l’approbation du Cabinet et du Parlement, par l’entremise du Ministre chargé de l’éducation.
57Ainsi, le Conseil et les Comités peuvent concentrer tous leurs travaux sur les aspects pédagogiques de l’enseignement — tout en nommant leurs porte-parole au sein du Service exécutif, comme l’État possède les siens dans les Comités.
58Le Service exécutif sera subdivisé en deux sous-services. L’un traitera des questions purement techniques, telles que les problèmes de construction. L’autre s’occupera d’administration et de finances.
59Ce dernier sous-service comprendra autant de secteurs que l’on comptera de sous-commissions relevant du Comité catholique. Il y aura donc le sous-service de l’enseignement primaire, celui de l’enseignement secondaire, etc. Chacun de ces sous-services devra recevoir comme membre un délégué de la sous-commission correspondante.
Liens juridiques avec le Parlement et le Cabinet
60Il est évident que l’Assemblée législative doit prendre, en vue du bien commun, les mesures voulues pour assurer une éducation suffisante aux enfants de notre Province et pour protéger les droits de la famille et de l’Église en ce domaine.
61[...]
62Mais, à notre avis, cela ne veut pas dire que le Parlement ne puisse pas déléguer certains de ses pouvoirs à des organismes subalternes tels que l’actuel Conseil de l’Instruction Publique ou celui que nous désignons ici, pour le remplacer, sous le nom de Conseil de l’éducation.
63En fait, nous soutenons que, si le Parlement le désire, les décisions du Conseil n’auront aucunement besoin de recevoir la sanction du lieutenant-gouverneur pour devenir mandataires. C’est que le Parlement aura permis au Conseil, non de légiférer, mais d’adopter des règlements qui auront les mêmes effets qu’une loi.
64Par conséquent, il n’est pas nécessaire de créer (en la personne d’un ministre, par exemple) un lien ou une représentation juridique entre le Conseil et le Parlement ni entre le Conseil et le Cabinet. Quant aux liens d’ordre pratique, nécessaires au bon fonctionnement du système, ils seront assurés par les représentants de l’État aux Comités — et vice versa, par la présence des délégués des Comités au Service exécutif.
65[...]
66Ainsi, du point de vue technique et financier, le Parlement contrôle, par l’entremise du Cabinet et du Service exécutif, l’emploi des fonds publics qu’il aura décidé d’affecter à l’éducation. Pour ce qui est de l’aspect académique de l’enseignement, nous suggérons que le Parlement délègue ses pouvoirs entre les mains d’un Conseil de l’éducation, autonome et distinct du Parlement.
67En cas de conflit entre le Gouvernement et le Conseil, le premier possède toujours un genre de veto sur les décisions du second — en ce sens qu’il peut couper les vivres à ce dernier. Mais, vice versa le Conseil et les Comités peuvent empêcher le Cabinet d’imposer une orientation pédagogique ou des mesures académiques dont ils ne voudraient pas.
68Par ailleurs, le Parlement, qui détient seul l’ensemble des pouvoirs législatifs, pourra siéger en Comité et entendre les représentants du Conseil. Il serait alors loisible au Parlement, donnant raison au Conseil, de forcer le Gouvernement à l’action — ou, donnant tort au Conseil, de légiférer en sens contraire et, même, de restreindre les pouvoirs du Conseil.
69Advenant un conflit entre le Conseil et le Parlement lui-même, il reviendrait alors à l’opinion publique, s’exprimant par voie de referendum ou au moment des élections générales, de trancher le débat en renversant le Gouvernement ou en forçant la démission des membres du Conseil et des Comités.
70[...]
Les subventions
71Nous l’avons vu, l’appui financier de l’État est devenu indispensable. Mais, quelle que soit l’importance de cet appui, on doit toujours se rappeler que le Gouvernement est obligé de le fournir. Car, s’il reconnaît aux commissions scolaires l’obligation de dispenser l’enseignement jusqu’à un certain niveau, il se reconnaît à lui-même, concurremment, l’obligation d’aider les commissions scolaires à remplir leur tâche.
72L’État, gardien du bien commun et responsable du trésor public, doit évidemment établir des normes et surveiller l’emploi des fonds qu’il distribue. Mais en les distribuant, il ne fait pas de charité ni de faveur ; il ne fait que retourner aux parents (par l’entremise des commissions scolaires) des sommes d’argent qui leur appartiennent. Ce sont là des vérités que nous tenons à rappeler au moment de commenter brièvement une politique de subventions.
73En accord avec ces principes et avec la nécessité de préserver l’autonomie des commissions scolaires, il nous apparaît indispensable que les octrois possèdent, avant tout, un caractère statutaire (régulier).
74Les octrois doivent être établis en tenant compte du nombre des élèves dans une commission scolaire donnée, de ses revenus, de la densité de la population et de sa richesse relative. Ainsi, doit-on souhaiter que certaines commissions scolaires reçoivent des octrois plus élevés que leurs voisines. Mais il est nécessaire que toutes conservent une liberté identique devant le pouvoir central. Une liberté qui permet aux commissaires de rendre compte de leurs actes aux parents qui les ont élus.
75[...]
76Ainsi, tout en gardant sur l’emploi des fonds publics la décision finale qui lui revient de droit, le Gouvernement pourra se prévaloir des conseils de gens venus de l’extérieur, parmi lesquels on devra compter des commissaires d’écoles. Ces derniers pourront alors, de leur côté, participer à l’établissement d’une politique d’octrois gouvernementaux — et la mesure de cette participation augmentera celle de l’autonomie réelle des commissions scolaires.
77Il reste que, si certains octrois doivent demeurer discrétionnaires, il faudrait en limiter le nombre au strict minimum. Encore ici, la présence de membres extra-gouvernementaux au sein du corps chargé de distribuer les octrois diminuera dans une large mesure le danger de faire intervenir la politique dans les questions d’éducation.
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