Les convictions de Jean Philopon et la date de son Commentaire aux Météorologiques
p. 23-69
Note de l’éditeur
Publication originale : Évrard Étienne, « Les Convictions religieuses de Jean Philopon et la date de son Commentaire aux Météorologiques », Bulletin de l’Académie royale de Belgique, Classe des Lettres, 1953, vol. 39, pp. 299-357.
Texte intégral
1La chronologie de Jean Philopon repose sur quelques données sûres, mais peu nombreuses. Je rappellerai celles qui concernent les deux groupes d’œuvres qu’utilise cette note : les Commentaires sur Aristote et les traités philosophico-théologiques ayant trait à l’éternité du monde et à sa création. Des ouvrages de la série exégétique, seul le Commentaire à la Physique est bien daté : il fut écrit en 5171. Le second groupe est mieux partagé : nous savons que le Contre Proclus fut composé en 5292 ; quant au De Opificio mundi, il se situe entre 557 et 560, puisque son dédicataire, le patriarche monophysite Serge, occupa le siège d’Antioche pendant cette période3 ; [300] en revanche, nous ignorons la date exacte du Contre Aristote4 ; notons encore que les trois derniers écrits manifestent la foi chrétienne de leur auteur5. Tels sont les seuls renseignements précis dont nous disposons.
2Plus vagues déjà, mais pourtant précieux sont les indices qui permettent de reconstituer la chronologie relative à l’intérieur de chacun des deux groupes. Pour ce qui concerne le premier, Philopon expose lui-même l’ordre à suivre dans l’explication des œuvres d’Aristote ; de plus, il multiplie les renvois d’un Commentaire à l’autre. D’après ces indications, Gudeman pense que notre auteur expliqua successivement les traités logiques, le De anima, la Physique, peut-être le De caelo, le De generatione et corrup[301]tione et enfin les Météorologiques6. Mais comme il a commis quelques erreurs dans l’interprétation des références données par Philopon, nous ne pouvons accepter ses conclusions qu’après vérification7. Quant au groupe des œuvres théologiques, le Contre Aristote y est postérieur au Contre Proclus8.
3Vient ensuite le problème des relations chronologiques entre la série exégétique et la série théologique. La solution qu’en propose Gudeman est liée à une hypothèse sur les convictions religieuses de Philopon et à des remarques sur son attitude à l’égard de certains philosophes. D’après le savant allemand, notre exégète aurait écrit ses Commentaires sur Aristote alors qu’il était encore païen. Qu’il l’ait été semble naturel puisqu’il fut l’élève du païen Ammonius. Quant aux quelques expressions apparemment chrétiennes sur lesquelles Busse9 avait attiré l’attention, elles n’auraient aucune valeur probante. En réalité, les Commentaires ne contiendraient aucune trace certaine de conceptions propres à la religion nouvelle et ce fait prouverait que leur auteur n’en était pas un adepte10.
4Toujours suivant Gudeman, les Commentaires seraient en tout cas une œuvre ancienne : les quelques attaques qu’ils contiennent contre le Stagirite sont d’un ton trop modéré pour qu’on puisse les croire contemporains du Contre Aristote ; autre indice analogue, ils ne qualifieraient pas Jamblique de divin s’ils étaient de la même époque que l’écrit Sur les statues dirigé contre ce penseur11.
5[302] Après avoir écrit la longue série de ses Commentaires, Philopon, vers 520, se serait converti. Devenu chrétien, il aurait d’abord tenté une conciliation de l’aristotélisme et du christianisme, par exemple dans le De Opificio mundi et dans l’Arbitre. Plus tard, il aurait répudié complètement les doctrines péripatéticiennes et composé le Contre Aristote12.
6Telle est, rapidement exposée, la reconstruction de Gudeman. Deux thèses y retiennent l’attention : celle de l’antériorité du groupe des Commentaires par rapport aux œuvres philosophico-théologiques et celle de la coïncidence de ce groupe avec une période païenne précédant une conversion au christianisme. La plupart des érudits s’y rallient pleinement13. Quelques-uns n’en tiennent pas compte, soit qu’ils les ignorent ou qu’ils les négligent14. Un seul, à ma connaissance, les conteste quelque peu : Hermann, s’il ne critique pas la chronologie de Gudeman, se demande sur quelles raisons se fonde l’hypothèse d’une période païenne dans la vie de Philopon ; mais il n’appuie sa remarque d’aucun argument ; la question n’importait d’ailleurs guère à [303] son travail15. Il faut encore noter que Wallies, tout en se ralliant aux conclusions rappelées ci-dessus, émet quelques critiques de détail : il reproche à Gudeman d’accorder trop d’importance à la qualification de divin appliquée à Jamblique ; il estime aussi que Philopon, encore que païen, manifeste dès l’époque des Commentaires une tendance à se rapprocher d’idées chrétiennes16.
7Dans cette note, je voudrais contrôler la valeur des conceptions de Gudeman sur les deux points que j’ai indiqués plus haut. L’étude de quelques problèmes philosophiques et des diverses solutions qu’en proposa Philopon me permettra de montrer que, pour les doctrines, le Commentaire aux Météorologiques se situe entre le Contre Proclus et le Contre Aristote. La chronologie que suggère cette remarque est confirmée par l’analyse des références vagues du même Commentaire à des œuvres que Philopon ne désigne pas explicitement. Dès lors, l’absence de doctrines spécifiquement chrétiennes dans les Commentaires ne peut être interprétée comme une preuve de paganisme et l’hypothèse de la conversion de Philopon perd l’un des fondements sur lesquels Gudeman l’a édifiée. J’espère en outre montrer qu’aucune autre raison ne la justifie et que d’ailleurs l’influence du christianisme est loin de faire défaut dans les Commentaires. Quant à l’attitude de notre auteur à l’égard des philosophes païens, elle n’a pas la signification que lui prête Gudeman et s’accorde parfaitement avec la thèse que je propose. D’après les résultats de ces enquêtes, je pourrai enfin donner, de l’activité littéraire de Philopon, de l’évolution de sa pensée et des rapports entre ses écrits et les [304] graves événements qui marquèrent la vie philosophique de son époque, une vue d’ensemble que je crois plus conforme à la réalité que celle de Gudeman.
8Au cours de ce travail, je devrai me fonder sur des passages de certains Commentaires, principalement du Commentaire à la Physique et du Commentaire aux Météorologiques. Il serait intéressant de connaître leur degré d’originalité. Comme la plupart de ses contemporains en effet, Philopon s’inspire beaucoup de ses prédécesseurs17. On peut craindre qu’entraîné par eux, ou même par l’auteur qu’il explique, il n’exprime des idées qu’il réprouve ou qui ne jouent aucun rôle actif dans sa pensée. En fait, on connaît des cas où une telle crainte est justifiée18. Mais comment distinguer, de ces imitations serviles, les développements plus personnels ? La comparaison avec les Commentaires d’autres exégètes permet de le faire dans une certaine mesure. S’il s’agit d’œuvres plus anciennes, elles nous aident à reconnaître le degré de liberté avec lequel Philopon les utilise ; c’est le service que nous pouvons attendre, par exemple, du Commentaire aux Météorologiques d’Alexandre d’Aphrodise19. Simplicius et Olympiodore nous seront plus utiles encore. Contemporains de Philopon, disciples d’Ammonius comme lui20, ils ont reçu le même enseignement ; ils ont dû avoir accès à une même documentation. Or, nous avons conservé, du premier, des Commentaires à la Physique et au De caelo, du second, un Commentaire aux Météorologiques21. Je ne puis entrer ici dans la difficile question des [305] sources de ces écrits22. Cependant, quand ils présentent des textes parallèles à ceux de Philopon, on peut légitimement supposer l’utilisation de sources communes23 ; la comparaison décèle alors l’originalité plus ou moins grande de chacun. Quant aux développements philoponiens qui restent isolés, ils expriment vraisemblablement des exégètes ou des doctrines peu courantes dans l’école d’Ammonius. C’est en eux que nous avons le plus de chances de découvrir la pensée propre de leur auteur.
9Après cette remarque préliminaire, nous pouvons passer à l’étude d’un premier problème philosophique. Dans son De caelo, Aristote soutient que, ni par nature, ni contre nature, aucun des éléments sublunaires ne possède le mouvement circulaire24. Quelques lignes plus bas, il reconnaît pourtant qu’ils l’ont contre nature25 et, dans les Météorologiques, il affirme que le feu et une partie de l’air sont entraînés par la rotation du ciel26. Le rapprochement de ces textes et leur comparaison avec certains principes aristotéliciens engendre une aporie que Xénarque de Séleucie avait remarquée. Pour la résoudre, il soutenait que le mouvement circulaire appartient tout aussi naturellement au feu que le mouvement ascensionnel ; mais le premier, disait-il, est propre à la masse, tandis que le second n’affecte que les parties séparées du tout et qui tendent vers leur lieu naturel sans encore y être27. Cette doctrine semble avoir eu grand [306] succès : Simplicius l’attribue non seulement à Xénarque, mais encore à Plotin et à Ptolémée28 ; Philopon en fait une théorie de ceux qu’il appelle les Platoniciens29 ; on la trouve dans Proclus30. Mais elle est en contradiction avec le texte d’Aristote. Alexandre note que celui-ci parle d’un mouvement contre nature ; il soulève d’ailleurs des objections contre Xénarque ; à son avis, la solution consiste à soutenir que la rotation du feu est en réalité un mouvement mixte31. D’autres commentateurs découvrirent un autre moyen d’esquiver la difficulté. Ils imaginèrent, à côté des mouvements naturels et des mouvements contre nature, une troisième catégorie, celle des mouvements surnaturels, produits par une réalité supérieure à celle qu’ils affectent. Il serait intéressant d’étudier l’origine, l’extension et les nuances de cette théorie. Pour le moment, il nous suffit de savoir qu’elle était fort répandue dans les milieux alexandrins de la première moitié du vie siècle : Damascius, Simplicius et Olympiodore, tous trois élèves d’Ammonius32, en étaient partisans33. Disciple du même maître34, Philopon l’accepta lui aussi.
10Deux textes du Commentaire à la Physique vont nous prouver qu’il sut même en faire une utilisation personnelle ; le premier concerne la simplicité du mouvement ; l’autre, la définition de la nature.
11La simplicité du mouvement se heurte à une objection qu’Aristote appelle logique. On pourrait penser en effet que le mouvement se compose de deux actes, l’un appartenant au moteur et l’autre au mobile. Ces deux actes sont des mouvements. Où convient-il de les situer ? Si par exemple on les place tous les deux dans le mobile, on tombe dans une absurdité : comment un [307] même être pourrait-il posséder deux mouvements conduisant à une même forme ? C’est là une impossibilité35. Aristote ne précise pas davantage, mais Philopon le fait à loisir. Les deux mouvements que l’on suppose, dit-il, ont soit des points de départ différents, soit le même point de départ. Or, ces deux hypothèses sont inadmissibles. En particulier, la seconde se détruit d’elle-même : les mouvements qui ont les mêmes termes passent par les mêmes intermédiaires, si bien qu’ils se confondent. Un adversaire d’Aristote pourrait s’insurger contre cette affirmation : on peut, dirait-il par exemple, aller d’une extrémité d’un diamètre à l’autre soit par le diamètre lui-même, soit en suivant une demi-circonférence. Mais cette instance ne résiste pas à l’examen. Ce qu’on étudie, en effet, ce sont les mouvements naturels ; or, aucun corps ne possède naturellement le mouvement rectiligne et le mouvement circulaire. Le feu et l’air contigu ne sauraient faire difficulté : s’ils suivent la rotation de l’Univers, c’est là un mouvement surnaturel, semblable au mouvement oblique que les corps des animaux, naturellement graves, ne possèdent que sous l’action de l’âme. Le seul mouvement naturel du feu c’est le mouvement rectiligne, qui, perpendiculaire à la terre et au ciel, lui permet d’atteindre le lieu supérieur36. Dans tout ce développement, Philopon ne se réfère à aucune autorité. En ce qui concerne le dilemme du début, Simplicius nous aide à en découvrir la source : il cite sous le nom d’Alexandre un texte dont l’utilisation par notre auteur est évidente37. Mais pour l’instance et sa réfutation, il [308] n’offre pas le moindre parallèle. Son silence est d’autant plus étonnant qu’il connaît la théorie du mouvement surnaturel et qu’il l’utilise dans un cas assez semblable à celui qui nous occupe : c’est elle qu’il invoque contre Alexandre et contre le mouvement mixte que ce dernier attribuait au feu pour éviter qu’un même corps eût deux mouvements contre nature ou deux mouvements naturels38. S’il avait connu l’objection et la réfutation que signale Philopon, aucune raison doctrinale ne l’empêchait de s’en faire l’écho. Et s’il ne les connaissait pas, c’est qu’elles n’étaient vraisemblablement guère répandues et qu’elles représentent peut-être même le fruit de la réflexion personnelle de Philopon39.
12L’exégèse de la définition de la nature contient un passage qui conduit à une conclusion analogue. On sait que, pour Aristote, la nature est un principe de mouvement et de repos40. Cette définition pourrait susciter des critiques. Philopon en signale deux qu’il résout ensuite. Seule la seconde nous intéresse ; la voici. La nature ne semble pas être principe de mouvement pour les masses des éléments, car celles-ci sont naturellement immobiles ; on le constate sans peine pour la terre et l’eau ; on peut s’en convaincre pour le feu et l’air contigu si l’on se souvient qu’ils sont entraînés par les corps célestes et que leur rotation est surnaturelle. Comme on s’y attend, Philopon ne reconnaît aucune valeur à cette objection. Mais — et c’est ce qui nous importe ici — il ne conteste pas les faits qu’elle allègue. Sa réfutation laisse intacte la théorie du mouvement surnaturel ; elle consiste seulement à mettre en lumière les changements qualitatifs que l’objection négligeait et dont la nature est le prin[309]cipe pour les masses élémentaires41. Simplicius, qui signale et résout lui aussi certaines difficultés à propos de la définition de la nature, ne présente aucune trace de celle-ci. Pourtant, il connaît la thèse de l’immobilité naturelle des masses élémentaires ; et, s’il ne l’admet pas entièrement, du moins ne la juge-t-il pas indigne d’une mention et d’une discussion42. S’il avait connu l’objection philoponienne, on peut supposer qu’il l’aurait résolue autrement, mais on ne voit pas le motif qui aurait pu l’inciter à l’omettre.
13Nous pouvons conclure. Au moment où il écrivit son Commentaire à la Physique, Philopon était persuadé que le mouvement circulaire du feu et de l’air contigu possède un caractère surnaturel. Cette thèse lui paraissait tellement vraie que, dans des passages probablement originaux, ici, il en tirait la réfutation d’une objection et là, il ne la contestait pas, bien qu’elle fondât une objection que pourtant il réfutait. Il admettait en outre que, dans leur lieu, les éléments sont naturellement immobiles et que le mouvement surnaturel est semblable au mouvement que nous appellerions animal.
14Le Contre Proclus témoigne d’une position identique. La nature, y lisons-nous, n’est principe de mouvement circulaire pour aucun des éléments sublunaires43. Ce n’est donc pas elle qui explique le mouvement circulaire du feu et de l’air. D’ailleurs, la thèse du mouvement surnaturel semble tellement certaine que, loin de la démontrer, Philopon l’utilise comme argument. Dans un premier cas, il l’emploie pour établir qu’un phénomène sur[310]naturel ne modifie pas l’essence de l’être qu’il affecte44 ; ailleurs, il y trouve la preuve qu’un phénomène surnaturel pour un être doit appartenir naturellement à un autre être, supérieur au premier45. Dans chacun de ces passages, l’argument fondé sur le mouvement surnaturel est suivi d’un second, tiré des connaissances et de la contemplation surnaturelles des âmes inspirées46. Ce rapprochement devait être traditionnel : on le retrouve chez Simplicius et chez Olympiodore47. Notons encore que, dans l’un des deux textes que je viens de citer, Philopon donne la doctrine du mouvement surnaturel pour aristotélicienne48 ; en cela, il se montre plus affirmatif que Simplicius, qui, lui, se contente de tenir cette origine pour probable49.
15Après ces indications d’une parfaite clarté nous devons nous attacher à l’étude d’un ensemble de textes plus difficiles. Dans son treizième argument, Proclus se fondait sur le mouvement circulaire que Platon reconnaît au ciel pour attribuer à ce dernier une nature essentiellement différente de celle des éléments sublunaires50.
16Cette argumentation fait penser à celle d’Aristote. Mais Philopon réserve l’examen de celle-ci pour le livre qu’il écrira contre le Stagirite. Pour le moment, il se contentera de rechercher s’il y a contradiction entre les deux thèses platoniciennes du mou[311]vement circulaire du ciel et de sa composition principalement ignée51. Ce qu’il appellera donc ciel dans les quelques chapitres qui suivent, ce sera un composé où prédomine le feu, et ce que nous trouverons, ce sera une enquête non pas sur la vérité, mais sur la cohérence interne du platonisme. Suivons notre polémiste dans son exposé.
17S’il était question d’un corps simple et inanimé, dit-il, le raisonnement de Proclus, encore qu’il soit faux, ne manquerait pas de force persuasive. Mais il s’agit d’un être composé et animé. Dès lors, son mouvement circulaire lui vient évidemment de son âme et non de son corps. Il arrive souvent en effet qu’un vivant possède comme tel un mouvement naturel qui n’appartient pas par nature à son corps. C’est ainsi que les animaux terrestres, en tant que vivants, se meuvent en oblique ; pourtant le seul mouvement de leur corps est le mouvement vers le bas52. Déjà le Commentaire à la Physique avait utilisé cet exemple, mais c’était pour illustrer la différence entre mouvement naturel et mouvement surnaturel53. Il semble donc que le mouvement animal se confond avec ce dernier ou que du moins il en est une espèce. Nous trouverons plus loin une confirmation de cette identification54. Avant d’y arriver, arrêtons-nous encore à un texte curieux où Philopon suppose chez son adversaire l’emploi d’un procédé dialectique. Admettons, pourrait dire Proclus, que le mouvement circulaire du ciel a l’âme pour principe ; quel [312] est alors son mouvement naturel ? Ce ne peut être le mouvement rectiligne, si bien que de toute manière, le ciel ne saurait se composer d’éléments sublunaires. La solution de cette difficulté se trouve dans Proclus lui-même. Si les éléments sublunaires en leur lieu naturel restent immobiles ou se meuvent en cercle, comme l’admet Proclus, il faut lui proposer le dilemme que voici : ou bien le mouvement circulaire du ciel est animal, ou bien il est naturel. Dans le premier cas, le ciel est naturellement immobile, comme le sont les éléments en leur lieu ; dans le second, son mouvement ne le distingue en rien des éléments. D’une manière comme de l’autre, Proclus est convaincu d’erreur55. À notre point de vue, l’intérêt de ce passage réside en ce que Philopon y soutient qu’en leur lieu, les éléments qui possèdent un mouvement circulaire animal (c’est-à-dire surnaturel) sont naturellement immobiles.
18Arrivons enfin au dernier chapitre de ce développement. Philopon y abandonne le point de vue du platonisme et de sa cohérence interne pour revenir à la considération de la réalité56. D’une manière générale, pourquoi, se demande-t-il, le mouvement du ciel en prouverait-il l’hétérogénéité ? Le feu lui aussi se meut en cercle ; l’observation des phénomènes dont il est le siège ne permet pas d’en douter. Pourtant personne ne prétend lui attribuer une nature différente de celle des éléments. Le cas du ciel est absolument identique, que son mouvement soit animal ou naturel57. Cette dernière mention des deux hypothèses possibles [313] est suivie d’un texte où Philopon semble bien avoir fait son choix. Le mouvement circulaire du feu est surnaturel, dit-il ; de même, le ciel, sous l’action d’une puissance supérieure et incorporelle, se meut surnaturellement en cercle. La seule différence c’est que la puissance incorporelle agit directement sur le ciel, indirectement sur le feu58.
19Ce passage apporte quelques éléments précieux. S’il abandonne complètement l’hypothèse du mouvement naturel, il emploie pour le mouvement animal une appellation nouvelle et le qualifie de surnaturel. L’équivalence des deux termes est évidente : tous deux s’appliquent à la même réalité, le mouvement circulaire non naturel du ciel ; les mouvements que tous deux désignent ont une même cause, que décrit ici l’expression puissance incorporelle et supérieure et que les chapitres antérieurs dénommaient plus simplement âme. Ainsi se confirme l’identification proposée plus haut59. Elle nous permet d’étendre au mouvement surnaturel toutes les indications qui concernent le mouvement animal. Quant à l’extension du mouvement surnaturel au ciel, elle pourrait paraître une innovation. Il est pourtant probable qu’elle était un bien commun. On la trouve, en effet, encore que selon des modalités différentes, chez Simplicius60.
20Nous pouvons maintenant prendre une vue d’ensemble de la position de Philopon sur le problème du mouvement circulaire du feu au moment où il écrivit le Contre Proclus. Pour lui, les éléments en leur lieu naturel sont naturellement immobiles. Le feu et l’air, entraînés par le ciel, possèdent un mouvement circulaire surnaturel, identique par ses caractères au mouvement animal et à l’inspiration divine. Le ciel lui-même ne se meut d’ail[314]leurs que sous l’action d’une cause supérieure et d’une manière surnaturelle. Enfin, la notion de mouvement surnaturel appartient à la doctrine aristotélicienne. Cet ensemble de thèses ressemble de près à celui que nous avons trouvé dans le Commentaire à la Physique. On ne remarque aucune divergence entre les deux œuvres. Quant aux données nouvelles qu’apporte le Contre Proclus, elles ne modifient pas essentiellement la théorie. Plutôt que de les considérer comme des signes d’une évolution personnelle de Philopon, il convient sans doute d’y voir des points acquis dès avant lui, mais qu’il n’avait pas eu l’occasion de mentionner dans la première des deux œuvres ; c’est en tout cas l’impression que donnent les parallèles fournis par Olympiodore et par Simplicius.
21Le Commentaire aux Météorologiques défend sur notre problème une position toute différente. Il n’y a pas lieu d’étudier les quelques passages où Philopon répète après Aristote que le feu et la partie supérieure de l’air sont entraînés par le mouvement du ciel61 : ils ne nous apprennent rien sur la nature de ce phénomène. Les trois textes où notre exégète laisse percer son opinion personnelle sont plus instructifs. Le premier concerne le passage où Aristote explique l’absence de nuages dans la région supérieure. L’une des causes invoquées est le mouvement circulaire de la partie supérieure de l’air62. Philopon note que ce mouvement, causé par la cinquième essence, n’est pas naturel aux yeux d’Aristote, mais qu’il l’est pour ceux qu’il appelle les Platoniciens ; pour ceux-ci, en effet, les masses élémentaires sont les unes immobiles, les autres animées d’un mouvement circulaire. Notre auteur termine par ces mots : « Ce n’est pas le moment de s’exercer sur ces questions, car nous en avons disputé complètement dans d’autres ouvrages63. »
22[315] On aimerait connaître le résultat de cette discussion. Un second texte va nous aider à le deviner. À propos de l’affirmation d’Aristote selon laquelle le feu et une partie de l’air sont entraînés par le ciel64, Philopon écrit : « Il veut donc que la rotation de ces deux corps soit forcée. Et comment serait durable ce qui existe par force et contre nature ? Nous en avons assez parlé ailleurs65. » Deux point apparaissent clairement dans ces quelques lignes : aux yeux de Philopon, Aristote tenait pour forcé le mouvement circulaire du feu (le premier texte, sans l’affirmer explicitement, le laissait déjà entendre) ; mais notre exégète estimait cette thèse inacceptable.
23Un dernier développement va compléter notre information. Après avoir distingué les comètes qui se forment sous un astre de celles qui sont indépendantes, Aristote notait que le mouvement de ces dernières subit un retard par rapport à la rotation céleste ; « tel est en effet, écrivait-il, le mouvement du monde qui entoure la terre66 ». Comme le précise Philopon, c’est le feu et l’air que désigne cette expression67. S’ils ne se meuvent pas aussi rapidement que les corps célestes, ne les suivant pas également et n’étant pas exactement sphériques, c’est, d’après Alexandre, parce que le mouvement circulaire ne leur est pas naturel et qu’ils sont entraînés par le mouvement des corps divins68. Cette exégèse ne parle pas de mouvement contre nature et nous savons qu’ailleurs, Alexandre proposait la thèse d’un mouvement mixte69, qu’il veut peut-être insinuer ici par les mots n’étant pas exactement sphériques. Mais Philopon, qui cite le texte d’Alexandre, omet ce membre de phrase et intercale les mots [316] mais évidemment contre nature après naturel70. Moyennant ces modifications, il peut mettre sous l’autorité d’Alexandre l’interprétation d’Aristote qu’il a déjà soutenue antérieurement71. Après quoi, il rappelle la thèse de Platoniciens. Si on l’admet, il faut dire que le mouvement du feu est naturellement plus lent que celui du ciel ; ceci n’a rien d’étonnant : on constate aussi des différences entre les vitesses des différents corps célestes. Il est d’ailleurs possible que lorsque Aristote écrit : « Tel est le mouvement du monde qui entoure la terre », il pense non à un mouvement forcé, mais à un mouvement naturel. En fin de compte, c’est à cette interprétation qu’il convient de se rallier, car il est impossible qu’un être reste constamment dans une situation contre nature72. Revenons maintenant aux comètes, qui ont fourni le point de départ de cette digression. Accidents du feu et de l’air, elles ont un mouvement de même caractère que celui de ces éléments73. Philopon termine enfin par ces mots :
De là, il est évident que leur mouvement [sc. des comètes] n’est pas non plus surnaturel, comme le dit Damascius ; nous avons réfuté cette thèse ailleurs ; en effet, il [sc. le mouvement] ne serait pas aussi sensible74.
24La réfutation dont la dernière phrase nous conserve un écho malheureusement trop bref, concernait-elle uniquement les comètes ? On peut en douter : pour Damascius comme pour Philopon, il est probable que leur mouvement dépendait de celui du feu et de l’air. Il y a plus : si l’on en croit un passage de Simplicius, le mouvement des [317] comètes fournissait un argument à la théorie du mouvement surnaturel75. Ainsi, en critiquant l’un, on critiquait l’autre.
25Les trois textes du Commentaire aux Météorologiques que nous venons d’analyser nous intéressent directement. Malheureusement, ils ne sont guère explicites et se bornent à rappeler trop brièvement des travaux antérieurs. Il est fort probable qu’ils font ainsi allusion à un seul et même ouvrage : c’est en tout cas ce que suggère le parallélisme des passages qui contiennent les références. Nous essayerons plus loin de l’identifier76.
26Rassemblons maintenant les quelques données que Philopon fournit sur le fond du problème. Aristote, dit-il, tient le mouvement circulaire du feu pour contraire à sa nature ; telle est du moins l’interprétation d’Alexandre. Mais ce dernier se trompe peut-être et une expression des Météorologiques fait plutôt penser à un mouvement naturel. S’il en est ainsi, l’opinion d’Aristote se confond avec celle des Platoniciens. Damascius, enfin, est partisan d’un mouvement surnaturel. Il a tort et sa thèse ne résiste pas à l’examen, pas plus d’ailleurs que celle du mouvement forcé. À celle du mouvement naturel, en revanche, Philopon ne fait aucune objection et le troisième texte semble bien indiquer que c’est à elle qu’il se rallie finalement.
27L’interprétation d’Aristote que Philopon attribue à Alexandre est authentique, comme le montre un fragment conservé par Simplicius77. Pour celle que notre exégète propose, je ne connais de parallèle ni dans Simplicius ni dans Olympiodore78. Quant à la critique du mouvement surnaturel, elle reste isolée. Ces quelques indications précisent les bornes de l’originalité possible de Philopon. Celle-ci consiste essentiellement dans le rejet de la thèse du mouvement surnaturel et dans l’adoption de celle du mouvement naturel.
28[318] Le Contre Aristote révèle une attitude analogue, malgré quelques différences. Dans un groupe de fragments du Ier livre de cet ouvrage perdu79, Philopon, reprenant une objection de Xénarque80, reprochait à Aristote de ne pas adopter un point de vue unique dans sa comparaison du ciel et des éléments, mais de prendre le premier selon sa totalité et dans son lieu naturel, les seconds selon leurs parties et hors de leur lieu81. S’il n’avait pas commis cette erreur le Stagirite aurait reconnu que les masses du feu et de l’air se meuvent naturellement en cercle82. Qu’il s’agisse bien là d’un phénomène naturel, Philopon le montre par une double réduction à l’impossible. Tout mouvement, en effet, est naturel ou forcé et contre nature83. Mais si le mouvement circulaire du feu était contre nature, il ne pourrait durer84 ; Philopon ajoute même qu’il est préférable de n’être pas du tout plutôt que d’être toujours dans un état contre nature85. En outre, comme le remarquait déjà Xénarque86, les contraires s’opposent un à un et le mouvement forcé est le contraire du mouvement naturel. Au mouvement ascensionnel, que le feu possède naturellement, ne peut donc s’opposer qu’un seul mouvement forcé, le mouvement vers le bas87.
29 La thèse du mouvement naturel, qu’on vient de prouver indirectement, se heurte pourtant à des objections. Aristote [319] soutient que le mouvement naturel d’un corps peut appartenir à un autre corps comme mouvement forcé, mais non comme mouvement naturel88. Puisque donc le mouvement circulaire appartient au ciel, il ne peut donc appartenir naturellement au feu. Pourtant, note Philopon, la terre et l’eau ont le même mouvement naturel, le mouvement vers le bas, si bien que la thèse aristotélicienne n’est rien moins qu’évidente89. Autre difficulté : on ne peut admettre qu’un même corps ait deux mouvements naturels, ce qui serait pourtant le cas pour le feu si, outre le mouvement ascensionnel, il possédait le mouvement circulaire. Cette difficulté n’est qu’apparente car, comme Philopon le remarque à la suite de Xénarque90, le mouvement ascensionnel est propre aux parties du feu hors de leur lieu naturel, tandis que le mouvement circulaire n’appartient qu’à la masse91.
30Quant à la thèse d’Alexandre, qui soutenait que le mouvement circulaire du feu est en réalité un mouvement mixte, Philopon citait les textes qui l’exposaient et il la réfutait longuement92.
31Tels sont les traits caractéristiques du Contre Aristote sur le problème qui nous intéresse : adoption de la thèse du mouvement naturel ; critique et rejet de deux thèses opposées, celle du mouvement contre nature et celle du mouvement mixte. Il est remarquable que les fragments conservés par Simplicius ne contiennent aucune allusion au mouvement surnaturel. Philopon avait-il réellement passé cette doctrine sous silence dans le Contre Aristote ou faut-il croire à une négligence de notre informateur ? La première hypothèse semble préférable. Dans ses excursus contre Philopon, Simplicius se livre à une critique impitoyable de son adversaire ; entraîné par une hostilité implacable, il n’hésite même pas devant la contradiction : c’est ainsi [320] qu’il fait appel à la théorie alexandriste du mouvement mixte que pourtant il rejette dans la partie proprement exégétique de son œuvre93. Animé de tels sentiments, il n’aurait pas manqué de couvrir de ses sarcasmes une critique du mouvement surnaturel, s’il en avait trouvé une94.
32 Si nous passons enfin au De Opificio mundi, un seul passage doit retenir notre attention. Philopon veut y prouver que le ciel n’est pas animé. Or, c’est d’après leurs actes que l’on distingue les êtres animés des êtres inanimés. Quel est donc l’acte des êtres célestes qui en prouve le caractère animé ? Serait-ce leur mouvement ? Ce qui spécifie les mouvements naturels des corps, c’est leur détermination ; en revanche, les mouvements animaux, provoqués par les désirs et les appétits, varient selon les moments. Or, rien n’indique que le mouvement circulaire des corps célestes résulte d’un choix de l’âme, « car, écrit Philopon, le feu lui aussi et l’air contigu se meuvent en cercle, et que ce mouvement ne soit pas forcé, nous l’avons démontré dans d’autres livres95 ».
33D’après ce texte, le mouvement circulaire du feu n’est pas forcé ; il n’est pas non plus animal : Philopon ne le dit pas, mais le sens de l’argumentation l’exige. C’est donc qu’il est naturel : telle est en effet la dernière des trois catégories de mouvement citées ici. Le terme de mouvement surnaturel n’apparaît pas dans notre développement ; quant à la notion, même si, comme dans le Contre Proclus96, elle équivaut à celle de mouvement animal, il reste que Philopon ne l’applique pas au feu. Pour celui-[321]ci, il n’envisage que deux hypothèses, celle du mouvement naturel, qu’il admet, et celle du mouvement forcé, qu’il dit avoir réfutée.
34Quel est l’ouvrage auquel il renvoie ainsi ? Reichardt pense au Commentaire à la Physique, dont il signale deux passages. Le premier — l’un de ceux que j’ai analysés plus haut97 — se fonde sur le caractère surnaturel de la rotation du feu pour prouver qu’un même corps ne peut posséder naturellement le mouvement rectiligne et le mouvement circulaire98. Dans le second, Philopon propose une objection, qu’il résoudra ensuite, à la thèse aristotélicienne selon laquelle le mouvement se situe uniquement dans le mobile : c’est en effet en raison de son mouvement que le ciel meut le feu99. On le voit sans peine, aucun des deux textes n’est satisfaisant. On pourrait alors penser à l’ouvrage que cite le Commentaire aux Météorologiques, mais il traitait du mouvement surnaturel, que le De Opificio mundi néglige complètement100. Le Contre Aristote, en revanche, contient le texte que nous attendons : il prouve que le mouvement circulaire du feu n’est pas forcé, et il y puise un argument pour soutenir la thèse du mouvement naturel101. On pourrait alors se servir de la référence du De Opificio mundi comme d’un indice chronologique.
35Les analyses qui précèdent mettent en lumière les variations doctrinales de Philopon sur le thème du mouvement du feu. Elles conduisent à former deux groupes des cinq œuvres étudiées. Tandis que le Commentaire à la Physique et le Contre Proclus s’attachent à la notion de surnaturel, le Commentaire aux Météorologiques, le Contre Aristote et le De Opificio mundi se montrent partisans de celle du mouvement naturel. Par un détail, le Commentaire aux Météorologiques semble être un peu plus proche du premier groupe que les deux autres ouvrages de sa série : il fait encore mention de la notion de mouvement surnaturel, encore que ce soit pour la critiquer ; au contraire, ni le Contre Aristote ni le De Opificio mundi n’y font la moindre allusion.
36Le classement ainsi obtenu n’est guère favorable à la thèse [322] chronologique de Gudeman. On se souvient qu’il supposait la composition de tous les Commentaires antérieurs à 520102. Comme, d’autre part, le Commentaire aux Météorologiques est postérieur au Commentaire à la Physique103, il se situerait entre 517 et 520104. Dès lors, Philopon aurait d’abord défendu la théorie du mouvement surnaturel, puis il aurait adopté celle du mouvement naturel avant 520. En 529105, avec le Contre Proclus, il serait revenu à sa première position. Il l’aurait à nouveau abandonnée, et encore au profit de la doctrine du mouvement naturel, dans le Contre Aristote, postérieur au Contre Proclus106, et dans le De Opifico mundi, qui date au plus tôt de 557107. On admettra difficilement une telle versatilité sur la foi de simples hypothèses. Il semble préférable de proposer une autre chronologie, qui respecte toutes les données certaines et donne de l’évolution de la pensée philoponienne une reconstitution plus satisfaisante. Il suffit pour atteindre ce résultat de placer la composition du Commentaire aux Météorologiques entre celle du Contre Proclus et celle du Contre Aristote. Deux étapes se distinguent alors nettement : Philopon, dans une première période de sa vie, aurait admis la thèse, courante à son époque108, du mouvement surnaturel ; peu après 529, il aurait changé d’opinion et se serait rallié à la doctrine du mouvement naturel.
*
37Les variations que l’on observe dans l’attitude de Philopon à propos d’une seconde doctrine vont confirmer la place que j’assigne au Commentaire aux Météorologiques. On sait l’importance de la théorie aristotélicienne de la cinquième essence. Dans le De caelo, le Stagirite, se fondant sur la considération du mouve[323]ment circulaire, prouvait l’existence d’une essence distincte des quatre éléments et supérieure à eux ; il en déduisait ensuite les caractéristiques, en particulier son incorruptibilité et son immutabilité quantitative et qualitative109. Pour confirmer ces déductions, il faisait appel à trois indices : d’abord, les anciens avaient déjà reconnu le caractère divin du ciel, puisqu’ils l’attribuaient comme séjour aux dieux110 ; d’autre part, l’observation n’y a jamais décelé le moindre changement111 ; enfin, le nom même d’éther, qui désigne le lieu supérieur, est une allusion au mouvement éternel (ἀεὶ θεῖν) du corps auquel il s’applique, et Anaxagore est dans l’erreur lorsqu’il croit y voir un synonyme du feu (αἴθειν)112. L’exposé du troisième indice se retrouve dans les Météorologiques113. Ce traité apporte en outre quelques contributions nouvelles à la doctrine. Il en donne d’abord une preuve indirecte fondée sur la considération des volumes des masses élémentaires. Ceux-ci ont entre eux un rapport défini qui ne serait pas respecté si l’espace situé au-delà de la terre et de l’eau ne contenait que le feu, que l’air ou même que ces deux éléments réunis. C’est donc qu’il existe une cinquième essence qui rétablit l’indispensable équilibre114. Mais on rencontre alors une autre difficulté. L’éther ne possède aucune des qualités caractéristiques des éléments sublunaires ; il ne possède donc pas la chaleur. Si le soleil est composé d’éther, comment expliquera-t-on son action calorifique ? Pour résoudre cette aporie, Aristote fait appel à la thèse de l’échauffement par le mouvement, qu’il avait déjà exposée dans le De caelo115, et il note que, de tous les corps célestes, le soleil est celui qui possède le mouvement le plus apte à échauffer le monde sublunaire. Il n’y a donc aucune raison d’attribuer une nature ignée au soleil. L’absence d’étoiles filantes dans la région supérieure et l’aspect du soleil, qui est blanc [324] et non couleur de feu, constituent eux aussi des indices de valeur116.
38Au début de sa carrière, Philopon ne semble avoir éprouvé aucun doute au sujet de l’ensemble de doctrines que je viens de rappeler. Dans son Commentaire à la Physique, il qualifie les corps célestes de divins117. Comme Simplicius, il appelle éther la cinquième essence118. Comme Simplicius encore, il croit à l’éternité du mouvement céleste ; tous deux en tirent, contre la définition de la nature comme principe de repos, une même objection qu’ils réfutent de la même manière : les pôles et le centre, disent-ils, sont immobiles119. Ces deux passages remontent probablement à une source commune. Il en est de même pour l’exégèse du texte où Aristote distingue la physique des mathématiques et de l’astronomie120. Elle contient, chez chacun de nos deux commentateurs, deux allusions parallèles au corps céleste et à ses propriétés. Mais l’exposé de Philopon est plus précis et plus développé que celui de Simplicius ; il semble qu’il a enrichi la source où il puise121.
39C’est plus vraisemblablement encore son inspiration propre que nous trouvons dans un texte pour lequel Simplicius n’offre aucun parallèle. Il y est question de la différence entre les raisonnements a priori et a posteriori. Philopon l’illustre au moyen [325] d’exemples : Aristote, dit-il, a utilisé la seconde méthode lorsqu’il a prouvé la sphéricité de la lune par l’étude des phases de cet astre ; il aurait employé le premier, s’il avait pris comme point de départ la notion même de cinquième essence122.
40 Le texte de la Physique ne donnait guère d’occasions de parler de l’hétérogénéité du ciel. Du moins les quelques allusions que je viens de relever paraissent-elles montrer qu’au moment où il commenta cet ouvrage, Philopon admettait sans hésitation les théories aristotéliciennes sur ce sujet.
41Le Contre Proclus révèle une attitude toute différente. Philopon s’y montre adversaire de la cinquième essence. S’il n’attaque pas l’argumentation fondée sur le mouvement circulaire, il promet de l’examiner dans le Contre Aristote123. Il sait déjà que cet examen sera en réalité une réfutation, sinon il ne le réserverait pas pour un ouvrage de polémique.
42Il marque d’ailleurs plus nettement son opposition dans plusieurs autres passages. C’est ainsi qu’il s’élève contre la thèse aristotélicienne de l’impassibilité du ciel ; il promet de l’étudier rigoureusement dans le Contre Aristote, mais il en fait dès maintenant une critique générale. Le ciel, dit-il, est la partie la plus importante du monde ; elle doit durer autant que lui. Il est logique qu’elle soit la moins sujette aux maladies et à la vieillesse. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour la croire absolument incorruptible124. Par cette remarque, Philopon paraît avoir surtout en vue de dénier toute valeur à l’indice que le Stagirite tirait de l’observation et de l’immutabilité céleste qu’elle semble révéler.
43[326] En ce qui concerne l’étymologie du mot éther et le recours au témoignage des anciens, Philopon ne critique pas explicitement Aristote. Il laisse pourtant paraître son opposition sur ces deux points car il affecte de réserver le nom d’éther au feu125 et prétend que le Stagirite est le premier philosophe qui ait introduit la notion de cinquième essence126.
44Mais c’est à propos de la composition ignée du ciel que notre auteur développe avec le plus de détails sa polémique : il y consacre un chapitre entier. Si le feu remplissait l’espace céleste, disait Aristote dans ses Météorologiques, son immense supériorité de volume aurait depuis longtemps provoqué la disparition des autres éléments127. Philopon commence par rappeler cette thèse128. Puis il expose ses objections. Il rétorque d’abord l’argument : même réduite aux proportions que lui assigne Aristote, dit-il, la masse du feu reste supérieure à celle des autres éléments ; comment donc n’a-t-elle pas provoqué l’embrasement général que semble redouter le Stagirite129 ? En réalité, une telle crainte est vaine car le feu élémentaire n’est pas consumant, mais bien vivifiant130. Au reste, Platon suppose que le ciel est un composé où prédomine le feu, mais où les autres éléments sont représentés ; dans ces conditions, la supériorité du premier est contre-balancée en raison du mélange131. Enfin, ce qui entre dans la formation du ciel, c’est le feu le plus pur et le plus subtil ; or l’expérience apprend que la causticité d’un feu est un rapport direct avec la densité de la matière qu’il consume ; le feu céleste doit donc être le moins caustique de tous132.
45On s’attendrait à voir Philopon critiquer l’explication aristotélicienne de la chaleur solaire : ce serait un indice de plus en [327] faveur de la thèse de la composition ignée des corps célestes. Mais on ne trouve rien de tel. En fait, notre auteur, à plusieurs reprises, distingue la chaleur, produite par le feu, de la lumière, dispensée par le soleil133. Dans l’unique passage qui, à ma connaissance, parle de l’action calorifique du soleil, il commence par distinguer deux espèces de causes motrices : celles qui meuvent en raison de leur propre mouvement et celles qui, restant immobiles, agissent par leur puissance naturelle ; de ces dernières, il donne l’aimant comme exemple. Il continue en disant que les changements qualitatifs et les générations du monde sublunaire proviennent de la puissance et de la disposition des corps célestes et non de leur simple révolution. « Car, écrit-il, c’est en s’approchant que le soleil chauffe et en s’éloignant qu’il refroidit134. » Ces derniers mots rappellent les expressions des deux passages qu’Aristote consacre à la doctrine de la chaleur solaire135. Si Philopon ne l’avait pas admise, il avait ici une excellente occasion de la réfuter ; son silence semble être une approbation.
46À vrai dire, le texte que je viens de résumer est assez obscur. Si le rôle de la position du soleil dans l’échauffement du monde sublunaire y apparaît clairement, l’allusion à la puissance naturelle des astres reste vague. Je vais tenter de la préciser en faisant appel à Simplicius. Ce commentateur attribue lui aussi l’action calorifique du soleil à sa puissance ainsi qu’au frottement des rayons lumineux qu’il émet136. Voici comment se produit le phénomène. Les rayons solaires, après avoir traversé les sphères [328] célestes, atteignent le monde sublunaire. Ils s’y heurtent à la résistance de certains corps et se réfléchissent. L’air, entraîné par leur mouvement, subit une friction, un foulage d’où résulte un échauffement. On comprend alors l’importance de la position du soleil. C’est elle qui détermine l’angle d’incidence et l’angle de réflexion des rayons. Or, plus le rayon incident et le rayon réfléchi s’écartent l’un de l’autre, moins ils compriment l’air ; ainsi s’expliquent les variations de chaleur137. C’est dans la puissance du soleil qu’il faut chercher la cause première de tout ce processus si, comme nous l’apprend Philopon, elle n’est autre que la luminosité138, c’est-à-dire la capacité d’émettre des rayons lumineux. Il semble bien que le texte dont nous sommes partis se réfère, encore que de manière imprécise, à la théorie qu’expose Simplicius. Les éléments essentiels sont les mêmes : d’une part, la puissance du soleil ; de l’autre, la position de l’astre ou, ce qui revient au même, le frottement des rayons dont l’intensité dépend de leur angle de réflexion. Or, Simplicius présente son exposé comme une simple interprétation de la doctrine aristotélicienne139. Cette interprétation devait d’ailleurs être courante dans l’école d’Alexandrie, car nous la retrouvons avec quelques variantes chez Olympiodore140. On en conclura sans grand risque d’erreur qu’à l’époque du Contre Proclus, Philopon était encore fidèle à la doctrine d’Aristote dans la question de la chaleur solaire.
47Si le Contre Proclus manifeste l’hostilité de son auteur à la cinquième essence, le Commentaire aux Météorologiques est plus net encore à cet égard. On y trouve d’abord une attaque contre l’étymologie aristotélicienne de l’éther et contre la confirmation que le Stagirite croyait y trouver en faveur de sa doctrine. Anaxagore, lisons-nous, n’est pas le seul à croire à la nature ignée du ciel ; Platon est du même avis, ainsi qu’Héraclite. Aristote se dépense en vain pour attribuer son innovation à ses prédécesseurs, [329] car personne avant lui n’a parlé d’une essence propre au ciel141. Il est le premier à soutenir cette opinion, le premier des Grecs en tout cas142, car on prétend que des Hindous ou peut-être des Babyloniens la soutiennent, mais Philopon avoue ne pas savoir si c’est exact143. Au reste, même si l’on accorde à Aristote son étymologie (bien qu’elle soit moins vraisemblable que celle d’Anaxagore), l’avantage qu’il croit en tirer est illusoire car la dénomination imposée au ciel par les anciens est alors tirée du mouvement, si bien qu’elle ne permet aucune conclusion nécessaire à propos de l’essence144. Après ces remarques, Philopon annonce l’examen, dans un ouvrage ultérieur, de l’argumentation que le De caelo fondait sur le mouvement circulaire145. Venant après une critique d’Aristote, cette promesse, dans l’esprit de celui qui la fit, devait probablement concerner, non pas une exégèse, mais bien une réfutation.
48[330] C’est encore dans une référence à une autre œuvre que Philopon marque son hostilité à l’argument tiré de l’équilibre des mases élémentaires. Comme je l’ai rappelé à propos du Contre Proclus, un ciel igné causerait, aux yeux d’Aristote, la perte des autres éléments146. On ne peut non plus admettre que l’espace situé au-delà de la terre et de l’eau soit rempli d’air, ni même d’air et de feu. En voici la raison. Lorsque les éléments se changent l’un en l’autre, ils le font selon des volumes de rapport défini : telle masse d’eau, par exemple, engendre une masse d’air un nombre déterminé de fois plus grande. Or les masses totales doivent être soumises au même rapport que la génération et la corruption des parcelles. Mais dans aucune des hypothèses envisagées, ce ne serait possible. La conclusion, implicite, c’est qu’il existe une cinquième essence147. Si d’ailleurs on nie que les éléments se changent l’un en l’autre, mais qu’on leur accorde pourtant une égalité de puissance, l’argumentation prend une forme légèrement différente, mais aboutit au même résultat. La puissance en effet est proportionnelle au volume, si bien qu’ici encore, on doit reconnaître l’existence d’un rapport défini entre les masses148. Philopon, après une longue exégèse de la preuve par la transmutation des éléments149, note qu’il a exposé ailleurs son opinion sur le problème et que, pour ne pas multiplier les digressions, il ne la reprend pas ici150. S’il avait simplement voulu marquer son accord, il aurait pu le faire fort brièvement ; de nombreuses digressions ne devaient lui paraître indispensables que s’il pensait à une réfutation. De celle-ci, il nous donne d’ailleurs un échantillon dans son commentaire de la seconde partie du texte d’Aristote. Il y nie que la puissance soit proportionnelle à la masse et tente de prouver son opinion par quelques exemples151.
49La thèse contre laquelle Philopon s’élève avec le plus de vigueur dans le Commentaire aux Météorologiques est celle de l’échauffement de l’air par le mouvement du soleil. Il s’efforce d’en faire voir les absurdités. En voici une première. Comme Aristote le reconnaît, si le soleil peut échauffer l’air par son mouvement, c’est qu’il est un solide (στερεόν)152. Ce terme ne désigne ni l’extension selon les trois dimensions, ni l’opacité, mais bien la résistance ou rigidité153. Or cette qualité se trouve au nombre de celles que le De generatione et corruptione range sous les deux oppositions fondamentales du chaud et du froid, du sec et de l’humide. On doit donc admettre que ces dernières caractérisent les êtres célestes aussi bien que les quatre éléments. Par ce détour, Aristote se rallie involontairement à la thèse de la composition ignée des astres154.
50On ne peut d’ailleurs douter que les sphères et les astres ne soient résistants ; ils le sont puisque, en dépit de leur vitesse, ils conservent leur forme intacte. À ce point de vue, tous seraient capables d’exercer une action calorifique155. Mais une telle action, outre la rigidité, exige encore le contact. Sous ce rapport, le soleil est défavorisé : trois sphères le séparent du monde sublunaire. Faut-il croire que son action se transmet par leur intermédiaire ? Mais il ne les meut pas, car un de leurs mouvements leur est propre et l’autre leur vient de la sphère des fixes. Il ne peut non plus les échauffer, puisque, selon Aristote, elles sont impassibles156. Alexandre, qui avait déjà remarqué cette aporie, en proposait deux solutions. La première consistait à montrer par des exemples que certaines actions se transmettent à travers des intermédiaires qu’elles n’affectent pas157. Mais si Olympiodore adopte une telle explication158, ni Simplicius159, ni Philopon160 ne la tiennent pour valable. Quant à la seconde solution d’Alexan[332]dre, nous aurons à y revenir plus loin161. La révolution solaire ne saurait donc être la source de la chaleur terrestre. Si l’on persiste à rapporter cette dernière à un mouvement céleste, on doit plutôt penser à celui de l’ensemble du ciel ou à celui de la première sphère, dont l’action motrice se propage jusqu’à la dernière. Mais une telle cause produirait une chaleur constante, que n’atténuerait pas la nuit. D’ailleurs, c’est évidemment le soleil qui échauffe la terre, et les remarques précédentes prouvent que, pour pouvoir le faire, il doit être chaud, comme l’est le feu162.
51Une autre observation le montre mieux encore. De tous les corps célestes, la lune seule est en contact direct avec le monde terrestre, et cette proximité compense sa légère infériorité de vitesse. Pourtant son mouvement n’est pas cause de chaleur. Elle ne produit une action calorifique, d’ailleurs faible, qu’en temps de pleine lune. On en conclura que le phénomène thermique dépend du phénomène lumineux. Mais la clarté lunaire n’est qu’un reflet de la lumière solaire. Cette dernière doit donc s’accompagner d’une chaleur plus grande. Dans le cas du feu aussi la chaleur est liée à la luminosité. Si donc le soleil échauffe, c’est en raison de sa qualité et non de son mouvement163.
52La théorie de l’échauffement par la réflexion des rayons ne s’oppose pas à cette conclusion, car la réflexion augmente aussi la chaleur produite par le feu164.
53Quant à l’analogie, qu’Aristote invoque en faveur de sa doctrine, c’est celle du feu qui est la plus claire. On voit bien que celui-ci échauffe ce qui s’approche de lui. Mais le Stagirite a préféré recourir à des comparaisons moins évidentes165.
54 Son interprétation souffre d’ailleurs d’une dernière difficulté : elle ne permet pas d’expliquer la fraîcheur de l’ombre. Ici encore, Alexandre avait vu l’objection. Mais la réfutation qu’il en tente [333] est sans valeur. Le phénomène en revanche s’explique bien si l’on admet que le soleil chauffe en raison de sa qualité et que celle-ci accompagne la lumière. La révolution solaire, comme celle de l’ensemble du ciel, produirait d’ailleurs une chaleur invariable166. La conclusion de toutes ces recherches, c’est que le soleil est de nature ignée167.
55Contre une telle conception, Aristote invoquait l’absence d’étoiles filantes dans le ciel et la couleur du soleil. Philopon réfute aussi ces deux indices : contre le premier, il insiste sur l’extrême résistance des corps célestes168 ; contre le second, il note l’absence de corrélation entre les couleurs et les qualités, il attire l’attention sur le fait que le feu se nuance différemment selon la diversité des matières qu’il consume, enfin il observe que le soleil n’est pas blanc, mais jaune et parfois rouge169.
56La masse imposante des développements que je viens de résumer montre avec quel acharnement Philopon s’efforce d’établir la thèse de la nature ignée du soleil. Il s’attaque aussi, encore que moins longuement, à l’impassibilité et à l’incorruptibilité célestes. C’est Alexandre qui lui en fournit l’occasion. L’action du soleil, disait celui-ci, peut se transmettre à travers les dernières sphères, car elles ne sont peut-être pas totalement impassibles. Aristote, en effet, bien qu’il se soit proposé de le faire, n’a pas démontré l’immutabilité du corps céleste. Au reste, il a l’habitude de la qualifier non pas d’absolument impassible, mais d’impassible en ce qui concerne toute affection mortelle. Comme il reconnaît dans le corps divin des degrés de pureté, on peut penser que la lune, moins pure, subit l’action du soleil et la transmet170. Philopon commence par affirmer que maintenir la thèse de l’impassibilité, c’est vouloir sauver Aristote malgré les phénomènes que les sensations nous révèlent. Il cite ensuite le texte d’Alexandre. Les restrictions qu’y subit la doctrine aristotélicienne ne lui semblent pas l’améliorer. S’ils ne sont pas impassibles, les corps célestes ont part aux quatre qualités fonda- [334]mentales, comme les corps sublunaires. S’ils comportent des degrés de pureté, ils ne peuvent être formés de la seule cinquième essence, mais doivent participer aussi aux éléments171. D’ailleurs, si Aristote affirmait l’immutabilité qualitative du ciel sans pouvoir la démontrer, c’est qu’il savait que la thèse de l’incorruptibilité y était liée. Qu’est-ce qu’une corruption, en effet, sinon une modification qualitative poussée au-delà d’une certaine limite ? Dans ces conditions, restreindre l’impassibilité aux affections mortelles est illusoire : tout corps qui peut subir une modification qualitative est nécessairement sujet à la corruption172. À travers les méandres de ces discussions, on voit apparaître les convictions de Philopon : à ses yeux, le ciel n’est ni impassible, ni incorruptible ; il ne diffère pas essentiellement des éléments sublunaires.
57La parenté du Contre Proclus et du Commentaire aux Météorologiques est indéniable. Malgré des diversités dues à leur caractère différent, les deux œuvres expriment la même hostilité contre la cinquième essence. Mais la seconde semble représenter un état de pensée plus évolué que la première. Tandis que celle-ci développe longuement la critique de l’équilibre des masses élémentaires, l’autre croit inutile d’y revenir et, si l’on excepte une courte remarque, elle se contente d’un renvoi à une œuvre antérieure. En outre, si le Contre Proclus ne paraît pas encore se séparer d’Aristote dans la question de la chaleur solaire, le Commentaire réfute sévèrement cette thèse. Enfin, sur l’impassibilité céleste, les deux écrits sont d’accord, mais le second s’exprime avec plus de netteté et — dirai-je — de virulence.
58Les deux œuvres ne constituent d’ailleurs qu’une étape intermédiaire dans une évolution dont le Contre Aristote marque le terme final. Les attaques de cet ouvrage contre la cinquième essence remplissent quatre des six livres qu’il compte173. Les analyser en détail serait trop long ; quelques indications suffiront à notre dessein174. Philopon, qui suit pas à pas le début du De [335] caelo175, rencontre d’abord l’argument tiré du mouvement circulaire. Aristote le fondait sur le principe de la correspondance entre les mouvements et l’essence des mobiles. Un corps simple, disait-il, possède naturellement un mouvement simple et un seul ; réciproquement, à chaque mouvement simple correspond un corps simple. Puisque le mouvement circulaire est simple, un corps doit exister qui le possède naturellement. Faisons un pas de plus. Au mouvement naturel s’oppose le mouvement contre nature ; or les contraires s’opposent un à un, si bien que chaque corps simple ne peut posséder qu’un seul mouvement forcé. Mais pour chacun des quatre éléments, l’un des deux mouvements rectilignes est naturel, tandis que l’autre est forcé. Le mouvement circulaire ne peut donc appartenir à aucun des éléments, ni comme mouvement naturel, ni comme mouvement forcé. D’ailleurs, le mouvement circulaire est supérieur au mouvement rectiligne. On conclura donc à l’existence d’une essence différente des éléments sublunaires et supérieure à eux.
59 Viennent ensuite deux nouveaux arguments. Le mouvement contre nature d’un corps appartient naturellement à un autre. Or le mouvement circulaire est contre nature pour les éléments ; il existe donc quelque autre essence pour laquelle il est naturel. En outre, ce qui est contre nature se corrompt rapidement ; il serait étonnant que, seul, le mouvement circulaire, tout en étant contre nature, pût subsister éternellement. Dès lors, même si le feu le possède contre nature, il existe un autre corps auquel il appartient naturellement. De tout ce qui précède, on peut déduire quelques-uns des caractères de la cinquième essence : ne pouvant pas se mouvoir en ligne droite, elle ne saurait être ni grave ni légère ; n’ayant pas de contraire, puisque son mouvement n’en possède pas, elle est inengendrée et incorruptible176.
60Développant une brève indication du Commentaire aux Météorologiques, Philopon commence par tenter d’établir que les mouvements n’apprennent rien de précis sur les essences177. Puis il note que le mouvement circulaire des astres comporte [336] des diversités et n’est pas véritablement simple178. Par un renversement complet de sa position, il prétend ensuite que le mouvement circulaire du feu et de l’air est naturel et simple : nous avons déjà rencontré cette thèse dans le Commentaire aux Météorologiques179. Philopon s’attaque encore à la thèse de la perfection du cercle et en réfute longuement les divers éléments180. Enfin il souligne avec vigueur la contradiction du Stagirite, qui, à quelques lignes de distance, refuse complètement le mouvement circulaire aux éléments, puis le leur accorde comme mouvement forcé181.
61Le développement suivant est consacré à la gravité et à la légèreté : aux yeux de Philopon, le ciel n’en est ni plus ni moins exempt que les éléments182. Arrivé à ce point, le Contre Aristote interrompt l’examen du De caelo pour porter son attention sur les Météorologiques183. Contre la doctrine de l’équilibre des masses élémentaires, on y retrouve les mêmes arguments que dans le Contre Proclus et dans le Commentaire aux Météorologiques : la supériorité du volume du feu184 ; l’indépendance de la puissance des éléments par rapport à leur masse185 ; le fait que le ciel est un mélange où prédomine le feu, mais où les autres éléments sont aussi représentés par leurs parties les plus subtiles186. À ces objections connues, le Contre Aristote ajoute une considération nouvelle : le semblable, dit Philopon, n’agit pas sur son semblable ; la sphère du feu ne doit donc rien subir du fait de la masse céleste, même si celle-ci est ignée, si bien que les autres éléments ne risquent pas plus de disparaître, que le ciel soit de feu ou qu’il se compose d’une cinquième essence187. En ce qui concerne l’action calorifique du soleil, Philopon semble reprendre ici ce qu’il a dit dans le Com[337]mentaire aux Météorologiques. À ses yeux, la chaleur solaire a pour cause une qualité. Pour le montrer, il établit que les corps célestes possèdent les qualités sensibles, et donc le chaud et le froid, qui sont les premières ; il tire aussi un indice de la couleur du soleil188. Il termine cette partie de son ouvrage en soutenant que tous les philosophes célèbres tiennent le ciel pour un composé des quatre éléments189. Il revient ensuite au De caelo et critique la thèse de la non-génération de la cinquième essence. Il montre que la génération a pour termes non les contraires propres, mais la privation et la forme ; or à la forme du ciel s’oppose une privation190. D’ailleurs le ciel a pour substrat la même matière que les êtres du monde sublunaire191. Enfin le principe de l’impossibilité d’une génération à partir du néant est faux, et l’on peut fort bien concevoir que Dieu, en créant la forme, crée aussi son substrat matériel192. Si les arguments rationnels d’Aristote ont si peu de valeur, les indices qui devraient les confirmer n’en ont pas plus. Que l’on attribue communément le ciel comme séjour à la divinité, cela ne prouve pas que l’on tienne ce lieu pour incorruptible193. Quant à l’immutabilité apparente du ciel, telle que la révèle l’observation, elle s’explique sans peine : les parties les plus importantes d’un tout doivent subsister aussi longtemps que ce tout ; le ciel doit donc demeurer intact aussi longtemps que doit exister le monde194. On retrouve ici un argument du Contre Proclus.
62Comme on a pu le constater, le Contre Aristote reprend la plupart des objections du Contre Proclus et du Commentaire aux Météorologiques, mais il les enrichit à plusieurs reprises et y ajoute une longue critique de la preuve par le mouvement circulaire, que les deux autres œuvres se bornaient à promettre. Quant à l’étude sur la génération du ciel et à la réfutation de l’argument tiré des croyances religieuses, elles sont elles aussi [338] nouvelles. Ainsi s’achève l’évolution de Philopon : parti, en ce qui concerne notre problème, de l’orthodoxie péripatéticienne, il l’abandonne complètement et en fait une critique de plus en plus complète.
63Il ne restait en ce domaine aucune tâche nouvelle pour le De Opificio mundi. En fait, on ne trouve dans cet ouvrage qu’un rappel du Contre Aristote. Dans l’étude que Philopon y consacre à l’essence du firmament, il écrit ceci : « Aristote, qui a supposé que le ciel est formé d’une cinquième essence corporelle, a reçu de notre part une réfutation suffisante195. » Reichardt ne précise pas cette référence, mais on admettra sans peine qu’elle se rapporte parfaitement au début du Contre Aristote196. Un autre texte doit retenir notre attention. Philopon, en un endroit, se demande comment la lumière peut subsister sans luminaires, comme l’affirme la Genèse197. Il répond en faisant remarquer que les limites de la puissance humaine ne coïncident pas avec celles du pouvoir divin. Puis il ajoute :
Regarde ce qui est à tes pieds ; seul le feu est à la fois lumineux et caustique, et nous sommes incapables de séparer l’une de l’autre ces qualités. Si donc on suivant les hypothèses d’Aristote, qui veut que le soleil et les astres ne brûlent pas, que l’on dise comment les luminaires célestes possèdent la luminosité du feu, sans sa causticité. Si l’on se laissait persuader par Platon, qui affirme que ces corps sont formés d’une prédominance de feu, comme le montrent les êtres qui sont proches du soleil et ne peuvent supporter son ardeur, qu’on examine les choses de notre monde [sc. et qu’on se demande] comment les vers luisants, qui possèdent évidemment la luminosité, n’ont aucune part à la causticité198.
64Reichardt croit que Philopon se trompe dans son allusion à Aristote, et il est clair que, si l’on prend καίειν dans son sens habituel et trans[339]itif, il a raison199. Mais le contexte montre que καίειν doit signifier ici être brûlant, être de nature ignée. Il y aurait alors une allusion à la théorie du soleil qui chauffe sans posséder lui-même la chaleur. Philopon la cite sans la critiquer, mais sans non plus l’approuver : elle n’est pour lui qu’un exemple. En revanche, quand il mentionne la théorie platonicienne sur la nature ignée des astres, il la confirme par un appel à l’expérience. On peut voir dans cette circonstance une indication sur ses préférences.
65 À la lumière des analyses qui précèdent, la place du Commentaire aux Météorologiques dans l’ensemble de l’œuvre de Philopon se confirme. Si l’on situe cet ouvrage entre 517 et 520, comme le veut Gudeman, on doit admettre, entre le Commentaire à la Physique et lui, une évolution brusque et profonde, par rapport à laquelle le Contre Proclus, en 529, marquerait un recul compensé, et au-delà, par le Contre Aristote. À cette complication sans nécessité, on préférera une solution plus simple. Par les doctrines qu’il expose, le Commentaire appartient au même groupe que les écrits théologiques ; il doit dater de la même époque. Plus évolué que le Contre Proclus, il l’est moins que le Contre Aristote ; sa composition doit se situer entre celle de ces deux œuvres.
*
66Afin de vérifier la date que je propose, je vais tenter de préciser les références vagues du Commentaire aux Météorologiques à d’autres écrits200. C’est l’allusion à un examen critique de l’argument par le mouvement circulaire qui doit d’abord retenir l’attention. La voici :
Quant aux argumentations que, dans le premier livre du De caelo, il a développées en se fondant sur le mouvement circulaire pour prouver que le ciel appartient à une cinquième essence corporelle, nous les passerons en revue dans d’autres ouvrages201.
67Dans ce texte, Gudeman voit la preuve [340] qu’avant de commenter les Météorologiques, Philopon avait écrit un Commentaire, d’ailleurs perdu, sur le De caelo202. Que Philopon ait expliqué ce traité, c’est fort possible. Mais le passage allégué ne le démontre pas aussi clairement que le dit Gudeman. Le savant allemand a en outre commis une erreur qui vicie toute sa construction. L’allusion du Commentaire aux Météorologiques n’est pas le rappel d’une œuvre antérieure, comme il le croit, mais bien la promesse d’un travail dont il annonce un thème203. Si donc elle concerne un Commentaire au De caelo, celui-ci lui est nécessairement postérieur204. Mais une telle chronologie est peu vraisemblable. S’il expliqua le De caelo, Philopon dut le faire avant de commenter les Météorologiques. C’est du moins ce que suggèrent les indications qu’il donne lui-même sur l’ordre à suivre dans l’explication des traités aristotéliciens205. Sans doute ne sommes-nous pas sûrs qu’il s’y soit rigoureusement conformé. Il serait toutefois téméraire de les négliger sans raison sérieuse206. Il ne semble pas que nous en ayons dans le cas présent. Si le Commentaire aux Météorologiques annonce l’examen d’un passage du De caelo, rien ne prouve qu’une telle étude dût nécessairement faire partie d’un commentaire sur ce traité ; le texte, fort vague, ne mentionne en tout cas aucun titre d’œuvre. On ne peut guère, sur la foi d’un renseignement aussi imprécis, admettre [341] l’existence d’un ouvrage et adopter pour lui une chronologie dépourvue de vraisemblance. On le peut d’autant moins qu’il existe une solution plus simple. En effet, d’après les indications que fournit Simplicius, le Contre Aristote contenait une étude critique sur l’argument par le mouvement circulaire207. Sauf erreur, c’est la seule œuvre de Philopon qui contienne un tel développement. C’est donc probablement lui que vise le Commentaire aux Météorologiques. C’est d’ailleurs lui que mentionne explicitement une promesse du Contre Proclus, parallèle à celle que nous étudions, mais exprimée en termes plus précis208 : ce fait ne peut que renforcer notre conviction. Nous croyons dès lors pouvoir affirmer que le Commentaire aux Météorologiques est antérieur au Contre Aristote, mais date d’une époque où celui-ci existait déjà à l’état de projet.
68La seconde référence que j’examinerai concerne l’argument par l’équilibre des masses élémentaires. Comme je l’ai déjà noté, celui-ci comprend deux parties. La première se fonde sur la théorie des transmutations des éléments209. Au moment où il en termine l’exégèse, Philopon écrit ces mots : « Sur toutes ces questions, nous avons dit ailleurs notre avis ; il s’y trouve à la disposition de ceux qui veulent le connaître, afin de ne pas multiplier les digressions210. » Hayduck suggère que cette allusion vise peut-être le Commentaire au De generatione et corruptione211. Le texte auquel il renvoie explique un passage où Aristote engage une polémique contre les idées d’Empédocle sur l’immutabilité des éléments et sur leur égalité212. Ces deux thèses, comme l’avait déjà remarqué Philopon, se retrouvent dans les Météoro[342]logiques, où elles servent de point de départ à la seconde partie de l’argument par les masses des éléments213. Cette rencontre fournit un premier motif de ne pas retenir la suggestion de Hayduck. Notre référence en effet ne concerne pas la seconde partie, mais bien la première. D’ailleurs, les deux traités aristotéliciens se placent à des points de vue différents : les Météorologiques prouvent que la position d’Empédocle ne dispense pas d’admettre un équilibre des volumes des éléments ; le De generatione montre qu’elle est incohérente et que l’égalité de puissance des éléments suppose leur mutabilité. Dans son exégèse de cette démonstration, Philopon n’exprime aucune opinion personnelle. S’il y mentionne les Météorologiques, c’est uniquement pour rappeler en quelques lignes comment Aristote y déterminait le rapport des masses totales des éléments par celui des volumes que l’on observe dans les transformations des parcelles. Mais il n’institue sur ce sujet aucun examen approfondi et n’émet aucune critique214. Les observations qui précèdent engagent à rejeter l’hypothèse de Hayduck : ce n’est pas dans le Commentaire au De generatione que l’on trouve le développement auquel Philopon se réfère.
69À première vue, il semble qu’un autre texte soit plus satisfaisant. Dans la section de la Physique qu’il consacre à l’infini, Aristote montrait que celui-ci ne saurait être un composé dont l’un des éléments serait infini. Ce dernier, en effet, causerait la disparition des autres, puisque la puissance est proportionnelle à la masse215. Dans son Commentaire à la Physique, Philopon critique longuement cette argumentation. À son avis, les qualités n’augmentent pas avec les volumes. Il admet cependant qu’un composé ne peut comporter d’élément infini, mais il en donne une justification différente : un mélange ou même une simple juxtaposition de deux éléments dont l’un est infini et l’autre fini est impossible, affirme-t-il, car avant qu’ils n’aient pu se réaliser, l’élément infini aura détruit l’autre en raison de la disproportion des volumes ; c’est par exemple ce qui se produirait si l’on voulait unir un setier d’air ou de feu à cent setiers d’eau, ou mélanger [343] à toute la mer un conge de vin216. Est-ce un développement qui répond à l’allusion du Commentaire aux Météorologiques ? On est tenté de le croire, car le principe de la correspondance entre les puissances et les volumes, dont il fait l’examen critique, sert précisément de base à la preuve par l’équilibre des masses élémentaires, qui est l’occasion de notre référence. Un examen plus attentif oblige pourtant à rejeter cette hypothèse. Sans doute s’agit-il dans les deux cas du même principe. Mais les Météorologiques ne l’utilisent que pour démontrer l’existence de la cinquième essence et Philopon le sait tellement bien que, dans la phrase immédiatement antérieure à la référence qui nous occupe, il le rappelle expressément217. Dans ces conditions, on s’attend à ce que le texte auquel il renvoie étudie la valeur de cette démonstration. Or, dans le Commentaire à la Physique, notre auteur n’en dit pas le moindre mot et se limite au problème de l’infini. À cette première objection s’en ajoute une seconde. Le Commentaire aux Météorologiques est résolument hostile à la cinquième essence218. Sous peine d’incohérence, il ne pouvait admettre l’argument d’Aristote en sa faveur219. Or, si nous appliquons à ce dernier les critiques du Commentaire à la Physique, nous constatons qu’il n’est atteint que dans ses modalités et non dans sa conclusion. Comme on s’en souvient, en effet, Philopon refuse de lier l’intensité des qualités aux variations des masses ; mais il pense pourtant qu’une augmentation de volume provoque un accroissement de puissance. S’il n’applique expressément cette remarque qu’au cas d’un élément infini, les exemples qu’il allègue montrent bien qu’il la croit tout aussi vraie dans le cas de volumes finis. Dès lors, la cinquième essence reste indispensable à l’équilibre du monde ; si l’on refusait d’en admettre l’existence, on devrait accorder au feu un volume tel que les autres éléments ne pourraient subsister. On ne peut donc voir dans le [344] développement du Commentaire à la Physique le texte auquel fait allusion notre référence.
70Si l’on veut le découvrir, il faut se reporter au Contre Proclus. L’un des chapitres de cet ouvrage, on s’en souvient, attaque expressément les Météorologiques et soutient qu’un ciel igné ne cause pas la disparition des autres éléments220. Cette thèse établie, les deux éventualités d’un ciel composé d’air ou d’air et de feu ne conservent plus aucun intérêt ; aussi ne faut-il pas s’étonner que Philopon les passe sous silence et ne juge pas nécessaire de s’arrêter à la réfutation qu’en fait le Stagirite221. L’argumentation que je viens de rappeler n’est pas un bien propre du Contre Proclus ; on la retrouve, encore amplifiée, dans le Contre Aristote222. Mais le Commentaire aux Météorologiques ne saurait y renvoyer puisqu’il lui est antérieur223. C’est donc bien le Contre Proclus qu’il vise. On en conclura qu’il fut composé après cet ouvrage, c’est-à-dire après 529.
71Il resterait à identifier l’œuvre à laquelle Philopon se réfère par trois fois à propos du mouvement circulaire du feu224. Il s’agit d’un écrit postérieur à 529, puisqu’il réfute la thèse du mouvement surnaturel, que le Contre Proclus admet encore225. D’autre part, sa réfutation de la théorie du mouvement forcé l’apparente au Contre Aristote. Mais ce dernier est postérieur au Commentaire aux Météorologiques ; de plus, il ne mentionnait probablement même pas la notion de mouvement surnaturel226. Faut-il penser à un Commentaire perdu au De caelo ? Ce n’est pas impossible, mais on supposerait avec autant de vraisemblance un de ces écrits plus personnels dont Philopon semble avoir eu l’habitude dès le début de sa carrière227. Aucune solution ne [345] m’apparaît sûre. Tout ce qu’on peut affirmer, c’est que, entre le Contre Proclus et le Commentaire aux Météorologiques, notre auteur composa un ouvrage où il démontrait que le mouvement circulaire du feu ne pouvait être ni forcé ni surnaturel.
*
72Nous pouvons conclure que, tant en raison des doctrines qu’il expose que de ses références à d’autres œuvres, le Commentaire aux Météorologiques est antérieur au Contre Aristote, mais postérieur au Contre Proclus, dont il est en outre séparé par un écrit difficilement identifiable. Cette date, différente de celle que propose Gudeman, oblige à revoir les hypothèses du savant allemand.
73Tout d’abord, si Philopon écrivit le Commentaire après le Contre Proclus, il était chrétien quand il le composa. Or, Gudeman pense que toute l’œuvre exégétique de notre auteur date d’une période païenne, qui se terminerait aux environs de 520, et, pour étayer son hypothèse, il emploie un indice, l’absence de doctrines chrétiennes, qu’il croit découvrir dans tous les Commentaires indistinctement228. Dès lors, si sa déduction est fausse à propos du Commentaire aux Météorologiques, elle l’est peut-être aussi pour les autres écrits du même groupe. L’hypothèse même du paganisme de Philopon perd ainsi sa principale justification. Ma remarque, insuffisante en elle-même, invite à une enquête directe sur ce sujet.
74 Rappelons en premier lieu que la seule foi religieuse que les témoignages anciens attribuent à Philopon est la foi chrétienne. Sur une période païenne et sur une conversion, les textes sont muets. Cette dernière aurait pourtant dû avoir un certain retentissement : la conversion d’un philosophe déjà connu par ses travaux d’exégèse n’a pu passer inaperçue. Sans doute ne peut-on se fier à un argument a silentio. Mais on reconnaîtra aussi que seuls des indices très forts sont à même de prouver un fait sur lequel on ne possède aucune indication explicite.
75[346] Wallies avait noté une autre circonstance intéressante, mais sans en tirer tout le parti possible229. D’après la majorité des manuscrits, l’auteur des Commentaires s’appelait Jean230. Or, Jean est un nom chrétien231. Quant à Philopon, simple surnom, d’ailleurs moins bien attesté, il est possible qu’il désignait les membres d’une association chrétienne232. Peut-on croire que l’auteur après sa conversion ou quelque scribe consciencieux ait modifié le libellé de tous les titres ? Ce n’est pas impossible, mais on s’étonnera que ce travail ait été effectué avec un soin tel qu’aucune trace de l’état ancien n’ait subsisté. Il serait plus simple de voir en Philopon un chrétien de naissance.
76Aux yeux de Gudeman, un fait nous en empêche. Élève du païen Ammonius, Philopon était certainement païen lui aussi233. On se rangera difficilement à cet avis. On aurait tort de croire que les intellectuels chrétiens se tenaient systématiquement à l’écart des païens. Pour le montrer, je relèverai quelques faits caractéristiques, en insistant sur ceux qui concernent l’école d’Alexandrie. Alors que l’ère des persécutions n’était pas encore close, Ammonius Saccas, le propre maître de Plotin, eut comme élève un chrétien de naissance, Origène, qui allait devenir une des lumières du christianisme de son époque234. Au quatrième [347] siècle, on voit les empereurs chrétiens manifester leur confiance au païen Thémistius, qui enseignait à Constantinople la philosophie aristotélicienne. Il faut dire que celui-ci montre dans ses œuvres une réelle tolérance et un souci d’éviter les formules trop spécifiquement païennes. Eut-il des élèves chrétiens ? C’est possible. En tout cas, son contemporain, Grégoire de Naziance, l’apprécie et n’hésite pas à l’écrire235. Sur l’école philosophique d’Alexandrie, nous trouvons une série d’indications assez abondantes. Remarquons d’abord que le milieu alexandrin était plus tolérant que l’école d’Athènes. Tandis que celle-ci se raccrochait farouchement au paganisme, les philosophes de la métropole égyptienne entrèrent vite dans la voie des accommodements236. Déjà Hiéroclès avait subi l’influence du christianisme et ses écrits en portent la trace237. Plus tard, Ammonius aurait conféré avec l’évêque d’Alexandrie pour déterminer les modifications doctrinales qui rendraient sa philosophie acceptable aux chrétiens238. Quoi qu’on pense de la vérité de cette anecdote, il introduisit dans son système quelques innovations qui eurent pour résultat, sinon pour but, de réduire l’écart entre Aristote et le christianisme239. On a aussi noté que les commentateurs alexandrins semblent manifester une prédilection pour les traités logiques, dont la matière offrait peu d’occasions de conflits240. Seule la présence d’élèves chrétiens dans l’école justifie une attitude aussi conciliante. En fait, nous savons qu’Hiéroclès eut comme disciples des adeptes de la religion nouvelle241. Il est donc fort vraisemblable que Philopon put fréquenter les cours d’Ammonius sans être nécessairement païen.
77[348] Mais s’il était chrétien, sa foi a dû laisser des traces dans ses écrits. Busse avait cru en déceler dans le Commentaire aux Catégories242. Cependant, comme l’observe Gudeman, ce ne sont peut-être que des interpolations. D’ailleurs elles sont trop sporadiques pour être concluantes. À la suite de Freudenthal, le savant allemand note qu’à cette époque, des réminiscences chrétiennes isolées ne suffisent pas à prouver le christianisme de leur auteur. En fait, on ne trouve dans les Commentaires aucune trace certaine de conceptions chrétiennes, pas même dans ceux qui expliquent la Physique et le De Anima, où il serait étonnant qu’elles aient pu être passées sous silence243.
78Il faut reconnaître que les allusions aux anges que l’on trouve dans le Commentaire aux Catégories pourraient être le fait d’un néoplatonicien aussi bien que d’un chrétien244. Elles ne nous apprennent donc rien sur la religion de Philopon. Mais à supposer que les Commentaires soient complètement dépourvus de références chrétiennes, s’ensuit-il nécessairement que notre auteur ait été païen ? Tannery ne le croyait pas. Il reconnaît que plusieurs ouvrages de Philopon ne contiennent aucune indication religieuse ; il a noté que, dans son exégèse, notre commentateur suit la tradition sans invoquer d’autres autorités et qu’il raconte même des fables païennes en se contentant d’indiquer par une brève formule qu’il ne les prend pas à son compte. Et pourtant il estime que la religion de Philopon ne fait aucun doute245. En fait, à l’époque de Philopon, l’exégèse d’Aristote reposait sur une tradition païenne, mais dont certains [349] représentants s’étaient efforcés de la rendre acceptable pour des chrétiens246. Dans ces conditions, on comprend sans peine l’absence de mentions expresses du christianisme dans les Commentaires247.
79Il est pourtant clair que, si Philopon était chrétien, ses œuvres doivent en porter la trace. À défaut de références explicites, notre auteur a dû au moins, dans les cas où plusieurs exégèses existaient, choisir celle qui était la plus favorable à ses convictions ; de plus, on comprendrait mal qu’il ait répété sans les combattre des thèses inconciliables avec le dogme. C’est en se fondant sur de telles considérations que Gudeman croit trouver une preuve du paganisme de Philopon. À l’en croire, ni le Commentaire à la Physique, ni le Commentaire au De anima ne présentent la moindre trace de conceptions chrétiennes ; dans le second, en particulier, Philopon n’élève aucune protestation contre les thèses de l’éternité de l’âme et de la matière, et ce fait serait significatif248. Examinons d’abord cette dernière affirmation, que, malheureusement, le savant allemand n’étaie d’aucune référence. Le Commentaire au De anima s’ouvre par un prologue où Philopon a voulu exprimer ses opinions personnelles249. Un tel texte est particulièrement précieux, et c’est à lui que je m’attacherai principalement, sans toutefois négliger le reste de l’œuvre. Philopon y promet de démontrer l’immortalité de l’âme rationnelle250. Mais en réalité il dépasse sa promesse et [350] conclut à son éternité251. Dans la suite, il lui arrive à plusieurs reprises de répéter cette thèse252. Est-elle incompatible avec le christianisme ? On ne peut guère l’affirmer, si l’on se souvient des théories d’Origène. D’après ce théologien, la création est éternelle. Les créatures qui existent de toute éternité sont des esprits qui, s’écartant plus ou moins de Dieu, subissent une déchéance proportionnée à leur faute. Certains d’entre eux, unis à des corps humains, deviennent des âmes253. Sans doute les doctrines origénistes furent-elles l’objet de condamnations ecclésiastiques, mais on notera qu’au vie siècle, elles connurent dans certains milieux chrétiens un regain de faveur, spécialement celle de la préexistence des âmes. C’est à cette dernière que s’attaque le premier des anathématismes que Justinien publia en 542 contre les thèses du docteur alexandrin254. Si nous passons à la matière, Philopon fait quelques allusions sans importance à l’éternité du corps céleste255. Il s’intéresse plus longuement au corps humain. À l’en croire, seule l’âme végétative est inséparable du corps grossier de la vie terrestre. L’âme animale en possède un autre, plus subtil, formé d’air, grâce auquel il lui est possible de se purifier dans les enfers256. Ce corps est-il éternel ? Philopon ne se prononce pas à ce sujet. Il rappelle seulement que, d’après certains, l’âme purifiée l’abandonne, mais que, même alors, il lui reste un corps, le corps lumineux, que l’on dit éternel257. À deux reprises, Philopon reparlera de ce dernier, mais il ne semble pas y croire. La première fois, il l’introduit par un φασίν prudent258 ; la seconde, il s’en sert seulement comme d’un exemple dans une critique d’Aristote, mais ne s’y attarde pas259. Nulle part il n’y consacre de développement particulier. À moins [351] d’omissions de ma part, on ne peut pas affirmer que Philopon se montre un partisan de l’éternité de la matière et des corps. L’eût-il même été, ce ne serait pas un motif suffisant pour penser qu’il n’était pas chrétien. Ici encore, on ne peut oublier Origène. Celui-ci croyait vraisemblablement à l’éternité de la matière260. Et s’il est peu probable qu’il attribuât un corps éternel aux esprits créés, du moins cette thèse se trouve-t-elle dans la traduction latine de son De Principiis que fit Rufin au vie s. Celui-ci la tenait peut-être de Didyme, dont il fut l’élève pendant plusieurs années à Alexandrie. En tout cas on a la preuve que, dès avant l’époque de Philopon, des chrétiens la soutenaient261. Les indices sur lesquels Gudeman avait attiré l’attention ne constituent donc nullement des preuves de paganisme.
80En revanche, on voit bien que, dans plusieurs Commentaires, Philopon interprète ou critique Aristote de manière à soutenir des doctrines conciliables avec le christianisme. Sans doute ne fait-il aucune mention expresse de cette religion. Sans doute encore n’a-t-il fait ainsi que suivre la voie dans laquelle l’engageaient ses maîtres alexandrins. Mais aucun autre commentateur contemporain ne semble s’être avancé aussi loin que lui. Revenons d’abord au Commentaire au De anima. Philopon y insiste sur l’immortalité de l’âme humaine et s’élève contre l’interprétation d’Alexandre, qui croyait reconnaître l’esprit divin dans l’âme à laquelle Aristote attribue l’immortalité262. Dans son commentaire du troisième livre, que nous ne possédons plus que dans une traduction latine, il revenait encore sur ce problème et y consacrait une longue étude263. Vancourt note que tout ce développement trouve son parallèle dans le Commentaire d’Étienne d’Alexandrie et suppose que les deux commentateurs ont puisé [352] à une source commune qu’il propose d’identifier avec Ammonius264. Il remarque en outre que, des quatre exégèses possibles, nos deux auteurs ont choisi précisément celle qui s’accordait le mieux avec la religion chrétienne265. Simplicius l’adoptait aussi, mais il est significatif qu’il s’y attardait beaucoup moins : pour un païen, la question était moins vitale266.
81Le Commentaire à la Physique est plus riche encore en indications intéressantes. Philopon y attaque d’abord l’opinion d’Aristote selon laquelle l’Univers est inengendré. L’être, dit-il, ne peut certes pas provenir de l’être, mais il peut surgir du non-être, sans aucune matière préexistante ; seule la préexistence de la cause efficiente est indispensable. Tant que l’on n’aura pas prouvé le caractère inengendré de la matière, on peut admettre que le Démiurge la crée en même temps que la forme267. Philopon dit avoir étudié ailleurs ce problème268. Il y revient encore plus loin et s’efforce de montrer que, pour Aristote, la matière est inengendrée non quant à la cause, mais bien quant au temps269. Cela revient à dire qu’elle est créée ab aeterno. On trouve cette interprétation chez Simplicius270. Comme le développement rappelé auparavant, elle ne fait que reprendre une théorie d’Hiéroclès. Influencé par le christianisme, le maître alexandrin lui aussi soutenait que le Démiurge crée le monde du néant, sans utiliser de matière préexistante, et qu’il le crée ab aeterno271. Mais Philopon va peut-être plus loin encore. Directement après avoir interprété le Stagirite comme je viens de le dire, il note que la thèse aristotélicienne d’une matière inengendrée repose sur le principe selon lequel rien ne vient du non-être, mais que celui-ci est faux si on l’applique à la cause matérielle, si bien que la matière première peut fort bien venir du néant et être engen[353]drée272. Notre auteur ne rappelle pas explicitement son exégèse du terme inengendré, mais la succession même des développements permet de croire que c’est elle qu’il a en vue. Notre passage tendrait alors à prouver que la matière est engendrée dans le temps. Ce serait un pas de plus vers la doctrine chrétienne la plus courante, celle de la création temporelle.
82On admettra d’autant plus volontiers cette interprétation que Philopon critique aussi les thèses de l’éternité du temps et du mouvement. Aristote, dans son étude sur l’infini, disait que si celui-ci n’existe absolument pas, il en résulte de nombreuses absurdités ; l’une d’elles est que le temps aura commencement et fin273. Dans son explication de ce passage, Philopon dénombre ces absurdités, puis il en fait la critique. Il montre en particulier que toute génération ne se fait pas dans le temps. Il rappelle aussi qu’il a démontré, dans son commentaire du huitième livre de la Physique, que la preuve aristotélicienne de l’éternité du mouvement n’est pas concluante274. En un autre endroit, il attaque la démonstration aristotélicienne de l’éternité du temps. Elle se fonde, dit-il, sur l’éternité du mouvement. Mais celle-ci n’a pas été démontrée dans le huitième livre de la Physique, et Philopon rappelle ici encore son exégèse de ce texte275. Nous ne la possédons malheureusement plus. Mais il nous suffit de savoir que Philopon n’admettait ni l’éternité du temps ni celle du mouvement. L’insistance qu’il met à les rejeter s’expliquerait bien si, chrétien, il voulait défendre sa croyance en une création temporelle du monde. En fait, dans un passage où le texte d’Aristote ne l’y incitait pourtant pas, il consacre un long développement [354] à montrer que ni le temps ni le monde ne sauraient être éternels276.
83Le Commentaire au De generatione et corruptione ne nous retiendra pas longtemps. Un seul texte nous intéresse. Philopon y note que subir (πάσχειν) et agir (ποιεῖν) se disent uniquement à propos des changements qualitatifs. Puis il ajoute que c’est la raison pour laquelle Aristote n’appelle pas Dieu cause efficiente (ποιητικόν) du monde, car Dieu est l’artisan non des qualités mais de l’essence de l’Univers et le verbe qui désigne son action est créer (παράγειν)277. Cette indication, que le texte commenté n’appelait d’ailleurs pas, est intéressante dans sa brièveté. Elle est un écho des controverses suscitées par la nature de la causalité que le Stagirite accorde à Dieu par rapport au monde. Ammonius, peut-être sous l’influence du christianisme, y a vu une causalité efficiente, et son enseignement sur ce point se répandit chez les exégètes ultérieurs278. C’est certainement à lui que se réfère ici Philopon. Que cette thèse ait eu de l’importance pour lui, c’est ce qui ressort du fait qu’il y fait allusion en un passage où cela n’était pas du tout nécessaire. On comprendrait facilement cette attitude de la part d’un chrétien.
84Le Commentaire aux Météorologiques, on l’a vu à loisir, critique abondamment Aristote. Je ne reviendrai pas sur les attaques rappelées plus haut279. Je noterai seulement leur parenté avec celles du Contre Proclus et du Contre Aristote280, qui sont certainement d’inspiration chrétienne. J’ajouterai que Philopon, à plusieurs reprises, y blâme les idées de Damascius, particulièrement celles qui se fondent sur l’astrologie. Il insiste sur le fait qu’en matière de physique on doit invoquer des causes physiques281. Ce peut être tout simplement la manifestation d’un esprit scientifique. On ne doit pourtant pas oublier que Damas[355]cius était le chef de l’école d’Athènes au moment de sa fermeture, ni que les croyances astrologiques étaient l’un des traits par lesquels les païens de cette époque se distinguaient des chrétiens282. Il est donc possible que l’hostilité de Philopon ait eu un motif religieux.
85Quant aux Commentaires des traités logiques, il n’y a pas lieu de s’y arrêter : ils constituent un terrain neutre où les croyances de l’auteur n’ont guère l’occasion de se manifester283.
86Si les raisons invoquées par Gudeman en faveur du paganisme de Philopon sont dénuées de fondement, on constate en revanche que les Commentaires montrent un intérêt tout particulier pour les exégèses et les critiques susceptibles de concilier l’enseignement philosophique avec les dogmes chrétiens. Il y a donc tout lieu de croire que, dès l’époque où il les écrivit, Philopon était chrétien284.
87En ce qui concerne l’attitude de notre exégète à l’égard des philosophes païens et spécialement d’Aristote, elle ne prouve pas, comme le pense Gudeman285, que les Commentaires soient plus anciens que les écrits théologiques. On notera d’abord que ceux-ci savent reconnaître les mérites du Stagirite et ne contiennent pas d’expressions particulièrement violentes à son égard. Le Contre Proclus loue son intelligence286, et, même quand il le critique, les termes qu’il emploie restent très mesurés287. En allait-il de même dans le Contre Aristote ? Nous ne pouvons en juger directement, mais il est vraisemblable que la réponse serait affirma[356]tive. Gudeman lui-même avoue que le Contre Proclus traite avec une remarquable courtoisie le philosophe contre lequel il est spécialement dirigé. C’était probablement l’attitude habituelle de Philopon à l’égard de ses adversaires288. À ce point de vue, les écrits théologico-philosophiques ne diffèrent donc pas des Commentaires au point de ne pouvoir en être contemporains. Ces derniers, d’ailleurs, ne limitent pas leur polémique contre Aristote aussi étroitement que le dit Gudeman289. Les textes que j’ai cités plus haut révèlent au contraire un auteur très libre et qui n’hésite pas à se séparer du péripatétisme sur quelques points importants. Quant aux expressions par lesquelles se manifeste cette opposition, si elles sont en général assez douces comme l’affirme Gudeman290, du moins sont-elles toujours très catégoriques291. Elles révèlent même parfois une ironie assez cruelle. Je n’en donnerai qu’un exemple : le Commentaire aux Météorologiques constate en un endroit qu’Aristote, sans le remarquer, est tombé dans ses propres filets292. Un synchronisme au moins partiel des séries exégétique et théologique n’est donc nullement invraisemblable et les termes dans lesquels s’y expriment les polémiques de Philopon n’obligent nullement à le rejeter.
88Si les diverses conclusions auxquelles je suis arrivé sont exactes, elles modifient assez profondément la reconstitution biographique de Gudeman. Voici celle que je proposerais. Philopon était probablement chrétien de naissance. Rien en tout cas n’indique qu’il ait jamais été païen. Dès le début de son activité littéraire, il manifeste son christianisme en interprétant Aristote d’une manière favorable à l’immortalité de l’âme humaine et en le critiquant à propos de la création du monde et de l’éternité du [357] mouvement. Il fut peut-être séduit un instant par les idées d’Origène, mais les abandonna bientôt. La fermeture de l’école d’Athènes a sans doute produit sur son esprit une assez forte impression. Il est remarquable en tout cas que son Contre Proclus est l’exact contemporain de cet événement. Peut-être la mesure de Justinien fut-elle difficilement admise dans les cercles philosophiques d’Alexandrie, où païens et chrétiens semblent avoir fait un effort pour harmoniser leurs points de vue. Philopon aurait alors voulu montrer qu’elle atteignait les disciples d’un philosophe dont l’enseignement était fort critiquable et qui n’avait consenti aucune concession au christianisme. C’est peut-être pour la même raison qu’un peu après, dans son Commentaire aux Météorologiques, il attaqua à plusieurs reprises Damascius, qui dirigeait l’école d’Athènes au moment de sa fermeture. À ce moment encore, il prit apparemment une conscience plus nette des contradictions entre les doctrines des païens et sa religion. C’est en effet dans le Contre Proclus qu’apparaît pour la première fois la critique de la cinquième essence. Un ouvrage postérieur que nous ne possédons plus y ajoutait une réfutation de la théorie du mouvement surnaturel du feu. On peut penser que Philopon craignait dans ces doctrines une certaine divinisation du ciel dans laquelle il voyait une atteinte à la majesté de Dieu. Le Commentaire aux Météorologiques, composé après 529, révèle une accentuation de cette attitude. On y voit en plus apparaître la critique de l’astrologie. Enfin le Contre Aristote constitue comme une somme des griefs de Philopon contre le système péripatéticien. Dans le De Opificio mundi, postérieur au Contre Aristote et écrit après 557, la philosophie n’apparaît plus qu’indirectement et cède la place à la théologie et à l’exégèse biblique.
89Seule une étude exhaustive des œuvres de Philopon révélerait le degré d’exactitude de cette reconstitution provisoire. Celle-ci me semble du moins respecter plus complètement que celle de Gudeman les indications sur lesquelles j’ai attiré l’attention. Elle permet en outre de mieux comprendre les répercussions des événements de la première moitié du vie siècle sur l’esprit de Philopon.
Notes de bas de page
1 Philopon, In Phys., dans les Commentaria in Aristotelem graeca, XVI et XVII (= Phil., In Phys.), 703, 16 et 17 : φαμὲν γὰρ ἐνεστηκέναι νῦν καὶ ἐνιαυτὸν καὶ μῆνα καὶ ἡμέραν, ἐνιαυτὸν Διοκλητιανοῦ ἔτος σλγʹ, μῆνα παχών, ἡμέραν δεκάτην. Sur ce texte, cf. l’apparat critique de Vitelli et Gudeman Alfred, « Joannes 21 », dans Realencyclopädie, IX.2, 1916, col. 1768 et 1778. Contrairement à ce qu’affirme Gudeman, nous possédons le commentaire complet des quatre, et non seulement des trois premiers livres de la Physique.
2 Philopon, De aeternitate mundi contra Proclum (= Phil., C. Pr.), 579, 14-15 Rabe : καὶ νῦν γὰρ ἐφ’ ἡμῶν κατὰ τὸ διακοσιοστὸν τεσσαρακοστὸν πέμπτον Διοκλητιανοῦ ἔτος κτλ. Cf. Gudemana., art. cit., col. 1768 et 1788.
3 Philopon, De Opificio mundi (= Phil., De op. m.), 2, 4 sq. Reichardt, dédie son traité à un certain Serge, qu’il qualifie d’ἀρχιερεύς. Égarés par les indications de Photius et de Nicéphore Calliste, plusieurs érudits ont identifié ce personnage avec le patriarche qui gouverna l’église de Constantinople de 610 à 639 ; sur cette erreur, cf. Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1768. En raison des dates de l’In Phys. et du C. Pr., il fallait alors supposer l’existence de plusieurs Philopons. C’est ce que fit Tannery Paul, « Sur la période finale de la philosophie grecque » [1896], dans Mémoires scientifiques, VII, Paris – Toulouse, Gauthier-Villars – Édouard Privat, 1925, pp. 211-241, et Tannery Paul, « Philoponus », dans Mémoires scientifiques, op. cit., pp. 318-320). Pour ce savant, les Commentaires sur Aristote et sur l’Arithmétique de Nicomaque, le Traité sur l’astrolabe et le Contre Proclus sont d’un même auteur, qui vivait pendant la première moitié du vie s. ; quant au De op. m. et aux autres ouvrages théologiques, ils appartiennent à un ou deux Philopons théologiens, postérieurs d’une ou de deux générations : cf. art. cit., pp. 220-222 et 318-319. En réalité, une telle hypothèse n’a aucun fondement sérieux, car le dédicataire du De op. m. n’est pas le patriarche de Constantinople, mais bien Serge de Tella, qui fut le successeur de Sévère en qualité de patriarche monophysite d’Antioche ; cette identification, déjà proposée par Ritter et Nauck, a été solidement établie par Walther Reichardt, dans la préface de son édition du De op. m., p. viii-ix ; personne ne la conteste plus. Or, Serge, dont on sait qu’il fut patriarche pendant les trois dernières années de sa vie, fut consacré en 557-558, comme l’a montré Brooks Ernest Walter, « The Patriarch Paul of Antioch and the Alexandrine Schism of 575 », Byzantinische Zeitschrift, 1929-1930, vol. 30, p. 469, d’après des documents qu’il est le premier à avoir utilisés ; la date ainsi établie est admise par Stein Ernest, Histoire du Bas-Empire, t. II, Paris, Desclée de Brouwer, 1949, p. 626 et 627, n. 2. Il faut donc admettre que Serge régna de 557/8 à 559/60 et préférer ces dates à celles que divers savants avaient proposées antérieurement et qui se situent d’ailleurs toutes aux environs du milieu du vie s. La datation exacte du De op. m. suppose encore résolu un dernier problème : Serge était-il déjà patriarche quand Philopon lui dédia son ouvrage ? Reichardt W., op. cit., p. xi, n’en doute pas. Mais Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit.., col. 1771, et FURLANIGiuseppe, « Il trattato di Giovanni Filopono sul rapporto tra le parti e gli elementi ed il tutto e le parti, tradotto dal siriaco », Atti del reale Istituto Veneto, 1921-1922, vol. 81, fasc. 2, p. 102, n. 5, le conteste. Stein E., Histoire du Bas-Empire, op. cit., p. 627, n. 2, résout la question par l’affirmative en notant que Serge devait être évêque pour mériter la qualification d’ἀρχιερεύς et qu’il ne le fut pas avant de devenir patriarche d’Antioche. En conséquence, on peut affirmer que le De op. m. fut écrit entre 557 et 560. Steine., Histoire du Bas-Empire, op. cit., p. 701, n. 1, le place vers 559.
4 Il en va de même pour un autre ouvrage relatif à la création du monde, dont j’ai essayé de démontrer l’existence dans mon mémoire de licence intitulé Philopon. Contre Aristote, livre I, Université de Liège, 1942-1943 [texte désormais perdu].
5 Pour le De op. m., la dédicace ne laisse aucun doute. Pour le C. Pr., cf. Gudeman A., « Joannes 21 » art. cit., col. 1789. Pour le Contre Aristote, c’est son inspiration chrétienne qui lui valut l’hostilité de Simplicius, cf. Praechter Karl, « Simplikios 10 », dans Realencyclopädie, III.A.1, 1929, col. 204 et 212.
6 Gudeman, « Joannes 21 », art. cit., col. 1769 et 1774-1780 (en tête de chacune des notices consacrées aux divers commentaires).
7 Wallies Maximilian, compte rendu de l’article de Gudeman, dans la Berliner philologische Wochenschrift, 1916, col. 588, en signale quelques-unes. J’aurai l’occasion d’en indiquer plus loin.
8 Phil., C. Pr., 258, 24 ; 396, 24 ; 483, 20, annonce clairement le Contre Aristote et indique quelques-uns des thèmes qu’il y traitera. Cf. Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1789 et mon mémoire précédemment cité.
9 Busse Adolf, Ammonii In Aristotelis Categorias Commentarium, CAG IV.4, Berlin, Reimer, 1895, pp. i-ii.
10 Gudeman, « Joannes 21 », art. cit., col. 1769 et 1771.
11 Ibid., col. 1769-1770. Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 223, avait déjà noté l’anomalie d’une telle expression sous la plume d’un chrétien, mais il croyait l’expliquer par le fait qu’« une partie de ses [sc. de Philopon] commentaires ne nous est parvenue qu’en extraits mélangés avec des fragments d’autre provenance ». Peut-être pensait-il par exemple au commentaire des quatre derniers livres de la Physique, dont nous ne possédons plus que des fragments ; mais en tout cas la remarque ne saurait s’appliquer au Commentaire aux Premiers Analytiques, où se trouve l’expression ὁ θεῖος Ἰάμβλιχος (26, 5).
12 Gudemana., « Joannes 21 », art. cit., col. 1770-1771.
13 Christ Wilhelm von, Schmid Wilhelm, Stählin Otto, Geschichte der griechischen Litteratur, II.26, München, Beck, 1924, p. 1067 ; Ueberweg Friedrich und Praechter Karl, Die Philosophie des Altertums, Berlin, Mittler, 192612, p. 643 ; Altaner Berthold, Précis de Patrologie, trad.. Marcel Grandclaudon, Mulhouse – Tournai, Salvator – Casterman, 1941, p. 431 ; Tatakis Basile, La Philosophie byzantine, dans Bréhier Émile, Histoire de la philosophie, 2e fasc. Suppl.., Paris, Presses Universitaires de France, 1949, pp. 39-40 ; la conversion de Philopon paraît tellement sûre que certains bibliographes l’utilisent comme moyen de classement, par exemple Perler Otmar, « Patristische Philosophie », dans BOCHENSCKIJózef Maria, Bibliographische Einführungen in das Studium der Philosophie, t. 18, Bern, A. Francke, 1950, p. 36.
14 Maspero Jean, Histoire des Patriarches d’Alexandrie, Paris, Honoré Champion, 1923, p. 198, parle de Philopon comme d’un monophysite de naissance ; il ne cite jamais le travail de Gudeman et ne prête guère d’attention aux Commentaires ; d’ailleurs, Philopon l’intéresse avant tout par son monophysisme et son trithéisme. Bardy Gustave, « Jean Philopon », dans Dictionnaire de théologie catholique, t. VIII, 1924, col. 831 sq., connaît et utilise Gudeman, mais il ne prend pas position à propos des deux thèses que nous étudions. Sanda Adalbert, Opuscula monophysitica Joannis Philoponi, Beyrouth, Typographia catholica, 1930, Praenotanda, pp. 5-7, étudie certaines questions de chronologie ; ses solutions diffèrent de celles de Gudeman, qu’il ne cite pas. Mais il ne traite pas des œuvres dont nous nous occupons ici. Stein E., Histoire du Bas-Empire, op. cit., p. 627, n. 2, critique la chronologie de Gudeman, mais pas sur les points qui nous importent, si ce n’est pour le problème des dates de Serge (à ce propos, cf. p. 23, n. 3).
15 HERMANNThomas, « Johannes Philoponus als Monophysit », Zeitschrift für die neutestamentliche Wissenschaft und die Kunde der älteren Kirche, 1930, vol. 29, p. 210, n. 9.
16 Wallies M., art. cit., col. 587-588. Avant Gudeman, il ne semble pas que l’hypothèse d’une conversion ait jamais été exposée. Tout au plus pourrait-on supposer que Praechter Karl, « Christlich-Neuplatonische Beziehungen », Byzantiniche Zeitschrift, 1912, vol. 21, no 1, p. 1, y pense quand il dit que c’est comme chrétien que Philopon écrivit ses ouvrages sur la création et sur l’éternité du monde, sans faire aucune allusion aux Commentaires. Pour Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 222, « la religion de Philopon ne fait aucun doute » ; c’est d’autant plus remarquable que, outre les Commentaires philosophiques et les œuvres scientifiques, ce savant n’accorde à notre auteur que le seul Contre Proclus. De même E. Zeller exclut systématiquement Philopon de son texte en raison de ses convictions chrétiennes : cf. à ce sujet Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 211.
17 Le titre même de certains de ses Commentaires indique qu’ils dépendent d’Ammonius ; cf. Gudemana., « Joannes 21 », art. cit., col. 1774.
18 En voici un exemple : dans son Commentaire à la Physique, Philopon explique et utilise à plusieurs reprises, sans indiquer la moindre réserve, le principe que rien ne naît de rien, cf. Phil., In Phys., 51, 25 – 52, 4 ; 169, 20-29 et 184, 24-25. Pourtant, en deux passages de la même œuvre, il critique longuement ce même principe, cf. ibid., 54, 13 – 55, 26 et 191, 9 – 192, 2.
19 Publié dans les CAG III.2, ed. Michael Hayduck, Berlin, Reimer, 1894 (= Al. Aphr., In Meteor.).
20 Ueberweg F. und Praechter K., Die Philosophie des Altertums, op. cit., p. 634 et 643.
21 Simplicius, In Phys. (CAG IX et X), ed. Hermann Diels, Berlin, Reimer, 1882 et 1895 (= Simpl., In Phys.) ; In De caelo (CAG VII), ed. H.L. Heiberg (= Simpl., In De C.) ; Olympiodore, In Meteor. (CAG XII.2), ed. Wilhelm Stüve (= Olymp., In Meteor.). Je n’ai mentionné que les Commentaires que je devrai utiliser dans ce travail.
22 Quelques sondages m’ont permis de constater que la comparaison de Philopon et de Simplicius, en particulier, est des plus fructueuses. Il semble qu’elle met surtout en lumière l’originalité de Philopon.
23 Sur la question des sources, cf. Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1773 et Beutler Rudolf, « Olympiodoros 13 », dans Realencyclopädie, XVIII.1, 1939, col. 220-221. Comme l’In Phys. de Simplicius est postérieur à celui de Philopon, on pourrait aussi penser à une utilisation du second par le premier. Cette solution ne me paraît pas admissible : pour des raisons qu’il serait trop long d’exposer ici, je pense que Simplicius ne connaissait ni les Commentaires, ni le Contre Proclus ; il n’avait lu que le Contre Aristote. Le Commentaire aux Météorologiques d’Olympiodore eest postérieur à 564 : cf. Zeller Eduard, Die Philosophie der Griechen, III.25, Leipzig, Reisland, 1903, p. 918, fin de la n. 4 de la p. 917. Cependant, Beutler R., « Olympiodoros 13 », art. cit., ne cite même pas l’In Meteor. de Philopon comme pouvant éclairer celui d’Olympiodore.
24 Aristote, De caelo, I, 2, 269a9-18.
25 Ibid., 269a30-b 2.
26 Id., Meteor., I, 7, 344a11-13.
27 Les éléments de cette doctrine se trouvent dans des citations ou des résumés de Simplicius, In De c., 20, 12-15 ; 21-25.
28 Ibid., 20, 10-15 ; 21-25.
29 Phil., In Meteor., 37, 18-22 ; 97, 4-6.
30 Cité par Phil., C. Pr., 380, 23 – 381, 1.
31 La polémique d’Alexandre contre Xénarque et son exégèse personnelle nous sont connues par Simpl., In De c., 50, 18-20 ; 50, 25 – 51, 1 ; 51, 5-8 ; 51, 32 – 52, 5 ; 54, 12-19. Sur Al. Aphr., In Meteor., 35, 20-23, cf. plus loin, p. 36.
32 Pour les deux derniers, cf. p. 27, n. 4. Pour Damascius, Kroll Wilhelm, « Damaskios 2 », dans Realencyclopädie, IV.2, 1901, col. 2039.
33 Pour Damascius, cf. Phil., In Meteor., 97, 20-21. Pour les deux autres, cf. Simpl., In De c., 21, 1-25 ; 51, 22-26 et Olymp., In Meteor., 2, 19-33 ; 7, 21-30.
34 Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1769.
35 Aristote, Physique, III, 3, 202a21-36. Je n’ai retenu que les éléments indispensables à la clarté de l’exposé.
36 Phil., In Phys., 378, 6-13 (le dilemme) ; 14-20 (l’instance) ; 21-31 (la réfutation) ; voici le texte de ce dernier passage : πρὸς μὲν οὖν τὴν πρώτην ἀπορίαν φημί ὅτι πρῶτον μὲν περὶ τῶν φυσικῶν κινήσεων νῦν ὁ λόγος, οὐ περὶ τῶν ἀπὸ ψυχῆς γινομένων, ἀδύνατον δέ ἐστιν ἐπὶ τῶν φυσικῶν κινήσεων τὸ κατ’ εὐθεῖαν κινούμενον τὴν κύκλῳ κινηθῆναι· κἂν γὰρ κινῆται τὸ ὑπέκκαυμα καὶ ὁ συνεχὴς ἀὴρ μετὰ τοῦ παντός, ἀλλ’ οὐ κατὰ φύσιν ἀλλ’ ὑπερφυῶς, ὥσπερ καὶ τὰ σώματα τῶν ζῴων βαρέα ὄντα κατὰ φύσιν τὴν ἐπὶ τὰ πλάγια κίνησιν οὐχ ὑπὸ φύσεως, ἀλλ’ ὑπὸ ψυχῆς κινοῦνται. ἀδύνατον οὖν ἓν καὶ τὸ αὐτὸ φυσικῶς κινούμενον εὐθεῖαν καὶ περιφέρειαν κινηθῆναι· τὸ γὰρ πῦρ ἀδύνατον ἄλλως τὸν ἄνω τόπον καταλαβεῖν, εἰ μὴ δι’ εὐθείας μόνης, καὶ ταύτης πρὸς ὀρθὰς ἤτοι πρὸς ἴσας ἀγομένης τὸ ἐξ οὗ καὶ εἰς ὅ. Dans ma paraphrase, j’ai précisé quelque peu les indications du texte : les termes du mouvement du feu sont évidemment la terre et le ciel.
37 Alexandre dans Simpl., In Phys., 443, 22-26 : τῷ δὲ καὶ δύο <εἰς ἓν εἶδος> ἐπήνεγκε τὸ <ἀλλὰ ἀδύνατον>· ἀδύνατον γὰρ τοῦτο. διὰ τί δὲ ἀδύνατον ; ἢ ὅτι πᾶσα μεταβολὴ ἐξ ἐναντίου εἰς ἐναντίον, ἓν δὲ ἑνὶ ἐναντίον. ἀδύνατον οὖν τὰς δύο κινήσεις δύο οὔσας μεταβολὰς καὶ ἐκ δυεῖν δηλονότι (οὐ γὰρ ἂν ἐξ ἑνὸς δύο ἦσαν) εἰς ἐναντίον τελευτᾶν. Remarquer particulièrement la parenthèse.
38 Sur la théorie d’Alexandre, cf. p. 28 avec la n. 8. Sur la réfutation, cf. Simpl., In De c., 51, 14-28.
39 Il s’agit évidemment d’une originalité restreinte : la doctrine est commune, y compris la comparaison avec le mouvement des animaux, qu’on retrouve par exemple dans Olymp., In Meteor., 2, 19-33. Mais ce qui est sans doute propre à Philopon, c’est l’utilisation de cette doctrine dans ce cas précis.
40 Ar., Phys., II, 1, 192b13-14 ; 21-22.
41 Phil., In Phys., 198, 12-19 : ἀλλὰ καὶ αἱ ὁλότητες τῶν στοιχείων ἀκίνητοι. τὸ γὰρ πῦρ ἐν τῷ οἰκείῳ τόπῳ οὐ κινεῖται, ἀλλὰ μόνως ἕστηκεν· ἡ γὰρ ἐγκύκλιος αὐτοῦ κίνησις καὶ ἔτι τοῦ προσεχοῦς ἀέρος οὐ φυσική, ἀλλ’ ὑπὲρ φύσιν, διὰ τὸ συμπεριάγεσθαι τῇ περιφορᾷ τῶν οὐρανίων. ὅτι δὲ τῷ οἰκείῳ λόγῳ ἀκίνητοί εἰσιν αἱ ὁλότητες, δῆλον ἐκ τῶν λοιπῶν δύο στοιχείων, ὕδατος λέγω καὶ γῆς, ἅπερ ὡς ὅλα ἀκίνητά ἐστιν. ὥστε εἰ αἱ ὁλότητες ἀκίνητοι, πῶς φαμεν τὴν φύσιν ἀρχὴν εἶναι κινήσεως καὶ ἠρεμίας. Ibid., 198, 32 – 199, 12 : καὶ ἐπὶ τῶν λοιπῶν δὲ στοιχείων, λέγω δὴ τῆς ὁλότητος τοῦ πυρὸς καὶ γῆς καὶ τῶν λοιπῶν, εἰ καὶ μὴ κινεῖται ὡς ὅλα ὑπὸ τῆς ἐν αὐτοῖς φύσεως κατὰ τόπον, ἀλλ’ οὖν τὴν ἀλλοιωτικὴν κίνησιν κινοῦνται κτλ. La fin de ce texte contient une curieuse doctrine sur les rapports entre masses et parties. Elle est reprise ibid., 199, 16-19 ; on la retrouve dans le C. Pr., X, 2-3.
42 Simpl., In De c., 21, 26-32 et 65, 7-19.
43 Phil., C. Pr., VII, 7, 259, 27 – 260, 2 : οὐδὲν γὰρ τῶν ὑπὸ σελήνην φύσει κυκλικὴν κινεῖται κίνησιν.
44 Ibid., VI, 29, 240, 28 – 241, 10 : οὐ γάρ, εἴ τι ὑπὲρ τὴν αὑτοῦ φύσιν ὑπάρξοι τινί, τοῦτο τῆς οἰκείας αὐτὸ μεθίστησι φύσεως καὶ ὁμοφυὲς ἐκείνῳ ποιεῖ, ἀφ’ οὗ ἡ τοιαύτη αὐτῷ πέφυκε δύναμις· ἐπεὶ καὶ ὁ ὑπὲρ τὰς κορυφὰς τῶν ὀρῶν διατεταμένος αἰθὴρ τῷ οὐρανίῳ συγκυκλούμενος σώματι καὶ ὑπὲρ τὴν οἰκείαν φύσιν τὴν κίνησιν ταύτην κινούμενος, ὡς Ἀριστοτέλει δοκεῖ, οὐδὲν ἧττον καὶ οὗτος τῶν εὐθυφορουμένων ἐστὶν σωμάτων οὐδὲ χαρακτηριστικὴν ἕξει τῆς οἰκείας οὐσίας τὴν κίνησιν, ὡς διὰ τοῦτο καὶ αὐτὸν ὁμοειδῆ τῷ οὐρανίῳ σώματι λέγεσθαι. Sur le sens de αἰθήρ dans ce texte et dans celui de la note suivante, cf. ibid., XIII, 6, 492, 7-9 : εἰ γὰρ ἡ τοῦ πυρὸς ὁλότης, λέγω δὴ τὸ αἰθέριον σῶμα, ὅπερ Ἀριστοτέλης ὑπέκκαυμα προσηγόρευσεν κτλ.
45 Ibid., VII, 16, 278, 21-28 : τὰ γὰρ ὑπὲρ φύσιν ὑπάρχοντά τισιν τοῖς κρείττοσιν αὐτῶν κατὰ φύσιν ὑπάρχει, ὥσπερ ἡ κύκλῳ κίνησις ὑπὲρ φύσιν τῷ αἰθερίῳ ὑπάρχουσα σώματι κατὰ φύσιν τῷ κρείττονι, λέγω δὴ τῷ οὐρανίῳ, ὑπάρχει· διὰ τοῦτο γὰρ ὑπὲρ φύσιν τὰ τοιαῦτα λέγεται ὑπάρχειν τισὶν διὰ τὸ ταῖς ὑπερεχούσαις αὐτῶν οὐσίαις κατὰ φύσιν ὑπάρχειν.
46 Ibid., VI, 29, 241, 10-14 et VII, 16, 278, 28 – 279, 4.
47 Simpl., In De c., 34, 13-19 et Olymp., In Meteor., 2, 26-29.
48 Cf. le texte cité p. 31, n. 3.
49 Simpl., In De c., 21, 23-25.
50 Phil., C. Pr., XIII, 477, 14 – 478, 6 (c’est la citation de l’argument de Proclus).
51 Ibid., XIII, 1, 483, 13-25.
52 Ibid., XIII, 2, 484, 26 – 485, 26 : ἀλλ’ εἰ μὲν ἁπλοῦν ὁ Πλάτων ἢ ἄψυχον εἶναι σῶμα τὸν οὐρανὸν ὑπετίθετο, τάχα ἂν τὸ πιθανὸν ἔχειν, εἰ καὶ μὴ τἀληθές, τῷ λόγῳ συνεχωρήσαμεν <· εἰ δὲ> σύνθετον μὲν αὐτὸν ἐκ τῶν στοιχείων εἶναι, εἰ καὶ πλείστης μοίρας μετέχειν πυρός, ἔμψυχον δ’ ὅμως καὶ ζῷον εἶναι καὶ ὑπὸ ψυχῆς κινεῖσθαι, παντὶ δῆλον οἶμαι, ὡς τὴν κύκλῳ κίνησιν οἰκείαν φησὶν καὶ κατὰ φύσιν ὑπάρχειν τῷ οὐρανῷ οὐχ, ᾗ σῶμά ἐστιν αὐτὸς καθ’ αὑτὸν χωρὶς τῆς ἐφεστηκυίας αὐτῷ ψυχῆς ἐπινοούμενος, ἀλλ’ ᾗ ζῷόν ἐστιν, ὑπὸ ψυχῆς αὐτῷ ἐγγινομένην […] καὶ γὰρ τὰ παρ’ ἡμῖν ζῷα τὴν ἐπὶ τὰ πλάγια κινούμενα κίνησιν κατὰ φύσιν μὲν ὡς ζῷα κινεῖται, οὐδενὸς δὲ τῶν στοιχείων, ἐξ ὧν τὰ σώματα αὐτῶν σύγκειται, οὐδ’ αὐτοῦ τοῦ συνθέτου κατὰ φύσιν ἐστὶν ἡ ἐπὶ τὰ πλάγια κίνησις κτλ. Le début du texte, tel que l’imprime Rabe, n’offre pas de sens satisfaisant. Pour le rendre clair, il suffit, comme je l’ai fait, de rétablir entre συνεχωρήσαμεν et σύνθετον, les mots εἰ δὲ, de mettre un point en haut après συνεχωρήσαμεν et de remplacer par une virgule le point qui sépare κινεῖσθαι de παντὶ δῆλον. Il semble aussi préférable d’accentuer ὁμῶς au lieu de ὅμως.
53 Cf. p. 29.
54 Cf. p. 34.
55 Phil., C. Pr., XIII, 3, 489, 3 – 490, 5. Voici le passage qui présente le plus d’intérêt pour nous (489, 24 – 490, 5) : εἴτε ἄρα ὑπὸ ψυχῆς αὐτῷ ἐφήκει ἡ κύκλῳ κίνησις, αὐτὸς δὲ οὐδεμίαν ἀπὸ τῆς ἑαυτοῦ φύσεως κινεῖται κίνησιν, κατὰ φύσιν δηλονότι μένει καὶ οὐ κινεῖται ἐπ’ εὐθείας ὡς τὸν οἰκεῖον κατειληφὼς τόπον καὶ ἡ κίνησις ἡ κύκλῳ ὡς ζῴῳ κατὰ φύσιν ὑπάρχει, εἴτε μὴ ὑπὸ ψυχῆς ἀλλ’ ὑπὸ φύσεως κύκλῳ φέρεται, κἂν τῶν εὐθυφορουμένων ᾖ σωμάτων, ἅτε δὴ ἐν τῷ οἰκείῳ ὑπάρχων τόπῳ, διότι τῶν εὐθυφορουμένων οὐδὲν ἐπ’ εὐθείας κινεῖσθαι δύναται ἐν τῷ οἰκείῳ καὶ κατὰ φύσιν ὑπάρχον τόπῳ.
56 Il ne le dit pas, mais on le sent à la forme très générale de la question sur laquelle s’ouvre le chapitre. En outre, tandis que les chapitres précédents rappellent fréquemment la nature du ciel platonicien (cf. XIII, 2, 487, 17-20 ; 3, 489, 15-21 ; 5, 491, 12-14), et se réfèrent constamment à Platon (cf. 2, 484, 18 ; 25 ; 26 ; 486, 13 ; 487, 17 ; 24-25 ; 488, 2 ; 7 ; 17 ; 3, 489, 1 ; 20 ; 4, 490, 6-7 ; 5, 491, 13 ; 492, 4), celui-ci ne fait rien de tel. De même, pour prouver le mouvement circulaire du feu, il fait appel à l’observation, tandis que plus haut, c’était l’opinion de Proclus qui était invoquée (cf. XIII, 3, 489, 7-16).
57 Ibid., XIII, 6, 492, 5-20.
58 Ibid., XIII, 6, 492, 20 – 493, 4 : ὡς οὖν ἡ τοῦ πυρὸς ὁλότης οὐχ ὑπὸ φυσικῆς ὁρμῆς τὴν κύκλῳ ποιεῖται κίνησιν ἀλλὰ τῷ περιέχοντι οὐρανῷ συμπεριάγεται (ὥσπερ ἀμέλει καὶ τὸ ἐντὸς τῶν μηχανημάτων ὕδωρ κύκλῳ συμπεριδινεῖται τοῖς μηχανήμασιν) καὶ ἔστιν αὐτῷ τῷ ὑπεκκαύματι ὑπὲρ τὴν αὐτοῦ φύσιν ἡ τοιαύτη κίνησις, οὕτω καὶ ὁ οὐρανὸς ὑπὸ κρείττονος δυνάμεως καὶ ἀσωμάτου κυκλοφορούμενος καὶ ὑπὲρ τὴν τοῦ σώματος αὐτοῦ φύσιν τὴν τοιαύτην ἔχων κίνησιν οὐδεμίαν ἕξει ἀνάγκην ἑτέρας εἶναι διὰ τοῦτο οὐσίας, πλὴν ὅτι ἀμέσως μὲν ὑπὸ τῆς ἀσωμάτου φύσεως ὁ οὐρανός, διὰ μέσου δὲ τούτου τὰ ἐντὸς κύκλῳ φερόμενα τῆς τοιαύτης ἀπολαύει κινήσεως.
59 Cf. p. 33.
60 Simpl., In De c., 21, 19-20 ; 51, 14-28. Rappelons à ce propos que Simplicius ne semble pas connaître le Contre Proclus : cf. p. 27, n. 7.
61 Phil., In Meteor., 31, 28-33 ; 33, 3-5 ; 36, 28 ; 45, 24-27 ; 95, 29-30.
62 Ar., Meteor., I, 3, 340b32-36.
63 Phil., In Meteor., 37, 14-23 : οὕτως οὖν ὁ ὑπὲρ τὴν περιφέρειαν ταύτην ἀὴρ ἐξ ἀνάγκης ἔξωθεν περιρρεῖ τῇ περιφορᾷ τῶν οὐρανίων συνεφελκόμενος ἅμα τῷ ὑπεκκαύματι, οὐ φυσικὴν ἔχων κατ’ Ἀριστοτέλην ταύτην τὴν κίνησιν, ἀλλ’ ἐκ τῆς ἔξωθεν τοῦ κυκλοφορικοῦ σώματος ἀνάγκης. ἰστέον δ’ ὅτι τοῖς Πλατωνικοῖς οὐ συνεφέλκεσθαι δοκεῖ τῷ οὐρανῷ τό τε ὑπέκκαυμα καὶ ὁ προσεχὴς ἀήρ, ἀλλὰ φυσικὴν ἔχειν τὴν τοιαύτην κίνησιν· τῶν γὰρ ὁλοτήτων αἱ μέν εἰσιν ἀκίνητοι, φασίν, ὡς ἡ τῆς γῆς καὶ τοῦ ὕδατος, αἱ δὲ κύκλῳ κινοῦνται, ὡς ἡ τοῦ ἀέρος καὶ ἡ τοῦ ὑπεκκαύματος· ἐπ’ εὐθείας γὰρ οὐδεμία τῶν ὁλοτήτων κινεῖται. περὶ δὲ τούτων οὐ τοῦ παρόντος γυμνάζειν καιροῦ· διηγώνισται γὰρ ἡμῖν ἐντελῶς ἐν ἑτέροις.
64 Ar., Meteor., I, 7, 344a11-13.
65 Phil., In Meteor., 91, 18-20 : βίαιον οὖν τὴν περιφορὰν τῶν δύο τούτων σωμάτων εἶναι βούλεται. καὶ πῶς τὸ βίᾳ καὶ παρὰ φύσιν διηνεκές ; ἑτέρωθι δὲ περὶ τούτων εἰρήκαμεν ἱκανῶς.
66 Ar., Meteor., I, 7, 344b8-12.
67 Phil., In Meteor., 97, 11.
68 Al. Aphr., In Meteor., 35, 20-23 : τοιαύτη γὰρ ἡ κίνησίς τε καὶ ἡ περιφορὰ τοῦ κόσμου τοῦ περὶ τὴν γῆν, οὐκ ἰσοδρομοῦσα τοῖς οὐρανίοις οὐδὲ ὁμαλῶς αὐτοῖς ἑπομένη οὐδὲ ἀκριβῶς σφαιρική, ἅτε οὐ κατὰ φύσιν αὐτῶν οὕτω κινουμένων, ἀλλ’ ὑποσυρομένων ὑπὸ τῆς τῶν θείων κινήσεως.
69 Cf. p. 28.
70 Phil., In Meteor., 96, 12-16.
71 Cf. p. 35.
72 Phil., In Meteor., 97, 4-16 ; voici le passage le plus intéressant (9-16) : μήποτε καὶ ὁ Ἀριστοτέλης ἐμφαίνει τι τοιοῦτον, ἐν οἷς φησι <τοιαύτη γὰρ ἡ φορὰ τοῦ κόσμου τοῦ περὶ τὴν γῆν>, τουτέστι τοῦ ὑπεκκαύματος καὶ τοῦ μὴ λιμνάζοντος ἀέρος, τὸ μὴ ἰσοδρομεῖν τῷ οὐρανῷ ἀλλ’ ὑπολείπεσθαι. ὥστε οὐ διὰ τὸ συνεφέλκεσθαι βίᾳ τὸ ὑπέκκαυμα τῶν οὐρανίων ὑπολείπεται, ἀλλ’ ὅτι τοιαύτην ἔχει τὴν φύσιν, ἐπείπερ εἰ βίᾳ καὶ παρὰ φύσιν οὕτως ἐκινεῖτο, τὸν πάντα χρόνον ἐν τῷ παρὰ φύσιν ἔμελλεν εἶναι καὶ τοῦ κατὰ φύσιν οὐδέποτε τεύξεσθαι, ὅπερ ἀδύνατον.
73 Ibid., 97, 16-19.
74 Ibid., 97, 20-21 : ἐξ οὗ δῆλον ὅτι μηδὲ ὑπὲρ φύσιν αὐτοῖς ἡ κίνησις, ὡς ἑτέρωθί πού φησι Δαμάσκιος, ὅπερ ἠλέγξαμεν· οὐ γὰρ ἂν ἦν οὕτως εὐπαθής. Dans ma traduction, j’ai déplacé les mots ἑτέρωθί πού. Ils ne sont guère satisfaisants à la place où les donne l’édition de Hayduck ; de plus, Philopon se sert assez habituellement de ἑτέρωθι pour renvoyer à un des autres ouvrages : cf. par exemple le texte cité, p. 35, n. 5.
75 Simpl., In De c., 35, 34 – 36, 3 : τὸ δεδειχέναι πρότερον, ὅτι οὐκ ἔστιν ἰδία τοῦ ὑπεκκαύματος ἡ κύκλῳ κίνησις, ἀλλ’ ὑπὸ τῆς οὐρανίας ἐνδίδοται περιφορᾶς ὑπὲρ φύσιν, ὡς δηλοῖ τὰ ἐκεῖ συνιστάμενα φάσματα συνανατέλλοντά τε καὶ συνδύνοντα τοῖς ἄστροις καὶ ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας.
76 Cf. pp. 58-59.
77 Simpl., In De c., 51, 32 – 52, 5. Alexandre voyait-il dans sa théorie du mouvement mixte (cf. p. 28) un équivalent de celle du mouvement contre nature ou distinguait-il les deux notions, nous ne saurions en décider.
78 Pour l’opinion de Simplicius, cf. p. 32. Olympiodore n’exprime aucune opinion sur le problème.
79 J’ai fait l’édition et le commentaire de ces fragments dans mon mémoire précédemment cité [voir ici pp. 197-334].
80 Xénarque dans Simpl., In De c., 20, 29-32.
81 Phil. dans Simpl., In De c., 33, 17-20 [13 E] : Ἔτι δὲ οὐκ ἐκ τῶν ὁμοίων, φησίν [sc. Philopon], ὁ Ἀριστοτέλης τὴν τῶν στοιχείων καὶ τὴν τοῦ οὐρανοῦ πεποίηται παρεξέτασιν, πῆ μὲν τὸ ὅλον λαβὼν ἐν τῷ οἰκείῳ τόπῳ κινούμενον, πῆ δὲ τὸ μόριον τῶν οἰκείων τόπων ἐκστὰν καὶ ἐν τῷ παρὰ φύσιν γενόμενον.
82 Ibid., 35, 18-20 : καὶ δῆλον, ὅτι ἐν πᾶσιν τούτοις ἔσφηλεν αὐτὸν τὸ τὴν κύκλῳ κίνησιν οὐρανίαν οὖσαν μὴ ὑπὲρ φύσιν νομίζειν ὑπάρχειν τῷ πυρί, ἀλλὰ κατὰ φύσιν. Ibid., 34, 7-9 : κύκλῳ γάρ, φησί, κινεῖται καὶ τὸ ὑπέκκαυμα καὶ ὁ ἀὴρ κατὰ τὴν ἰδίαν φύσιν ταύτην ἔχοντα τὴν κίνησιν ὥσπερ καὶ ὁ οὐρανός.
83 Ibid., 34, 9 : ἢ γὰρ κατὰ φύσιν, φησίν, ἢ βίᾳ καὶ παρὰ φύσιν.
84 Ibid., 37, 26-28 [24 E] : ἐπειδὴ δὲ πολλαχοῦ παράγει τό, εἰ μὴ κατὰ φύσιν ἐστὶν ἡ κυκλοφορία τῷ ὑπεκκαύματι καὶ τῷ ἀέρι, παρὰ φύσιν οὖσαν μὴ ἂν ἐπὶ πολὺ διαμένειν.
85 Ibid., 34, 10 : κάλλιον δὲ τὸ μηδὲ ὅλως εἶναι τοῦ ἀεὶ ἐν τῷ παρὰ φύσιν εἶναι.
86 Xénarque dans Simpl., In De c., 50, 20-24.
87 Phil. dans Simpl., In De c., 34, 33 – 35, 2 [16 E] : προσθεὶς δὲ λέξιν τὴν λέγουσαν “ἔτι εἰ ἡ παρὰ φύσιν ἐναντία τῇ κατὰ φύσιν” καὶ τὰ ἑξῆς, […] πολλὰ ληρῶν, ὡς οἶμαι, δεικνύναι πειρᾶται, ὅτι οὐκ ἔστιν παρὰ φύσιν ἡ κύκλῳ φορὰ τῷ πυρί…
88 Ar., De caelo, I, 2, 269a7 sq.
89 Phil. dans Simpl., In De c., 34, 21-24 [15 E] : ἔτι δὲ καὶ πρὸς τοῦτον ἐνίσταται τὸν λόγον, ὡς “βίᾳ μὲν τὴν ἄλλου κίνησιν ἐνδέχεται καὶ ἑτέρου εἶναι, κατὰ φύσιν δὲ ἀδύνατον·” τῇ γὰρ γῇ καὶ τῷ ὕδατι κατὰ φύσιν ἐστὶν ἡ ἐπὶ τὸ μέσον τοῦ παντὸς κίνησις.
90 Cf. p. 28.
91 Phil. dans Simpl., In De c., 35, 14-16 [17 E] : δύο λέγων τοῦ πυρὸς κατὰ φύσιν κινήσεις, τὴν μὲν ἐπὶ τὸ ἄνω τῶν μερῶν αὐτοῦ τῶν τῆς ὁλότητος ἀποσπασθέντων, τὴν δὲ κύκλῳ τῆς ὁλότητος.
92 Citation du texte d’Alexandre : Phil. dans Simpl., In De c., 37, 20-24 [18 E] ; 37, 12-15 [23 E]. Critique de la théorie : In De c., 36, 11-18 [19 E] ; 21-25 [20 E] ; 37, 3-8 [21 E] ; 10-12 [22 E] ; 16-18 [23 E].
93 Utilisation de la théorie du mouvement mixte : Simpl., In De c., 37, 29-32. Rejet de cette théorie : 51, 14-28.
94 L’argument vaut a fortiori, car Simplicius était partisan de la théorie du mouvement surnaturel : cf. p. 29.
95 Phil., De op. m., 231, 24 – 232, 12 : Ἀλλ’ οὐδὲ ὡς ἔμψυχα τὰ οὐράνια δεικνύειν ἕξει τις, ἵνα καὶ λογικὴν ἔχειν αὐτὰ ψυχὴν συγχωρήσωμεν· εἰ γὰρ ἐκ τῶν ἀπὸ ψυχῆς ἐνεργειῶν τὰ ἔμψυχα διακρίνομεν τῶν ἀψύχων, ποία τις ἐνέργεια τῶν οὐρανίων ἔμψυχα δείκνυσιν αὐτά ; ἡ μὲν γὰρ φυσικὴ τῶν σωμάτων κίνησις, τῶν βαρέων φημὶ καὶ τῶν κούφων, ὥρισται τῶν μὲν κάτωθεν ἄνω, τῶν δὲ τοὔμπαλιν ἄνωθεν φερομένων κάτω, ἡ δὲ ἀπὸ ψυχῆς ἐνυπάρχουσα τοῖς ζῴοις καθ’ ὁρμὴν αὐτῆς οἰκείαν καὶ ὄρεξιν γίνεται τῆς φαντασίας ἐπεγειρούσης τὰ κινητικὰ τῶν ζῴων μόρια. διὸ καὶ οὐκ ἀεὶ ἡ αὐτή, ἄλλοτε δὲ ἄλλη, πρὸς τὴν ἐκείνων ὄρεξίν τε καὶ χρείαν ἡ κίνησις· ἐπὶ δὲ τῶν οὐρανίων οὐκέτι σημεῖον οὐδὲν τοῦ κατὰ προαίρεσιν ψυχικὴν τὴν ἐγκύκλιον αὐτῶν γίνεσθαι κίνησιν· κύκλῳ γὰρ καὶ τὸ ὑπέκκαυμα κινεῖται καὶ ὁ τούτῳ πλησιάζων ἀήρ, καὶ ὅτι μὴ βίᾳ, δεδείχαμεν ἐν ἑτέροις.
96 Cf. p. 34.
97 Cf. p. 29 sq.
98 Phil., In Phys., 378, 25, cité par Reichardt dans l’apparat critique à De op. m., 232, 12.
99 Ibid., 384, 19.
100 Cf. p. 36.
101 Cf. p. 38 sq.
102 Cf. p. 24 sq.
103 Sur ce point, Gudeman, « Joannes 21 », art. cit., col. 1769, a raison, car Phil., In Meteor., 35, 18-19 cite le Commentaire à la Physique.
104 Sur la date de l’In Phys., cf. p. 23.
105 Cf. p. 23.
106 Cf. p. 24.
107 Cf. p. 23.
108 Cf. p. 29.
109 Ar., De caelo, I, 2, 268b14 – 3, 270a35.
110 Ibid., I, 3, 270b5-11.
111 Ibid., I, 3, 270b11-16.
112 Ibid., I, 3, 270b16-25.
113 Id., Meteor., I, 3, 339b19-30.
114 Ibid., I, 3, 339b30-340a17, et le commentaire de Phil., In Meteor., 25, 35 – 26, 9.
115 Ar., De caelo, II, 7, 289a19-35.
116 Id., Meteor., I, 3, 341a12-36.
117 C’est ce qu’implique Phil., In Phys., 262, 1.
118 Ibid., 340, 31. On retrouve tout ce passage presque littéralement dans Simpl., In Phys., 398, 7 sq.
119 Phil., In Phys., 198, 10-12 et 19-22 : εἰ γὰρ καὶ τὰ οὐράνια σώματα φυσικά, ἐκεῖνα δὲ στάσεως ἐν ἑαυτοῖς ἀρχὴν οὐκ ἔχει (ἀεικίνητα γάρ ἐστιν), ἔοικε μὴ κοινὸς εἶναι πάσης φύσεως ὁ ὁρισμὸς οὗτος… φαμὲν οὖν πρὸς τοῦτο, ὅτι μάλιστα μέν ἐστι καὶ ἐπὶ τῶν οὐρανίων οὐ μόνον κινήσεως ἡ ἐν αὐτοῖς φύσις αἰτία, ἀλλὰ καὶ στάσεως· ἕστηκε γὰρ ἡ ὁλότης τὰ κέντρα οἱ πόλοι, τῆς δὲ στάσεως ταύτης ἡ φύσις τῶν οὐρανίων αἰτία. Cf. Simpl., In Phys., 264, 21-25, qui met l’objection sous le nom d’Alexandre.
120 Ar., Phys., II, 2, 193b22-35.
121 Phil., In Phys., 219, 19-22 : αὐτὸς γοῦν ἐν τῇ Περὶ οὐρανοῦ οὐ μόνον περὶ τῆς οὐσίας τῶν οὐρανίων ἀπέδειξεν, ὅτι ἐστὶν ἑτέρας τινὸς παρὰ τὰ τέσσαρα στοιχεῖα, ἀλλ’ ὅτι καὶ σφαιρικὸν ἔχει κατὰ φύσιν τὸ σχῆμα, καὶ ὅτι κυκλοφορικόν. Ibid., 220, 20-25 : ἀλλ’ ὁ μὲν φυσιολόγος ὅτι τὰ τοιαῦτα σχήματα καὶ αἱ κινήσεις αἱ τοιαῦται οἰκεῖα καὶ συμφυῆ τῇ τοιαύτῃ οὐσίᾳ, λέγω δὴ τῇ πέμπτῃ κτλ. Cf. Simpl., In Phys., 290, 20-26 et 291, 7-20. L’expression de cinquième essence ne se trouve que chez Philopon. La comparaison de tout ce passage chez les deux commentateurs prouve à l’évidence l’utilisation d’une source commune.
122 Phil., In Phys., 9, 23 – 10, 2 : οὕτω γοῦν καὶ αὐτὸς ἐν τῇ Περὶ οὐρανοῦ βουλόμενος ἀποδεῖξαι ὁποῖόν τί ἐστι τὸ τῆς σελήνης σχῆμα, ἐκ τῶν φωτισμῶν αὐτῆς κατεσκεύασεν ὅτι σφαιρικόν. […] ἐνταῦθα οὖν τεκμηριωδῶς ἐκ τῶν ὑστέρων τῇ φύσει, τῶν φωτισμῶν λέγω, τὸ τῇ φύσει πρότερον τὸ σχῆμα ἀπέδειξε, δέον ἐκ τοῦ δεῖξαι ὅτι ἐκ τῆς πέμπτης ἐστὶν οὐσίας διὰ τοῦτο ἀνάγκη σφαιρικὴν εἶναι κτλ. Simpl., In Phys., 15, 15-25, fait aussi la distinction entre les deux modes de raisonnements, mais il l’illustre par d’autres exemples.
123 Phil., C. Pr., XIII, 1, 483, 18-21 ; voir le texte de cette allusion, p. 56, n. 4.
124 Ibid., X, 5, 396, 20 – 397, 20. Voici le passage le plus intéressant, 397, 16-20 : εὔλογον οὖν καὶ αὐτὸ τῶν ἄλλων ὡς ὅτι μάλιστα πάντων ἄνοσόν τε καὶ ἀγήρων εἶναι, ἕως ἂν ὁ θεὸς τόδε τὸ πᾶν σῴζεσθαι βούληται, ἀλλ’ οὐκ ἤδη διὰ τοῦτο καὶ παντελῶς ἀπαθὲς αὐτὸ κατὰ φύσιν καὶ ἄφθαρτον ὑπολαμβάνειν εὔλογον.
125 Ibid., VI, 29, 241, 3-4 ; VII, 14, 276, 8-9 ; VII, 16, 278, 24 ; XIII, 6, 492, 8-9 (où il précise le sens du mot : λέγω δὴ τὸ αἰθέριον σῶμα, ὅπερ Ἀριστοτέλης ὑπέκκαυμα προσηγόρευσεν) ; XIII, 14, 519, 16-17 (τὸ πῦρ τὸ αἰθέριον).
126 Ibid., XIII, 15, 527, 6-8 : δοκεῖ γὰρ πρῶτος πάντων Ἀριστοτέλης τὴν περὶ τοῦ πέμπτου σώματος δόξαν εἰσηγήσασθαι.
127 Ar., Meteor., I, 3, 399b30-340a3.
128 Phil., C. Pr., XIII, 14, 517, 8-24.
129 Ibid., XIII, 14, 517, 24 – 518, 4.
130 Ibid., XIII, 14, 518, 5-13.
131 Ibid., XIII, 14, 518, 14-18.
132 Ibid., XIII, 14, 518, 18 – 519, 17.
133 Ibid., IV, 9, 78, 12-13 ; IV, 11, 84, 11-12 ; VII, 12, 269, 9-11.
134 Ibid., VII, 14, 274, 15 – 276, 16. Voici le passage que j’ai traduit (276, 10-14) : τὴν γὰρ κίνησιν τοῖς τῇδε τὴν κατ’ ἀλλοίωσίν τε καὶ γένεσιν δυνάμει μᾶλλον καὶ τῇ τοιᾷδε τῶν κατ’ οὐρανὸν σχέσει καὶ οὐχ ἁπλῶς τῇ περιδινήσει ψιλῇ παρέχεται· τῷ γὰρ πλησιάσαι τισὶν θερμαίνει ταῦτα ὁ ἥλιος καὶ ψύχει πάλιν ἀφιστάμενος. Sur le sens du mot σχέσις, cf. ibid., 78, 23-28 : καὶ αἱ τῶν οὐρανίων δὲ σωμάτων ἐσόμεναι περιφοραὶ καὶ τίνες ἐν τίνι χρόνῳ αἱ πρὸς ἀλλήλας αὐτῶν ἔσονται σχέσεις (ἄλλοτε γὰρ ἄλλη τῶν ἄστρων ἡ πρὸς ἄλληλα γίνεται σχέσις) τῇ προγνώσει δηλονότι τοῦ θεοῦ ἀμερῶς συνειλημμέναι εἰσίν.
135 Ar., De caelo, II, 7, 289a32-33 : διὸ δὴ πλησιάζοντός τε αὐτοῦ καὶ ἀνίσχοντος καὶ ὑπὲρ ἡμῶν ὄντος γίγνεται ἡ θερμότης, et Meteor., I, 3, 341a26-27 : καὶ γὰρ ἐνταῦθα τῶν βίᾳ φερομένων ὁ πλησιάζων ἀὴρ μάλιστα γίγνεται θερμός (dans un exemple).
136 Simpl., In De c., 88, 19-21 : ὁ μέντοι ἥλιος καὶ ταύτῃ τῇ δυνάμει καὶ τῇ τῶν ἀκτίνων παρατρίψει θερμὸν τὸν ἀέρα ποιεῖ καὶ δι’ αὐτοῦ τὰ ἄλλα θερμαίνει.
137 Ibid., 441, 2-24.
138 Phil., C. Pr., IV, 11, 83, 27 – 84, 5 : ἐπεὶ μὴ ὡς πρός τι μήτε τῷ πυρὶ ἡ θερμότης μήτε τῷ ἡλίῳ ἡ φωτοειδὴς ὑπάρχει δύναμις· αἱ γὰρ συμπληρωτικαὶ τῶν οὐσιῶν δυνάμεις, … αὐταὶ καθ’ αὑτὰς ἀσχέτως τοῖς πράγμασιν ἐνυπάρχουσιν.
139 Simpl., In De c., 441, 26-31, interprète les termes du texte d’Aristote en fonction de la théorie qui vient d’être exposée.
140 Olymp., In Meteor., 32, 9 – 33, 5.
141 Phil., In Meteor., 16, 20-25.
142 Ibid., 17, 15-18.
143 Ibid., 17, 33-36.
144 Ibid., 16, 25-30 : ἔστι δὲ μὴ παρὰ τὸ αἴθειν· καίτοι γε τὰ τῆς ἐτυμολογίας ἐγγίζει μᾶλλον ἐκείνῳ. τοῦτο δέ πως ἕτερον αὐτὸν δείκνυσι τῶν παρ’ ἡμῖν· οὐ γὰρ ἀπὸ τῆς οὐσίας ἡ τοῦ ὀνόματος θέσις, ἀλλ’ ἀπὸ τοῦ ἀεὶ κινεῖσθαι γέγονεν. οὐκ ἀναγκαίως οὖν ἐκ τοῦ ὀνόματος ἕτερον εἶναι τὸν οὐρανὸν τῶν παρ’ ἡμῖν ὑπονοεῖν αὐτοὺς κατεσκεύασε. J’ai reproduit le texte imprimé par Hayduck. Il exige quelques corrections. La proposition οὐ γὰρ ἀπὸ… doit être la justification de cette idée que le nom αἰθήρ, venant de ἀεὶ θεῖν, ne prouve pas une différence d’essence. La proposition précédente exprime pourtant une idée opposée, qui ne se comprend pas dans le contexte. Pour la rendre intelligible, il suffit d’accentuer τοῦτο δὲ πῶς : elle devient ainsi une interrogation oratoire. Le pronom τοῦτο y représente l’étymologie de ἀεὶ θεῖν ; le ἐκείνῳ qui précède représente alors l’étymologie αἴθειν. La particule καίτοι indique que l’on vient de faire une concession. Il faut donc, dans la phrase qui précède, écrire ἔστω au lieu de ἔστι ; cette correction rend d’ailleurs la négation μή plus correcte. Je propose pour l’ensemble du texte la traduction que voici : « Admettons qu’il ne vient pas de αἴθειν (sous-entendu mais bien de ἀεὶ θεῖν) ; cependant les caractères étymologiques se rapprochent plus de la première interprétation ; d’ailleurs comment la seconde montre-t-elle qu’il [sc. le ciel] est différent des éléments sublunaires ? Car ce n’est pas de l’essence que le nom a été tiré, mais du mouvement perpétuel. La démonstration qu’il a tirée du nom ne prouve donc pas nécessairement qu’ils [sc. les anciens] supposaient le ciel différent des éléments sublunaires. » Des deux autres passages où Philopon emploie le mot αἰθήρ, l’un adopte le sens aristotélicien (31, 30), l’autre attribue à Platon l’opinion que αἰθήρ désigne τοῦ ἀέρος τὸ εὐαγέστατον (38, 6-7). Al. Aphr., In Meteor., 8, 20-25 ; Simpl., In De c., 118, 16 – 119, 6, et Olymp., In Meteor., 20, 20-21, 5, exposent sans aucune reticence l’étymologie aristotélicienne de l’éther.
145 Phil., In Meteor., 16, 30-32. Sur cette allusion, cf. pp. 55-56.
146 Cf. p. 44.
147 Ar., Meteor., I, 3, 340a3-13.
148 Ibid., 340a13-17.
149 Phil., In Meteor., 18, 23 – 24, 38.
150 Ibid., 24, 38 – 25, 2 ; voir le texte de cette allusion, p. 56, n. 6.
151 Ibid., 25, 18-27. Al. Aphr., In Meteor., 9, 8 – 10, 25, et Olymp., In Meteor., 17, 10 – 18, 30 et 25, 3-15 ne font aucune réserve à propos de l’argumentation que Philopon critique ici.
152 Ar., Meteor., I, 3, 341a28.
153 Phil., In Meteor., 41, 33-34 (contre le sens de τριχῆ διαστατόν) et 43, 33 – 44, 18 (contre le sens de μὴ διαφανές).
154 Ibid., 41, 25 – 42, 1. L’allusion concerne De gen. et corr., II, 2, principalement 329b32-34.
155 Phil., In Meteor., 42, 1-16.
156 Ibid., 42, 16-32 ; 49, 18-22.
157 Al. Aphr., In Meteor., 18, 8-28.
158 Olymp., In Meteor., 33, 7-15 cite Alexandre en y proposant seulement une légère correction de forme.
159 Simpl., In De c., 440, 19-36.
160 Phil., In Meteor., 47, 27 – 49, 17.
161 Cf. p. 50 sq.
162 Ibid., 42, 29-32 ; 45, 17-20 ; 49, 22-29.
163 Ibid., 42, 32 – 43, 25. Il est exact qu’à la luminosité de la lune correspond un phénomène thermique dont l’importance est d’ailleurs minime.
164 Ibid., 43, 25-33. Sur la théorie de l’échauffement par la réflexion, cf. p. 45 sq.
165 Ibid., 45, 14-17.
166 Ibid., 52, 6 – 53, 2. Cf. Al. Aphr., In Meteor., 19, 13-19.
167 Phil., In Meteor., 53, 21-27.
168 Ibid., 46, 11-27. Cf. Olymp., In Meteor., 33, 19-27.
169 Phil., In Meteor., 47, 13-27. Cf. Olymp., In Meteor., 33, 27 – 34, 6.
170 Al. Aphr., In Meteor., 18, 28 – 19, 13.
171 Phil., In Meteor., 49, 29 – 51, 3.
172 Ibid., 51, 10 – 52, 5.
173 Le cinquième est consacré au chapitre où Aristote montre qu’il n’existe pas de contrariété dans le mouvement circulaire (Ar., De caelo, I, 4). Le sixième concerne l’éternité du mouvement.
174 Je reprendrai ici les conclusions de mon mémoire précédemment cité [voir ici pp. 234-249].
175 Simpl., In Phys., 1117, 15 – 1118, 9 précise que les cinq premiers livres du Contre Aristote concernent le De caelo tandis que le sixième attaque la Physique.
176 Aristote, De caelo, I, 2, 268b26 – 3, 270a35.
177 Cf. les fragments cités par Simpl., In De c., 26, 31 – 27, 4 [7 E] ; 28, 5-11 [9 E] ; 30, 26-34 [10 E] [j’ajoute entre crochets les numéros des fragments tels qu’édités dans ce volume].
178 Ibid., 31, 7-14 [11 E] ; 32, 1-11[12 E].
179 Sur cette thèse dans le Contre Aristote, cf. p. 38 sq. Sur l’In Meteor., cf. p. 37.
180 Simpl., In De c., 42, 27-31 [26 E] ; 43, 8-12 [27 E] ; 43, 22-25 [28 E] ; 44, 15-18 [29 E] ; 45, 3-7 [30 E] ; 46, 6-11 [31 E] ; 46, 18-19 ; 22-25 [33 E] ; 29-33 [34 E] ; 47, 1-3 [35 E] ; 10-13 [36 E] ; 27- 30 [37 E] ; 48, 5-7 [38 E] ; 15-22 [39 E] ; 49, 7-10 [40 E].
181 Ibid., 56, 28 – 57, 8 [41 E] ; 58, 1-4 [42 E] ; 5-10 [43 E] ; 19-22 [44 E].
182 Ibid., 66, 11-14 [46 E] ; 17-19 [47a E] ; 67, 16-17 [49b E] ; 70, 34 – 71, 6 [48 E] ; 75, 17 – 76, 29 [55a E].
183 Ibid., 80, 25-28.
184 Ibid., 81, 5-9 [59 E], qui rappelle en outre que le feu céleste n’est pas caustique.
185 Ibid., 81, 22-26.
186 Ibid., 84, 15-22.
187 Ibid., 82, 14-26.
188 Ibid., 87, 29-31 ; 88, 8-10 ; 89, 15-19.
189 Ibid., 90, 21-25.
190 Ibid., 123, 13 – 124, 17 ; 131, 31 – 132, 17 ; 121, 25 – 122, 9.
191 Ibid., 134, 20-24.
192 Ibid., 136, 12-26.
193 Ibid., 139, 23-26 ; 141, 14-19.
194 Ibid., 142, 7-25.
195 Phil., De op. m., 118, 3-4 : Ἀριστοτέλης δὲ πέμπτης οὐσίας σωμάτων τὸν οὐρανὸν ὑποθέμενος αὐτάρκη πρὸς ἡμῶν τὸν ἔλεγχον εἴληφε.
196 Cf. p. 51 sq.
197 Ibid., 185, 18-22.
198 Ibid., 185, 22 – 186, 7. Voici la phrase qui nous intéresse directement (185, 25 – 186, 2) : εἴ τις οὖν ταῖς Ἀριστοτέλους ὑποθέσεσιν ἕποιτο, μὴ καίειν ἐθέλοντος τὸν ἥλιον καὶ τοὺς ἀστέρας, λεγέτω, πῶς οἱ κατ’ οὐρανὸν φωστῆρες τὸ φωτιστικὸν ἔχουσι τοῦ πυρός, τοῦ καυστικοῦ χωρίς.
199 Cf. l’apparat critique à 185, 25.
200 La seule référence précise ne nous est pas utile ici. Elle ne concerne que le Commentaire à la Physique, dont elle prouve l’antériorité. Cf. p. 41, n. 9.
201 Phil., In Meteor., 16, 30-32 : τὰς δὲ ἀπὸ τῆς κυκλοφορίας ἐν τῷ πρώτῳ τῶν Περὶ οὐρανοῦ διεσκευασμένας ἐπιχειρήσεις αὐτῷ τοῦ πέμπτης εἶναι σωμάτων οὐσίας τὸν οὐρανὸν ἐν ἑτέροις διελευσόμεθα. Dans ses renvois à d’autes œuvres, Philopon a l’habitude d’employer le pluriel. Cf. par exemple ibid., 35, 18-19, où il renvoie à l’In Phys. par les mots ἐν τοῖς εἰς τὸ τέταρτον τῆς Φυσικῆς ἀκροάσεως σχολικοῖς ἡμῶν συγγράμμασιν.
202 Gudemana., « Joannes 21 », art. cit., col. 1779.
203 Gudeman dit textuellement : « Vor den Meteorologica ist jedenfalls der verlorene Kommentar zu De caelo anzusetzend, da p. 16, 31 f. daselbst auf diesen deutlich verwiesen wird. » Philopon écrit pourtant διελευσόμεθα.
204 Cette remarque permet de corriger une autre indication de Gudeman. Celui-ci, « Joannes 21 », art. cit., col. 1779, admettrait volontiers que l’In De c. est encore visé dans un passage de l’In Phys., 55, 24-26, dont voici la traduction : « Contre la thèse qui nie que l’être soit engendré, en voilà assez pour le moment de notre part nous avons suffisamment discuté de tels “théorèmes” dans d’autres ouvrages. » Ce texte ne vise certainement pas la même œuvre que celui de l’In Meteor. Ce dernier en effet fut composé après l’In Phys. Un écrit postérieur à In Meteor. ne saurait se confondre avec un ouvrage que In Phys. présente comme déjà achevé. Au reste, quoi qu’en pense Gudeman, une discussion sur l’origine radicale de l’être n’appartient pas nécessairement à un In De c. Ce θεώρημα, comme Philopon l’appelle lui-même, a bien pu trouver place dans les Σύμμικτα θεωρήματα que l’In Phys., 156, 17 mentionne.
205 Phil., In Cat., 7, 31 sq. ; In Phys., 1, 22 – 2, 2 ; In Meteor., 2, 17-22.
206 Gudemana., « Joannes 21 », art. cit., col. 1769 ; 1774 ; 1779 leur accorde un grand prix, mais il ne peut les respecter dans le cas qui nous occupe que grâce à son erreur.
207 Cf. sur ce point, p. 51 sq.
208 Phil., C. Pr., XIII, 1, 483, 18-21 : τὰς μὲν οὖν Ἀριστοτέλους ὑπὲρ τοῦ πέμπτον εἶναί τι σῶμα τὸν οὐρανὸν ἐπιχειρήσεις ἐν τοῖς πρὸς αὐτὸν (σὺν θεῷ δὲ εἰρήσθω) λεχθησομένοις ἐπισκεψόμεθα.
209 Sur ce sujet, cf. p. 47.
210 Phil., In Meteor., 24, 38 – 25, 2 : περὶ δὲ τούτων ἁπάντων ἑτέρωθι τὰ δοκοῦντα ἡμῖν εἴρηται, καὶ γνῶναι πρόκειται τοῖς ἐθέλουσιν, ἵνα μὴ πολλὰςτὰς παρεκβάσεις νῦν ποιώμεθα.
211 Hayduck Michael, In Aristotelis Meteorologicorum librum primum Commentarium (CAG XIV.1), Berlin, Reimer, 1901, Index nominum, s.v. Φιλόπονος, p. 154, écrit : « fort. comm. in l. de gen. et corr. p. 257 sqq. » à propos du passage que nous examinons.
212 Ar., De gen. et corr., II, 6, 333a16-34.
213 Id., Meteor., I, 3, 340a3-17. Cf. Phil., In Meteor., 25, 7-10.
214 Le passage qui rappelle les Meteor. est Phil., In De gen. et corr., 258, 33 – 259, 3.
215 Ar., Phys., III, 5, 204b13-19.
216 Phil., In Phys., 420, 27 – 425, 12 (critique d’Aristote) ; 425, 12 – 426, 18 (solution personnelle). Sous une formulation imparfaite, on reconnaît ici une distinction identique à celle que font les physiciens modernes entre la température et la quantité de chaleur ; cf. surtout à ce point de vue, 420, 28-30 et 421, 2-18.
217 Phil., In Meteor., 24, 36-38.
218 Cf. pp. 46-51.
219 Cf. p. 48.
220 Phil., C. Pr., XIII, 14, 517, 8 – 519, 17. Cf. sur ce texte p. 44-45.
221 Sur celle-ci, cf. p. 48.
222 Cf. p. 53.
223 Comme je viens de l’établir, pp. 55-56.
224 Sur ces références, cf. pp. 35-37.
225 Sur ce point, cf. p. 34. A fortiori, ne peut-il être question de l’In Phys., que suggère, Hayduck dans son Index, p. 154 à propos de la référence de Phil. In Meteor., 37, 23.
226 Sur la date, cf. pp. 55-56 ; sur la doctrine, cf. p. 39 sq.
227 Gudemana., « Joannes 21 », art. cit., col. 1780, note qu’un cod. Marcianus nomme Philopon comme interprète du De caelo. Comme œuvres plus personnelles, nous connaissons, outre le Contre Proclus, le Contre Aristote et les autres traités théologiques, les Σύμμικτα θεωρήματα qui sont antérieurs à l’In Phys. (cf. p. 55, n. 5).
228 Sur cet argument, cf. pp. 24-25.
229 Walliesm., compte rendu de l’article de Gudeman, art. cit., col. 588.
230 Cf. les apparats critiques des éditions de chacun des Commentaires. Quelques manuscrits ne donnent aucun nom d’auteur ; un manuscrit ne donne que Philopon. Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 221, a raison de dire que les meilleurs et les plus anciens manuscrits donnent le nom de Jean le Grammairien ; mais contrairement à ce qu’il affirme, Simplicius n’atteste pas le nom de Jean ; en réalité, il se contente de désigner son adversaire comme celui qui s’appelle lui-même grammairien : cf. par exemple Simpl., In De c., 119, 7.
231 Remarquons à ce propos que c’est uniquement sur la foi de leur nom que l’on considère Élias et David comme chrétiens. Cf. Praechterk., « Christlich-neuplatonische Beziehungen », art. cit., p. 1, et Zeller E., Philosphie der Griechen, op. cit., p. 918, n. 4.
232 Sur ce point, cf. Petrides Sophrone, « Spoudaei et Philopones », Échos d’Orient, 1904, 7, no 49, pp. 341-348.
233 Cf. plus haut, p. 24.
234 Le fait est connu par un témoignage de Porphyre rapporté par Eusèbe. Praechter le tient pour douteux, mais ne donne pas la raison de sa réserve (Die Philosophie des Altertums, op. cit., pp. 594-595). En revanche, Jean Daniélou l’accepte sans hésitation dans son récent ouvrage Origène, Paris, La Table ronde, 1948, p. 88.
235 Sur tout ceci, cf. Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 219 et K. Praechter K., Die Philosophie des Altertums, op. cit., pp. 656-657.
236 Sur cette différence, cf. par exemple Praechter K., « Christlich-Neuplatonische Beziehungen », art. cit., p. 1.
237 Ibid., pp. 1-27 et Id., Die Philosophie des Altertums, op. cit., pp. 641-642.
238 Cette anecdote, rapportée par Damascius, est étudiée par Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 225 sq. Vancourt Raymond, Les Derniers Commentateurs alexandrins d’Aristote, Lille, Facultés catholiques, 1941, p. 18, ne semble pas lui accorder grande créance. de Labriolle Pierre, La Réaction païenne. Étude sur la polémique antichrétienne du ier au vie siècle, Paris, Artisan du livre, 1942, p. 482, l’admet, mais il ne me paraît pas la rapporter à Ammonius, fils d’Hermias, puisqu’il la tient pour antérieure à l’époque où enseignait Hiéroclès.
239 Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., p. 226 sq. et Vancourtr., Les Derniers Commentateurs alexandrins d’Aristote, op. cit., pp. 18-23.
240 Praechter K., Die Philosophie des Altertums, op. cit., p. 639, et Vancourt R., Les Derniers Commentateurs alexandrins d’Aristote, op. cit., pp. 17-23.
241 Praechter K., « Christlich-Neuplatonische Beziehungen », art. cit., p. 1.
242 Cf. p. 25.
243 Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1769. Cf. Freudenthal Jakob, « Ammonios 15 », dans Realencyclopädie, I.2, 1894, col. 1864. Wallies M., art. cit., col. 587, admet la conclusion de Gudeman. Il note pourtant que les allusions aux anges ne sont ni aussi rares que le dit ce savant, ni limitées à l’In Cat. De plus, il les croit authentiques. Mais, pour prouver ces divers points, il n’invoque que les citations de Philopon dans Simpl., In Phys. Or, celles-ci, on le sait, concernent uniquement le Contre Aristote dont le caractère chrétien n’est pas douteux. Elles n’ont donc aucune valeur pour le problème qui nous occupe.
244 Cf. par exemple Ammonius, In Porph. Isag., Index de A. Busse dans le volume qui contient Amm., In Cat., s.v. ἄγγελος, p. 109.
245 Tannery P., « Sur la période finale de la philosophie grecque », art. cit., pp. 222-223. L’expression ὥς φησιν ὁ ποιητής, se trouve dans le Commentaire à Nicomaque, mais on en trouve d’analogues dans les Commentaires sur Aristote à propos de thèses philosophiques, par exemple In Meteor., 3, 36 – 4, 2 et 4, 9-13.
246 Cf. p. 61.
247 C’est d’autant plus compréhensible que, même dans certaines de ses œuvres d’inspiration chrétienne, Philopon n’est guère prodigue de références explicites à sa foi : le C. Pr., par exemple, en est presque complètement dépourvu. Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1789, qui en fait la remarque, suppose que Philopon, réfutant un païen, s’est astreint à se servir des armes mêmes du paganisme. Le fait n’en est pas moins remarquable. Rappelons en outre que Philopon était en butte aux blâmes de ses coreligionnaires parce qu’il réfutait les doctrines païennes plutôt que de commenter les textes sacrés : Phil., De op. m., 1, 14 – 2, 4.
248 Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1769 et 1777.
249 Phil., In De an., 1, 5 – 20, 22. Que Philopon ait l’intention de révéler sa pensée personnelle, il le dit 1, 8-9 ; et l’on voit bien que, pour lui, cela ne consiste pas seulement à répéter le Stagirite : après avoir rapporté les opinions des anciens et terminé cette revue par Platon et Aristote, il continue en disant qu’« il ne faut pas s’arrêter aux déclarations des anciens, mais s’intéresser aux preuves de toute choses » : ibid., 12, 10-15.
250 Ibid., 12, 15-17.
251 Ibid., 16, 2-26.
252 Ibid., 241, 27-28 ; 242, 16-19.
253 Daniélou J., Origène, op. cit., pp. 209-216 et 253.
254 Fritz G., « Origénisme », dans Dictionnaire de Théologie catholique, t. XI, 1931, col. 1574- 1578.
255 Phil., In De an., 138, 31 et 324, 15-16.
256 Ibid., 17, 16 – 18, 22.
257 Ibid., 18, 22-31. Sur ce corps lumineux, cf. Praechter K., Die Philosophie des Altertums, op. cit., p. 629, n. 1 et 641. Phil., C. Pr., en fait la critique, VII, 245, 22-28 et VII, 14, 272, 27 – 276, 21.
258 Ibid., III, 4, 49, 4-8.
259 Ibid., VI, 7, 138, 8-9.
260 Daniélou J., Origène, op. cit., pp. 216-217.
261 Sur la thèse soutenue dans la traduction de Rufin, cf. Daniélou J., Origène, op. cit., p. 216. Sur Rufin, cf. Altaner B., Précis de patrologie, op. cit., p. 330 sq.
262 Phil., In De an., 159, 4 – 160, 7 ; 261, 11-27.
263 On sait que le Commentaire grec au troisième livre conservé sous le nom de Philopon est inauthentique et qu’il est probablement l’œuvre d’Étienne d’Alexandrie. Une partie du texte de Philopon est conservé dans une traduction latine médiévale. Sur ces questions, cf. De Corte Marcel, Le Commentaire de Jean Philopon sur le troisième livre du Traité de l’âme d’Aristote, Liège – Genève, Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et Lettres – Droz, 1934, qui publie le texte latin, et Vancourt R., Les Derniers Commentateurs alexandrins d’Aristote, op. cit., pp. 43-59. Le passage qui nous intéresse se trouve p. 30 sq. de l’édition de M. De Corte.
264 Vancourt R., Les Derniers Commentateurs alexandrins d’Aristote, op. cit., pp. 57-59.
265 Ibid., pp. 55-56.
266 [Simpl.], In De an., 240, 2-5. La remarque sur le caractère vital de la question est de Phil., In De an., 12, 10-15.
267 Phil., In Phys., 54, 9 – 55, 24.
268 Ibid., 55, 24-26.
269 Ibid., 189, 10-26.
270 Simpl., In Phys., 256, 16-25.
271 Cf. Praechter K., « Christlich-Neuplatonische Beziehungen », art. cit., pp. 5-12, et Die Philosophie des Altertums, op. cit., pp. 641-642.
272 Phil., In Phys., 191, 9-33. Le passage important est 191, 28-29 : πῶς ἄν τις παραδέξαιτο τὸ μηδὲν ἐκ τοῦ μηδαμῇ μηδαμῶς ὄντος γίνεσθαι, ἀλλ’ ὡς ἐκ προϋποκειμένου ὑλικοῦ αἰτίου. Vitelli propose d’écrire ἀλλ’ ἢ ὡς au lieu de ἀλλ’ ὡς. Mais le sens qui résulte de cette correction ne s’accorde pas avec le contexte. Pour obtenir une signification acceptable, il suffit d’adopter le texte des mss. et de traduire ἀλλὰ par du moins, sens qui est attesté. (Cf. Liddell-Scott-Jones, s.v.).
273 Ar., Phys., III, 6, 206a9-11.
274 Phil., In Phys., 456, 4-8 (les absurdités) ; 456, 17 – 458, 31 (leur critique). La référence au Commentaire à Phys. VIII se trouve 458, 30-31.
275 Ibid., 762, 5-9. Les deux références au Commentaire à Phys. VIII semblent indiquer que Philopon avait expliqué ce dernier avant les quatre premiers, car elles sont toutes les deux à l’aoriste.
276 Ibid., 428, 23 – 430, 10.
277 Phil., In De gen. et corr., 136, 21 – 137, 3.
278 Vancourt R., Les Derniers Commentateurs alexandrins d’Aristote, op. cit., pp. 18-21.
279 Cf. pp. 46-51.
280 Cf. pp. 51 et 53.
281 Phil., In Meteor., 44, 22-36 (critique de l’astrologie ; éloge des explications physiques) ; 117, 8- 31 (critique de l’explication de la voie lactée de Damascius ; Philopon qualifie cette explication de μῦθος ; nouvel éloge de l’explication par les causes physiques). Cf. aussi 97, 21.
282 Sur l’astrologie chez les néoplatoniciens, cf. par exemple Riess Ernst, « Astrologie », dans Realencylopädie, II.2, 1896, col. 1824. Il est curieux de constater que dans son De op. m., 195, 3 – 204, 7, Philopon fait une longue critique de l’astrologie et qu’il s’y appuie sur l’autorité d’Origène.
283 Cf. sur ce point, p. 60.
284 Il n’y a pas lieu de s’arrêter aux brèves allusions à l’éternité du monde que l’on trouve dans les Commentaires. Un exégète est inévitablement amené à répéter certaines thèses de l’auteur qu’il explique, sans pouvoir les critiquer chaque fois qu’il les rencontre. Ce qui prouve bien qu’elles n’ont guère d’importance, c’est qu’on en trouve dans l’In Phys. (par exemple 490, 14) alors que cette œuvre, comme on l’a vu, attaque la thèse de l’éternité du temps, du mouvement et du monde.
285 Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1769-1770.
286 Phil., C. Pr., VI, 27, 211, 20-26.
287 Cf. par exemple ibid., XIII, 14, 517, 8-11.
288 Il faut d’ailleurs remarquer que l’hostilité de Philopon à Aristote ne fut jamais une hostilité totale. Les hérésiologues notent par exemple qu’il se fondait sur l’aristotélisme pour justifier son trithéisme ; cf. Maspero Jean, Histoire des patriarches d’Alexandrie, op. cit., p. 202. Or le trithéisme apparut seulement vers 559, cf. Stein E., Histoire du Bas-Empire, op. cit., p. 627, n. 2.
289 Gudeman A., « Joannes 21 », art. cit., col. 1770.
290 Ibid.
291 Cf. par exemple Phil., In Phys., 559, 17 sq. ; 560, 16 sq. ; 676, 1-3 ; In Meteor., 47, 13, etc.
292 Phil., In Meteor., 17, 1-2.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
La théorie des catégories
Entre logique et ontologie
Arnaud Dewalque, Bruno Leclercq et Denis Seron (dir.)
2011
Charles Péguy
Note sur M. Bergson et Note conjointe sur M. Descartes
Charles Péguy Andrea Cavazzini et Jonathan Soskin (éd.)
2016
Les frontières de la mondialisation
Gestion des flux migratoires en régime néolibéral
Denis Pieret
2016
Enquête ouvrière et théorie critique
Enjeux et figures de la centralité ouvrière dans l’Italie des années 1960
Andrea Cavazzini
2013
Études philoponiennes
Philosopher à l’École d’Alexandrie
Étienne Évrard Marc-Antoine Gavray (éd.)
2020