Penser la parole en formes monstrueuses :
Les Silènes d’Alfred Jarry et le paradigme grotesque
p. 153-166
Texte intégral
Les Silènes, une « figure » grotesque
1Sous le titre évocateur Les Silènes1 se cache un texte « de » Alfred Jarry, qui est la version française d’une pièce de Christian Dietrich Grabbe. Déjà à partir du titre, Jarry semble vouloir dérouter le lecteur en utilisant une substitution, au lieu d’une traduction. Le Lustspiel de l’auteur romantique est en effet Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung (Plaisanterie, satire, ironie et signification plus profonde), un titre dont la lettre demeure assez loin de la solution choisie par Jarry.
2Le choix du titre est fondamental : il indique que, bien plus qu’une traduction, le texte de Jarry s’appuie sur des procédés qui font glisser la partition verbale dans un jeu qui interpelle les figures imaginaires, en juxtaposant la surface à la profondeur selon le modèle de la « substantifique moelle » évoquée par Rabelais2.
3Pourtant et paradoxalement, si on se focalise sur le procédé de traduction et si on compare les deux textes, on ne peut pas affirmer que Jarry ait beaucoup « inventé ». Il a plutôt « trouvé » — comme on dit à propos d’Ubu3.
4L’invention de Jarry — ce mélange de mots et d’images — ne se retrouve pas au niveau littéral, mais dans une sorte de « sous-texte », un texte sous-jacent et qui nous semble prendre forme sous l’impulsion des Silènes.
5Le titre est évidemment un nœud fondamental de cette création de Jarry : il s’agit du pivot où il détourne l’œuvre originelle, non pas en changeant des éléments mais plutôt en la regardant sous un prisme qui en révèle des traits essentiels. Les Silènes n’est pas un titre qui décrit, mais plutôt une figure au sens rhétorique ; ils vont au-delà de leur existence comme nom et incarnent la correspondance même de l’image avec les mots (une figure, au sens fort du terme) — en dévoilant le contenu.
6En tant que référence à plusieurs facettes, les Silènes permettent ce procédé.
7Dans la mythologie grecque, « Silène » est une sorte de bouffon de l’Olympe qui nourrit Bacchus. Il faut au moins rappeler qu’il s’agit d’une créature sylvestre, mi-homme mi-bête, à l’origine représentée avec une queue, les sabots et les oreilles de cheval, et un phallus en érection. Entre autres, Silène « avait le don de la sagesse et le cachait ». Au ve siècle avant Jésus-Christ, Silène devint le nom du père nourricier de Dionysos, ce qui favorisa l’intégration de ces figures au culte dionysiaque : pendant les fêtes de Dionysos à Athènes, l’on jouait trois tragédies suivies d’un drame satyrique, parodie de légendes héroïques, et le chœur des satyres exprimait la couardise, la lubricité et le plaisir de boire4.
8Jarry explicite sa référence au célèbre passage du prologue de Rabelais à Gargantua : les petites boîtes qui montrent « pinctes au-dessus de figures joyeuses et frivoles, comme des harpies, satyres […] et aultres telles pinctures5 ».
9Les Silènes du titre de Jarry ne sont en fait ni les images, ni les personnages mythologiques (ou leur référence iconographique), ni le texte, mais plutôt une perspective, une porte qui ouvre à une façon autre de lire le texte et de saisir sa composition ; ce qui nous invite à nous interroger sur les stratégies de cette traduction-réinvention.
10En général, Jarry se tient très proche de l’allemand : dans la syntaxe, dans la « germanisation » de la ponctuation, dans la traduction à la lettre de certains noms de personnages. Cette proximité est un fait remarquable dans le cas de deux langues très différentes entre elles, qui imposent d’habitude de comprendre, puis de renverser la construction de la phrase, puis de la reconstruire selon la syntaxe de la langue d’arrivée. En se tenant proche de la lettre, Jarry obtient une traduction atypique, une sorte de traduction « monstre ».
11Dans cette traduction apparemment littérale, Jarry travaille en profondeur sur et sous les mots, en leur donnant parfois des doubles sens, des ambiguïtés, en multipliant les signifiés. Dans le contexte du grotesque et de la ’Pataphysique, cela signifie nier le « sens unique » afin de multiplier les possibilités et les points de vue, jusqu’à faire vaciller la signification même : c’est un des traits de la catégorie du grotesque6.
12Le grotesque assume toujours une polarité sublime ; il se nourrit de références aux arts visuels, dans un mélange « perceptif » de mots et d’images ; ce mélange marque sa constitution d’éléments juxtaposés, qui joint les différentes espèces ; il vit de la dialectique entre surface et profondeur. Enfin, le grotesque suscite un rire qui déclenche une réflexion.
13L’étymologie renvoie au mot « grotte », à une dimension cachée et exotérique. Le mot plonge ses racines dans la Renaissance et doit son origine aux « grotesques » (découvertes dans l’ancienne maison de Néron à Rome) : des décorations où s’entremêlent éléments végétaux, oiseaux, insectes, figures humaines, monstres mythologiques, amphores, trophées. Dès sa préhistoire, alors que sa définition ne désigne pas encore un style littéraire, deux caractéristiques fondamentales ressortent. La première est le caractère monstrueux, engendré par la conjonction d’êtres ou de milieux différents : des corps naissent de grappes végétales, des visages portent des traits humains et animaux, des objets inanimés se mêlent et se confondent avec des éléments animés. La deuxième est la coprésence de motifs abstraits et figuratifs, dans un contexte sans proportions. Giorgio Vasari définit les grotesques comme « une sorte de peinture licencieuse et très ridicule7 ». André Chastel met l’accent sur le sentiment de libération, signe de l’indépendance du royaume de l’art vis-à-vis du monde réglé par les lois naturelles de la physique8.
14Dans les décorations « à la grotesque », la conception habituelle des relations spatiales disparaît, le haut ne domine plus le bas, ce qui est léger peut descendre, ce qui est lourd s’élève avec légèreté. Ce bouleversement des lois communes de la physique se retrouve dans la métaphore qui est à l’œuvre dans le champ littéraire.
15Les décorations à grotesque sont comparées aux formes créées par les nuages : selon Anton Francesco Doni (1549), ce sont des « confusions de la tête9 », des visions subjectives ; pour Armenini, il s’agit d’une sorte d’hallucination inconsistante, comme les taches sur les murs où chacun peut reconnaître les formes de choses extravagantes qui n’existent que dans notre esprit10. Léonard de Vinci invitait à reconnaître dans les taches des murs ou dans les pierres, des éléments de paysage : des montagnes, des fleuves, des rochers, des arbres, des plaines, des vallées et des collines, des batailles, des figures étranges, des visages, des habits « et une infinité de choses11 ». Au xvie siècle, on considère que ces formes irrationnelles nées d’unions monstrueuses ont toutefois leur cohérence, une logique symbolique.
16Ces signes hiéroglyphiques cachent, sous l’apparence du jeu, une « substantifique moëlle » à la manière de Rabelais. Lomazzi, lui aussi peintre et théoricien, parle d’énigmes et de chiffres, de figures égyptiennes et hiéroglyphiques, utilisées pour signifier des concepts cachés sous d’autres figures, comme dans les emblèmes et les allégories. Le fantastique est l’enveloppe d’un savoir profond, qu’il s’agisse d’une réflexion philosophique, d’une puissance magique ou d’un savoir ésotérique.
17Montaigne en 1580 transpose les caractères de la décoration grotesque dans le domaine littéraire : il justifie la forme libre et capricieuse de l’essai ; des « peintures fantasques, n’ayant grâce qu’en la variété et estrangeté. Que sont-ce icy aussi, à la vérité, que crotesques et corps monstrueux, rappiecez de divers membres, sans certaine figure, n’ayant ordre, suite ny proportion que fortuite12 ? »
18Après sa naissance dans le domaine des arts visuels, le grotesque se développe dans la littérature et au théâtre. Dans un important essai de Wolfgang Kayser, on peut lire qu’il est plus aisé de comprendre le grotesque en parcourant les salles du Musée du Prado (devant Bosch et Bruegel, Les Ménines de Velasquez, les Désastres de Goya) qu’en lisant Gottfried Keller, Lawrence Sterne, E.T.A. Hoffmann ou Edgar Allan Poe13 (et on pourrait ajouter à ces noms Victor Hugo, qui nous offre une double expérience du grotesque, du côté des mots et des images).
19On voit se profiler à partir du romantisme une forme « grotesque », non codifiée par un genre, mais avec plusieurs caractères récurrents : la forme ouverte, le montage, les dimensions surhumaines, l’exagération, l’alogisme, l’absence d’une narration linéaire remplacée par la parataxe ou la simultanéité, l’ambivalence, la stratégie du retournement, la composition en mosaïque qui souvent fait usage de citations en jouant sur des formules à sens multiples. Tous les éléments énumérés appartiennent à la sphère de création de Jarry.
20Au xxe siècle, à la composition bizarre et hybride s’ajoute le malaise, déclenchant une perte des repères causée par le doute sur l’authenticité du réel. Des associations incongrues font surgir l’idée de l’absurdité du monde : l’« assemblage » devient le chiffre de l’absurdité et du chaos.
21Dans ce contexte la parole est utilisée de façon alogique et anti-descriptive ; on redécouvre son pouvoir évocateur, symbolique, ou bien purement phonétique, ainsi que sa valeur de « matériau », utilisée selon une stratégie décentrée. On fait appel aux capacités imaginatives et associatives du spectateur (ou du lecteur) pour révéler des couches de significations profondes qui vont au-delà de la parodie. L’œuvre de Jarry condense emblématiquement tous ces procédés de décomposition et de recomposition associative. C’est un auteur « grotesque » pour l’absence de psychologie de ses personnages réduits à des types, mais aussi en raison de la construction dramaturgique de ses pièces (souvent des scènes autonomes non reliées entre elles), et de leur traitement parodique et désacralisant. Ce n’est pas par hasard que son attention est attirée par l’œuvre de Christian Dietrich Grabbe, Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung, un « grotesque » de l’époque romantique, que Martin Esslin comptait dans la « tradition » du théâtre de l’absurde14.
22Le procédé grotesque, considéré aussi dans sa façon d’exploiter l’assemblage, équivaut à la catégorie de « monstre » ; d’autre part, « l’idée de monstre, capitale pour comprendre l’œuvre de Jarry, est étroitement liée à son utilisation du collage », écrivait Brunella Eruli dans un article au titre emblématique, Le Monstre, la colle, la plume15. L’épreuve de ces relations est contenue dans L’Ymagier, en 1896 : « Il est d’usage d’appeler monstre l’accord inaccoutumé d’éléments dissonants : le Centaure, la chimère se définissent ainsi pour qui ne comprend. J’appelle monstre toute originale inépuisable beauté16. »
23Le collage est l’expression d’un univers qui se nourrit des correspondances, des retours, d’associations qui ne sont pas linéaires et qui donnent à voir la manifestation des possibilités infinies.
24C’est ce procédé que Jarry utilise ou, pour mieux dire, que Rabelais utilise et que Jarry lui emprunte et « colle » sur le texte de Grabbe.
Grabbe, auteur pair
25Dans le titre Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung, Christian Dietrich Grabbe (1801-1836) conjoint la « plaisanterie » (la blague, selon d’autres traductions) et la signification profonde ; un « éclat de rire désespéré17 » suscite chez l’homme le dévoilement du caractère illusoire des valeurs communément admises, jusqu’à la désintégration de la certitude de pouvoir accéder à la connaissance. Le Scherz, le « capriccio », le fantastique ouvrent à une dimension existentielle supérieure. C’est l’univers grotesque qui fonctionne en tant que commun dénominateur entre Jarry et Grabbe, qui en fait des « pairs », pour le dire avec Faustroll.
26Qui est Grabbe ? Il existe quelques consonances biographiques entre l’inventeur de la ’Pataphysique et ce romantique qui prend distance avec le romantisme, qui propose des héros qui sont désormais des anti-héros, qui réinvente des mythes en les renversant (Don Juan et Faust). Dans Theodor Herzog von Gothland (Theodor Duc de Gothland, 1822), Grabbe présente « un héros démesuré et vulgaire d’une singulière puissance dramatique18 ». Parmi les définitions que la critique a utilisées pour ses personnages, on trouve : « des titans marqués par le scepticisme », qui ont une expérience du réel et de la vie ; « les fruits de leur effort titanique est le cynisme ; sous la cendre de l’idéal couve la vulgarité » ; ses pièces sont « un mélange d’éléments contrastés » ; Grabbe est un « Shakespeare ivrogne » qui utilise les registres de l’effrayant et du grotesque19. Comment ne pas penser à Ubu ?
27Ladislao Mittner écrit que les héros de Grabbe font toujours une petite erreur20. Son Theodor Duc de Gothland exprime un pessimisme radical : la douleur est le destin de l’univers. Peu après cette tragédie, Grabbe compose Scherz : une pièce d’une comique « populaire », contrepoint grotesque de la tragédie. Il crée un « théâtre anti-aristotélicien ante litteram », un drame ouvert qui saisit la réalité dans son état fragmentaire21.
28Grabbe lui-même constatait : « Je suis trop jeune pour ce temps. Peut-être commenceront-ils à me comprendre dans deux cents ans22. » Avant d’être « adopté » par les avant-gardes, Grabbe fut découvert par Jarry (d’autres traductions françaises suivront23). Considéré un « pré-expressioniste », Grabbe devint le personnage protagoniste de Der Einsame (Le Solitaire) de Hanns Johst, en 1917 ; Leopold Jessner, le plus célèbre metteur en scène du mouvement expressionniste, met en scène Hannibal. Martin Esslin pose Grabbe (à côté de Büchner), dans la tradition de l’absurde — pour ne citer que quelques exemples.
29Scherz propose un diable très vivant et très noir qui trouve que sur la Terre il fait trop froid. Il apporte des nouvelles étonnantes sur les hommes de lettres du passé, punis en Enfer ou loués au Paradis. Il en dérive une revue parodique de la littérature du passé et du futur. Selon le diable, les êtres les plus affreux sont les maîtres (ivrognes) qui élèvent les enfants. Dans le final de la pièce entre en scène « le maudit Grabbe ou, comme on devrait proprement le nommer, le minuscule Crabe, l’auteur de cette pièce24 ».
30Il est difficile de raconter le déroulement dramatique de l’action ; Grabbe même l’affirme, dans une lettre à Tieck, en 1822 : « Der Gang der Handlung absichtlich so lose und wunderlich aneinander gestellt25 » (« Le déroulement de l’action est intentionnellement ouvert et construit d’une manière paratactique »). Les unités d’action, de lieu et de temps ne sont pas respectées. Il n’y a pas d’évolution psychologique des personnages, et on peut difficilement suivre le fil d’une histoire26, sauf celle du mariage de Liddy, désirée par trois hommes pour des raisons différentes : pour son corps, pour son esprit, pour son argent ; ce dernier motif permet de « boucler » l’intrigue et le pacte avec le diable.
31Jarry lit le texte de Grabbe en 1896 ; il le propose à Lugné-Poe comme étant l’œuvre d’un « auteur ivrogne très célèbre en Allemagne » et en disant que la pièce est « d’un comique très voisin de Ubu roi27 » — mais Lugné-Poe choisit Ubu.
32En 1898, le Mercure de France annonce les répétitions en cours des Silènes, ce qui témoigne du projet de mettre en scène la pièce en marionnettes au Théâtre des Pantins, avec la musique de Claude Terrasse ; on annonce aussi la publication du texte28.
33Jarry cite le théâtre des Pantins ainsi que Grabbe dans une conférence du 22 mars 1902 : « Les pantins […] s’occupèrent aussi d’une pièce allemande extraordinaire du célèbre Ch. D. Grabbe, proclamé en Allemagne le plus grand tragique après Schiller [rayé : mais on connaît peu Les Silènes, son unique pièce comique29]. » À cette occasion, il lit les deux scènes de négociations avec le diable (acte II, scènes 2 et 430).
34Le travail de traduction date des premiers mois de 1898 (pour la représentation au Théâtre des Pantins), c’est-à-dire que Jarry y travaille en parallèle avec Faustroll. Ce n’est donc pas sans importance que le texte de Grabbe, Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung fasse partie de la bibliothèque du Docteur ’pataphysicien (onzième livre), dans la liste des « vingt-sept volumes dépareillés, tant brochés que reliés31 » (entre autres, Rabelais et deux textes traduits par Jarry, The Rime of the Ancient Mariner de Coleridge et Scherz de Grabbe). Le Lustspiel revient dans le viie chapitre du premier Livre, Du petit nombre des élus : « À travers l’espace feuilleté des vingt-sept pairs, Faustroll évolua vers la troisième dimension : […] De Grabbe, les treize compagnons tailleurs que massacra, à l’aurore, le Baron Tual par l’ordre du Chevalier de l’Ordre pontifical du Mérite Civil, et la serviette qu’il se noua préalablement autour du cou32. » Comme dans Scherz, comme dans Faustroll, le jeu d’allusions aux hommes de lettres et à leurs œuvres accompagne tout le texte.
35L’histoire des différents manuscrits a été tracée dans le numéro de Viridis Candela sur lequel nous nous sommes appuyée ; de ce parcours labyrinthique on peut tirer la considération qu’il s’agit d’une histoire de « collage33 ».
36Des fragments des Silènes furent publiés dans La Revue Blanche du 1er janvier 1900, précédés d’une note de Jarry :
GRABBE, Christian Dietrich, né et mort à Dettmold [sic] (1801-1836), le plus grand poète d’Allemagne, dit-on, depuis la mort de Schiller. Mal connu en France, les dictionnaires citent ses tragédies : Le duc de Gothland, Marius et Sylla, Don Juan et Faust, Les Hohenstaufen (Frédéric Barberousse et Henri IV), Napoléon ou les Cent Jours, Annibal, La Bataille d’Arminius — et ne mentionnent pas sa comédie satirique, célèbre encore, que nous avons traduite et dont nous ne donnons que de scènes détachées, les allusions perpétuelles aux littératures du temps la faisant peu compréhensible sans un long commentaire. Le titre de cette pièce en trois actes est : Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung (Plaisanterie, satire, ironie et signification profonde). Rabelais en a préparé la translation plus concise : « Silènes estoient jadis petites boites… » — A.J34.
37Jarry laisse suspendue la citation du texte de Rabelais, en faisant confiance au lecteur pour compléter.
38Reprenons le prologue de Gargantua :
Buveurs très illustres, […] Alcibiades, ou dialogue de Platon intitulé le Bancquet, louant son précepteur Socrate, sans controverse le prince des philosophes, entre aultres parolles le dict estre semblable es Silènes. Silènes estoient jadis petites boites, telles que voyons de présent es bouticques des apothecaires, pinctes au-dessus des figures joyeuses et frivoles, comme des harpies, satyres, oysons bridés, lièvres cornuz, canes bastées, boucqs volans, cerfz limmoniers et aultres telles pinctures contrefaictes à plaisir pour exciter le monde à rire (quel fut Silène, maistre du bon Bacchus) ; mais au dedans l’on reservoit les fines drogues, comme baulme, ambre gris, amomon, musc, zivette, pierreries et aultres choses precieuses. Tel disoit estre Socrate, parce que, le voyans au dehors et l’estimant par l’extérieure apparence, n’en eussiez donné un coupeau d’oignon, tant laid il estoit de corps et ridicule en son maintien, le nez pointu, le reguard d’un taureau, le visage d’un fol, […] toujours riant […], toujours cachant son divin sçavoir ; mais, ouvrans ceste boyte, eussiez au dedans trouvé une céleste et impréciable drogue : entendement plus que humaine, vertus merveilleuse, courage invincible, […] deprisement incroyable de tout ce pourquoy les humains tant veiglent, courent, travaillent, navigent et bataillent35.
39Le passage sur la substantifique mouelle suit : en se référant aux œuvres qui ont l’apparence de bouffonneries et qui révèlent dedans une substance différente et sérieuse, Rabelais nomme le chien la bête « du monde plus philosophe » : « Rencontrant quelque os medulare » il l’étudie, le guette, puis avec « diligence il le sugce » ; ce « peu de moelle » est plus délicieux que toute autre mets. « Rompre l’os et sugcer la sustantificque mouelle36 » : c’est le conseil de l’auteur au lecteur de Gargantua. Un avis en mots qui se traduit dans l’image des Silènes représentés sur les boîtes des apothicaires37.
40Il n’y a pas pour Jarry meilleure « autorité » : Rabelais est une sorte de divinité tutélaire dans un cadre de renvois multiples entre auteurs « grotesques » à travers les siècles. Les petites boîtes qu’il évoque sont documentées : elles font partie du monde des apothicaires, des alchimistes, des professionnels de la métamorphose38.
41L’idée de la substantifique mouelle se superpose, dans la perspective jarryenne, à un autre « avis aux lecteurs », celui contenu dans le titre de Grabbe (le rire sur le monde cache une dimension profonde) ; il s’agit de l’incarnation du concept grotesque dont on a parlé, qui met en relation une surface aérienne et fantastique et une profondeur, la perception sensible et la réflexion. En optant pour le titre Les Silènes, Jarry suggère a priori son interprétation du texte, il montre du doigt la « signification profonde », la « mouelle » qu’on pourra « sugcer » au-delà des blagues et des situations absurdes proposées dans la pièce.
Adaptation : le paradigme grotesque à l’épreuve
42Le rapport entre surface et profondeur a une relation avec la traduction littérale (la « surface » du texte). Or, le paradoxe ici est que le passage « logique » de l’allemand à la langue française exigerait de s’éloigner de la lettre, alors que Jarry s’y refuse souvent, en détournant le sens ou en produisant des effets imprévus.
43Impossible de citer ici le texte d’une manière analytique, mais on peut synthétiser les principes qui marquent les procédures d’adaptation. Certaines interventions visent à la mise en scène en marionnettes : Jarry coupe des passages, par exemple ceux concernant l’intrigue des hommes qui désirent Liddy, ce qui constituerait le seul fil narratif. Selon Rutilie Foch, le deuxième acte gagne « en brusquerie, en style marionnettes39 ». Jarry coupe la scène où l’on raconte ce qui se passe en Enfer (dans le texte de Grabbe les plus sublimes héros du théâtre sont réduits à des taverniers ou des entremetteurs — le Chasseur noir du Freischütz a été expédié par le diable directement au ciel, par exemple).
44Les allusions à la littérature et au théâtre de l’époque sont réduites. Dans le catalogue d’une importante exposition consacrée à la ’Pataphysique, Brunella Eruli intitulait son intervention La Letteratura patafisica : Scherzo, ironia e significato profondo40. Il n’est pas question du texte de Grabbe dans l’article ; le titre est cité en tant qu’emblématique d’une catégorie esthétique et d’un état d’esprit ; un mot manque dans cette citation, « satire » — il ne s’agit pas d’un oubli. Une différence entre le texte de Grabbe et l’adaptation de Jarry est en effet l’élément proprement satirique ; les passages qui n’ont pas été retenus par Jarry dans sa traduction sont en général les allusions aux comédiens ou à certaines tendances de son époque. Jarry a écarté quinze pour cent du texte, « à des fins d’efficacité41 ».
45D’autres coupes relèvent de la censure : par exemple dans le passage concernant Jeannette Dolcemiel. « Jarry s’arrête aux chatouilles à la nuque, Grabbe, lui, détaillait les opérations : “Je caressais sa nuque charmante, lui pinçais le mamelon et finalement, sans façon, je mettais la main sur son giron42” », observe Rutilie Foch. Dans le même sens on peut lire les changements qui concernent « l’affaire de condoms manquants43 », traitée avec beaucoup d’esprit ’pataphysicien par la « Régente de Monstrosophie Jarryque & Exhibitionnisme » Brunella Eruli, dans le même Cahier.
46Certains noms sont modifiés et perdent leur référence historique : le dramaturge Houwald devient Troccon44 ; Adolph Müllner devient Machemerde, d’origine rabelaisienne (cité dans Faustroll) ; son œuvre Die Schuld (La Faute) devient Le Pâté ; Jarry actualise des titres pour ses spectateurs français (des « notes » en marge du texte manuscrit témoignent de sa recherche dans le choix des titres des journaux45).
47Des noms de personnages sont traduits à la lettre, Jarry leur inventant un équivalent français ; ils gardent donc leur signification allusive : comme Foch l’a souligné, Freiherr von Mordax devient le Baron Tual (Margrave Tual, selon les différents rédactions). Le Baron von Haldungen est Saint Maintien (Halten signifie tenir46) ; Wernthal se change en Valgarant ; Gottliebchen, plus évidemment, en Théophilot.
48Mais le cas qui nous semble le plus intéressant dans le contexte de l’esprit de Jarry, du grotesque et de la ’Pataphysique, est celui des substantifs traduits à la lettre et qui déclenchent un tout autre signifié : le cas emblématique est « figue d’oreille » qui traduit (à la lettre !) « Ohrfeige » (gifle47) : magnifique exemple de détournement ’pataphysique.
49Le fait de substituer aux noms cités des équivalents tirés du contexte de la langue d’arrivée est normal dans une traduction, surtout s’il s’agit d’une traduction destinée à la scène. Ce qui apparaît atypique, ce sont donc plutôt les cas où les allusions allemandes subsistent — ce qui arrive souvent dans Les Silènes.
50Cependant, ces transpositions ne sont pas de règle : elles n’affectent pas L’Empartial de Hambourg ni Le Correspondant de Nuremberg (I, I), ni les divers ouvrages que le diable fait transporter en enfer par son serviteur Néron (III, 20- 21). Jarry ne touche pas à l’arrière-plan allemand de la pièce : le diable est pris pour « une femme de lettres allemande » et « la littérature allemande » reste en enfer le châtiment suprême. Nombres d’allusions littéraires subsistent, par exemple à Poésie et Vérité de Goethe […]. Quand le diable énumère les mauvais lieux qui sont la porte de l’enfer, Jarry supprime, certes, les noms des rues chaudes, qui n’auraient rien dit à un spectateur français, mais il maintient Berlin, Dresde et Leipzig, éliminant Paris et son Palais-Royal pourtant présents dans le texte original (II, 6). La pièce reste située en Allemagne. Les allusions à l’actualité française n’en auraient été que plus drôles, lors de représentations en marionnettes48.
51Or, le fait de garder les références allemandes est un moyen pour détourner le texte (évidemment du point de vue de la réception française, notamment parisienne), en accentuant son côté alogique, avec des références qui ne parlent pas aux spectateurs. « Jarry est donc un adaptateur interventionniste qui n’intervient pas systématiquement49. »
52Jarry est « “un traducteur plutôt précis et vigoureux” qui et travaille vite et “colle” de près l’allemand ». Il en résulte « un certain nombre de phénomènes50 », comme la ponctuation germanisée (la conservation de la ponctuation d’origine donne lieu à une « ponctuation respiratoire51 ») ou la grammaire germanisée (les naturalistes se cassent les têtes à coups de cailloux).
53On retrouve en outre des fautes factices qui montrent l’approche de Jarry. Par exemple, le « Sofa » de Goethe révèle selon Rutilie Foch un jeu de mots pataphysicien : le « Divan » (Diwan) est un recueil de poèmes arabes ou persans, mais la traduction volontairement erronée choisit une autre signification du mot ; « pour l’observateur superficiel, c’est un contresens52 », mais en vérité le texte prend un chemin différent…
54Un dernier exemple nous montre que la traduction peut être marquée par la sonorité : le son reste proche de l’allemand, mais le sens change nettement. Grabbe utilise l’expression « Du alberner Pinsel » (espèce d’idiot, mais à la lettre « pinceau pâli »), que Jarry traduit « Pinceau de l’Albane », en donnant lieu à une nouvelle référence, absente dans le texte originaire : celle à Francesco Albani, peintre italien53.
55Tous ces procédés engagent une « signification profonde » et plurielle : le ’pataphysicien évite le sens unique. Dans Les Minutes de sable mémorial, Jarry écrit : « Suggérer au lieu de dire, faire dans la route des phrases un carrefour de tous les mots54. » Dans le cas de la traduction, « avec deux roues à parcourir simultanément deux fois plus de possibles carrefours verbaux, l’art de traduire est propice à l’exploration des sens interdits ou mieux des sens “supplémentaires”, comme les univers55 ». Comme dans le monde du grotesque, multiplier les significations des mots (ou des images) est un moyen d’y faire voir différentes profondeurs.
56Au niveau de la structure, Jarry a considéré chaque acte comme une unité56. Toute l’histoire des différentes versions (avec leurs différentes coupures) nous montre la possibilité de monter le texte selon plusieurs perspectives. Cette possibilité tient d’abord au texte de Grabbe, déjà « anti-dramatique », mais dans le contexte de Jarry, le procédé prend d’autres nuances. Chez Jarry chaque mot contient une pluralité des signifiés, qui sont donc arbitraires, mais en relation dans une chaîne d’analogies, d’assonances57. Si « le sens ne fait plus corps avec l’objet, mais se pose sur lui d’une manière toute provisoire58 », dans le cas d’un texte préexistant, la manifestation d’infinis possibles semble se multiplier.
57Dans le compte rendu d’un ouvrage qui prétendait avoir la clé de son œuvre, Brunella Eruli rappelait : « Jarry est avant tout l’artiste conscient de la mort du signifié dans le monde moderne. Assumer cette prémisse a des implications essentielles dans son processus de création, dans ses directions et dans ses modalités59. »
58En conclusion, une ouverture : dans l’histoire de leur publication, Les Silènes rencontrent les Éditions des Bibliophiles Créoles, en 1926 (une édition qui a fait l’objet de l’analyse du carnet Viridis Candela, en tant qu’étape des « assemblages » bizarres de ce texte). C’est assez curieux d’en repérer un exemplaire, orné « d’un frontispice à l’eau-forte de Galanis, montrant une sirène fort occupée à arranger le sexe imposant d’un homme nu », une image « collée » par les éditeurs comme introduction au texte de Jarry60. On ne peut pas éviter d’aller d’une manière immédiate à l’assonance entre Silènes et Sirènes (êtres mythologiques qui reviennent, entre autres, dans le prologue de Rabelais…).
59En considérant les modalités de composition propres à Jarry, on est tenté de penser qu’il a choisi le titre aussi pour cette assonance. D’autre part les Sirènes sont, elles aussi, des êtres monstrueux, des hybrides étranges et des créatures séduisantes. Ce dernier trait les rapproche des représentations du diable. Dans la chaîne des boucles ’pataphysiques, on pourrait aussi arriver — peut-être avec la même audace que Vasari attribuait aux figures grotesques — à penser à toute la famille dont les Sirènes font partie : Ondines, Mélusines, Willies, Giselle, Lilith, parfois alliées et maîtresses du diable. Le diable — vrai protagoniste de l’œuvre de Grabbe.
Notes de bas de page
1 Les Silènes datent de 1898-1900. Pour l’histoire des différentes rédactions de la traduction, voir Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, no 6, 15 sable 129 EP, vulg. 15 décembre 2001 (Célébration du 200e anniversaire de Grabbe) ; l’édition « définitive » est Les Silènes, adaptés de l’allemand de C. D. Grabbe par Alfred Jarry, musique de Claude Terrasse ; avec un éloge technique de Thieri Foulc et Philippe Cathé, Paris, Collège de ’Pataphysique, CXXIX [2001] ; cf. aussi Alfred Jarry, Les Silènes dans Œuvres complètes, t. 2, éds H. Bordillon, avec P. Besnier et B. Le Doze, Paris, Gallimard, 1987, p. 27- 49 ; Notices, notes et variantes, p. 697-709.
2 J’ai abordé pour la première fois le texte de Grabbe dans le contexte d’une réflexion sur le grotesque et la marionnette (voir note 6), et celui de Jarry en fonction d’une création de Marco Martinelli (Teatro delle Albe) ; cf. Cristina Grazioli, « Le profondità del Grottesco : da Rabelais alle Albe », Marco Martinelli, Scherzo, satira, ironia e significato profondo, Rome, Editoria & Spettacolo, 2007, p. 5-26.
3 Cf. Brunella Eruli, Jarry. I mostri dell’immagine, Pise, Pacini, 1982, p. 5.
4 Voir l’entrée « Silène », Grand Larousse Encyclopédique en dix volumes, Paris, Larousse, 1968, tome 9, p. 827 ; Encyclopedia Universalis en ligne.
5 François Rabelais, Gargantua, publié sur le texte définitif, établi et annoté par Pierre Michel, préface de Victor Hugo, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1965, p. 25.
6 Cf. Cristina Grazioli, « La marionetta e il grottesco. Intersezioni », dans Lo specchio grottesco. Marionette e automi nel teatro tedesco di primo ’900, Padoue, Esedra, 1999, p. 9-36 ; « Ars combinatoria. Le Grotesque et la marionnette », trad. Didier Plassard, dans Humain-Non humain, Puck. La marionnette et les autres arts, no 20, Montpellier, L’Entretemps, 2014, p. 29-38.
7 Giorgio Vasari, Vite de’ più eccellenti architetti, pittori, et scultori italiani, da Cimabue insino a’ tempi nostri, Torino, Einaudi, 1991, I, p. 73.
8 André Chastel, La Grottesque. Essai sur l’« ornement sans nom », Paris, Le Promeneur, 1988.
9 Anton Francesco Doni, Disegno del Doni, partito in più ragionamenti, Venise, Gabriel Giolito di Ferrari, 1549, p. 22.
10 Giovan Battista Armenini, De’ veri precetti della pittura, Turin, Einaudi, 1988, p. 220.
11 Léonard de Vinci, Traité de la peinture, Paris, Calmann-Lévy, éd. A. Chastel, 2003, p. 216.
12 Michel de Montaigne, « De l’amitié », Essais, Livre I, XXVIII, éds M. Rat et A. Thibaudet, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1962, p. 181.
13 Wolfgang Kayser, Das Groteske. Seine Gestaltung in Malerei und Dichtung, Oldenburg, Stalling, 1957.
14 Martin Esslin, Le Théâtre de l’absurde, traduit de l’anglais par Marguerite Buchet, Francine Del Pierre, Fance Frank, Paris, Buchet/Chastel, 1963, p. 317-318.
15 Brunella Eruli, « Le monstre, la colle, la plume », Revue des Sciences Humaines, no 3, 1986, p. 51-66.
16 Alfred Jarry, L’Ymagier, no 2, janvier 1895, dans A. Jarry, Œuvres complètes, t. 1, éd. M. Arrivé, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1972, p. 969-975 (p. 972).
17 Voir Rudolf Drux, « Christian Dietrich Grabbe, Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung », Interpretationen. Dramen des 19. Jahrhunderts, Stuttgart, Reclam, 1997, p. 71-93.
18 Giuseppe Saito, « Christian Dietrich Grabbe », Teatro tedesco. Raccolta di drammi e commedie dalle origini ai nostri giorni, éds Giaime Pintor et Leonello Vincenti, Milan, Bompiani, 1946, p. 715-716 (introduction à la traduction italienne Scherzo, satira, ironia e altre cose più profonde).
19 Ibidem.
20 Ladislao Mittner, Storia della letteratura tedesca, Turin, Einaudi, III*, tome I, p. 297.
21 Ibid., p. 299 ; plus récemment, Michele Cometa a parlé d’« athéisme mystique » : « Don Giovanni è Faust. L’ateismo mistico di Ch. F. Grabbe », Humanitas, 62, 5-6 (2007), p. 963-968.
22 Lettre à son éditeur Schreiner, citée dans Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., 2e page de couverture.
23 Raillerie, satire, ironie et signification cachée, trad. Robert Valançay, Paris, Éditions Fontaine, 1946 ; Plaisanterie, satire, ironie et sens plus profond, trad. Henri-Alexis Baatsch, Paris, Éditions Le terrain Vague - Eric Losfeld, 1971 ; Plaisanterie, satire, ironie et signification plus profonde, trad. Robert Piéchaud, La Roulette russe, février 2008.
24 « Das ist der vermaladeite Grabbe, oder wie man ihn eigentlich nennen sollte, die zwergigte Krabbe der Verfasser dieses Stücks ! », Christian Dietrich Grabbe, Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung, op. cit., p. 64 ; cf. Alfred Bergman, « Nachwort », ibidem, p. 79-86 ; Rudolf Drux, « Christian Dietrich Grabbe, Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung », Interpretationen. Dramen des 19. Jahrhunderts, op. cit., p. 71-93.
25 Ibid., p. 71. Grabbe fait partie des auteurs considérés dans l’importante étude de Volker Klotz, Geschlossene und offene Form im Drama, München, Carl Hanser, 1960.
26 Cf. Rudolf Drux, Christian Dietrich, Grabbe, Scherz, Satire, Ironie und tiefere Bedeutung, op. cit., p. 80.
27 Lettre du 12 mars 1896, cité dans Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., p. 51.
28 Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., p. 51.
29 Alfred Jarry, « Les Marionnettes » [Conférence sur les pantins], L’Étoile absinthe, 5-6e Tournée, Société des amis d’Alfred Jarry, juin 1980, p. 42-46 ; liste des lectures, ibid., p. 47.
30 Rutilie Foch avec Patricia von Münchow, « Jarry et le 11e livre pair », Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., p. 53.
31 Alfred Jarry, Gestes et opinions du Docteur Faustroll, pataphysicien, Œuvres complètes, op. cit., p. 660-661.
32 Ibidem, p. 665-666.
33 Voir Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit.
34 Note de Jarry à l’édition (fragmentaire) des Silènes dans La Revue Blanche, 1900, 1er janvier ; voir Alfred Jarry, Les Silènes, adapté de l’allemand de C. D. Grabbe par Alfred Jarry, musique de Claude Terrasse, Paris, Collège de ’Pataphysique, CXXIX [2001], p. 89.
35 F. Rabelais, Gargantua, op. cit., p. 25-27.
36 Ibidem, p. 29.
37 Quelques années avant Rabelais, Érasme de Rotterdam a recours à la même référence dans l’Adage 2201 (Sileni Alcibiadis). Les silènes de l’Antiquité étaient de petites figurines fendues en leur milieu et qu’on pouvait ouvrir : fermées, elles représentaient un joueur de flûte grotesque ; ouvertes, elles montraient la figure d’une divinité. Elles deviennent signe du rapport entre le corps et l’âme.
38 Le silène est aussi une plante qui montre une forme ronde intéressante par rapport à Ubu…
39 Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ‘Pataphysique, op. cit., p. 53 ; les exemples que nous proposons sont tirés du traitement exhaustif conduit par Rutilie Foch.
40 Brunella Eruli, « La Letteratura patafisica : Scherzo, ironia e significato profondo », Jarry e la patafisica. Arte letteratura spettacolo, Milan, Bompiani, 1983, p. 12-26.
41 Rutilie Foch et Patricia von Münchow, « Jarry et le 11e livre pair », Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., p. 54.
42 Ibid., p. 53-54.
43 Brunella Eruli, « L’Affaire de condoms manquants », Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., p. 69-74.
44 Ibid., p. 52. Peut-être écho de Trochon, marchand de vélos auprès duquel Jarry s’était lourdement endetté.
45 Ibid., p. 54.
46 Ibid., p. 58.
47 Dans Faustroll l’Évêque Marin Mensonger donne à Bosse-de-Nage « une figue d’oreille » (A. Jarry, Gestes et opinions du Docteur Faustroll, pataphysicien, op. cit., p. 697).
48 Rutilie Foch avec Patricia von Münchow, « Jarry et le 11e livre pair », Viridis Candela. Carnets trimestriels du Collège de ’Pataphysique, op. cit., p. 54-56 ; c’est nous qui soulignons.
49 Ibid., p. 57.
50 Ibid.
51 Ibid., p. 65.
52 Ibid., p. 57.
53 Viridis Candela, op. cit. p. 58.
54 A. Jarry, « Linteau », Les Minutes de sable mémorial, Œuvres complètes, op. cit., p. 171.
55 Viridis Candela, op. cit., p. 60.
56 Ibid., p. 62.
57 Cf. Brunella Eruli, « La Letteratura patafisica : Scherzo, ironia e significato profondo », loc. cit., p. 15.
58 Ibidem, p. 52.
59 Brunella Eruli, compte-rendu de « Keith Beaumont, A. Jarry : A critical and Biographical Study, Leicester University Press, 1984 », Rivista di letterature moderne e comparate, 1986, vol. XXXIX, II, p. 157-159.
60 Citation tirée de la description d’une vente aux enchères : « Les Silènes. Papeete, Les Bibliophiles Créoles [René Bonnel], [1925]. […] Édition originale de cette version libre et arrangée par Pascal Pia de la traduction par Alfred Jarry du texte de Grabbe Satire, Ironie et Sens plus profond. […] La chemise de l’emboîtage présente sur le premier plat une gidouille qui n’est pas sans rappeler les travaux de M.C. Escher. Séduisante réalisation » [en ligne].
Auteur
Université de Padoue
Professeure à l’université de Padoue, où elle enseigne l’histoire du théâtre et du spectacle ainsi que l’histoire et l’esthétique de la lumière au théâtre. Les axes de ses recherches portent sur le théâtre allemand entre xixe et xxe siècles, sur les poétiques de la marionnette, sur les conceptions de la lumière, l’éclairage de scène et ses implications dramaturgiques à travers les siècles et jusqu’à nos jours. Parmi ses publications, on peut citer : Lo Specchio grottesco. Marionette e automi sulla scena tedesca del primo ’900 (Esedra, 1999) ; Luce e ombra. Storia, teorie e pratiche dell’illuminazione teatrale (Laterza, 2008) ; les éditions italiennes des écrits sur le théâtre de Rainer Maria Rilke, des auteurs de l’expressionnisme allemand, des études de Bernhard Diebold et de Hans Doerry. Elle a été corédactrice avec Didier Plassard du numéro 20 de la revue Puck (Humain-Non humain, 2014). Elle prépare un ouvrage consacré à Rilke et le théâtre.
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