Chapitre 7. Le travail et le rapport salarial
p. 133-152
Texte intégral
1L’extension du salariat apparaît bien un trait caractéristique de la seconde moitié du XIXe siècle. Ce mouvement ne peut être détaché des conditions de l’accumulation du capital qui viennent d’être décrites : l’usage de la force de travail salariée est la source du profit qui, comme "rémunération" du capital, conditionne la poursuite du processus d’accumulation ; de plus, en retour, la nature et les formes de ce dernier stimule l’accroissement du salariat. De ce fait, le rapport salarial doit occuper le coeur de la description des problèmes liés au travail... Il s’agit des conditions économiques, juridiques, politiques qui régissent l’usage et la reproduction des forces de travail. Il n’épuise pas tous les aspects des rapports de production capitalistes et ne subit pas les seuls effets du rythme de l’accumulation, il reste, en l’occurrence, modelé par les luttes des travailleurs, dont la conscience de classe née avec la Révolution de 1848, se fortifie sous l’Empire.
2Nous avons pris ici le parti d’étudier le seul travail industriel1 réservant l’analyse du monde agricole au prochain chapitre. Il y a maintenant une frontière entre le travail Industriel et le travail agricole, la seconde moitié du XIXe siècle marque la fin du travailleur rural polyvalent, agriculteur de par les legs du passé, et, producteur pour le compte d’un industriel sous l’effet de la nécessité. Comme le remarque J. Bruhat "parmi les mutations qu’on observe au sein de la société française au XIXe siècle, la plus importante, par ses conséquences générales, est le développement du monde urbain du travail. Il croît d’abord en Importance numérique (en chiffres absolus et en chiffres relatifs). D’autre part, à l’Intérieur de ce monde du travail le prolétariat proprement dit se distingue de plus en plus nettement d’une masse indifférenciée aux statuts divers. Ce prolétariat prend de son existence une conscience de plus en plus claire..."2. L’auteur conclut que dans les années 1880 le monde urbain du travail est en passe de devenir fondamentalement celui du prolétariat.
3Nous procéderons à l’étude du travail en trois rubriques : l’extension du salariat et le nouveau rapport salarial, le travail et les structures productives, et, la rémunération du travailleur. Chacune décrivant une tendance lourde : la croissance de la main-d’oeuvre salariée et son contexte, l’essor du travail en usine et la restructuration des qualifications, la hausse tendancielle du salaire nominal et réel.
Section I – L’extension du salariat et le nouveau rapport salarial
4La domination du capitalisme et des rapports de pouvoir qu’il implique passe par un essor du salariat et l’Institutionnalisation des rapports de travail nouveaux. En même temps que les classes dirigeantes organisent une mobilisation importante de forces de travail, celles-ci s’organisent afin de défendre et d’améliorer leurs conditions.
§ I – L’EXTENSION DU SALARIAT
5Dans la période présentement étudiée on assiste à une croissance de la population active salariée même si la population Industrielle (salariée) connaît une progression plus modérée. Puisque l’industrie capitaliste constitue maintenant le secteur moteur du système productif, il s’agira de relever les sources à partir desquelles il s’alimente en forces de travail : l’exode rural et l’immigration étrangère.
A – Accroissement de la population active mais croissance modérée du salariat industriel
6A la veille de la première guerre mondiale, la population active atteint le chiffre de 21 millions. Sur la période étudiée, elle s’accroît de 7 millions, ce qui est remarquable compte tenu d’une faible croissance démographique. Sachant que la population travaillant effectivement n’a jamais atteint en France le seuil de 22 millions, on conclut que, durant la seconde moitié du XIXe siècle et les premières années du XXe siècle, s’est effectué une "mise au travail" importante. L’emploi industriel augmente à un rythme plus élevé puisque sa part dans la population active progresse, mais on remarque que sur l’accroissement de population active (7 millions) l’industrie n’en fournit qu’un peu plus d’un tiers (exactement 2,5 millions). Ce fait doit être souligné. Il signifie que la salarisation des emplois ne touche pas seulement l’Industrie mais aussi le secteur tertiaire, en 1911 les employés formalent une fraction non négligeable du salariat et en notable progression. D’après les recherches de J.C. Toutain le nombre d’ouvriers de l’industrie serait passé de 2,7 millions en 1866 à 4,7 en 1911 (le nombre varie fortement dans la courte période puisqu’il subit l’influence des cycles industriels). De ce fait on est en droit de conclure à une croissance modérée du salariat industriel ouvrier, elle-même explicable par la faiblesse relative de l’industrie française qui n’apparaît pas comparable à celle des grandes nations industrielles (Angleterre, Allemagne, Etats-Unis). On ne peut pas ne pas remarquer les "transferts internes" à la classe des salariés : diminution du nombre de domestiques et accroissement du nombre d’employés. La seconde révolution industrielle et les débuts de la tertiairisation de l’économie requièrent un nouveau personnel dans l’appareil productif aussi bien qu’en dehors (dans le commerce par exemple).
Année | Population totale | Population active | Population active industrielle-BTP |
1856 | 36,0 | 14,1 | 3,8 |
1861 | 37,4 | 14,8 | 4,0 |
1866 | 38,1 | 15,1 | 4,2 |
1872 | 36,1 | 14,7 | 3,8 |
1881 | 37,4 | 16,6 | 4,4 |
1891 | 38,1 | 16,3 | 4,6 |
1896 | 38,3 | 18,9 | 5,4 |
1901 | 38,4 | 19,7 | 5,9 |
1906 | 38,8 | 20,7 | 6,0 |
1911 | 39,2 | 20,9 | 6,2 |
Evolution de la population (en millions)3

Evolution du salariat4 ;
B – Les sources de main-d’oeuvre industrielle : exode rural et immigration
7Les études traitant des origines des nouveaux salariés font apparaître deux sources principales d’approvisionnement en forces de travail : l’exode rural et l’immigration5. Au cours d’une première phase couvrant tout le Second Empire et jusque dans les années 1875, le premier semble dominant. Il s’agit du départ des campagnes surpeuplées de jeunes gens ayant le plus souvent effectué leur service militaire6. Ils deviendront cheminots, maçons, ouvriers boulangers, mécaniciens dans la grande banlieue parisienne. L’Ouest et le Centre fournissent les plus gros contingents. L’immigration se poursuit mais sans changer de nature. Dans une seconde période qui s’ouvre avec la crise agricole et le protectionnisme, les termes du problème changent : l’agriculture tend à retenir ses forces de travail masculines et les flux de main-d’oeuvre vers l’industrie se rétrécissent. L’immigration étrangère "se voit assigner son rôle contemporain : alimenter les postes du marché de l’emploi que les français commencent à délaisser faute d’une validation sociale suffisante (qu’il s’agisse des rémunérations ou des conditions de travail)"7. Les étrangers occuperont alors près de 8 % de la population active, cette proportion aurait sans nul doute progressé sans une loi de naturalisation d’office (entre 1872 et 1911 on enregistra près d’un million de naturalisations). Cette population diffère beaucoup de celle d’aujourd’hui : composée majoritairement d’Italiens et de Belges, et en proportions moindres d’Espagnols ou de ressortissants d’Europe Centrale, elle trouve à s’embaucher dans la sidérurgie du Nord et du Nord-Est, dans les travaux publics ou comme manoeuvre dans les grandes usines.
8Ces deux sources clés de la prolétarisation ou de la salarisation expliquent pourquoi la mobilité de la force de travail fut Importante.
§ II – LE NOUVEAU RAPPORT SALARIAL
9De l’individuel au collectif, voilà résumé le changement majeur. Nous consacrons quelques développements à détailler ses conséquences.
A – Un nouvel esprit : de l’individuel au collectif
10Le nouveau rapport salarial provient de l’évolution du capitalisme, et des changements dans les rapports de forces entre les classes. A la concentration productive, à la centralisation financière, à l’organisation d’ententes professionnelles patronales correspondent l’établissement d’une collectivité nouvelle de travailleurs et la naissance de l’entraide ouvrière. Ainsi que le remarque M. Bouvier-Ajam "le rapport des forcés n’est plus le même puisque les forces sont organisées"8. Le système d’emploi et de travail institué par la Révolution et la Restauration n’est pas globalement et brutalement supprimé, il est partiellement et patiemment révisé. Ainsi tout ce qui se rattache à l’organisation des ouvriers s’avère d’abord nié, puis toléré enfin accepté et donc codifié. Quelques dates de ce processus : en 1864, on autorise la cessation concertée du travail (en clair : la grève), première entorse sérieuse à la loi Le Chapelier, puis on reconnaît les chambres syndicales et le droit de réunion (l’un ne pouvait aller sans l’autre), en 1884 on affirme le principe de la liberté syndicale, point d’orgue de ce mouvement de révision. Rien ne pourra plus être comme avant, même si, comme dans toute avancée sociale, on enregistre des reculs ; ainsi évoquera-t-on la vieille loi Le Chapeller pour condamner des formules associatives ou dénoncer des coalitions9.
11II faudra attendre 1890 pour assister à la suppression du livret ouvrier mais le Droit retardait sur les pratiques : il n’était plus depuis longtemps en vigueur ; il n’empêche, c’est donc à la fin du siècle que le Droit entérine le refus de l’individualisme issu de la Révolution.
B – Les conséquences
12Elles sont repérables dans la consolidation du mouvement ouvrier et dans les Inflexions de la législation.
1 – La montée du mouvement ouvrier
13Le mouvement ouvrier s’organise dans la vie politique et dans le monde du travail. Retenons ici les grands moments de l’histoire du syndicalisme français. D’abord atomisé, il va connaître très rapidement des tentatives d’unification. A la fin du siècle deux véritables centrales syndicales coordonnent l’action ouvrière : "La Fédération Nationale des Syndicats" et la "Fédération des bourses du travail". Elles fusionneront en 1902 dans la Confédération générale du Travail. Le mouvement syndical possède maintenant une organisation puissante et susceptible de mobiliser une grande masse de salariés. Cette force il la retire du nombre de ses adhérents, estimés à plus de 50 000 en 1880, ils seront 400 000 à la fin du siècle et un million à la veille de la première guerre mondiale.
2 – Les inflexions dans la législation : de la réglementation du travail à la politique sociale
14Avec la IIIe République, la nouvelle solidarité ouvrière va provoquer l’établissement d’une meilleure législation du travail. Dès 1874, le travail des enfants de moins de 10 ans est interdit et la journée de travail des autres ne peut dépasser six heures. Les gouvernements du Centre ou du Centre-Gauche où dominent Républicains, Radicaux et quelques Socialistes dissidents semblent reconnaître l’importance de la "question sociale". En 1900, une Direction du travail est créée au Ministère du Commerce. On attendra 1906 pour assister à la création d’un Ministère du travail. Une inspection du travail naît sous le Ministère Millerand, de même qu’un "code du travail" en Décembre 1910. En ce qui concerne les avantages matériels on doit retenir le repos hebdomadaire obtenu par les salariés en 1900, et, une législation sur les retraites des ouvriers avec une participation du salarié, une allocation de l’Etat et une contribution du patronat. De ce point de vue, dans les premières années du XXe siècle apparaît une nouvelle conception des problèmes sociaux. Durant tout le XIXe siècle10 l’Insécurité et la pauvreté n’étaient pas corrigées, exceptions faites des réalisations d’une fraction du patronat qui gérant les quelques caisses de retraite ou de secours, controlait et stabilisait une grande partie de leur main-d’oeuvre. La rupture survient lorsque l’Etat intervient en matière de reproduction des forces de travail ; la "politique sociale" – elle n’a pas encore ce nom – a pour objectifs : la santé, l’aide familiale, la vieillesse (avec les retraites). Mais il s’agit de premières formulations timides et contestées par les fractions de la bourgeoisie les plus attachées – économiquement ou idéologiquement – au libéralisme, et, par la paysannerie dans sa grande majorité. On doit remarquer que cette politique se trouve préparée dans le dernier tiers du XIXe siècle par l’invention du "social" : les pouvoirs publics possèdent des moyens légaux pour "intervenir" dans la vie familiale et, en réglementer des aspects (protection des enfants, assistance médicale, surveillance des nourrissons... etc)11.
Section II – Le travail et les structures productives
15Le système Industriel français a largement entamé une profonde mutation qui le conduit d’une myriade d’ateliers ruraux aux macro-unités de production bien que subsistent de petites et moyennes entreprises. Les changements techniques et technologiques attachés à la "seconde révolution industrielle" remodèlent son paysage. Les nouveautés se déploient à des rythmes plus ou moins brutaux selon les secteurs, mais circonscrivent les mêmes conséquences : essor du travail en usine, conditions et organisations nouvelles du travail, et transformations des qualifications.
§ I – L’ESSOR DU TRAVAIL EN USINE
16Au début du XXe siècle, l’usine envahit progressivement le paysage Industriel avec le développement de la métallurgie et des industries chimiques. Mais bien souvent elle vit sans rationalisation du travail, sans plan structuré, sans organisation sérieuse de la production12. Les conditions de travail rappellent celles du XIXe siècle. Mais la "production populaire résiste", on l’a signalé. Le travail à domicile reste important dans l’Industrie du vêtement avec la diffusion de la machine à coudre, le travailleur, à vrai dire le plus souvent la travailleuse, payé à l’oeuvre connaît des conditions de travail peu enviables (organisation appelée sweating-system afin de marquer la pénibilité du labeur). On en mesure l’importance lorsque l’on sait que les successeurs des chambrelans de la période impériale s’élèvent sans doute à 800 000 personnes au début du siècle. La manufacture dispersée constitue une forme de production en notable régression13. L’atelier industriel artisanal subsiste dans les grandes villes, mobilisant peut-être plus d’un million d’artisans et d’apprentis (ou assimilés).
§ II – CONDITIONS ET ORGANISATIONS NOUVELLES DU TRAVAIL
17Nous décrirons en premier lieu un aspect des conditions de travail : sa durée. On s’attachera par la suite, à identifier les formes prises par l’organisation du travail.
A – La durée du travail
18Globalement la durée Journalière du travail oscille autour de douze heures à la fin du siècle. Dans la métallurgie cette durée permet le travail en continu de deux équipes. Dans la filière textile-habillement, elle s’élève à 12 h 30 voire 13 h comme dans la construction ou le terrassement. En 1892, on abaissa la durée du travail pour lès femmes et les adolescents ; en 1900, on décida de remanier le texte de 1892 et... de le faire appliquer. Cinq ans plus tard la Journée de travail de huit heures est introduite par étapes dans les mines. Elle ne se généralisera qu’en 1920. En définitive, à la veille de la première guerre mondiale rares étalent les entreprises où l’ouvrier devait travailler moins de dix heures14.
19Au regard des salariés des usines les travailleurs à domicile apparaissent surexploités. Dans la lingerie et la chaussure, faute de réglementation et de protection, la durée de travail atteint 14 ou 15 heures. Conditions d’un autre âge qui ne seront adoucies que quelques années plus tard.
B – Les formes de l’organisation du travail
20Le travail en usine ne signifie pas l’uniformité des conditions de travail. L’organisation du travail varie beaucoup selon les branches ou les caractéristiques de la fabrication. Dans les Industries de séries le système de l’atelier a cours. M. Bouvier-Ajam en donne la description suivante : "La main-d’oeuvre est aussi peu différenciée que possible : un seul groupe homogène ou plusieurs complémentaires, sous le commandement direct et le contrôle d’un "contre-maître"... s’il s’agit d’un travail dominé par les machines qui décident du rythme de la main-d’oeuvre. Si la production de la machine est déterminée par l’impulsion physique humaine, c’est le "principe de la galère" et le contremaître veille à la cadence. Si le travail demeure essentiellement "manufacturier", avec simple partage entre l’homme et la machine, simple additif mécanique ou même absence de machine, la cadence dûment impulsée et contrôlée, est prescrite par les consignes d’atelier ou assurée par le maître"15. Bien que le Taylorisme (avec le chronométrage des temps, la décomposition des tâches) soit encore absent, il apparaîtra en France avec les années 1910 dans les usines Berliet, Arbel, et Renault, on remarque quelques traits qui le préfigurent16 : actes productifs fondés sur la cadence, répétition créant la monotonie, savoir-faire réduit avec une perte de technicité. On voit se dessiner la coupure entre le personnel chargé de l’exécution, et, celui tenu d’assurer la préparation et le contrôle du travail. Dans les industries de process où dominent les transformations physico-chimiques de la matière, on trouve le "système de l’équipe" ; il "associe en un groupe de travail plus ou moins dense, mais normalement limité, des hommes qui accomplissent une tâche représentant en soi une opération non réduite à quelques gestes"17. Si les travailleurs relèvent de la même spécialité on aura une équipe homogène, lorsqu’ils possèdent une spécialisation professionnelle différente, ils forment une équipe à éléments complémentaires. La division du travail existe à l’intérieur de l’équipe, de même que les rapports de force ou de dépendance. Le travail en verrerie avant la mécanisation illustre bien ce procédé18. Une équipe de trois ouvriers est chargée de la fabrication de la bouteille : le "gamin" recueille le verre en fusion au bout d’une canne à souffler, le "garçon" effectue un premier soufflage du verre avant de remettre l’objet de travail au souffleur, véritable artiste, qui assure la finition de la bouteille. La hiérarchie des savoir-faire se reflète dans la grille des salaires, et provoque une structuration des pouvoirs, il n’est pas rare que le souffleur embauche et paye les "gamins".
21Dans le bâtiment domine encore le système du métier et en particulier dans la maçonnerie. Le compagnon-maçon a acquis au cours d’un long apprentissage (souvent comme "garçon" d’un autre compagnon) les éléments de son métier. Il travaille au sein d’une équipe qui n’a pas une composition stable, dirigée par un maître-compagnon lui-même ancien compagnon reconnu par la profession. Généralement, il n’est pas entrepreneur (ou patron) mais plutôt un chef d’équipe (ou contremaître). Il va traiter avec un maître d’oeuvre en quête d’équipes de travail. Avec cette organisation existe une mobilité à l’Intérieur de la profession, le grouillot (le manoeuvre) peut devenir garçon puis compagnon-maçon, si l’ascension paraît difficile, elle ne semble pas Impossible.
22On voit poindre une organisation spécifique de l’embauche qui a cours dans les différentes industries : la pratique du marchandage, réglementairement Interdite mais pratiquement licite. Le tacheronnat en constitue une forme assez répandue : le chef d’entreprise sous-traite un travail à un chef d’équipe (le tâcheron) qui se charge de le faire exécuter par des ouvriers19.
§ III – MACHINISME, QUALIFICATION ET FORMATION
23Le développement du machinisme et de la mécanisation, ainsi que les changements dans la division du travail qui l’accompagnent, produisent une restructuration des qualifications et nécessitent un mode de formation spécifique.
A – La restructuration des qualifications
24De 1864 à 1913, le nombre des machines à vapeur s’accroît de 310 %. Le machinisme pénètre dans de nouveaux secteurs : la fabrication des cuirs, la fonderie, le travail du verre... etc. Les premières machines-outils – déjà d’origine allemande ou américaines – naissent (ainsi la fraiseuse voit le jour). Ce mouvement de mécanisation suivi d’une division accrue du travail transforme le contenu des emplois. D’après une enquête effectuée en 1893-1897 sur sept secteurs Industriels représentant 206 000 ouvriers la main-d’oeuvre masculine se décomposait comme suit :
– Contremaîtres | 3,50 % |
– Ouvriers qualifiés | 18,25 % |
– Ouvriers spécialisés | 29,32 % |
– Manoeuvres | 18,46 % |
– Apprentis Enfants | 11,25 % |
– Indéterminés | 18,57 % |
25Si l’échantillon choisi représente bien les profils de la qualification ouvrière, on conclut que l’organisation scientifique du travail (le taylorisme) n’a pas été la première tentative de déqualification du travailleur, il n’a fait que parachever une tendance déjà forte mettant en "déroute les métiers"20. L’importance des ouvriers spécialisés et des manoeuvres démontre que l’usine se construit autour d’un procès de travail marginalisant les savoir-faire de métier.
B – Un apprentissage nouveau rendu nécessaire
26Avec la mécanisation et les Innovations de la seconde révolution Industrielle, les anciens savoir-faire structurés autour des métiers deviennent obsolètes, ou n’apparaissent plus opératoires. Les modes de formation tels que l’apprentissage corporatif, le tour de France... etc. n’ont plus cours ou deviennent marginaux. De nouveaux systèmes de formation se dessinent lentement bien que l’appareil scolaire ne prenne pas en compte les exigences du travail manuel. L’école de Jules Ferry est plus une école idéologique ou politique, qu’une école technique21. L’enseignement professionnel, tous niveaux confondus, ne possède en 1910 que 50 000 élèves. A sa périphérie naissent des institutions comme l’école Diderot (école professionnelle municipale) en 1873.
27En fait, l’essentiel de l’apprentissage se fait sur le tas dans les petites usines, à travers les changements successifs d’emplois ou, pour les grands centres Industriels, dans les "écoles maisons" (Berliet, Michelin, Schneider). On trouve ici une caractéristique bien française : les classes dominantes ont toujours privilégié lorsqu’il s’agissait de transformer le système éducatif, une culture élitiste (générale et scientifique) aux dépens d’une culture de masse (professionnelle et technique)22.
Section III – La rémunération du travailleur
28La rémunération du travailleur constitue un élément nécessaire à la reproduction de la force de travail mais aussi de la reproduction économique d’ensemble. On a Indiqué dans le chapitre précédent qu’apparaissent dans la période, de nouveaux enchaînements entre les principales variables macro-économiques, ils touchent également la formation du salaire. Nous procéderons Ici, d’abord à l’étude du salaire nominal, ensuite à celle du salaire réel et donc du niveau de vie. A moins de précisions contraires, il s’agira du salaire ouvrier.
§ I – LE SALAIRE NOMINAL : LES TENDANCES ET LES MECANISMES DE FORMATION
29Deux nouveautés dans l’histoire économique : le salaire nominal connaît une tendance durable à la hausse et s’établit par de nouveaux mécanismes.
A – La tendance ascendante du salaire nominal
30Si l’on compare l’évolution globale du salaire nominal dans la période que nous étudions à sa tendance antérieure, telle qu’elle se manifeste dans la première moitié du XIXe siècle, le changement s’avère frappant. Avec le milieu du siècle naît une nouvelle dynamique : l’évolution à la hausse du salaire nominal marquée, toutefois, par une courte stagnation autour des années 1883-1892. Cette tendance n’exclut pas des variations à la baisse du salaire nominal certaines années, mais, d’une part, il s’agit là de mécanismes liés aux cycles de conjoncture où s’exprime une autre régulation (nous l’étudierons dans le prochain paragraphe), d’autre part, ces baisses localisées dans le temps ne remettent pas en cause le rythme de croissance du salaire nominal sur plusieurs dizaines d’années. Celui-ci s’élève globalement par an à 1,2 % de 1840 à 1913. Un tel taux cumulé sur six décennies implique approximativement un doublement du salaire nominal. Cette allure globale doit être modulée selon les branches : si chaque industrie connaît une évolution semblable (hausse du salaire nominal sur la longue période), on enregistre toutefois d’importantes disparités dans le rythme de croissance ce que décrit le tableau ci-après.

Evolution du salaire ouvrier nominal par branches23 (base 100 en 1850)
B – Un nouveau mécanisme de fixation du salaire24
31Un premier élément : il existe une dépendance des salaires par rapport aux fluctuations de l’emploi, elles-mêmes commandées par les variations de volume de la production industrielle. Le salaire nominal baisse lors des périodes de dépression, et, croît dans les périodes d’expansion. Cette flexibilité constitue le coeur d’une régulation nouvelle que l’on a pu appeler concurrentielle dans la mesure où les ajustements se pratiquent sur des marchés. On en déduit qu’un tel régime implique une grande mobilité de la force de travail. Il s’agit là d’une tendance en quelque sorte macro-économique, qu’il faut corriger pour chaque branche – ou Industrie – par le poids et la spécificité des conjonctures partielles. Ceci explique les différences notables dans l’évolution du salaire nominal sur plusieurs décennies, pouvant aller du simple au double. A cet égard, le développement des rapports de production capitaliste, du travail en usine qui lui est lié et la lente, mais bien réelle élimination des formes de travail artisanales ou "proto-capitalistes", exercent une influence notable dans la hiérarchisation des salaires nominaux. Ainsi s’explique la faible progression du salaire nominal dans l’industrie textile. De même on peut arguer, compte tenu de ces fortes disparités, que la notion de salaire moyen s’avère bien peu réaliste.
§ II – LE SALAIRE REEL ET LE NIVEAU DE VIE
32Des données suffisamment sûres permettent de conclure à une élévation tendancielle du salaire réel de l’ouvrier ; quant au revenu des salairiés et plus généralement, leur niveau de vie, nous ne pouvons qu’apporter quelques éléments afin de saisir leur réalité.
A – La hausse tendancielle du salaire réel ouvrier
33Comment a évolué le salaire réel de l’ouvrier ? L’étude des Indices en courte période s’avère délicate, leur lecture moins aisée encore. Le premier élément qui transparaît s’avère être l’importance des fluctuations que subit cette variable eu égard aux très fortes variations des prix, alors que l’allure du salaire nominal apparaît beaucoup moins erratique. Dans une perspective de longue période on note une tendance à la hausse du taux de salaire réel de 1855 à 190525, vient ensuite une courte phase de baisse jusqu’à la première guerre mondiale. En indices, le salaire réel passe de 50 en 1855 à 100 en 1900, soit un doublement en près d’un demi-siècle26. Il Importe de noter que ce gain de pouvoir d’achat du salaire (ce qui ne veut pas dire du revenu du salarié puisqu’il peut être affecté par d’autres facteurs comme la durée du travail, la pression fiscale... etc.) est acquis par deux modalités : le salaire nominal croît plus fortement que le coût de la vie, ce qui est le cas en début de période ; le salaire nominal augmente alors que le coût de la vie stagne ou décroît, évolution qui prévaut jusqu’en 1905 environ. L’étude de J. Singer-Kérel27 sur le coût de la vie à Paris confirme une baisse du coût de la vie pour les ouvriers de 1880 à 1905.
B – Le revenu salarial, le niveau de vie et le genre de vie
34Compte tenu des difficultés rencontrées pour évaluer le revenu des salariés, nous ne proposerons qu’une brève description du niveau de vie et quelques repères pour apprécier les transformations du genre de vie.28
1 – La difficile évaluation du revenu des salariés
35L’étude du revenu des salariés s’avère extrêmement délicate. La connaissance du salaire réel horaire semble Insuffisante pour connaître le revenu réel puisqu’il faudrait appréhender la durée du travail. On doit noter que le chômage au cours de l’année était fréquent ; selon une enquête de 1891-1893 la moyenne des journées de travail dans les principales Industries était de 290 jours avec des extrêmes pour les industries chimiques (327 Jours) et pour la construction en pierre (255 jours) (110). Le chomâge saisonnier devait entamer le revenu salarial puisque pour plus de la moitié des ouvriers, la rétribution s’effectuait à l’heure ou à la journée et, pour un bon tiers, la rémunération s’établissait en fonction de la tâche. Les compléments de salaires étaient inexistants mais les avantages en nature et les revenus annexes (liés à la culture d’un petit jardin) semblent plus importants qu’aujourd’hui29. Le revenu familial reste lui aussi difficile à évaluer. Le salaire de la femme reste sans nul doute une source de revenu important au début de la vie du couple. Quant à l’apport des enfants, le développement de la scolarisation en liaison avec l’accroissement de l’âge légal de travail, fait qu’il devient minime. Si bien que l’on peut conclure que dans la majeure partie de la classe ouvrière, le salaire du père est largement prépondérant30.
2 – Quelques données sur le niveau de vie
36Les travaux de l’I.S.E.A. sur le revenu national31 Indiquent qu’au cours du XIXe siècle la part des salaires dans le produit net s’accroît.

37Mais cette information prouve un changement irréversible de structures : la fin de l’atelier artisanal ou "proto-capitaliste" et la consolidation des formes de production capitaliste. De plus s’agissant d’une aussi longue période, la même catégorie statistique ne peut rendre compte des réalités économiques trop changeantes. L’analyse de la consommation de produits par personne témoigne de l’amélioration du niveau de vie : la consommation de sucre passe de 2,6 kg par an avant 1850 à 17,5 vers 1910, celle du vin de 86 litres à 160 litres32. Toujours aux mêmes dates, la consommation de pommes de terre double, celle du blé s’accroît de 70 %. La consommation de viande augmente mais avec beaucoup moins de vigueur33. Il s’agit ici de moyennes qui cachent d’importants écarts. En définitive, si l’on conclut à l’amélioration du niveau de vie, il faut ajouter que la classe ouvrière française n’a pas celui de ses voisines anglaise ou allemande, et, que la misère et les inégalités persistent.
3 – Les transformations du genre de vie
38J. Fourastié a proposé un schéma situant l’évolution des différents types de consommation populaire34. Le premier degré est occupé par une consommation où prédomine le froment et le seigle (soit le méteil), vient ensuite une alimentation à base de blé dans les dernières décennies de l’ancien régime (le pain représentait 75 % des dépenses d’un manoeuvre célibataire vers 1710). Dans la troisième étape, les dépenses alimentaires occupent une place dominante dans la consommation mais elles deviennent maintenant très variées. La fin de la prépondérance de l’alimentation marque la dernière étape. La période que nous étudions semble caractérisée par la fin de la domination du pain dans la consommation populaire, tendance déjà entamée depuis un demi-siècle35, et la diversification des dépenses alimentaires. Celles-ci occupent encore selon les budgets, et d’après différentes estimations, de 60 à 70 % de la consommation totale, part qui se réduit progressivement. La qualité de l’alimentation s’améliore lentement avec l’achat de la viande et l’entrée de légumes et de fruits dans l’alimentation.
Dépenses | 1856 | 1905 |
Part des dépenses alimentaires | 70,7 % | 63,6 % |
Part des dépenses non-alimentaires | 29,3 % | 36,5 % |
dont | ||
Habitation | 15,2 % | 17,1 % |
Habillement | 12,2 % | 10,5 % |
Entretien et soins personnels | 0,7 % | 2,8 % |
Santé | 0,6 % | 1,9 % |
Transport | 1,0 % | |
Divers | 0,6 % | 3,0 % |
Les transformations dans la consommation ouvrière36
39La dépense en logement occupe une faible place, alors que la consommation du vêtement reste significative. Compte tenu d’un mode de vie maintenant largement urbain, il s’agit d’un contraste dont Michèle Perrot note qu’il "repose sur des faits économiques et psychologiques, Il illustre un choix mais aussi des possibilités. La cherté du loyer en a constamment refoulé le désir tandis que par la baisse des prix industriels, le vêtement devenait sans cesse plus accessible et vanté par toute une publicité. Stigmate d’une condition, le vêtement conserve une extrême importance sociale"37. Vont naître alors de nouvelles formes de distribution outre la vente par catalogue, qui connaît dans les zones rurales un nouvel essor, les grands magasins surgissent dans les principales villes du pays et principalement à Paris.
Conclusion du Chapitre 7
40L’imprégnation croissante des procès de travail par la mécanisation et le renouvellement des filières suite aux retombées de la seconde révolution industrielle produisent un changement dans les qualifications ouvrières : disparition progressive des savoir-faire de métiers, de ce que T. Veblen a appelé l’instinct artisan, mais qui n’implique pas la fin des secteurs artisanaux ; émergence de nouveaux savoirs pratiques et nécessité du technicien. Mouvements qui s’accomplissent en liaison avec l’essor du salariat et, plus timidement, avec l’agrandissement de la classe ouvrière. Dans l’usine, nouvelle structure productive encore faiblement rationalisée, s’affrontent patronat et salariés. Mais le combat ne possède plus les anciennes règles car les cadres économiques et juridiques se trouvent transformés. Enfin, une meilleur rétribution de l’heure de travail, améliore certainement la condition ouvrière mais assure également des marchés pour les produits de l’industrie.
Notes de bas de page
1 Outre l’ouvrage de M. Bouvier-Ajam, on pourra consulter le livre d’E. Dolléans et de G. Dehove "Histoire du travail en France", tome 1er et les contributions de C. Fohlen et de F. Bédarida à "l’Histoire générale du travail" sous la direction de L.H. Parias, tome III.
2 H.E.S. Tome 3, volume 2.
3 J.C. Toutain, étude déjà citée. Nous soulignons à nouveau l’extrême fragilité des indicateurs, ce qui fait que les données ici présentées ne se trouvent pas en harmonie avec celles que l’on a pu relever jusqu’à présent.
4 J. Marchal et J. Lecaillon "La répartition du Revenu national", Paris 1958, tome 1.
5 J.P. de Gaudemar "La Mobilisation Générale" Champ Urbain, G. Lefranc, "Histoire du travail et des travailleurs", Flammarion, C. Mercier ouvrage cité, F. Selier "Les Salariés en France", P.U.F. Que sais-je ?
6 G. Lefranc lui attribue une grande responsabilité. Soulignons à nouveau qu’à côté des exploitants et des ouvriers agricoles, les artisans et commerçants des campagnes subissant la concentration économique et la contraction de l’activité rurale, quittent leurs villages ou leurs bourgs.
7 De Gaudemar ouvrage cité p. 73.
8 Ouvrage cité page 166.
9 Idem, p. 165.
10 Sur ces points on se reportera à J. Guéguen-Baslé et M. Baslé "La politique sociale : histoire, enjeux et crise". Profil Hatier.
11 J.M. Barbier "Le quotidien et son économie", Editions du C.N.R.S., 1981, p. 169.
12 "Cette structure composite des usines, les problèmes de transport qui s’y posent expliquent le fourmillement d’une armée de manoeuvres, poussant brouettes et diables, portant les pièces d’un atelier à l’autre, prédécesseurs des modernes caristes. De là d’innombrables pertes de temps qui commencent à préoccuper les managers". M. Perrot H.E.S. Tome 4, volume 1 p. 467-468.
13 Une exception : la soierie lyonnaise. D’abord essentiellement urbaine, puis pratiquement rurale ; vers 1890 la ville ne possède que le quart des 120 000 métiers (C. Fohlen "Le travail au XIXe siècle" P.U.F. Que Sais-je ? p. 38).
14 P. Louis "La condition ouvrière en France depuis cent ans", P.U.F. Que Sais-je ? 1950 p. 54.
15 Ouvrage cité p. 189-190.
16 P. Fridenson a pu parler de "climat pré-taylorien".
17 M. Bouvier-Ajam p. 190.
18 Nous suivons ici la description faite par C. Mercier "L’industrie du verre creux : pour une économie du savoir-faire". Document de travail 81-2-003 E.R.A.C.N.R.S. 872 Université Lyon 2.
19 E. Levasseur ouvrage cité.
20 L’exemple de la fabrication chapelière s’avère éclairant ; voici ce qu’écrit un ouvrier : "Par la transformation de la chapellerie manuelle en industrie mécanique, il s’est formé la catégorie des aides ouvriers ; dans l’ancienne chapellerie, il fallait savoir faire un chapeau de bout en bout ; aussi formions-nous une espèce de caste privilégiée parmi les autres ouvriers ; c’était une noblesse de métier ; l’aide ouvrier est le produit né du développement mécanique ; il se recrute surtout parmi le prolétariat rural". Pour la référence on se reportera à l’ouvrage de G. Lefranc déjà cité p. 328.
21 M. Perrot H.E.S., tome 4, volume 1 p. 476.
22 Ces points ont été noté par R. Guillon "Enseignement et organisation du travail du XIXe siècle à nos jours". Dossiers C.E.R.E.Q. n° 21.
23 D’après J. Kuczynski ouvrage cité.
24 Nous suivrons ici l’analyse faite par R. Boyer "Les salaires en longue période", "Economie et statistique", septembre 1978.
25 D’après l’étude de J. Lhomme "Le pouvoir d’achat de l’ouvrier français au cours d’un siècle : 1840-1949". Le mouvement social, avril-juin 1968.
26 De 1841 à 1913 le salaire réel croît à un rythme annuel de 0,9 %.
27 "Le coût de la vie à Paris de 1840 à 1954", A. Colin 1961.
28 E. Levasseur "Salariat et salaires", Doin, Paris 1909, p. 181.
29 Noté par M. Pérot, H.E.S., Tome 4, volume 1 p. 487.
30 idem p. 488.
31 Cahiers de l’I.S.E.A. Série D, Le Revenu National.
32 Faut-il préciser qu’en la matière, il ne s’agit pas toujours d’un progrès.
33 Données citées par F. Perroux "Prise de vue sur la croissance française 1780-1950" in "Income and Wealth", série V, Londres 1955.
34 "Machinisme et bien-être", Paris, Editions de Minuit 1951.
35 Le pain représentait de 34 à 51 % du budget vers 1830, 10 % vers 1900 (M. Perrot, ouvrage cité, p. 497)
36 Cité par B. Boyer (article cité) d’après les données de J. Singer-Kérel (ouvrage cité).
37 Ouvrage cité page 499.
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