Chapitre II. Astolphe de Custine, correspondant de Metternich
p. 235-256
Texte intégral
1Personnalité attachante et singulière, Custine nous est mieux connu depuis le livre que lui a consacré le marquis de Luppé, et les documents que nous publions n’ont pas l’ambition de modifier le portrait composé par cet excellent biographe. Mais ils permettront peut-être de le nuancer sur quelques points, et de mieux connaître le modèle. Face à Metternich, le gentilhomme auquel sa mésaventure de 1824 avait interdit les salons du Faubourg Saint-Germain, l’esthète généreux, désœuvré et tourmenté si accueillant aux écrivains ou aux artistes n’est plus tout-à-fait le même que dans ses compagnies habituelles. Et ce nouveau personnage que lui suggèrent les circonstances n’est pas dépourvu d’intérêt.
* * *
2C’est, précise le marquis de Luppé, le 29 avril 1835 qu’il quitta Paris pour Jérusalem, avec l’intention de rejoindre à Spalato, sur la côte dalmate, .un groupe de voyageurs1 ; et l’annonce de troubles en Serbie l’aurait amené à changer d’itinéraire. En fait il avait peut-être dès son départ le projet de passer par Vienne : avant d’utiliser, pour visiter les Lieux Saints, la lettre d’introduction que Chateaubriand lui avait remise pour le T.R.P. Gardien du couvent du Saint-Sauveur, il pouvait se recommander auprès du chancelier d’Autriche du billet que la duchesse d’Abrantès expédiait à son intention dès le 30 avril.
3Bizarre initiative, en vérité, et bien dans la manière de cette femme singulière, que de solliciter en faveur de celui qu’elle cherchait pour lors à s’attacher les bons offices du plus illustre de ses amants ! L’événement, du reste, allait prouver qu’elle avait vu juste et qu’elle avait eu raison de manquer à la réserve. Certes, quoi qu’aient prétendu certains de ses historiens2, ni la fidèlité au souvenir ni même la délicatesse n’ont distingué la vie sentimentale de Metternich, longtemps homme à bonnes fortunes, époux trois fois comblé, mais d’abord homme d’Etat et trop conscient de sa supériorité pour garder grande attention à celles dont la route croisait la sienne. La seule comtesse de Lieven semble avoir réussi à lui inspirer une inclination durable, parce que cette femme énergique, intelligente et cultivée avait été une partenaire à sa mesure. On se plait cependant à imaginer qu’au printemps de 1835, le chancelier ne lut pas sans quelque princement de cœur le message venu de Paris. Car le nom qui le terminait rappelait un épisode notable, sinon émouvant, du début de sa carrière3. Rien n’y avait manqué : la passion flatteuse d’une maîtresse en vue, l’utile assujettissement d’une femme du monde à sa politique, le romanesque des arrangements floraux par lesquels, avant chaque rencontre, l’élue annonçait ses états d’âme à son galant visiteur, et, pour finir, un scandale de belle taille qui avait failli dégénérer en grave incident diplomatique avant d’amuser l’Europe. Vingt-cinq ans bien sûr avaient passé, chargés d’événements et, pour l’ancien ambassadeur à Paris, de glorieuses responsabilités ; mais le rappel de ces heures ardentes et mouvementées avait de quoi le toucher. Le ton du billet, du reste, évoquait le passé, par la formule tout intime du début (que bien peu, même parmi les proches, auraient osée) et la « tendre affection » offerte à la fin. Laure d’Abrantès apparaît ici telle qu’on l’a dépeinte, fidèle comme certaines Grecques, ses ancêtres, au souvenir du Dieu qui les avait une fois possédées4.
Paris, le 30 avril 1835
Mon cher Clément, voici une Personne que je vous supplie d’accueillir avec votre bonté accoutumée. Soyez pour monsieur le marquis de custine ce que vous seriez pour un ancien ami. Croyez qu’il mérite toute la bienveillance que vous lui accorderez – oui j’en suis Garant – et de plus Je le suis du plaisir que vous trouverez à rencontrer dans un homme bien plus jeune qu’eux l’esprit aimable de M. de Narbonne, de M. le chevalier de Boufflers son grand-père, et celui du comte de Sabran son oncle.
accueillez-le pour lui-même, il le mérite, accueillez-le pour moi. Je vous le demande au nom de notre ancienne amitié vous ne pouvez la mettre en oubli, vous la rappellerez malgré vous.
Adieu mon cher Prince donnez moi donc De vos nouvelles, à moi qui vous aime toujours avec une tendre affection.
La Duchesse d’Abrantès5.
4Que les temps, cependant, avaient changé ! Tandis que le séducteur poursuivait sa carrière avec une sûreté où l’entregent avait sa part, l’amante délaissée n’était jamais parvenue, malgré beaucoup d’efforts, à rétablir complètement sa position mondaine. Son salon, ses relations, l’éclat qui s’attachait encore à son nom avaient aidé Balzac en lui assurant le contact avec un monde dans lequel il n’aurait pu prétendre, sans ce concours, être si vite reçu. Mais leur liaison, celle d’un débutant ambitieux et d’une protectrice vieillissante, avait vite tourné au compagnonnage littéraire. En se rapprochant de Custine, la duchesse avait-elle lieu d’attendre davantage ? Eut-elle même jamais l’espoir ou l’ambition de l’épouser ?6 Ç’aurait été pousser fort loin l’illusion. Malgré sa réputation douteuse, le marquis restait de trop bonne maison pour consentir à une telle alliance. Ses lettres établissent que règnait entre eux une sympathie très vive ; il a été sensible – profondément – à l’attachement d’un être qu’un dernier élan du cœur, la solitude menaçante et peut-être le besoin poussaient vers lui. Mais après quelques aveux sans lendemain il se déroba devant un engagement décisif. Ils se rencontraient souvent, fréquentaient les même milieux et partageaient des goûts identiques : ces affinités ne suscitèrent finalement, de sa part, qu’une sincère et durable amitié7.
5La situation n’était pas encore aussi nette au moment du voyage en Orient, et pour mieux servir celui qu’elle veut gagner, Laure d’Abrantès déploie toute son habileté. Elle avait assez connu Metternich pour savoir que, parfait homme du monde et hôte toujours courtois, il conservait toute sa faveur aux modes de sa jeunesse. Peu porté vers le lyrisme, plein de dédain pour les romans qui l’ennuyaient, il ne comprenait guère le romantisme, qu’il tenait pour l’étalage indiscret des passions et le signe non équivoque du désordre social. Auprès de lui, Narbonne et Boufflers constituaient de meilleures cautions que Chateaubriand, qu’il détestait8. Aussi, pour créer d’emblée un préjugé favorable, choisit-elle de présenter le marquis comme un fidèle tenant de l’Ancien Régime, l’héritier des élégances de vieille société.
6Etait-ce d’ailleurs totalement inexact ? Médiocre romancier et piètre auteur dramatique, Custine est d’abord pour nous, à cette date, l’un des témoins les plus lucides d’une époque dont il se jugeait la victime, celui qui avait su écrire dès le 8 mai 1812 : « Est-ce ma faute, à moi, si je suis né dans un siècle dont René est le chef d’œuvre littéraire ? »9 Quand il analyse, par exemple dans les lettres à Rahel Varnhagen, son impuissance à se décider et à agir, fût-ce pour conduire sa propre vie, la qualité de son propos l’égale au meilleur Senancour, et l’on devine que l’éclat de ses réceptions, ses fréquentations littéraires ne sont qu’apparence. Nul n’a mieux illustré l’analyse de Pascal : riche, libre, mais surtout embarrassé de lui-même, ce raffiné dont le faste éblouit pratique le divertissement avec une clairvoyance cruelle. Mais la compagnie dans laquelle il avait, faute de mieux, choisi de s’étourdir, était-elle celle qu’appelaient ses préférences ? C’était dans un autre monde que la naissance avait marqué sa place, et il y a lieu de penser que cet aristocrate ne se sentait pas toujours pleinement à l’aise parmi ceux qu’il recevait parce que ses mœurs ne les choquaient point10 . Cet organisateur de tant de brillantes soirées éprouve la lassitude du monde, et la nostalgie de réunions plus paisibles où les plaisirs de la conversation auraient constitué l’essentiel. Observateur délicat, profond et piquant, pour reprendre les termes de Sophie Gay11 que l’examen de la correspondance confirme de tout point, Custine semble avoir bien rarement ressenti pour son propre compte, une fois maître de maison, la satisfaction que lui avait value, un soir de mai 1814, l’entretien de Madame de Staël : « Ce salon est plus qu’un lieu où l’on se divertit, c’est un miroir où se peint l’histoire du temps. Ce qu’on y voit et ce qu’on y entend est instructif autant que bien des livres et plus gai que bien des comédies. Vous me demandez pourquoi je lis peu. A quoi bon lire quand on passe sa vie à puiser à la source de toutes les idées de son temps, à les voir en travail dans leur germe, à prévoir leur effet quand elles seront en circulation dans le monde ? Je retrouverais ailleurs mal employé ce que je découvre ici sous la forme la plus séduisante... »12 Cet hommage d’un visiteur qui avoue plus loin « préférer à tout l’âme des gens d’esprit » s’adresse d’abord, il est vrai, à la mémoire de celle qui avait excellé à susciter par sa seule présence des échanges étincelants. Mais il semble bien que, pour Custine, l’escrime intellectuelle telle qu’il l’avait vu pratiquer rue du Bac demeura toujours la perfection du genre. Pour cet insatisfait qui ne connut que bien rarement l’accord avec soi-même, la réflexion sur les hommes comptait plus que les discussions ou les jouissances esthétiques, parce qu’elle seule aidait la recherche de soi. Les réceptions de Saint-Gratien, les soirées données à l’hôtel de la rue de La Rochefoucauld parvenaient-elles à créer l’atmosphère excitante et policée où son intelligence se sentait à l’aise ? Malgré leur génie ou leur réputation les invités n’étaient pas vraiment de son milieu, ni lui du leur. Plus qu’un égal il demeurait près d’eux un mécène.
7Ainsi s’explique la profonde impression que fit le chancelier sur son visiteur, et l’opinion tout-à-fait positive que celui-ci prit d’abord de lui. « Depuis l’ancien temps, dont je me souviens encore, écrit-il à Sophie Gay le 6 juin, je n’ai rien vu de si parfaitement aimable, de si noble, de si simple que M. de Metternich. Cela repose de toutes les sottises de nos hommes influents... C’est comme la danse de Mlle Taglioni, qui paraît à la portée de quiconque la regarde »13. Au Ballhausplatz ou dans la résidence du Rennweg, Custine retrouvait ce que le Paris de la monarchie citoyenne ne lui offrait plus guère, une atmosphère qui rappelait le XVIIIe siècle et la conversation d’un homme exceptionnel. Son hôte était assez pénétré de suffisance pour trancher de tout sans appel, et n’aimait rien tant qu’étaler devant les étrangers sa tranquille infaillibilité14. Or lui-même était depuis longtemps convaincu que l’action des individus hors du commun assurait seule le salut de la société15 ; d’autre part, rongé d’incertitude, il sentait que l’admiration était son premier besoin16. Tout naturellement, il était devenu l’auditeur attentif et déférent de ce prestigieux interlocuteur. Dogmatisme satisfait d’un côté, disponibilité respectueuse de l’autre : ces deux esprits d’apparence si dissemblable étaient faits pour s’entendre.
8Cependant le projet de voyage en Orient demeurait, et il fallait continuer la route. Malgré ses soucis d’homme d’Etat, Metternich s’entremettait volontiers pour rendre service aux gens de son monde, et il proposa à Custine d’accompagner deux princes autrichiens, Frédéric Schwarzenberg et François Lobkowitz à bord d’une, corvette en partance de Trieste pour Smyrne. Lobkowitz voulait se consoler d’un amour malheureux et Schwarzenberg avait, comme on dirait de nos jours, besoin de se changer les idées... La lettre suivante, datée du canal de Corfou le 18 juin, nous renseigne sur le détail de la navigation et l’atmosphère qui régnait à bord. Elle souligne d’autre part la respectueuse liberté que le marquis croyait pouvoir se permettre avec le chancelier, en se fondant sur l’amical intérêt que celui-ci venait de lui témoigner.
Monseigneur,
De toutes les bontés que vous avez eues pour moi, celle dont je suis le plus pressé de rendre grâce à Votre Altesse, c’est de la permission de lui écrire. J’aurais emporté un regret dans ce voyage rendu si facile grâce à votre protection, si je n’avais pu vous dire que de tant de souvenirs que je vais recueillir, un des plus intéressants pour moi sera toujours celui des heures passées près de Vous à Vienne. Il est si rare de rencontrer des hommes d’action, dont la pensée s’élève au dessus de ce qu’ils font journellement, et embrasse le fond des choses, comme des solitaires, tandis qu’ils combattent sur la brèche comme des soldats, que lorsque je trouve un tel homme, ce qui m’est arrivé une fois en ma vie, je reçois ses paroles comme des orâcles. Je me dis en même temps, et peut-être trouverez Vous cette pensée bien présomptueuse, que l’habitude de conduire les hommes doit rendre la société semblable à un désert, qu’on doit se lasser de commander à des manœuvres qui ne vous comprennent pas, qu’on doit souffrir de n’être jugé que par des ennemis, des envieux ou des imbécilles, et que si l’on rencontre un esprit dont on soit compris, par une sorte d’analogie d’esprit qui se fait sentir dans toutes les situations de la vie, on aime à se reposer un moment, à oublier le tracas journalier, à se sentir apprécié comme on le sera par l’histoire !... pardon de me faire ainsi ma part dans une relation qu’il serait plus naturel de n’attribuer qu’à la bonté qu’on vous connaît et à la généreuse hospitalité dont l’esprit s’est réfugié chez Vous. Je me flatte peut être ; mais17 qui savez voir en peu de tems ce qu’il y a dans les hommes, Vous savez déjà que je dis tout ; et je n’ai pas besoin de m’excuser davantage.
Nous avons fait un voyage admirable, par la beauté du tems ; c’est une navitation toute pratique. Depuis sept jours que nous sommes en mer, je n’ai pas senti le mouvement du vaisseau, et nous touchons à Corfou, d’où j’enverrai ce soir j’espère, ma lettre à Votre Altesse.
J’ai employé tous mes talens diplomatiques à m’emparer de la Corvette Impériale où Vous m’avez fait recevoir : elle est maintenant à ma disposition pour tout le voyage. Voici comment : J’ai représenté au général Appel18, qui voulait aller directement à Constantinople, qu’il ne s’accoutumerait jamais aux chaleurs de l’Orient s’il ne commençait par s’acclimater sur mer où l’on souffre toujours moins. Trois semaines ne sont pas suffisantes, un mois de plus est nécessaire à une organisation délicate ; d’ailleurs comment retourner en Allemagne sans avoir vu Jérusalem ; deux jours de voyage à cheval ne sont rien en comparaison de ce qu’une telle route offre de curieux ; le Pce de Lobkowitz avait le même intérêt que moi, le Pce de Schwarzenberg n’en avait aucun, que celui d’un bon vivant toujours prêt à faire plaisir, et à trouver qu’on lui en fait. Il a donc été arrêté à l’unanimité qu’on s’adresserait à l’autorité compétente à Athènes, et nous ne doutons pas que nous n’obtenions la corvette pour nous mener en Syrie et nous ramener à Smyrne, ce qui allonge la traversée d’un mois et abrège mon voyage de six. Voilà ce que je vous dois ! Si Vous Vous repentez, il n’est plus tems de donner contre ordre, car nous serons partis d’Athènes avant que Vous puissiez nous atteindre ! Quelqu’idée que j’aye de Votre pouvoir, je me sens donc à l’abri jusqu’à Constantinople.
Votre Altesse a bien voulu m’y promettre des lettres pour la Russie ; le retard qui m’empêchera de profiter de ces recommandations avant la fin de la saison, ne m’empêchera sûrement pas de les trouver chez M. de Sturmer19 quand j’arriverai à Constantinople.
Mes compagnons de voyage et le commandant de la corvette me comblent de soins ; Vous avez eu la bonté de me dire que je pouvais faire quelque bien au Pce Schwarzenberg : j’ai peur de lui en faire trop, car je le contredis sur tout ! Au reste nos discussions sont très amicales, jusqu’au moment où elles tombent sur les personnes ; mais quand l’éloge de Robespierre arrive, je perds le sang froid et je me sauve ! De peur que Votre Altesse n’en fasse autant avec cette lettre, je me hâte de la terminer, en me recommandant à Vos bontés et en Vous offrant l’hommage des sentiments de respect, d’obéissance et de gratitude que Votre Altesse doit déjà avoir reconnus en moi.
A de Custine
dans le canal de Corfou ce 18 juin !
9En fait, changeant une fois de plus ses projets, Custine n’est pas allé à Constantinople, et a quitté la corvette autrichienne à Athènes. Le marquis de Luppé parle à ce propos d’interruption en coup de tête, provoquée par la crainte de la peste qui sévissait au Levant et par une « fièvre inflammatoire » dont le marquis aurait été alors atteint20. L’extrait suivant d’une dépêche du comte Stürmer, ministre d’Autriche à Constantinople, permet d’expliquer autrement cette décision soudaine.
Bujuk-Déré
22 juillet 1835
.....
M. de Custines, qui avait accompagné le général Appel et les Princes Schwarzenberg et Lobkowitz à Athènes, paraît avoir renoncé au projet qu’il avait de venir à Constantinople. Il a failli avoir de grands désagrémens à bord du Veloce21 par suite d’obscénités dont il a été soupçonné et que la plume se refuse à tracer.
10Il est remarquable que ce texte a été classé dans les archives personnelles du chancelier. Aurait-il concerné une personnalité de moindre rang, ou un adversaire de la monarchie, qu’il aurait été communiqué sans tarder aux services de police. Mais, dans l’Autriche du Vormärz, la discrétion était recommandée aux bureaux, dès lors que la moralité de membres de la haute société se trouvait en cause. Selon toute vraisemblance, Custine n’a jamais su que les autorités de Vienne avaient été averties de sa conduite. Aussi convient-il de tenir pour sincères, et non pas dictées par le souci de faire oublier le scandale, les protestations d’admiration et de reconnaissance qui ouvrent sa lettre à Metternich du 3 janvier 1837.
11Ils s’étaient revus pendant l’été 1836, à l’occasion d’une cure à Marienbad qui avait permis au marquis de pousser jusqu’à Königswart. L’accueil du chancelier avait été plein de bienveillance, et Custine était en droit de penser que rien n’avait transpiré des incidents de l’année précédente. Peut-être sentait-il mieux, à mesure que le temps passait, combien sa vie était manquée. On a l’impression, quand on le lit, que de cet échec la fréquentation du grand homme lui avait donné une conscience plus nette. Sans doute celui-ci, sensible aux qualités intellectuelles de son visiteur, avait-il tout fait pour le mettre en confiance ; la mutuelle sympathie née à Vienne est sortie renforcée de ce nouveau tête-à-tête. « Votre bonté m’aide à me réconcilier avec moi-même ». Cet hommage qui rappelle le ton de certaines lettres à Rahel Varnhagen a chance de ne rien devoir à la courtoisie. Le marquis avait retrouvé à Königswart l’atmosphère la mieux faite pour lui plaire : une distinction qui n’excluait pas la simplicité, et à laquelle le maître de maison joignait les fortes convictions dont il se savait totalement démuni lui-même. Le pays gouverné depuis si longtemps par un tel homme pouvait lui apparaître comme une patrie d’élection. Plus soucieuse de fidélité dynastique que de nationalité la diplomatie autrichienne n’avait-elle pas recruté ses agents un peu partout en Europe, et singulièrement parmi les émigrés ? N’aurait-il pu lui-même, avec un peu d’initiative, passer à son service lors du Congrès de Vienne, auquel il avait accompagné Alexis de Noailles sans posséder de fonction nettement définie, dans le seul but de se faire des relations et de s’initier aux affaires ? Telles formules de la lettre du 3 janvier, à la fois nostalgiques et ambiguës, suggèrent assez clairement le regret de n’avoir pas su, au moment opportun, rejoindre l’homme d’Etat capable de l’associer à une grande œuvre. Certes il serait aventureux d’insister. En 1837, Astolphe de Custine s’est trop délibérément installé dans la société parisienne pour s’imaginer longtemps autre qu’il a choisi d’être. Mais il est significatif de ce perpétuel insatisfait que le regret d’une carrière plus féconde l’ait un instant effleuré, et qu’il ait éprouvé le besoin, pour excuser son inutilité présente, de rappeler qu’un guide lui avait manqué22.
12Est-ce pour prolonger l’illusion ? Au lieu du billet que réclamaient les convenances en ce début d’année, il s’autorise de la permission qui lui avait été donnée d’écrire « même sans prétexte » pour composer une chronique mondaine détaillée.
Monseigneur,
Il y a longtemps que j’aurais pu profiter de la permission que m’avait donnée Votre Altesse de lui écrire même sans prétexte. J’attendais toujours quelque chose de nouveau à lui apprendre, mais je vois que cette attente, en se prolongeant, me ferait paraître indigne de ses bontés par mon peu d’empressement à l’en remercier, et j’aime mieux lui répéter ce qu’elle sait que de me donner l’ombre d’un tort envers elle.
L’idée qui me domine lorsque ma pensée se reporte vers Königswart et vers Vous, c’est que Vous connaissez les hommes mieux que personne et la dessus se fonde une grande sécurité. Persuadé que je suis que je n’ai rien à vous apprendre sur mes sentiments de gratitude et de respect et en même tems sur la parfaite analogie de mes idées avec les Vôtres, je remercie le sort, mais tout bas, de ce qu’il m’a permis d’approcher d’un homme si supérieur à tous égards, et ménagé la surprise de me trouver d’accord avec lui sur tous les points. Ceci n’est pas une explosion de vanité satisfaire, c’est l’expression du bonheur involontaire que j’éprouve à reconnaître des rapports si inattendus entre l’homme qui a le plus fait en ce monde et moi, qui suis un de ceux qui ont fait le moins. Soit faiblesse, soit malheur, soit incapacité secrète qui paralyse en moi la faculté de vouloir et d’agir : je n’ai jamais eu le caractère nécessaire pour- tirer parti de mon esprit, mais le jugement bienveillant d’une personne telle que Vous, Monseigneur, dédommage de bien des mécomptes, adoucit bien des regrets, et même le repentir. L’inaction qui tient de la paresse peut devenir une cause de remords ; mais Votre bonté m’aide à me réconcilier avec moi-même : je me dis : si j’avais eu un tel chef je serais devenu un autre homme. Vous savez que je ne suis pas de ceux qui pensent qu’on peut se passer de guide pour aller loin.
Je vis trop à l’écart pour pouvoir Vous donner aucune nouvelle du grand monde ; c’est à Vous que je voudrais demander des aperçus sur l’état politique et même sur la société de Paris. Depuis longtemps ce sont les étrangers qui nous font les honneurs de chez nous ; et cette particularité peut avoir des conséquences plus graves qu’on ne semble le penser ici. L’esprit de parti arrivé au point où il est en France devient une cause de mort, une maladie incurable. Je vois le mal ; mais j’ignore le remède.
Je ne sais pas si Vous avez entendu parler autrement que par les livres et les revues de Mme du Devant, qui signe ses ouvrages : George Sand. Si vous ne la connaissez que par ses écrits, ou ceux des autres le récit d’une soirée arrangée dernièrement pour me faire rencontrer avec elle, Vous amusera peut-être. C’était chez Chop pin23, un pianiste dont le talent élégant, poétique et gracieux prête une voix et une âme à l’instrument le moins fait pour toucher les cœurs. J’arrive de bonne heure : la Corinne de l’abbé de Lamennais (du nouvel abbé de Lamennais ; l’auteur de l’indifférence est bien loin) sa Corinne n’était pas encore là. Elle entre à la fin, accompagnée de Mme d’Agout Mlle de Flavigny24 qui se croit des titres et en acquiert tous les jours de nouveaux à la place de confidente de la femme libre. Mme Sand avait un costume qui mérite une description détaillée : Une jupe de soie bordée de rubans une ceinture cerise retombant en écharpe flottante, une chemise de soie blanche froncée autour du col, en guise de corsage et par là dessus une veste ouverte à la manière des femmes orientales ou des danseuses de corde, la tête nue, les cheveux entièrement plats ou séparés sur le sommet du crane dont la forme est admirable et sur le front, mais retombant en grosses boucles sur les épaules. Elle est entrée vivement : une grande bourse pleine de cigarres à la main, et avant de s’asseoir elle en a tiré un pour l’allumer à une bougie de la cheminée, puis elle est tombée brusquement sur une causeuse les pieds dans le feu. Voilà pour les yeux. Vous figurez Vous cette apparition dans un salon de Paris ? Du reste le plus beau front, le plus haut, le plus pensant, des yeux profondément noirs, et dont l’expression pleine de puissance est d’accord avec le front. Un nez romain, mais d’homme et non de femme, et cela pour cause à ce qu’on assure, une bouche diabolique et misérable : toutes les passions, toutes les douleurs, toutes les audaces et tous les naufrages : peu ou point de menton, une petite taille, presque pas de corps : enfin la tête et la queue d’une Syrène : telle est la femme qui aspire à prendre dans l’avenir la place de Mme de Staël dans le passé. Du moins la voilà telle que mes yeux l’ont vue.
Maintenant Voici pour l’esprit : – Bonjour Monsieur, d’un ton brusque et en détournant la tête de l’autre côté : telle fut la réponse à mon salut quand le maître de la maison m’eut mené et nommé à elle. A chaque question que je faisais, des oui et des non les plus brefs possibles, jusqu’à ce que découragé je m’en fusse à l’autre bout de la chambre causer avec Mme d’Agout que je connaissais. La musique commence, la soirée s’avance, Mme Sand fume et échange en chuchottant quelques monosyllabes avec nourry le chanteur25 ; moi je me dis : rien ne sera gauche comme d’avoir demandé à rencontrer une personne célèbre pour passer tout le temps qu’on est avec elle sans lui parler : Je me creuse donc la tête à chercher une nouvelle phrase qui provoque une réponse et je profite d’un moment où la place est vide sur la causeuse pour aller me rasseoir à côté de la femme libre, puis sacrifiant mon amour-propre à mon orgueil je lui dis avec résolution : Mme je n’ai pas eu le bonheur de vous rencontrer (remarquez avec quel soin délicat j’évitais le mot honneur) depuis un jour mémorable pour moi. – lequel Monsieur ? – Un jour où je venais de faire représenter pour la première fois, une tragédie qui est tombée, la fessée26. – Oh Monsieur ! Vous exagérez, elle n’est point tombée. En condescendant jusqu’à cette politesse indirecte, elle me regardait fixement. – Un demi succès, repris je, ou un revers me paraît la même chose en fait d’essais littéraires. – Le succès ne prouve rien dans les affaires de ce monde. – Il me semble pourtant Madame, qu’il prouve plus que le témoignage que chacun se rend à soi même dans le secret de son orgueil. – Point de réponse !... Je continue : Vous étiez ce jour là dans la loge de Mme Dorval (l’actrice qui jouait Beatrix) pour laquelle vous paraissiez avoir une admiration passionnée27. – Oui Monsieur, et je m’en glorifie, je suis toujours la même pour elle, mais je ne la vois plus ! Suit un grand éloge de l’actrice au bout duquel la bacchante littéraire se lève toujours aussi brusquement et va parler à un Polonais, le PCe Bernard Potocki28. Voilà tout ce que j’ai obtenu de l’héroïne de l’avenir29.
Voilà avec moins de supériorité de talent l’échantillon de toutes les personnes qui se préparent à régénérer le monde, et Vous voyez comme elles commencent par réformer ce qu’elles appellent les grimaces et les mensonges de l’ancienne politesse. On m’assure que Mme Sand est souvent aussi maussade que je l’ai vue, surtout pour les personnes de bonne compagnie d’autrefois qu’elle déteste. Elle est dit-on petite fille du Mal de Saxe et de Mlle Lecouvreur30.
Il y a ici un homme d’un siècle et d’un esprit bien différent : le vieux comte de Romanzow31 qui arrive de Petersbourg pour revoir Paris après une absence de cinquante ans. Dans ce tems là, il avait joué avec ma grand mère32 et chez elle, la comédie du Misanthrope, et Mr le Comte d’Artois pour forcer la porte, s’était revêtu ainsi que le Bailly de Crussol33 de la livrée de Sabran. Ils furent reconnus à un coup de sifflet qu’ils donnèrent vers la fin de la représentation ; le prince soupa dans son déguisement et tout le tans de la soirée, la comtesse Diane de Polignac l’appela M. la France. C’est lui dont M. de Montbel vient de raconter la mort d’une manière si noble et si simple dans une brochure qu’on ne peut lire sans attendrissement34.
M. de Romanzov, grâce au souvenir de ma grand mère, a voulu que mon oncle, M. de Sabran, me conduisit chez lui. On parlait des femmes qu’il avait connues autrefois ; n’allez pas les voir dit un ami de Mr de Romanzov ; cela vous ferait de la peine ; Peut-être cela me ferait encore plus de plaisir, répond l’aimable vieillard ; surtout la charmante duchesse d’Uzès que j’ai laissée si fraîche, si jolie, si gaie. Quand à celle là, vous pouvez la revoir sans crainte, répond mon oncle qui est toujours en distraction moitié naturelle, moitié jouée par taquinerie, elle est conservée étonnament et sera très contente de vous revoir. Sur cette assurance Mr de Romanzov se décide à l’entrevue et que voit-il au fond d’un fauteuil à Bras : une petite figure ridée ployée en deux, ou plutôt roulée comme une feuille morte, sourde, malade et qui peut à peine se rappeler le nom de son ancien adorateur. Voilà le plaisir perfidement ménagé par mon oncle au vieil ami de ma grand mère ! Cette visite et celle à Mme Sand peignent en mal il est vrai les deux extrêmes de la société de Paris : celle qui finit et celle qui va commencer35.
Permettez-moi, Monseigneur, de n’ajouter pas un mot d’excuse à ce long caquetage. Vous m’avez habitué à Votre indulgence à Königswart où vous m’appreniez tant de choses et même à ramer sur un lac ; mais surtout à rire des systèmes de Philosophie qui placent exclusivement le bonheur dans la médiocrité : je l’ai vu précisément où les Sages des livres disent qu’il n’est pas : au faite du pouvoir. Cela prouve qu’il peut être partout pour une âme digne de l’obtenir et de le conserver.
Daignez agréer l’hommage de la respectueuse reconnaissance avec laquelle j’ai l’honneur d’être, Monsieur, de Votre Altesse.
Le très humble et très obéissant serviteur
Paris, ce 3 janvier 1837 A. de Custine
J’éprouve encore le besoin de remercier Madame la Princesse de Metternich de ses Bontés pour moi, et d’offrir mes hommages à Madame la Ctesse Zichy. J’entends d’ici leurs exclamations hélas trop motivées contre tout ce qui arrive de mal chez nous.
13Metternich prisait fort les lettres de ce genre, surtout quand elles lui arrivaient de Paris, capitale de l’art de vivre mais aussi refuge d’où exilés et libéraux narguaient sa politique. Hasard ou dessein, Custine aborde successivement ces deux thèmes. La relation de sa rencontre avec George Sand était de nature à confirmer le chancelier dans ses préventions de conservateur contre la littérature à la mode, tandis que l’évocation du comte Roumantsiev et de son ami Elzéar de Sabran rappelait le bon vieux temps.
14Il se trouve que nous possédons plusieurs relations de la soirée organisée chez Chopin le 13 décembre 1836, qui avait constitué une manière d’événement mondain36. Quinze ans après, le compositeur polonais Brzowski en parle longuement dans ses souvenirs de voyage à Paris. Son récit, plus circonstancié et, selon toute vraisemblance, plus objectif que celui de Custine, aide à mieux comprendre ce dernier37. « L’éminent artiste » – c’est ainsi que son compatriote désigne Chopin – avait arrangé chez lui, rue du Mont-Blanc, un concert de musique de chambre auquel devaient participer Liszt et le chanteur Nourrit, et il avait eu soin de faire figurer leurs noms, outre celui de George Sand, sur les lettres d’invitation qu’il avait envoyées. Ces précautions avaient eu plein succès. Le moment venu, se pressait chez lui « une assemblée choisie et captivante, puisque composée pour l’essentiel de personnalités très connues de la littérature et des arts », parmi lesquelles Eugène Sue, Schoelcher, Pixis, Berryer, Ferdinand Denis, les comtes Vladimir et Bernard Potocki. La présence de Custine n’offrait guère, dès lors, de relief particulier. George Sand, en revanche, attirait d’autant plus les regards qu’elle était avec la comtesse d’Agoult la seule femme de l’assistance. L’opposition de leurs deux silhouettes était saisissante. « La comtesse, une blonde d’humeur enjouée et coquette, d’un commerce aimable, était par sa grâce légère et sa toilette d’une exquise élégance, le modèle même de la charmante Parisienne du plus haut rang. Madame George Sand était tout le contraire : brune, sérieuse et froide, comme si elle n’était pas française, elle avait des traits réguliers, une physionomie calme ou plutôt engourdie, où l’on n’apercevait que la sagesse, la pensée et l’orgueil ». Et Brzowski ajoute un peu plus loin, après avoir noté que, dans cette société où tout le monde se connaissait, « personne n’éveillait la curiosité des autres : quant à nos deux dames, le contraste frappant de leurs types était toujours aussi impressionnant. Tandis que la comtesse d’Agoult animait avec espièglerie une conversation spirituelle et séduisante, un doux sourire sur son visage entouré de longues boucles à l’anglaise, George Sand, figée sur une causeuse devant la cheminée, et lançant de légères bouffées de son cigare, répondait cérémonieusement et en comptant ses mots aux propos des hommes qui s’asseyaient près d’elle, pleins de déférence et de respect ». Rien n’interdit de ranger parmi ces admirateurs « le marquis C., de haute taille, avancé en âge, le type même du grand noble légitimiste », dans lequel nous n’avons nulle peine à reconnaître le correspondant de Metternich.
15Brzowski n’était pas écrivain de profession. Mais l’attention avec laquelle ce jeune étranger a observé les célébrités parisiennes offre une sérieuse garantie d’authenticité, d’autant qu’il a pu rédiger ses souvenirs en s’aidant des lettes qu’il avait envoyées à sa femme sur le moment. Le croquis qu’il trace, par exemple, de Madame d’Agoult semble suggestif et exact. Son texte mérite, croyons-nous, le même crédit à propos de George Sand qui était, à cette date, une personnalité fort en vue. Or, le cigare excepté, rien de singulier ni d’excentrique n’apparaît dans le comportement qu’il lui prête, celui d’une romancière consciente de ses mérites, recevant avec une froideur étudiée les hommages qu’on lui adresse. Aussi bien s’agissait-il, ce soir-là, d’une assemblée mondaine où cette femme de haute intelligence se fût certainement interdit tout manque de tenue qui aurait ressemblé à une faute de goût. Quant à la robe turque sur laquelle Custine est si disert, elle ne correspondait peut-être que de loin aux canons du Faubourg Saint-Germain (ou de la cour de Vienne). Mais elle rappelle surtout, de nos jours, la faveur de la génération romantique pour les mises singulières. A lire la description qui en est faite, elle semble du reste avoir été fort bien portée, et avoir traduit avec élégance le faible de sa propriétaire pour l’indépendance vestimentaire. Surprit-elle les assistants ? La relation de Brzowski n’en fait pas même mention.
16Il suffit de rapprocher ce récit de celui du marquis pour sentir combien ce dernier durcit le trait, et deviner avec quelles arrière-pensées il a rédigé son texte. Nous avons relevé plus haut que, malgré ses dires, la réunion du 13 décembre avait peut-être un autre objet que de lui faire rencontrer « la femme libre »38. Mais les perfidies calculées qui accompagnent le portrait en action de « Mme du Devant » semblent autrement plus graves que ce trait d’amour-propre. A Vienne ou à Königswart, Metternich avait certainement parlé de Lamennais à son visiteur : depuis 1830 l’abbé était l’un des hommes dont il avait combattu l’influence et les idées avec le plus de constance. Il avait travaillé par tous les moyens à faire condamner ses thèses à Rome, et tenait les Paroles d’un croyant pour une œuvre satanique, destructrice de la société39. Custine au contraire avait d’abord témoigné une vive sympathie au programme de l’Avenir40... Certes les temps avaient changé, et l’intérêt que portait George Sand au prêtre qui venait d’abandonner le service de l’Eglise pour celui de la démocratie faisait jaser41. Mais s’autoriser des ragots parisiens pour présenter au chancelier l’auteur de Lélia comme « la Corinne du nouvel abbé de Lamennais » ressemblait assez à une médisance, voire à une indignité. Et évoquer, à propos de tel détail physique, les mœurs qu’on lui prêtait n’arrangeait rien, bien au contraire.
17S’il s’était agi de quelque plébéienne, même marquée par le génie, Custine aurait sans doute été moins disert. Mais cette femme-écrivain qui avait conquis la gloire en offensant les idées reçues était la petite-fille du Maréchal de Saxe, elle avait pour intime amie l’ex-Mademoiselle de Flavigny, autre affranchie de haut rang, et elle faisait le principal ornement des réceptions parisiennes quand elle consentait à s’y rendre. Or, s’adressant à Metternich, le marquis Astolphe se sentait profondément aristocrate. Malgré les incidents qui avaient marqué sa vie privée, il n’avait jamais donné dans la bohême ou le laisser-aller, et c’était à l’évidence sa naissance comme son éducation qui, plus que la recommandation de Laure d’Abrantès, lui avaient valu d’être admis dans l’intimité du chancelier. Rien de plus singulier pour lui, dès lors, et mieux de nature à choquer son correspondant (pour ne pas parler de la princesse Mélanie) que le cas d’une cousine de rois qui reniait ses origines et aimait se vanter de son ancêtre l’oiseleur42. Telle qu’elle nous est ici décrite, George Sand ignore à dessein la moindre politesse et se complait en une incivilité de principe. La romancière finit par ressembler à son œuvre, c’est-à-dire qu’elle est devenue impossible à fréquenter à force d’avoir écrit tant de pages où la morale du beau monde ne trouvait guère son compte. La malveillance, du reste, n’altère nullement le talent du peintre. Custine, qui sait voir et excelle à se souvenir43, livre de son modèle une image pleine de vie. L’apparence physique, l’allure orientale du costume, l’opposition bien tranchée des couleurs, la coiffure que le portrait de Delacroix et, plus encore, la gravure de Calamatta44 ont popularisée, tout est rendu avec une belle maîtrise, qu’on retrouve dans l’évocation si vivante de l’entrée en scène, et du cigare allumé à la bougie de la cheminée en un geste qu’on sent familier. Pourquoi faut-il que, derrière le visage dont l’harmonie comble l’amateur de beauté, l’aristocrate imagine par complaisance le tumulte de tous les débordements ? C’était affaiblir de parti-pris un morceau bien venu, et composé avec un manifeste plaisir.
18Mais c’est dans la suite que la critique se fait la plus vive. Nous avons rappelé le goût de Custine pour la conversation, qu’il jugeait l’un des plus sûrs moyens d’apprécier les êtres. Or, dans ce qu’il écrit, tout concourt à laisser entendre que « la femme libre » manque de ce don essentiel. Le rapprochement avec Madame de Staël prend de ce point de vue tout son sens. Telle que nous la découvrons ici, par incapacité ou dédain, George Sand semble hors d’état de soutenir dans le monde sa réputation d’intelligence, voire d’adopter le ton qui convient en ce genre de rencontres. Sa brusquerie à l’occasion sententieuse décourage l’amabilité, et elle ne s’intéresse qu’à ceux parmi lesquels elle a décidé de vivre. Tant par ses manières que par ses propos sa conduite ressemble à un perpétuel défi45.
19Spectateur pourtant attentif, Brzowski n’avait rien noté de pareil. En comparant les deux témoignages, on a le sentiment que Custine, pour les besoins de sa démonstration, a combiné une petite comédie dans laquelle il se réserve le meilleur rôle, celui de l’homme du monde rudoyé par une « bacchante littéraire », pour reprendre ses propres termes. Devons-nous, pour autant, admettre sans examen sa version des faits ? Une hypothèse vient à l’esprit, que suggère la chronique scandaleuse. Si libre qu’elle se voulût dans sa vie personnelle, George Sand a fort bien pu, lors de cette première entrevue, éprouver peu d’attirance pour un personnage dont la réputation restait à Paris douteuse, en dépit de sa culture et de son faste. Derrière l’amateur de musique et l’admirateur empressé, elle discernait peut-être le pitoyable héros du « drame étrange » d’octobre 1824, dont elle avait presque été le témoin et que, de son propre aveu, elle se refusait à raconter46. Mais elle avait l’esprit large, beaucoup de générosité naturelle, et ces préventions ne durèrent pas ; après cet entretien manqué tous deux se revirent, et échangèrent même quelque correspondance. Comme Custine, faute de mieux, fréquentait avec prédilection les artistes, leurs chemins ne pouvaient manquer de se croiser. Au début de Juillet 1840 elle se rendit chez lui à Saint-Gratien, en compagnie de Chopin, de Delacroix et d’autres intimes. Elle s’était annoncée avec sa « caravane » par un billet où l’esprit se tempérait de familiarité étudiée, retrouvant ainsi l’urbanité dont il l’avait crue d’abord si complètement démunie47. Lui-même lui fit peu après l’hommage de son livre sur La Russie en 1839. Elle le remercia en développant l’une des brèves remarques qu’il n’avait guère appréciées en décembre 1836 : « Vous avez voulu écrire pour être vrai, pour satisfaire votre conscience et votre cœur, et quand même vous n’auriez pas le succès de foule, vous n’en auriez pas moins atteint votre but »48. L’auteur apprécia-t-il ce compliment ? De fait la publication de l’ouvrage les rapprochait, puisqu’il jugeait sans indulgence le régime tsariste et la société servilement hiérarchisée qui en était issue. Ce fut, nous y reviendrons, la raison pour laquelle le livre fit scandale à Vienne.
20La situation était fort différente en janvier 1837, et Custine pouvait se prévaloir auprès de son correspondant d’un crédit intact. Plein du souvenir de leurs entretiens de l’été, il adopte le ton le mieux fait pour lui plaire, et cherche manifestement à donner à son « caquetage » l’allure de leurs conversations. S’il se dispense d’insister sur la politique du jour, c’est qu’elle n’était guère son affaire et qu’elle offrait une matière difficile à traiter avec un tel partenaire. On demeure cependant surpris de la discrétion désabusée avec laquelle il condamne ceux qui, à l’image de George Sand « héroïne de l’avenir », espéraient la transformation de la société. Même si on fait la part de la réserve aristocratique, sa réprobation paraît manquer de force, et dépourvue de toute illusion. Sentait-il, au fond de lui-même, que la victoire de ces révolutionnaires mal élevés était à la longue assurée ? La perspective d’achever ses jours en un monde si différent de celui qu’il aimait redoublait alors ses regrets de l’ancien art de vivre, qu’il avait retrouvé intact à Königswart.
21Cette nostalgie pourrait, dans tous les cas, expliquer la surprenante anecdote qui termine sa lettre. Avec l’apparition, au moins inattendue, du comte Roumantsiev (dont Metternich connaissait sûrement la réputation et peut-être la personne, car cet héritier d’une illustre famille pétersbourgeoise avait beaucoup voyagé en Europe), nous passons soudain du Paris de Louis-Philippe à celui de Marie-Antoinette, et des incongruités modernes aux facéties du comte d’Artois ; le triste Charles X, qui venait de mourir sur le sol autrichien, avait dans sa jeunesse égayé la cour de son frère et compté peu de cruelles. On croirait, au lieu de Custine, lire la baronne d’Oberkirch ou mieux le Prince de Ligne. Les derniers beaux jours de l’Ancien Régime tiennent en ces quelques phrases, où l’on saisit sur le vif combien 1789 a marqué la fin d’une époque. Car, en 1837, de tels divertissements n’étaient plus de mise, faute d’acteurs comme de spectateurs. La nouvelle classe dirigeante les ignorait, et ceux qui en savaient le prix étaient morts ou sur le bord de la tombe. La dernière scène prend de ce fait allure de symbole, lorsque Roumantsiev ne se doutant de rien est amené chez la duchesse d’Uzès qui, fort malmenée par l’âge, le reconnaît à peine. Custine a trop de savoir-vivre pour approuver cette cruelle manigance de son oncle, qui avait tendance avec l’âge à confondre plaisanterie et sarcasme. Mais, telle qu’il la présente, la rencontre de ces vieilles gens forme le contre-point tragique des jeux de princes évoqués peu auparavant. Certes, quelque soixante ans plus tôt, Voltaire avait ainsi rendu visite, peu avant sa mort, à la marquise de La Tour du Pin-Gouvernet, ses amours de jeunesse quand elle s’appelait Suzanne de Livry, et tous deux s’étaient séparés consternés de ce que le temps avait fait d’eux49. Mais du moins pouvaient-ils espérer qu’autour d’eux le monde continuerait tel qu’il avait favorisé leurs plaisirs. Désormais, aux ultimes survivants comme aux nostalgiques de l’Ancien Régime, cette mince consolation elle-même manquait. Et c’est sans doute avec une sincérité non dénuée d’envie que Custine, pour terminer, félicitait Metternich d’opposer à la fuite des jours et aux dangereuses rêveries des contemporains la sérénité du sage.
22Les deux hommes se revirent pendant l’été 1837, à l’occasion d’un nouveau séjour de Custine à Marienbad. Le billet suivant accompagnait l’envoi des Voix intérieures, parues chez Renduel à la fin de juin 1837. Les quelques indications données au lecteur souvent pressé et peu amateur de poésie qu’était le chancelier, témoignent de la fidélité légitimiste du marquis, mais aussi de la sûreté de son jugement : même si une certaine redondance le heurte, il sait reconnaître l’importance de la pièce A Olympio, préface des Contemplations et du haut lyrisme de l’exil.
Monseigneur,
Voici le seul exemplaire des Voix intérieures que je possède ici : J’ai fait un pli aux vers sur la mort de Charles dix. Ceux à l’arc de triomphe à ses enfants, à son frère mort, et surtout à Olympio sont ce qui m’a le plus frappé dans ce recueil où le progrès de la pensée me paraît sensible malgré le système d’exagération dans l’expression adopté par l’auteur.
Permettez-moi, Monseigneur de ne pas prendre congé de Votre altesse sans lui renouveler l’expression de ma gratitude pour ses bontés et du respect avec lequel j’ai l’honneur d’être Son très humble et très obéissant serviteur A. de Custine.
Ce 10 août Marienbad.
23Ce fut la relation du voyage en Russie qui, selon toute vraisemblance, compromit leurs relations. Si nous ne savons pas directement ce que Metternich en pensa, le Journal de son épouse contient des indications fort précises. L’ouvrage avait paru en mai 1843, et dès le 11 juillet la princesse Mélanie le lit avec son mari. Il y a lieu de croire que ses notes reproduisent assez exactement, ici comme ailleurs, l’opinion de celui-ci :
« J’ai lu avec Clément le Voyage en Russie de M. de Custine ; c’est un livre très remarquable, à cause de la sincérité dont il porte le cachet. Jamais on n’a, je crois, rien imprimé d’aussi méchant ; avec cela, l’ouvrage est bien écrit et très intéressant. On a de la peine à se séparer de ce livre, qui, sous l’apparence d’un grand amour de la vérité, d’une politesse parfaite, et souvent même à côté de vifs éloges, contient les plus amères critiques »50.
24La première impression, donc, avait été mêlée. Mais dix jours plus tard (21 juillet 1843) le ton change. La lecture a été reprise avec le concours d’un expert, le comte Edouard de Woyna, diplomate autrichien arrivant de Saint-Pétersbourg.
« A sept heures et demie est venu Woyna, pour lire avec moi l’ouvrage de Custine. J’éprouve de l’intérêt à l’entendre se prononcer sur ce livre ; il est beaucoup plus à même de le juger que moi, attendu que je n’ai pas d’idées bien nettes sur la Russie. Bien que son cœur penche vers l’indulgence, Woyna est étonné et effrayé des vérités que renferme ce livre infâme, qui produit en Russie un effet écrasant. On dit que l’Empereur est très irrité de cette publication »51.
25Le chancelier d’Autriche avait toutes les raisons de partager le sentiment sévère du tsar Nicolas. On peut croire qu’il jugea au moins inutile de maintenir son amitié à l’auteur.
Notes de bas de page
1 Astolphe de Custine, Monaco, 1957, p. 176.
2 Par exemple G. De Bertier De Sauvigny, M. et son temps, Paris, 1959, p. 26, qui nous semble fort indulgent.
3 Cf. R. Chantermesse, Le roman inconnu de la duchesse d’A., Paris, 1927, p. XIX sq.
4 Ibid., p. LIII/LIV.
5 Acta Clementina, M.R.A., 81, A-2 ; c’est la cote de tous les documents que nous publions, à une exception près que nous signalerons. Le dossier comprend en outre un billet daté du 28 mai (1835) dans lequel, se recommandant de la duchesse, C. demande à l’archiduc Charles de lui préciser « le moment où il me serait permis de Vous faire ma cour sans importunité ».
6 Cf. Luppé, op. cit., p. 175.
7 Cf. S. Jeune, Lettres inédites du marquis de C. à la duchesse d’A., in R.H.L.F., 1958, p. 165-182.
8 Les attaques contre lui sont nombreuses sous la plume du chancelier, et visent l’écrivain autant que le ministre, le journaliste ou l’ambassadeur. On en trouvera quelques-unes, parmi les plus violentes, dans notre Metternich et Lamennais, Paris, 1963, p. 23 sq.
9 Mémoires et voyages, t. I, repris par Lacretelle, Marquis de C., Souvenirs et portraits, Monaco, 1956, p. 76 ; de même p. 103 (26 mai 1817).
10 A notre sens, le portrait le plus révélateur de C. demeure celui qu’a tracé Philarète Chasles dans ses Mémoires (Paris, 1876, t. I, p. 309-310).
11 Salons célèbres, Paris, 1864, p. 17.
12 Ibid., p. 18. L’éloge prend tout son relief quand on sait qu’il a été composé en décembre 1836, à la requête de Sophie Gay (cf. A.-M. Rubino, Alla ricerca di A. de C., Roma, 1968, p. 143, note 2), et qu’en mai 1814 les Alliés occupaient Paris !
13 Cité par Luppé, op. cit., p. 176.
14 Cf. ce mot tardif (janvier 1850) mais révélateur : « Je suis en quelque sorte le titulaire d’un professorat de vérités fondamentales » (cité par Bertier De Sauvigny, op. cit., p. 47).
15 Lacretelle, op. cit., p. 131 (janvier 1822).
16 Ibid., p. 137 (novembre 1823).
17 Vous omis.
18 Ce brillant combattant des guerres contre Napoléon occupait ses loisirs à voyager dans les pays méditerranéens. 11 reprendra du service contre le Piémont en 1849 (1785- 1854).
19 Auteur du document suivant (Acta Clementina, M.R.A., 64, A-6). Esprit distingué, orientaliste d’honnête réputation, le comte de S. était un agent de confiance, ancien ministre autrichien à Sainte-Hélène.
20 Op. cit., p. 178.
21 C’était le nom de la corvette.
22 Son attitude face à M. n’est pas sans rappeler celle qu’il avait eue en 1814 devant Talleyrand (cf. Lacretelle, op. cit., p. 87).
23 Leurs relations dataient de l’été 1834. L’amitié et l’admiration de C. pour Chopin sont bien connues, comme le nouvel éclat donné au piano par les musiciens romantiques.
24 Mme de Custine avait peut-être cherché à lui faire épouser son fils, après le veuvage de celui-ci (cf. Lettres inédites au marquis de La Grange, éd. Luppé, p. XV, note 2). Mme d’Agoult vivait avec Liszt depuis l’été 1835.
25 Il s’agit bien sûr du célèbre Adolphe Nourrit.
26 Expression au moins inattendue pour désigner Béatrix Cenci, que Mme Dorval n’avait pu sauver en mai 1833. C. fait l’éloge de son interprète dans l’avant-propos de l’édition de la pièce.
27 Cf. A. Maurois, Lelia ou la vie de George Sand, Paris, 1952, p. 152 sq.
28 Il est plusieurs fois question de lui, vers cette date, dans la correspondance de George Sand.
29 La formule n’est pas gratuite : après Indiana et Valentine, les Saint-Simoniens avaient tenté de rallier G. Sand à leur cause et, peu après, Michel de Bourges l’avait amenée à s’intéresser à la question sociale, d’où sa sympathie pour Lamennais.
30 Erreur bien sûr, mais combien révélatrice !
31 Il s’agit sans doute de Sergeï Petrovitch Roumantsiev (1755-1838) dernier représentant du nom, un temps diplomate mais aussi auteur de vers français et ami des réformes qui, pour donner l’exemple, avait affranchi une partie de ses serfs.
32 La comtesse de Sabran, fidèle compagne du chevalier de Boufflers (qui du reste, quoi qu’en dise plus haut Laure d’Abrantès, n’était pas le grand-père de C.).
33 Il doit s’agir d’Alexandre de Crussol (1743-1815), grand bailli d’épée de Bar-sur-Seine, et fort ami du comte d’Artois qu’il avait accompagné comme aide de camp au siège de Gibraltar en 1782. – Quant à la comtesse Diane de Polignac, elle était dame d’honneur de Madame Elisabeth, sœur de Louis XVI, et belle-sœur de l’amie de Marie-Antoinette. La comtesse De Boigne (Mémoires, éd. Berchet, Paris, 1971, t. 1, p. 45) fait d’elle « le scandale personnifié ».
34 Ce travail intitulé Dernière époque de l’histoire de Charles X... connut un vif succès auprès du public légitimiste. L’auteur avait eu soin de rappeler les égards témoignés au roi exilé par la cour de Vienne.
35 La mère de la princesse Mélanie, troisième épouse du chancelier.
36 Cf. Correspondance de G. Sand, éd. G. Lubin, Paris, 1967, t. III, p. 596 et Th. Marix-Spire, George Sand et la musique, Paris, 1955, p. 527-528.
37 Nous le citons d’après la traduction qu’a bien voulu nous en faire notre collègue Th. Kowzan, que nous avons le plaisir de remercier ici.
38 F. Denis, il est vrai, précise que G.S. désirait rencontrer C. et E. Sue. Il note, d’autre part, le charme de son costume et l’ardeur avec laquelle elle fumait.
39 Cf. notre Metternich et Lamennais.
40 Comme l’atteste sa lettre à Stendhal du 6 novembre 1830 (Stendhal, Correspondance, éd. Del Litto-Martineau, Paris (Pléiade), 1967, t. II, p. 856).
41 Cf. G. Sand, Correspondance, op. cit., t. III, p. 623, lettre du 30 décembre 1836 (notamment la note 1).
42 La formule est d’A. Maurois, op. cit., p. 237.
43 Il confiait à Mme Récamier « n’avoir jamais bien su dire ce qu’il pensait qu’en écrivant » (lettre du 1er septembre 1834 citée par A.-M. Rubino, op. cit., p. 139).
44 Ils constituent les nos 115 et 145 de G. Lubin, Album Sand, Paris (Pléiade), 1973.
45 Vigny, cet autre aristocrate, avait eu une réaction assez analogue après leur première rencontre de mars 1832 (Journal d’un poète in Œuvres complètes, éd. Baldensperger, Paris (Pléiade), 1948, t. II, p. 946-947).
46 Cf. Œuvres biographiques, éd. G. Lubin, Paris (Pléiade), 1971, t. Il, p. 47 et 1316.
47 Correspondance, op. cit., t. V, p. 79-80 (30 juin 1840).
48 Ibid., t. VI, p. 137-138.
49 Souvent rappelée, l’anecdote a été reprise par J. Orieux, Voltaire ou la royauté de l’esprit, Paris, 1966, p. 764-765.
50 Mémoires, documents, écrits divers laissés par le prince de Metternich publiés par son fils le prince Richard de Metternich, Paris, 1880-1884, t. VI. p. 652.
51 Ibid., p. 654.
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