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    Plan détaillé Texte intégral « L’Oustillement au vilain » L’inventaire d’Annapes Les labours de Lejre Les socs de Pfaffenschlag Le champ de Lindholm Hoje Sur un cartulaire du XIIIe siècle Sur la Tapisserie de Bayeux Le mois de juillet La grange de Mont-Saint-Jean Les maisons de Dracy Le Bon berger de Jehan de Brie Le porc médiéval Notes de bas de page

    Archéologie du village et de la maison rurale au Moyen Âge

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre 6. Outils et techniques agricoles du monde médiéval

    p. 101-139

    Texte intégral « L’Oustillement au vilain » L’inventaire d’Annapes Les labours de Lejre Les socs de Pfaffenschlag Le champ de Lindholm Hoje Sur un cartulaire du XIIIe siècle Sur la Tapisserie de Bayeux Le mois de juillet La grange de Mont-Saint-Jean Les maisons de Dracy Le Bon berger de Jehan de Brie Le porc médiéval Notes de bas de page

    Texte intégral

    1Le Moyen Âge nous a légué une documentation écrite si abondante que les historiens sont loin de l’avoir entièrement exploitée. Et nombreux sont les documents qui nous parlent de la terre, de ceux qui la possèdent, des hommes qui la cultivent, des fruits qu’elle donne. La terre est alors source de toute richesse, fondement de tout pouvoir ; son exploitation est la grande affaire des hommes. Il est naturel qu’elle fasse l’objet premier des documents que les clercs établissent patiemment, à la main : les diplômes et les chartes sont consacrés à des cessions de biens fonciers, les comptes enregistrent des entrées et des sorties exprimées en grains, en bétail, les actes notariés portent sur les profits attendus de la culture et de l’élevage ; et le nom des « terriers », ces cadastres féodaux, est en lui-même éloquent. Les campagnes constituent aussi la toile de fond des récits littéraires et le monde rural est une réserve de références pour le prédicateur et le moraliste. Des traités sont consacrés à la gestion des domaines et aux méthodes et moyens du paysan. L’histoire des techniques rurales au Moyen Âge ne peut donc s’écrire sans le recours à l’écrit.

    2Elle ne peut davantage se priver des nombreuses images auxquelles le parchemin des manuscrits, la pierre des églises, le verre des vitraux ont offert leur support. Les thèmes certes sont le plus souvent religieux, mais le monde de la Bible est aussi un monde rural et c’est avec les paysans, avec les champs et les instruments de leur temps que les artistes ont illustré leur argument. Et la vie rurale leur offrait aussi abondance de sujets profanes. Or l’image est irremplaçable : là où l’écrit pour évoquer un outil, use d’un mot, le document iconographique propose une représentation concrète et restitue le geste, la manière de se servir de l’instrument. Mais l’image peut être maladroite. L’archéologie donne l’outil lui-même, dans son matériau, dans ses dimensions, du moins quand l’outil est en métal ou que des conditions particulières ont favorisé la conservation des matériaux périssables. Les fouilles mettent au jour, en outre, des structures qui appartiennent à l’exploitation agricole, des constructions pour abriter les récoltes et le bétail. Dans les meilleurs cas, elles procurent encore des grains carbonisés, des vestiges botaniques, des os animaux, des pollens ; et là où le texte parle de blé, sans plus, l’archéologie précise : Triticum estivum, Triticum monococcum, dans un cas du froment, dans l’autre l’engrain, une céréale pauvre. Même lorsque les textes ne font pas défaut, même lorsque l’image est offerte à foison, l’archéologie s’affirme donc, elle aussi, irremplaçable. Et, bien sûr, son intervention est encore plus nécessaire quand il s’agit des temps où l’écrit est rare et l’image pauvre et figée dans ses stéréotypes, quand il s’agit du haut Moyen Âge.

    3Pourtant, c’est encore sur la base du document écrit que se lit l’histoire des techniques médiévales. Il n’y a pas si longtemps que l’image est prise au sérieux et échappe au statut de simple illustration du texte. Et l’archéologie médiévale ne s’est pas tout de suite adressée aux sites ruraux, elle ne le fait que depuis quelques décennies. Il y a moins de temps encore qu’elle prend en compte les vestiges botaniques et osseux, qu’elle recherche les champs fossiles, qu’elle associe l’étude des terroirs à celle des villages. Aujourd’hui, si les contrastes tendent à s’effacer entre l’avance des pays slaves et de l’Europe du Nord sur les rivages méditerranéens, les données restent encore fort inégales d’un pays à l’autre, souvent aussi très ponctuelles. C’est donc une analyse encore tâtonnante qu’on peut proposer actuellement et une synthèse qui ne respecte pas les équilibres souhaitables entre les secteurs d’activité, entre les régions ni entre les siècles, mais il est hors de doute que c’est de l’archéologie, d’une archéologie médiévale qui enrichit constamment ses perspectives qu’on peut désormais attendre les avancées futures de l’histoire des techniques agricoles au Moyen Âge.

    « L’Oustillement au vilain »

    Or vous veux raconter
    Comme se doit estorer (équiper)
    Homme qui femme prend.
    Sachez tout vraiment
    Que lui convient maison
    Et bordel (grange) et buiron ;
    En l’un mettre son grain
    Et en l’autre son fain (foin)
    Et en la tierce maigne (demeure)
    Que rien ne lui soufraigne (manque)
    ……
    Se lui convient faucille
    Et alène et étrille
    Couteau à pain tailler
    La jarce (lancette) pour saigner
    La queue et le fusil
    Les aiguilles poignant
    Et les forces tranchant

    4« L’Oustillement au vilain », qui date du XIIIe siècle, appartient à un genre qui a connu un certain succès au Moyen Âge, un genre dont Jacques Prévert s’est souvenu. Sur le ton tout à la fois sentencieux et cocasse, ces poèmes se présentent comme des traités d’économie domestique, avec une forte coloration misogyne en général. L’Oustillement est peut-être le plus sérieux, le plus fiable donc, le plus proche en tout cas, des réalités rurales. Mais bien sûr, dans ce genre énumératif, le mot compte au moins autant que la chose et la rime provoque des associations bizarres (Le sac et le boissel/Le van et le ratel/Picois (pioche) cognée et pelle). Dans l’Oustillement, la licence poétique demeure cependant bridée par une certaine logique et, finalement, l’équipement agricole dont doit se pourvoir le paysan qui femme prend paraît des plus complets ; il n’y manque ni la charrue, ni la charrette, ni la herse, ni cet ancêtre de la brouette qu’est la civière…

    5On souhaiterait que les inventaires archéologiques, et ceux de la documentation écrite, soient toujours aussi riches. C’est loin d’être le cas. Les sources archéologiques sont particulièrement décevantes, et les découvertes d’outils sont des plus rares. Elles ne le sont peut-être pas davantage que pour les époques plus anciennes, ou seulement alors à cause du retard relatif pris par l’archéologie médiévale, mais en face des données de l’écrit ou même de l’image elles paraissent ne pas faire le poids.

    6Ainsi l’outillage tient bien peu de place dans l’œuvre d’Édouard Salin consacrée au Fer à l’époque mérovingienne. L’outillage proprement agricole y est réduit à quelques faucilles, à une serpette, à un coutre. Il est vrai que le mobilier connu de Salin provenait presque toujours de tombes et dans les sépultures les armes sont beaucoup plus fréquentes que les outils. Les habitats du haut Moyen Âge ne sont pas beaucoup plus riches : quelques forces et des couteaux à Brebières (Pas-de-Calais), agglomération de cabanes des VIe-VIIe siècles.

    7Il faut pourtant noter une exception plutôt surprenante et qui concerne le monde slave. Là, les découvertes ne sont pas rares, comme en témoignent les deux volumes du répertoire des Outils dans les Balkans. Les outils proviennent parfois de tombes ; plus souvent ils constituaient de véritables trésors, comparables à des trésors monétaires ou à des cachettes d’armes.

    8En Occident, même les fouilles de villages médiévaux plus tardifs, qui se font toujours plus nombreuses, ne se révèlent pas bien riches en découvertes d’outils et on serait bien en peine, sur le seul témoignage de l’archéologie, de restituer l’équipement d’une exploitation. Voici Brucato, en Sicile, où une douzaine de maisons rustiques ont été fouillées : elles n’ont livré que quatre faucilles en tout, peut-être une pointe de soc d’araire et une sonnaille de fer, avec quelques plombs et flotteurs de filets de pêche. Et cependant, cet habitat fortifié a été détruit brutalement par le fer et le feu en l’année 1338, et le passage de la guerre a laissé en place un mobilier abondant dont de très nombreux récipients en terre cuite et des armes.

    9Sur le site d’un autre village du XIVe siècle, Dracy, en Bourgogne, une maison incendiée vers 1360 a procuré un outillage relativement abondant et diversifié, dont deux faucilles, une serpe à vigne, une serpette, quatre couteaux à couper les grappes, deux pierres à aiguiser ; cependant c’est une autre maison qui a donné un fer de houe, et il faut souligner l’absence de soc ou de coutre, alors même que le village devait, on le sait par les documents, des corvées de charrue.

    10Les habitats villageois qui n’ont pas subi de destruction brutale, que leurs habitants ont abandonnés paisiblement, sont encore plus pauvres en outillage agricole. Naturellement, on s’explique assez bien la médiocrité du bilan ; l’outillage offre des conditions peu favorables à sa préservation : en bois, il ne se conserve pas, en fer il est encombrant donc récupérable et sans doute, de fait, est-il récupéré. On observera toutefois que les fouilles subaquatiques de l’habitat de Charavines aujourd’hui sous les eaux du lac de Paladru, dans des conditions optimales pour la conservation du bois, sont tout à fait pauvres en instruments agricoles. Et au bilan bien maigre de l’archéologie occidentale on peut encore une fois opposer celui des pays de l’Est : les fouilles de sites ruraux y dressent des inventaires plus complets et surtout plus diversifiés : à Svidna, en Bohême, par exemple ou à Pfaffenschlag (en allemand, L’Essart du curés en Moravie. Sur ce dernier site, l’inventaire archéologique enregistre des socs de charrue, des faucilles, une faux, un élément de fléau, une ferrure de bêche, une étrille, des forces à tondre les moutons. Pourtant, Pfaffenschlag, contemporain de Brucato, de Dracy, a été déserté dans des conditions pacifiques. Mais en Europe centrale on n’est jamais bien loin des mines de fer et la métallurgie y prospère depuis la protohistoire : peut-être est-ce là la raison de ces contrastes1 ?

    L’inventaire d’Annapes

    Nous avons trouvé dans le fisc d’Annapes un palais royal construit en très bonne pierre, trois chambres, la maison tout entourée d’une galerie avec onze petites pièces ; au-dessous, un cellier, deux porches ; à l’intérieur de la cour, dix-sept autres maisons construites en bois, avec autant de chambres et les autres dépendances en bon état : une étable, une cuisine, une boulangerie, deux granges, trois magasins… Outils : deux bassines de cuivre, deux vases à boire, deux chaudrons de cuivre, un de fer, une poêle, une crémaillère, un landier, une torchère, deux cognées, une doloire, deux tarières, une hache, un grattoir, un rabot, une plane, deux faux, deux faucilles, deux pelles ferrées. Des outils de bois en suffisance…

    11Annexé au célèbre capitulaire De Villis qui, au début du IXe siècle, légifère sur la gestion des domaines royaux, l’inventaire du « fisc » d’Annapes, en Flandre, est offert en modèle aux administrateurs des biens ecclésiastiques et royaux. S’agissant d’un grand domaine qui compte de nombreux bâtiments et possède un cheptel abondant où figurent, entre autres, soixante-dix juments et vingt-et-un chevaux, la pauvreté de l’outillage métallique ne laisse pas d’étonner. Encore faut-il remarquer que les récipients, l’équipement du foyer, les instruments du charpentier y tiennent plus de place que les outils agricoles. Georges Duby a voulu y voir le signe de la rareté de l’outillage en fer au haut Moyen Âge qu’aurait remplacé un équipement de bois.

    12L’insuffisance de l’approvisionnement en fer du haut Moyen Âge a été maintes fois soulignée : concernant le fer agricole, le miracle de saint Benoît restituant la serpe qu’un serviteur avait laissé tomber dans un marais paraît comme une bonne illustration du prix attaché au métal et donc de sa rareté. Pourtant, cette pauvreté en fer a aussi été contestée et a été jugée invraisemblable. Le texte de l’inventaire d’Annapes a fait l’objet d’une autre interprétation. Les travailleurs du domaine étaient des prébendiers et des corvéables : on peut penser qu’ils étaient requis avec leurs propres outils dont l’exploitation, dès lors, n’avait pas à être pourvue. L’argument n’emporte pas entièrement la conviction et en tout état de cause, le dossier reste ouvert.

    13Les documents écrits se multiplient à la fin du Moyen Âge ; nombreux et de nature très variée sont ceux qui informent de l’équipement agricole et c’est tout à fait normal puisque l’écrit est pour une large part consacré aux biens fonciers, à la terre. Les comptes seigneuriaux enregistrent des corvées de charrue, de hersage, parfois des achats d’outils ou des dépenses de réparations confiées au forgeron ; les documents princiers dressent parfois des inventaires de biens paysans saisis ; les archives notariales comportent des baux à ferme, des cessions d’exploitations qui sont d’autres occasions d’inventaires… Il est pourtant très difficile d’évaluer la valeur de l’équipement paysan, de préciser de quels outils il se compose. Les historiens de la vie rurale au Moyen Âge, pourtant nombreux et de plus en plus attachés à exploiter au mieux les documents sériels, ne s’y risquent pas.

    14Les données, il est vrai, sont régulièrement disparates, voire contradictoires. L’inventaire, dressé en 1401, d’un laboureur normand qui se pendit par désespoir, comptait du bétail, des grains, des meubles, mais pas un seul outil agricole ; mais presque à la même date, en 1392, et dans la même province, un autre suicidé possédait à sa mort une charrue, un coutre, un soc, une herse et deux charrettes.

    15Françoise Piponnier, qui a étudié plusieurs centaines d’inventaires après-décès des biens de paysans bourguignons, datés entre 1340 et 1430, y a rencontré des pelles et des bêches en grand nombre ; la houe, de divers types et sous divers noms, est également très présente, mais les mentions de charrue sont rares. On hésiterait à en conclure que les paysans bourguignons étaient peu nombreux à utiliser la charrue, moins nombreux que les laboureurs normands chez qui la mention revient plus souvent : les comptes seigneuriaux font état, en Bourgogne, de corvées de charrue. Il y a tant de considérations en fait qui biaisent les inventaires ! Dans les mêmes documents la herse n’apparaît que deux fois ; mais elle était sans doute en bois, donc de valeur médiocre et les scribes négligent de l’enregistrer, comme ils omettent à peu près totalement les râteaux et les fourches. De même c’est leur faible valeur qui explique la relative rareté des faucilles, fréquentes sur les sites archéologiques mais qui ne sont mentionnées que vingt-sept fois par les inventaires bourguignons. Mais les faux sont encore plus rares et elles étaient chères. Alors ?

    16Dans l’histoire des campagnes médiévales, l’exploitation paysanne reste la grande inconnue : on ne parvient ni à saisir ses dimensions ni à évaluer ses moyens et ses revenus. Les documents agraires sont ceux de la seigneurie et n’éclairent bien que celle-ci. Or même l’équipement de l’exploitation seigneuriale échappe le plus souvent : la vaste grange – il faut entendre ici une ferme et un domaine – de Vaulerent, près de Louvres, dépendant de l’abbaye cistercienne de Chaalis, fait l’objet en 1315 d’un bail à ferme portant sur les bâtiments et 227 hectares ; dans l’inventaire figurent des fourches, mais de charrue, point !

    17Impossible donc d’apprécier ce que pouvait être l’outillage dont disposait un paysan. Quel paysan d’ailleurs ? Le laboureur ? Par définition, il devait posséder un train de culture, mais certains, on le sait, s’associaient pour l’acquérir et l’entretenir. Le brassier ? On l’imagine pourvu seulement de l’outillage à main, mais encore ? Tout ce qu’on peut faire, c’est dresser un inventaire optimal, réunissant tout l’outillage connu. Dès lors on retrouve à peu près l’Oustillement au vilain : charrue, herse, charrette, bêche, pioche, faucilles, serpes, pelles, crible, tamis, van pour s’en tenir à l’essentiel ; encore y manque-t-il la faux2.

    Les labours de Lejre

    18Entre 1972 et 1983, on a pu voir, près de Lejre, au Danemark, une charrue médiévale à l’œuvre. Sur un champ de deux hectares et demi, cinq années de suite, elle a réalisé des labours en planches et en « adossant ». Attelée à deux forts chevaux – des chevaux de brasseur, ce qui est bien normal puisque l’expérience bénéficiait de l’aide de la fondation Carlsberg ! – la charrue faisait 3,90 m de long (7,75 m avec l’attelage) ; elle comportait un avant-train, un coutre fixé sur l’age, un sep et un étançon réalisés dans une même pièce de bois fourchue, un versoir de bois, un soc symétrique et un unique mancheron. Naturellement c’était une reconstitution, une version plus solide de la charrue construite pour le musée de Viborg qui emprunte ses modèles à des témoins archéologiques d’instruments datant des XIIIe et XVe siècles et s’inspire aussi de témoins ethnographiques, notamment pour l’avant-train, le mancheron et le versoir.

    19Des résultats de l’expérience conduite à Lejre par Grith Lerche, les plus intéressants concernent le profil des raies tracées par la charrue : il s’agissait surtout de vérifier qu’on pouvait induire les caractères de l’instrument des traces qu’il a laissées. Il y a bien, de fait, un profil caractéristique du labour à la charrue, différent de celui donné par l’araire ; et des labours à l’araire, réalisés également par le Centre historique et archéologique de Lejre, ont permis la confrontation. Le profil de la raie tracée par la charrue « médiévale » est dissymétrique et complexe, avec un bord redressé, l’autre côté étant d’abord oblique puis ondulé. Accessoirement, l’expérience de Lejre a confirmé que les tournailles aux extrémités du champ faisaient perdre beaucoup de place, justifiant ainsi ceux qui, comme Marc Bloch, y voyaient la raison de l’allongement des champs, lié donc à l’adoption de la charrue. Elle a aussi rappelé que les labours usaient considérablement et rapidement les pièces métalliques de l’instrument : quatre socs ont été nécessaires ; avec cela, la charrue, pourtant conduite par un agriculteur et non par un scientifique inexpérimenté, s’est brisée deux fois sur des pierres.

    20L’expérience de Lejre est très significative et, d’abord, parce qu’elle a été réalisée au Danemark : c’est avec la Tchécoslovaquie et l’Angleterre, l’un des pays où les recherches en archéologie agraire sont les plus avancées ; et la découverte à plusieurs reprises dans les tourbes du Danemark de bois de charrue y est sans doute pour beaucoup, comme celle, fréquente, de socs et de coutres en Tchécoslovaquie. Les labours de Lejre rendent manifestes aussi les progrès que l’archéologie fait accomplir à l’histoire des techniques médiévales, en même temps que les hésitations et les limites qui caractérisent encore l’état de nos connaissances. L’intervention de l’ethnographie mérite aussi d’être soulignée : elle est à la fois nécessaire pour combler les lacunes et justifiée par la continuité de la civilisation paysanne du Moyen Âge à nos jours. Enfin, on doit saluer, comme elle le mérite, l’émergence d’une archéologie expérimentale dans le domaine des médiévistes ; les expériences danoises ne sont pas isolées : les Tchèques, bien sûr, ne sont pas en reste, ni les Anglais, et la France compte depuis peu une ferme archéologique où l’on a commencé de tester les techniques médiévales. L’expérience se développe dans le Morbihan, à Melrand, auprès des vestiges du village de Lann Gouh, abandonné au XIe siècle.

    21La nécessité de l’archéologie expérimentale s’est d’abord imposée pour le néolithique et la protohistoire ; l’expérimentation des techniques médiévales ne paraît pas moins utile, ne serait-ce que pour résoudre le problème majeur : araire ou charrue ? Bien sûr, c’est un fait acquis : le Moyen Âge connaissait la charrue. Mais, à supposer qu’il l’ait inventée – ce qui n’est pas très sûr – quand et où l’a-t-il mise au point, et à quel rythme s’est faite sa diffusion ? Voilà qui reste confus, incertain, embrouillé.

    22Une part de l’ombre projetée sur la question tient à ce qu’on peine à définir ce qu’est une charrue. En principe, rien n’est plus simple. Il y a belle lurette qu’on a renoncé à faire de l’avant-train, du petit chariot à deux roues – les « rouelles » des documents médiévaux – l’élément caractéristique de la charrue : on sait qu’il y a des araires à roues et des charrues qui en sont dépourvues. Il est maintenant décidé que l’araire, instrument symétrique qui ouvre simplement la terre, s’oppose à la charrue, instrument dissymétrique qui, par l’intervention du versoir, retourne la terre après l’avoir tranchée. Par conséquent les éléments qui introduisent la dissymétrie, le soc quand il est plus développé sur un côté, et naturellement le versoir, doivent constituer le signe irréfutable qu’on a affaire à la charrue et non à l’araire.

    23Mais, en fait, il existe entre les deux instruments des transitions nombreuses et si, récemment encore, on pouvait rencontrer des hybrides appelés parfois araire-charrue (arlpflug), on doit s’attendre à ce que la recherche archéologique ou historique réserve des énigmes et tombe sur des cas ambigus. On sait aussi que le labour dissymétrique a précédé l’instrument dissymétrique, de sorte que théoriquement, la trace, le profil de la raie, pourraient ne pas constituer une preuve. Enfin, la charrue tourne-oreilles, attestée dès le XIIIe siècle, présente un soc symétrique : le versoir est changé de côté au bout de la raie.

    24D’une façon générale, la définition actuelle de la charrue, si elle a pour elle la logique, n’en est pas moins arbitraire. Les hommes du passé pouvaient avoir une tout autre conception des choses, de sorte qu’il s’introduit une inévitable confusion entre nos définitions et leur façon de voir : nous employons les mêmes mots, mais sans doute avec des sens différents. On a toujours au Moyen Âge opposé deux instruments, un lourd et l’autre léger : un synode polonais de 1262 taxe le petit aratrum, appelé « radio », d’une livre de cire, et le grand aratrum, appelé « plug », de deux livres ; or « radio » c’est dans les langues slaves, l’araire ; « plug », c’est la charrue. Sans doute, mais cette opposition recouvre-t-elle bien la nôtre ?

    25En Occident, aratrum – d’où vient le mot araire – s’oppose généralement à carruca – d’où vient charrue. Mais carruca, c’est aussi une voiture, et dès lors on peut penser que la charrue était avant tout l’instrument pourvu de roues. Était-il, pour autant, dissymétrique3 ?

    Les socs de Pfaffenschlag

    De 1960 à 1971, une fouille exhaustive a été réalisée sur le site du village déserté de Pfaffenschlag, en Moravie. La deuxième phase d’occupation, datée de la fin du XIIIe siècle et du XIVe siècle, correspond à une sorte de village-rue, allongé de part et d’autre d’un petit cours d’eau. Cet habitat, modeste, comptait alors 16 maisons ; les unes, sur la rive droite, au nombre de dix, comprenaient dans une cour une étable et une habitation où un vestibule distribuait une pièce à vivre, avec un poêle, d’un côté et de l’autre une chambre ; sous l’habitation une cave qui parfois se développe en souterrain servait sans doute à abriter les réserves. Ces maisons de la rive droite auxquelles s’opposent celles de la rive gauche, plus petites et sans cour, étaient sans doute celles de laboureurs à la tête d’une petite exploitation.

    26C’est dans ces maisons qu’ont été trouvés quatre socs symétriques ; triangulaires, ils mesurent de 8 à 10 cm de long, avec une largeur maximale de 6 à 7 cm ; la douille, étroite, est fort allongée, jusqu’à 10 cm. La maison X, également sur la rive droite, a procuré un soc asymétrique beaucoup plus fort : long de 18 cm, large de 15, il comporte une douille presque aussi longue et large, mais très ouverte.

    27Le terroir de Pfaffenschlag, fossilisé par la reconquête de la forêt après l’abandon du village au début du XVe siècle, a pu être reconnu : outre les bois et les pâturages, il s’étendait sur 123 hectares de terres cultivées et on peut estimer à 11 hectares la superficie d’une exploitation. Les parcelles, longues de 800 m pour 18 à 25 m de large, montraient des billons qui ne se comprennent bien qu’avec des labours à la charrue, bien en accord, aussi, avec l’allongement des champs. Enfin les pollens recueillis ont montré qu’on cultivait à Pfaffenschlag le froment, le seigle, l’avoine, l’orge et même, fait notable, le sarrazin, dès la fin du XIIIe siècle. Instruments et outils, forme des champs, profil des labours, vestiges des espèces cultivées, voilà ce que donne maintenant la recherche archéologique sur les sites ruraux, au moins dans les pays nordiques et l’Europe de l’Est.

    28« On ne sait rien de la forme des socs », constatait Georges Duby, il y a vingt-cinq ans, au sujet des mentions fournies par les documents, à propos en particulier de la « socherie » de Metz qui, au XIIe siècle, constituait le « métier » le plus important de la ville. Si on est toujours dans l’ignorance de la forme des socs en France au Moyen Âge, il n’en va pas de même pour d’autres pays et on aperçoit, en fait, une assez grande variété morphologique.

    29Le soc long et étroit, où la douille faite de deux ailes repliées est aussi large que la partie travaillante, un type connu dès la protohistoire, dit le type « celte », est présent encore au Moyen Âge ; les sites russes en ont procurés qui datent des IXe-Xe siècles, et à Novgorod aux XIe-XIIe siècles, les socs ont encore cette forme qu’on a rencontrée également à la fin du Moyen Âge, en Lettonie, au château de Rerezkne (Rositten).

    30Un soc beaucoup plus large, mais aussi à ailes rabattues, a été trouvé en Roumanie sur un site daté du XIe-XIIe siècle. Assez voisin, mais triangulaire avec les ailes complètement repliées pour chausser l’extrémité du sep, le soc mis au jour dans un atelier de forgeron dans le comté d’Argyll en Ecosse, est sans doute très ancien, antérieur au Xe siècle, mais des pierres tombales du sud-ouest de l’Écosse, beaucoup plus tardives, représentent des socs triangulaires, parfois sans douille.

    31En forme de pelle ou de flèche, avec une longue soie, cet autre type se rencontre à la fois en Italie, dans le Piémont, dans un établissement d’époque lombarde ; au Danemark où il correspond aux seps de bois du XIIIe et du XVe siècle ; en Pologne où un exemplaire a été trouvé près de Bydgoszcz, datant également du XIIIe-XIVe siècle. Beaucoup plus fréquents, les socs en forme de bêche triangulaire ou d’écu, à douille étroite comme ceux de Pfaffenschlag, se rencontrent dans les fouilles sur des sites du XIVe-XVe siècle en Yougoslavie, à Petrus, à Djerdap. Le type ne doit cependant pas dater de la fin du Moyen Âge puisque le soc, de forme très voisine en bêche ou en écu mais pourvu d’une douille très large, plutôt un manchon très ouvert, figure sur des sites de toutes époques, à Pulstuk (XIIIe-XIVe s.) en Pologne, dans le trésor d’outils de Vrsac (XIe-XIIIe s.) et les fouilles de Borac (XIVe-XVe s.) en Yougoslavie, sur des sites des IXe-Xe siècles en Russie, en Bessarabie, en Moravie (Stare Zamky, IXe s.).

    32On s’est demandé dans quelle mesure les socs pouvaient informer de la morphologie de l’instrument et des méthodes de labour. Les avis divergent : pour les uns, on ne peut rien en induire concernant la dimension, la construction de l’instrument ni les façons de s’en servir. D’autres au contraire postulent la plus étroite connexion entre le soc et la charrue (ou l’araire). Ainsi une partie travaillante plus large que la douille serait l’indice qu’on a affaire à un soc de charrue, ce qui paraît contestable. La forme asymétrique, surtout, peut être sans problème associée à la charrue, mais il est moins évident que le soc symétrique soit nécessairement celui de l’araire.

    33Les coutres ne sont pas rares dans les trésors d’outils ou sur les sites ruraux des pays slaves : ce sont souvent les mêmes contextes qui procurent les socs et les coutres, mais ces derniers ne se prêtent pas aussi aisément à une typologie : ce sont toujours des lames de fer, droites ou légèrement incurvées, pourvues d’une large soie destinée à traverser le bois de l’age. On se borne le plus souvent à distinguer les coutres courts, attribués à l’araire, des longs (50 cm) qui seraient ceux de la charrue ( ?). D’autres outils sont associés à l’instrument aratoire même s’ils n’en font pas partie. Ce sont notamment des spatules de fer pourvues d’une douille, de longueur variable (5 à 15 cm) : ces outils, trouvés en Roumanie et en Bulgarie notamment, sur des sites d’époques diverses – IXe siècle à Curcani mais XVe siècle à Suceava, en Roumanie – ont été interprétés comme des grattoirs pour nettoyer le soc de la charrue. Enfin, sur les documents iconographiques montrant des scènes de labour, il n’est pas rare que figure, passée dans la ceinture du laboureur ou suspendue au timon, comme on le voit sur une fresque de l’église d’Elmelunde, au Danemark, une petite hache ou une herminette : la fonction de cet outil paraît être d’extirper quelque souche ou autre obstacle sur le chemin du coutre et du soc.

    34Les marais et les tourbes du Danemark qui ont procuré la découverte de bateaux et même de corps humains comme celui de Tollund devaient naturellement recéler des éléments en bois de charrues ou d’araires : on a souvent hésité sur les dates de ces pièces, mais pratiquement toutes celles qui avaient d’abord été attribuées à la protohistoire sont aujourd’hui, grâce au radiocarbone et à la dendrochronologie, restituées au Moyen Âge ou au XVIe siècle. Une des plus anciennes de ces pièces est l’age de Navndrup, épais de 10 cm, long de 2,67 m qui présente des mortaises pour le tenon de l’étançon et, pour le coutre, les trous des chevilles qui le fixaient à l’essieu et à l’autre extrémité le tenon destiné à assujettir le mancheron. Mais on a surtout trouvé des pièces taillées dans une fourche de bois, chêne ou hêtre, formant d’une part le sep, d’autre part l’étançon ; ces fragments, datés du XVe siècle à Linaa, à Andbjerg, à Tommerby portent des trous correspondant aux clous qui fixaient le versoir et montrent sur le côté du guéret des galets de silex, de quartzite ou de granit sertis dans le sep : ces galets devaient le protéger contre une usure trop rapide. Les socs correspondant aux seps danois, comme en témoignent les logements creusés dans le bois ainsi que des exemplaires en fer comme le soc (dissymétrique) de Nyborg, étaient du type pourvu d’une soie et en forme de flèche.

    35Ce sont des conditions particulières qui ont permis la conservation de ces fragments de bâti en bois ; de même, la rencontre de labours médiévaux suppose une fossilisation précoce, intervenant très vite après le dernier passage de la charrue4.

    Le champ de Lindholm Hoje

    La fouille d’un petit établissement du XIe siècle à Lindholm Hoje, sur le Limfiord, au nord du Jutland, a révélé, 25 à 30 cm au-dessous des vestiges de l’habitat, un champ labouré qu’une tempête de sable avait brutalement fossilisé : la différence de texture et de couleur, très nette, entre le sable et la terre arable, a permis d’observer des ornières laissées par des charrois, les billons et les dérayures des derniers labours et de fines traces de hersage. Que le labour ait été effectué à la charrue est prouvé par les extrémités du champ où l’instrument avait été soulevé en laissant des traces significatives et qui gardaient l’empreinte de sabots de cheval. Les billons, étroits, étaient formés de deux à six raies, avec une largeur de 15 à 25 cm par raie ; les dérayures conformes à la pente, assez forte, du champ, étaient bien conçues pour drainer, mais sans doute aussi servaient-elles de chemins pour faciliter le sarclage. On a pensé que le champ devait être ensemencé d’une céréale exigeant un sarclage soigné, peut-être le millet. Enfin, la fraîcheur et la netteté des traces ont suggéré qu’il s’agissait des labours d’une seule année.

    36Les labours fossilisés de Lindholm ne sont pas tout à fait isolés, mais l’étude ne bénéficie pas toujours des mêmes atouts : à Lindholm, aux conditions particulièrement favorables s’ajoute la compétence de la spécialiste danoise, Grith Lerche. Les champs fossilisés sous la forêt, comme à Pfaffenschlag, comme à Dobropole en Pologne, ou à Tamasi, en Hongrie, ne permettent guère que d’observer les billons, leur largeur, leur longueur.

    37Des traces de labour à l’araire, d’époque viking, ont été relevées au Danemark encore, à Aggersborg et à Viborg, à Loddekopinge en Suède, et récemment d’autres traces ont été moulées sur un champ du XIVe ou du XVe siècle, découvert à Paris, dans la cour du Carrousel à un emplacement qui, évidemment, était hors les murs à cette date. Ce qui signe le travail à l’araire, ce sont les labours croisés : l’instrument ne contraint pas à croiser les raies mais il y incite du fait du travail trop léger qu’il effectue. À Ribe, dans le Jutland, les raies datées du XIIIe siècle adoptaient trois directions successives, nord-sud, puis ouest-est, et de nouveau nord-sud ; leur profil montrait que la terre n’avait pas été retournée, mais que deux araires avaient été utilisés, dont l’un avait un soc plus étroit, de sorte qu’il s’agit peut-être de labours espacés dans le temps plutôt que de labours croisés.

    38Les billons de Lindhom mesuraient jusqu’à 130 m de long, ceux de Pfaffenschlag, on l’a vu, 800 m. Les billons n’impliquent peut-être pas absolument des labours à la charrue mais il y a quand même de fortes chances pour qu’ils soient imputables à cette technique, alors que des labours à plat laisseraient dans l’incertitude. De même les longues raies doivent être associées à la charrue ou, tout au moins, à l’instrument lourd et pourvu d’un avant-train qui le rend plus difficile à manœuvrer et demande un espace relativement important pour opérer le tournant au bout de la raie : cet espace étant constant, plus le champ est allongé, plus le terrain perdu pour la culture est limité.

    39Marc Bloch appelait la charrue « mère des champs allongés » et il voyait dans l’opposition charrue-araire l’origine du contraste qui existe dans les paysages agraires français, entre les champs allongés du Nord et les parcelles plus ramassées et irrégulières du Midi. Si on ajoute que, pour faciliter l’accès au champ, les parcelles allongées invitent à organiser le terroir en quartiers où les raies sont toutes orientées dans le même sens, on voit de quelle conséquence a été l’adoption de la charrue dans l’organisation du paysage rural5.

    Sur un cartulaire du XIIIe siècle

    40Marc Bloch disait (approximativement) que, vus par les historiens, les paysans du Moyen Âge ne labouraient que des cartulaires… Le mot trouve une sorte d’illustration dans un dessin d’un cartulaire de l’abbaye cistercienne de Coton, dans le Lincolnshire, un dessin daté des environs de 1280, qui représente précisément un instrument aratoire. Et cette représentation est d’autant plus précieuse qu’elle est accompagnée d’une légende, la liste des diverses parties de l’instrument. Or celui-ci comporte bien les pièces habituelles, un coutre (culter), un soc (vomer), avec à la fois un manche et un mancheron, mais s’il possède un joug avec ses attaches, il n’a pas d’avant-train, mais seulement un patin (pes). Ce dernier élément montre qu’il s’agit de la « charrue branlante », la charrue sans roue, mais qui, dans l’évolution de l’instrument aratoire se situe après la mise au point de la charrue et l’adoption de l’avant-train ; elle ne constitue nullement un archaïsme, mais une solution qui donne plus de maniabilité. En outre, si la légende évoque deux oreilles (aures), le dessin du cartulaire ne montre qu’un versoir : pour Georges Cornet, cette contradiction est peut-être le signe qu’on a affaire aussi à la « charrue tourne-oreilles » où le versoir est mobile, fixé tantôt à gauche, tantôt à droite et la tourne-oreilles constitue aussi une adaptation et, d’une certaine façon, un progrès qui évite à l’instrument des parcours compliqués. Dans l’Angleterre du XIIIe siècle, l’évolution de l’instrument aratoire est presque arrivée à son terme.

    41Il est hors de doute, aussi bien, que l’instrument dissymétrique est alors largement répandu. Il est fort courant dans toute la grande plaine de l’Europe du Nord, de la Flandre à la Russie ; il est présent en Europe centrale, et en France, la charrue est l’instrument des labours en Normandie, dans les campagnes parisiennes, en Picardie, en Artois, en Lorraine. Au haut Moyen Age, en revanche, l’araire est prédominant, si même il n’est pas seul. On en connaît deux types principaux, déjà repérés dans la protohistoire : l’araire à l’age incurvé, du type de Dostrup, qui attaque la terre obliquement, et le « dental » antique, l’araire de Triptolème, au soc plus large et dont le sep est horizontal. D’autres types apparaîtront plus tard, comme la socha (ou sokha) des plaines russes, pourvue de deux socs : selon les auteurs, elle apparaîtrait déjà au VIe siècle, ou seulement au IXe. Mais l’évolution qui conduit de l’araire à la charrue est en marche dès le haut Moyen Âge.

    42On a longtemps considéré comme une charrue l’instrument que Pline l’Ancien appelle ploum et dont il signale l’usage aux confins de la Gaule et de la Rhétie, au premier siècle de notre ère. On pense aujourd’hui qu’il ne s’agissait encore que d’un araire à roues, encore que le terme paraît bien être une latinisation du germanique pflug qui désigne la charrue : toujours la même ambiguïté. Quoi qu’il en soit, l’avant-train, qui permet de régler la profondeur du labour, constitue bien une étape importante dans l’histoire de la charrue. Mais des découvertes récentes suggèrent une apparition précoce de l’instrument dissymétrique : les fouilles de Feddersen Wierde, près de Brême, ont rencontré des traces de labour attribuées à une charrue à versoir, datant du Ier siècle avant notre ère, et des socs dissymétriques datés du Ier siècle avant au IIe siècle après J.-C. ont été trouvés au Danemark. La charrue pourrait bien être apparue d’abord dans l’aire germanique, dès avant le temps de la migration des peuples.

    43Son émergence dans le monde slave tend aussi à reculer dans le temps à la faveur de découvertes – ou d’interprétations – nouvelles. L’instrument à soc dissymétrique et versoir n’y était d’abord signalé qu’au XIIe siècle, mais l’archéologue polonais Witold Hensel a situé avant le Xe siècle la diffusion de la pluzyca, charrue certes sans avant-train mais pourvue d’un versoir ; et l’historien tchèque Frantisek Sach a estimé que les Slaves de Moravie auraient commencé à utiliser la charrue entre le VIIIe et le IXe siècle. En tout cas, de petits socs asymétriques, datant du IXe siècle, ont été trouvés en Moravie et Slovaquie.

    44En Occident, la charrue est connue autour de l’an mil : un manuscrit anglo-saxon du Xe siècle montre deux paires de bœufs attelées à une charrue à grand versoir. Et les représentations iconographiques de la vraie charrue se multiplient au XIIe siècle. C’est aussi le temps où l’on assiste en Occident à la multiplication des labours et on ne peut s’empêcher d’y voir une conséquence de la diffusion de la charrue.

    45Le développement de la charrue et de son usage ne relègue pas l’araire au rang des curiosités ; on s’en doute puisque, hier encore, c’était l’instrument du labour dans la France méridionale, dans les pays méditerranéens et balkaniques. Au Moyen Âge, c’est, bien sûr, dans ces parties de l’Europe qu’on le voit représenté, illustrant, par exemple, les mois d’octobre ou de novembre de la mosaïque de Santa Maria Annunziata d’Ostrante (XIIe s.) et le calendrier sculpté de la fontaine de Pérouse (XIIIe s.). Et Emmanuel Le Roy Ladurie fait encore pour les XVIe-XVIIIe siècles un portrait affligeant du médiocre araire languedocien, l’araire chambige, « écorchant la terre à trois pouces, la pulvérisant sans la retourner ». Même dans les pays du Nord, il s’en faut que la charrue fasse disparaître l’araire : l’araire dental à bâti quadrangulaire est encore représenté par les peintures murales des églises danoises à la fin du Moyen Âge.

    46La charrue ne déclasse pas davantage les outils du labour à bras. Les techniques du jardinage, tout d’abord, étaient requises pour les petits lopins, proches des habitations, où l’on cultivait les légumes ; et ceux-ci tenaient dans l’alimentation une place difficile à apprécier mais sans doute importante.

    47Même les champs et la culture des céréales étaient loin d’ignorer les labours à bras, encore à la fin du Moyen Âge et plus tard. Il y a, à cela, d’excellentes raisons : la charrue, l’araire n’étaient pas utilisables sur les sols trop pentus, sur les terrasses trop étroites, sur les sols trop caillouteux, sur les parcelles trop petites ou sur les terrains plantés comme sont les vignes. Les paysans trop pauvres pour posséder un attelage n’avaient d’autre ressource que de travailler leur terre à la bêche ou à la houe. Et on peut encore faire valoir que le labour à bras était plus soigné, plus efficace que le travail effectué par l’instrument tracté, surtout s’il s’agissait d’une première mise en culture ; et il complétait heureusement le travail bien léger, souvent insuffisant, de l’araire. C’était sans doute une tâche bien pénible et bien lente que de retourner un champ à l’aide de l’outil emmanché, mais Georges Comet fait remarquer que la perte de temps était relative, s’il est vrai qu’une seule œuvre à la bêche suffit là où il faudrait plusieurs labours.

    48Un manuscrit du XIIIe siècle, conservé à la Bibliothèque municipale de Besançon, illustre le mois de février par deux paysans travaillant l’un à la bêche, l’autre à la houe. Ce sont les deux principaux outils du travail à bras. La bêche, l’outil au manche dans le prolongement du fer prend le plus souvent au Moyen Âge l’aspect de la pella ferrata ; l’instrument est seulement habillé de fer ; un double croissant de métal en cercle l’extrémité. C’est cette bêche ferrée que représente régulièrement l’iconographie médiévale, par exemple ce manuscrit de Dresde, de 1330, qui a permis à Paul Grimm d’illustrer le fer de la bêche qu’il avait mis au jour en 1939 sur le site du village médiéval de Hohenrode, dans le Harz, un site du XIVe siècle précisément. Les trouvailles de fers de ce type ne sont pas, en effet, moins fréquentes en archéologie, surtout en Europe centrale et orientale, et sur des sites de toutes époques, y compris la fin du Moyen Âge. Plus rare paraît être la forte bêche à trois dents datée du XIVe siècle mise au jour par les fouilles de Saint-Denis.

    49Les formes de la houe sont plus variées mais toujours l’outil se caractérise par l’angle proche de 45° que fait le manche avec le fer. Celui-ci peut être rectangulaire et étroit, ou trapézoïdal, ou triangulaire ; il peut présenter un tranchant élargi et incurvé à la manière d’un fer de hache ; il peut encore prendre la forme du bident. Et les noms dont on le désigne sont variés même en s’en tenant au domaine français : en Bourgogne les documents du XIVe siècle appellent bigol la houe à deux dents, fessour celle à la lame étroite et maigle (meille) la houe dont la douille en col de cygne permettait de fouiller sous les ceps de vigne. La houe trouvée à Dracy, à laquelle manque l’œil d’emmanchement, est un fessour ou une maigle : on voit bien la technique de fabrication qui, en repliant les côtés du fer, a donné la forme trapézoïdale de la lame. La houe de Saint-Denis est aussi exceptionnelle que la bêche : elle a trois dents légèrement incurvées.

    50Il faut encore mentionner la pioche dont le manche est perpendiculaire au fer, celui-ci pouvant présenter un tranchant ou deux, une pointe ou deux. Mais la pioche (ou pic) est un outil polyvalent. Les outils du sarclage ne diffèrent pas beaucoup de la houe ou du pic. Les sarcloirs semblent se distinguer par leurs petites dimensions : « un fessourot pour sacler » disent les documents bourguignons, en adoptant un diminutif du fessour (la houe)6.

    Sur la Tapisserie de Bayeux

    La Télé du Conquest appelée communément – et à tort puisqu’il s’agit d’une toile brodée la Tapisserie de Bayeux est une œuvre unique en son genre, surtout si on songe qu’elle a été réalisée à la fin du XIe siècle. C’est aussi un document extraordinaire, moins pour le récit qu’elle donne de la conquête de l’Angleterre et de ses préparatifs diplomatiques et militaires que pour l’authenticité, la richesse et la précision de ses images : elle constitue un reportage aussi fidèle que coloré de la vie matérielle au XIe siècle. L’armement, les méthodes de combat, les bateaux tels qu’elle les représente ont trouvé leur vérification dans les textes et les sources archéologiques ; et les étranges châteaux de la Tapisserie se sont révélés conformes dans tous leurs détails à ce que de rares documents et les fouilles nous ont appris du château du premier âge féodal, le château à motte.

    51Et c’est encore la Toile de la Conquête qui nous offre l’image la plus complète, la plus rare, des travaux des champs, et parmi les plus anciennes : une scène de labour, suivie de semailles, d’un hersage et d’une chasse aux oiseaux.

    52Le labour est effectué par un instrument à roues, attelé à un animal aux longues oreilles, âne ou mulet, que guide un paysan armé d’un aiguillon ; le semeur porte devant lui une besace béante qu’il tient ouverte de la main gauche tandis qu’il lance le grain à la volée de la main droite ; la herse, carrée, a quatre traverses dentées ; elle est traînée par un cheval qui porte le collier d’épaules rigide, alors que l’âne attelé à la charrue semble harnaché d’un collier de garrot ; dans les deux cas il n’y a qu’un animal de trait et la herse paraît bien pourvue d’un palonnier ; enfin, à l’aide d’un long bâton, un homme, ou un enfant, éloigne les oiseaux du champ ensemencé. Tout cela peut paraître banal et ne l’est pourtant pas aux yeux de l’historien des techniques : sur la herse, sa fonction, sur les animaux de trait, sur l’attelage, c’est un témoignage précieux par sa date et sa précision que nous offre la célèbre « Tapisserie ».

    53La herse est connue dès l’Antiquité. On perd ensuite sa trace jusqu’à l’époque carolingienne. Il est vrai que, faite de bois, sa conservation est problématique. Mais, même au Danemark, on n’en connaît qu’un exemplaire de haute époque, daté du IXe siècle par le radiocarbone : il s’agit, en fait, de quatre pièces de bois appartenant à deux traverses au moins, remployées dans le coffrage d’un puits à Viborg. Les traverses, en aubier de chêne, épaisses de 7 cm environ, présentaient quelques dents encore en place, en bois également, longues d’environ 20 cm et espacées de 14 à 18 cm. Avec cette structure, la herse de Viborg ressemble étonnamment à une autre, beaucoup plus ancienne, la plus ancienne connue, datée du premier siècle : celle-ci, retrouvée à Dorregest, en Hollande du Nord, également remployée dans un puits, présente des dents en bois de 22 cm, espacées de 15 cm. On pourrait ainsi penser que durant le premier millénaire, l’instrument n’a pas connu de modification. Toutefois, on a trouvé récemment sur le site du village carolingien de La Grande Paroisse (ou Pincevent), non loin de Montereau, près d’une centaine de dents de herse, en fer, incurvées, mesurant 9 cm de long ; les traces de bois permettent d’estimer à 2 cm l’épaisseur des traverses qui étaient, sans doute, doublées. En Europe centrale, où les mentions de corvées de hersage se multiplient à partir du XIVe siècle, les dents de fer deviennent à cette époque plus fréquentes sans pour autant faire disparaître les pointes de bois ; les fouilles du petit château de Semonice, en Tchécoslovaquie, daté du début du XIVe siècle, ont procuré de nombreuses dents de fer, mesurant environ 20 cm de long.

    54La Tapisserie de Bayeux nous dit quelle était la fonction de la herse ; elle semble sur la broderie précéder le semeur mais il faut lire le déroulement des dessins en épisodes qui se succèdent, comme sur une bande dessinée, de gauche à droite. Le labour vient donc avant les semailles qui, en fait, précèdent la herse : le hersage sert à couvrir les semences. Certes, ce n’est pas sa seule fonction et sans doute dans l’Antiquité s’agissait-il surtout de briser les mottes, d’enlever les racines et les mauvaises herbes coupées par le labour ; c’est resté le rôle de la herse dans les régions méridionales. Il existe d’ailleurs une autre méthode pour couvrir les semences : c’est l’araire qui effectue le travail et on sème avant son passage ; c’est ce qu’on appelle « semer dessous ».

    55Mais « semer dessus » comme le fait le paysan de la Tapisserie et enterrer la semence après le labour semble avoir favorisé la diffusion de la herse. Et François Sigaut lie la généralisation de cette pratique dans la France et l’Europe du Nord à une culture : celle de l’avoine. Le hersage ne se comprend bien qu’après des labours à plat ou en planches peu relevées, or c’est le type de labour qui est employé presque toujours pour l’avoine de printemps ; et on voit que les corvées de hersage sont, au début, aux temps carolingiens, exigées au printemps. On notera encore que c’est dans les régions en bordure de la mer du Nord que l’avoine, traditionnellement, tient une place notable dans l’alimentation humaine : c’est aussi dans ces régions qu’apparaissent les premiers témoins de la herse. L’avoine est aussi la meilleure nourriture qu’on puisse donner à un cheval, et culture de l’avoine, élevage du cheval et hersage se trouvent associés ainsi par de multiples liens. La Tapisserie de Bayeux nous montre la herse tirée par un cheval et c’est le cas le plus fréquent dans l’iconographie, par exemple sur la célèbre miniature des Très Riches Heures du duc de Berry où on voit, devant le Louvre, une herse, ici également traînée par un cheval. C’est que le hersage, pour être efficace, doit être effectué à vive allure, de façon à faire tressauter l’instrument, et la rapidité ne peut être attendue que du cheval. Le cheval est parfois, dans les documents, appelé herpicarius, du nom latin du hersage (hirpicare) et, dès la fin du XIe siècle, le concile de Clermont place sous la sauvegarde de la Paix de Dieu les chevaux tramant les herses.

    56L’emploi du cheval dans les travaux agricoles ne s’est pourtant pas limité au hersage : il a progressé tout au long du Moyen Âge et l’aire de sa diffusion finit sans doute par coïncider avec celle de la charrue. Cependant, s’il y a une relation entre l’emploi du cheval et la culture de l’avoine, il faut sans doute tenir compte des innovations introduites dans l’attelage et qui sont probablement pour beaucoup dans la progressive (et relative) victoire du cheval sur le bœuf. La Tapisserie de Bayeux, avec la scène du hersage, montre ce qu’on a appelé « l’attelage moderne » : il consiste dans le collier rigide, le « bourrel », mais aussi dans les brancards ou les traits latéraux attachés au palonnier ; et au nombre des innovations décisives, il faut encore compter le ferrage des équidés.

    57Dans « l’attelage antique », le collier de garrot faisait porter l’effort de traction sur le cou de l’animal, contraint de gonfler les muscles de la gorge pour éviter l’asphyxie : Lefebvre des Noetes l’a mis en évidence, voici déjà cinquante ans : tout changea avec le collier rigide qui pesait non plus sur le cou, mais sur les épaules, point d’appui qui ne gênait plus l’animal et lui permettait de donner toute sa force. La bricole, apparue à peu près en même temps, faisait porter l’effort, elle, sur le poitrail, autre solution préférable au collier de garrot.

    58Le collier d’épaules était connu en Chine, dès le VIe siècle ; de là il serait passé en Europe par l’Asie Centrale, mais André Haudricourt, se fondant sur la linguistique, voit les Slaves attelant avec le collier rigide et ferrant leurs chevaux dès avant le temps de leur dispersion, au VIe siècle. Quoi qu’il en soit, le « bourrel » n’est pas repéré en Occident avant le Xe siècle, à peu près en même temps que les brancards – qui, à la différence du timon antique, permettent d’atteler un seul animal – et que le palonnier – qui, à l’inverse, permet d’atteler autant d’animaux que l’on veut, de front ou en file. Pour les bœufs, le joug de cornes, déjà connu de l’Égypte antique, a mis longtemps à faire son chemin, à vaincre la résistance d’un préjugé hostile : il ne commencerait à devenir fréquent qu’aux XIe-XIIe siècles, sans d’ailleurs empêcher le joug de garrot, amélioré parfois sous la forme d’un cadre de bois, de rester prédominant.

    59Ces diverses innovations ne concernent pas seulement l’attelage de la charrue et de la herse : elles sont capitales pour les progrès des charrois. On ne doit pas négliger le rôle des charrois en agriculture : quand ils sont difficiles, quand le paysan ne dispose que du lourd et antique chariot à quatre roues (qui ne sera pourvu de l’avant-train mobile qu’à la fin du Moyen Âge), ou quand il doit se contenter de la civière, du traîneau, du travois, les transports sont réduits à peu de choses : cela veut dire qu’on utilise peu l’engrais et qu’on peine à rentrer les moissons en gerbes. L’attelage moderne et le cheval ont fait les charrois plus rapides et plus efficaces ; la charrette à deux roues et deux brancards n’est pas moins importante dans l’histoire des techniques agraires que la charrue.

    60L’archéologie a peu de part dans nos connaissances sur l’avènement de l’attelage moderne : tout, ou presque, nous vient de l’iconographie et de la linguistique. Elle retrouve cependant sa place quand il s’agit de la ferrure des animaux. Il n’est guère de sites médiévaux, au moins à partir de l’époque carolingienne, qui ne procure de fers à cheval, et souvent en grand nombre : les fouilles du village provençal de Rougiers en ont ainsi donné cent cinquante.

    61L’histoire du fer à cheval intéresse tout autant et même davantage la cavalerie que les travaux agricoles. On retiendra quand même qu’il n’est fréquemment attesté qu’à partir du IXe siècle, même si des découvertes ont fait remonter son apparition à l’Antiquité. Le ferrage ne concerne pas seulement le cheval : dans le mobilier de Rougiers figurent aussi des fers d’âne, nettement plus petits, et des fers à mulet qui se caractérisent par une forme presque rectangulaire. Quant aux fers à cheval proprement dits, ils appartiennent sur ce site, comme ailleurs, à deux types qui se sont succédé : le fer festonné à six étampures ovales destinées à recevoir des clous en clés de violon ; le fer à rives linéaires, plus large et plus lourd, à crampons forts, aux étampures carrées pour des clous à tête circulaire ou pyramidale, ce dernier type remplaçant progressivement le premier dans la deuxième moitié du XIIIe ou la première moitié du XIVe siècle.

    62Les fers à bœufs ne sont pas non plus inconnus ; on en a trouvé en Angleterre où les comptes domaniaux en font de fréquentes mentions à partir du XIIIe siècle. Plus légers, destinés seulement aux pattes antérieures, ils sont en deux pièces en raison de la forme du sabot ; plus légers en fer, ils étaient de cinq à dix fois moins chers que la ferrure des équidés. En tout état de cause on ne doit pas oublier que le bœuf a non seulement régné sans partage au Sud, mais qu’il a toujours concurrencé le cheval au Nord ; plus économique, plus efficace peut-être pour les labours et les sols lourds, il est préféré au cheval par les agronomes anglais du Moyen Âge et en Angleterre, au moins, on estime que les bœufs sont restés dans l’économie agricole plus nombreux que les chevaux jusqu’à la fin du Moyen Âge7.

    Le mois de juillet

    63Venu de l’Antiquité classique, le thème du calendrier, illustré par les signes du zodiaque et les travaux des saisons ou des mois, connaît un regain de faveur au « plein Moyen Âge » : il participe au décor des édifices religieux, soit sculpté aux voussures ou sur l’architrave des porches, soit peint sur les parois ou sur l’intrados de l’arc triomphal, soit encore réalisé en vitrail ou encore en mosaïque dans les pavements. Perrine Mane a compté – et étudié – quatre-vingts en France et quarante-sept en Italie de ces cycles datés des XIIe-XIIIe siècles, représentant les travaux des mois et qui, en fait et on ne s’en étonnera pas, sont inspirés pour l’essentiel par la vie rurale et le calendrier des travaux des champs. Le mois de juillet est ainsi illustré par la moisson, au moins en France ; juin en revanche l’emporte sur juillet en Italie et c’est assez normal. La scène présente naturellement des variantes mais on peut décrire sans peine l’image classique que les calendriers nous offrent de la moisson : le paysan, pieds nus, mais coiffé d’un chapeau à larges bords est penché, la jambe gauche en avant, légèrement fléchie ; il tient la faucille de la main droite tandis que sa main gauche enserre la javelle qui va être coupée : il s’apprête manifestement non à la trancher mais à la scier et un peu au-dessous des épis, au niveau du tiers supérieur de la tige. La faucille présente plus de variété. On peut estimer sa longueur à une quarantaine de centimètres si on se réfère à la taille du moissonneur et on peut lui donner un manche court, de la taille du poing, mais dans la courbure du fer les différences sont sensibles ; assez trapue, cependant, et souvent en forme de croissant, elle ressemble plus à la faucille pour couper les herbes qu’à l’outil trouvé le plus souvent dans les fouilles, mince et qui dessine plus souvent un segment d’ovale ou d’ellipse qu’un arc de cercle.

    64L’iconographie et les textes sont parfaitement d’accord : la moisson au Moyen Âge se fait à la faucille. Les documents emploient d’ailleurs des expressions comme « scier » ou « fausciller les blés ».

    65Les trouvailles de faucilles sont très fréquentes sur les sites ruraux, presque autant que celles de fers à cheval, et cela dans toute l’Europe, de l’Angleterre aux Balkans, des pays Scandinaves à la Sicile. Elles présentent quelques traits communs, comme l’emmanchement à soie, mais le dessin de la courbure est assez varié ; les dimensions aussi qui se situent entre 25 et 50 cm de longueur. On peine à apercevoir une évolution et personne n’a encore proposé de typologie satisfaisante. Il semble – c’est au moins ce que suggèrent les synthèses rédigées dans les pays de l’Est – que la morphologie évolue depuis une faucille relativement courte et arquée en croissant vers un outil plus long, plus mince, à la courbure moins prononcée et qui par ses dimensions et sa forme permet de scier une gerbe plus copieuse.

    66Autre problème : certaines faucilles sont dentelées, d’autres non, et cela parfois sur le même site et dans le même contexte, ainsi à Rougiers en Provence. Il semblerait, à première vue, que « scier » les blés suppose une lame dentelée : pourtant celle-ci est exceptionnelle dans la documentation iconographique. Il est vrai que la faucille dentelée s’use plus vite et que l’aiguiser demande plus de temps. Mais on s’attendrait à ce qu’elle soit employée dans les pays chauds et secs où les tiges sont plus dures ; il n’en est rien. Les faucilles du village sicilien de Brucato sont lisses, alors que celles du village bourguignon de Dracy sont dentelées, comme aussi celles de Pologne ; et on sait qu’en Normandie, à la fin du Moyen Âge, seigle et froment étaient sciés à la faucille dentelée. Enfin, la sape qui est une petite faux, à lame faiblement incurvée, accompagnée d’un crochet pour maintenir debout les tiges coupées, apparaît en Flandre au XIVe siècle, comme en témoigne l’iconographie. Reste la faux : son utilisation pour les moissons ne serait pas antérieure au XIVe siècle : à cette date, elle est employée en Normandie pour l’orge, l’avoine, les vesces. Elle permet, on le sait, un travail de deux à quatre fois plus rapide que la faucille et on peut s’étonner que son usage ait mis tant de temps à s’imposer pour la moisson, alors qu’elle est connue depuis toujours. Mais elle présente plusieurs inconvénients : elle est chère, elle ne peut être utilisée que par quelqu’un d’expérimenté, elle coupe au ras du sol ce qui n’était pas forcément recherché ; plus brutale que la faucille, elle secoue davantage les épis et elle moissonne les mauvaises herbes avec les céréales ; enfin elle s’accorde mal avec le relief des champs en billons et il est très significatif qu’elle ait d’abord été employée pour l’avoine, semée sur des labours à plat.

    67Il fallait aussi que fùt mise au point la faux moderne. Utilisée depuis l’Age du Fer pour l’herbe des prés, la faux a d’abord une lame courte, peu ou pas incurvée, et dans le même plan que le manche, assez court, avec lequel elle fait un angle droit. Les trouvailles de cet outil primitif se situent pratiquement toutes en Europe centrale où elles sont relativement fréquentes, notamment dans les trésors du haut Moyen Âge. Les courbures de la lame s’accentuent ensuite et la nouvelle faux, avec sa lame oblique, sa potence, son râtelier n’apparaît sans doute pas avant le XIIe-XIIIe siècle.

    68Le battage qui suit la moisson a laissé plus de témoins dans l’iconographie et de mentions dans les documents ou chez les agronomes que de vestiges archéologiques. La technique antique du tribulum, sorte de traîneau dont le plancher était, au-dessous, hérissé de silex, était connue des pays slaves du haut Moyen Âge et elle s’est sans doute conservée en Espagne où on la trouvait encore hier. Mais la zone méditerranéenne pratiquait surtout le dépiquage sous les pieds du cheval, préféré au bœuf : cette technique ne peut laisser comme témoin que l’aire de foulage, surtout si elle était pavée. Le battage au fléau, plus courant au Nord, n’est guère susceptible de laisser davantage de vestiges : le fléau, d’abord un simple bâton, prend ensuite sa structure classique, en deux parties, la batte et le manche ; mais ces deux éléments sont en bois et articulés par un lien ou une courroie de cuir. Toutefois, à Pfaffenschlag, on a retrouvé des pièces de fléau sous la forme d’un anneau de fer engagé dans deux embouts métalliques qui habillaient les extrémités de la batte et du manche. En bois aussi, ou en osier, les autres instruments qui servaient lors du battage ou du vannage, le van lui-même et le crible, mais aussi les pelles, les fourches, les râteaux : il est douteux que les rares fourches en fer, comme celle, à deux dents, trouvée à Saint-Vaast-sur-Seulles (XIVe s.) dans un contexte, d’ailleurs, castrai, aient servi pour les céréales8.

    La grange de Mont-Saint-Jean

    69Sur un plateau de l’Auxois, entre les vallées du Serein et de l’Armençon, des fouilles récentes ont mis au jour un ensemble de bâtiments, datant du XIVe siècle et qu’un document a permis d’identifier comme une exploitation seigneuriale : la « grange » du sire de Mont-Saint-Jean. Dans un enclos de 4 000 m2 la grange se composait d’une habitation associée à une écurie, d’une grande remise, d’une bergerie, et d’un quatrième bâtiment qui était une grange, au sens où nous l’entendons aujourd’hui, c’est-à-dire un édifice destiné à abriter les récoltes et le battage. Tous les bâtiments dont les murs sont conservés sur quelques assises, jusqu’à un mètre de haut, étaient construits en moellons calcaires et couverts de pierres. La grange était le plus vaste : longue de 40 m, large de 17, elle s’ouvrait sur l’un de ses pignons par une large porte charretière, pourvue de chasse-roues, et par deux portes piétonnières. L’espace intérieur s’organisait en trois nefs, dessinées par deux alignements de dés de pierre, bases des quatorze piliers de bois qui supportaient la forte charpente : la nef centrale sur laquelle ouvrait le portail permettait aux charrettes d’accéder dans la grange où les récoltes étaient entassées dans les nefs latérales. La structure caractéristique de l’édifice de Mont-Saint-Jean se retrouve très exactement dans les « granges à piles » conservées dans les villages voisins mais de datation incertaine. On la retrouve aussi dans les granges des abbayes cisterciennes où cependant les piliers sont en pierre et supportent des arcs, comme celle de Vaulerent (aujourd’hui Vollerand à Villeron, Val d’Oise). Cette dernière, construite sans doute au début du XIIIe siècle, avait une capacité de stockage de 6 à 7 000 m3, correspondant de près au volume des récoltes de l’exploitation monastique qui était d’environ 3 500 m3 de blé, en gerbes, et autant d’avoine.

    70Les structures destinées à accueillir les récoltes constituent une des données par lesquelles l’archéologie peut aborder les techniques et la production agricoles. La grange correspond à une moisson en gerbes, et donc effectuée à la faucille (ou à la faux) ; elle implique aussi un battage différé qui peut se faire à la mauvaise saison bien à l’abri et à l’aise sous le toit du bâtiment, à un moment où le calendrier agricole est moins chargé. En outre, conservées en gerbes, les céréales continuent à mûrir. Mais les structures de stockage repérées par l’archéologie sont variées et correspondent à des techniques diverses : ce sont des épis et non des gerbes que l’on conservait dans les greniers sur pilotis et ce sont des grains qui remplissaient les silos enterrés.

    71Sur les sites ruraux du haut Moyen Âge, notamment dans l’aire germanique, à Kootwijk, en Gueldre, par exemple, ou à Warendorf, en Westphalie, la fouille a mis en évidence sous la forme de trous de poteaux les traces de greniers sur pilotis : surélevés et avec sans doute des parois ajourées, ils assuraient une meilleure ventilation et une meilleur dessiccation des céréales qu’en même temps ils mettaient à l’abri des rongeurs. À Warendorf, les traces des poteaux dessinaient des structures hexagonales ou octogonales. Le nom allemand du grenier – speicher, du latin spicarium – dit assez qu’à l’origine on conservait les récoltes en épis. L’iconographie atteste que de tels greniers se voyaient encore en Bohême à la fin du Moyen Âge.

    72Les silos souterrains correspondent à une tout autre pratique. Ces structures sont assez peu évoquées dans l’écrit. Les livres d’agriculture arabes en parlent cependant, sous le nom de matmura, d’où le terme de « matamore » dont on les a parfois appelés en Méditerranée et les documents siciliens mentionnent assez fréquemment, notamment à l’ouest de l’île où la tradition arabe est restée longtemps plus forte, des faveae à grains c’est-à-dire des trous. Mais ce n’est pas seulement dans l’aire musulmane ou même méditerranéenne que l’archéologie repère ces excavations : elle sont présentes partout, y compris en Europe centrale et à toutes les périodes du Moyen Âge, aussi bien aux IXe et Xe siècles, à Saint-Germain-lès-Corbeil dans la région parisienne qu’à Condorcet, aux XVe-XVIe siècles dans les Baronnies.

    73Enterrer le grain dans des excavations avait l’avantage de ne pas coûter cher, tout en assurant sur plusieurs années une assez bonne conservation et en mettant le grain à l’abri des insectes. Il ne semble pas que la préoccupation de cacher les réserves ait prévalu dans cette pratique. Bien sûr, la bonne conservation exigeait une parfaite étanchéité et une fermeture hermétique : il n’était pas question d’ouvrir le silo pour une consommation quotidienne et on peut même penser qu’une fois vidé, on ne le réutilisait pas ou rarement. En tout cas ces fosses sont toujours retrouvées en batteries très nombreuses : vingt-cinq et sans doute plus sur une aire de 35 x 10 m à Saint-Michel-du-Touch (Toulouse) et, à Montaigut, près de Gaillac, les silos constamment recreusés dans le sous-sol d’un bâtiment de pierre du XIIe siècle avaient fini par se recouper. Ces silos sont presque toujours de faible volume, avec des profondeurs atteignant rarement deux mètres, et une forme en bouteille (ou en poire), des fonds plats ou légèrement concaves.

    74Il faut sans doute rapprocher de ces structures les souterrains aménagés qui, plus encore que les fosses, ont excité les imaginations, mais qui apparaissent désormais, après les recherches des archéologues limousins, comme des annexes de l’exploitation agricole, dans la plupart des cas. Si on prend en compte les installations à la surface du sol, on observe des vestiges d’habitat et des silos à proximité de l’accès des souterrains et au-dessus des cavités : on a vu qu’à Pfaffenschlag aussi les souterrains dépendaient des habitations paysannes dont ils constituaient les caves.

    75D’autres silos se présentent comme des constructions au-dessus du sol, même si on y accédait par une trappe depuis l’étage : à Rougiers, on connaît plusieurs de ces petits magasins à grains, aux parois revêtues de mortier. L’un d’eux, d’une contenance de 5 m3 environ, était divisé intérieurement par des cloisons légères et sans doute amovibles. De même, dans le village sicilien de Brucato, un des bâtiments, au sol et aux murs recouverts de mortier, avait également servi de silo dans un premier temps avant qu’on y ouvrît une porte, mais ses dimensions étaient beaucoup plus importantes (5,60 x 3,30 m au sol).

    76Enfin, on ne peut passer sous silence la conservation des grains dans des jarres, selon une coutume très ancienne en Méditerranée.

    77L’archéologie rencontre encore d’autres structures associées à la conservation mais plus rares, parce que liées à certaines conditions climatiques : ce sont les fours à sécher les grains, rencontrés sur plusieurs sites anglais et en Europe centrale. Composés d’un couloir où le feu était allumé et d’une chambre où le grain était entassé, ils assuraient la dessiccation par un courant d’air chaud.

    78On ne fera qu’évoquer les moulins qui ne relèvent plus vraiment des techniques agricoles et qui, au Moyen Âge, sont des entreprises seigneuriales. Cependant il va de soi que le moulin à eau dont la diffusion s’étend entre le IXe et le XIIe siècle, comme le moulin à vent qui apparaît en Provence et en Normandie à la fin du XIIe siècle, constituent un élément majeur dans l’équipement des campagnes : entre autres avantages, ils libèrent la main-d’œuvre pour d’autres tâches que la mouture des grains. On doit pourtant noter la fréquence des meules de moulins à bras sur les sites ruraux, en contradiction avec la banalité, l’interdiction de moudre ailleurs qu’au moulin seigneurial. Sans doute, le plus souvent ces meules, des meules tournantes presque toujours, sont-elles des remplois : la question de leur destination première se pose néanmoins à l’archéologue. S’agissait-il de fraude, d’installations de secours en cas de troubles, ou d’instruments destinés à d’autres aliments que les céréales : le sel ou les farineux9 ?

    Les maisons de Dracy

    79Des fouilles commencées en 1965 ont mis au jour, non loin de Beaune, les maisons d’un petit village disparu à la fin du Moyen Âge. Pour l’essentiel, elles dataient de la première moitié du XIVe siècle : Dracy a été détruit et incendié vers 1360, avant d’être définitivement abandonné au tout début du XVe siècle. Les maisons plutôt massives étaient construites en moellons calcaires, et couvertes également de pierres. L’importance des vestiges, la stratigraphie et divers aménagements de la construction ont permis de leur restituer un étage. Et, en fin de compte, aussi bien par ses matériaux, ses dimensions que par sa distribution, la maison de Dracy apparaît très proche de la traditionnelle maison vigneronne de la Côte-d’Or : elle en constitue comme un prototype. Elle compte trois espaces bien séparés, une pièce à vivre, un cellier et, au-dessus de celui-ci, un grenier. Le cellier, légèrement enterré et bien isolé du toit par le plancher du grenier, recouvert d’une épaisse couche de terre, devait offrir de bonnes conditions pour la conservation du vin. Un espace un peu surélevé au fond de la pièce n’a procuré aucune trouvaille de mobilier ; devant, en revanche, se trouvaient des pichets : c’était là très certainement que se trouvaient les tonneaux ; ils étaient, alors, entièrement en bois, cercles compris et n’ont pu laisser dans l’incendie de la maison que ce témoin négatif.

    80Une bonne part du mobilier évoquait d’ailleurs la viticulture : des coupes à boire très plates évoquant, en plus grand, le tastevin, et surtout tout un outillage très caractéristique : le « fessour » déjà mentionné, une grande serpe à vigne, des serpettes, des couteaux à raisin, et les vestiges d’un entonnoir sous la forme d’un tube de cuivre jouant dans une rondelle du même métal, et portant la trace des clous qui la fixaient sur le fond du récipient en bois.

    81Dracy appartenait au duc de Bourgogne et dépendait de sa châtellenie de Saint-Romain. Les comptes du châtelain pour les années 1347, 1348, 1349 – en ces années, Dracy était encore un village vivant – abondent en mentions concernant les travaux de la vigne. Ils enregistrent les dépenses en salaires et en nourriture, pour les hommes et les femmes qui ont travaillé dans les vignes ducales, et à lire ces livres de comptes, c’est tout le calendrier de la viticulture qu’on voit se dérouler. On a commencé par « épaisseler », c’est-à-dire enlever les échalas (qui s’appellent paisseaux en Bourgogne) pour les aiguiser avant de les replanter plus tard ; on a « amené la genne du treuil jusqu’à la vigne », c’est-à-dire que le marc (la genne), résidu du pressage, a été pris au pressoir (le treuil) pour être épandu dans les vignes, en guise de fumure ; puis c’est la taille, la grande affaire du vigneron. Ce sont les femmes qui ont « essarmenté », épandu la « genne », et porté les sarments au château, mais ce sont les hommes qui ont « fessoré (déchaussé et recouvert les pieds à la houe) du premier coup », qui ont coupé les saules et, avec l’osier, lié les vignes, qui ont ensuite pioché du « deuxième et du troisième coup ». Viennent enfin dans les comptes, les dépenses liées aux vendanges, la viande, le poisson, le fromage, le blé achetés pour la nourriture des vendangeurs, avec la vaisselle de bois, de terre cuite et de verre, les salaires des porteurs et des âniers, les achats de cire et de suif pour graisser la vis du pressoir, les salaires des hommes qui ont nettoyé le pressoir, lavé les cuves, foulé le raisin, des « chapuis » (charpentiers-tonneliers) qui ont relié les tonneaux avec des cercles neufs. Une seule opération importante a échappé au scribe. On peut pourtant être assuré qu’elle était courante en Bourgogne, c’est le provignage, ou marcottage, qui consiste à planter la vigne en pliant au sol et en enterrant des sarments nouveaux issus des vieux ceps. Le provignage donnait une plantation « en foule », tout à fait irrégulière, fort différente des plantations en rangs bien alignés qu’on voit dans les vignobles d’aujourd’hui.

    82On sait tout, semble-t-il, des travaux de la vigne et de l’élevage du vin au Moyen Âge. Ce que les textes ne disent pas, l’iconographie nous le montre. La vigne est très présente dans les calendriers de France et d’Italie : la taille, bien sûr, mais aussi la vendange, occasion pour nous d’observer la forme des paniers tressés, des hottes d’osier, des comportes de bois ; mais aussi le foulage, effectué aux pieds par des hommes nus ou aux vêtements troussés ; et puis la préparation des tonneaux, les cercles et les douves mis en place avec un maillet de bois, et encore « l’ouillage », le remplissage des tonneaux à l’aide d’un vaste entonnoir de bois, quadrangulaire ou rond. On connaît même les cépages, en tout cas beaucoup d’entre eux, l fromenteau qui, dans toute la France du Nord, donnait les vins blancs, le morillon, notre pinot noir, qui donnait les vins rouges, et bien d’autres, comme le gamay, le cépage de notre Beaujolais, condamné au nom de la qualité par les ducs de Bourgogne, ou le savignien blanc dont, vers 1512, l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés achetait 10 000 pieds à Meursault, ou l’auvernat du vignoble d’Orléans, ou le muscat qui, au XIVe siècle, gagne le Languedoc. On n’ignore pas davantage que le Moyen Âge ne savait pas bien assurer la conservation des vins, que, du même coup, on buvait jeunes, qu’en revanche, on cultivait la vigne sous des deux peu cléments, jusqu’en Angleterre et en Pologne.

    83La contribution de l’archéologie à ce riche dossier réside, comme c’est presque toujours le cas, dans l’outillage que procurent les fouilles : essentiellement les serpes et les serpettes. Or, il apparaît avec force que l’outillage n’a pas subi de modification notable depuis l’Antiquité. De celle-ci, le Moyen Âge a poursuivi l’œuvre en étendant la viticulture à l’Allemagne, à la Pologne, mais les Romains, avec la vigne, avaient introduit toutes les techniques qui lui sont liées, y compris les deux grands types de pressoirs, celui à arbre et celui à vis. Le Musée du vin à Beaune ne montre pas d’outillage médiéval, mais les serpes du XIXe siècle qu’on y voit ressemblent comme des sœurs à celles des temps romains avec lesquelles elles voisinent : jusqu’à l’adoption du sécateur, à partir de 1860, les outils du vigneron et les techniques de la viticulture sont demeurés à peu près inchangés. La serpe de Dracy est un outil lourd en fer : large de 15 cm pour une longueur de 21 cm, elle comporte un croc à son extrémité et au dos un talon tranchant. Elle était emmanchée à soie, comme les serpettes également incurvées mais plus petites, qui comme les couteaux, peu pointus, de 10 à 12 cm de long, servaient à couper les grappes. La grande serpe était, elle, utilisée pour la taille de vigne. « Le croc unique sert à l’ablation des sarments superflus ; le taillant coupe la branche à fruit… ; le dos tranchant sert à l’ablation du bois mort » (A. Lagrange). Les serpes médiévales présentent cependant une certaine variété mais il ne semble pas que les variations morphologiques puissent s’expliquer facilement : si la serpe de Dracy a un dos tranchant, celles des calendriers, bourguignons pourtant, de Vézelay et d’Autun n’en ont pas. On a pensé que les bois durs, comme ceux du cépage Gamay, exigeaient un talon. Cultivait-on des Gamay à Dracy, pas très éloigné du village éponyme de ce plan ? Ce n’est pas impossible, mais ce n’est pas non plus prouvé. On a aussi supposé que le dos tranchant ne pouvait être employé dans les vignes aux sarments touffus, comme ceux du pinot gris et des vignes à vin blanc, parce que l’ethnographie a observé une aire de serpe sans talon, en Champagne, Lorraine, Alsace, mais l’iconographie montre des serpes à talon en Alsace…

    84Les outils de l’arboriculture, voire ceux de l’exploitation de la forêt, ne différaient pas sensiblement des outils de la viticulture. On utilisait les serpes à croc et des serpettes arquées pour la taille des fruitiers et pour débroussailler ; c’est, en tout cas, ce que montre l’iconographie. En Occident, les fruitiers étaient principalement le pommier et le poirier ; en Italie s’y ajoutaient le figuier, ainsi que l’amandier, l’abricotier, le cerisier qui finirent par gagner la France. Mais on ne doit pas négliger l’importance du noyer, pour l’huile qu’on tirait des noix partout où l’olivier ne pouvait s’acclimater, et du châtaignier dont les fruits complétaient, voire remplaçaient les céréales dans l’alimentation paysanne.

    85Le rôle de la forêt n’était pas moindre, on le sait. Les documents n’évoquent pratiquement pas la cueillette des baies, des plantes sauvages mais la paléobotanique commence à établir qu’elle tenait sa place dans l’acquisition de la nourriture. La forêt constituait surtout un vaste pacage pour les bêtes, les porcs, les chèvres, mais aussi les bovins, malgré les limitations imposées aux droits d’usage à partir du XIIIe siècle, limitations qui ont, du même coup, accru l’intérêt de la jachère dans les terres emblavées. Les bois étaient également une réserve de fourrage ; les glands et les faînes étaient cueillis pour la nourriture des porcs ; et pour les bovins, les moutons, les chèvres, les feuillages fournissaient un fourrage de complément. La serpe, la serpette – sous des noms divers, qui supposent malgré tout une certaine spécialisation de l’outil, le « trinque basson » (ou trinquebuisson), serpe à couper les taillis, la « vonge », le « goyart », serpe ou faucille à longue hampe, la faucille elle-même, étaient les instruments de cette forme d’exploitation des bois. Mais pour l’abattage des arbres, le seul outil utilisé était la cognée ; la scie était connue mais on ne l’employait qu’à un autre stade du travail du bois. Qu’elle figure sur les documents iconographiques, comme ce célèbre manuscrit de Cîteaux ou l’initiale I est illustrée par un moine abattant un chêne, ou qu’elle vienne des fouilles de Bohême (Semonice), de Serbie (faubourg de Belgrade, XIIIe-XIVe siècle), de Moldavie (Suceava, XIVe siècle), la cognée a toujours un long fer, dissymétrique, perpendiculaire au manche. L’herminette, à lame incurvée, faisant un angle aigu avec le manche, entrait en jeu également, mais surtout pour dessoucher ou extirper les buissons10.

    Le Bon berger de Jehan de Brie

    « Le berger est encore paré noblement de sa houlette, selon son état de berger et comme un évêque ou un abbé de sa crosse, ou comme un bon homme d’armes est bien équipé et protégé quand il a un bon glaive pour la guerre… La houlette est garnie d’un long fer concave et tranchant, avec un embout où l’on fiche le manche long et rond, qui sera en néflier ou autre bois dur et ferme. Le fer concave et un peu recourbé sert à ramasser et « houler » ou jeter de la terre légère sur les brebis : d’où le nom de « houlette ». On peut aussi l’ôter pour corriger les brebis et agneaux. À l’autre bout de la hampe, il doit y avoir un crochet de bois de même nature et essence que le manche lui-même. Par ce crochet du bout de la houlette, on prend, retient et accroche les brebis et agneaux, pour voir s’ils ont la rongne, pour oindre et saigner et faire tenir tranquilles pour appliquer un remède. »

    86En comparant la houlette à la crosse et à l’épée, Jehan de Brie s’est essayé, astucieusement à exalter la condition du berger, pourtant bien déprimée de son temps. Né en 1349, d’abord commis à la garde des oies, puis à celle des pourceaux, ensuite vacher, Jehan de Brie devient berger à l’âge de onze ans ; entré plus tard dans la maison de conseillers du roi, il se vit commander par Charles V l’ouvrage qui nous a conservé son nom : le « Traité de l’estat, science et pratique de l’art de bergerie et de garder oelles et brebis à laine », remis au roi en 1379. « L’art de bergerie » enseigne à conduire le troupeau, à entretenir la bergerie, à connaître le temps et à reconnaître les mauvaises herbes, à soigner les maladies des brebis ; il évoque le calendrier, le temps de la tonte, celui de la saillie, de la castration et précise quel doit être l’équipement du berger. Et donc, la houlette est l’attribut du berger. On le savait, mais Jehan de Brie nous dit quel est son usage. Avec la houlette on jette de la terre à la tête des brebis et c’est pour les ramener dans le droit chemin. Certes, le berger possède un chien ; Jehan de Brie le décrit comme un gros mâtin, au collier armé de pointes ou de plaques de fer pour mieux se défendre des loups. Mais précisément, le rôle du chien n’est pas de guider mais d’abord de garder les moutons, en attaquant tout ce qui est étranger au troupeau et à son maître. Le chien de conduite, pense-t-on, serait un nouveau venu : ignoré de l’Antiquité, il ne serait apparu que tardivement au Moyen Âge, passant d’Islande en Angleterre, pas avant le XIIIe siècle, peut-être seulement au XVe. Jehan de Brie dit bien « quand le berger a un bon mâtin, loyal et hardi, c’est très profitable à la garde des troupeaux ». Il est vrai qu’il enseigne aussi comment dresser le chien à aller chercher par l’oreille les brebis égarées…

    87On a retrouvé un bâton de berger dans les fouilles sublacustres de Charavines (XIe siècle) mais c’est une rencontre exceptionnelle, peut-être unique. Beaucoup plus fréquentes en revanche sur les sites archéologiques sont les sonnailles et les grelots qui aidaient aussi à la conduite des troupeaux. Jehan de Brie parle d’ailleurs du mouton sonnailler, le « clocheman », mais l’on faisait porter aussi des clochettes, les « clarins », ou des grelots, les « dandins », aux vaches, aux chevaux ; on attachait même des grelots, parfois, aux pattes des éperviers et des faucons. C’est pourtant dans les zones d’élevage ovin que sonnailles et grelots ont été, le plus souvent, découverts, ainsi à Brucato, en Sicile, à Montségur dans l’habitat rustique associé au célèbre château des Albigeois, et à Rougiers. Sur ce dernier site, on ne compte pas moins de vingt-sept sonnailles en fer et cuivre, de divers types, petites (3,6 cm de haut) et grandes (jusqu’à 18 cm), avec des battants en fer ou en os, de forme droite, proche du rectangle, ou bombée, ou encore évasée vers le bas à la manière d’une cloche plate.

    88D’autres découvertes renvoient aux soins donnés aux animaux mais elles se réduisent à peu de choses. Le Moyen Âge n’ignorait pas l’art vétérinaire, mais celui-ci s’intéressait surtout aux chevaux comme en témoigne le De Medicine Equorum dû au médecin de l’empereur Frédéric II, lui-même auteur d’un traité de fauconnerie. Jehan de Brie, dans l’équipement du berger, mentionne un couteau pour ôter la « roigne » et des ciseaux pour couper la laine autour des plaies, et il nous entretient longuement des maladies des brebis – des maladies souvent difficiles à identifier – mais ne propose guère que des remèdes de bonne femme. On sait au moins que la pratique de la saignée était courante à la fin du Moyen Âge et pas seulement pour les chevaux mais aussi pour les porcs et les veaux ; et, en Europe Centrale, en Hongrie notamment, on a parfois trouvé des lancettes servant à la saignée. Plus fréquentes dans les fouilles sont les étrilles. En Pologne, une étrille trouvée à Plonsk (XIIIe s.) se présente sous la forme d’une corne dentelée à son extrémité la plus large. Elles sont plus souvent en fer et faites d’un large peigne incurvé (15 à 20 cm) où s’attachent deux ou trois branches qui se réunissent pour s’emmancher à soie : trois exemplaires de ce type ont été trouvés dans les fouilles anciennes du château de Saint-Vaast-sur-Seulles, en Normandie (XIIIe-XIVe s.) qui ont procuré aussi un cure-pied et une trousse de lames rabattables dans le manche et portant une pointe latérale acérée.

    89Certaines structures mises au jour par l’archéologie constituent d’autres témoins de l’élevage, tout en restant d’interprétation délicate. En particulier, on aurait tort de tirer argument de leur absence pour nier la présence des troupeaux. Ainsi, à Brucato, l’habitat ne présentait aucun local qu’on ait pu identifier comme bergerie ou étable ; mais l’élevage ne pouvant être absent d’un terroir sicilien au XIVe siècle, il a paru raisonnable de situer les abris pour les animaux hors du village selon une pratique courante en Sicile. Ailleurs, la présence des animaux se concrétise dans les locaux ou des parties de bâtiments dont la destination ne fait pas de doute. Les dimensions de certaines constructions, observées sous la forme de trous de poteaux comme c’est la règle sur des sites du haut Moyen Age, ne s’expliquent que par la présence des hommes et du bétail sous un même toit. Presque toujours, ces sites offrent deux types de constructions, les unes, très petites et excavées, les autres édifiées au niveau du sol, avec des dimensions souvent importantes, de 12 à 30 m de long sur 6 à 9 m de large, à Warendorf, en Wesphalie par exemple, ou à Kootwijk, en Gueldre. Mais une partie de ces « grandes maisons » était consacrée au bétail ; c’est particulièrement clair quand le sol présente deux aspects différents, avec un espace légèrement déprimé comme cela a été noté à Sleen dans la Drenthe. La présence d’enclos à bestiaux est, en outre, constante dans ces habitats du haut Moyen Âge et témoigne de la place de l’élevage à cette époque.

    90Dans des villages plus récents, en Europe du Nord-Ouest, notamment, il n’est pas rare que la maison, avec des dimensions plus modestes, abrite aussi le bétail sous le même toit que les hommes. C’est le cas de la maison-mixte observée en Bretagne aux XIe-XIIe siècles, et surtout en Angleterre sur tous les sites de villages désertés : la « long-house » anglaise, un des types les plus fréquemment représentés dans les villages médiévaux abandonnés, offre une partition en deux espaces séparés par un couloir ouvrant sur les deux côtés longs du bâtiment. Dans l’un d’eux, la présence du foyer atteste qu’il s’agit de la demeure des hommes ; dans l’autre, une mangeoire de pierre, des drains, un sol chargé de déchets organiques, manifestent souvent qu’on a affaire à une étable.

    91Des habitats, qui furent ensuite désertés, doivent leur apparition à l’élevage transhumant. À partir du IXe siècle, pour les moutons, du XIe pour les vaches, l’estivage s’est développé au point de provoquer, en Provence notamment, un commencement de surcharge pastorale, accompagnée de déboisements excessifs, à la veille de la peste noire. En Auvergne, où les textes mentionnent les burons, dès le XIIIe siècle, Gabriel et Pierre-François Fournier ont repéré les vestiges laissés sur les hauteurs par les habitats qui abritaient les pâtres pendant l’estive : dans le Cantal ce sont de petites agglomérations de pierres sèches ; dans les monts Dore et le Cezallier des cavités creusées dans la pente et disposées en alignement très régulier comme à La Vedrine (Saulzet-le-Froid, Puy-de-Dôme) évoquent des constructions à demi-excavées, couvertes en matériaux légers. Quand dans le passé on s’est hasardé à fouiller ces structures, c’était avec la pensée qu’elles remontaient à la préhistoire ; elles ont pourtant procuré un mobilier – bien pauvre – qu’on peut dater des temps modernes ou de la fin du Moyen Âge11.

    Le porc médiéval

    92Les dessins, les miniatures, les sculptures des chapiteaux représentent fréquemment le porc, soit comme animal symbolique, soit, de façon plus réaliste, comme animal domestique, presque familier. La glandée – les porcs paissant paisiblement dans la forêt sous la conduite d’un porcher – constitue un thème de l’iconographie médiévale, dans les calendriers notamment où le même animal apparaît encore, en décembre, lorsqu’il est abattu et promis à alimenter les ripailles de la fin de l’année. Mais il est figuré de façon si étrange à nos yeux que, pour un peu, on hésiterait à y reconnaître un porc. Rouge ou même noirâtre, il a des pattes longues et fines, un corps maigre, une crinière de soies hérissées sur l’échine, des oreilles courtes mais un groin allongé avec de puissantes canines ; et la queue n’est même pas en tire-bouchon. Bref, le porc médiéval ressemble plus à un sanglier qu’à un cochon d’aujourd’hui.

    93Le Moyen Âge n’a rien ajouté au capital des animaux domestiques légué par l’Antiquité, mais cela ne veut pas dire que rien n’a changé des temps romains à l’époque moderne. L’apparence des animaux, leur taille, leur poids, les races même ne sont pas exactement au Moyen Âge ce qu’ils sont aujourd’hui. La proportion entre les espèces s’est aussi modifiée. Ainsi, la place que tient le porc dans l’iconographie est une nouveauté par rapport à l’Antiquité où c’était plutôt le mouton qui occupait la scène.

    94Sans être aussi éloquents que sur la céréaliculture, les documents médiévaux sont assez riches d’informations sur les animaux domestiques. Les baux à cheptel, par exemple, précisent volontiers la couleur de robe des bovins, comme aussi leur état sanitaire, souvent déplorable, bœufs écornés, aveugles, voire boiteux.

    95Les documents parlent aussi des croisements ou du moins d’achats de reproducteurs étrangers : des seigneurs normands ont ramené des étalons d’Orient, d’autres font venir d’Espagne des chevaux arabes ou importent des béliers de Séville et d’Angleterre ; on sait aussi qu’un frère de Clairvaux ramena des buffles d’Italie au XIIe siècle. Mais on peut penser qu’il s’agit là de recherches isolées, sauf peut-être en ce qui concerne les chevaux et, à la fin du Moyen Âge, les ovins : l’industrie drapante incitait à développer les races riches en laine. Mais il est douteux que le souci d’améliorer les races ait été partagé par la classe paysanne.

    96De même, on croit savoir que les bovins étaient élevés plus pour le travail et le lait que pour la viande mais les données des textes sont trop sporadiques, voire contradictoires, pour autoriser des affirmations tranchées. La basse-cour apparaît peu, également : les gallinacés doivent leur notoriété aux prélèvements seigneuriaux, les « gelines de coutume », au rôle des œufs dans l’alimentation, mais la place des oies, des canards est plus difficile à cerner. Les pigeons sont mieux connus du fait des limitations apportées à leur élevage, souvent réservé à l’aristocratie (le droit de colombier).

    97Dans ces conditions, on est en droit d’attendre beaucoup de la paléozoologie. Ce n’est pas que celle-ci n’ait aussi ses limites : les os animaux recueillis sur les sites d’habitat, dans les dépotoirs notamment, informent d’abord de la consommation en aliments carnés et les proportions entre les espèces ne reflètent pas nécessairement les équilibres de l’élevage. À s’en tenir aux vestiges osseux, la place du cheval risquerait d’apparaître négligeable.

    98La dent des chiens a fait disparaître les os fragiles, ceux des animaux de basse-cour particulièrement, régulièrement sous-représentés dans les analyses ostéologiques. On a observé aussi que le porc était plus abondant sur les lieux de consommation urbaine et monastique que sur les sites ruraux. Mais les proportions entre espèces et leur évolution au cours des siècles ne sont pas les seules données de l’archéozoologie, qui informe aussi de l’apparence des animaux et sinon tout à fait de leurs races, du moins de leur taille, ainsi que de l’âge auquel on les abattait.

    99Sur ce dernier point, les observations sont unanimes : les bovins, les porcs étaient tués à un âge plus tardif qu’aujourd’hui, les bœufs vers quatre ans, sans doute après avoir été utilisés pour tirer la charrue et la charrette ; les veaux sont exceptionnels dans le mobilier ostéologique. Les porcs étaient abattus entre 12 et 18 mois (les « porcs surannés ») parce que, sans doute, leur engraissement demandait alors plus de temps que de nos jours. Les ostéologues constatent aussi, dans l’Europe du Nord, une diminution générale de la taille et du poids des animaux au Moyen Âge : les grands bœufs de la Gaule romaine semblent avoir disparu aux temps mérovingiens.

    100Sur la place relative des espèces, malgré l’impressionnante multiplication récente des recherches ostéologiques, au moins en Europe du Nord et de l’Est, les synthèses sont encore difficiles et ne vont pas sans contradiction. Alors qu’on observait un accroissement de l’élevage bovin en France du Nord jusque vers l’an mil, Maria Dembinska, en fondant son analyse sur les données de 59 sites polonais, voit une progression importante de l’élevage porcin dans la même période, contrastant avec une régression proportionnelle des bovins. Le même accroissement de l’élevage des porcs est observé en Italie où cependant les moutons et les chèvres tiennent toujours la première place, alors qu’ils viennent régulièrement au troisième rang, derrière les porcs et les bovins en Europe du Nord. Il est sans doute prématuré de fonder des courbes sur les données trop ponctuelles dont nous disposons aujourd’hui, mais ce qu’on voit clairement c’est que l’histoire de l’élevage médiéval ne pourra plus s’écrire sans le concours des études ostéologiques12.

    101À l’exception de la charrue (et encore !) et de « l’attelage moderne », le Moyen Âge semble n’avoir rien apporté de vraiment neuf à l’équipement agricole. Il n’a pas non plus enrichi le stock des espèces cultivées ou élevées, sauf tardivement dans le domaine des fruitiers et des légumes. Mais les techniques agricoles ne tiennent pas tout entières dans l’outillage et l’acclimatation d’espèces. Elles résident aussi dans les façons culturales, dans l’enrichissement et l’amendement des sols, dans la sélection des semences et des races, dans les systèmes de culture. Et il faut bien admettre que c’est là, dans ces autres techniques, que se trouvent les progrès accomplis puisque les historiens sont unanimes à reconnaître une explosion agricole au cours du Moyen Âge. Des siècles médiévaux datent, on le sait, la constitution de nos terroirs, une organisation des sols qui a imprimé leurs traits essentiels à nos paysages, tout un ensemble de pratiques qui ont perduré sinon jusqu’à nos jours, du moins jusqu’à hier, jusqu’à la mécanisation. Les progrès accomplis par les techniques agricoles au Moyen Âge se traduiraient notamment par l’extension des terroirs et l’accroissement des rendements. Mais ce sont là des domaines où l’archéologie intervient peu, où se posent en outre des questions complexes, surtout s’il s’agit de dater et de fournir des explications. L’extension des terres cultivées ne fait pas de doute, mais il y a eu plusieurs moments forts dans ce mouvement. Les « grands défrichements » qui connaissent leur plus grand élan au XIIe siècle, ont été précédés de conquêtes plus difficiles à apprécier et qui se situent au haut Moyen Âge, à l’époque carolingienne notamment. Les rendements médiévaux ont, pour leur part, suscité une abondante littérature et alimenté nombre de controverses. On les a estimés très bas encore au temps de Charlemagne, de l’ordre de 2 pour 1, ou à peine plus (il s’agit des rendements à la semence, les seuls que les documents permettent d’approcher). Ces chiffres ont été jugés invraisemblables par certains ; si on en croit l’archéologie expérimentale anglaise, ils seraient inférieurs à ceux de l’Âge du fer ! Les rendements, en tout cas, atteindraient couramment 5 pour 1, au XIIIe siècle, voire dans des exploitations exceptionnellement bien conduites, 8 à 12 pour 1. Quoi qu’il en soit, les progrès sont certains et la production agricole a pu nourrir une population en accroissement constant depuis la fin de l’époque carolingienne, avec une poussée démographique spectaculaire jusqu’à la veille de la peste noire, au XIVe siècle, et cela en réduisant même les disettes. Rendre compte de cet essor, décrit parfois comme un « bond en avant », est plus délicat. On a invoqué le radoucissement du climat du IXe au XIIIe siècle. On a surtout pensé aux techniques agricoles, moins peut-être aux amendements, connus depuis longtemps, ou aux fumures – dont l’insuffisance est restée criante durant tout le Moyen Âge – qu’à la multiplication des façons culturales, qu’à la sélection des semences, et qu’aux progrès de l’outillage, enfin : si celui-ci n’a pas beaucoup changé, comme on l’a vu, il s’est pourtant amélioré pour devenir plus performant et surtout, il est devenu plus nombreux. L’équipement des exploitations a ainsi pu accroître la productivité tandis que les moulins libéraient des bras pour d’autres tâches. Enfin, l’assolement triennal a augmenté à la fois le rendement du sol et la productivité ; la même terre donnait deux récoltes sur trois ans, au lieu d’une sur deux ans ou encore quelques récoltes successives mais suivies d’une plus longue période de repos, comme dans les plus anciens systèmes ; d’autre part, le calendrier agricole plus serré occupait les hommes presque toute l’année et rentabilisait le matériel. Mais l’assolement triennal n’a pas gagné l’Europe méridionale et sa mise en place a été probablement tardive. Les cultures de printemps l’ont précédé, comme appoint d’abord ; la rotation plus ou moins régulière avec le développement des légumineuses qui reconstituent les sols n’était pas encore tout à fait l’assolement : celui-ci associe un calendrier régulier avec une organisation du terroir en soles où toutes les parcelles respectent le même cycle. Ce système n’est vraiment attesté qu’au XIIIe siècle, peut-être fin XIIe. Il correspond à une quasi-monoculture des « blés », au triomphe de la céréaliculture. Il n’est pas sûr, en effet, qu’avant ce plein Moyen Âge, la culture des céréales ait à ce point dominé la production agricole, qu’elle ait eu ce caractère obsédant qu’on lui connaît lorsque les documents commencent à révéler l’organisation des campagnes. Certains indices laissent penser qu’aux périodes antérieures les produits de l’élevage, ceux de la prédation, chasse, pêche, cueillette ont pu concurrencer les céréales dans l’alimentation humaine.

    102C’est là peut-être un point que l’archéologie contribuera à éclairer. Il faut, en effet, se demander quel a été l’apport de l’archéologie au progrès des connaissances et ce qu’il peut être dans l’avenir. Sa contribution, on doit le reconnaître, est encore limitée ; on s’en persuade si on observe le chemin parcouru depuis les grandes synthèses de Marc Bloch, de Grand et Delatouche, depuis celle de Georges Duby, plus récente mais encore antérieure au développement de l’archéologie médiévale : les retouches, les compléments représentent encore peu de choses ; encore ne les doit-on pas tous à l’archéologie. À celle-ci on reconnaîtra le mérite d’avoir, par ses découvertes, précisé l’histoire de la charrue et des labours, d’avoir donné forme à des outils comme la faucille ou la faux dont on ne possédait, avec les noms, que des images plus ou moins fiables, d’avoir donné toute leur place à certaines techniques de conservation des grains, comme les silos enterrés. Mais peut-être les contributions les plus importantes concernent-elles les animaux et les plantes, c’est-à-dire qu’on les doit à l’intervention des sciences naturelles, à la palynologie, à la paléobotanique, à la paléozoologie ; pour mieux dire, car les données restent encore trop rares et trop éparses, on attend de ces recherches les avancées les plus importantes dans le domaine des techniques d’acquisition de la nourriture et de la production agricole.

    103Déjà, pourtant, les greniers brûlés, les silos, les tourbières, les sols noyés, les dépotoirs procurent une masse de matériaux qui commencent à être analysés, à procurer des questions, à apporter des informations neuves. Déjà, on sait que l’orge et le seigle, dans les pays slaves, au haut Moyen Âge, l’emportaient sur le millet qui passait, récemment encore, pour avoir été la céréale dominante. Dans ces mêmes pays, le seigle aurait fait disparaître presque complètement le froment dès le XIIIe siècle, et, alors qu’il était à peu près inconnu des Romains, le seigle aurait largement contribué aussi à la céréalisation de l’Occident. En revanche, on commence à réaliser que les céréales pauvres, millet, épeautre, engrain tenaient encore une place importante à la fin du Moyen Âge, que l’orge n’a pas été, aussi tôt qu’on le pensait, réservé à l’alimentation animale. Le sarrasin, qu’on croyait ignoré avant la deuxième moitié du XVe siècle, est maintenant attesté, de façon encore ponctuelle à des époques plus précoces…

    104Ce ne sont là que des aperçus. Les méthodes nouvelles sont porteuses de bien d’autres données et sont riches de promesses. L’archéologie médiévale, en outre, n’a pas dit son dernier mot ; il ne se passe guère de temps sans qu’une nouvelle fouille sur un site rural n’apporte de nouveaux exemplaires, bien datés, d’outils médiévaux, ne révèle de nouvelles structures d’exploitation, ne procure ces grains, ces macro-restes de plantes, ces os animaux qui, on peut le penser, préciseront petit à petit l’histoire des campagnes médiévales.

    Notes de bas de page

    1 Sur L’oustillement au vilain : Colardelle M., Verdel É.« Les Fouilles de Charavines : un village de l’an mil retrouvé sous l’eau », Dossiers Histoire et Archéologie, no 129, 1988. Guillou A. (sous la direction de), Les Outils dans les Balkans du Moyen Âge à nos jours, Paris, 2 vol., 1996. Lorcin M.-T.,« De l’oustillement au vilain ou l’inventaire sans raton laveur », Revue historique, 274, p. 321-339. Pesez J.-M. (sous la direction de), Brucato, histoire et archéologie d’un habitat médiéval en Sicile, Rome, 1984, 2 vol. Salin É., France-Lanord A., Le Fer à l’époque méroviengienne. Étude technique et archéologique, Paris, 1943.

    2 Sur l’inventaire d’Annapes : Bois G., Crise du féodalisme, Paris, 1976. Daumas P., sous la direction de, Les Origines de la civilisation technique, Paris, 1962. Demolon P., Le Village mérovingien de Brebières (VIe-VIIe  siècles), Paris, 1972. Doehard R., Le Haut Moyen Âge occidental ; économies et sociétés, Paris, 1971. Duby G., L’Économie rurale et la vie des campagnes dans l’Occident médiéval, Paris, 1962, 2 vol. Guérin I., La Vie rurale en Sologne aux XIVe et XVe siècles, Paris, 1960. Higounet C., La Grange de Vaulevent. Structure et exploitation d’un terroir cistercien de la plaine de France. XIIe-XVe siècle, Paris, 1965. Piponnier F., « L’outillage agricole en Bourgogne à la fin du Moyen Âge », 109e Congrès national des Sociétés savantes. Histoire médiévale, tome 2, p. 131-145, 1984. Plaisse A., La Baronnie de Neubourg, Paris, 1961. Un Village au temps de Charlemagne, Paris, 1988.

    3 Sur les labours de Leyre : Bloch M., Les Caractères originaux de l’histoire rurale française, 1er vol., Paris, 1952. Hensel W., Slowianszczyzna Wczesnosredniowieczna (les Slaves au haut Moyen Âge), 8e édition, Varsovie, 1987. Lerche C, The Plough of Medieval Denmark, Tools and Tillage, 1970, p. 131-149. Podwinska Z., Technika upraxy roli w Polsce sredniowiecznej (Techniques agricoles en Pologne médiévale), Wroclaw, Varsovie, Cracovie, 1962. Steensberg A. et alii., Borup Agre. Atlas of Borup Village, Copenhague, 1968.

    4 Sur les socs de Pfaffenschlag : Batt M., Un soc d’araire en pierre mis au jour à Karhaes Vihan en Brennilis, Archéologie en Bretagne, no 25, 1980, p. 43-46. Chernetsov A., On the Origin and Early Development of the East European and the Russian sokha, Tools and Tillage, 1972, p. 34-49. Mugurevics E., Olinkalna un Lokstenes pilsnovadi, Riga, 1977. Nekuda V, Pfaffenschlag, zanikla stredveka ves u Slavonic (Pfaffenschlag, village médiéval désertéprès de Slavonice), Brno, 1975. Smetanka Z., Zivot stredovetké Vesnice, Zaniskla Svidna (la Vie du village médiéval déserté de Svidna), Prague, 1988.

    5 Sur le champ de Lindholm Hoje : Hall D., Medieval Fields, Aylesbury, 1982. Lerche G. et Seensberg A., Agricultural Tools and Field Shapes, Copenhague, 1980. Lerche G., Seensberg A., Ridged Fields and Profiles of Plough Furrows, Ploughing Practices in Medieval and Post-Medieval Times, a Study in Experimental Archaeology, Tools and Tillage, 1986, p. 131-155. Madsen K., Medieval Ploughing Marks in Ribe, Tools and Tillage, 1980, p. 36-45. Noe P., Pre-Medieval Plough Marks in Viborg, Tools and Tillage, 1981, p. 59-64. Ramskou T., Lindholm Høje, a Danish Viking Period Field, Tools and Tillage, 1981, p. 98-109.

    6 Sur un cartulaire du XIIIe s. : Delisle L., Étude sur la condition agricole et l’état de l’agriculture en Normandie au Moyen Âge, Évreux, 1851. Fourquin G., Les Campagnes de la région parisienne à la fin du Moyen Âge, Paris, 1964. Le Roy Ladurie E., Les Paysans du Languedoc, Paris, 1956.

    7 Sur la tapisserie de Bayeux : Démians d’Archimbaud G., les Fouilles de Rougiers, Paris, 1980. Haudricourt A.-G., La Technologie, science humaine. Recherches d’histoire et d’ethnologie des techniques, Paris, 1987. Langdon J., Ox-Shoeing on English Demesnes 1200-1300, Tools and Tillage, 1986, p. 173-179. Lefebvre de Noettes Cdt., L’Attelage. Le cheval de selle à travers les âges. Contribution à l’histoire de l’esclavage, 2e édition, 1931. Lerche G., A Viking Harrow Down a Well, Tools and Tillage, 1982, p. 185-192.

    8 Sur le mois de juillet : Beranova M., Types of Slavic Agricultural Production in the 6th-16 th Centuries A.D., Ethnologia Slavica no 16, 1986, p. 7-48. Sigaut F., Identification des techniques de récolte des graines alimentaires, Journal d’Agriculture traditionnelle et de Botanique appliquée, 1978, p. 145-161.

    9 Sur la grange de Mont-Saint-Jean : Beck P., sous la direction de, Une Ferme seigneuriale au XIVe siècle, la grange du Mont (Charny, Côte-d’Or), DAF no 20, 1989. Chapelot J., Fossier R., Le Village et la maison au Moyen Âge, Paris, 1980. Gady S., Les Souterrains médiévaux du Limousin. Approche méthodologique, DAF no 19, Paris, 1989. Gast M., Sigaut F., sous la direction de, Les Techniques de conservation des grains à long terme, 2 vol., Paris, 1979 et 1981. Heidinga H. A., Medieval Settlement and Economy North ofthe Lower Rhine. Archaelogy and History of Kootwijk and the Veluwe, Assen, Mastricht, 1987.

    10 Sur les maisons de Dracy : Archéologie du village déserté, Paris, 1970. Boschi : Storia e archeologia, Ancône, Rome, 1982. Bourgogne médiévale, la mémoire du sol. Vingt ans de recherches archéologiques, Dijon, 1987. Bucaille R., et Pesez J.-M., L’Habitat paysan en Bourgogne viticole du XIVe au XIXe. Approche anthropologique, Archeologia Médiévale, VII, 1980, p 73-82. Dion R., Histoire de la Vigne et du vin en France, des origines au XIXe, Paris, 1959. Lagrange A., Musée du vin de Bourgogne à Beaune. Catalogue (extrait de Arts et Traditions populaires), 1965. Piponnier F., Une maison villageoise au XIVe : le mobilier, Rotterdam. Papers II, 1975, p. 151-170.

    11 Sur le bon berger Jehan de Brie : Beresford M., Hurst J., sous la direction de, Deserted Medieval Villages, Londres, 1971. Costes P., La Vie pastorale en Provence au XIVe siècle, Études rurales, 1972, p. 61-75. Fournier G. et P.-F. La Vie pastorale dans les montagnes du Centre de la France. Recherches historiques et archéologiques., 1983. Halbout P, Pilet C., Vaudour C, sous la direction de, Corpus des objets domestiques et des armes en fer de Normandie, du Ier au XVe siècle, Caen, 1987. Jean-Brunhes Delamarre M., La Vie agricole et pastorale dans le monde. Techniques et outils traditionnels, Paris, 1985. Le Roy Ladurie E., Montaillou, village occitan, Paris, 1975. Planhol X. de, Le chien de berger ; développement et signification géographique d’une technique pastorale, Bulletin de l’Association des Géographes français, 1969, p. 355-368. Sclafert T., Cultures en Haute-Provence, déboisements et pâturages au Moyen Âge, 1959.

    12 Sur le porc médiéval : Baruzzi M. et Montanari M., Porci et porcari nel Medioevo, Bologne, 1981. Dembinska M., Les changements dans la structure de l’élevage aux VIe-XIIe siècles, Rapports du IIIe Congrès international d’archéologie slave, tome 2, Bratislava, 1980, p. 93-103. Grand R. et Delatouche R., L’Agriculture au Moyen Âge, de la fin de l’empire romain au XVIe siècle, Paris, 1960. Groeman Van Waateringe W. et Van Wijngaarden-Bakker L. H. Farm Life in a Carolingian Village, Assen-Maastricht, 1987.

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    1 Sur L’oustillement au vilain : Colardelle M., Verdel É.« Les Fouilles de Charavines : un village de l’an mil retrouvé sous l’eau », Dossiers Histoire et Archéologie, no 129, 1988. Guillou A. (sous la direction de), Les Outils dans les Balkans du Moyen Âge à nos jours, Paris, 2 vol., 1996. Lorcin M.-T.,« De l’oustillement au vilain ou l’inventaire sans raton laveur », Revue historique, 274, p. 321-339. Pesez J.-M. (sous la direction de), Brucato, histoire et archéologie d’un habitat médiéval en Sicile, Rome, 1984, 2 vol. Salin É., France-Lanord A., Le Fer à l’époque méroviengienne. Étude technique et archéologique, Paris, 1943.

    2 Sur l’inventaire d’Annapes : Bois G., Crise du féodalisme, Paris, 1976. Daumas P., sous la direction de, Les Origines de la civilisation technique, Paris, 1962. Demolon P., Le Village mérovingien de Brebières (VIe-VIIe  siècles), Paris, 1972. Doehard R., Le Haut Moyen Âge occidental ; économies et sociétés, Paris, 1971. Duby G., L’Économie rurale et la vie des campagnes dans l’Occident médiéval, Paris, 1962, 2 vol. Guérin I., La Vie rurale en Sologne aux XIVe et XVe siècles, Paris, 1960. Higounet C., La Grange de Vaulevent. Structure et exploitation d’un terroir cistercien de la plaine de France. XIIe-XVe siècle, Paris, 1965. Piponnier F., « L’outillage agricole en Bourgogne à la fin du Moyen Âge », 109e Congrès national des Sociétés savantes. Histoire médiévale, tome 2, p. 131-145, 1984. Plaisse A., La Baronnie de Neubourg, Paris, 1961. Un Village au temps de Charlemagne, Paris, 1988.

    3 Sur les labours de Leyre : Bloch M., Les Caractères originaux de l’histoire rurale française, 1er vol., Paris, 1952. Hensel W., Slowianszczyzna Wczesnosredniowieczna (les Slaves au haut Moyen Âge), 8e édition, Varsovie, 1987. Lerche C, The Plough of Medieval Denmark, Tools and Tillage, 1970, p. 131-149. Podwinska Z., Technika upraxy roli w Polsce sredniowiecznej (Techniques agricoles en Pologne médiévale), Wroclaw, Varsovie, Cracovie, 1962. Steensberg A. et alii., Borup Agre. Atlas of Borup Village, Copenhague, 1968.

    4 Sur les socs de Pfaffenschlag : Batt M., Un soc d’araire en pierre mis au jour à Karhaes Vihan en Brennilis, Archéologie en Bretagne, no 25, 1980, p. 43-46. Chernetsov A., On the Origin and Early Development of the East European and the Russian sokha, Tools and Tillage, 1972, p. 34-49. Mugurevics E., Olinkalna un Lokstenes pilsnovadi, Riga, 1977. Nekuda V, Pfaffenschlag, zanikla stredveka ves u Slavonic (Pfaffenschlag, village médiéval désertéprès de Slavonice), Brno, 1975. Smetanka Z., Zivot stredovetké Vesnice, Zaniskla Svidna (la Vie du village médiéval déserté de Svidna), Prague, 1988.

    5 Sur le champ de Lindholm Hoje : Hall D., Medieval Fields, Aylesbury, 1982. Lerche G. et Seensberg A., Agricultural Tools and Field Shapes, Copenhague, 1980. Lerche G., Seensberg A., Ridged Fields and Profiles of Plough Furrows, Ploughing Practices in Medieval and Post-Medieval Times, a Study in Experimental Archaeology, Tools and Tillage, 1986, p. 131-155. Madsen K., Medieval Ploughing Marks in Ribe, Tools and Tillage, 1980, p. 36-45. Noe P., Pre-Medieval Plough Marks in Viborg, Tools and Tillage, 1981, p. 59-64. Ramskou T., Lindholm Høje, a Danish Viking Period Field, Tools and Tillage, 1981, p. 98-109.

    6 Sur un cartulaire du XIIIe s. : Delisle L., Étude sur la condition agricole et l’état de l’agriculture en Normandie au Moyen Âge, Évreux, 1851. Fourquin G., Les Campagnes de la région parisienne à la fin du Moyen Âge, Paris, 1964. Le Roy Ladurie E., Les Paysans du Languedoc, Paris, 1956.

    7 Sur la tapisserie de Bayeux : Démians d’Archimbaud G., les Fouilles de Rougiers, Paris, 1980. Haudricourt A.-G., La Technologie, science humaine. Recherches d’histoire et d’ethnologie des techniques, Paris, 1987. Langdon J., Ox-Shoeing on English Demesnes 1200-1300, Tools and Tillage, 1986, p. 173-179. Lefebvre de Noettes Cdt., L’Attelage. Le cheval de selle à travers les âges. Contribution à l’histoire de l’esclavage, 2e édition, 1931. Lerche G., A Viking Harrow Down a Well, Tools and Tillage, 1982, p. 185-192.

    8 Sur le mois de juillet : Beranova M., Types of Slavic Agricultural Production in the 6th-16 th Centuries A.D., Ethnologia Slavica no 16, 1986, p. 7-48. Sigaut F., Identification des techniques de récolte des graines alimentaires, Journal d’Agriculture traditionnelle et de Botanique appliquée, 1978, p. 145-161.

    9 Sur la grange de Mont-Saint-Jean : Beck P., sous la direction de, Une Ferme seigneuriale au XIVe siècle, la grange du Mont (Charny, Côte-d’Or), DAF no 20, 1989. Chapelot J., Fossier R., Le Village et la maison au Moyen Âge, Paris, 1980. Gady S., Les Souterrains médiévaux du Limousin. Approche méthodologique, DAF no 19, Paris, 1989. Gast M., Sigaut F., sous la direction de, Les Techniques de conservation des grains à long terme, 2 vol., Paris, 1979 et 1981. Heidinga H. A., Medieval Settlement and Economy North ofthe Lower Rhine. Archaelogy and History of Kootwijk and the Veluwe, Assen, Mastricht, 1987.

    10 Sur les maisons de Dracy : Archéologie du village déserté, Paris, 1970. Boschi : Storia e archeologia, Ancône, Rome, 1982. Bourgogne médiévale, la mémoire du sol. Vingt ans de recherches archéologiques, Dijon, 1987. Bucaille R., et Pesez J.-M., L’Habitat paysan en Bourgogne viticole du XIVe au XIXe. Approche anthropologique, Archeologia Médiévale, VII, 1980, p 73-82. Dion R., Histoire de la Vigne et du vin en France, des origines au XIXe, Paris, 1959. Lagrange A., Musée du vin de Bourgogne à Beaune. Catalogue (extrait de Arts et Traditions populaires), 1965. Piponnier F., Une maison villageoise au XIVe : le mobilier, Rotterdam. Papers II, 1975, p. 151-170.

    11 Sur le bon berger Jehan de Brie : Beresford M., Hurst J., sous la direction de, Deserted Medieval Villages, Londres, 1971. Costes P., La Vie pastorale en Provence au XIVe siècle, Études rurales, 1972, p. 61-75. Fournier G. et P.-F. La Vie pastorale dans les montagnes du Centre de la France. Recherches historiques et archéologiques., 1983. Halbout P, Pilet C., Vaudour C, sous la direction de, Corpus des objets domestiques et des armes en fer de Normandie, du Ier au XVe siècle, Caen, 1987. Jean-Brunhes Delamarre M., La Vie agricole et pastorale dans le monde. Techniques et outils traditionnels, Paris, 1985. Le Roy Ladurie E., Montaillou, village occitan, Paris, 1975. Planhol X. de, Le chien de berger ; développement et signification géographique d’une technique pastorale, Bulletin de l’Association des Géographes français, 1969, p. 355-368. Sclafert T., Cultures en Haute-Provence, déboisements et pâturages au Moyen Âge, 1959.

    12 Sur le porc médiéval : Baruzzi M. et Montanari M., Porci et porcari nel Medioevo, Bologne, 1981. Dembinska M., Les changements dans la structure de l’élevage aux VIe-XIIe siècles, Rapports du IIIe Congrès international d’archéologie slave, tome 2, Bratislava, 1980, p. 93-103. Grand R. et Delatouche R., L’Agriculture au Moyen Âge, de la fin de l’empire romain au XVIe siècle, Paris, 1960. Groeman Van Waateringe W. et Van Wijngaarden-Bakker L. H. Farm Life in a Carolingian Village, Assen-Maastricht, 1987.

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    • Le Jan, Régine. (2003) La société du haut Moyen Âge. DOI: 10.3917/arco.lejan.2003.01.0285
    • Young, Bailey K.. (2020) Encyclopedia of Global Archaeology. DOI: 10.1007/978-3-030-30018-0_1730
    • Guicheteau, Antoine. Marchaisseau, Vincent. (2021) La genèse du village. DOI: 10.4000/books.artehis.25629
    • (2006) Les Monts d’Aubrac au Moyen Âge. DOI: 10.4000/books.editionsmsh.19463
    • Peytremann, Edith. (2013) The Archaeology of early medieval (6<sup>th</sup>-12<sup>th</sup> century) rural settlements in France. Arqueología de la Arquitectura, 0. DOI: 10.3989/arqarqt.2012.11606
    • Fernández Mier, Margarita. Fernández Fernández, Jesús. López Gómez, Pablo. (2022) Agrarian Archaeology: A Research and Social Transformation Tool. Heritage, 6. DOI: 10.3390/heritage6010015

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