Introduction
p. 427-428
Texte intégral
1La nécessité d’une définition sociale des élites s’impose. A l’historien incombe la tâche à la fois de définir leur configuration sociale et de dater les infléchissements qui ponctuent leur insertion dans les pouvoirs locaux. Sous la notion sociologique d’élites, en effet, l’histoire sociale désigne des réalités sociales fort différentes par leur âge historique, leur rapports au pouvoir et leur culture : élites d’ancien type vaincues par l’autonomisation des pouvoirs fondés sur la compétence mais aussi élites nouvelles. La périodisation des relais, des unes aux autres, est loin d’être établie : les élites traditionnelles s’identifient-elles au pouvoir local au point de le conserver durablement tout au long du XIX° siècle ? Les élites nouvelles, quant à elles, bénéficient d’une intégration nationale plus affirmée ; cherchent-elles à conquérir le pouvoir local, et quand ?
2Reste à définir également le pouvoir local, de la commune au pays et du département à la province et à la région. Comme le groupe social des élites, l’espace du pouvoir local se recompose au fil des décennies. De surcroît, les élites le construisent pour s’y inscrire, du simple village à un arc alpin présenté comme ayant vocation régionale. Leur configuration intègre l’espace comme facteur de définition mais aussi de classement ou de déclassement.
3Deux niveaux d’analyse s’imposent donc : celui des réalités politiques et sociales et celui des représentations — représentations des élites mais aussi de l’espace dans lequel elles s’inscrivent comme encore de la fonction qu’elles s’assignent —, représentations auxquelles réagissent les acteurs de la vie politique, économique et sociale.
4Entre histoire des groupes sociaux et histoire de l’imaginaire social, s’impose un devoir de subtilité et de rigueur dans les approches. De grandes questions de méthode se posent dans ce chantier entre micro-histoire et étude quantitative. Comment établir les corpus ? Faut-il s’en tenir aux annuaires, souvent établis par les élites elles-mêmes et donc facteurs dynamiques de leur genèse et de leur identité ? Dans quelles directions les solliciter ? Et quelles problématiques retenir de l’accumulation de biographies, toujours singulières, auxquelles s’attache la micro-histoire ? Décidément, l’histoire des élites demeure un chantier expérimental d’importance pour l’histoire sociale1.
Notes de bas de page
1 Jacques REVEL (dir.), Jeux d’échelles. La micro-analyse à l’expérience, Paris, Seuil-Gallimard, 1996 ; Christophe CHARLE (dir.), Histoire sociale, histoire globale ? Actes du colloque des 27-28 janvier 1989, Paris, MSH, 1993.
Auteur
Professeur à l’Université Lumière - Lyon II.
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