Chapitre quatre. Les ambiguïtés du postféminisme
p. 83-101
Texte intégral
Du personnel politique à la politique individualiste
1Résumons. Pour Bonnie Dow et Angela McRobbie, l’adage de la deuxième vague féministe, « le personnel est politique », a été dévoyé en un « le politique est personnel », déplaçant les problèmes structurels rencontrés par les femmes dans l’univers privé. Le responsable principal en est le postféminisme qui dévalorise l’action collective et la politique militante au profit d’un cadre individualiste centré sur ego et d’une réduction de toute contrainte sociopolitique au choix personnel. Les politiques féministes se sont transformées en identités féministes, regrettent-elles, lesquelles ne prennent pas acte du social qui contraint ni du collectif qui émancipe. Angela McRobbie, dans The Aftermath of Feminism, produit pareilles récriminations lorsque, complexifiant la théorie du backlash de Susan Faludi, elle signale que les femmes (de surcroît, les jeunes femmes) sont dépolitisées et considère le féminisme comme dépassé. Primat des choix individualistes pour Dow, rejet du féminisme pour McRobbie, le postféminisme peine à trouver une définition stable mais désigne toujours ce moment de l’après-féminisme qui en trahit la dimension collective et « politique » au sens traditionnel. Il est curieux de voir que McRobbie formule ces critiques à l’égard des femmes et de leurs représentations médiatiques des années 1990, tandis que Bonnie Dow, en 1996, l’applique aux héroïnes des années 1970. Celles-ci, de Mary Richards à Dr Quinn, ne formulent en effet que très rarement des enjeux clairement féministes et ne font que laconiquement référence aux mouvements militants. Lorsque c’est le cas, l’hétérogénéité des courants et des pratiques est ramenée à l’étiquette inclusive et réductrice de « féminisme », au singulier. Toutefois, si la politique au sens traditionnel est exclue des séries analysées par Bonnie Dow, cela ne signifie pas que les idéologies féministes et même que les mouvements militants ne traversent pas ces représentations médiatiques, mais c’est moins par la représentation de femmes ouvertement féministes que de femmes aux prises avec des questions féministes que les séries abordent l’émancipation féminine. McRobbie ou Dow ont raison d’écrire que les représentations des années 1990 sont postféministes (au sens où le féminisme aurait accompli son travail et ne serait plus nécessaire), mais à condition d’entendre par féminisme sa définition libérale. Alors, en effet, de Mary Richards à Dr Mike, les représentations télévisuelles, lorsqu’elles s’attachent à montrer la conquête de la sphère publique par les femmes, semblent signifier que la tâche est accomplie et ce, sans qu’il ait été besoin de remettre en cause l’ensemble du système patriarcal. Une telle interprétation des représentations ignore néanmoins, probablement parce que les auteures les considèrent trop peu montrées, les manifestations du féminisme radical : les héroïnes ne sont pas toujours satisfaites de leur vie professionnelle, ni de l’agencement entre public et privé, encore moins de leur vie amoureuse. Maude défend des positions progressistes, par exemple sur l’avortement ; les Drôles de Dames se réapproprient leurs corps et combattent des machos ; Murphy Brown lutte pour ne pas céder aux arrangements inégalitaires qu’on lui propose. Si la télévision, c’est vrai, montre peu de personnages ouvertement féministes et encore moins de luttes féministes militantes, on ne peut pour autant considérer que le féminisme radical est complètement absent des représentations. Sa dimension collective est certes individualisée car la télévision tend précisément à incarner les problématiques sociales dans des héro(ïne)s, mais les questions que le féminisme a soulevées sous-tendent les thèmes traités : agencement du public et du privé, réappropriations des corps, renversement des rôles genrés, critique du patriarcat, anti-essentialisme, exploitation domestique sont constamment présents. Bonnie Dow et Angela McRobbie restent finalement prisonnières d’une conception exclusivement publique et militante du féminisme. Mary Richards n’a pas besoin d’ode explicite à Gloria Steinem pour que les récits de ses aventures soient porteurs de significations sur sa condition de femme active et célibataire. Un autre problème est que, défini par l’individualisme et le primat du choix personnel, le postféminisme est légitimé par une question centrale et passionnante de l’après-féminisme qu’est celle de la victimisation. Comment considérer que les choix individualistes ne sont pas la nouvelle expression d’un antiféminisme que les femmes produisent malgré elles ? Comment éviter de déposséder les femmes de leur capacité d’agir lorsque l’on décrit les oppressions, les normes et les contraintes qui pèsent sur elles, dans une tradition critique sur laquelle plane toujours le fantôme du concept d’aliénation ? Ce « disempowerment » est lui-même issu des diagnostics d’un féminisme critique qui étouffe les femmes sous le poids de structures patriarcales ancrées dans des dominations presque systématiques (à défaut d’être universelles). Cette systématicité se fait au-delà des gradations, alors que l’oppression se ressent moins chez les femmes blanches et économiquement aisées1, principales porte-paroles du postféminisme. La tendance victimisante de certains féminismes provient certainement de leur difficulté à adopter une démarche compréhensive et inductive, et à considérer les pratiques et les choix individuels comme des micropolitiques capables de perturber ce qui est encore trop souvent considéré comme des superstructures. Les analyses par ailleurs très fines de Bonnie Dow souffrent ainsi de ne pas prendre la pleine mesure des subversions culturelles produites par les médiacultures et les comportements individuels (« réels » et représentés).
2Finalement, le problème posé par ces auteures semble plutôt être l’actualisation du féminisme radical à l’aune de la modernité avancée. L’émergence de l’individualisme réflexif et de sa nouvelle conception du sujet n’est pas opposée au féminisme radical, au contraire. Puisqu’il « désigne le refus de tout enfermement identitaire involontaire2 » et qu’il porte en son cœur l’émancipation, il a au contraire permis au féminisme radical de survivre à la deuxième modernité, moyennant quelques adaptations. L’affirmation qui s’est faite à la fin des années 1960 d’un sujet libre et indépendant a été permise par l’émancipation des femmes, qu’elle a encouragée en retour. L’individualisme réflexif n’a pas seulement bouleversé les valeurs holistes (que le féminisme radical a parfois du mal à abandonner sous ses formes militantes), ni la perception de l’individu et de ses possibles, il a aussi changé les rapports sociaux et notamment amoureux. En conclusion, si la politisation des relations intimes telle que l’envisageait le féminisme radical au début des années 1970 a du mal à percer dans les représentations télévisuelles des années 1980, c’est aussi parce qu’elle se heurte à un affaiblissement des modes relationnels d’alors par la réinvention des liens amoureux qu’a permis l’individualisme réflexif. On voit bien en effet qu’à partir des années 1970, les héroïnes peinent de plus en plus à trouver non plus un mari, mais un partenaire qui respecte leur individualité (Murphy Brown) et le rêve de la famille nucléaire se fait timide, quand il n’est pas frontalement attaqué (Roseanne). Dans le même temps, les sociétés étasunienne et européenne connaissent une croissance des divorces, indice d’une précarisation des relations amoureuses. Il est évident que les différentes formes de féminisme des années 1960 et 1970 ne peuvent survivre à de telles mutations sociales sans actualiser leurs objectifs et leurs propositions. Le défi de la réinvention de l’amour doit s’accompagner d’une réinvention des féminismes, cela sans balayer un individualisme réflexif précieux pour l’affirmation des identités et des politiques.
Un féminisme aux influences matérialistes encombrantes pour l’étude des imaginaires culturels ?
3Ce sont les influences matérialistes qui apparaissent poser des limites à l’analyse des productions culturelles : sont souvent convoquées les « vraies » conditions de vie des femmes, comme lorsque la féministe Susan Douglas, dans une approche mimétique qui s’est déjà montrée inappropriée à l’étude des imaginaires, regrette l’inadéquation des représentations médiatiques avec les statistiques de femmes actives. Or, ces influences matérialistes relèvent en réalité bien peu d’études empiriques à l’instar des travaux remarquables de Christine Delphy en la matière, mais trahissent plutôt une démarche prescriptive. Par exemple, Bonnie Dow a beau ne pas nier le potentiel féministe des médiacultures, elle ajoute immédiatement que « l’idéologie [féministe représentée] est forgée à l’aune des besoins de la télévision, et non des besoins des politiques féministes engagées dans le futur des femmes, peu importe leur race, classe, sexualité, ou situation3 » : les industries télévisuelles apparaissent comme une superstructure venant étrangler l’expression de la « réalité » des conditions matérielles des femmes, alors qu’elles devraient être le territoire de leur expression. Le « danger » ne se logerait donc pas dans l’appréciation des moments passés devant ces séries télévisées, mais dans la croyance que les idées peuvent remplacer les luttes matérielles, ce qui reviendrait à adopter une posture postmoderne, célébration aveugle des discours et images médiatiques. Les dernières lignes de Prime Time Feminism sont une définition quelque peu matérialiste du féminisme comme « politiques aux conséquences matérielles qui entraîne des choix difficiles, un travail lourd et un engagement dans l’action collective » – clef de voûte d’une hiérarchisation des actions politiques sur les représentations médiatiques car si « les images peuvent et ont contribué à ce combat, elles ne peuvent pas s’y substituer4 ». C’est bien sur cette question que semble achopper la réflexion de Bonnie Dow. Le problème n’est pas celle de la substitution mais de la composition : il est essentiel d’abandonner cette vision linéaire des luttes sociales, considérant que le matériel précède l’imaginaire, pour envisager ce dernier comme une partie de la charpente. Il ne s’agit pas de penser que matérialité et imaginaire participent équitablement des politiques et encore moins de perdre la notion de causalité, mais d’une part de réintégrer les effets bien réels des imaginaires (ce qu’Edgar Morin a si bien montré) et d’autre part de prendre acte du tournant culturel. À l’inverse, lorsque Bonnie Dow plaide explicitement pour un renforcement de la distinction entre culture et politique5, elle montre la définition très traditionnelle qu’elle entérine de la communication médiatique, qu’elle limite à la rhétorique et à la politique classique. En rejetant la dimension politique de la culture et en balayant la dimension culturelle de la politique, Dow envisage les médias comme une fenêtre aux vitres étroites et déformantes sur les féminismes, à la manière des journaux télévisés sur les faits et les événements. Or, la priorité qu’elle confère aux discours, reléguant les pratiques en arrière-plan, pose d’autant plus problème que l’analyse porte non pas sur des propos publics « réels » mais sur des représentations imaginaires narratives. Cette axiologie nous fait retrouver une vieille distinction entre parole et pratiques alors même que c’est en ces dernières que se morcellent les idéologies : Stuart Hall a bien décrit la dispersion des rapports de classe « dans les agencements fragmentaires d’une myriade d’opinions et de volontés individuelles, de pouvoirs séparés » avant d’être réorganisés en « cohérences imaginaires6 », en vœu de consensus. Le primat des discours pose également problème parce qu’il est erroné de penser que ce que dit un personnage (ou d’ailleurs toute personne « réelle ») est un témoin fidèle de ses actes, un miroir de ses pratiques. Ce décollement entre ce que l’on dit faire et ce que l’on fait vraiment nous rappelle que les idéologies et les pratiques, loin d’être des systèmes parfaits, ne sont parfois cohérentes ni en elles, ni entre elles. Pratiques, idéologies et discours sont saturés de contradictions, tout particulièrement dans des médiacultures enclines au syncrétisme.
4Pour comprendre cette difficulté qu’a Bonnie Dow à saisir les enjeux de l’imaginaire, il faut regarder du côté de son ancrage épistémologique. Formée de son propre aveu non pas à l’étude des médias mais à la rhétorique et à l’analyse des discours publics7, Bonnie Dow considère que la « télévision de divertissement accomplit une partie du travail culturel qui était auparavant produit par les discours publics » et qu’il faut en ce sens analyser « le travail rhétorique de la télévision quand elle négocie les problématiques sociales pour les définir, les représenter et, in fine, offrir des visions de leurs sens et de leurs implications8 ». Une telle étude des séries télévisées et plus largement de la télévision est, on le devine, particulièrement problématique car elle considère que les perspectives de la rhétorique peuvent être saisies presque indifféremment de l’objet étudié : elles seraient valables pour les discours publics du xixe et du début du xxe siècle comme pour la télévision industrielle des xxe et xxie siècles. Enfin, envisager les séries télévisées comme des discours rhétoriques visant à persuader, c’est apposer un filtre prescriptif à l’étude des séries télévisées, dictant ce que la télévision devrait montrer (des femmes émancipées sans prix à payer) au lieu de comprendre le processus démocratique qui est à l’œuvre dans l’hétérogénéité des hégémonies et contre-hégémonies. Réintégré à l’analyse, celui-ci permet d’envisager que la tension entre standardisation et innovation pour fédérer des publics très différents leur permet précisément de dialoguer. Les recherches de Bonnie Dow souffrent ainsi de ne pas être sous-tendues par une analyse socioéconomique des chaînes de télévision et/ou des représentations médiatiques, un écueil imputable à son inscription dans le champ des communication studies anglosaxonnes qui tendent à négliger, selon Douglas Kellner, « la spécificité des textes culturels, leurs effets et leurs usages par les publics [et à] se concentrer sur une partie seulement du circuit de communication et de culture9 ». En somme, si les tendances hégémoniques des productions télévisuelles produisent effectivement une réduction et une simplification des problématiques et des courants féministes comme le défend Bonnie Dow, ce dont ne peut se défaire une analyse des industries culturelles, ses travaux souffrent en retour de ne pas proposer une démarche compréhensive des médias de masse, s’inscrivant dans des logiques de production industrielles et culturelles. Une telle démarche devrait permettre de compléter, au côté pile de l’hégémonie, de la standardisation et des normes, le côté face de la contre-hégémonie, de l’innovation et des réinventions quotidiennes, trop souvent oubliées. Que la métaphore monétaire ne trompe pas : côté pile et côté face, pour autant qu’ils sont dans des processus de dialogie et de compromis, ne sont pas sur un pied d’égalité mais dans une lutte constante de définitions du monde. Pour résumer, cette difficulté à analyser les héroïnes de séries télévisées comme des incarnations idéologiques des définitions du monde provient d’une triple erreur : d’abord d’une démarche prescriptive, qui tend à dire ce que les médias devraient montrer plutôt que de favoriser une compréhension des tensions idéologiques ; ensuite de l’insuffisante prise en considération de la dimension politique et humaniste de l’individualisme réflexif, entendu seulement comme l’arrachement du sujet au combat politique ; enfin, d’une définition anachronique du sujet, perçu comme maillon du collectif, et non comme individu autonome, capable de micropolitiques et de subversions quotidiennes.
Un concept nébuleux pour une fracture générationnelle
5Au fond, le postféminisme est un champ plus labile que celui décrit par Bonnie Dow ou Angela McRobbie : il est avant tout un mouvement contradictoire et un concept nébuleux, marqué par une forte fracture générationnelle. Le postféminisme est envisagé tour à tour comme un backlash, comme une branche de la troisième vague ou comme étant en articulation avec le post-modernisme, le post-structuralisme et le post-colonialisme. Se confondant quelquefois, mais pas toujours, avec l’antiféminisme, le postféminisme décrit dans l’après-féminisme la libération parfois joyeuse « des chaînes idéologiques d’un mouvement féministe dépassé et sans espoir10 ». Célébration d’un individualisme souvent consumériste (dont les garde-robes des héroïnes de Sex and the City sont de fidèles témoins), il faut rappeler que le postféminisme ne fait pas partie des mouvements politiques féministes mais a été le terme apposé par ces derniers sur un ensemble de représentations socioculturelles affleurant au milieu des années 1980.
6Dans le champ académique, l’expression apparaît en 1987 sous la plume de Deborah Rosenfelt et Judith Stacey pour désigner l’émergence d’une culture et d’une idéologie qui « incorpore, révise et dépolitise un bon nombre des questions fondamentales de la deuxième vague11 ». Plus largement, le postféminisme tend désormais à se « cristalliser autour de questions comme la victimisation, l’autonomie et la responsabilité12 ». Humanisme libéral qui refuse de considérer les femmes comme des proies passives et qui tente de trouver une place aux hommes, le postféminisme pose en son épicentre la question maintes fois répétée par les personnages : peut-on tout avoir, relation amoureuse et vie professionnelle épanouissante, féminité et féminisme ? Parce que les héroïnes postféministes étudient le problème de l’héritage du féminisme de la deuxième vague alors même que tous ses objectifs n’ont pas été atteints, et que ceux qui l’ont été restent fragiles, elles se sont attiré les foudres des théoriciennes féministes qui y voient une trahison des idéaux défendus durant les années 1960 et 1970. L’expression des peurs et des doutes des personnages féminins est perçue tantôt comme une réaction antiféministe aux avancées de la deuxième vague, tantôt comme une fracture générationnelle discutant les obstacles persistants.
7Au cœur de cette controverse féministe, un premier courant composé notamment de Susan Faludi, Tania Modleski, Andrea Press et Angela McRobbie envisage le postféminisme comme un backlash, un antiféminisme qui renie les avancées de la deuxième vague. Pour Modleski, le postféminisme nous ramène dans un univers pré-féministe13. Andrea Press utilise le terme pour définir un esprit antiféministe dans les séries des années 1980, arguant que ce mouvement signe « un retrait des idées féministes qui dénaturalisait le rôle traditionnel des femmes dans la famille et marque à la place une ouverture toujours plus grande aux notions traditionnelles de féminité et de rôles féminins14 ». Pour Susan Faludi et Angela McRobbie, postféminisme et backlash se confondent et doivent leur succès à leur capacité à se faire passer pour ironie quand, en réalité, ils attaquent les laborieuses et fragiles victoires égalitaires de la deuxième vague. Dans cette stratégie, le rôle des médias est central car ils convainquent les femmes de la désuétude du féminisme en montrant des héroïnes malheureuses du fait de ses accomplissements (Bridget Jones, Ally McBeal…), blessure profonde que seul le grand amour pourra guérir. Le chapitre « Postfeminism and Popular Culture » d’Angela McRobbie est paradigmatique de ce mouvement. En complexifiant l’hypothèse du backlash de Susan Faludi, McRobbie identifie le paradoxe d’une représentation massive à partir des années 1990 de personnages principaux féminins et d’une « accumulation de réponses ambivalentes et apeurées15 ». Elle voit dans la figure de la blonde ambitieuse (Bridget Jones, Ally McBeal, Sex and the City) l’archétype d’un nouvel antiféminisme soutenu par l’individualisme contemporain. L’hypothèse de McRobbie est celle d’une fracture générationnelle entre les femmes, à la manière de la fracture de classe irréconciliable chez Simone de Beauvoir, qui prévaut sur toute considération féministe et rend le féminisme lui-même désuet pour l’unique raison qu’il date de quelques décennies. L’« idéologie cool » se nourrit de la jeunesse et prône le présentéisme. À cela s’ajoute, pour McRobbie, une « relation non critique aux représentations sexuelles produites commercialement [qui] invoquent une hostilité à assumer des positions féministes du passé, pour adhérer à un nouveau régime de significations sexuelles basées sur le consentement féminin, l’équité, la participation et le plaisir, libre de toute politique ». Pour être libre de boire et de fumer, de faire la fête et l’amour avec qui bon leur semble, sont requis des femmes le silence public et la retenue de toute critique. Ces représentations semblent dire que les femmes réussissent, non pas grâce aux avancées féministes de la deuxième vague, mais grâce aux vertus de l’individualisme auquel elles ont enfin accès. Au diagnostic de backlash, Bonnie Dow préfère le terme de « postféminisme » pour désigner quelque chose de sensiblement différent que les regrets générationnels de McRobbie. Selon elle, dès Murphy Brown en 1988, les héroïnes postféministes ne désavouent pas les victoires du féminisme mais y portent des critiques conjointement mélioratives et péjoratives qui interrogent l’héritage de la deuxième vague. Mais, ignorant les effets structurels, le postféministe remet aux seules femmes la responsabilité des inégalités de genre persistantes, suggérant que celles-ci ne peuvent être résolues que dans les choix individuels et les subtils dosages entre privé et public.
8De nombreuses critiques ont été formulées à l’égard de cette définition du postféminisme, critiques qui privilégient une approche moins nostalgique. Une frange des chercheur. e. s envisage plutôt ces représentations médiatiques comme une interrogation socioculturelle de l’héritage du féminisme. Une première erreur, en effet, est de n’imaginer le postféminisme que dans son « post », c’est-à-dire comme une réponse à, ou une suite imparfaite de la deuxième vague, sans prendre en considération les grandes mutations sociales qu’ont connues les sociétés occidentales ces cinquante dernières années, et dans lesquelles le féminisme lui-même a joué un rôle majeur. Or, pour Stephanie Genz et Benjamin Brabon, « la pluralité et l’“impureté” du postféminisme [ne peuvent être comprises que comme] symptomatiques d’une modernité avancée encline à la contradiction et d’un environnement socioculturel changé, caractérisé par des discursivités complexes et des interactions contextuelles16 ». Le postféminisme, arguent-ils, n’a pas été seulement enfanté par le féminisme mais est aussi lié à d’autres mouvements comme l’individualisme libéral ou le consumérisme, auxquels on peut ajouter, angle mort de leur ouvrage, la réflexivité.
9En extrayant le postféminisme de son contexte socioculturel pour ne l’envisager que comme une réponse à la deuxième vague, Faludi, Modleski, McRobbie et, dans une moindre mesure, Dow, peinent à considérer la culture populaire comme une sphère publique. Elles la soupçonnent, au contraire, de pervertir des formes supposément pures du féminisme, produisant toujours une opposition entre l’authenticité politique et la culture populaire. Rachel Moseley et Jacinda Read s’opposent à cette exaltation nostalgique de la deuxième vague qui se fait au détriment d’une compréhension des imaginaires médiatiques comme médiateurs des controverses sociales : elles plaident pour explorer les manières dont les représentations médiatiques agissent comme « l’un des territoires de production et d’exploration du féminisme17 ». Dit autrement, il apparaît difficile de calquer mécaniquement des mouvements féministes eux-mêmes hétérogènes et contradictoires sur des représentations médiatiques qui sont forcément polysémiques. Amanda Lotz souligne, à raison, qu’il est « impossible d’argumenter de façon persuasive que telles séries sont féministes ou antiféministes du fait de leur nature contradictoire et de leur usage sophistiqué d’appareils narratifs, comme de la complexité de leurs formes textuelles et du contexte de programmation dans lequel elles circulent18 ». On peut ajouter qu’un amalgame handicape régulièrement les réflexions sur le postféminisme : peu d’auteures distinguent en effet la représentation de la légitimation. Or, ce n’est pas parce qu’un programme télévisuel aborde un sujet qu’il le légitime. Évoquer, par exemple, les problèmes de l’articulation de la vie professionnelle avec la vie privée n’est pas forcément légitimer cette distinction patriarcale. La norme étant ce qui relève de l’évidence, c’est d’ailleurs déjà dénaturaliser cette opposition que de la problématiser. De telles thématiques signifient plutôt la prise en charge de problèmes caractéristiques des esprits du temps pour les discuter, de façon parfois progressiste et parfois conservatrice, dans une sphère publique médiatique dont le registre est celui des imaginaires. Donner représentation à une idéologie n’est donc pas nécessairement valoriser ladite idéologie, une affaire qui reviendra aux modalités de la représentation en question, comme on le sait bien, par exemple, à propos des représentations des personnages queer dont il ne suffit pas qu’ils soient montrés pour être acceptés, valorisés ou subversifs.
10De telles critiques réintègrent conjointement les logiques de production des séries télévisées et leur participation à la sphère publique. Ainsi remises en perspective, les approches de Susan Faludi et d’Angela McRobbie témoignent de la difficulté d’une certaine frange de la deuxième vague à s’actualiser aux problématiques d’une modernité désormais bien avancée et que ladite deuxième vague a pourtant encouragée. Lorsque Faludi écrit de façon péremptoire que « tout mouvement ou philosophie qui se définit comme “post” ce qui était là avant est voué à être réactionnaire19 » ou lorsque McRobbie déplore le manque d’activisme collectif des nouvelles générations sans jamais s’interroger sur les raisons pour lesquelles ces dernières s’en détournent, elles tendent à donner raison à Benz et Brabon pour qui « les modèles et les cadres interprétatifs de l’action politique comme les entend la deuxième vague doivent être étendus pour inclure les différentes capacités d’agir et positions subjectives que les individus prennent dans la culture du xxie siècle20 ». Le postféminisme tel que l’entend Bonnie Dow est là encore plus subtil que les définitions antiféministes de Faludi, Modleski et McRobbie : le courant admet de tels anachronismes en suggérant que les femmes résistent à s’identifier comme féministes car elles n’en voient pas le rapport avec leurs conditions matérielles d’existence contemporaines : « les changements d’attitude à l’égard du féminisme ne représentent pas toujours un rejet de la libération des femmes mais plutôt un ajustement à son égard21 ». L’enquête empirique de Pamela Aronson confirme cette perspective, montrant que si les femmes rechignent à s’identifier explicitement comme féministes, elles approuvent sans concession les linéaments égalitaires du mouvement22. Si l’hypothèse d’une fracture générationnelle est largement répandue dans ces travaux, les causes divergent : pour Benz et Brabon, elle est encouragée par les difficultés de la deuxième vague à s’adapter aux problématiques de la modernité avancée. Le postféminisme considèrerait le féminisme accompli parce que les héroïnes représentées peinent à l’appliquer tel quel à une époque désormais réflexive et individualiste. En ce sens, en effet, si McRobbie critique beaucoup les jeunes générations, elle peine en retour à bien vouloir tenter quelques redéfinitions et critiques du féminisme de la deuxième vague. Cela ne signifie pas pour autant que le postféminisme est antiféministe. Moseley et Read ont bien compris que les représentations de trentenaires anxieuses ne sont pas une trahison des idéaux féministes mais la confrontation de ces derniers avec de nouvelles générations : « si Ally McBeal intéresse des vingtenaires et des trentenaires pleines d’anxiété, c’est parce qu’elle dramatise avec efficacité les problèmes, les luttes et les contradictions que rencontrent ces jeunes femmes contemporaines23 ». En proposant une lecture plus conflictualiste, Moseley et Read parviennent à éclairer d’un jour nouveau la dimension profondément générationnelle du postféminisme qui s’exprime dans ces conciliations hésitantes entre « désirs féministes et désirs féminins24 ».
Le postféminisme, courant postmoderne ?
11Affranchie de la définition réductrice d’une politique féministe forcément traditionnelle, collective et publique, la réflexion sur le postféminisme s’attache à comprendre les contradictions contemporaines que rencontrent les femmes dans les représentations médiatiques. La plus forte d’entre elles est la conciliation difficile du féminisme avec une féminité qui n’est plus essentielle et avec laquelle on peut désormais jouer. Puisqu’il « célèbre et comprend les modes conventionnels de féminité comme n’étant pas nécessairement en conflit avec le pouvoir féminin25 », le postféminisme repense les tensions entre féminisme et féminité. En conséquence, pour Moseley, les représentations sont postféministes lorsqu’elles tentent de réintégrer aux politiques féministes une féminité traditionnelle, sans pour autant l’exalter comme essentielle. Cette proposition, parmi les plus intéressantes, montre que les représentations font paradoxalement le pari d’un féminisme perturbant le système patriarcal et affirmant la labilité des genres sans pour autant remettre en cause la féminité. Cette approche permet de comprendre des héroïnes aux qualités syncrétiques comme Murphy Brown, physiquement féminines (cheveux longs et blonds, talons hauts, bijoux, foulards…) et comportementalement masculines (austères, franches, déterminées, ambitieuses…), mais il lui manque une dimension réflexive que Myra MacDonald appelle « une conscience de soi parodique26 » : les individus jouent des codes genrés qu’ils dosent à leur façon. Une héroïne comme Samantha Jones (Sex and the City) mélange par exemple une apparence très féminine avec un comportement sexuel codé masculin. Dans la mesure, néanmoins, où les personnages comme Roseanne qui inversent ces caractéristiques (comportement féminin et apparence masculine) ne sont pas qualifiés de postféministe, on voit bien la dimension conservatrice du mouvement qui refuse d’abandonner les codes féminins classiques, même s’il les teinte de post-modernisme en en révélant les artifices, comme l’a bien montré Niall Richardson à propos de Bree van de Kamp27 (Desperate Housewives). Pour ces auteur.e.s, le postféminisme n’est pas backlash parce qu’il ne dénonce pas les avancées de la deuxième vague et parce qu’il n’essentialise pas les qualités féminines ni forcément ne les exalte. En revanche, l’ironie et le flottement de sens du post-modernisme qu’il récupère lui permettent de se demander si l’on peut être féminine et féministe, sans considérer la féminité comme absolue (bon nombre d’héroïnes jugées postféministes ont des traits masculins comme Murphy Brown) ni essentielle (leur féminité est distanciée, graduelle et parfois ironique comme celle de Buffy). Cette dimension est importante car elle provient directement d’un individualisme réflexif que les théoriciennes critiques peinent à intégrer à leurs écrits. Pour saisir pleinement les représentations des années 1990 comme Buffy ou Alias, on ne peut ignorer l’exagération de leurs marques de féminité lorsqu’elles combattent en pantalon de cuir ou se griment en bombe sexuelle. Cela vaut également pour des séries plus « réalistes », dont les personnages ne sont ni super-héroïnes ni espionnes : quand Carrie Bradshaw (Sex and the City) réalise qu’elle ne peut pas acheter son appartement car elle a dépensé 40 000 dollars dans de luxueuses chaussures, l’exagération du consumérisme contemporain accentue une féminité déjà bien parodiée par le défilé de mode quotidien qu’elle performe. Cette conciliation, sinon impossible en tout cas difficile, de la féminité avec le féminisme est paradigmatique de la question clé de voûte du postféminisme : peut-on tout avoir ?
12Pour analyser ces représentations, il faut s’éloigner d’une approche prescriptive articulée autour du concept de « rôles modèles ». Une telle herméneutique, hégémonique dans la critique féministe étasunienne de la télévision, est vouée à l’échec car elle est basée sur l’hypothèse d’effets directs et ne rend pas fidèlement compte de la complexité narrative. Comme le résume brillamment Amanda Lotz, les séries requièrent plutôt « un engagement critique avec la question de savoir pourquoi elles entrent en résonance avec leurs publics, plutôt que de décrier catégoriquement le potentiel féministe d’un personnage parce que sa jupe est trop courte, parce qu’elle est trop mince ou parce qu’elle admet ne pas trouver un épanouissement total dans son travail28 ». En nous enjoignant de nous détacher de la vision antiféministe du postféminisme pour embrasser une démarche compréhensive de ce mouvement, Ann Brooks en propose une définition qui prend toute sa pertinence dans son application par Amanda Lotz. Pierre angulaire des analyses des héroïnes des années 1990, la définition est longue mais mérite d’être citée dans sa totalité : le postféminisme « se détache conceptuellement des débats sur l’égalité dans le féminisme pour s’intéresser à ceux sur la différence. Il produit fondamentalement, non pas une dépolitisation du féminisme, mais un tournant politique dans les théories et les concepts du féminisme. Le postféminisme engage un dialogue critique avec les précédents concepts et les précédentes stratégies politiques et théoriques féministes, cela du fait de son inscription dans d’autres mouvements sociaux progressistes : le postféminisme exprime ainsi l’intersection du féminisme avec le post-modernisme, le post-structuralisme et le post-colonialisme. En tant que tel, il représente un mouvement dynamique capable de contester les cadres modernistes, patriarcaux et impérialistes. Il facilite ainsi une conception plus étendue et pluraliste de l’application du féminisme, tout en répondant aux demandes des cultures marginalisées, diasporiques et colonisées d’un féminisme non-hégémonique capable de donner une voix aux féminismes locaux, indigènes et post-coloniaux29 ». Pour Amanda Lotz, le postféminisme est la troisième sous-branche du féminisme de la troisième vague, une troisième vague attentive aux diversités des identités féminines (des problématiques de race jusqu’à la variété des sensibilités féministes), comprenant que l’oppression vécue par une femme n’est pas la même que celle vécue par une autre. Cette troisième mouvance, nouvelle voie pour le renouvellement du féminisme de la deuxième vague par son attention aux problématiques de choix, de diversité, d’engagement, de subalternité, d’identités de genre et de déconstruction semble vouloir lier théorie et pratique, un problème fameux des mouvements féministes depuis les visions excluantes de la deuxième vague et depuis le rejet postféministe de la théorisation. Dans cette perspective, le postféminisme est un mouvement qui prend acte de la complexification de la question de l’émancipation, du fait de la multiplication des générations et des demandes de reconnaissance.
13Ces précisions faites, le qualificatif de « postféministe » appliqué, par exemple, à Sex and the City prend un tout autre sens : celui, non pas d’une trahison de la deuxième vague du fait du port régulier de jupes, mais d’interrogations de l’héritage de la deuxième vague et du renouvellement du mouvement féministe en fonction des envies et des attendus très différents de ses quatre personnages principaux, plaçant la diversité des approches féministes au cœur de son récit. Amanda Lotz conclut son plaidoyer pour un postféminisme englobé dans la troisième vague en énumérant ses quatre principaux attributs : « l’exploration des diverses relations au pouvoir que les femmes occupent [;] la représentation de solutions variées et du relâchement de l’activisme [;] la déconstruction des catégories binaires de genre et de sexualité désormais vues comme flexibles et indistinctes, [enfin] l’examen par les séries de situations illustrant les luttes contemporaines qui font face aux femmes et aux féministes30 ». Les héroïnes postféministes veulent concilier ce qui a traditionnellement été construit comme inconciliable, cela en faisant un minimum de compromis : lorsqu’un juge estime indécemment courtes les jupes qu’Ally McBeal porte au tribunal, l’avocate refuse de céder à ce qu’elle considère être une atteinte à sa liberté et s’obstine à les porter jusqu’à être placée en détention pour insulte à la Cour. Aussi Lotz propose-t-elle l’expression de « nouvelle “nouvelle femme” », en référence à la « nouvelle femme » des années 1960 et 1970, pour désigner les héroïnes postféministes des années 1990. Parce qu’elles refusent « de distinguer et de choisir entre public et privé, entre identités féministe et féminine, [entre] vie professionnelle et vie domestique31 », des personnages comme Ally McBeal ou Carrie Bradshaw mettent au cœur de leur construction individualiste l’envie postféministe de « tout avoir » : carrière et romance, bureau et chambre à coucher, sérieux et féminité. Mais tout avoir sans faire de compromis ne peut se faire qu’en embrassant la contradiction. Ally McBeal et Carrie Bradshaw sont névrosées, dépriment un peu, se bercent d’illusions, hallucinent, imaginent des mondes parallèles et, finalement, revendiquent le droit à la contradiction et à l’hétérogénéité, loin de la femme au foyer parfaite des années 1950 et de l’idéal de la working woman. Le postféminisme disqualifie justement les héroïnes modèles et privilégie des femmes incertaines et imparfaites, gaffeuses et pourtant ambitieuses, professionnelles et sérieuses. La « nouvelle “nouvelle femme” » est ainsi composée des deux grandes dimensions de la deuxième modernité : côté face, elle s’inscrit dans l’individualisme réflexif car elle est compétitive, consumériste, séduisante, ambitieuse, pleine d’esprit, déterminée et ouverte ; côté pile, elle subit l’acidité de la liquidité moderne car elle est névrosée, peu sûre d’elle, compulsive, superficielle et vit des épisodes de déprime32. Les héroïnes sont déraisonnables car la réalité elle-même n’est pas unie et stable mais hétérogène et fuyante, construite par les individus qu’elle construit en retour. En ce sens, Ally McBeal a beau être perdue, elle est en fait un personnage très actif : faisant des erreurs, recommençant, s’entêtant, s’obstinant, elle ne cesse de devoir préférer telle ou telle voie, envisageant le chemin comme la véritable quête. Elle incarne l’injonction faite aux individus par la deuxième modernité de devoir choisir constamment. L’expérience individuelle prend ainsi une place toute nouvelle à partir des années 1990, et montre son potentiel politique dans sa richesse, sa diversité et sa logique ascendante : les vies sont faites de décisions individuelles sans nier les trajectoires sociales, les inégalités des chances ou les structures : Carrie Bradshaw (Sex and the City) s’entête contre un Mr Big à la distance patriarcale ; Ally McBeal est victime de harcèlement sexuel ; Lorelai Gilmore (Gilmore Girls) fuit sa famille bourgeoise ; enfant, Sydney Bristow (Alias) a été conditionnée par son père pour devenir, comme lui, une espionne ; le destin de la Tueuse a désigné Buffy bien malgré elle. Les héroïnes, aussi individualistes soient-elles, ne sont pas sans structures mais la « nouvelle “nouvelle femme” » est plus troublée que la « nouvelle femme » ne l’était car, embarquée dans les introspections de la deuxième modernité, elle pense « l’entre-deux et l’incohérence comme un territoire d’épanouissement33 ». Pour l’héroïne postféministe, le problème n’est plus la conquête de la sphère publique mais de voir les luttes émancipatrices se réfugier dans la sphère privée et notamment dans la structure du couple. Cette dernière est interrogée par le postféminisme qui ne remet pas en cause les positions comportementales du masculin, même s’il remodèle les masculinités en favorisant celles qui sont douces et en réservant les manifestations virilistes aux ennemis. De façon globale néanmoins, les personnages masculins semblent n’avoir que peu de responsabilités dans les inégalités persistantes et l’idéologie postféministe des héroïnes des années 1990 ne les intègre que très rarement dans les problématiques émancipatrices. Cela est bousculé à partir des années 2000, lorsque des héroïnes quadragénaires commencent à formuler des reproches féministes à leur époux et à chercher, auprès de partenaires à la masculinité plus douce, des formes de relation pure.
Notes de bas de page
1 hooks, bell, Feminist Theory : From Margin to Center, New York, South End Press, 1984.
2 Singly (de), François, L’Individualisme est un humanisme, Paris, Éditions de l’Aube, 2007, p. 14.
3 Dow, Bonnie J., Prime-Time Feminism. Television, Media Culture, and the Women’s Movement Since 1970, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 1996, p. 214.
4 Dow, Bonnie J., ibid., p. 215.
5 « Je discute également une autre dichotomie dont je pense qu’elle devait être renforcée plutôt que dissoute : celle entre culture et politique. », Dow, Bonnie J., ibid., p. 9.
6 Hall, Stuart, « Culture, The Media and the “Ideological Effect” », in Curran, James, Gurevitch, Michael, Woollacott, Janet, Mass Communication and Society, Londres, Sage Publications, 1979, p. 339.
7 « Une grande partie de la perspective que j’adopte sur la télévision provient du fait que je n’ai pas été formée aux media studies mais aux rhetorical studies », Dow, Bonnie J., ibid., p. xiv.
8 Dow, Bonnie J., ibid., p. xv.
9 Kellner, Douglas, « Communication vs. Cultural Studies : Overcoming the Divide », Communication Theory, 5, 1995 p. 162-177.
10 Gamble, Sarah, The Routledge Companion to Feminism and Postfeminism, Routledge, 2002, p. 36.
11 Rosenfelt, Deborah, Stacey, Judith, « Second Thoughts on the Second Wave », in Hansen, Karen, Philipson, Ilene, Women, Class and the Feminist Imagination. A Socialist Feminist Reader, Philadelphia, Temple University Press, 1990.
12 Rosenfelt, Deborah, Stacey, Judith, ibid., p. 36.
13 Modleski, Tania, Feminism Without Women. Culture and Criticism in a “Postfeminist” Age, Londres, Routledge, 1991, p. 3.
14 Press, Andrea L., Women Watching Television. Gender, Class, and Generation in the American Television Experience, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 1991, p. 4.
15 McRobbie, Angela, ibid.
16 Genz, Stephanie, Brabon, Benjamin, Postfeminism. Cultural Texts and Theories, Edinburg, Edinburg University Press, 2009, p. 6.
17 Moseley, Rachel, Read, Jacinda, « “Having It Ally” : Popular Television (Post) Feminism », Feminist Media Studies, 2, 2002.
18 Lotz, Amanda D., Redesigning Women. Television after the Network Era, Urbana, University of Illinois Press, 2006, p. 98.
19 Faludi, Susan, Backlash. La guerre froide contre les femmes, Paris, Des Femmes, 1993, p. 15.
20 Genz, Stephanie, Brabon, Benjamin, ibid., p. 39.
21 Dow, Bonnie J., Prime-Time Feminism. Television, Media Culture, and the Women’s Movement Since 1970, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 1996.
22 Aronson, Pamela, « Feminists or “Postfeminists” ? : Young Women’s Attitudes toward Feminism and Gender Relations », Gender and Society, 17, 2003, p. 903-922.
23 Moseley, Rachel, Read, Jacinda, ibid., p. 231-249.
24 Moseley, Rachel, Read, Jacinda, ibid.
25 Moseley, Rachel, « Glamorous Witchcraft. Gender and Magic in Teen Film and Television », Screen, 43, 2002, p. 403-422.
26 MacDonald, Myra, Representing Women. Myths of Femininity in the Popular Media, Londres, Hodder Education, 1995, p. 100.
27 Richardson, Niall, « As Kamp as Bree. The Politics of Camp Reconsidered by Desperate Housewives », Feminist Media Studies, 6, 2006, p. 157-174.
28 Lotz, Amanda D., ibid., p. 117.
29 Brooks, Ann, Postfeminisms. Feminism, Cultural Theory and Cultural Forms, Londres, Routledge, 1997, p. 4.
30 Lotz, Amanda, « Postfeminist Television Criticism : Rehabilitating Critical Terms and Identifying Postfeminist Attributes », Feminist Media Studies, 1, 2001, p. 105-121.
31 Genz, Stéphanie, « Singled Out : Postfeminism’s “New Woman” and the Dilemma of Having It All », The Journal of Popular Culture, 43, 2010, p. 97-119.
32 Genz, Stéphanie, ibid.
33 Genz, Stéphanie, ibid.
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