À l’ombre des acteurs : les amuseurs à l’époque classique
p. 183-209
Texte intégral
1Dans les cités grecques, et particulièrement à Athènes, à côté des professionnels des spectacles, évoluait toute une catégorie d’amuseurs, ἀκροάματα, que les Anciens ont souvent stigmatisés1, et que les contemporains, dans le meilleur des cas, définissent comme les « catégories les plus inférieures d’artistes »2. Je fais allusion aux, γελωτοποιοί aux θαυματοποιοί, aux πλάνοι3 et à leurs congénères4. Leur histoire, reflet probable de leur statut, est difficile à écrire. Associés parfois aux débuts de l’histoire des acteurs, surtout à celle des acteurs comiques5, ces amuseurs peuvent être perçus comme leurs épigones. Pourtant, s’ils n’étaient pas des professionnels, au sens strict du terme – ils ne participaient pas, semble-t-il, à des concours officiels organisés par les cités –, ces amuseurs n’étaient pas dénués d’une τέχνη ou d’un ἐπιτήδευμα qui leur permettait de survivre et de passionner les foules6.
2Plusieurs auteurs anciens évoquent ces amuseurs sans pour autant s’y attarder. Les sources les plus importantes sur la question sont le Banquet de Xénophon, et le Deipnosophistes d’Athénée de Naucratis. Ce dernier nous a légué un catalogue comportant le nom et les différentes spécialités des baladins qui étaient actifs entre le Ve et le IIIe siècle av. J.-C. Les γελωτοποιοί et πλάνοι ne figurent pas dans les inscriptions grecques, quelle que soit leur époque, alors que les θαυματοποιοί font leur entrée dans la mémoire collective ou du moins dans la mémoire des sanctuaires panhelléniques à partir du IIIe siècle av. J.-C.
3Les ἀκροάματα ont suscité un vif intérêt de la part des philologues et des historiens de l’Antiquité. Ils ont été attachés aux κώμοι7 qui auraient donné naissance à la comédie8 ou au mime9. En France, L. Robert10 a consacré des pages lumineuses à ces baladins alors qu’il étudiait les inscriptions agonistiques d’époque hellénistique et impériale11. Pourtant, malgré la multiplicité d’études consacrées au théâtre et à ses manifestations, nous ne disposons d’aucune synthèse sur les ἀκροάματα. Nous ne disposons pas non plus d’études concernant leur activité à l’époque classique. Dans ce volume consacré au statut des acteurs de l’Antiquité, il m’a semblé utile d’étudier ceux qui vivent à l’ombre des professionnels du spectacle au moment même où leur statut commence à se définir. En prenant en considération les acquis des études consacrés aux ἀκροάματα à l’époque hellénistique, je tenterai de proposer une typologie des amuseurs d’époque classique, puis je mettrai en évidence ce que l’on connaît de leur statut et des rapports qui se tissent entre eux et les « patrons » ou entre eux et le monde du théâtre.
I. Terminologie
a. Les ἀκροάματα hellénistiques et classiques
4Étudiant une inscription attique retrouvée près de l’Asclépieion et datée du IIe ou du IIIe siècle de notre ère12, L. Robert13 prenait le contre pied de ce qu’affirmait J. Kirchner qui, dans son édition des Inscriptiones Graecae, la classait parmi les inscriptions éphébiques. Dans une tentative d’expliquer le terme ἀρχαιολόγος, l.7, le savant allemand, considérait que le document se référait à l’activité des rhéteurs et des philosophes qui, dans les gymnases, donnaient des ἀκροάσεις, des « conférences », contribuant à la formation des jeunes gens. Puisque à la l.3 de la même inscription le terme ἀκροάματα peut être restitué et qu’il est associé au métier des κωμῳδοί et des κιθαρῳδο, L. Robert propose de classer ce document parmi les inscriptions agonistiques et de considérer l’ἀρχαιολόγος comme un mime14. Pour étayer son hypothèse, le savant français observe qu’il faut distinguer les termes ἀκρόασις et ἀκρόαμα. Le premier s’adapte parfaitement aux activités des conférenciers, puisqu’il peut être rendu en français par « audition », « conférence », alors que le second sied au monde des concours, puisqu’un ακρόαμα est « un artiste, chanteur, musicien, acteur ou danseur »15. Fréquent dans les inscriptions d’époque hellénistique et impériale16 et utilisé volontiers au pluriel, le terme ακρόαμα, contrairement aux suggestions de Kirchner, n’aurait rien à voir avec le monde des gymnases et des concours qui s’y déroulaient, mais bel et bien avec le monde des concours qui se multipliaient dans les cités grecques à l’époque hellénistique, comme le confirme, d’ailleurs, l’étude que W. Slater propose dans ce volume17.
5Dans les inscriptions d’époque classique, le terme ακρόαμα n’est jamais utilisé, alors qu’il est souvent attesté dans les textes littéraires. Désignant en premier lieu « ce que l’on entend », donc l’audition, qu’il s’agisse de discours ou de musique18, ακρόαμα en vint à signifier également l’audition comme spectacle, puis les spectacles en général19. Enfin, par métonymie, l’artiste qui fait, qui est le spectacle, ce qui confirme les conclusions de L. Robert évoquées plus haut. En effet, à partir du IIIe siècle av. J.-C., au pluriel, ce terme désigna les conférenciers, les chanteurs et les acteurs qui se produisaient dans le cadre des συμπόσια20. Or, à moins de supposer que les textes classiques où le terme était utilisé dans le sens d’« artiste » ont disparu, ce qui semble impossible à soutenir, vu le grand nombre de sources dont nous disposons pour la période, il faut supposer que le terme ἀκροάματα rendait désormais compte de réalités qui auparavant étaient exprimées par le verbe ἀκροάομαι et suggérées par l’utilisation du nom ἀκροατής21.
6Quels spectacles ou quels artistes entraient dans la catégorie des ἀκροάματα ? Pour l’époque hellénistique, la lecture de Plutarque peut être instructive. En effet, en discutant des ἀκροάματα dignes de figurer dans un συμπόσιον de savants, le moraliste refuse la tragédie, la comédie ancienne, les dialogues de Platon dramatisés, les mimes, qu’ils soient des ὑπόθεσεις ou des παίγνια, les pantomimes de Pylade, pour ne retenir que ceux de Bathyle22, certains passages de Ménandre et la musique des flûtes et des cithares23. Pourtant, certains de ses invités, comme Philippos de Prousias24, ne voyaient pas d’inconvénient à ce qu’un γελωτοποιός vienne égayer leurs discussions puisque Xénophon, lui-même, ne rougissait pas, « en présence de Socrate, de faire surgir sous les yeux du public le bouffon Philippe comme Homère “un oignon pour accompagner sa boisson” ».
7Le souhait de Philippos de Prousias devient apparemment une réalité dans les συμπόσια qu’offrait le riche Larensis. En tout cas, Athénée, dans son Deipnosophistes, évoque les spectacles, (ἀκροάματα), variés et toujours renouvelés que son hôte prodiguait à ceux qui étaient conviés à sa table. Le livre XIV de son Deipnosophistes est presque entièrement consacré aux spectacles et donne l’occasion à Athénée d’évoquer les γελωτοποιοί, les πλάνοι, les mimes, les pantomimes, les citharèdes, les aulètes, etc. L’Antiquaire n’oublie pas, cependant, de préciser qu’une discussion concernant d’autres ἀκροάματα, tels les θαυματοποιοί, avait eu lieu précédemment. Or, de cette discussion, il ne nous reste qu’une sorte de catalogue que nous pouvons lire dans l’épitomè de son ouvrage. Même si le texte semble privé de son contexte, il nous permet de connaître un grand nombre de spécialités artistiques qui, par la suite, furent englobées par le terme générique ἀκροάματα. En revanche, pour ce qui est de leur identité, on a beau chercher les amuseurs contemporains d’Athénée qui défilaient devant les convives de Larensis, on ne les trouve pas. Par contre, l’Antiquaire nous livre une liste très importante de ceux qui se donnaient en spectacle entre le Ve et le IIIe siècle av. J.-C. En effet, les amuseurs que connaît Athénée sont ceux qui figuraient dans les sources de l’époque classique, par exemple, Aristoxène de Tarente (IVe siècle av. J.-C.), Douris de Samos (IVe siècle av. J.-C.), Phanodèmos (IVe siècle av. J.-C.). Le compte rendu que donne Athénée de ces auteurs prouve que les amuseurs qui nous occupent étaient désignés tantôt par le terme générique ἀκροάματα, tantôt par des termes spécifiques qui, à des exceptions près, renvoyaient à leur métier, ou plus précisément à leur τέχνη.
8Une étude de ces termes et de la τέχνη des ἀκροάματα d’époque classique s’impose car elle peut nous aider à mieux comprendre l’évolution de cette forme d’art et de ses rapports avec le monde des spectacles.
b. Du nom et de la τέχνη des amuseurs : les différentes catégories d’ἀκροάματα
9Au Ve siècle av. J.-C., le terme πλάνος désignait l’errance. Naturellement au IVe siècle, il fut utilisé pour définir le mode de vie de ceux dont elle était le lot quotidien. Il n’est donc pas étonnant que le terme prit un sens péjoratif que l’on rend en français par « vagabond » ou « imposteur ». Ce terme aurait désigné à partir du IVe siècle également un métier artistique, ou du moins, la τέχνη de celui dont l’art consiste à berner son semblable.
10Θαυματοποιός et γελωτοποιός, par contre, sont des noms de profession qui reposent respectivement sur θαῦμα, pour le premier, γελῶς, pour le second suivis du suffixe – ποιός, dérivé du verbe ποιέω. Littéralement ces termes signifient « celui qui fait ou qui accomplit des tours de force ou d’adresse », « celui qui fait, qui crée ou qui provoque le rire ». θαυματοποιός, dont la forme adjective est attestée à l’époque impériale, était employé dès le IVe siècle par Platon et Démosthène pour désigner celui qui accomplit des tours d’adresse. À cette époque, on utilisait également le verbe θαυματουργέω pour évoquer l’activité de ce type d’amuseur, comme on l’observe dans le Banquet de Xénophon25. Puisque l’action de ce dialogue se place en 422 av. J.-C., il semble opportun de considérer que les θαυματοποιοί se donnaient en spectacle au moins depuis le Ve siècle26.
11La première utilisation du terme γελωτοποιός remonterait à Eschyle. Le tragique l’aurait employé dans sa forme adjective dans son drame satyrique, Ὀστολόγοι, les Ramasseurs d’os. Ulysse évoque, semble-t-il, une dispute où son adversaire Palamède lui aurait décoché un « plaisant projectile »27, un malodorant urinoir. Comme nom de profession, le terme apparaît pour la première fois chez les philosophes du IVe siècle28. Dans son Banquet, Xénophon introduit un γελωτοποιός dans le dîner qu’offre Callias en l’honneur de son amoureux, Autolycos, vainqueur au pancrace de 422, ce qui suggère que cette profession avait pignon sur rue dès le Ve siècle av. J.-C.
12En tout cas, il est certain que les termes que nous venons d’évoquer sont couramment utilisés à partir du IVe siècle, ce qui tend à suggérer que, dès l’époque classique, on a éprouvé le besoin de distinguer le métier des amuseurs de celui des acteurs, qui étaient désormais considérés comme des professionnels du spectacle. Cette distinction dans la nomenclature était d’autant plus nécessaire que la τέχνη de certains de ces amuseurs était en tous points semblable à celle des acteurs. Cependant, alors que les acteurs exerçaient, en quelque sorte, une tâche civique – à Athènes, ils étaient assignés aux poètes par les archontes responsables des concours dionysiaques29 –, les amuseurs qui nous intéressent étaient livrés à eux-mêmes et ne bénéficiaient d’aucune protection particulière, comme nous le verrons par la suite.
II. Typologie
13Les amuseurs intermittents sont souvent associés, aux époques hellénistique et impériale, aux mimes et aux pantomimes. Il convient de vérifier si les Grecs du Ve et du IVe siècle av. J.-C. les percevaient de la même façon en étudiant les sources de cette époque, même si celles-ci ne sont que le fruit de citations d’auteurs d’époque impériale, comme Athénée, notre meilleur guide en la matière.
a. πλάνοι
14Athénée, dont l’amour et la connaissance de l’époque classique ne sont plus à démontrer, cite trois πλάνοι célèbres : Cephisodoros, Pantaléon d’Athènes et Matréas d’Alexandrie. Les deux premiers auraient vécu au IVe siècle av. J.-C., alors que nous n’avons pas d’éléments précis pour dater celui qui, au dire d’Athénée, était apprécié à la fois des Grecs et des Romains30. Cependant, les sources que cite l’Antiquaire nous permettent de comprendre en quoi consistait ce métier.
15Selon Nicostratos, Cephisodoros était capable de se poster au milieu d’une venelle pour empêcher ceux qui transportaient une lourde charge d’avancer31. Dionysos de Sinope, poète de la comédie nouvelle, rappelle son agilité (ταχὺν ὄντα) et sa dextérité à monter en courant sur les hauteurs de l’Acropole et à redescendre à l’aide de son bâton. À en croire ces poètes, c’est justement son activité qui lui aurait valu l’appellation de Πλάνος. Si ces textes sont dignes de foi32, Cephisodoros était un farceur doublé d’un acrobate ou d’un funambule.
16Tout autre semble avoir été la τέχνη de Pantaléon. Ce dernier, selon le poète comique Théognète, aurait inventé une façon de parler particulière, grâce à laquelle il se procura une certaine aisance : ses propos plaisaient, ils provoquaient le rire33. Le philosophe Chrysippe34 rappelle une de ses farces au goût moralisateur : sur son lit de mort, il fit appeler ses enfants séparément et leur confia qu’il avait enterré son trésor, ce qui les poussa à prendre des pioches et à creuser la terre jusqu’à ce qu’ils comprennent la supercherie de leur père. Cependant, Athénée ne cite pas ce qui semble la suite logique : en piochant, ils étaient censés comprendre que la richesse est le fruit d’un dur labeur. En tout cas, Pantaléon serait mort en riant et en laissant en héritage le rire.
17Étant donné que tout ce que nous savons des πλάνοι est issu de citations empruntées aux poètes comiques, on pourrait croire que ces personnages sont de caractères fictifs d’une comédie donnée. Or il est intéressant de noter qu’un Pantaléon donna son nom au titre d’une comédie de Théopompe35, poète actif à Athènes entre 400 et 370 av. J.-C. Étant donné l’habitude qu’avaient les poètes de se moquer de leurs contemporains, il ne serait pas étonnant que le Pantaléon de Théopompe fût à l’origine de la popularité de notre πλάνος. Les fragments de cette comédie36 ne peuvent infirmer ou confirmer cette hypothèse. Mais, il est certain qu’à cette époque, un Pantaléon vivait à Athènes. A. M. Desrousseaux suggère de l’identifier au frère d’un des clients de Lysias qui, en 383 av. J.-C., s’attaqua à son accusateur Théomnestos37. Était-il vraiment notre πλάνος ?
18Quoi qu’il en soit, Athénée évoque également parmi les πλάνοι célèbres Matréas d’Alexandrie qui se serait fait un nom, d’abord, comme créateur de charades. Celles-ci devaient provoquer la stupeur du public qui était obligé de s’avouer vaincu, s’il est vrai qu’à l’époque d’Athénée on cherchait encore la solution à une de ces devinettes : « Il prétendait nourrir une bête qui se mange elle-même, de sorte que l’on cherche encore aujourd’hui ce que c’est que la bête de Matréas »38. Outre ce type de passe-temps qui faisait la joie des banqueteurs, Matréas s’adonna aux parodies des Problèmes (ἀπορίαι) d’Aristote39. Par exemple, « pourquoi les éponges boivent, mais ne s’enivrent pas ». Certes, il n’est pas aisé de discuter des goûts des Anciens. Cependant, il semble difficile d’admettre que des simples jeux de mots aient pu rendre ce personnage célèbre parmi les Grecs et les Romains. En étudiant le texte d’Athénée on observe qu’il cite d’autres parodistes dont le célèbre Matron ou Matréas40 de Pitane. Ce dernier aurait écrit des Parodies, dont Athénée conserve plusieurs passages et surtout un grand fragment de son Repas attique, composé dans le plus pur style homérique41. Il est tentant de supposer que ce Matron de Pitane, cet amuseur « errant », se serait rendu en Égypte, sous les Lagides, devenant le Matréas Alexandreus. Ses œuvres, conservées dans la bibliothèque du Musée, auraient donné naissance à la copie qu’Athénée de Naucratis aurait consultée. En tout cas, si cette hypothèse ne peut être confirmée, il semble plausible qu’Athénée ait pour le moins confondu des éléments de la biographie de ces deux personnages, Matron de Pitane ou Matréas d’Alexandrie. En effet, la renommée qu’Athénée attribue à notre plano~ sied mieux au parodiste Matron de Pitane dont la verve et la drôlerie devaient effectivement enchanter son public.
19D’après ces exemples, il semble évident que la τέχνη des πλάνοι ne se résumait pas à une habileté physique quelconque. De ces amuseurs on espérait aussi, si l’on encroit les sources évoquées, des exercices intellectuels qui devaient flatter l’esprit d’un public érudit ou qui se voulait érudit. Telle qu’elle est décrite, la τέχνη des πλάνοι a des accointances avec celle des θαυματοποιοί, des γελωτοποιοί ou des παρῳδοί. Le terme πλάνος, en tout cas, n’est pas souvent utilisé dans la langue grecque pour désigner une profession. Plus que le nom d’un amuseur en particulier, le terme πλάνος devait désigner des amuseurs qui vivaient dans l’errance et qui, grâce à leur τέχνη, égaraient42 l’esprit de leur public.
b. θαυματοποιοί
20Parmi les θαυματοποιοί reputés, Athénée cite Xénophon et Cratisthène de Phlionte43, Nymphodore44, Diopeithès de Locres, Scymnos de Tarente, Philistidès de Syracuse, Héraclite de Mitylène45, qui auraient exercé leur métier entre le IVe et le IIIe siècle av. J.-C. Sur les trois derniers, nous ne savons presque rien si ce n’est qu’ils faisaient partie de l’entourage d’Alexandre et que, lors des noces du conquérant, ils auraient partagé la vedette avec des θαυματοποιοί venus d’Inde46. Xénophon et Cratisthène de Phlionte, passés maîtres dans l’art de l’illusion, étaient capables de faire jaillir spontanément du feu47, alors que Diopeithès de Locres prétendait faire jaillir du lait et du vin de son estomac en s’attachant à la ceinture des petites outres bien remplies de ces liquides.
21À côté de ces tours de magie, la τέχνη de Nymphodore semblait plus raffinée. En citant Douris, Athénée le désigne comme illusionniste. Mais un illusionniste d’un type tout à fait particulier, puisqu’il se serait rendu célèbre en raillant la poltronnerie des habitants de Rhégion48. Cette bizarrerie disparaît si l’on considère, en suivant Cléarque de Soli, qu’Athénée présente Nymphodoros comme un mime ou un mimographe de tradition syracusaine49.
22À l’époque classique, l’art du θαυματοποιός qui inclut des tours d’adresse, des tours de magie, des acrobaties est ποικίλος, « varié » Cette diversité se confirme également à l’époque hellénistique, puisque, selon L. Robert, on aurait regroupé dans la catégorie des θαυματοποιοί, non seulement les prestidigitateurs, mais aussi les équilibristes, les jongleurs, les acrobates, les montreurs de marionnettes et même les montreurs de bêtes50. Pourtant, les auteurs d’époque classique et même les inscriptions du début de l’époque hellénistique font une nette distinction entre les θαυματοποιοί et les amuseurs qui rentreraient, selon L. Robert, dans cette catégorie. Ainsi, soit l’on considère que le terme θαυματοποιός était réservé à ceux qui avaient atteint le sommet de leur art, combinant tous leurs aspects, soit il faut accepter que l’arbitraire régnait en matière de tours d’adresse, du moins dans les textes.
23H. Reich considère que les θαυματοποιοί pourraient être inclus parmi les μίμοι51 et Nymphodoros en est un des paradigmes. Certes les θαυματοποιοί ont été associés aux mimes à l’époque hellénistique. Mais en va-t-il de même à l’époque classique. Douris et Cléarque, nous l’avons observé, ne s’accordent pas sur le nom de profession de notre amuseur. Doit-on considérer que Nymphodoros était un θαυματοποιός qui serait devenu mime, comme Ischomachos, un ancien héraut, ou qu’il était un acteur de mimes qui utilisait des tours d’adresse dans la mise en scène de ses mimes ou de ceux qu’il interprétait ? Ne peut-on pas dire simplement qu’Athénée, reproduisant fidèlement ses sources, utilise le terme mime quand il cite Cléarque parce que ce dernier se réfère à des sources ou à des réalités siciliennes, alors que Douris, ne disposant pas de cette terminologie qui désignait le mime littéraire, dont Sophron avait la paternité, la décrit en se servant d’un terme qui était utilisé en Grèce propre ou en Asie ? Quoi qu’il en soit, il n’est pas aisé de savoir à quel moment les θαυματοποιοί ont intégré la catégorie des mimes et s’ils l’ont vraiment intégrée. Si tel est le cas, les θαυματοποιοί étaient des professionnels qui s’exhibaient sur des scènes de fortune mais également dans les théâtres52.
c. Γελωτοποιοί
24Les γελωτοποιοί étaient si célèbres dans l’Antiquité que certains de leurs détracteurs ont trouvé en Thersite53 leur paradigme mythique. D’autres, plus rieurs les font remonter à Palamède et à Rhadamante54, ce qui souligne à la fois leur piété et leur prodigieuse intelligence.
25Contrairement aux θαυματοποιοί célèbres, originaires d’un grand nombre de cités, les γελωτοποιοί semblent avoir été un pur produit athénien. Parmi les plus célèbres on compte Straton, Mandrogènes, Callimédon, dit le Crabe, Deinias, Mnasigeiton, Menaichmos et bien entendu Philippe, le γελωτοποιός du Banquet de Xénophon. Grâce à ce personnage, ou à l’art de Xénophon, nous pouvons nous faire une idée très précise du métier du γελωτοποιός. Dès son arrivée chez Callias, Philippe annonce qu’il est venu « muni de tout le nécessaire pour dîner aux frais d’autrui » (πάντα τὰ ἐπιτήδεια ὥστε δειπνεῖν τἀλλότρια)55. Accepté au συμπόσιον, il montrera qu’il excelle dans plusieurs spécialités d’où l’expression πάντα τὰ ἐπιτήδεια qui remplace, dans ce contexte, le terme τέχνη. En effet, il sait débiter de bons mots56, imiter de scènes de théâtre57, contrefaire la voix et les attitudes des hommes politiques et artistes à la mode58, faire ou mimer des acrobaties, danser59. En un mot, Philippe est un amuseur accompli et tire une grande fierté de sa capacité à provoquer le rire60.
26Le métier du γελωτοποιός repose entièrement sur la μίμησις, que ce soit celle de la voix (des hommes ou des animaux), des gestes, des attitudes, des comportements ou des discours. Sa τέχνη est donc en tous points comparable à celle des ὑποκριταί et particulièrement des acteurs comiques. Il n’est donc pas étonnant que Reich les désigne comme μίμοι et plus précisément comme μίμοι γελοίων. Pourtant, il est intéressant de remarquer que les Anciens ne confondaient pas ces amuseurs dans une même catégorie. Xénophon ne le faisait pas en tout cas.61 Dans les écrits d’Athénée et dans un grand nombre de sources anciennes, γελωτοποιός et μῖμος sont utilisés côte à côte à maintes reprises62. Cependant, l’on observe qu’Athénée a du mal à nommer certaines spécialités, comme celles de Straton de Tarente qui mimait des dithyrambes, ou Oinonas d’Italie qui s’adonnait aux imitations des citharédies. Or, ces renseignements, Athénée les puisa probablement dans l’œuvre d’Aristoxène de Tarente63, un des plus grands spécialistes de la musique de l’Antiquité. C’est chez Aristoxène qu’il apprend également que le γελωτοποιός Eudicos devint célèbre grâce à ses imitations de lutte à main plate ou à coup de poings64. Il est impossible de savoir si Aristoxène distinguait ou s’il mélangeait ces artistes dans une même catégorie. La seconde hypothèse semble la plus convaincante puisque l’Antiquaire est en mesure d’évoquer trois τέχναι distinctes. La première, plus simple, relèverait d’une imitation de gestes ; la seconde et la troisième, plus complexe, dépendraient d’une composition musicale et d’un texte écrits. Eudicos serait désigné comme γελωτοποιός, Oinonas comme citharède et parodiste, Straton, comme parodiste de dithyrambes.
27Enfin, je ne suis pas convaincue que l’expression μῖμοι γελοῖοι soit un synonyme parfait de γελωτοποιοί. S’il est vrai que les mimes de Sophron étaient désignés comme μῖμοι γελοῖοι et mi moi σπουδαῖοι, il est possible que les anciens aient utilisé l’expression mi moi γελοίων pour désigner les interprètes de ces mimes qui sont également distincts des γελωτοποιοί. En tout cas, les occurrences sont très peu nombreuses pour que l’on puisse en tirer une règle générale.
28Malgré la limpidité des termes désignant certains métiers des amuseurs, ils sont loin de livrer tous leurs secrets. Ces zones d’ombre que nous n’arrivons pas à éclairer s’expliquent peut-être par la richesse de leur τέχνη et par leur versatilité. Cependant, il est plus que probable que les difficultés que nous affrontons quand nous voulons cerner ces personnages découle, en partie, de la comparaison implicite que les auteurs anciens établissaient entre eux et les professionnels du spectacle. D’ailleurs, les changements qui se sont produits dans le milieu des spectacles furent, à ne point douter, responsables de l’évolution de la manifestation de leur τέχνη ou plus précisément de l’évolution de leur carrière, dont l’aboutissement se vérifie à l’époque hellénistique et à l’époque impériale.
III. Vie et statut des amuseurs
29Les sources anciennes tendent à présenter les amuseurs comme des amateurs, probablement pour mieux souligner la différence qui les oppose aux véritables professionnels des spectacles, acteurs et musiciens. Leur mode de vie, leur mode d’expression et plus précisément les milieux où ils évoluaient peuvent nous renseigner sur l’ébauche de leur statut qui semble se dessiner à l’époque classique.
30Peu loquaces sur la question, les sources anciennes nous permettent cependant de formuler quelques hypothèses à propos du statut des ἀκροάματα. Apparemment, les πλάνοι, les θαυματοποιοί et les γελωτοποιοί étaient leurs propres maîtres. Souvent d’origine citoyenne65, leur popularité et le besoin dans lequel ils se trouvaient ou l’attrait des grands centres urbains les poussaient à rejoindre la catégorie des métèques un peu partout dans le monde grec66, comme Mandrogènes d’Athènes ou le Syracusain du Banquet. Certains exerçaient leur métier à temps plein, comme Philippe ou le Syracusain du Banquet de Xénophon. D’autres, le faisaient sporadiquement, comme Callimédon d’Athènes, dit le Crabe. Fils de Callicrate, ce dernier tirait sa fortune des concessions minières dont il disposait en Attique67.
31Les amuseurs évoluaient dans le monde du « show business ». À l’époque classique, ils donnaient des représentations publiques à l’agora68, peut-être dans les théâtres du monde grec69, plus tard, comme les τεχνῖται, ils se produisaient dans les sanctuaires panhelléniques70. Cependant, leur cadre privilégié d’expression était le συμπόσιοv. Si nous connaissons les engagements qui liaient les acteurs71 ou les τεχνῖαι72 à leur public, nous manquons de sources explicites sur les moyens d’embauche des ακροάματα et sur les salaires qu’ils touchaient en récompense de leurs démonstrations.
a. Amuseurs ou parasites ?
32Puisque les πλάνοι, les θαυματοποιοί et les γελωτοποιοί se produisaient dans le cadre des συμπόσια, on les associe volontiers soit aux flatteurs qui s’installaient à demeure chez les riches Athéniens et les aidaient à gaspiller leurs biens, soit aux parasites qui, semble-t-il, se présentaient chez leurs hôtes sans invitation, sans payer l’écot convenu pour ce genre de réunion73. En effet, Xénophon suggère cette interprétation dès lors que Philippe, en s’adressant à Callias et à ses invités, affirme : « Je suis un bouffon (γελωτοποιός), vous le savez tous, et je me suis empressé de venir dans la pensée qu’il était plus amusant (γελοιότερον) de se présenter au repas sans y être invité que sur invitation »74. En proférant ces mots, Philippe souligne que son entrée en action tient d’une mise en scène qui vise à susciter le rire, soit qu’elle fait partie du spectacle qui est le sien. En effet, dès le moment où il frappe à la porte de Callias, Philippe joue le rôle de l’amuseur en parodiant des scènes de comédie où le héros, accompagné de son serviteur, toujours chargé, se présente devant quelqu’un pour lui demander de l’aide75. Certes, Xénophon préfère insister sur le sans-gène du γελωτοποιός qui court derrière sa nourriture. Pourtant, Philippe affirme clairement que sa présence dans les dîners est le fruit d’une invitation. En effet, interrogé par un des convives sur ce qu’il voyait dans sa bouffonnerie (γελωτοποιία) qui lui permettait d’en être fier, Philippe répond : « Ne suis-je pas là à juste titre puisque tous, me connaissant pour un bouffon (γελωτοποιός), lorsqu’il leur advient quelque chose d’heureux, s’empressent de m’inviter à y participer, tandis que dans l’infortune ils me fuient sans se retourner, de crainte que je ne les fasse rire malgré eux ? »76. Cependant, que ce soit dans la fiction ou dans la réalité, l’arrivée intempestive du γελωτοποιός cache souvent la connivence qui l’unit au maître de maison et que, malgré lui, Xénophon laisse transparaître dans les propos que Philippe adresse au portier de Callias. En se faisant annoncer et en insistant sur le bagage du rire qu’il transporte, le γελωτοποιός fait savoir au maître de maison, par des propos voilés, qu’il arrive bien disposé à honorer le contrat qui les unit. Grâce au γελωτοποιός et à la mise en scène de son « sans gène », le maître de maison peut donner le spectacle de son élégance, de son savoir faire, de son humour, bref, de sa magnanimité77. De plus, par cette arrivée « sans invitation », le γελωτοποιός dégage son hôte de la responsabilité du spectacle qui sera offert aux convives. S’il est de mauvais goût, ils n’auront qu’à s’en prendre au bouffon.
33En tout cas, il semble plausible que le γελωτοποιός propose sa τέχνη contre un salaire. L’associer aux flatteurs et aux parasites tient à mon sens, d’un topos littéraire78. En tout cas, il suffit d’observer que, dans le banquet qui se déroule chez Callias, Xénophon fait intervenir également une troupe d’amuseurs dirigée par un Syracusain79. Comme Philippe, ce dernier boit et mange à la table du riche Athénien80. Cependant, il semble évident qu’il était engagé contre salaire, comme l’étaient les joueuses de flûte qui égayaient les συμπόσια81 attiques. Si celles-ci touchaient jusqu’à deux drachmes par soirée, on peut supposer que le Syracusain faisait un bénéfice de six à huit drachmes par démonstration privée. En effet, dès son apparition, Xénophon précise qu’il gagnait de l’argent dans les exhibitions qu’il donnait avec les siens. Par ailleurs, quand Socrate lui demande de quoi il est fier, le Syracusain répond : « De la folie des gens, par Zeus ! Je leur montre des marionnettes et ils me nourrissent ». La τροϕή que le Syracusain retire de son savoir-faire, c’est-à-dire son salaire, équivaut aux invitations au dîner que Philippe espère recevoir.82
b. Parasites ?
34En Grèce ancienne, les parasites étaient des citoyens choisis par le peuple pour récolter le blé destiné au culte d’un dieu ou d’un héros83. Dans l’exercice de leurs fonctions, ils étaient invités à partager les repas du dieu, comme les bienfaiteurs d’Athènes étaient honorés par les repas au prytanée84. Dans les dèmes d’Attique, il y avait différents groupes de parasites qui sacrifiaient soit à un dieu, soit à un héros85. Les parasites étaient donc une donnée incontournable de la religion athénienne et une pratique sociale très vivace que ce soit au IVe ou au IIIe siècle av. J.-C. Athénée évoque à deux reprises une bande joyeuse de soixante individus, dont Deinias, Menaichmos, Mnesigeiton, Callimédon, fils de Callicrate, associés au culte d’Héraclès des Diomées86 Selon les spécialistes, ces derniers devaient appartenir à un thiase, comparable à celui du dème de Kynosarges dont Philonidès, l’acteur, le poète comique, διδάσκαλος de certaines comédies d’Aristophane, faisait partie au Ve siècle87. Pourtant, tout en appartenant à un thiase, les « soixante » auxquels Athénée fait allusion auraient pu figurer parmi la liste des parasites attitrés d’Héraclès, que les Athéniens désignaient annuellement parmi les citoyens, fils de citoyens, propriétaires fonciers et menant une vie sans reproche88. Les poètes comiques préfèrent, cependant, ignorer cette magistrature sacrée et utilisent, à partir du IVe siècle, le terme παράσιτος pour désigner les pique-assiettes.
35Quoi qu’il en soit, les soixante d’Athènes incarneraient les deux aspects du parasite. Et c’est peut-être justement parce qu’ils honoraient Héraclès, l’amateur de bonne chère et du rire, qu’ils devenaient, à son image, des ventres affamés, ridicules, eux qu’Athénée associe aux γελωτοποιοί. Si l’on croit Athénée, qui cite Téléphanes, ils seraient devenus célèbres grâce à leurs bons mots : Philippe II de Macédoine aurait payé son pesant d’or pour qu’ils fussent copiés à son intention89. Cette information confirmerait les propos badins que tient Anaxandride quand il fait remonter l’art du γελωτοποιός à Rhadamanthe et Palamède90 : ces héros auraient inventé les geloia qui ouvraient les portes des dîners. Les bons mots, geloia, sont la monnaie d’échange du γελωτοποιός, qui se fait parasite pour l’amour du rire.
36Or transformer les amuseurs en flatteurs ou en parasites accomplis revient à les priver de leur τέχνη ou du moins à la tenir pour une chose de peu. Pourtant en faisant des ἀκροάματα des ventres ambulants, les auteurs anciens ont bon gré mal gré souligné des aspects essentiels de leur profession : le manque de stabilité qui les pousse à courir le monde à la recherche d’une embauche ; le cadre privilégié de leur activité, le συμπόσιον.
37Enfin, cette association renvoie à un paradigme qui s’affirme dès l’époque archaïque, celui du poète errant ou mendiant. Comme les ἀκροάματα, les poètes lyriques attachés aux cours aristocratiques, en échange de leurs chants, demandaient à leurs « patrons » des manteaux, des sandales, des chénices de blé. Or ceux qui osent réclamer un véritable salaire, comme l’aurait fait Simonide de Céos, seront rudement critiqués et par leurs contemporains et par leurs successeurs qui gloseront allégrement sur leur « muse vénale ». Il semble donc qu’en Grèce ancienne, il vaille mieux être un ventre qu’un grippe-sou !
c. Amuseurs et acteurs
38Les ἀκροάματα donnaient des démonstrations en solo, comme le one man’s show de Philippe ou en troupe, comme celle dirigée par le Syracusain présent au banquet de Callias. Il est probable qu’ils aient cherché à se regrouper en de petites corporations pour se protéger des dangers auxquels l’artiste solitaire était exposé sur terre et sur mer et surtout pour augmenter leurs chances d’être embauchés et de réussir. D’une certaine façon, ils imitaient les formations des professionnels du spectacle, qui regroupaient depuis le IVe siècle au moins trois acteurs, et qui annoncent peut-être celles des τεχνῖται91. D’autre part, à partir du IVe siècle, si l’on en croit Athénée, prenant exemple sur les διδάσκαλοι dramatiques, les ακροάματα professionnels créèrent des « écoles d’amuseurs », démontrant par là leur volonté de donner un cadre « institutionnel » à la pratique de leur τέχνη. En célébrant Cratisthène de Phlionte, Athénée rend hommage à son maître, Xénophon, le θαυματοποιός92. En outre, le métier des γελωτοποιοί, au même titre que celui des acteurs du Ve et du IVe siècle av. J.-C., devient une affaire de famille. Mandrogènes d’Athènes, engagé lors de la célébration des noces du Macédonien Caranos, digne successeur de Straton d’Athènes, était également son parent93.
39Récemment, I.E. Stephanis a inclus dans sa prosopographie des τεχνῖται dionysiaques toutes les catégories des amuseurs qui nous intéressent94. Or, comment peut-on les désigner de la sorte, si dans les textes littéraires ce terme n’est jamais associé à ces baladins ? Peut-être faut-il comprendre le terme τεχνῖται dans le sens le plus large, c’est-à-dire celui qui est doué d’une τέχνη95. À l’image des professionnels du spectacle, les amuseurs pouvaient se réclamer de Dionysos parce qu’ils s’adonnaient à la μίμησις, au chant, à la danse, à tout ce qui faisait le spectacle, à tout ce qui faisait le théâtre, domaine privilégié du dieu. De plus, ils se produisaient dans le cadre du συμπόσιον où le vin et le fils de Sémélé ne font qu’un. Quoi qu’il en soit, même s’ils ont pu s’organiser en petites troupes, ils n’ont jamais intégré un des κοίνα de τεχνῖται, même si, au IIIe siècle, ils se retrouvent dans les sanctuaires panhelléniques à côté de ceux qui auraient pu se réclamer de cette affiliation. En effet, à Délos, des θαυματοποιοί figuraient parmi les κωμῳδοί, les τραγῳδοι, les aulètes qui avaient offert des spectacles ou « participé à des concours en l’honneur du dieu »96. Le cas de Cléopatre, θαυματοποιός, est exemplaire. Elle se serait produite à Délos à trois reprises à côté d’acteurs qui, à l’exemple d’Alexandros97, Callippos98 ou Menekles99, auraient obtenu des premiers prix aux Dionysies ou aux Lénéennes d’Athènes. Nous ne savons pas en quoi consistait le spectacle de ce θαυματοποιός. Nous ne savons pas non plus, comme le souligne B. Le Guen100, à quel titre ces artistes athéniens se seraient rendus à Délos ni si Cléopâtre était, d’une façon ou d’une autre, attachée à ce groupe. En tout cas, elle aurait pu se déplacer en compagnie de ces artistes célèbres à Athènes, ou, du moins, être entourée par d’autres ἀκροάματα, peut-être même des technites qui auraient pu déployer sur eux leurs ailes protectrices101.
40Mais pourquoi se rendaient-ils dans ces sanctuaires ? Voulaient-ils faire montre de leur piété à l’égard du dieu qui les accueillait ? Peut-être. Cependant, il ne faut pas oublier que ces lieux, fréquentés par des gens venant de toutes les contrées du monde grec, devaient se transformer lors des Apollonia de Délos, par exemple, en une grande « foire » aux artistes qui y faisaient montre de leurs talents. Les amuseurs qui s’exhibaient à la suite des concours ἱεροί espéraient probablement être enrôlés par un particulier, par une troupe, peut-être même par une confrérie dionysiaque : ils avaient le talent et le goût du spectacle qui ne demandaient qu’à être reconnus, officialisés. Mais là, nous sommes trop éloignés de l’époque classique.
41À partir du IVe siècle, il n’y a pas de doute, les ἀκροάματα étaient engagés par les aristocrates macédoniens et siciliens, au même titre que les poètes et les acteurs vedettes. Il serait naïf de supposer que Mandrogénès et sa femme avaient quitté Athènes pour forcer leur entrée dans la maison de Caranos, comme l’aurait fait Philippe chez Callias. Ils furent sans doute engagés parce que leur célébrité, comparable à celle de certains acteurs, avait dépassé les frontières de l’Attique. Nourris et logés, ils devaient recevoir une compensation financière pour les services rendus au même titre que les vedettes du théâtre athénien. Par ailleurs, certains ακροάματα ne devaient rien avoir à envier aux acteurs professionnels : ils étaient également des vedettes102. Certes, on peut supposer que là où l’on ne pouvait pas payer les services des professionnels du théâtre, on devait se contenter des amuseurs qui étaient capables d’offrir des divertissements de bonne qualité et hauts en couleur. Puisque l’imitation était au cœur de leur art, ils pouvaient contrefaire le jeu des vedettes internationales que leurs éventuels employeurs rêvaient de connaître. Pourtant, ceux qui pouvaient se payer les services des ἀκροάματα étaient les mêmes que ceux qui disposaient d’artistes renommés à demeure. Philippe, Alexandre, Denys de Syracuse, Démétrios Poliorcète, Antiochos en faisaient partie et chez eux évoluaient les professionnels des spectacles et également les ἀκροάματα. Or les Denys et les Alexandre n’étaient pas les seuls à apprécier les spectacles. Au IVe siècle, l’engouement pour le théâtre n’était pas un phénomène uniquement athénien. La construction de théâtres dans les différentes régions du monde grec au IVe siècle confirme cette tendance103. Dans cette atmosphère, la rivalité entre artistes s’est sans doute intensifiée. Si les vedettes étaient accaparées par les commandes, les étoiles de seconde zone ont eu également leur chance de se frayer un chemin vers la gloire. Les amuseurs, entraînés par ce mouvement, devinrent, comme le prouvent les sources qui ont conservé leur nom, des vedettes, imposant leur art dans l’ensemble du monde grec.
42Que la carrière des amuseurs accompagne celle des acteurs n’a en soi rien d’étonnant, surtout si l’on considère que le monde du théâtre à Athènes, à l’époque classique, était à la fois très ouvert et extrêmement fermé. En effet, tous les ans, un grand nombre de citoyens et probablement de métèques prenait part aux célébrations en l’honneur de Dionysos. Cependant, peu arrivaient à percer comme acteurs. Le système des concours faisait que seuls les meilleurs aspiraient à faire le don de leur talent à Dionysos année après année. La course à l’excellence, que se livraient chorèges et poètes, touchait, à n’en point douter, les interprètes. Plus d’un dut connaître le « chômage ». Avide de nouveautés, le public pouvait réduire au silence plus d’un aspirant à la gloire dionysiaque. Ceux qui avaient été touchés par la magie du théâtre pouvaient songer à embrasser la carrière d’amuseurs. Par ailleurs, il ne me semble pas impossible que certains acteurs aient, dans leurs moments de liberté, entre un contrat et l’autre, accepté de jouer dans les maisons privées ou dans les démonstrations publiques. De plus, il y eut, peut-être, un va-et-vient entre le monde professionnel et celui des amuseurs. Qui sait si l’on ne recrutait pas, par exemple, les acteurs comiques parmi le vivier que constituaient les amuseurs et, particulièrement, les γελωτοποιοί ?
43À l’ombre des acteurs professionnels, puis des technites, les amuseurs, errants par nature, ont été souvent méprisés par les anciens qui, prenant exemple sur Platon, les auraient expulsés volontiers de la cité104. Leur présence dans les συμπόσια et le rire qu’ils provoquaient dans l’exercice de leur métier les enchaînait invariablement à la débauche, à tout ce que l’homme a en lui de plus vil. Associés aux riches citoyens d’Athènes, puis aux cours aristocratiques des différentes cités grecques, ils étaient le miroir et l’image déformée d’un pouvoir en déclin ou du pouvoir d’un homme politique qu’il fallait à tout pris rabaisser, détruire. Ne faisant qu’un avec les rois que l’on transformait en θαυματοποιοί ou en γελωτοποιοί105, les amuseurs intermittents furent victimes du préjugé négatif qui découlait, en grand partie, d’une construction intellectuelle ou idéologique façonnée par les historiens et les philosophes anciens106. Dans cette perspective, le catalogue des ἀκροάματα, que l’on doit à Athénée, est précieux à plus d’un titre. Il montre que ce préjugé n’avait pas emporté l’adhésion de tous les savants à la fin de l’époque classique et au début de l’époque hellénistique. À ce moment-charnière de l’histoire du spectacle, il était encore possible de discuter de la τέχνη des ἀκροάματα et de l’insérer dans une étude plus large sur l’évolution du théâtre grec107. En dehors des inscriptions qui conservent leur souvenir, les auteurs Anciens ont soigneusement évité de nommer les πλάνοι, les θαυματοποιοι les γελωτοποιοί et leurs congénères. Aussi, pour succinct qu’il puisse paraître, le catalogue d’Athénée les a arrachés, à jamais, à issaient depuis le IIIe siècle av. J.-C. Il leur a conféré le statut prestigieux du πρῶτος εὐρετής, qui n’était peut-être pas nécessairement le leur. En tout cas, il nous a légué le premier traité sur les ἀκροάματα, montrant par là qu’une histoire des spectacles doit prendre en compte ceux qui, dans leur errance, se sont dressés comme messagers culturels, lançant des modes, colportant des nouvelles, imitant le dieu qui va, le dieu qui vient à la tête des chœurs joyeux.
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Notes de bas de page
1 Cf. Philodème, De rhetorica, I, 59 Sudhaus ; Galien, Protréptique, IX, 1, 20 Kühln. Cf. Robert 1938, 106, 8, et Lightfoot 2002, 212 n. 8. Voir aussi dans ce volume, Slater p. 143-160 qui commente FD III2, 47, 20 et FD III2, 48-42. Pour ces inscriptions et commentaires, cf. Le Guen 2001, I, T10, l. 20, 88-91 et T14, 117-123.
2 Cf. Robert 1936, 244, et, plus récemment, Lightfoot 2002, 212 (l’Auteur utilise l’expression « lower-brow » pour définir ces amuseurs).
3 Cf. Tableau I (catalogue des amuseurs connus d’Athénée).
4 Cf. Athénée, Deipnosophistes, I, 19-20.
5 Sur la question, cf. dans ce volume, Lanza p. 33-42.
6 Le Guen 2001, I, TE 34, 1 et, dans ce volume, p. 77-106, n. 38 ἐπιτήδευμα sert à qualifier le professionalisme des artistes. À l’époque classique, cette idée était rendue par le neutre pluriel de l’adjectif ὲπιτήδειος, c’est-à-dire ta ; ἐπιτήδεια. En tout cas, Xénophon, Banquet, I, 11, semble l’utiliser dans cette acception pour désigner le métier du γελωτοποιoς, le professionnel du rire.
7 Par exemple, Pickard-Cambridge 19622, 132-162.
8 Cf. Cornford 1914, 44. Ces recherches se fondent sur Athénée XIV, 621 f-622 d, qui cite Sémos de Délos (F.Gr.Hist., III, no 396, F 24).
9 Reich 1903.
10 Cf. 1929, 427-438 ; 1930, 106-122 ; 1957, 229-238.
11 Dans ce volume, Slater, poursuivant les recherches de Robert, étudie les ἀκροάματα de Carie à travers les inscriptions d’époque hellénistique et impériale.
12 IG II2 2153.
13 1936, 235-254..
14 Robert 1936, 237.
15 Robert 1936, 236. Pour preuve, le savant français renvoie aux inscriptions qu’il a étudiées en 1930, 216.
16 Robert 1936, 236.
17 Cf. p. 143-160.
18 Selon les lexiques, l’ακρόαμα est associé au plaisir. Cf. Chantraine, et L. S. J., s.v. ἀκρόαμα. Voir aussi Mau, s.v. akroama. Cf. Thucydide, III, 38, 4 ; Aristophane, Guêpes, 562 ; Xénophon, Banquet, II, 2 (Socrate oppose les spectacles, voire les plaisirs visuels, θεάματα, aux auditifs, ἀκροάματα) ; Xénophon, Hiéron, 1, 14 ; Aristote, Ethique à Nicomaque, 1173 b 18 (où le terme est associé à δράματα).
19 Aristophane, dans les Guêpes, 562, joue sur les mots ἀκροαταί, « spectateurs » et ἀκούσαντες, « auditeurs », terme utilisé également pour désigner les juges (cf. Démosthène, Contre Aphobos, III, 8). Thucydide (III, 38,4), commentant les débats qui ont eu lieu à Athènes en 428 à propos de Mitylène, reproduit un discours de Cléon qui compare le peuple réuni en assemblée aux spectateurs d’agônes littéraires et gymniques, insistant sur l’inconsistance de l’engagement politique de ces « spectateurs de paroles et auditeurs de faits » (θεαταὶ μὲν τῶν λόγων, ἀκροαταὶ δὲ τῶν ἔργων). Dans les Grenouilles, Aristophane utilise le verbe ἀκροάομαι alors qu’il est question de l’agôn entre Eschyle et Euripide. Certes, le poète évoque le spectacle auditif qu’ils offrent au public. Cependant, tout le vocabulaire est fondé sur le combat, ce qui nous permet de conclure que ce verbe indique aussi le spectacle visuel. En tout cas, il y a une oscillation également dans l’emploi du mot θέαμα, spectacle visuel. Dans le Banquet de Xénophon, VII, 5 la troupe du Syracusain présente un pantomime (donc un θέαμα) qui évolue au son d’un air bachique (VIII, 3).
20Cf. Phylarque, 62 ; Polybe, IV, 20, 10 ; 16, 21 ; 12. Voir aussi, Cicéron, Seste, 54, 116. Voir aussi Robert 1930 : 116.
21 Cf. n. 18.
22 Plus précisément la bathyllide qui, rapprochée du cordax et présentant un hyporchème, était considérée comme terre à terre. Cf. Plutarque, Propos de Table, 711 F.
23 Propos de Table, 710 F-713 F.
24 Propos de Table, 710 C.
25 Cf. VII, 2. Voir aussi II, 1 où Xénophon décrit une danseuse experte en acrobaties (θαύματα).
26 Xénophon utilise le verbe θαυματουργέω pour désigner les exercices qu’une danseuse ferait sur la roue d’un potier. Peut-on supposer que ce genre d’exercice était connu depuis l’époque homérique ? Difficile à dire. En tout cas, l’aède compare la danse des jeunes gens, qu’Héphaïstos avait façonnée sur le bouclier d’Achille au tour du potier (Iliade, XVIII, 601).
27 Cf. fr. 180 * Radt = fr. 180, 2 N2 (cité par Athénée, 1, 17 b-c). Voir aussi les commentaires de Desrousseaux sur ce passage. Ce fragment est également cité par Eustathe, ad Od., 2, 156, 11, qui avait peut-être trouvé ce renseignement chez Athénée qu’il cite à maintes reprises. En effet, en 2, 166, 38, il reprend le jugement d’Anacharsis à propos des γελωτοποιοί que nous trouvons chez Athénée, XIV, 613 d.
28 Cf. Platon, République, 620 C ; Xénophon, Banquet, I, 11, etc ; Anabase, VII, 3, 33.
29 Sur la question, cf. Pickard-Cambridge 19682, 93-95.
30 I, 19 d (Εθαυμάζετο δὲ παρ’ Ἕλλησι καὶ Ῥωμαίοις Ματρέας ὁ πλάνος ὁ Ἀλεξανδρεύς).
31 Athénée, XIV, 615 f, cite le Syrien, fr. 25 K.-A. Aucun élément ne permet de dater cette comédie de Nicostratos. Fils d’Aristophane, ce dernier aurait été actif, selon Webster, entre 370 et 310 av. J.-C.
32 Cf. Athénée, XIV, 615 d-f, qui cite les Homonymes, fr. 4 K.-A. Cette comédie qui aurait été produite entre 304 et 294, étant donné que le poète fait référence à Séleucos. Sur la question, cf. Webster 1953, 108.
33 Cf. Athénée, XIV, 616 a, cite L’Ami du patron, fr. 2 K.-A.
34 Cf. Athénée, XIV, 616 a-b = S. V. F. 3, 109 (De la beauté et des plaisirs).
35 Ce titre est cité par Pollux, Onomastikon, IX, 16 et 10, 41. Même si la Souda affirme que ce poète était contemporain d’Aristophane, il a dû exercer son métier au IVe s. av. J.-C. En tout cas, dans une de ses comédies, il cite clairement Platon (cf. L’homme à la dent douce, fr. 15 K.-A, apud Diogène Laërce, III, 26). Sur ce poète, voire Webster 1953, 17 sq.
36 En tout cas, ce personnage aurait pu donner naissance à un caractère de la comédie italienne, Pantalone, comme le suggère Edmonds, FAC, I, 865 n. d (commentaire à la comédie de Théopompe, Pantaléon). Dans la comédie italienne, Pantalone est le vieillard libidineux et cupide qui porte une culotte longue, d’où le nom de l’habillement masculin.
37 Cf. Contre Théomnestos I, 5. Desrousseaux considère qu’un autre plaidoyer de Lysias était adressé contre lui. Or, le titre du plaidoyer auquel le savant français fait allusion est celui-ci : Contre Pancléon comme quoi il n’est pas Platéen. Dans l’apparat critique de ce discours que l’on doit à L. Gernet et M. Bizos il n’y a aucune allusion à une possible erreur de transcription du nom de l’accusé. Je considère donc que cette hypothèse ne doit pas être retenue. Pour d’autres remarques concernant l’identification de ce personnage, cf. Kassel-Austin, CAF, VII, 730 (commentaire à la comédie de Théopompe, Pantaléon).
38 Cf. Athénée, I, 19 d. Desrousseaux, dans son commentaire à ce passage, considère que la bête de Matréas pouvait être le catablépas dont la stupidité le pousse à manger ses propres pattes (cf. Pline, VIII, 32 ; Elien, De la nature des animaux, VII, 5). D’autres auraient vu un sens moral à cette tirade. Je pense que Matréas pouvait faire allusion au corps qui nous nourrissons et qui se consume lentement avec le temps qui passe.
39 Cf. Athénée, I, 19 d. Plutarque évoque le plaisir que ces Problèmes suscitaient dans les sumposia des Thermopyles, cf. Propos de Table, 734 D.
40 Cf. Athénée, I, 5 c (Matréas) et 2, 62 (Matron).
41 Athénée, II, 62, c ; IV, 134 d-137 d. Ce dernier aurait vécu entre le IVe et le IIIe siècle. Sur Matron, voir Olson et Sens, 1999. Selon Degani 1996, 413, le Repas attique daterait de 305-300 av. J.-C.
42 Cf. l’utilisation du verbe πλανάω dans le fr. de Théognète, cité par Athénée, 14, 616 a.
43 Cf. I, 19 e-f.
44 Cf. I, 19 f qui cite Douris de Samos, FGrHist 76 F 57.
45 Cf. 1, 20 a.
46 Athénée, XII, 538 e (apud Charès de Mitylène, Histoires d’Alexandre, X = F.Gr.Hist. 125 F4). Voir aussi Élien, Histoires variées, 8, 7.
47 Pausanias, V, 27, 5, raconte comment parmi les Lydiens, un mage (μάγος) était capable de faire jaillir le feu d’un autel. Ce « miracle » était accompli en suivant un rituel qui prévoyait une invocation à la divinité concernée et une cantilène magique en langue barbare qu’il faisait d’après un livre.
48 Athénée, I, 19 f = Douris, fr. 44 M II 480.
49 Athénée, X, 452 f = Cléarque, fr. 19 Werhli. La tradition a conservé un dicton sur les« lièvres de Rhégion » qui remonterait, peut-être, à ce « texte » de Nymphodoros. Sur la question, cf. Desrousseaux à Athénée I, 19 f.
50 Cf. Robert 1929, 427-438.
51 1903, 236 (à propos de Nymphodoros) et 320 (pour les θαυματοποιοί en général).
52 Si à Athènes, la première représentation publique d’un mime attestée (Watzinger 1901) daterait de la fin du IIIe siècle av. J.-C., en Sicile celle-ci devait remonter à la fin du Ve siècle, étant donné que celui que l’on considère d’ordinaire comme l’inventeur du genre, Sophron, était actif vers 420 av. J.-C. Sur la question, cf. Csapo-Slater 20015, 170.
53 Cf. Platon, République, 620 C ; Plutarque, Moralia, 18 C, Dion Chrysostome, Discours, XXXII, 86, 6, etc.
54 Cf. fr. 10 K.-A. = Athénée, XIV, 614 c. Pour ce fragment, cf. Phillips 1957, 267-268.
55 I, 11. Dans le Banquet de Lucien, 18,3, Aristénète, le maître de maison, donne l’ordre au γελωτοποιός qu’il a engagé « de dire ou faire tout ce qu’il croirait capable d’exciter l’hilarité des convives » (ἐκέλευσε τòν γελωτοποιòν εἰσελθόντα εἰπεῖν τι ἢ πρᾶξᾶι γελοῖον, ὡς ἔτι μᾶλλον οἱ συμπόται διαχυθεῖεν).
56 En I, 11, par exemple ; II, 14 (à propos de Pisandre) ; II, 20 (à propos de Socrate) ; II, 27.
57 I, 15-16. À mon avis, Philippe imite dans cette scène les personnages d’Eschyle (Niobé de la pièce homonyme ou Achille qui figurait dans les Myrmidons et dans les Phrygiens). Cf. aussi Aristophane, Grenouilles, 911-913.
58 Philippe obtenait beaucoup de succès avec ses caricatures, eikasmoi, cf. VII, 1. Il est possible qu’en évoquant Callipide, le célèbre acteur tragique en III, 11 il ait contrefait sa voix ou ses attitudes. En tout cas, il se moque de sa prétendue fierté. Sur Callipide, cf. Csapo 2002, 127-147. De même, en s’attaquant à Pisandre, II, 14, peut-être l’imite-t-il. En tout cas, les convives de Callias le pressent de s’adonner à ce type de jeu.
59 II, 21-23.
60 Cf. III, 11 et IV, 50. Pour une performance d’un autre γελωτοποίoς hors pair, cf. Lucien, Banquet, 18, 3-19. Il faut cependant souligner que ce bouffon est une construction littéraire dont le paradigme est sans doute Philippe.
61 Cf. 1903, 284 et 807. Démosthène, Olynthiennes, 11, 9, observe que Philippe II de Macédoine aimait s’entourer de ces que μῖμοι γελοίων certains traduisent par « bouffons » (cf. Ghiron-Bistagne 1976, 3) ou par « mimes des clowns » (cf. Grimal, dans la traduction qu’il donne de Philostrate, Vie d’Apollonios, IV, 44, 10).
62 Cf. Athénée, VI, 261 c et XIV, 614 c. Plutarque, Brutus, 45, 6, évoque Volumnius, un mime, à côté de Saccoulion, un γελωτοποιός ; Diodore de Sicile, XX, 63, 2.2. (associé à Agathoclès) ; Dion Cassius, Histoire romaine, LVI, 30, 4, 3 ; 119, 13 ; Dion Chrysostome, XXXII, 86, 6.
63 Cf. fr. 136 Wehrli.
64 I, 19 f = Aristoxène de Tarente, fr. 135 Wehrli.
65 Cf. Athénée, I, 19-20.
66 Les amuseurs d’Alexandre, par exemple, proviennent des cités de Grèce continentale, de Grande Grèce ou des cités d’Asie. Ils peuvent également être des prisonniers étrangers, comme les Indiens qui figurent dans le dîner de noces qu’il donna après sa victoire sur Darius II. Cf. Athénée, XII, 538 c., qui cite Charès, FGrHist 125 F4.
67 Sur ce point, cf. Davies 1971, 279 (cf. PA 8032). Deinias (cf. PA 3154), Menaichmos (cf. PA 9851) devaient être également des citoyens aisés.
68 Cf. Xénophon, Banquet, II, 1 ; Théophraste, Caractères, XX, 7.
69 On peut supposer que Nymphodoros s’exhibait dans les théâtres de Sicile (cf. Athénée, I, 19 f et X, 452 f). Peut-être nos amuseurs occupaient l’espace théâtral, comme le marionnettiste Pontheinos l’aurait fait, si l’on croit Athénée, I, 19 e.
70 Les références dont nous disposons concernent plutôt le IIIe siècle av. J.-C. Cf. IG XI, 110, 34 ; 112, 22 ; 113, 28 ; IG XI, 133, 79.
71 Cf. par exemple, Démosthène, Sur la couronne, 262 ; Plutarque, Alexandre, 29.
72 Cf. Le Guen 2001, I, 105 et 126 ; II, 102-104. Voir dans ce volume, p. 77-106.
73 Sur les flatteurs et parasites, cf. Davidson 1997 ; Bruit 1995, 196-203 ; Brown 1992, 91-107 ; Avezzu 1989, 235-40 et Fisher 2000-396. Venir sans payer son écot se dit en grec asymbolon. Cf. Athénée, XIV, 614 c. Sur les banquets à écot, cf. Schmitt-Pantel 1992, 101. Asymbolon peut être utilisé également comme synonyme d’akletos, celui qui se présente à un banquet sans invitation. Cf. Fehr 1990, 185-195.
74 Banquet, I, 13.
75 Cf. Grenouilles, 19-41. Dans cette même comédie, Dionysos (vv. 12-15) critique les poètes grossiers, ϕορτικοί, qui se servaient des esclaves écrasés par le poids de leurs bagages pour provoquer le rire.
76 Banquet, IV, 50.
77 Cf. Banquet, I, 12-13.
78 Sur les flatteurs, κόλακες, voir aussi, dans ce volume, P. Ceccarelli, 000. Pour le parasite perçu comme un ventre, cf. Avezzu 1989, 125-240. Sur la question, voir aussi Nesselrath 1990, particulièrement 309-316 ; Withmarsh 2000, 304-315, notes 571-572.
79 Cf. II, 1. La troupe était composée d’une joueuse de flûte, d’une danseuse experte en acrobaties ou en tours de force (θαύματα δυναμένων ποιεῖν) et d’un garçon qui excellait dans le jeu de la cithare et dans la danse.
80 Cf. Aristote, Constitution d’Athènes, 50, 2.
81 Cf. II, 1 (ἀργύριον ἐλάμβανεν).
82 Cf. IV, 54 (Επὶ νή Δία τοῖς ᾄϕροσιν. Οὕτοι γὰρ τὰ ἐμοι∙ νευρόσπαστα θεώμενοι τρέϕουσί με). Il est plus que probable que le Syracusain fut lui-même un amuseur. Il se dit, dans ce texte νευροσπάστης. Cependant, il est possible qu’il ait pu utiliser ce terme de façon métaphorique : les amuseurs qui composent sa troupe seraient ses marionnettes.
83 Cf. Bruit 1995, 196-206.
84 Sur la question, cf. Schmitt-Pantel 1992, 145-177 et 225-226 (pour une reprise du motif dans la comédie d’Aristophane).
85 Par exemple, Apollon au dème d’Acharnes, cf. Athénée, 6, 234 f. Voir aussi 6, 235 a-c. Sur la question, voir Schmitt-Pantel 1992, 101-102.
86 Cf. XIV, 614 d.
87 Sur ce thiase, cf. Lind 1985 : 249-281. Voir aussi Humphreys 1974, 88-95.
88 Athénée, V, 239d-e.
89 Athénée, V, 260 b (apud Hégésandre de Delphes, FHG, IV, 413). Pour les anthologies d’histoires drôles dans l’Antiquité, cf. Athénée, III, 124 d ; 6, 244 f-245 a. Voir aussi Bremmer 1997, 11-28 ; Dalby 2000, 372-394.
90 Cf. fr. 10 K.-A. Sur ce fragment, cf. Phillips 1957, 267-268.
91 Sur les associations de tecni`tai, cf. Le Guen 2001.
92 I, 19 e : Eqaumazeto de kai Xenofwn o qaumatopoio~ o~ maqhthn katelipe Kratisqenh to Fliavsion.
93 Athénée, IV, 128 a-131 f. Pour les familles d’acteurs à Athènes, cf. Sutton 1987, 9-26.
94 1988, 590-591 (récapitulatif des catégories des amuseurs).
95 Sur la question, cf. Le Guen 2001, II, 27-32 et, dans ce volume, p. 77-106, n. 38. Light-foot 2002, 12, souligne cependant que les Anciens refusaient cette nomenclature aux amuseurs qui nous intéressent.
96 Cf. IG XI, 110, l. 34 (268 av. J.-C.), IG, XI, 112, 22 (268 av. J.-C.) ; XI, 113, 28 (267 av. J.-C.), XI, 115, l. 25 (259 av. J.-C.) ; XI, 118, l. 47 (236 av. J.-C.). Voir aussi pour le IIe siècle av. J.-C., IG, XI, 133, l. 78-79 (170 av. J.-C.).
97 Cf. IG II2 2325, 305 = Mette VD 2 col. 6, 10 (victoire aux Lénéennes), Stéphanis, no 112.
98 Cf. IG II2 2323 a, 88 et 2325, 200 = Mette, III B 2 col. 1, 12 (Stéphanis, no 1349). Selon Sifakis, 1967, 149, la victoire de cet acteur remonterait à sa jeunesse puisqu’elle daterait des Dionysies de 313/312 av. J.-C.
99 Cf. IG II2 2325, 222 = Mette, V C2, col. 6, 7 (victoire aux Lénéennes), Stéphanis, no 1649.
100 2000, I, 64.
101 Sur les privilèges dont jouissaient les technites, cf. Le Guen 2001, I, 27, 59, 61, 77, etc (ἀσυλία, inviolabilité) et I, 48, 53, 59, 61, etc (ἀσϕαλεία, sécurité).
102 Certains amuseurs, si l’on croit Athénée, I, 19a-20b, auraient reçu des honneurs insignes des cités où ils s’étaient produits : les habitants d’Héstiaia-Oréos auraient dressé une statue en bronze de Théodoros, le escamoteur, au théâtre de cette cité. Eurycléidès, le marionnettiste, aurait été honoré à Athènes avec une statue de bronze dressée au théâtre de Dionysos, à côté de celle d’Eschyle. Certains danseurs comme Hérodotos et Archélaos devinrent, grâce à leurs talents, des amis d’Antiochos. Quant à Aristonycos de Caryste il aurait reçu la citoyenneté athénienne. Cette distinction pourrait s’expliquer par la flatterie des Athéniens à l’égard d’Alexandre le Grand auquel Aristonycos était attaché.
103 Sur la question, cf. dans ce volume, Csapo, particulièrement, p. 53-76 et n. 13.
104 République, 395 c : 606 et 620.
105 Cf. Athénée, XIV, 614 e sq. Je pense tout particulièrement à Philippe II de Macédoine (cf. Démosthène, Olynthiennes, 11, 9 ; Théopompe, ap. Polybe, 8, 9-13) ; Démétrios Polior-cète (Phylarque, FHG, I, 339 et 341 ; Plutarque, Démétrios, 15, 3 ; Athénée, VI, 261 b), Anti-ochos Epiphane (Athénée, IV, 438 a sq., apud Polybe, 26, 1), Agathoclès (Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XX, 63, 2), etc. Sur la question, cf. Maas, RE, s.v. gelotopoios.
106 Cf. Platon, République, 395 c : 606 et 620 ; Aristote, Problèmes, 333, 208. Sur ce texte, voir les commentaires de Le Guen, 2001, I, 331 et Ceccarelli, dans ce volume, p. 109-142. Cf. aussi Athénée 14, 614 e sq. dont les sources sont Démosthène, Théopompe, Plutarque, etc.
107 Cf. Athénée, I, 20 e sq.
108 Les talents de cet amuseur rappellent ceux des ῥωμαισταί. Athénée affirme qu’il était célèbre pour ses imitations des luttes à main plate et à coups de poings.
109 Selon Aristoxène, Straton était admiré par ses imitations de dithyrambe : διθυράμβους μιμούμενος. Pour Stéphanis, cet amuseur serait un παρῳδóς.
110 Voir aussi Oinopas d’Italie. Cf. Athénée, XIV, 638 b (apud Aristoxène de Tarente, fr. 135 Wehrli) : (μιμούμενος) τὰς κιθαρῳδίας. Stéphanis le classe parmi les παρῳδόι.
111 Cet amuseur et ses compagnons, Philistidès et Héracléidès sont cités également par Athénée en XII, 538 e (apud Charès, F.Gr.Hist. 125 F4). Pour Philistidès, cf. aussi Alciphron, III, 19, 10.
112 Voir aussi, XIV, 695 f où Athénée cite Dionysos de Sinope, fr. 4 K.-A. et Nikostratos, fr. 24 K.-A.
113 Cf. XIV, 616 a-b (apud Theognetos, L’Ami de son maître, fr. 2-K.-A. et Chrysippe, SVF
III, p. 199).
114 Cet amuseur est évoqué également en XIV, 614 d.
115 Cette liste n’est pas exhaustive. L’étude des travaux de L. Robert suffit à le confirmer. J’ai décidé d’indiquer ici les amuseurs dont la tevcnh est proche de celle des ἀκροάματα qui ont fait l’objet de mon étude, πλάνοι, θαυματοποιοί, γελωτοποιοί.
116 Kléupatra et Kléopatra sont la même personne.
Auteur
Université de Tours
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