Les causatifs du moyen-anglais et leurs compléments
p. 103-124
Texte intégral
1. Introduction : les causatifs et les types de complément
1L’étude des causatifs analytiques du moyen-anglais met en évidence de nombreuses différences par rapport à la langue contemporaine. Certains verbes faisant partie intégrante du système causatif de l’anglais contemporain ne s’emploient que rarement dans ce sens, voire pas du tout, à l’époque du moyen-anglais (GET, HAVE), alors que d’autres (DO, LET) ont reçu d’autres fonctions ou bien ont tout simplement dispara de la langue (GAR)1.
1.1 Les verbes causatifs
2Je vais m’intéresser ici aux causatifs implicatifs (voir, entre autres, Song (1996), pour une discussion de l’importance de la notion d’implicativité dans l’expression de la causation) employés avec un complément infinitif. Je me base en ce qui concerne l’implicativité sur la définition proposée par Shibatani (1976) : "The truth of the caused event holds whenever that of the causing event holds." Ainsi make et cause sont-ils à considérer comme des verbes "implicatifs" en anglais contemporain, à la différence de ask ou de order, comme le montre le contraste entre (i/ii) et (iii/iv)
(i) *I made him open the door, but he didn’t do it.
(ii) *I caused him to open the door, but he didn’t do it.
(iii) I asked him to open the door, but he didn’t do it.
(iv) I ordered him to open the door, but he didn’t do it.
3Ce même paramètre permet d’opposer les principaux implicatifs du moyen-anglais, DO, GAR, LET, et MAKE (également cause, qui apparaît courant 14ème) à des verbes souvent appelés "semi-causatifs," comme haten ou bidden/beden, qui peuvent dans certains contextes recevoir une interprétation causative par inférence pragmatique.
1.2 Les compléments infinitifs
4Toujours est-il que le locuteur du moyen-anglais disposait de plusieurs verbes pour exprimer la notion de la causation. Mais si l’on constate une variation considérable dans le choix du causatif (V[cause]), il en est de même pour le choix du complément de ce dernier. Il est possible de trouver des occurrences de pratiquement tous les types de compléments avec tous les causatifs, la répartition variant beaucoup, entre autres, en fonction du dialecte. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce problème par la suite. Voici, en attendant, les principaux types de structures de surface utilisées dans les constructions causatives :
5VOSI2
1) For ther ben manye felle frekes my feeris to aspie--/ Bothe Priour and Suppriour and oure Pater Abbus;/ And if I telle any tales, thei taken hem togideres,/ And doon me faste Frydayes to breed and to watre.
(Langland, "Piers Plowman")
"For there are many cruel men, to spy out my companions, both Prior and Sub-prior and our Father Abbot, and if I tell any tales, they take them all together and make me fast on Fridays, on just bread and water."
6VOSI+TO
2) fro a litil errour out of pis weye. may a man come bi grace aȝen / but myche errour wiϸ errour of wit : makiϸ man to growe in more errour (Wyclif, "De Officio Pastorali")
"From a little error, astray from this path, a man may come back, but great error, with error of understanding, makes one grow still more in error."
7VOSI+FOR TO
3) For it was wynter time tho,/ And wynter, as be weie of kinde/ Which stormy is, as men it finde, Ferst makth the wyndes forto blowe. (Gower, "Confessio Amantis")
"For it was winter then, and winter, which by its very nature is stormy, as men find, first makes the wind blow"
8V+ϷAT
4) Of Accidie comth first that a man is anoyed and encombred for to doon any goodnesse, and maketh that God hath abhomynacion of swich Accidie, as seith Seint John. (Chaucer, "Parson’s Tale")
"Of sloth comes first that a man is unwilling and slow to do anything good, and makes (that) God abhor(s) such sloth, as saint John says."
9V+I3
5) And he wolde not suffre no Iewes to dwell ϸere, but only cristene men, For alϸough it were so ϸat he were not cristned ȝit he louede cristene men more ϸan ony other nacioun saf his owne. This Empereur leet enclose the chirche of seynt Sepulcre + walle it within the cytee, ϸat before was withoute the cytee long tyme beforn. (Anon, "Mandeville’s Travels")
"And he would not allow any Jews to dwell there, but only Christian men, for although it was true that he was not christened, yet he loved Christian men more than any other nation save his own. This emperor had the church of St Sepulcre enclosed and walled within the city, (church) that was outside the city wall for a long time beforehand."
10La structure VOSI dans (1) est celle utilisée généralement en anglais moderne avec MAKE, VOSI+TO (2) celle que l’on retrouve derrière cause ou get modernes. Une "variante" VOSI+FOR TO (3) devient relativement fréquente au 14ème siècle : pour les besoins de la discussion ici, je simplifierai volontairement en regroupant les compléments de type (2) et (3) dans une seule catégorie VOSI+TO. J’inclus l’exemple (4) pour montrer que certains causatifs acceptaient aussi des compléments introduits par that : cette structure est pourtant peu fréquente en moyen-anglais avec les causatifs, se limitant essentiellement à quelques occurrences avec DO et MAKE. La construction que l’on retrouve dans (5), où le sujet de l’infinitif s’efface de l’énoncé de surface, est très courante dans les premiers textes de notre corpus (tout début du 12ème siècle) : ainsi dans le "Brut" de Laȝamon est-elle de loin la construction la plus fréquemment employée dans l’expression de la causation.
11Une première question qui se pose est de savoir si cette double variation, à la fois dans le choix de V[cause] et dans celui du complément, peut s’expliquer, et de quelle manière. En ce qui concerne le choix du causatif, la variation s’explique en partie par des facteurs "diatopiques" ou dialectaux : comme le constate Mustanoja (1960), GAR s’emploie dans les dialectes septentrionaux (les "York Mystery Plays," ou YP, les oeuvres de Richard Rolle, RR), alors que DO est plus courant à l’est de l’Angleterre ("Vices & Virtues," "Havelok"), et LET à l’ouest et dans le sud-ouest ("Brut", "Owl and Nightingale"). De la même manière, des facteurs d’ordre stylistique semblent par moments avoir favorisé le choix de telle ou telle forme plutôt qu’une autre. On assiste par exemple au 14ème siècle à une certaine renaissance de la tradition poétique allitérative du vieil-anglais, ce qui a très vraisemblablement provoqué le choix de GAR plutôt que DO ou MAKE, les causatifs les plus fréquents chez Langland, dans l’exemple suivant :
6) Grammer for girles I garte first write,/ And bette hem with a baleys but if thei wolde lerne. (Langland, "Piers Plowman")
"A grammar for girls I first had written, and beat them with a stick if they would not learn."
12De la même manière, la présence ou l’absence devant l’infinitif de to s’explique quelquefois, dans les œuvres poétiques de Gower ou de Chaucer par des considérations métriques, la chute ou le gain d’une syllabe permettant au poète de mieux équilibrer ses vers. Mais au-delà de ces considérations d’ordre stylistique ou diatopique, le choix de tel verbe causatif ou de tel complément est-il motivé ? Je prendrai en considération les différents types de complément infinitif, pour montrer qu’il ne s’agit pas d’une forme de variation purement "libre". Nous verrons que certains paramètres, notamment l’agentivité des sujets et la nature précise du contexte, jouent un rôle important dans le choix du causatif ainsi que dans la sélection du complément. Je montrerai par contre qu’il n’est pas possible d’expliquer chacun de ces choix en fonction de critères sémantiques rigides, et ceci parce que la variation s’avère être un élément indispensable au bon fonctionnement du système linguistique ainsi qu’un élément moteur dans le déclenchement des changements intervenant au sein de ce système, dans le cadre d’un modèle d’évolution dynamique : nous verrons ce dernier à l’œuvre dans le cas du verbe causatif MAKE.
13Par la suite, le terme S1 sera employé pour désigner le sujet du verbe causatif, ou V[cause], L’infinitif enchâssé s’appellera V2, son sujet S2. Je considère que le sujet de V[cause] reçoit le rôle thématique d’Agent ([Ag]) en cas de causation intentionnelle, par un sujet animé, et de Cause ([Cs]) dans le cas contraire.
2. La construction V+I
2.1 Le choix de V[cause]
14Commençons par la structure V+I. Très courante dans les textes, surtout poétiques, du début de la période dite du moyen-anglais, elle se maintient tout au long de cette période : on trouve de nombreux exemples encore dans les "Pastori Letters" ainsi que dans les œuvres de Malory (environ 1470-5). Je donne ici des exemples avec LET trouvés dans le "Brut" (5) ou encore dans "Mandeville’s Travels" (6, ci-dessous), mais la même construction s’emploie de la même manière avec d’autres verbes dans d’autres dialectes : GAR dans le nord, généralement, ou DO dans l’est. C’est le verbe causatif habituellement associé à la causation agentive qui s’emploie dans cette construction (voir annexes). Par contre, LET en tant que causatif "pur" (à la différence de ses emplois avec les sens optatif ou de "permission") n’existe pratiquement que dans la construction V+I : nos corpus ne contiennent que quelques rares cas de LET VOSI causatif dans le "Brut" et "Owl and Nightingale", œuvres du tout début du 13ème siècle.
2.2 Le "profil sémantique" de V+I
15Je laisse de côté pour l’instant la question de la syntaxe de cette construction, qui fera l’objet d’une future publication. Elle se différencie par contre assez nettement des autres compléments infinitifs sur le plan sémantique, présentant dans presque tous les textes, avec tous les V[cause], les propriétés suivantes :
L’infinitif en position de V2 est transitif direct ;
Le causateur S1 est toujours Agent ;
V[cause] dans la plupart des textes est toujours au prétérit, ou quelquefois à la forme impérative, dénotant une action ponctuelle ;
Le S2 non-exprimé possède toujours les traits +AGENT, +HUMAIN ;
Le complément désigne un événement de type "accomplishment" dans la classification de Dowty (1979) : il s’agit essentiellement de "telic predicates" au sens de Hopper & Thompson (1980 : 251) : "an action viewed from its endpoint."
Il s’agit de mettre en évidence ce qui arrive à quelqu’un ou à quelque chose (en l’occurrence le C.O.D. de V2), plutôt que le rôle du sujet de ce dernier, S2.
16Tous ces facteurs contribuent à ce que la glose la plus fréquente en anglais contemporain soit du type "have + participe passé", qui conviendrait très bien à l’exemple (5) ci-dessus ou encore aux deux premiers LET de l’exemple suivant :
7) Arður asechen lette ; alle ϸa riche/kinges and eorles; and ϸa riccheste beornes./ϸa i ϸan fehte weoren i-slaȝen ; and idon of lif-dœȝn/ he lette heom burien ; mid baldere pruten./ Buten ϸreo kinges ; he beren lette. Luces ϸan kaisere. (Laȝamon, "Brut")
"Arthur had all the rich kings and earls, and the richest men that were slain in the battle, and deprived of life, sought out. He had them buried with due honours. But three kings he had bear Lucius the emperor."
17Les deux premiers énoncés avec LET causatif correspondent bien aux critères sémantiques évoqués ci-dessus. Cet exemple permet également de comparer LET causatif avec des compléments V+I et VOSI : en effet, lorsque l’identité du sujet de l’infinitif est importante pour les besoins du récit, on réintègre celui-ci directement dans l’énoncé de surface, l’ensemble devenant une structure VOSI : c’est le cas de la dernière ligne de l’exemple (7) ci-dessus, où, suite à son combat victorieux contre les Romains, Arthur souhaite faire enterrer Lucius, son adversaire tué au combat, avec tous les honneurs dus à son rang : il n’est pas question de faire porter son corps par n’importe qui, mais par trois rois, signe du respect que le roi Arthur portait au défunt. La "vedette" en quelque sorte se trouve partagée entre les arguments sujet et COD de l’infinitif.
18Généralement, la structure V+I affiche une assez grande régularité par rapport aux critères présentés ici. Exception faite de quelques rares exemples avec MAKE (début du 13ème siècle) ou encore avec CAUSE dans les "Confessio Amantis," V+I paraît toujours correspondre à un profil sémantique relativement précis, avec une mise en relief du SN COD de V2.
3. Les constructions VOSI/VOSI+TO :
3.1 Le choix de V[cause]
19Les compléments de type VOSI s’emploient avec tous les opérateurs causatifs cités ci-dessus. Dans tous les textes que nous avons étudiés, en plus de la distribution géographique de Mustanoja, on constate que GAR, DO et LET sont en concurrence ou en distribution complémentaire, selon le point de vue que l’on adopte, avec MAKE, ce dernier étant présent dans tous les dialectes. Ainsi dans "Piers Plowman" (PP), par exemple, c’est DO qui complète – ou s’oppose à – MAKE. Dans les "York Mystery Plays" (YP) ce sont GAR et MAKE qui servent généralement à exprimer la causation. Dans un dialecte comme dans l’autre, le choix du causatif semble au moins partiellement motivé : deux critères au moins paraissent pertinents ici. Si l’on regarde les tableaux 2 et 6 en annexe, on voit par exemple que l’agentivité du sujet de V[cause] est un élément important dans le choix de GAR/DO plutôt que MAKE : un S1 [Agent] favorise l’emploi de GAR ou de DO :
Sujet (S1) de DO [Ag] 25/30 dans PP (83,3 %), celui de MAKE 16/31 (51,6 %)
Sujet (S1) de GAR [Ag] 33/39 dans YP (84,6 %), celui de MAKE 16/35 (45,7 %)
20Ainsi la causation volitionnelle s’exprime-t-elle plus facilement par DO ou par GAR, selon le dialecte, que par MAKE. Il est intéressant de constater que Kemmel & Verhagen (1994) mettent en évidence un phénomène similaire en néerlandais moderne, autre langue germanique, avec l’alternance laten/doen, laten étant associé dans 99 % des cas à un causateur animé, doen dans seulement 42 % des cas.
21MAKE est également associé, dans les premiers textes, à des contextes génériques :
8) For idelnesse is luðer; on œlchere ϸeode./for idelnesse makeð mon; his mon-scipe leose./ ydel-nesse makeð cnihte; for-leosen his irihte./ idelnesse grœiðeð; feole uuele craften. (Laȝamon, "Brut")
"For idleness is hateful to all peoples, for idleness makes a man lose his manhood; idleness makes a knight neglect his duty, idleness prepares the way for many evil deeds."
22Le "Brut" est un poème très long, constitué de plus de 30 000 lignes, dont la plupart relatent les exploits et les prouesses d’Arthur et de ses preux chevaliers : par moments, par contre, Laȝamon se livre à des réflexions plutôt philosophiques ou morales. Dans ce type de contexte, l’expression de la causation se fait non pas par LET mais par MAKE, comme dans l’exemple (8).
23Ainsi une sorte d’opposition commence-t-elle à s’établir :
S1 [Agent] | S1 [Cause] |
Contextes spécifiques | Contextes génériques |
← DO/GAR | MAKE → |
24Les éléments figurant dans la colonne de gauche rendront plus probable le choix de DO ou de GAR : ceux dans la colonne de droite celui de MAKE.
3.2 Le choix du complément
25Quant au choix du type de complément, avec ou sans to, la plupart des explications généralement avancées reprennent l’idée de Bock (1931), qui postule que (je simplifie très grossièrement) la structure VOSI sans to signifierait qu’il existe un lien plus étroit entre V[cause] et l’infinitif. Cette idée est souvent appliquée aux causatifs en termes de causation plus ou moins "(in)directe". Tel est le point de départ de Fischer dans deux articles (1994, 1995) consacrés au "Early Middle English" et au moyen-anglais tardif respectivement. Elle propose dans Fischer (1995) une définition de la causation indirecte et identifie certains éléments favorisant la présence de to dans les compléments infinitifs en général. Sa démarche consiste à démontrer que l’alternance VOSI/VOSI+TO peut s’expliquer chaque fois en fonction de critères sémantiques. Nous reproduisons ici ceux qui semblent pertinents au domaine de la causation
26Eléments entraînant le choix de to :
Non-simultaneity of tense domains.
Indirect causation :
subject of matrix verb does not directly cause what is expressed in the infinitive clause.
the subject/causer is inanimate and as such more of an instrument than a cause.
what is caused is a process in which the causee himself takes/must take an active part : (he is) animate and represented as "highly volitional".
Non-actuality.
Passive constructions.
(d’après Fischer (1995) : 7-8)
27Ces critères semblent, pour la plupart, très pertinents. Son critère IV devient important surtout après 1300-1350 : seul II(c) nous paraît contestable, comme nous le verrons dans 4. 2. Néanmoins, ce genre de démarche n’est pas sans poser de problèmes :
28i) Le nombre élevé de contre-exemples : ceux-ci se trouvent, malheureusement, très facilement et en très grand nombre. A titre d’exemple, elle illustre son critère II(a) par la citation suivante, des "Canterbury Tales" :
9) 2507: Sire, wolde he seyn, an emperour moot nede/2508: Be vertuous and hate tirannye --/2509: For which he [Nero] in a bath made hym [Seneca] to blede/2510: On bothe his armes, til he moste dye. (Chaucer, "Monk’s Tale")
"Sire, he would say, an emperor must of necessity be virtuous and hate tyranny, for which he made him bleed, in a bath, from both his arms, until death."
29Elle appelle ceci "a very clear example", précisant que to est présent : "...because we know indeed that Nero did not kill Seneca with his own hands, but pressed him into committing suicide." (1995 : 11) : la présence d’un intermédiaire est nécessaire pour assurer la réalisation.
30Ceci paraît tout à fait plausible : mais il faudrait aussi pouvoir expliquer pourquoi on ne trouve pas de to dans (10) ci-dessous :
10) 2511 : This nero hadde eek of acustumaunce/2512: In youthe agayns his maister for to ryse,/2513: Which afterward hym thoughte a greet grevaunce ;/2514 : Therefore he made hym dyen in this wise. (Chaucer, "Monk’s Tale")
"This Nero had also in youth the custom of rising up against his master, which afterwards seemed to him to be a source of great grievance, therefore he made him die in this manner."
31Je rajoute les numéros de ligne pour montrer que la deuxième occurrence suit la première à seulement cinq lignes d’intervalle. Les référents des pronoms he et hym dans (10) sont les mêmes que dans (9) : plus important encore, les rapports entre les deux - le facteur déterminant dans le choix d’un complément avec to, selon Fischer - sont rigoureusement identiques dans les deux cas. Les autres critères aussi donnent un nombre non négligeable de contre-exemples, ce qui serait logiquement impossible si vraiment les deux constructions avaient une "signification" radicalement différente. L’opposition sémantique qui opposerait VOSI à VOSI+TO ne semble pas aussi nette que le laisse entendre l’article de Fischer.
32ii) La deuxième difficulté posée par ce type d’analyse est qu’elle présente une vision relativement "statique" des choses : après tout, si tout s’explique très facilement en synchronie, pourquoi auraient-elles évolué ? Pourtant, il est évident qu’une évolution s’est effectivement produite : MAKE, par exemple en anglais moderne, n’accepte plus les compléments en to, sauf dans certains cas particuliers (voir Lowrey, 1997).
33iii) Si évolution il y a eu, fondée sur des critères sémantiques, on aurait pu s’attendre à ce qu’elle " grammaticalise" les critères de Fischer pour aboutir à un contraste sémantique net, comme celui qui oppose LET VOSI, qui exprime toujours soit le sens dit de "permission," soit le sens "optatif," à LET VOSI+TO, cette dernière structure ayant toujours le sens d’"empêcher," "entraver," comme ci-dessous :
11) "That is sooth,' seide Scripture; " may no synne lette/Mercy al to amende, and mekenesse hir folwe : (Langland, "Piers Plowman") "That is true," said Scripture, "may no sin prevent Mercy from repairing everything, and Meekness from following her:"
34Dans un deuxième article (1994, mais rédigé après celui publié en 1995), Fischer ajoute les critères de transitivité de Hopper & Thompson (1980) : pour simplifier son argument, les éléments assimilés par Hopper et Thompson à ce qu’ils appellent "low transitivity" sont associés par Fischer à son tour à la causation indirecte et par conséquent à la présence de to. Je n’en reproduis ici que ceux qui semblent pertinents : elle constate par exemple que les critères suivants, entre autres, favorisent normalement la présence de to :
Les contextes génériques
S1 [Cause]
35Nous retrouvons ainsi les mêmes critères que nous avions déjà vus à l’œuvre dans le choix de V[cause] dans 3.1. Une fois encore, l’idée semble très intéressante et permet en effet de justifier l’absence ou la présence de to dans certains compléments. Mais à nouveau, ce type de démarche n’est pas sans poser de problèmes. A force de multiplier les critères susceptibles de jouer un rôle dans le choix de structure, on risque effectivement de voir l’ensemble de la théorie perdre quelque peu de sa valeur explicative. Et que faire d’exemples comme le suivant, où les critères cités ci-dessus semblent se contredire :
12) hwet is win in wunde; Win makeð wunde smerte. Ah ϸe smertinge clenseð ϸe wunde; ... Al so hali schrift bið in ure wunde hwan we scule festen... ("OE Homilies")
"What is wine in a wound; wine makes the wound smart. But the smarting cleans the wound, just as holy confession is in our wounds when we shall feast (?)"
36Le causateur étant inanimé, le contexte générique, on devrait d’après les critères de Fischer trouver to ici. Pourtant, ce n’est pas le cas. Fischer tente d’expliquer le phénomène de la manière suivante : "The object of what is caused is also inanimate, so that it cannot play an active part, which makes the bare infinitive again the logical choice." (1994 : 262), en s’appuyant selon toute probabilité sur le "revers" en quelque sorte de son critère II(c) ci-dessus. On ne voit pourtant pas ce qu’il y aurait de "logique" dans ceci : pourquoi la nature inanimée du S2 l’emporterait-elle ici plutôt que celle tout aussi inanimée du S, ou encore le caractère générique du contexte ? Faut-il tenter d’établir une hiérarchie de critères dans le but d’expliquer ce type de contradiction apparente, ce qui se présente comme une tâche particulièrement difficile, compte tenu du degré de variation que l’on constate dans le domaine ? Loin d’avoir tout expliqué, l’analyse proposée semble plutôt avoir compliqué davantage ce qui n’était déjà pas simple. On a l’impression qu’il manque un élément : un cadre théorique qui permette de tenir compte à la fois des intuitions de Fischer, qui paraissent tout à fait justes dans l’ensemble, et en même temps de la variation que je viens d’évoquer.
4. Un modèle d’évolution "dynamique"
37Ce cadre correspond relativement bien au modèle "dynamique" d’évolution linguistique prôné par Smith (1997), inspiré des travaux de Weinrich, Labov et Herzog (1968), entre autres, et qui s’appuie notamment sur les notions de "variational space" et de "contact". Smith voit la variation comme quelque chose de nécessaire dans le système linguistique, ainsi que la source principale d’innovations. Dans le domaine de la phonétique, par exemple, la variation dans la réalisation de tel ou tel phonème serait nécessaire pour tenir compte du fait qu’un locuteur ne prononce pas chaque fois un phonème donné exactement de la même façon, et que deux personnes différentes auront un ensemble différent de réalisations pour un même phonème. C’est ainsi que les locuteurs d’une même langue tolèrent pour les besoins de la communication plusieurs réalisations différentes d’un même élément au sein d’un "champ de variation." Smith (1997) fournit d’autres exemples dans les domaines de la syntaxe et du lexique : en ce qui concerne les causatifs, ce genre de tolérance serait nécessaire pour tenir compte de la perception et de la conceptualisation individuelle d’un phénomène aussi complexe que la causation : les notions de causation directe, immédiate ou autre relèvent souvent de notre perception subjective des événements. Ainsi peut-on postuler l’existence d’un champ de variation de la construction V[cause]OSI-TO, à l’intérieur duquel se situeraient les notions de causation indirecte, non-immédiate ou générique, par exemple. Celui-ci s’opposerait à celui de la structure V[cause]OSI, tout en le recouvrant partiellement :

38La construction VOSI+TO contiendrait dans son champ de variation davantage de situations impliquant la causation indirecte (par l’intermédiaire d’un tiers) ou non-immédiate, alors que dans le champ correspondant à VOSI se situeraient davantage de cas de causation "directe". Les deux champs se recouvrent pourtant au milieu : comme le dit Smith, "such overlaps are typically the sites of change in the linguistic system." (Smith, 1997 : 45).
39Ce genre de considération souligne le besoin de tenir compte, en plus de l’analyse d’exemples isolés, de la dimension "globale" aussi : c’est ce que j’ai essayé de faire en analysant les rôles thématiques attribués par tous les prédicats enchâssés sous les différents verbes causatifs (voir annexes). Ceci permet de dégager des tendances générales intéressantes, dont je vais me servir, notamment, pour proposer une analyse de l’évolution de MAKE causatif en m’appuyant sur la notion de champ de variation.
5. L’évolution dans le domaine causatif : le cas de MAKE
40Commençons par identifier les éléments qui vont s’avérer pertinents pour la suite de la discussion.
5.1 L’agentivité du S1
41Les tableaux 1-6 en annexe montrent la répartition par rôle thématique des sujets (S1, S2) dans quelques-uns de nos corpus de la fin du 14ème siècle. Ils permettent dans un premier temps de confirmer certaines tendances constatées plus haut : ainsi "l’opposition" entre MAKE et le causatif "principal" de chaque dialecte. Le S1 est [Agent], par exemple :
Dans les dialectes du nord :
YP : avec GAR dans 88,7 % des cas (46/52), avec MAKE dans 45,7 % (16/35)
RR : avec GAR dans 68,7 % des cas (11/16), avec MAKE dans 46,6 % (7/15)
42La différence La différence entre les deux corpus s’explique vraisemblablement par la thématique des deux textes, les œuvres de Rolle contenant davantage de prose d’inspiration religieuse, mobilisant tout simplement moins de causateurs agentifs, avec pour conséquence une baisse sensible des emplois de GAR.
Dans les dialectes des Midlands :
PP : avec DO dans 85,7 % des cas (36/42), avec MAKE dans 51,6 % (16/31)• Dans les dialectes du sud :
CA : avec DO dans 84. 6 % des cas (33/39), avec MAKE dans 54,4 % (37/68)
43La situation est légèrement différente en ce qui concerne la position de MAKE dans les oeuvres de Gower et de Chaucer, où il est en train de devenir "causatif principal". Les emplois de DO sont par conséquent moins nombreux que dans PP, par exemple.
44Il serait possible de représenter ainsi les champs de variation respectifs de MAKE et de DO ou GAR à cette période, notamment pour les dialectes du nord et des Midlands, par rapport au paramètre de l’agentivité du causateur :

5.2 L’agentivité du S2
45L’étude des données pour le corpus CA permet de mettre en évidence d’autres contrastes également. Une opposition commence à se dessiner, dans le dialecte sudiste de Gower, par exemple, entre MAKE VOSI et MAKE VOSI+TO, toujours au niveau du paramètre de l’agentivité du causateur. Un deuxième élément semble significatif dans le choix de MAKE VOSI : l’agentivité du sujet de l’infinitif. En effet, dans la construction sans to, contrairement à ce qu’avait prévu Fischer dans II(c) ci-dessus, on trouve une proportion élevée de S2 [Agent] :
15/37 MAKE VOSI (soit 40,5 %) | 2/14 MAKE VOSI+TO (soit 14 %) |
46Le même corpus contient également une proportion relativement élevée de configurations [Agent]→[Agent], des cas de "inducive causation" dans la terminologie de Kemmer & Verhagen (1994) où le sujet de l’infinitif est "poussé" à agir par l’intervention d’un autre sujet volitionnel. Cette tendance est encore plus forte dans les écrits de Chaucer (tableau 5).
47L’importance de cette configuration se confirme dans les autres dialectes aussi : elle se présente par exemple dans 16 occurrences sur 28 (61,5 %) de DO VOSI dans PP, et 20 occurrences sur 38 (52,5) % des GAR VOSI dans YP. Ainsi dans tous les dialectes que nous avons étudiés, la configuration [Ag]→[Ag] paraît à la fin du 14ème siècle particulièrement compatible avec la construction VOSI sans to. Le verbe GAR d’ailleurs, souvent associé aux contextes agentifs, ne figure que très rarement dans la structure VOSI+TO dans des textes comme PP où l’auteur l’a très vraisemblablement emprunté aux dialectes septentrionaux.
5.3 L’histoire de MAKE causatif
48Penchons-nous quelques instants sur l’histoire de MAKE causatif. On sait que le premier cas documenté de MAKE causatif avec complément infinitif date d’environ 1175, selon le OED. On a vu également qu’il est associé au départ aux contextes génériques ainsi qu’aux causateurs inanimés :
13) A vorbisne is of olde iwurne,/Ϸat neode makeϸ old wif eorne./& yet ich habbe an oϸer onswere. ("Owl and Nightingale")
"A proverb was coined a long time ago, that need makes the old woman run, and yet I have another answer."
49Même les rares cas de V+I qui ne conforment pas au modèle sémantique proposé dans 2. 2 présentent majoritairement MAKE comme V[cause] :
14) Vor hit is soϸ. Alured hit seide,/& me hit mai ine boke rede :/"Eurich ϸing mai losen his godhede/Mid vnmeϸe & mid ouerdede. "/Mid este ϸu ϸe miȝt ouerquatie,/& ouerfulle makeϸ vvlatie. ("Owl and Nightingale")
"For it is true, king Alfred said so, and one may read it in a book, everything may lose its goodness, through immoderation and through excess. You might over-glut yourself with pleasure, and too much makes feel disgust."
50A l’époque de Chaucer, on trouve toujours des MAKE génériques, avec des causateurs de type inanimé, ainsi que des cas de causation "indirecte", comme dans (15), où "hire lecherye" semble fonctionner comme une sorte d’instrument ou d’intermédiaire :
15) Fy! spek namoore – it is a grisly thyng – /Of hire horrible lust and hir likyng./Of clitermystra, for hire lecherye,/That falsly made hire housbonde for to dye. (Chaucer, "Wife of Bath’s Prologue")
"Enough ! Speak no more -it is a grisly thing- of her horrible lust and her desire, of Clytemnestra, who through her lechery treacherously made her husband die."
51Le contexte de (16) est de nouveau générique, le sujet S1 inanimé :
16) And forther over, it maketh hym that whilom was sone of ire to be sone of grace ; and alle these thynges been preved by hooly writ. (Chaucer, "Parson’s Tale")
"And furthermore, it makes him that was formerly the son of anger the son of grace, and all these things are demonstrated by the holy scriptures."
52L’anglais contemporain préférerait sans doute la construction "small clause" ici, la présence de be dans le complément entraînant généralement une lecture agentive : MAKE s’est vu attribuer un rôle tout particulier dans la langue moderne, précisément dans l’expression de la causation mettant en scène deux sujets agentifs (voir Terasawa (1985) et Lowrey (1997)).
53En plus des exemples comme (15) et (16), on trouve également dans CT des configurations [Agent]→[Agent], souvent avec la construction VOSI :
17) He yaf me al the bridel in myn hond,/ To han the governance of hous and land,/And of his tonge, and of his hond also;/And I made hym brenne his book anon right tho. (Chaucer, "Wife of Bath’s Tale")
"He gave me free rein, in my own hands, to have the governance of his house and land, and of his tongue and his hand, too ; and I made him bum his book right then, straight away."
54MAKE semble exprimer ici le sens coercitif qu’il véhicule souvent en anglais moderne, grâce en partie à un conflit supposé entre les volontés respectives des deux sujets. L’emploi de MAKE dans ce type de contexte constitue une innovation par rapport aux emplois qui lui étaient réservés lors de ses débuts en tant que causatif. Ces emplois se font, comme le confirment les données des tableaux 3 et 5, plus facilement avec un complément de type VOSI (sans to) qu’avec VOSI+TO. Une opposition commence à se dessiner entre les deux constructions, du moins dans les dialectes sudistes/londoniens de CA et CT, que l’on pourrait représenter en termes de champs de variation, de la façon suivante :

55Ceci correspond bien à ce que l’on sait de l’histoire de MAKE par la suite : ces deux champs de variation vont par la suite s’éloigner l’un de l’autre, produisant un effet "boule de neige" (Smith, 1997) à partir du 17ème siècle environ (Lowrey, 1997) : la construction sans to sera associé de plus en plus exclusivement aux contextes agentifs.
56Quant à la question de savoir pourquoi MAKE a connu cette évolution particulière au sein du système causatif du moyen anglais, il semblerait une fois encore que l’agentivité soit un facteur important. La représentation très simplifiée du système causatif de PP et de YP pourrait prendre la forme suivante, en ne tenant compte que du paramètre de l’agentivité :

57DO va bientôt quitter le groupe des causatifs, se voyant attribuer d’autres fonctions. Forme limitée essentiellement aux dialectes du nord, GAR sera probablement perçu comme un régionalisme, d’autant plus que l’arrivée de l’imprimerie et la "standardisation" relative basée sur les normes du "Chancery English" (Samuels, 1963) contribuera à l’isoler davantage. La conséquence en sera le déplacement du champ de variation de MAKE vers la gauche du schéma, pour occuper celui libéré par les deux autres verbes.
58Ce processus paraît déjà bien entamé dans le dialecte de Chaucer que Smith (1997 : 73-76) identifie comme l’un des ancêtres du futur "Chancery Standard". Les emplois de DO causatif deviennent sensiblement moins fréquents, MAKE VOSI et VOSI+TO ayant commencé à se séparer. La représentation de la situation dans CA ou CT, toujours simplifiée, prendrait plutôt la forme suivante :

59Une fois encore, la disparition du système causatif de DO (ainsi que celui, ultérieurement, de LET V+I) entraîne le décalage de MAKE vers la gauche du schéma, permettant l’entrée de CAUSE à droite. En effet, CAUSE avec complément infinitif apparaît dans les dialectes méridionaux au cours du 14ème siècle, initialement dans les mêmes contextes génériques et/ou non-agentifs où MAKE avait lui aussi fait ses débuts :
18) For every creature bore,/If thou him yive, is glad therfore,/And every gladschipe, as Ifinde,/Is confort unto loves kinde/And causeth ofte a man to spede. (Gower, "Confessio Amantis")
"For every creature born, if you give to him, is glad thereof, and all gladness, or so I find, is a comfort unto the very nature of love, and often causes a man to prosper."
60Ainsi le modèle d’évolution dynamique permet d’expliquer certaines évolutions qui se produisent au sein du groupe des causatifs, concernant non seulement le verbe MAKE mais l’ensemble du système des causatifs analytiques. Ce type d’approche nous paraît plus à même de rendre compte des variations que l’on constate dans le domaine que d’autres, plus "rigides", visant à tout expliquer sémantiquement en synchronie.
6. Conclusions
61Cette étude a permis de mettre en évidence certains facteurs qui semblent avoir influencé, en moyen-anglais, à la fois le choix du verbe causatif et en même temps celui de son complément. Nous avons vu par exemple l’importance de facteurs comme l’agentivité du causateur ou encore la nature du contexte (générique ou spécifique) pour le choix du causatif : il est intéressant de constater que, quels que soient les verbes qu’ils utilisent pour exprimer la causation, tous les dialectes du moyen-anglais semblent avoir pratiqué cette distinction. L’expression de la causation non-agentive ou générique incombe dans les premiers textes du l3ème siècle à MAKE. Quant au type de complément, nous avons défini un profil sémantique de la construction V+I causative qui démarque assez nettement celle-ci des autres structures causatives utilisées à l’époque. Nous avons vu également que le paramètre de l’agentivité, du sujet de 1’infinitif cette fois-ci, devient très important pour le choix du complément dans les textes de la fin du 14ème siècle, surtout lorsque les deux sujets possèdent le statut d’agent. Cette configuration a joué un rôle prépondérant dans l’évolution de MAKE causatif, notamment, ainsi que dans celle de CAUSE.
62Les explications proposées ici représentent nécessairement une vision très simplifiée de l’évolution des causatifs en moyen-anglais. Nous avons volontairement insisté sur 1 importance de certains critères seulement, au détriment d’autres qui ont tous contribué au processus évolutif. Nous avons préféré ne pas aborder ici un certain nombre de questions, comme les raisons qui auraient poussé V+I à quitter le système, par exemple. Par contre, nous avons souligné qu’il paraît indispensable d’aborder l’étude des modifications intervenues au sein du système causatif du moyen-anglais d’une manière qui intègre pleinement la variation considérable qui semble être la norme dans le domaine. Nous avons souligné effectivement les difficultés que posent les tentatives d’expliquer l’alternance entre compléments avec ou sans to, par exemple, selon des critères sémantiques trop rigides. C’est la raison pour laquelle le type de cadre théorique proposé par Smith (1977) semble le mieux adapté à l’étude des problèmes posés par la complémentation des causatifs, dans la mesure où il présente la variation comme quelque chose de nécessaire pour tenir compte de notre conceptualisation individuelle précisément des critères sémantiques évoqués par Fischer, entre autres, dans les analyses "classiques", et fournit en même temps une source potentielle d’évolution : ce sont précisément les domaines où les champs de variation de deux éléments se recouvrent que les changements sont susceptibles de se produire. Le modèle appelé "dynamique" par Smith fait appel à des facteurs intra-et extra-linguistiques pour expliquer l’évolution : une fois encore, ceci correspond bien au contexte où des éléments comme DO et LET sont amenés à changer de fonction, mais également où le contact entre les différents dialectes et les premiers pas vers l’instauration d’une norme littéraire influencent le comportement des locuteurs.
Bibliographie
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REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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10.1007/978-94-009-9473-7 :Dowty, D., 1979. Word Meaning and Montague Grammar, Kluwer, Dordrecht.
Fischer, O., 1994. "Verbal Complements in Early ME," English Historical Linguistics.
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10.2307/413757 :Hopper, P. & S. Thomson, 1980. "Transitivity in Grammar and Discourse," Language 56, 251-99.
Kemmel, S. & A. Verjagen, 1994. "The Grammar of Causatives and the Conceptual Structure of Events," Cognitive Linguistics 5-2, 115-156.
Lowrey, B., 1997. L’alternance entre BV et TO+V après le verbe causatif MAKE (mémoire de DEA).
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10.1016/S0024-3841(99)00004-2 :Smith, J., 1997. An Historical Study of English: Function, Form and Change, Routledge.
10.4324/9781315842295 :Song, Jae Jung, 1996. Causatives and Causation, Longman.
Terasawa, J. "The Historical Development of the Causative Use of the Verb MAKE with an Infinitive," Studia Neophilologica 57, 133-43
Visser, F., 1963-73. An Historical Syntax of the English Language, E. J. Brill.
Weinreich, U., Labov W., Herzog M., 1968. "Empirical Foundations for a Theory of Language Change," in Directions for Historical Linguistics, Lehmann & Malkiel (eds.), University of Texas Press, Austin.
Annexe
ANNEXES. Répartition des sujets S1/S2i par rôle thématiqueii
1. RR : "Works", de Richard Rolle, dialecte du Nord, env. 1335-1345
S1 | S2 | ||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | |
GAR VOSI | |||||||
14 | 9 | 5 | 6 | 5 | 3 | 3 | |
GAR VOSI PASS | |||||||
2 | 2 | 2 | |||||
16 | 11 | 5 | 6 | 7 | 3 | 3 | |
MAKE VOSI | |||||||
3 | 2 | 1 | 3 | 1 | |||
MAKE VOSI TO | |||||||
11 | 5 | 6 | 1 | 8 | 2 | ||
MAKE VOSI TO PASS | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
15 | 7 | 8 | 1 | 11 | 3 | 1 | |
DO VOSI | |||||||
1 | 1 | 1 | 1 | ||||
1 | 1 | 1 | 1 |
2. YP : "York Mystery Plays", env. 1380 (?), dialecte du Nord (Yorks.)
S1 | S2 | ||||||
[Ag] | [Cs][Ag] | [Th] | [Exp) | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | ||
GAR VOSI | |||||||
37 | 31 | 6 | 21 | 14 | 3 | 20 | |
GAR VOSI PASS | |||||||
2 | 2 | 2 | |||||
GAR V+1 | |||||||
13 | 13 | (13) | (13) | ||||
52 | 46 | 6 | 21(+13) | 16 | 3 | 20(+13) | |
DO VOSI | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
DO VOSI TO | |||||||
2 | 1 | 1 | 1 | 1 | |||
3 | 2 | 1 | 2 | 1 | |||
MAKE VOSI | |||||||
10 | 2 | 8 | 6 | 6 | |||
MAKE VOSI TO | |||||||
25 | 14 | 11 | 13 | 8 | 5 | 1 | 7 |
35 | 16 | 19 | 19 | 14 | 5 | 1 | 8 |
3. CA : "Confessio Amantis", John Gower, dialecte de Londres/South-East Midlands, fin 14ème siècle
S1 | S2 | ||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dép] | [Ag]→[Ag] | |
MAKE VOSI | |||||||
34 | 22 | 12 | 15 | 9 | 10 | 3 | 10 |
MAKE VOSI TO | |||||||
14 | 7 | 7 | 2 | 8 | 2 | 2 | 1 |
MAKE VOSI FOR TO | |||||||
11 | 6 | 5 | 4 | 8 | 2 | ||
MAKE+ϷAT | |||||||
4 | 4 | 2 | 1 | 1 | |||
MAKE V+1 | |||||||
1 | (1) | ||||||
MAKE+PA PART | |||||||
4 | 2 | 2 | |||||
68 | 37 | 30 | 23 | 26 | 14 | 5 | 13 |
DO VOSI | |||||||
8 | 6 | 2 | 1 | 4 | 3 | 1 | 1 |
DO VOSI TO | |||||||
6 | 5 | 1 | 3 | 2 | 2 | ||
DO VOSI FOR TO | |||||||
13 | 10 | 3 | 2 | 1 | 9 | 1 | 1 |
DOV+1 | |||||||
10 | 10 | (10) | (10) | ||||
DO ϷAT | |||||||
2 | 2 | 2 | |||||
39 | 33 | 6 | 6(+10) | 9 | 14 | 2 | 2(+10) |
LET V+1 | |||||||
20 | 20 | (21) | (21) | ||||
LET V+V+1 | |||||||
13 | 13 | (13) | (13) | ||||
33 | 33 | (34) | (34) | ||||
CAUSE VOSI TO | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
CAUSE V+TO+1 | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
CAUSE V+FOR TO+1 | |||||||
1 | 1 | (1) | |||||
3 | 3 | (1) | 2 |
4. CP : Chaucer prose works : "Tale of Melibee", "Parson’s Tale", "Boece", "Treatise on the Astrolabe"
S1 | S2 | ||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | |
MAKE VOSI | |||||||
9 | 5 | 4 | 5 | 4 | 1 | 3 | |
MAKE VOSI TO | |||||||
18 | 7 | 11 | 4 | 7 | 6 | 1 | 2 |
MAKE VOSI FOR TO | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
MAKE+ϷAT | |||||||
5 | 1 | 4 | 2 | 3 | |||
MAKE V+1 | |||||||
1 | 1 | (1) | (1) | ||||
34 | 15 | 19 | 9(+1) | 14 | 10 | 1 | 5(+1) |
LET V+1 | |||||||
4 | 4 | (5) | (5) | ||||
4 | 4 | (5) | (5) | ||||
DO VOSI | |||||||
2 | 1 | 1 | 2 | ||||
DO VOSI TO | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
3 | 1 | 2 | 2 | 1 |
5. CT : Chaucer, "The Canterbury Tales", env. 1387-1399, dialecte de Londres/South-East Midlands
S1 | S2 | ||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | |
MAKE VOSI | |||||||
42 | 34 | 8 | 23 | 11 | 9 | 21 | |
MAKE VOSI TO | |||||||
27 | 16 | 11 | 11 | 14 | 3 | 7 | |
MAKE VOSI FOR TO | |||||||
14 | 6 | 8 | 3 | 9 | 1 | 1 | 1 |
MAKE VOSI PASS | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
MAKE+ϷAT | |||||||
8 | 1 | 7 | 5 | 2 | 1 | ||
92 | 57 | 35 | 42 | 37 | 14 | 1 | 29 |
S1 | S2 | ||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | |
DO VOSI | |||||||
12 | 9 | 3 | 4 | 8 | 2 | 4 | |
DO VOSI TO | |||||||
3 | 3 | 2 | 1 | 2 | |||
DO+ϷAT | |||||||
1 | 1 | 1 | |||||
DO V+1 | |||||||
19 | 19 | (19) | (19) | ||||
35 | 32 | 3 | 6(+19) | 9 | 2 | 1 | 6(+19) |
CAUSE VOSI TO | |||||||
3 | 1 | 2 | 1 | 1 | 1 | 1 | |
CAUSE VOSI FOR TO | |||||||
1 | 1 | (1) | |||||
5 | 1 | 4 | 2(+1) | 1 | 1 | 1 | |
LET V+1 | |||||||
15 | 15 | (15) | (15) | ||||
LET V+V+1 | |||||||
3 | 3 | (3) | (3) | ||||
18 | 18 | (18) | (18) |
6. PP :"Piers Plowman", W. Langland, env. 1375-80, dialecte des South-West Midlands
S1 | S2 | |||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | ||
MAKE VOSI | ||||||||
11 | 7 | 4 | 8 | 4 | 3 | 3 | ||
MAKE VOSI TO | ||||||||
18 | 9 | 9 | 12 | 4 | 4 | 1 | 6 | |
MAKE +ϷAT | ||||||||
2 | 2 | 2 | ||||||
31 | 16 | 15 | 20 | 10 | 7 | 1 | 9 | |
DO VOSI | ||||||||
23 | 20 | 3 | 19 | 4 | 3 | 16 | ||
DO VOSI TO | ||||||||
5 | 4 | 1 | 1 | 1 | 4 | 1 | ||
DO VOSI FOR TO | ||||||||
2 | 1 | 1 | 2 | 1 | ||||
DO V+1 | ||||||||
12 | 11 | 1 | (12) | (12) | ||||
42 | 36 | 6 | 22(+12) | 5 | 7 | 18(+12) | ||
S1 | S2 | |||||||
[Ag] | [Cs] | [Ag] | [Th] | [Exp] | [Bén/Dét] | [Ag]→[Ag] | ||
GAR VOSI | ||||||||
3 | 3 | 1 | 2 | 1 | ||||
GAR VOSI TO | ||||||||
4 | 4 | 1 | 3 | 1 | ||||
GAR V+1 | ||||||||
1 | 1 | (1) | (1) | |||||
8 | 8 | 2(+1) | 5 | 2(+1) | ||||
LET V+1 | ||||||||
7 | 7 | (7) | (7) |
Notes de bas de page
1 J’utilise les majuscules pour désigner à la fois toutes les variantes orthographiques ou régionales d’un causatif moyen-anglais ainsi que le verbe correspondant en anglais contemporain.
2 VOSI : "verb + object/subject + infinitive." Le terme est de Visser (1963-73).
3 V+I : "verb + infinitive" (d’après Denison, 1993).
Notes de fin
i Compte tenu des cas de coordination infinitive, le nombre total de S2 peut dans certains cas dépasser le chiffre correspondant pour les S1.
ii Les rôles thématiques sont représentés de la manière suivante :
[Ag] : Agent
[Cs] : Cause
[Th] : Thème
[Exp] : Expérient
[Bén/Dét] : Bénéficiaire ou Détrimentaire
[Ag]→[Ag] : S1/S2 Agents
Auteur
Université d’Artois, Lille III
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Répétition, répétitions : le même et ses avatars dans la culture anglo-américaine
Jean-Paul Regis (dir.)
1991
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Jean-Paul Regis, Maryvonne Menget et Marc Chenetier (dir.)
1988
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Michel Fabre, Claude Julien et Trevor Harris (dir.)
1998
Le crime organisé à la ville et à l'écran aux États-Unis, 1929-1951
Trevor Harris et Dominique Daniel (dir.)
2002