Analyse informationnelle dans un environnement complexe : vers un système d’aide à l’interprétation des besoins « SAIB »
p. 221-233
Résumés
L’exploitation des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) et leur intégration plus que nécessaire dans le fonctionnement des entreprises font que les PME s’appuient sur des cabinets d’audit et de conseil pour les aider dans leur évolution, en particulier dans le domaine des nouvelles technologies qu’elles sont loin de maîtriser. La complexité du domaine des TIC, sa dynamique et sa perpétuelle évolution font que les informations utilisées pour identifier les besoins en la matière deviennent de plus en plus complexes et couvrent un spectre très large, difficile à cerner. Ceci est dû en grande partie à la diversité des acteurs et par conséquent à la multiplicité des référentiels informationnels de ces mêmes acteurs qui interviennent dans le processus. Pour répondre à cette problématique, nous proposons un Système d’Aide à l’Interprétation des Besoins (SAIB) et à la capitalisation des connaissances dont le fondement est construit sur un rapprochement des référentiels de ces différents acteurs.
Information and Communication Technologies (ICT) and their integrations are key elements and necessary for the development of Small or Medium Enterprises (SMEs). Consulting and Audit companies help them to develop new information and communication technologies. This ICT field is very complex, dynamic and in perpetual evolution and information used in order to identify needs, are more and more complex and difficult to determine. The number of actors and the user profiles are important. In order to answer this problem, we develop a System for the Interpretation of Needs or « Système d’Aide à l’Interprétation des Besoins » (SAIB). This tool is based on the user profiles of these actors.
Entrées d’index
Mots-clés : profil utilisateur, expression des besoins en information, approche tridimensionnelle, système d’aide à l’interprétation des besoins, technologies de l'information et de la communication (Tic)
Keywords : new information and communication technologies, user profile, expression on information needs, three-dimensional approach, system assistance of interpretation on the needs
Texte intégral
INTRODUCTION
1L’importance capitale accordée actuellement aux systèmes d’information et aux nouvelles technologies dans le domaine du management des organisations n’est plus à démontrer (Florent, 1991), (Humbert, Lesca, 1995). Le management « moderne » se caractérise par l’exploitation optimale des ressources informationnelles dont dispose l’organisation et ce à travers son système d’information. Ce qui garantit à l’organisation non seulement l’acquisition et/ou le maintien de sa compétitivité au niveau économique mais surtout assure sa pérennité et sa survie (Marciniak, 1997), (Laudon, Laudon, 2001).
2L’intégration de ces outils, plus qu’indispensable, est une « affaire » de spécialistes. Les entreprises se font de plus en plus assister par des cabinets d’audit et de conseil en système d’information afin d’intégrer ces outils, les exploiter et en tirer le meilleur profit (Thorin, 2001). Ces cabinets d’audit et de conseil permettent à l’entreprise de faire face aux évolutions imposées par le mode socioéconomique et de bénéficier d’une approche de capitalisation des expériences et ce à travers une démarche de conduite de changement (Carlier, 1992).
3Le problème auquel sont confrontées ces organisations se situe au niveau de l’expression de leurs besoins. En effet et contrairement aux « grosses structures », les Petites et Moyennes Entreprises (PME) ne disposent pas de Direction des Systèmes d’Information (DSI) dont la charge principale est d’identifier le besoin de l’entreprise et de l’exprimer auprès de prestataires et notamment des cabinets d’audit et de conseil. L’identification des besoins et leur formulation constituent un réel problème car reste en grande partie à la charge des PME.
4S’appuyant sur des requêtes loin d’être rigoureuses, les cabinets d’audit et de conseil essayent dans un premier temps d’identifier au mieux ces besoins. Leur référentiel informationnel est différent de celui des personnes chargées de l’expression des demandes dans les PME. Pour ces cabinets, la difficulté se situe plus au niveau de l’identification exacte de la demande que sur la préconisation de solutions.
5Cette thématique constitue l’essentiel de notre article. Nous proposons, après une définition du cadre de la problématique traitée, une démarche méthodologique sur laquelle nous nous appuyons pour tenter d’apporter une solution. Cette démarche est suivie d’une analyse des référentiels informationnels des différents acteurs qui interviennent dans le processus d’expression et d’interprétation, aboutissant à une approche de médiation qui nous permet de rapprocher les référentiels. En d’autres termes, faire converger la formulation des besoins et leur interprétation.
CADRE DE L’ÉTUDE
6L’identification des besoins par les cabinets d’audit et de conseil se fait à travers des informations que l’on qualifie de « complexes ». L’ambiguïté des informations servant à exprimer les besoins est essentiellement due à l’étendue du champ d’application du domaine couvert, à la mutation croissante du contexte technologique et à l’hétérogénéité des profils des acteurs humains qui interviennent.
FORMULATION DES BESOINS DANS UN ENVIRONNEMENT COMPLEXE : DOMAINE DE L’AUDIT ET DU CONSEIL EN SYSTÈME D’INFORMATION
7Les problèmes liés à l’expression des besoins sont omniprésents dans différents domaines. Ils sont cependant très accentués dans le domaine de l’audit et du conseil en système d’information et nouvelles technologies. Nous relevons au moins deux sortes de contraintes :
La rapidité de l’évolution de l’environnement des systèmes d’information et des nouvelles technologies,
La complexité du vocabulaire utilisé pour représenter les informations de ce domaine.
L’ÉVOLUTION DE L’ENVIRONNEMENT
8L’avènement de l’Internet, le phénomène de mondialisation et la globalisation des échanges ont engendrés une véritable accélération de la volonté des organisations pour intégrer les nouvelles technologies. Conscientes de l’importance de ces outils, les PME se trouvent face à des situations où l’apport des nouvelles technologies fait partie de la stratégie globale de l’organisation (TARD 91]. Reste que l’identification des besoins réels dans le domaine technologique relève plus de l’expertise « technique » que de l’expertise « métier ». Certes ces derniers possèdent des compétences nécessaires à leurs activités mais sont loin d’être tous en mesure d’identifier des besoins pouvant être couverts par ces technologies.
LA COMPLEXITÉ DU VOCABULAIRE
9L’évolution du domaine des nouvelles technologies s’accompagne par un changement perpétuel du vocabulaire lié à la spécialité. Prétendre « saisir » les innovations langagières demeure un réel défi pour ces PME d’autant plus qu’elles ne disposent pas d’experts techniques. Ces derniers sont capables, entre autres, de se tenir informés sur le moindre progrès technologique, ce qui requiert de leur part une actualisation constante du vocabulaire.
10En somme, l’innovation et la dynamique évolution du domaine des nouvelles technologies et du langage technique font que les informations utilisées pour identifier les besoins en la matière deviennent de plus en plus complexes et couvrant un spectre très large qui est difficile à cerner.
HÉTÉROGÉNÉITÉ DES CADRES DE RÉFÉRENCES
11Les ressources humaines dont disposent les PME sont fondées essentiellement autour d’experts métier. L’analyse des besoins formulés par ces acteurs est assurée par des acteurs techniques. Chaque acteur intervenant dans le processus d’expression ou d’interprétation des besoins s’appuie sur un ensemble de paramètres qui lui sont propres. Ces paramètres peuvent être de différentes natures. Certains relevant plus des compétences métiers, d’autres de compétences techniques, voire même de l’expérience de chacun. C’est ce que l’on définit comme le « cadre de référence ».
12Nous nous appuyons sur l’hypothèse essentielle pour notre démarche que les cadres de référence constituent l’élément fondamental dans les difficultés rencontrées par les différents acteurs pour l’expression et l’interprétation des besoins. Pour valider cette hypothèse et identifier au mieux les différents cadres de référence, nous nous sommes appuyés sur une démarche dont nous donnons ci-dessous les idées directrices.
QUELLE MÉTHODOLOGIE POUR L’ANALYSE DE L’EXPRESSION ET L’INTERPRÉTATION DES BESOINS DANS UN ENVIRONNEMENT COMPLEXE ?
13L’expression des besoins et leur interprétation dépendent à la fois de l’évolution des technologies de l’information et de la communication, de la sphère professionnelle de l’entreprise et des acteurs humains. Afin d’analyser ces différents éléments, nous allons nous appuyer sur l’approche nommée « approche tridimensionnelle » (Bouzidi, 2001).
14L’approche tridimensionnelle puise son fondement du paradigme orienté « usager » qui, contrairement au paradigme orienté « système », permet de prendre en considération des aspects autres que technologiques et ce en mettant l’acteur humain au centre de la conception du système et non pas l’inverse (Amos, 1999), (Chaudiron, Ihajadene, 2002). Même si l’acteur humain constitue le socle de notre démarche, elle s’appuie fortement sur l’activité et les outils technologiques.
15Trois dimensions identifient cette approche : la dimension cadre/activité permet de disséquer l’activité et de mettre en relief le processus d’expression des besoins, la dimension humaine s’attache à étudier les caractéristiques des différents acteurs humains et la dimension technologique identifie les outils technologiques qui optimisent l’activité. Chacune de ces dimensions nous permet de clarifier une facette de notre problématique.
L’INFLUENCE DU CONTEXTE PROFESSIONNEL : LA DIMENSION CADRE/ACTIVITÉ
16L’activité des entreprises clientes peut couvrir un champ aussi large que l’activité économique. Du voisinage de cette activité par rapport à l’utilisation des nouvelles technologies dépend en grande partie la justesse de l’expression des besoins et par conséquent leur interprétation par le cabinet d’audit et de conseil.
17Cependant, le problème qui se pose est qu’un cabinet d’audit et de conseil peut être amené à intervenir dans plusieurs domaines. Il peut être sollicité par des organisations qui appartiennent à des champs d’activités allant du bâtiment au tourisme en passant par le transport, l’informatique et l’hôtellerie. L’environnement socio-professionnel d’appartenance des organisations clientes reste tout de même assez hétérogène par rapport au métier d’audit et de conseil en système d’information et nouvelles technologies.
18Afin de traiter cette facette de notre problématique, la dimension cadre nous permet d’analyser les caractéristiques des différents environnements et ce au travers d’un ensemble de niveaux. Le niveau organisationnel permet de préciser l’environnement global dans lequel l’activité est assumée. Le niveau fonctionnel dégage les différentes fonctions qui représentent l’activité en question. Le niveau structurel identifie les ressources humaines et matérielles nécessaires pour l’activité. Cet ensemble de niveaux permet de dégager les flux informationnels et les processus qui les génèrent.
19L’enjeu fondamental de la dimension cadre est de faire correspondre à chaque niveau, décrit ci-dessus, un ensemble d’informations et de connaissances qui seront formalisées pour qualifier l’activité étudiée. Elles seront enrichies, complétées par la dimension humaine, et exploitées d’une façon optimale au moyen de la dimension technologique.
LE RÔLE DU FACTEUR HUMAIN : LA DIMENSION HUMAINE
20La dimension humaine s’attache à analyser les caractéristiques des acteurs humains qui interviennent dans l’activité tant au niveau de la conception du système d’information (acteur conseil) que dans son exploitation (acteur client). Cette dimension s’articule autour de plusieurs volets, nous citons : l’analyse des référentiels et les caractéristiques des acteurs humains impliqués dans le processus et l’identification de leurs besoins informationnels.
21Comprendre et analyser les référentiels des acteurs humains impliqués dans l’activité est un point d’entrée indispensable. Cette compréhension des acteurs commence, selon nous, par une connaissance des caractéristiques strictement individuelles que nous qualifions de « paramètres ou caractéristiques endogènes ». Nous citons les plus importantes qui représentent autant d’éléments qui permettent de cerner le « comportement » d’un individu dans une situation donnée : le profil de formation, le parcours socioprofessionnel et le niveau de connaissance dans un domaine ou un métier.
22Cette vue individuelle est insuffisante pour cerner un acteur humain en matière de qualification et de capacité à assumer un rôle bien défini. Il semble nécessaire de chercher des caractéristiques qui sont liées à son environnement et à son contexte sociétal général. C’est ce que nous qualifions de « paramètres ou caractéristiques exogènes ».
23L’identification et l’analyse de ces deux groupes de variables endogènes et exogènes nous permettront de cerner au mieux les caractéristiques des acteurs humains qui interviennent dans le processus mais aussi d’identifier et de comprendre les sources de divergences entre ces mêmes acteurs.
24Notre domaine d’étude est délimité par au moins deux cadres de référence. Le premier cadre s’appuie essentiellement sur le métier du groupe chargé de formuler la demande de service. Le second se fonde sur l’activité des acteurs responsables de l’analyse des besoins et de la préconisation des solutions.
25Une étude pragmatique (Boulesnane, Bouzidi, 2006) nous a permis d’identifier un ensemble de paramètres endogènes tels que :
Le profil de formation « spécialité »,
Le parcours professionnel : domaines d’expertise,
Les connaissances en matière de technologie « cursus ».
26Et des paramètres exogènes qui sont organisés autour de critères contextuels et sociaux tels que :
La fonction exercée et les rôles assumés,
La qualification des entreprises où a exercé l’acteur « performance, métier, ... »,
L’environnement socio-économique où a évolué professionnellement l’acteur en question.
27Loin d’être exhaustifs, tant pour les paramètres endogènes que pour les paramètres exogènes, la qualité de chaque paramètre dépend en grande partie de l’acteur, certes, mais aussi de la nature des besoins réels de l’entreprise en matière d’intégration des nouvelles technologies dans les systèmes d’information. Nous représentons ces différents paramètres dans la figure suivante.

Fig. 1. Caractéristiques des acteurs humains dans un contexte d’audit et de conseil.
28Afin d’identifier les besoins informationnels des acteurs humains, nous proposons de partir des profils qui caractérisent ces acteurs. L’analyse de ces besoins permet de cerner leurs attentes en terme d’informations qui sont nécessaires dans l’exercice de leurs activités. Ces informations seront prises en considération dans la dimension technologique. Nous résumons les principaux besoins informationnels des acteurs humains par les points suivants :
Sur le plan conceptuel, l’attente de l’acteur client serait d’avoir une aide afin d’identifier son besoin réel, de le formuler et de le situer dans l’organisation. Sur le plan technique, les résultats attendus touchent à l’exploitation, l’optimisation et l’évolution du système d’information et aux limites de ce système au niveau opérationnel et stratégique.
L’acteur conseil a besoin d’avoir une vision claire du problème exprimé par son client. Ce qui lui permet de situer l’origine du problème, les causes de son émergence, les coûts générés et les attentes du client.
L’IMPORTANCE DU CONTEXTE TECHNOLOGIQUE : LA DIMENSION TECHNOLOGIQUE
29La dimension technologique permet d’analyser les problèmes que rencontrent les acteurs humains dans un contexte d’audit et de conseil en système d’information et nouvelles technologies en matière d’outils technologiques assurant une optimisation de l’activité. Elle permet également de définir les éléments technologiques fondamentaux d’une approche d’aide à l’interprétation.
30Plusieurs volets sont déclinés, en particulier le niveau fonctionnel qui sert à identifier les fonctions réalisées par les outils technologiques en décrivant leurs performances mais aussi les limites de leur adaptabilité et d’utilisation. Le niveau organisationnel s’attache à décrire les ressources matérielles et humaines à mettre en place pour que l’intégration des outils technologiques s’adapte à l’activité. Le niveau opérationnel, lié à la mise en œuvre et à l’exploitation de cet outil technologique, apporte une assistance aux différents acteurs humains lors de l’exploitation de ces outils. De même qu’il met en relief l’importance de la phase d’accompagnement et d’aide au changement nécessaire lors de l’intégration des nouvelles technologies dans le processus fonctionnel des entreprises.
31L’approche tridimensionnelle nous a certes aidée dans la compréhension de notre problématique. Elle nous a permis de disséquer les différents éléments constitutifs et nous a offert un cadre méthodologique sur lequel nous nous sommes appuyés. Un second volet de notre problématique est d’ordre linguistique. En effet, l’identification des besoins, leur formulation et leur interprétation reposent en grande partie sur des expressions langagières.
32Un volet important de notre approche est fondé sur l’identification des référentiels et la mise en place d’un processus de convergence de ces mêmes référentiels. Ce processus de convergence s’appuie sur des outils à la fois linguistiques et technologiques. L’acteur humain restant toujours l’élément ou le composant fondamental de l’approche que nous proposons.
CONVERGENCE DES RÉFÉRENTIELS : VERS UN SYSTÈME DE MÉDIATION PERMETTANT LA JUSTE EXPRESSION DES BESOINS
33À partir d’une étude sur le terrain1 que nous avons affinée, nous avons recensé des situations où pour un même concept, l’utilisateur non expert emploie des désignations multiples. Avec l’usage, les utilisateurs, qui ne sont pas spécialisés dans le domaine des systèmes d’information et des nouvelles technologies ont tendance à s’approprier certains termes et à les utiliser dans des contextes qui ne sont pas adéquats avec le contexte réel. Un même concept est identifié et qualifié par plusieurs expressions, ce qui engendre plusieurs interprétations et rend l’identification des besoins des clients difficile (Boul, 2004).
34La première étape d’analyse consistait à élaborer une liste de termes qui font l’objet de confusion dans ce contexte. Nous citons à titre d’exemple : applicatif, architecture des systèmes d’information, architecture client-serveur, audit des systèmes d’information, bases de connaissances, etc. Cette liste a constitué le noyau d’un lexique de départ que nous avons construit et enrichi en mettant en relief les relations inter - concepts et en particulier celles liées à l’usage.
35Le lexique a fait l’objet d’une analyse linguistique (Touratier, 2000), (Lehmann, Martin-Berthet, 1998) faisant apparaître des relations que l’on qualifie de « contextuelles ». Même si l’analyse est fondée sur des concepts linguistiques, nous nous sommes intéressés à un niveau plus pragmatique. De cette analyse, il en ressort à titre d’exemple, qu’au concept synonyme au sens classique du terme est associé un deuxième niveau d’interprétation : la synonymie « liée à l’usage ». Cette seconde étape nous a permis de prendre conscience que les usagers substituent les termes les uns par les autres selon le contexte, leur profil, leur niveau en matière de systèmes d’information et de nouvelles technologies et le type d’entreprise à laquelle ils appartiennent. En somme, c’est en fonction de son référentiel qu’un acteur identifie et exprime ses besoins (Boulesnane, Bouzidi, 2006).
36Par la suite, le filtrage et le traitement de notre corpus ont permis de rassembler des groupes de mots qui se caractérisent par des relations sémantiques identiques. Afin de mettre en relief les concepts et les liens inter concepts, nous nous sommes appuyés sur la théorie des graphes (Fame, 1986), (Gordan, Minoux, 1985). Notre objectif est de rendre compte de l’importance de certains termes, de la force de certains liens et de permettre une visualisation du graphe par l’utilisateur. En voici un extrait du graphe et des relations liées à l’usage.

Fig. 2. Extrait du modèle représentant le lexique : thésaurus (Boulesnane, 2004).
37Cette étape débouche sur la constitution d’un lexique. À la différence des lexiques « classiques », notre thésaurus permet de prendre en considération le niveau contextuel identifié par des relations linguistiques que nous avons qualifiées de relations liées à l’usage.
STRATÉGIE GLOBALE DE L’APPROCHE : PROGRESSION DANS L’ANALYSE
38Les ressources linguistiques, que ce soit les synonymes ou les hyponymes liés à l’usage, ainsi représentées permettent au cabinet d’audit et de conseil d’explorer les différentes pistes de confusions dans l’emploi d’un terme donné. Ces pistes sont constituées d’un ensemble de « termes candidats » qui délimitent ce que l’on appelle un « intervalle de confusion ». On définit la notion d’intervalle de confusion comme le sous graphe constitué des concepts pouvant commuter avec le terme considéré. Si les termes sont en commutation directe avec ce dernier, l’intervalle de confusion est qualifié d’intervalle« immédiat ». À l’inverse, si le sous-graphe prend en considération des termes en liaison indirecte avec le mot faisant objet de confusion, l’intervalle est qualifié de « profond ». L’intervalle profond inclut l’intervalle immédiat, son extension peut couvrir la totalité du graphe (Boulesnane, Bouzidi, 2005).
39L’exploitation de l’intervalle immédiat permet à l’utilisateur d’éviter de se perdre dans sa recherche. Il ne faut pas perdre de vue que ce premier niveau rassemble les relations linguistiques liées à l’usage qui sont immédiatement substituables avec le terme qui fait l’objet de confusion. Le passage à l’intervalle profond ne se fait que lorsque l’utilisateur souhaite affiner sa recherche.
40L’approche d’aide à l’interprétation des besoins que nous proposons dépend certes des outils de représentation et d’exploitation de l’information, mais l’expert humain reste l’ultime décideur qui oriente l’usage des informations. En effet, l’approche est fondée sur une démarche d’essence heuristique dont l’objet fondamental n’étant pas de garantir le choix le plus efficace mais d’assister l’utilisateur par la proposition des voies potentielles qu’il peut suivre pour résoudre son problème. Ces voies sont constituées des différents intervalles : immédiat et profond. L’utilisateur dispose au départ de plusieurs voies d’interprétations possibles et ce n’est que par le resserrement progressif de ces voies que l’affinement du besoin est rendu possible.
ARCHITECTURE DE L’APPROCHE
41L’approche d’aide à l’interprétation des besoins offre à l’utilisateur, en fonction du profil du client, des termes sur lesquels porte la confusion, l’exploration du voisinage des termes en question. Le développement de cette interface permet d’apporter à l’utilisateur des réponses rapides mais aussi pertinentes. L’étude de l’adaptabilité de l’outil se fait tant au niveau de l’inventaire des différentes représentations possibles qu’au niveau des conditions de fiabilité d’accès aux informations (Boulesnane, Bouzidi, 2006).
42L’approche tridimensionnelle nous permet au final d’avoir une architecture globale du système d’aide à l’interprétation des besoins que nous proposons et ce au travers l’interaction des trois dimensions : la dimension cadre/activité, la dimension humaine et la dimension technologique.

Fig. 3 : Architecture du système : interaction des dimensions (Bouzidi, 2001).
CONCLUSION
43La réflexion présentée dans cet article a pour objet principal de traiter du processus d’expression des besoins dans une activité d’audit et de conseil en système d’information et nouvelles technologies. Cette activité fait intervenir des populations hétérogènes se caractérisant par une diversité au niveau des référentiels. Nous nous sommes appuyés sur l’approche tridimensionnelle qui nous a offert non seulement un cadre théorique qui s’adapte à notre problématique et aux propositions que nous faisons, mais aussi de placer l’acteur humain au centre de notre démarche. C’est par une appréhension du domaine d’étude à travers la dimension cadre/activité, une analyse des référentiels des différents acteurs humains et une dimension technologique représentée par des méthodes et des outils de représentation et d’exploitation des bases d’informations que nous avons développé notre proposition de système d’aide à l’interprétation des besoins.
44Le degré de pertinence d’un système d’aide à l’interprétation des besoins (SAIB) dépend non seulement des techniques d’indexations et d’acquisitions des informations mais également de l’utilisateur, de son profil et de sa démarche d’interrogation et de recherche.
45À partir de cette analyse mêlant linguistique, analyse du facteur humain et outils technologiques nous avons décelé quelques approfondissements nécessaires à notre approche en particulier celles touchant à la caractérisation des utilisateurs et du domaine d’application.
46Actuellement, nous envisageons d’affiner notre démarche par l’amélioration de la grille de classification des usagers et l’élargissement du corpus. De plus, nous sommes sur le point de mettre en place au moyen d’outils technologiques simples un prototype qui nous permet de valider à la fois la démarche utilisée, mais surtout l’approche fondée sur la convergence des référentiels. Cet outil de capitalisation des connaissances assistera le cabinet d’audit et de conseil dans la phase d’analyse des besoins.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Enquête réalisée en 2003, affinée en 2004, 2005.
Auteurs
Doctorante, Allocataire de recherche
Professeur des Universités
Équipe Sicomor, Centre de Recherche MAGELLAN, IAE, Université Jean Moulin, Lyon III
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Quatre ans de recherche urbaine 2001-2004. Volume 2
Action concertée incitative Ville. Ministère de la Recherche
Émilie Bajolet, Marie-Flore Mattéi et Jean-Marc Rennes (dir.)
2006
Quatre ans de recherche urbaine 2001-2004. Volume I
Action concertée incitative Ville. Ministère de la Recherche
Émilie Bajolet, Marie-Flore Mattéi et Jean-Marc Rennes (dir.)
2006