Léonard et la cuisine, de la Toscane à la France
p. 89-102
Texte intégral
1Léonard de Vinci est sans nul doute le plus connu des italiens venus en France à la Renaissance. L’un de ses derniers écrits, une démonstration de géométrie, se termine abruptement par « etc. car la soupe refroidit » et l’on imagine sa servante Mathurine l’appelant de la cuisine du Clos Lucé à Amboise. Cet effet de réel émouvant créé par la petite note renvoie à la question complexe du rapport à l’alimentation du grand artiste-ingénieur. Léonard était-il végétarien1 ?
2Une lettre à Julien de Médicis d’un voyageur en Orient du nom d’Andrea Corsali (1487- ?), décrivant une peuplade indienne hindouiste qui refuse de faire couler de sang et qui ne mange aucun animal, mentionne de façon très explicite les habitudes diététiques de son contemporain :
Certains infidèles nommés Guzzarati sont si gentils qu’ils ne se nourriraient d’aucun être dans lequel coule du sang et ils ne permettraient pas plus que l’on blesse tout être vivant, comme notre Leonardo da Vinci.2
3 Ce témoignage est parfois mis en relation avec des textes des carnets léonardiens. Certaines prophéties/charades écrites pour amuser la cour de Milan semblent en effet indiquer une certaine répulsion vis-à-vis de l’idée d’infliger la mort pour les besoins alimentaires des hommes ; ainsi, la phrase « Les maîtres des domaines mangeront leurs laboureurs » renvoie-t-elle aux bœufs que l’on mange3. Plus loin, la prophétie « à celles qui les nourrissent ils infligeront une mort barbare dans les tortures » fait en fait allusion aux animaux que l’ont dévore après les avoir tués4. Ailleurs encore la prédiction « Les temps d’Hérode reviendront ; les enfants innocents seront arrachés à leurs nourrices et mourront de grandes blessures, aux mains d’hommes sans pitié » fait simplement allusion aux chevreaux5.
4La présentation que fait Giorgio Vasari dans ses Vies des artistes d’un Léonard ami indéfectible des animaux appuie l’impression que donnent les charades :
Il eut toujours des chevaux, qu’il appréciait beaucoup, qu’il aimait particulièrement plus que tous les autres animaux, et qu’il supportait et élevait avec grand amour et patience. Et il arrivait que souvent que, passant par des lieux où l’on vendait des oiseaux, il les sortait de leur cage d’une main, leur redonnant la liberté perdue, et payait de l’autre à qui les vendait le prix requis.
5Léonard dans ses prophéties semble aussi hostile au fait que l’on mange des œufs et même au fait que l’on récolte du miel. Ce faisceau d’indices a suffi pour qu’aujourd’hui Léonard soit enrôlé aux côtés des végétariens et des « véganes » (végétaliens) au risque de tous les anachronismes. Pourtant, une autre série d’indices, qui contredisent les premiers, instillent un doute par rapport à ces certitudes et à l’interprétation des charades de cour. Un certain nombre de textes de la main de Léonard semblent en effet indiquer que le maître pratiqua à plusieurs reprise la vivisection : pour extraire des pigments rouge d’une sèche, pour étudier les mouvements d’aile d’une libellule, pour percer le secret des battements cardiaques en enfonçant des poinçons dans le cœur d’un porc encore vivant, etc. De plus, dans plusieurs passages de ses codices, Léonard décrit sans les condamner le moins du monde des cuisines pleines de jambons et de saucisses. Enfin, à aucun moment il ne se décrit explicitement lui-même comme végétarien. Peut-être serait-il dès lors judicieux de déplacer un instant le débat piégé par la polémique et passer simplement en revue les quelques textes de Léonard relatifs à l’alimentation ?
6 Plusieurs ouvrages ont été récemment consacrés à la relation qu’entretenait Léonard avec la cuisine de la Renaissance. Le premier fut publié originellement en anglais et traduit en italien sous le titre Note di Cucina di Leonardo da Vinci6. L’autre rédigé par le journaliste Sandro Masci s’intitule dans la traduction française Léonard de Vinci et la cuisine de la Renaissance7. Le premier des deux livres, pour utiliser un euphémisme, n’a rien de scientifique et repose sur un très pastiche Codex Romanoff (un recueil de recettes qu’aurait écrit Léonard) ainsi que sur des interprétations délirantes et comiques de dessins de Léonard. Le second est mieux informé mais fonctionne sur un autre principe : rendre compte de ce qu’était la cuisine « au temps de Léonard » à partir de compte rendus de banquets et de traités de cuisine contemporains. Il exclue le Codex Romanoff des sources digne de foi, en revanche, lorsqu’il entreprend de faire la liste des codices de Léonard, il reste trop général et ne repère pas toutes les allusions du maître à des questions d’alimentation. Le présent article se propose d’abord de faire pièce des fables colportées et ensuite de procéder à l’inventaire des quelques indices à notre disposition pour évoquer vraiment le rapport de Léonard à la cuisine d’après ses propres écrits. Ce n’est qu’une fois cette tâche accomplie qu’on pourra se demander si le Léonard qui arriva au Clos Lucé en 1517 et fut le fleuron de la cour de François Ier était porteur des valeurs de la gastronomie italienne de son temps, même lorsqu’il demandait à sa servante Mathurine de lui concocter une minestra.
Fictions comiques à déconstruire
7Commençons par déconstruire le livre qui propose la transcription d’un prétendu Codex Romanoff qui aurait été découvert en 1981 au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg. La fable racontée par Shelagh et Jonathan Rough, qui a fait naître la rumeur aujourd’hui malheureusement très répandue, est qu’un certain Pasquale Pisapia, personnage au demeurant impossible à tracer, aurait en 1931 copié à la main un manuscrit disparu de la bibliothèque de l’Ermitage de Léningrad. Ce manuscrit, édité par les Rough, propose une centaine de pages de recettes. Il s’agit manifestement d’un pastiche, ce que l’on peut démontrer par le ton et le style employé qui ne correspondent pas à la langue de Léonard (par exemple l’emploi de l’expression « il mio Signore » pour désigner le More), et d’autre part en raison des invraisemblances du texte lui-même. Certes, les marques d’historicité sont là : les dramatis personae sont reconnaissables – Ludovic le More, Salai, Agnolo di Polo, Scappi, Giulio Orsini, Cesare Borgia, etc. – mais leur densité est telle qu’on est en droit de se demander si elles n’ont pas simplement pour fonction de construire la crédibilité d’un texte douteux. Le faussaire a étudié les biographies de Léonard pour introduire des effets de vérité, couvrant non seulement les années milanaises mais également celles au service du Valentinois. La disparition mystérieuse de l’original de ce Codex Romanoff interdit toute étude sérieuse. Les commentaires de Sehlagh et Jonathan Rough sur les véritables écrits de Léonard sont par ailleurs du plus haut comique et confirment l’idée d’une parodie. Un orgue d’artillerie à fûts multiples tournant autour d’un axe, par exemple, devient sous leur plume une machine à hacher le persil (p. 23). La fameuse vis aérienne (p. 37) se transforme en un presse-purée ou une vis servant à fabriquer des saucisses à Milan (il y a tout de même là une référence cachée à un témoignage de Venturi) ! La machine à tailler les limes est présentée comme un marteau à éliminer les grenouilles des barils d’eau potable (p. 40), des bombardes (p. 42) et une tour prévue pour le château de Milan (p. 43) sont interprétées comme des machines à concasser le poivre. Un escalier à double vis du manuscrit B (fo 69ro) est interprété comme un engin pour insérer des bouchons dans des bouteilles… Une catapulte dessinée par Valturio est assimilée à une machine pour transformer les lasagnes en spaghetti et une machine de corderie est interprétée comme une invention pour tester l’élasticité des spaghetti. Des modèles d’architectures à plan centré sont encore lus comme des décorations de table en pâte d’amande et en gélatine (p. 30) ! On aura compris que les auteurs se sont bien amusés en ne tenant absolument aucun compte des textes de Léonard accompagnant ces dessins. Une petite enquête rapide sur internet prouve pourtant que les Note di Cucina di Leonardo da Vinci sont bien trop souvent prises au premier degré. Il est sans doute nécessaire à présent de reprendre les carnets page à page de manière à faire l’inventaire honnête de ce que Léonard a réellement écrit, ce afin de savoir si l’on peut oui ou non reconstruire une « cuisine de Léonard ».
Cuisines et instruments de cuisine chez Léonard de Vinci
8De fait, en tant qu’architecte, Léonard s’est sérieusement penché sur la question des cuisines, notamment à propos d’une demeure patricienne à construire à Milan ou encore lorsqu’il étudie le projet du palais de Romorantin8. L’organisation de la cuisine de la villa milanaise de Mariolo de Guiscciardi vers 1497 permet de voir la rationalité léonardienne à l’œuvre9. Elle fonctionne sur le principe de la ségrégation des espaces, un peu comme la ville idéale du manuscrit B qui réserve le premier étage à la noblesse et toutes les activités roturières au sous-sol. Le texte du Codex Atlanticus répond totalement à la demande du commanditaire, identifié par Carlo Pedretti comme étant Mariolo del Guiscardi, chambellan de Ludovic le More. Il décrit une demeure de 120 m de façade et 72 m de flancs et une cuisine à plan carré.
Celui qui est à l’office aura derrière soi l’entrée de la cuisine pour faire promptement son travail. La fenêtre de la cuisine sera sur le devant de l’office, pour qu’il puisse retirer le bois. Mon dessin représente une façade plus grande par derrière que par devant, alors que ce devrait être le contraire. La grande pièce pour la famille, éloignée de la cuisine, pour que le maître de la maison n’entende pas le tintamarre ; la cuisine servira pour laver la vaisselle d’étain, de façon qu’on ne la voie pas emporter à travers la maison… Grande chambre pour le maître. Chambre, cuisine. Dépense. Antichambre. Grande pièce pour la famille. Dépense, bûcher, cuisine, poulailler, salle et appartement devront être contigus à cause des commodités qui s’ensuivent. […] L’épouse aura son appartement et sa salle distincte de ceux de la famille, pour pouvoir faire manger ses servantes à une autre table de la même salle.10
9Le nœud du problème tient à la nécessité de garder non loin l’un de l’autre un secteur où l’on travaille, où l’on s’approvisionne, où l’on doit avoir accès à plusieurs points d’eau et où l’on stocke des denrées, voire des animaux vivants et des réserves de bois et un secteur où l’on se détend et où l’on prend les repas loin du bruit et des odeurs. Les éléments de confort définis par Léonard sont la commodité, l’utilité (deux valeurs déjà identifiées par Vitruve) mais aussi le silence et la tranquillité. Il est intéressant par ailleurs de rapprocher le passage de ceux que consacre Bartolomeo Scappi à la cuisine idéale et également aux planches de ce dernier où une pièce distincte est réservée au travail du rémouleur et au lavage des plats d’étain11. On trouve en outre dans le passage du Codex Atlanticus une référence à la nécessaire optimisation des gestes, un type de réflexion auquel Léonard ingénieur, devant calculer par exemple le coût temps/travail/ salaire du creusement d’un fossé, était largement habitué. Dans le manuscrit B, Léonard dessinait par exemple les trajets d’un ouvrier terrassier en marquant au sol les silhouettes de ses semelles12. Un autre passage de ce manuscrit permet de mieux cerner la cuisine idéale de Léonard, poêle et cheminée y jouent un rôle central :
c : poêle qui reçoit la chaleur de la cheminée de la cuisine, par un tuyau de cuivre, haut de deux brasses et large d’une brasse ; l’été, pour utiliser le poêle, on posera dessus une tablette de pierre ; b sera l’endroit où l’on conserve le sel ; à la séparation a, il y aura l’ouverture d’un conduit dans la cheminée, pour suspendre les viandes salées et autres choses analogues ; le plafond sera pourvu de nombreux tuyaux pour la fumée, avec diverses issues des quatre côtés de la cheminée ; si la tramontane menaçait de devenir gênante, la fumée trouverait ainsi à s’échapper de l’autre côté ; répandue à travers les nombreux tuyaux, elle améliore les viandes salées ; elle amène à perfection les langues, saucisses et autres denrées semblables (e il fumo per molti condotti si viene a spargere e fare bona carne salata, lingue e salsicce ; e simili cose fa perfette). Mais prends soin que lorsque tu pousseras le portillon a, une fenêtre puisse s’ouvrir en face, pour donner du jour à la petite pièce. Cela se fera au moyen d’une tige reliée à la porte et à la fenêtre – comme ceci.13

10Les modes de conservation de la viande, salaison et fumaison, jouent ici un rôle central. Dans les planches de Scappi aussi, des jambons sont suspendus au-dessus de l’âtre et les recettes sont données pour confectionner toutes sortes de jambons, de salamis et de lards14. Un texte d’un certain Mazenta qui, d’après Giovan Batttista Venturi, aurait écrit sur Léonard à la fin du xvie siècle (ainsi que sur la façon de rendre l’Adda navigable), suggère que le Toscan ne se serait pas seulement contenté de se pencher sur la question de l’enfumage des salaisons mais aussi sur celle de la fabrication des saucisses : « Dans les caves de Milan on fait souvent usage d’une plaisante machine imaginée par Vinci, c’est une roue mue par un enfant, elle sert à faire le cervelas, sans craindre ni mouches ni mauvaises odeurs15. »
11Les cheminées représentaient sans aucun doute pour Léonard comme pour une majorité de ses contemporains un élément architectonique clé de toute demeure. Dans l’une de ses fables, l’artiste évoque d’ailleurs avec émotion l’action du feu dans l’âtre et donne la mesure de la place qu’il lui accorde dans sa propre perception du confort domestique :
Un reste de feu subsistait dans un petit charbon, parmi les cendres tièdes et tirait maigre et piètre pitance de ce peu de nourriture. Quand arriva la surveillante de la cuisine, pour préparer le repas habituel, elle mit des bûches dans le foyer et au moyen d’une allumette, tira une petite flamme du charbon presque éteint ; puis elle le plaça parmi les buches qu’elle avait disposées, posa dessus la marmite et s’en fut sans y plus songer. Fort réjoui du bois sec, le feu commença par s’élever au-dessus de lui, chassa l’air de ses interstices et, s’y insinuant, se fraya allègrement passage… Il souffla entre les intervalles des bûches dont il fit de charmantes fenêtres à son usage et jeta des flammes brillantes et rutilantes qui soudain dissipèrent les ténèbres de la cuisine close. Les flammes accrues se livrèrent à des jeux joyeux avec l’air environnant et le doux murmure de leur chant donna naissance à une mélodie suave.16
12L’une des machines domestiques les plus connues dessinées par Léonard, le tournebroche mécanique, à contrepoids ou à vapeur, devait justement être construite dans un conduit de cheminée. Le Bolognais Bartolomeo Scappi fait figurer en 1570 deux planches présentant des tournebroches mécaniques assez proches de ceux de Léonard17. Le premier livre de l’ouvrage de Scappi s’intitule Des circonstances nécessaires au maître queux. Du site, de la forme et du dessin d’une cuisine18. Le chapitre 43 du premier livre définit quant à lui le matériel de fer pertinent à une cuisine (p. 12). On y trouve décrites toutes sortes de broches plus ou moins fortes réalisées afin de supporter le poids de tel ou tel animal, des trépieds pour poser les poêles mais aussi des appareils mécaniques comme des broches faites à moulinets avec leurs chaînes (« spedi fati a molinello con le lor catene »). Les tournebroches mécaniques ne sont pas à proprement parler commentés dans l’Opera, ils apparaissent simplement à la fin du volume sur des pages non numérotées dans un cahier contenant la représentation générale de la cuisine, celle de la loggia où l’on aiguise les couteaux, l’on pend le gibier et l’on conserve le poisson, de la laiterie où l’on fabrique la crème et le beurre, de la cuisine de campagne et de divers types d’ustensiles. Les deux modèles de tournebroches retenus par Scappi sont un tournebroche mu par la chaleur et un tournebroche mu par un tambour, exactement comme chez Léonard19.
13Le tournebroche à contrepoids utilisait les principes mécaniques des premières horloges médiévales. Pour empêcher que la corde ne se dévide trop rapidement sur le tambour, il fallait un mécanisme capable de retenir le mouvement des poids et de normaliser les mouvements du tournebroche. On utilisait un système astucieux, nommé échappement ou encliquetage, formée d’une roue dotée de dents dissymétriques et d’une butée. Pour que les intervalles de temps entre chaque tour soient comptés de façon précise, régulière, il fallait en outre un régulateur. Au xive siècle, on avait inventé pour les horloges une barre oscillante ou foliot équipée de deux poids coulissant permettant d’ajuster le rythme du va-et-vient. Les régulateurs de tournebroches pouvaient être à deux bras ou à quatre bras aux extrémités alourdies par des poids appelées masselottes. Enfin, pour transmettre l’énergie régulièrement et de telle sorte qu’on puisse compter sur sa précision, il fallait un ensemble d’engrenages qui divisaient l’énergie de façon contrôlable et déterminaient la vitesse des broches qui en étaient solidaires. Léonard de Vinci, au folio 21ro du Codex Atlanticus, dessine avec une grande précision une de ces broches à contrepoids, décrivons-la20 : un grand châssis supporte un cylindre ou tambour sur lequel est attachée la corde reliée au contrepoids. Le tambour est à son tour solidaire d’une grande roue-volant faisant tourner un pignon horizontal mettant en rotation une roue dentée faisant tourner par un pignon vertical le régulateur et, par un pignon ayant le même axe que le volant, deux roues verticales, solidaires des broches21. L’originalité la plus amusante de ce dessin est peut-être le régulateur qui se trouve coiffé de plumes ! Sur le même feuillet du Codex Atlanticus mais cette fois dans la partie inférieure de la page, léonard représente en outre un tournebroche à chaleur22. Comme souvent chez lui, le croquis correspond sans doute à une réalité dont il a été témoin et dont il se saisit. Compte tenu du fait que l’on trouve surtout cette technologie par la suite dans la zone linguistique germanique, peut-être peut-on même suggérer qu’il puise son inspiration dans des discussions avec les mécaniciens allemands qu’il fréquente à Milan dans les années 1490 comme ce Giulio Tedesco avec qui il évoque les systèmes anti-friction des cloches de son pays23. Dans le dessin léonardien, en tout cas, l’énergie du tournebroche provient de l’air chaud concentré par la hôte de la cheminée sur une roue divisée en quatre secteurs montés en moulin à vent. La vitesse de rotation des rôtis est réglée automatiquement par l’intensité de la flamme. Un renvoi d’angle à pignon transmet l’énergie de l’arbre moteur à un axe horizontal solidaire d’une poulie reliée par une courroie à la poulie de la broche. Léonard commente : « Ceci est le véritable mode utilisé pour cuire les rôtis : en fonction de la température modeste ou forte du foyer, la pièce à rôtir tournera lentement ou rapidement24. » La liste des ustensiles de ménage que donne Léonard dans le manuscrit H complète l’image qui pouvait être la sienne d’une cuisine à la mesure de ses moyens :
Nouveaux ustensiles d’étain. 3 parures de draps, 6 petites écuelles, 6 écuelles, 2 grand plats, 1 plat moyen, 2 petits plats. Anciens ustensiles d’étain. 3 petites écuelles, 4 écuelles, 3 grandes écuelles, un plat, 4 chandeliers, 1 petit chandelier, une nappe, 2 draps de lit, 3 serviettes pour la tête de 4 lès chacune, 3 petits draps, 2 serviettes, 2 nappes 1/2, 16 nappes ordinaires, 8 chemises, 9 serviettes, 2 essuie-tout, 1 bassin.25
14Abondance des nappes et des serviettes (on sait grâce au manuscrit Forster que Salai avait droit à deux torchons pourpre foncé), luxe des chandeliers, plats d’étain, diversité des plats pour présenter les mets sur la table centrale : Léonard avait indéniablement l’occasion de convier des hôtes à dîner, et il est fort improbable qu’à cette époque ses invités, amis ou apprentis, aient apprécié de grands repas végétariens. Peut-on à présent, à partir de quelques indices, reconstruire l’environnement alimentaire et gastronomique de Léonard ?
Essai de délimitation de l’environnement alimentaire et gastronomique de Léonard
15Quelques adages diététiques laissés par Léonard peuvent constituer un point de départ commode de l’enquête :
Veux-tu rester en bonne santé, suis ce régime : ne mange point sans en avoir l’envie, et soupe légèrement ; mâche bien, et que ce que tu accueilles en toi soit bien cuit et simple. Qui prend médecine se fait du mal. Garde-toi de la colère et évite l’air alourdi ; tiens-toi droit en sortant de table et ne cède pas au sommeil à midi. Sois sobre pour le vin, prends-en fréquemment en petite quantité mais pas en dehors des repas, ni l’estomac vide ; ni ne retarde la visite aux lieux d’aisance. Si tu prends de l’exercice qu’il soit modéré. Ne te couche pas à plat ventre ni la tête basse et couvre toi bien la nuit. Repose ta tête et tiens-toi l’esprit en joie ; fuis la luxure et observe la diète.26
16Ce texte en vers, marqué par une antipathie sévère vis-à-vis des médecins, adressé à un certain Teodorico, appartient au genre des régimes de santé, connu depuis le xiiie siècle. L’on est fort éloigné avec lui des banquets pantagruéliques proposés par Martino dans son Libro de arte coquinaria ou par Bartolomeo Sacchi, dit Platine, dans son De honesta voluptate et valetudine (1487), que Léonard mentionne pourtant dans le Codex Atlanticus sous le titre De onesta volutta comme un ouvrage appartenant à sa bibliothèque27. L’artiste-ingénieur prône en effet la tempérance, la simplicité et la cuisson poussée. Cela étant, le propos est bien trop général pour que l’on puisse identifier avec certitude ce que Léonard appelait « un souper léger ».
17Il faut donc nous tourner vers les ingrédients que Léonard mentionne au fil des milliers de pages de ces codices. L’huile d’olive, par exemple, est déjà fort présente dans ses écrits, même s’il a le projet de convertir, sur le territoire de Vinci, un moulin à huile hydraulique sans doute hérité de son oncle en moulin à couleurs. Au folio 47ro du Codex Atlanticus, l’ingénieur toscan propose un mécanisme de pressoir actionné par un cheval, tel que « les olives seront si fortement pressées que les déchets en seront presque secs ». Certains feuillets des manuscrits de Windsor donnent également à voir des paysans cueillant les olives en Toscane, signe probable de la familiarité de Léonard avec la délicieuse huile issue de la première presse du fruit28.
18Saucisses et viandes fumées, citées à propos de l’agencement des cuisines milanaises, sont peut-être à rapprocher d’une phrase un peu énigmatique : « Si Pétrarque aimait tant le laurier, c’est parce qu’il est bon accommodé aux saucisses et aux grives. Je n’attache aucune valeur à leurs bagatelles29. » En matière de viande, Léonard, on s’en souvient, évoque dans ses charades le chevreau et le bœuf. Ses dessins d’anatomie comparée prouvent par ailleurs qu’il a eu l’occasion d’examiner l’estomac, la matrice placentaire et le cœur d’une vache, le cœur d’un mouton et qu’il a été présent lors de l’abattage d’au moins un cochon avec la méthode toscane des poinçons et du marteau, cochon dont il observe aussi la trachée et le poumon30. Rien de tout cela ne plaide pour la vision vasarienne d’un artiste trop sensible pour faire du mal aux animaux. Enfin, Léonard s’intéresse aussi aux mœurs des chapons, très appréciés à la table des princes, il écrit : « Demande à la femme de Biagino Crivelli comment le chapon élève et couve les œufs de la poule, à la saison des amours31. » La seule référence à du poisson est par ailleurs une fable parlant de poisson bouilli, or, dans le traité de Martino, on explique la cuisson des poissons entiers dans des paniers que l’on peut sortir de l’eau.
19Léonard, passionné de botanique on le sait, évoque aussi à plusieurs reprises les légumes. Le manuscrit Forster mentionne par exemple toute une série de fèves et de grains : fèves, millets (blanc ou rouge), haricots blancs, grosses fèves, pois32… Le manuscrit B représente en aquarelle colorée des cosses de petits pois et des cerises33.
20Tous ces ingrédients (cerises mises à part) entrent dans la composition notamment des potages riches que l’on confectionne à l’époque, souvent agrémentés de sucre et d’œufs. Une liste plus intéressante encore est peut-être celle des graines que Léonard décide d’emporter avec lui lorsqu’il fuit Milan en 1500 de peur que Ludovic le More ne le châtie d’avoir collaboré avec les Français :
Prends des graines de fotteragi [?], de carottes blanches et d’ail de plaisance […]. Prends des graines de lis, d’alchimille commune, et de courges marines.34
21Dans l’urgence, il s’agit de charger sur ses mules des biens de grande valeur, occupant un minimum de volume : peut-être ces légumes sont-ils précieux à ses yeux en raison de leur nouveauté ou de leur rareté. Les courges marines sont des melons d’eau. L’ail de Piacenza sert probablement à préparer l’agliata, cette sauce devenue à la mode, que mentionne le Libro de arte coquinaria et qui permet d’éliminer le goût de certaines viandes bouillies. La salsa verde, utilisée aujourd’hui pour le bollito (bœuf bouilli) et le lampredotto (tripes), revêt la même fonction. Léonard en fournit d’ailleurs sa recette in extenso :
Persil 10 parts, menthe une part, thym sauvage une part, pain brûlé 10 parts, vinaigre, poivre et sel un peu.35
22La recette de ce genre de persillade au goût acide, car c’est ce que l’on aime alors, diverge légèrement de celle donnée par Martino da Como qui remplace la menthe par du thym, des blettes et de l’ail, puis ajoute à son mélange un peu de gingembre. Si Léonard n’utilise pas cette épice, il mentionne en revanche ailleurs, dans le Codex Arundel, de la noix de muscade, et nous savons que son goût est particulièrement apprécié à Florence à la Mensa dei Signori36. Agliata et persillade semblent contredire une fois de plus le façonnage vasarien de Léonard en icône végétarienne.
23Une autre recette prête moins à polémique, c’est celle de l’eau des Turcs donnée dans un feuillet du Codex Atlanticus datée par Carlo Pedretti de 1517, c’est-à-dire des années françaises : « Sucre, eau de rose, citron et eau fraiche passée dans une toile blanche, boisson servie fraiche par les Turcs en été37. » Cette limonade à l’eau de rose est toujours en usage aujourd’hui en Tunisie. Il n’est point besoin pourtant d’imaginer un quelconque voyage de Léonard au-delà du Bosphore (malgré la fameuse proposition de pont sur la Corne d’Or faite à Bajazet II en 1503) car il a probablement eu connaissance de cette boisson en Italie où vivaient de nombreux esclaves d’Afrique du Nord, employés notamment aux travaux de terrassement.
24Dans les pages rédigées par Léonard en France, nous ne disposons finalement que de deux références précises à la gastronomie. L’une est cette recette d’eau des Turcs, dont le goût à la rose n’évoque pas la modernité mais bien une saveur médiévale très implantée partout en Europe. L’autre est la mention que fait Léonard de la « soupe qui refroidit ». La soupe de Mathurine semble donner crédit à la thèse végétarienne, mais sa recette ne nous est pas connue. Que pouvait bien être cette minestra qui plaisait au maître ? Une adaptation d’une recette de Martino da Como (Minestre di brodetto bianco, fava menata, minestra de Roselli) ou de Bartolomeo Scappi (Minestra alle mele, minestra di coratella) ? Ou encore une soupe « à la française » ? Le terme minestra est utilisé en italien pour désigner une soupe assez épaisse, éventuellement sucrée-salée mais elle peut tout à fait inclure de la viande, comme la soupe de fressure de veau que propose Scappi.
25Bien après Vasari, pourtant, au début du xxe siècle, le romancier russe Dmitry Merezhkovsky a campé un Léonard végétarien confiant à son apprenti son horreur de la viande38. Cette fiction savante est sans doute l’origine d’une citation faussement attribuée à Léonard que l’on retrouve aujourd’hui dans divers ouvrages militants de la cause végétarienne39 : « J’ai rejeté la viande très tôt dans mon enfance, et le temps viendra où les hommes, comme moi, regarderont le meurtre des animaux comme ils regardent maintenant le meurtre de leurs semblables », fait-on dire à Léonard. En vérité, ce texte est un palimpseste du chapitre six de Merejkovski où l’auteur fait dire à un fictionnel journal de Giovanni Beltraffio :
Le mécanicien Zoroastro m’a raconté que depuis son jeune âge, Léonard ne mange pas de viande et affirme qu’un jour viendra où tous les hommes, se contenteront comme lui d’une nourriture végétale et tiendront le meurtre d’un animal aussi criminel que celui d’un homme.40
26Si l’on en reste là, on aurait donc affaire à une pure fiction mais le témoignage tardif d’Andrea Corsali cité en introduction contredit cette idée. Serait-il possible que dans ses dernières années, Léonard se soit converti à une alimentation purement végétarienne41 ? C’est envisageable mais le crédit que l’on peut accorder à la lettre de Corsali n’est pas total. En effet, ce dernier ne faisait pas partie de l’entourage immédiat de Léonard même s’il semblait tenir pour acquis que Julien de Médicis, le patron de Léonard, était au courant des particularités du régime alimentaire de son artiste-ingénieur. Quant aux prophéties léonardiennes, elles fonctionnent sur le ressort de l’humour et forcent le trait emphatique et apocalyptique pour entrer dans un genre dont Léonard adore se moquer ; les prendre au pied de la lettre est tout aussi problématique. Certes, Léonard semble avoir accordé un grand prix à la vie mais cela ne l’empêcha jamais d’inventer des engins de mort et de pratiquer des dissections, loin de toute sensiblerie anachronique pour son temps.
27Certains ont cru pouvoir trancher le débat à partir d’une liste de course attribuée à Léonard présente dans le Codex Arundel. Même si l’écriture n’est pas de la main du maître mais plutôt de celle d’un de ses apprentis ou de ses amis42. Cette liste datée de 1504 fait figurer de conséquents achats de fromage et de viande, toutefois, il est impossible d’affirmer que cette viande était destinée à la propre table du peintre – peut-être devait-elle simplement nourrir les membres de son atelier.
Notes de bas de page
1 Depuis que la communication qui donne lieu au présent article a été donné lors du colloque de Blois, un ouvrage grand public est sorti posant cette question : Alessandro Vessozi et Agnese Sabato, Leonardo non era vegetariano. Dalla lista di spesa alle ricette di Enrico Panero, Firenze, Maschietto Editore, 2015. Son argumentation est sensiblement différente des lignes que l’on trouvera ici.
2 Corsali Andrea, copie de la « Lettera di Andrea Corsali allo illustrissimo Principe Duca Juliano de Medici, venuta Dellindia del mese di Octobre nel XDXVI », fo 4ro, http://nla.gov.au/nla.ms-ms7860-1
3 Codex Atlanticus, fo 370ro.
4 Codex Atlanticus, fo 370ro.
5 Codex Forster, II, v.
6 Rough Shelagh et Jonathan, Note di Cucina di Leonardo da Vinci, Roma, Voland, 2005.
7 Masci Sandro, Léonard de Vinci et la cuisine de la Renaissance. Scénographies, inventions et recettes, Rome, Gremese Editore, 2005. De nombreux blogs sur internet reprennent encore le sujet mais utilisent peu ou prou les mêmes sources.
8 Cf. ms. I, fos 170-173 ; Codex Atlanticus, fos 76vo et 209ro.
9 Cf. Carlo Pedretti, Leonardo Architetto, Milano, Electa Editrice, 2007, p. 70-73.
10 Codex Atlanticus, fo 158vo a (anciennement 426vo), c. 1497 : « Quello che sta alla credenzia de’ avere dirieto a sé l’entrata della cucina per poter sollecitare e, nella fronte della credenza, la finest[r]a della cucina per torre legne. Il disegno fatto ha maggiore facciata dirieto che dinanzi, che debbe essere per l’opposito. La sala della famiglia di là dalla cucina, a ciò il padron non senta loro romore, e che la cucina sia lor comoda pel peltro che s’ha a lavare, che non passi per la casa evidente… Dispensa, legne e pollaro, cucina e sala e camera saran, ovver debbono essere contingenti per la comodità che ne resulta ; e stalla, letame e orto contingenti. La sala del padrone e della famiglia debbe mettere in mezzo la cucina ; e nell’una e nell’altra si porga le vivande per via di finestre larghe e basse, ovver torni. Fareno alla mogliera la sua camera e sala sanza la sala della famiglia, perché si fanno mangiare a un’altra tavola le sua donzelle ‘n una medesima sala. Bisogna 2 camere oltre alla sua, una per le donzelle, l’altra per balie, e camerini per loro servizi. Voglio che un uscio serri tutta la casa. »
11 Scappi Bartolomeo, Opera, Venezia, Michele Tramezzino, 1570, p. 6.
12 Institut de France, ms. B, fo 51ro.
13 Institut de France, ms. B, fo 14vo : « c sarà una stufa che arà il caldo del camino della cusina per uno tabernaculo di rame, alto 2 braccia e largo uno. E in quel medesimo loco si soprapporrà una pietra alla state, a ciò che la stufa si possa usare. b sarà un loco da tenere sale e confezzione : a sarà uno us[c]io da entrare nel camino per appiccare carne insalata e simili cose, e nel suo cielo si farà molti condotti di fumo che abbino varie uscite in 4 facce del camino, a ciò se il vento settantrionale ti volessi offendere, che ‘l fumo trovi uscita dall’altra faccia ; e il fumo per molti condotti si viene a spargere e fare bona carne salata, lingue e salsicce ; e simili cose fa perfette. Ma fa che quando tu spigni l’usciolo a, che a riscontro s’apri una finestra che dia lume a la piccola stanza, e questo si farà con uno bastone che sia congi[u] nto coll’uscio e la finestra in questa forma [segue figura]. »
14 Scappi B., Opera, op. cit., p. 6.
15 Cité par Venturi Giovanni Battista, Essai sur les ouvrages physico-mathématiques de Léonard de Vinci, Paris, 1797, p. 42, renvoyant lui-même à l’ouvrage de Gian Ambrozzio Mazenta, 1635.
16 Codex Atlanticus, fo 331ro (anciennement 116vo b) : « Rallegrandose il foco delle secche legne che nel focolare trovato avea e in quelle appresosi, e con quelle comincia a scherzare, tessendo le sue piccole fiammelle ora qua, ora là per li intervalli che infra le legne si truova, traeva… E scorrendo infra quelle con festevole, giocoso transito, cominciò a spirare fra li intervalli delle superiori legne ; apparia facendo di quelli a sé dilettevoli finestre, ora qua, ora là. E elevato alquanto le lucenti e rutilanti fiamme, già aveva cacciato le oscure tenebre della chiusa abitazione, e con galdio già le fiamme nate scherzavan collana d’esse circundatrice, e con dolce mormorio cantando già creava pia[cevole] sonito. »
17 L’Opera de Scappi connut un tel succès qu’elle inspira le cuisinier hongro-germanique Marx Rumpolt, auteur d’Ein New Kochbuch (1581), l’Espagnol Diego Granado dans son Libro del arte de cozina (1599), le Flamand Antoine Magirus – Koochboec oft Familieren Keukenboec (1612) – et ultimement le Français Lancelot de Casteau dans son Ouverture de cuisine (1604).
18 Delle circostanze necessarie al maestro Cuoco, Cap. i a car. I Del sito, & forma, & dìsegno d’una cucina (Scappi B., Opera, op. cit., p. 2 et 3).
19 « Molinello con tre spedi che si volta dasse per forza de rotte con il tempo afoggia di orologio come nella presente figura si dimostra in Opera. » (Ibid., p. 3.)
20 Routh Shelagh et Routh Jonathan, Leonardo’s Kitchen. Notebooks, London, Collins, 1987.
21 Pascal Brioist, « Tournebroches, cuisiniers et horlogers de la Renaissance », dans Latrémolière Élisabeth et Quellier Florent (dir.), Festins de la Renaissance. Cuisine et trésors de table, Blois/Paris, Château royal de Blois/Somogy éditions d’art, 2012, p. 146-157.
22 Léonard de Vinci, Codice Atlantico, fo 2ro, bas.
23 Sur ces transferts de technologie trans-nationaux chez Léonard, voir Pascal Brioist, « A case of know-how circulation : the bell called Mutte in the city of Metz », dans Leonardo and Schickhardt, actes du colloque Europa bauen : Leonardo da Vinci und Heinrich Schickhardt. Zum Transfer technischen Wissens im vormodernen, Stuttgart, 29-30 mai 2008, 2009.
24 Léonard de Vinci, Codice Atlantico, fo 21 : « Questo è il vero modo di cuocere gli arrosti, impero che secondo che’l fuoco è temperato o forte, “l’arrosto si volge adagio o presto”. »
25 Institut de France, ms. H, fo 137vo : « Peltro novo. 3 para di lenzuola, 6 scodellini, 6 scodelle, 2 piattegli grandi, 1 piattegli mezzani, 2 piatteletti. Peltro vecchio. 3 scodellini, 4 scodelle, 3 quadretti, 2 scodellini, 1 scodellone, 1 piatello, 4 candelieri, 1 candelliero picolo, 1 tovaglioli, 2 fazzoletti, 3 asciugatesta di 4 teli l’uno, 3 lenzoli piccoli, 2 tovaglie e 1/2, 16 mantili, 8 camice, 9 pannetti, 2 sciugaco, 1 bacino. »
26 Codex Atlanticus, fo 213ro (anciennement 78vo b) : « Se voi star sano, osser[v]a questa norma : non mangiar sanza voglia e cena leve, mastica bene e quel che in te riceve sia ben cotto e di semplice forma. Chi medicina piglia, mal s’informa. Guarti dall’ira e foggi l’aria grieve ; su diritto sta, quando da mensa leve ; di mezzogiorno fa che tu non do[r]ma. El vin sia temperato, poco e spesso, non for di pasto né a stommaco voto. Non aspettar né indugiare il cesso. Se fai esercizio, sia di picciol moto. Col ventre resuppino e col capo depresso non star, e sta coperto ben di notte. El capo ti posa e tien la mente lieta. Fuggi lussuria e attienti alla dieta. »
27 Sacchi Bartolomeo, Opusculus de obsonis ac honesta voluptate, Roma, c. 1473, cité comme présent dans la bibliothèque de Léonard par Girolamo d’Adda : Leonardo da Vinci e la sua libreria, note di un bibliofilo, Milano, G. Bernardoni, 1873.
28 Windsor, Royal Library, ms. 12644.
29 Codex Trivulzio, fo 1.a.
30 Windsor, Royal Library, fos 19055ro/c, 19074vo/c, 19029ro/c, 19054vo/c.
31 Quaderni III 7ro. Crivelli était, outre le père de la belle Lucrezia dont on connaît le portrait du Louvre, le capitaine des arbalétriers du More que ce dernier traitait en frère.
32 Manuscrit Forster II, fo 65ro : « Panico, miglio, meliga bianca, meliga rossa, fagioli, fave, pisegli, panis. »
33 Institut de France, ms. B, fo 3ro.
34 Codex Atlanticus, fo 669ro : « Tolli del seme de fotteragi, e delle gniffe bianche, delli agli di Piacenzi […]. To’ della semenza de ligli e del’erba stella, delle zuche marine. »
35 Manuscrit Forster II, fo 60vo : « Petrosemolo, parte 10, Menta parte 1, Serpilo parte 1, Pan brusato parte 10, Aceto, pevro e sale poco. »
36 Codex Arundel, fo 190vo. Voir aussi Eloire Sarah, « Les épices à la Mensa dei Signori au xve siècle », Journal de la Renaissance, vol. IV, 2006, p. 57-72.
37 Codex Arundel, fo 482ro : « Zucchero, acquarosa, limone e acqua fresca colati in tela bianca : e questa è bevanda di Turchi la state. »
38 Merezhkovsky Dmitry Sergeyevich, Le roman de Léonard de Vinci, 3 vol., Paris, Éditions Bossard, 1926.
39 Wynne-Tyson Jon, The Extended Circle : A Commonplace book of Animal Rights, New York, Paragon, 1985.
40 Merezhkovsky D.S., Le roman de Léonard de Vinci, op. cit., vol. 1, p. 250.
41 Cf. Bramly Serge, La vie de Léonard de Vinci, Paris, Le Livre de Poche, 1991 : « Léonard aimait tant les animaux qu’il est devenu végétarien. »
42 Codex Arundel, fo 148ro.
Auteur
CESR UMR 7323, université de Tours
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