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    Presses universitaires François-Rabelais
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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Les points cardinaux de la science-fiction Le paranormal : présupposés pour un art du dérangementLe retour du fantastiqueL’enquête policière comme outil d’analyse sociale Notes de bas de page

    The X-Files

    Ce livre est recensé par

    • Thomas Michaud, Communication, mis en ligne le 29 août 2023. URL : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/communication/17545 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/communication.17545
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    Table des matières

    Chapitre un. Entre l’histoire policière et le récit fantastique

    Le paranormal comme dérivé programmatique

    p. 47-79

    Texte intégral Les points cardinaux de la science-fiction Une œuvre présente d’anticipation L’Homme, la technologie, l’extraterrestre : le transhumanisme en jeuLe paranormal : présupposés pour un art du dérangementLe retour du fantastiqueL’enquête policière comme outil d’analyse sociale Notes de bas de page

    Texte intégral

    1Passé les années, mais aussi tous les commentaires et les pratiques promotionnelles qui ont accompagné le programme et sa diffusion, il est devenu de plus en plus difficile d’accoler un genre et un sujet précis à la série. Œuvre-hommage à la tradition du cinéma de série B et même plus largement à toute la littérature de genre, elle a constitué une charnière entre différentes ères du divertissement télévisé. Entre le rendez-vous de la semaine, propre à la télévision de programmation et propice aux enquêtes « fermées », et le récit au long cours, dont les effets de rappel et de construction sont autant portés par une structure narrative interne que par des phénomènes externes (marketing, par exemple), la série s’est déployée dans des univers éclectiques dont elle a offert cohérence par une résonance toute contemporaine. Face à la tradition des genres, la série a eu le mérite de se placer à un carrefour, ou plutôt sur un territoire, relativement méconnu, prônant à la fois son originalité et sa capacité à capter différentes orientations, narratives, esthétiques ou discursives pour les installer dans son propre horizon d’attente. The X-Files s’est ainsi posée à la jonction de la science-fiction, du policier et du récit fantastique, ne respectant jamais à la lettre l’héritage de chacun de ses genres, et en proposant une filiation finalement détournée.

    Les points cardinaux de la science-fiction

    Une œuvre présente d’anticipation

    2La série a souvent été considérée comme un programme de science-fiction. Il n’est bien sûr pas impossible de relever des points communs, sans pour autant qu’elle relève de la mise en scène d’un univers où se déroulent des faits qui ne peuvent être avérés en l’état actuel de la civilisation1. De la même manière, si elle peut parfois y faire référence, notamment au travers de certains clins d’œil à l’âge d’or du genre, la série ne se fond en rien dans l’un des sous-genres qui la composent : uchronie, dystopie, voyage dans le temps, cyberpunk, space opera, space fantasy, planet opera ou encore hard science-fiction. En somme, la série ne cherche en rien à construire un monde imaginaire, notamment parce qu’elle place au centre de son intrigue le monde réel et que le décorum ou, plus largement encore, l’esthétique du programme ne fait que ponctuellement appel aux éléments propres de la science-fiction. Toutefois, elle s’inspire très largement des fonctionnements propres à la science-fiction pour voir comment le monde est imaginé, proposant ainsi une sorte de mise en abyme « populaire » où la culture de la science-fiction est intégrée comme manière de penser. En somme, la série positionne les grands points cardinaux de la science-fiction pour mieux les recycler.

    3Elle donne en premier lieu une importance capitale à l’expérience de pensée, faisant souvent de sa narration une fiction spéculative qui pose autant des idées que des personnages ou des situations. Ensuite, elle met en place une distanciation cognitive qui place le téléspectateur dans une position active, notamment pour jauger des écarts, et percevoir la prégnance de la « dislocation conceptuelle »2 qui permet, de la sorte, d’interroger aussi bien la société comme terrain de constatations, que la fiction comme terrain de contestation. En fin de compte, la série ne peut pas être directement rapprochée d’une littérature produite par Philip K. Dick ou encore Ray Bradbury, de séries comme Star Trek, Docteur Who ou Stargate SG-1 (Showtime/Sci Fi Channel, 1997-2007) et plus encore du cinéma de Roland Emmerich (Independance Day), Michael Bay (Armageddon), Ridley Scott (Blade Runner), Georges Miller (Mad Max), de Robert Zemeckis (Retour vers le futur), Georges Lucas (Star Wars), notamment parce qu’elle semble a priori refuser une esthétique de blockbuster. The X-Files se sert toutefois de ces références comme lieux d’une opposition, discursive et esthétique, ou, au mieux, comme l’expression d’une époque révolue ayant participé à la construction d’une culture, voire d’une contre-culture3. Malgré un affichage très fort de la série en « marge » de la science-fiction, elle fait résolument sienne les grandes thématiques du genre. Ainsi, si l’exploration spatiale s’affirme encore plus dans la saison 11 au travers du personnage de Monsieur Y (A.C. Peterson)4, elle est avant tout présentée par le prisme de la conquête spatiale et de l’héroïsation américaine qui s’y trouve mise en jeu, comme dans Space (1.09 – fig. 18) ou dans la place centrale accordée à la médaille à l’effigie d’Apollo 11 (fig. 19)5. Le temps, tout comme l’histoire, ne sont pas traités comme la raison d’une alternative parallèle6 que la fiction se plaît à explorer, mais comme des données essentielles pour mettre en lumière un certain nombre d’incompréhensions7. S’il traite bien de l’altérité au travers d’espèces xénogènes, voire d’intelligences artificielles, le programme tente avant tout de questionner l’humanité et la métamorphose en cours, notamment en contournant les figures canoniques de l’extraterrestre. Face à cette tradition du genre, The X-Files se pose naturellement à la marge : elle s’inspire de la science-fiction sans pour autant en appliquer les principes à la lettre, afin de construire une identité et un discours propres, et elle élabore une narration science-fictionnelle pré-apocalyptique. Au cœur de cette approche, la série fait bien œuvre d’anticipation, sans pour autant l’afficher comme telle. Son principe est bien d’exposer des sujets de la société de son temps et de les mettre en histoire : de donner une parole à des questions qui n’ont pas encore de mode d’expression. Elle parvient à capter certains discours, certaines peurs ou sujets propres à son époque pour leur donner une orientation potentielle, dans une formulation souvent violente, parfois irréelle, afin d’imprégner l’imaginaire autant que l’esprit critique. Mais une fois encore, la série ne saurait être l’application stricto sensu du genre de l’anticipation, dans la mesure où elle ne se projette pas directement dans le futur, mais le pose comme un point d’ancrage réel où les phénomènes, relevés et interprétés, doivent être combattus : si elle ne voyage pas dans le futur, elle traverse bien les territoires de son époque, dans lesquels les signes d’une modification en marche sont visibles, posant non plus simplement la question du temps, mais d’une durée, comprise entre le passé – et son héritage –, le présent – et sa réalité – et le futur, au sein de laquelle des ébranlements peuvent être appréhendés, mesurés, tout autant que des permanences peuvent être décelées, pour proposer, entre les lignes, une lecture de l’éternité.

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    L’Homme, la technologie, l’extraterrestre : le transhumanisme en jeu

    4Dernier sujet, largement emprunté à la science-fiction, et sur lequel The X-Files anticipe largement des questionnements propres à notre époque actuelle : le transhumanisme. En traitant de la question dans le cadre des évolutions technologiques (de la gestion des paramètres biologiques aux nanotechnologies), la série s’interroge ouvertement sur l’avenir de l’Homme, en proposant une vision « positive » (la permanence de l’Homme en dehors du corps) et une vision résolument « négative », notamment en interrogeant la valeur éthique des choix effectués.

    5Ce sujet est essentiellement posé par la nature tout à fait singulière de l’extraterrestre. Mouvantes, illustrées en partie par un virus qui n’est, finalement, qu’une simple « flaque » d’huile modifiant en premier lieu le regard8 de la personne infectée (fig. 20), les différentes formes d’allégories extraterrestres de la série agrègent en son sein différentes représentations qui sont, toujours, accompagnées d’interprétations censées interroger la place de l’Homme. Dans ce contexte, l’extraterrestre s’impose comme une allégorie motrice installant le propos comme fiction critique.

    6Choisir de parler d’allégorie plutôt que de métaphore est un parti pris critique. Cette figure nous permet en effet de mettre l’accent sur plusieurs notions essentielles de la série et de voir comment l’imagerie extraterrestre peut être l’occasion d’un discours sur des réalités concrètes. En effet, en tant que figure macrostructurale, l’allégorie n’est plus un ornement rhétorique, mais bien la condition esthétique d’une forme d’imagination expressive qui contient et véhicule une vision du monde fondée sur un principe d’analogie. En somme, l’allégorie recèle en elle un facteur complexifiant qui ouvre le passage du récit de science-fiction vers un discours critique sur l’histoire : en tant que suite d’images continuées, elle est appelée par et porte en même temps la narration. Figure de proue de la série, l’iconographie des extraterrestres suppose, pour se muer en allégorie, une variété de formes et de renvois articulés. La mobilité nécessite alors d’être déconstruite afin d’étudier les implications métaphoriques et leur évolution tout au long de la série.

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    7Il est essentiel de remarquer le jeu polymorphique élaboré et dans quelle mesure il donne la possibilité aux personnages de traverser des questions ayant trait à l’humain et à sa condition dans le monde contemporain, tout en posant les jalons d’une fiction singulière par son mode de narration. Une série qui suit, tout d’abord, des agents du FBI les yeux rivés au ciel ne peut faire l’économie de l’image prototypique des extraterrestres (petits, à la peau grise, ayant quatre doigts aux mains et aux pieds, aux grands yeux noirs occupant la majeure partie d’un visage ovoïde). S’ils n’apparaissent qu’à la fin de la première saison (The Erlenmeyer Flask, 1.24 – fig. 21), c’est avant tout pour des raisons budgétaires. Mais si les extraterrestres sont le nœud où tous les fils thématiques de la série se rejoignent, ils ne sont toutefois mis en scène sous cette forme qu’à dose homéopathique. Mieux, on ne les retrouve que dans des situations narratives particulières qui relèvent de reconstitutions d’enlèvements (Jose Chung’s ‘From Outer Space’, 3.20 – fig. 22), de discours rapportés, voire de cauchemars (Duane Barry, 2.05 – fig. 23) ou de mystifications qui empêchent parfois le bon fonctionnement des enquêtes. Ce type de traitement de l’image extraterrestre apparaît de manière plus frontale à la saison 10. Toutefois, un jeu de distanciation est mis en place, dans la mesure où il n’est représenté qu’à travers les souvenirs du médecin informateur de Mulder, ancrant ainsi ce discours rapporté dans une imagerie propre à Roswell, entendu comme mythe contemporain, comme le vecteur d’une culture populaire, en même temps que la partie visible d’une mystification (fig. 24). À ce titre, Gethsemane (4.24), qui relate un montage de mensonges construit pour pousser Mulder au doute, copie à la fin de l’épisode l’autopsie de l’entité biologique extraterrestre qui aurait été récupérée à Roswell en 1947 et dont la vidéo fit grand bruit au milieu des années 90 (fig. 25). Appelée puis repoussée, l’image traditionnelle d’humanoïdes est l’occasion de poser le cadre d’une mythologie tout en s’écartant progressivement de lieux communs. Parce qu’elle figure un imaginaire collectif, elle est convoquée pour les discours qu’elle porte, tout en étant sujette à de nombreuses remises en question. L’image d’un alien sous les traits d’une bête violente, bavant sa bile avant de fondre sur un innocent, est particulièrement éphémère dans la série, mais non moins significative. Empruntée aux films de genre, elle est d’abord utilisée dans la première partie de Fight the Future, puis dans l’épisode qui lui fait directement suite, The Beginning (6.01 – fig. 26). Bien que citée, elle est rapidement mise à mal et remplacée. Remarquons d’abord que ces monstres ne viennent pas à bord de vaisseaux, mais qu’ils ont été déposés sur Terre à la préhistoire par une météorite avant de se développer grâce à l’ère géologique actuelle, ce choix venant souligner le refus d’être totalement affilié aux blockbusters du genre. Enfin, la présence d’un tel type d’image peut être perçue comme un véritable clin d’œil. En effet, si elle est acceptable dans un blockbuster, elle ne semble pas appartenir à l’univers de la série. Le début de la sixième saison marque aussi un tournant dans la vie de The X-Files qui déménage de Vancouver pour s’installer à Los Angeles. La mutation de la bête féroce en un humanoïde à la fin de l’épisode (fig. 27) peut alors s’interpréter comme l’intégration de références extérieures à elle (hollywoodiennes en l’occurrence) pour mieux montrer comment elle s’en écarte, d’autant que l’humanoïde est mis en proximité avec Gibson Praise (Jeff Gulka)9, le plus extraterrestre des humains, signifiant ainsi le retour, après les effets du film, à une vision plus contemplative et critique du sujet.

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    Roswell, le miroir aux alouettes ?
    Pour la narrationde The X-Files, l’affaire Roswell constitue un point de fixation central, qui lui permet d’installer son propre discours en regard de la culture populaire. Ignorée voire raillée dans les premières saisons, elle s’impose comme une des origines des affaires non-classées dans The Truth (9.19-20), avant d’être déplacée (My Struggle I, 10.01) puis considérée comme un écran de fumée (My Struggle II, 10.06). Il est vrai que cette histoire tout à fait singulière agrège à elle seule un certain nombre de mythes et fantasmes populaires qui traversent plus de soixante années de l’histoire des États-Unis.
    Tout commence le 8 juillet 1947. William Brazel, alors propriétaire d’un ranch dans une zone désertique et peu accessible près de Roswell, découvre des débris éparpillés sur ses terres. Bien qu’il récupère régulièrement des fragments issus de ballons météorologiques, « Mac » est intrigué par l’aspect des matériaux. Il se tourne vers le shérif de Roswell, qui lui conseille d’avertir la base militaire la plus proche. Le lieutenant Walter Haut, porte-parole du Roswell Army Air Field (RAAF), fait alors un premier communiqué de presse à la demande du colonel William Blanchard, commandant de la base, annonçant qu’ils ont récupéré un disque volant écrasé. Le lendemain, le brigadier général Ramey de la base de Fort Worth, où ont été transportés les débris pour examen, publie un rectificatif : le disque volant n’était qu’un énième ballon-sonde. Une conférence de presse est alors organisée afin de montrer les pièces aux journalistes : plus personne ne doute alors de la véracité du discours militaire. Les faits sont bien établis. Et si Roswell semble ouvrir une période longue de plus d’une décennie d’observations d’ovnis, l’affaire n’existe pas encore…
    L’histoire de Roswell est même oubliée pendant trente ans, jusqu’à ce que Jesse Marcel, lieutenant-colonel arrivé le premier sur les lieux, déclare à l’ufologue StantonFriedmanen1978quelesdébris étaient bien d’origine extraterrestre. Pour lui, les fragments présentés étaient des faux et il expose sa conviction d’une supercherie des responsables militaires. Son récit fait alors grand bruit, notamment lorsqu’il est repris deux ans plus tard par Charles Berlitz et William L. Moore dans leur ouvrage, le premier du genre, intégralement consacré à ce qu’il convient dorénavant d’appeler l’affaire Roswell. Publié en 1980, The Roswell Incident réunit plus de quatre-vingt-dix témoignages. Véritable succès, il ouvre la voie à d’autres enquêtes de ce type sur toute la décennie. La bataille entre les ufologues convaincus et les sceptiques fait rage autour de ce que certains nomment alors « le Watergate Cosmique ». Il est alors régulièrement demandé à l’Armée de l’Air de rendre des comptes, en mettant toujours plus en scène une ère du doute quant au pouvoir politique et militaire.
    L’affaire prend toutefois une autre tournure au milieu des années 90, l’imposant définitivement, comme l’explique le sociologue Pierre Lagrange, dans un inconscient collectif à dimension cette fois-ci mondiale. En 1993, un producteur londonien, Ray Santilli, prétend posséder le corps d’un extraterrestre qui n’aurait pas survécu au crash. Le 28 août 1995, la Fox diffuse un documentaire, « Alien Autopsy : Fact or Fiction ? ». De larges extraits seront repris en France dans l’émission télévisée de Jacques Pradel, « L’Odyssée de l’étrange ». Après que le film a généré plus 30 millions de bénéfices, Santilli avoue en 2005 la supercherie, l’extraterrestre ayant été fabriqué avec des effets spéciaux… Le mythe continue pourtant d’exister et l’hypothèse extraterrestre de faire parler, de vacanciers curieux venus discuter d’un folklore localaux candidats aux élections présidentielles.
    Dans la seconde moitié de la décennie 90, l’affaire Roswell a allègrement mêlé fait divers, évolution des technologies militaires à une période de doute profond des institutions envers les institutions et croyances convoquant mythes et fictions, pour finalement participer d’une réécriture complète de l’histoire des ovnis.

    8Dans la multiplication des manières de représenter l’extraterrestre, la série n’incarne pas toujours cette menace, la limitant par exemple à une énergie aux capacités radioactives (Space, 1.09 ; Fallen Angel, 1.10). Dans le plan d’invasion du monde que fomentent les extraterrestres en collaboration avec le groupe de conspirateurs, l’huile noire joue ensuite un rôle capital. Porté par des abeilles (Herrenvolk, 4.01), ce virus « intelligent » doit, le jour venu, servir l’infection du monde. Présent de la troisième (Piper Maru, 3.15) à la huitième saison (Vienen, 8.18), elle se présente comme un véritable fil rouge de la série. L’aspect singulier de cette entité extraterrestre est un écho sensible de notre quête contemporaine d’énergie fossile, renvoi que certains épisodes revendiquent clairement. Terma (4.09) se termine ainsi dans une zone d’extraction de pétrole à la frontière du Canada (fig. 28), tandis que toute l’action de Vienen (8.18) se déroule sur une plateforme située dans le golfe du Mexique. Les épisodes qui mettent en scène le Cancer noir se font pour une grande part sur un arrière-plan politique : bien que métamorphosée par des questions contemporaines (économiques et énergétiques), la guerre froide n’est pas terminée. Aux côtés de cette référence historique et politique présentée sous le costume de la conspiration, l’huile noire active une peur plus récente, centrée elle sur l’attaque bactériologique. Entre les rumeurs de tests au cours de la guerre en Irak, les possibles attaques à l’Anthrax ou encore les ravages du virus Ebola (dont la série emprunte l’imagerie et le caractère hémorragique10), les créateurs ont trouvé avec cette modeste « flaque » d’huile un réceptacle idéal à des problématiques extrêmement contemporaines.

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    9Dans ce panorama de l’allégorie extraterrestre de la série, la polymorphie est centrale, notamment parce qu’elle indique une mobilité, tant du côté de l’émetteur que du récepteur11. Le charismatique Brian Thompson joue ainsi le rôle d’un mercenaire polymorphe présent des saisons 2 (Colony, 2.16 – fig. 29) à 8 (Within, 8.01). Accompagné de quelques acolytes, il est en charge de la surveillance du Complot et de vérifier que les accords noués entre les extraterrestres et les conspirateurs sont bien respectés. À l’opposé, des rebelles obstruent leurs orifices afin d’éviter toute contamination par le virus (The Red and the Black, 5.14 ; Two Fathers, 6.11 – fig. 30) et dans le but de briser l’alliance macabre conclue entre les deux camps. Le jeu de variation effectué notamment autour de la figure de Brian Thompson (qui joue aussi l’un des rebelles) représente à lui tout seul le choix à formuler par le Syndicat entre une collaboration avec l’envahisseur et une résistance face à l’ennemi. L’Histoire, que les conspirateurs s’évertuent à maîtriser, se répète sous nos yeux. Tout au long de la série est posée la relation entre l’homme et les extraterrestres. La confusion des races sert bien évidemment à construire en filigrane l’histoire de la manipulation génétique de l’homme qui, au moment de l’invasion finale, sera remplacé par des hybrides. Individus saignant du liquide toxique (The Erlenmeyer Flask, 1.24 – fig. 31) ou mères mettant au monde des aliens (Per Manum, 8.13) (fig. 32) : toutes ces sources éparses se rejoignent finalement dans les personnages de super-soldats ou dans la horde d’esclaves des saisons 8 et 9. La peur postmoderne qui se déploie ici, relayée par des manipulations génétiques qui ont émaillé l’Histoire et agrémentent les revues scientifiques contemporaines, est bien la perte de l’âme. Ces extraterrestres, qui ont pourtant d’abord figure humaine, sont régis par un violent instinct de conservation. Ramené à ses traits biologiques, l’homme rejoint ainsi l’extraterrestre dans sa condition d’envahisseur avide de territoires à conquérir. À cette « humanisation » des extraterrestres qui permet d’interroger la condition postmoderne de l’homme répond un impact culturel qui sert l’atmosphère et l’esthétique de la série. En effet, aux thèmes de l’invasion et de la déshumanisation vient s’ajouter le motif de l’espion et de l’agent ennemi infiltré dans une société, véritable obsession dans la conscience américaine depuis les années 50. Tout concourt ici à affermir l’ambiance sombre de la série, empreinte d’une culture de la guerre froide et du cynisme d’une génération post-Watergate qui doute profondément du processus démocratique et des administrations en place.

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    10Si les extraterrestres sont majoritairement dépeints comme des êtres supérieurs entreprenant une invasion meurtrière de la Terre, d’autres sont toutefois des êtres protecteurs et fraternels, à l’image de Jeremiah Smith (Talitha Cumi, 3.24), un extraterrestre polymorphe qui met ses dons au service de l’humanité12 (fig. 33). Il est évident que la dialectique entre les anges sauveurs et les colonisateurs violents sert avant tout la complexité et le suspense de l’histoire. Mais la mobilité allégorique met aussi en scène les crises et contradictions de la civilisation occidentale, les extraterrestres devenant la projection fantasmatique de sa mauvaise conscience13. Aussi civilisés que nous puissions l’être, nous restons des primitifs face à des êtres qui nous sont de loin supérieurs14 : c’est un peu ce que nous dit la série lorsqu’elle retrace l’histoire de l’homme et ancre l’invasion dans les temps reculés de la préhistoire, puis des cultures archaïques. Par ailleurs, ces personnages positifs invitent à nous interroger sur un échange entre science et religion, et sur l’utilisation de la première au service du perfectionnement de la condition humaine. Si la conscience postmoderne les confronte, un personnage tel que Smith permet au contraire de mener des questions technologiques sur un terrain théologique. Il n’est alors pas étonnant de remarquer qu’il joue un rôle prépondérant dans une secte ufologique (Deadalive, 8.15) et que la série s’oriente, dans les saisons 7 à 9, vers un traitement mystico-technique, voire prophétique, de la thématique extraterrestre15. Cette dialectique entre le bien et le mal place l’homme à la croisée des chemins, entre une élévation et une déchéance provoquées par le progrès. C’est dans le personnage de William, l’enfant miraculeux de Mulder et de Scully, qu’elle se condense. Dernier stade supposé de l’hybridation, il est l’objet d’une lutte acharnée entre des hommes qui voient en lui le sauveur (Providence, 9.10) et des extraterrestres qui le considèrent déjà comme leur Messie (Essence, 8.21), orientation prophétique que modifie un peu la onzième saison.

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    11Entre expériences génétiques et allégorie extraterrestre plurielle, la série ne cesse d’interroger l’avenir de l’Homme, en questionnant la technologie, l’éthique et, finalement, le rôle du pouvoir et du savoir scientifique dans le cadre du « progrès ». Ainsi, si The X-Files semble partager un certain nombre de présupposés et d’arguments avec le transhumanisme, notamment dans une conception « progressiste », voire humaniste16, elle n’en affirme pas moins pour autant un doute profond sur la question, qui prend alors la teneur d’un discours postmoderne17, pour finalement ouvrir un débat sur les positions scientifiques contemporaines. Bien qu’inscrite dans un mouvement New Age certain, The X-Files fustige les nouveaux mouvements de spiritualité qui gravitent autour du concept de transhumanisme (groupes ufologiques, mormonisme, christianisme libéral, mouvement raëlien…), dénonçant la dérive sectaire qui en résulte nécessairement, notamment la promesse d’immortalité18. À chaque fois, la série pointe du doigt la volonté de l’Homme de « jouer à Dieu »19, mêlant pouvoir et savoir technologique au risque d’engager une sélection eugénique. Ainsi, si dans la « première » série, le Complot négocie avec l’envahisseur extraterrestre sa survie afin de se donner le temps de mettre en place un antidote contre un virus censé infecter la planète entière, les saisons 10 et 11 s’aventurent plus volontairement dans une sélection mise en place par l’Homme afin de détruire totalement une Terre à la dérive par sa faute, tout en élisant des personnes capables de porter l’espèce au-delà de ce cataclysme. Par le prisme du transhumanisme, la série intègre à sa diégèse des sujets sur la fin et la continuation, et sur les métamorphoses induites par ces données cardinales. C’est finalement autour de la mort que le sujet est le plus prégnant. Ainsi, les super-soldats, sorte de bras armés d’un complot qui se « rénove » dans les saisons 8 et 9, sont présentés comme des êtres indestructibles, tour à tour dépeints comme des extraterrestres singeant l’humanité pour mieux la combattre, et comme des supra-humains indiquant une évolution fondamentale pour maintenir l’espèce lorsqu’elle sera confrontée à l’apocalypse. Dans les deux cas, tous les personnages sont dénués d’humanité : ils deviennent l’application propre à la série d’une population de cyborgs ne répondant plus qu’à des injonctions biologiques. Lorsque Mulder est enlevé à la fin de la saison 7, avant d’être retrouvé mort quelques mois plus tard pour finalement revenir à la vie, une véritable comparaison est effectuée avec le personnage de Billy Miles. Si ce dernier est le premier à sortir du coma, il effectue une mue, se débarrassant de son ancienne peau pour mieux signifier qu’il change de corps (fig. 34). Cette image, très forte dans le déroulé de l’épisode, renvoie à une « peur de la mort » symptomatique des pensées transhumanistes, où le corps, ici réparé, voire remplacé, n’est plus le lieu de la déchéance humaine. En quelque sorte, Billy Miles se débarrasse de son ancien corps pour finalement nier le caractère charnel20 de l’humanité. Dans ce contexte, Mulder réalise une double prouesse : celle de revenir d’entre les morts et d’échapper… à l’immortalité21. La série, et même la fiction dans son intégralité, expose ainsi un discours tout autre. Si le corps de Mulder est montré – ce qui constitue une mise en scène rare pour l’époque –, il n’est jamais en putréfaction, et ce malgré les mois écoulés. En tournant ainsi autour du sujet de l’immortalité, tout en questionnant le départ de son héros (qui est alors celui de David Duchovny), elle affiche sa propre volonté de permanence. Face à une mort (du programme) annoncée, The X-Files construit sa narration sur l’absence, le souvenir et la nostalgie, qui constitueront alors les éléments de son esthétique pour les deux saisons de fin initialement prévues, avant de perdurer dans un second film, puis dans deux nouvelles saisons, pour un total de seize épisodes. Finalement, au travers du transhumanisme et de sa propension au discours eschatologique, la série a élaboré une diégèse des fins dernières de l’Homme, du monde, mais avant tout d’elle-même.

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    Le paranormal : présupposés pour un art du dérangement

    12De la série, un élément, tout autant fédérateur que mal défini, a été principalement retenu : le paranormal. Ce sujet n’est en rien un genre artistique, même s’il permet de définir les contours d’une approche narrative et de la construction de l’histoire. Il marque un espace marginal, situé à côté des discours scientifiques établis par consensus et/ou validation d’une communauté légitime, utilisé comme boîte à outils d’analyses et d’explications rationnelles de la société. Le paranormal fonctionne résolument comme un fourre-tout où phénomènes inexpliqués, sortant du cadre de la raison scientifique, viennent se mêler aux errements personnels et collectifs de l’imaginaire. Il constitue un lieu d’attente de la validation, historique et dialectique, qui est le terrain fertile pour tous les développements possibles, l’espace de réunion des peurs et des doutes tout autant que des relâchements cathartiques d’une époque. Il est la fange de notre monde où les étrangetés, parce qu’elles touchent à la morale et à l’entendement, sont encore en quête de sens. Dans toute la tradition de la pensée, le paranormal constitue un élément extérieur, mais dont la position éloignée n’est en rien déconnectée d’une réalité tangible, contrôlée et mesurable. Il marque des effets, indirects voire indistincts, qui montrent la relation complexe qu’entretient l’homme avec son environnement, au point parfois d’en fantasmer la présence. Démocrite, par exemple, voit dans les rêves, mais aussi dans tout phénomène parapsychique, l’incarnation de notre rapport imagé aux objets qui nous entourent, ces images étant avant tout les représentations de pensées, de caractères et d’émotions émises et traversant de manière aléatoire les objets et les hommes22. Pour Platon, ces dispositions forgent « l’âme irrationnelle » qui marque les « folies divines » (poétique, amoureuse, mystique, prophétique). Comme chez Aristote, qui aura plus tard tendance à réduire ces phénomènes à des stimuli externes, cette activité relève d’une précognition, transversale et informelle. Même quand la question est reprise par la physique quantique, les études remarquent que le champ de perception, y compris lorsqu’il est produit par l’activité cérébrale, s’étend largement au-delà de l’organe physique. Dans chacune de ces propositions, le paranormal signale l’activité, plus ou moins perceptible, de l’Homme dans son environnement, vu comme un espace nécessairement modifié par sa présence : bien que les discours rapportés soient, notamment du point de vue de la communauté scientifique, souvent raccrochés à du charlatanisme, elle signale la place de l’Homme dans le cadre d’une action, au sens plus ou moins défini. Lorsque, enfin, l’expression paranormale relève de la folie (littéraire ou non), qu’elle appartienne à la sémiologie psychiatrique (logorrhée, hypertrophie du moi) ou à la prophétie religieuse, elle peut être perçue comme un symptôme.

    13La permanence du sujet paranormal dans les histoires de The X-Files n’est en rien le signe d’un « délire » et d’une pure irrationalité. Au contraire même, la mise en place du duo comme construction dialectique tend à mettre en évidence le paranormal comme un phénomène révélateur d’une action, positive ou négative, de l’Homme, de peurs ou d’angoisses générées par la société ou l’époque, mais aussi comme différents symptômes s’exprimant de manière aléatoire et, encore, insensée. Dans leur grande majorité, les épisodes se situent à la jonction du fantastique, de l’horrifique et du policier, cherchant à créer une intrigue finalement chimérique captant des tendances, des types de discours et une approche sémiotique spécifique. Dans cette configuration, le paranormal ne saurait occuper une fonction générique. Toutefois, il permet de construire un schéma narratif : le phénomène se donne à voir lors d’une séquence prégénérique23, d’où les agents sont la plupart du temps absents, avant d’être décrypté, notamment au travers des tentatives multiples d’explication. Finalement, le paranormal n’est en rien une posture de la série, qui constate en premier lieu un événement, dans son expression violente, pour ne pas dire exceptionnelle. Même si Mulder passe pour un illuminé passionné par les sujets paranormaux, il fait surtout figure d’encyclopédie d’une connaissance folklorique à la fois érudite et populaire, tandis que Scully occupe une place plus légitime, en tant que représentante d’un discours scientifique établi et académique, et ce même si dans de nombreux cas elle cherche, par des méthodes médicales innovantes, à en repousser les limites24. Face au paranormal, Mulder comme Scully sont habités par un « doute » presque cartésien. Si le premier convoque des explications « originales », il ne les considère pas comme des fins en soi et cherche, notamment au travers de la contradiction proposée par Scully, une démarche de validation. En somme, les deux agents se placent non dans une vision « délurée » du paranormal, mais procèdent d’une approche que nous pourrions qualifier de zététique25 : marquée par l’« art du doute », elle cherche des raisons à des choses, en avançant de manière ordonnée et méthodique, mais surtout en restant éloignée de tout dogme. L’utilisation presque outrancière du paranormal braque en définitive l’attention sur le phénomène, son expression et les tentatives multiples d’explication.

    14En arrière-plan, toutefois, des « raisons », sociales, sociétales, historiques, psychologiques apparaissent. Un schéma se compose, le paranormal étant alors le lieu d’un décalage (comme tentative de changement d’équilibre) ou du dérangement (comme tentative de création d’un désordre) de la parole établie. Plutôt que d’opérer une description linéaire de la réalité et de faire ainsi de son propos une pure représentation, une thèse ou un pamphlet, la série se donne ainsi pour mission de révéler des relations profondes, et d’appeler l’élaboration d’un discours critique. Ainsi, la série structure un certain nombre d’angles morts, qui sont autant de sujets qu’elle porte, avec plus ou moins de réussite. Ces thématiques sont nombreuses, notamment du côté des loners (l’anthologie permettant finalement un catalogue des problématiques du temps), et appartiennent à ce que nous pourrions appeler – afin d’être le plus général possible – des questions de société : immigration, chômage, vieillesse, maladie, écologie, condition animale, usage des technologies, écart entre les zones urbaines et les zones rurales, enseignement, éducation, place des minorités dans la société… Dans le cadre anthologique, comme dans celui de la mythologie, la série affronte aussi des questions historiques, regarde en arrière, du côté des guerres notamment, pour mieux interroger la position impérialiste américaine contemporaine, mais aussi pour jouer le rôle d’un activateur mémoriel. Au-delà du filtre fictionnel, la série installe son discours dans une logique historiographique, où les événements s’enchaînent autant qu’ils se répètent, dessinant ainsi une histoire aux tonalités contre-culturelles de l’Amérique. La Seconde Guerre mondiale et les horreurs de la Shoah, la guerre froide, le conflit du Vietnam, la première guerre en Irak ou encore le scandale du Watergate sont autant d’éléments convoqués directement ou en filigrane afin que la série réponde à ses ambitions historiques. Dans une logique tout à fait similaire, la mythologie s’attaque quant à elle à une histoire plus « grande » : celle de l’Homme. Habitée par des angoisses propres à la fin du millénaire, elle s’interroge alors sur le sort de son espèce, dans un sens aussi bien scientifique et technologique (les manipulations génétiques) que prophétique (l’image de la sixième extinction), essayant de trouver une « origine » pour mieux circonscrire les raisons d’une fin.

    Le retour du fantastique

    15Le rapport à la science-fiction et la convocation du paranormal comme élément de dérangement font de la série une représentante moderne du récit fantastique. Si l’usage réitéré du savoir scientifique constitue un point d’ancrage certain dans le genre de la science-fiction, le fantastique se situe plutôt du côté de l’enclenchement diégétique et narratif des épisodes, la série oscillant ensuite entre application esthétique et affirmation d’un certain nombre de libertés, notamment en apportant une (ébauche de) résolution sociale, politique et historique.

    16Reste que ces différentes approches génériques et thématiques ont toutes en commun l’intrusion de l’irrationnel dans la vie réelle. Ce phénomène est d’abord considéré comme anormal parce qu’empreint de mystère, mystère d’autant plus prégnant qu’il survient dans un environnement familier. Ainsi, les scènes prégénériques des épisodes sont-elles très souvent l’expression d’un trouble survenant dans un espace ou dans une situation de la vie quotidienne, qui vient alors rompre le flux continu des jours : alors une présence dangereuse intervient dans un bureau fermé (Squeeze, 1.03) ou le regard d’un marin revenant à son domicile est subitement infecté par un mal noir et inconnu (Piper Maru, 3.15). Le phénomène mystérieux crée ainsi une faille, une zone de turbulences entre ce qui relève du naturel et ce qui marque une expérience surnaturelle. En reprenant la taxinomie élaborée par Tzvetan Todorov, le fantastique se présentera, plus qu’avec ses atours de genre, comme une sorte d’inflexion, permise par des effets thématiques et narratifs, de la diégèse, histoire dont les possibles développements imaginaires seront exploités. Cette inflexion assure, tant du côté des protagonistes que des téléspectateurs, une forme d’instabilité et de crispation : face à cet événement défiant le sens commun, tous sont sur la brèche. Plus qu’en d’autres situations, le titre français de la série brille alors par sa pertinence : les épisodes de la série se situent en effet « aux frontières du réel », dans ce lieu où l’étrange, entendu comme les limites « génériques » du réel, et le merveilleux, à savoir l’univers où le surnaturel est admis comme une norme, questionnent les limites de la réalité dans ses différentes dimensions.

    17Du fantastique, les créateurs de la série tentent visiblement d’en utiliser toutes les potentialités. Dans une approche presque « décadente », le récit fantastique se fait proche de la fable et de l’allégorie pour mieux formuler une critique sociale, notamment à l’encontre d’un matérialisme bourgeois et du consumérisme contemporain. Les phénomènes, qui s’expriment régulièrement de manière violente, s’immiscent en dehors ou, à l’inverse, investissent la réalité matérielle, profitant de ce gain d’autonomie pour mettre à mal la vision rassurante du quotidien offerte par une suite d’objets. Le réel capte alors et s’ouvre à d’autres dimensions, donnant l’impression d’une réponse psychique aux dures réalités, paradoxalement ignorées, de ce monde. Sur ce point, The X-Files tente au début des années 90 de réhabiliter le récit fantastique et de lui (re)donner ses lettres de noblesse. En s’appuyant sur une tradition de récit de genre, elle lie un art de l’image, l’étrangeté se donnant alors à voir, et une véritable science du discours, le fantastique devant être rationalisé par la langue, tout en devenant l’expression et le révélateur d’un certain nombre de dérives. En somme, l’usage du fantastique dans The X-Files s’inscrit ainsi dans la tradition d’un symbolisme « fin de siècle » propre à la littérature française (de Maupassant à Bloy en passant par Barbey d’Aurevilly), du fantastique gothique de Poe, mais surtout de Irving ou de Hawthorne, voire du réalisme fantastique du cinéma et de la télévision américaine des années 60 et 70, période de production de Psychose (1960) et des Oiseaux (1963) d’Alfred Hitchcock, de Répulsion (1965), du Bal des vampires (1967) et de Rosemary’s Baby (1968) de Roman Polanski, de Duel (1973) de Steven Spielberg, de Sœurs de sang (1973) de Brian de Palma, de L’Exorciste de William Friedkin, mais aussi de Dossiers brûlants, la période se concluant en quelque sorte avec les films plus volontairement esthétiques et expressionnistes de Dario Argento, comme Suspiria (1977) ou Inferno (1980).

    18Pour The X-Files, cette effraction du surnaturel n’est pas uniquement une configuration unilatérale et, dans cette démarche, tout est bon pour tenter de débusquer le réel, y compris dans les recoins les plus éloignés de la société. Le format de la série qui, dans son caractère anthologique rapproche les épisodes des contes, permet donc une traversée de la réalité des imaginaires contemporains, la convocation des effets surnaturels étant un prétexte à l’explication de leur raison d’être. En faisant intervenir fantômes, vampires, loups-garous et autres monstres de différentes natures, la série explore les socles traditionnels et folkloriques de la société américaine, tandis que les figures propres à la mythologie, hybrides ou extraterrestres, représentent l’intervention d’une autre forme d’intelligence, la construction de l’arc mythologique proposant d’ailleurs une lecture singulière du récit d’anticipation. L’insolite, l’épouvante, voire le merveilleux créent, quant à eux, une gamme de tonalités au sein de laquelle la série se plaît à se positionner en fonction des sujets et du niveau d’implication que les créateurs souhaitent leur offrir. À bien des égards, The X-Files fait figure de catalogue, voire d’encyclopédie du fantastique. Les épisodes convoquent ainsi tour à tour des thématiques du bien et du mal, du dédoublement et de la monstruosité, voire de la bestialité dans une visée anthropomorphique, la folie, la métamorphose ou encore l’invasion. De la même manière, le recours aux archétypes des personnages est lui aussi tout à fait sensible : vampires, savants fous, créatures mythiques, diables, enfants possédés, automates, marionnettes ou poupées malfaisantes, fantômes et revenants, voire morts-vivants occupent régulièrement des rôles centraux dans les constructions diégétiques. La série, comme dans beaucoup de configurations similaires, prend une distance critique avec ces archétypes pour tenter d’en donner un certain nombre d’explications rationnelles. Comme nous avons pu le voir avec la science-fiction, The X-Files place souvent ses histoires dans des espaces reculés, à commencer par les bois et les forêts. Dans une approche tout à fait similaire, elle fait régulièrement appel à l’obscurité, que ce soit au travers de scènes nocturnes ou par des actions se situant dans des lieux où règne justement la nuit ou la pénombre. Dans la veine d’un cinéma plus expressionniste, ce jeu de clair-obscur donne vie à ce qui est caché et sert à caractériser des ambiances dramatiques contrastées.

    19Tous ces éléments, typiques d’un fantastique que nous pourrions qualifier de classique, forment une esthétique au préalable repérable et, comme nous l’avons affirmé par ailleurs, placent The X-Files dans une tradition du genre où la volonté de réhabiliter le récit fantastique à la télévision est clairement affichée. Dans l’industrie cinématographique américaine, la seconde moitié des années 80 et le début des années 90 sont en effet marqués par des fictions puissantes, le fantastique étant alors intégré à des productions populaires à gros budget. Mettant notamment en images les œuvres de Stephen King, qui deviendra ainsi le romancier le plus adapté26, John Carpenter (The Thing, 1982), David Cronenberg (The Fly, 1986), Ridley Scott (Alien, 1979 ; Blade runner, 1982), David Lynch (Dune, 1984), James Cameron (Terminator, 1984 ; Aliens, 1986 ; Abyss, 1989), Ivan Reitman (Ghostbusters, 1984) ou encore Tim Burton (Beetlejuice, 1988) contribuent à populariser le récit fantastique. Mais à la suite de Twin Peaks, The X-Files, si elle fait souvent référence à quelques films mentionnés, use du format sériel pour densifier son propos et ne pas se limiter à une application du genre. En dehors de quelques épisodes qui s’affirment vraiment dans la pratique, la volonté n’est très certainement pas de faire un pur et simple exercice de style. Le fantastique s’expose ainsi comme prétexte à un discours plus large, sur la société, sur l’Histoire et sur l’Homme. Le format de la série, mais aussi son type de diffusion, fait entrer le fantastique dans le quotidien du téléspectateur. Même si la franchise s’exportera dans les salles obscures à la fin de la décennie, même si elle est produite par un puissant network, elle propose une approche renouvelée du spectacle fantastique. Hommage au cinéma de genre et à la tradition du film de série B, elle en exploite surtout la dimension subversive, notamment en interrogeant la place de la fiction dans la construction sociétale. Dans la continuité de programmes anciens tels que The Twilight Zone, The Outer Limits ou Alfred Hitchcock Presents, The X-Files s’impose comme un rendez-vous de l’étrange qui fait progressivement figure de lieu de mise en danger et de compréhension du réel. Au fur et à mesure du succès et du rythme de la production, la série devient un phénomène de société au sein duquel le surnaturel vient bousculer les codes de compréhension du monde. Cette place, allouée autant à la production, à sa capacité de capter et de modifier les tendances pour leur offrir un nouvel impact, qu’à la télévision et aux modes de consommation des produits culturels et de divertissement des années 90, confère à la série un soft power, aussi « doux » et surinterprété soit-il.

    L’enquête policière comme outil d’analyse sociale

    20L’une des particularités génériques de The X-Files est de lier récit fantastique d’héritage classique et schéma de la narration policière, croisant elle aussi les influences du roman, du cinéma et de la série télévisée. Nous avons déjà expliqué en quoi Kolchak : The Night Stalker a constitué une influence de premier ordre pour Chris Carter, notamment parce que cette série réunit les archétypes du fantastique et du polar pour former une production originale, opérant une convergence des différentes tendances de son époque. Bien évidemment, l’héritage d’une série comme The Invaders doit elle aussi être rappelée, l’errance de David Vincent étant ponctuée d’un certain nombre d’enquêtes qui seraient autant d’énigmes le menant vers la preuve de l’existence des extraterrestres. Toutefois, réunir aussi ouvertement et aussi fondamentalement les deux univers fait de The X-Files un pionnier, dont les héritiers les plus directs se nommeront plus tard Fringe (Fox, 2008- 2013) ou Bones (Fox, 2005-2017). Autre particularité de l’époque, et qui viendra alimenter le fantasme américain de la représentation des forces de police, les deux protagonistes de la série sont deux agents du FBI. Si Dale Cooper (Twin Peaks) avait ouvert la voie quelques années plus tôt, les personnes en charge de la résolution d’un crime étaient généralement les policiers d’une ville, les employés d’une société privée ou, plus souvent, des détectives privés et indépendants. Sur ce sujet aussi, The X-Files participera d’une représentation accrue de l’agence fédérale au sein des fictions télévisées, relayées dès les années 90 par une production comme Profiler (NBC, 1996-2000).

    21La deuxième innovation proposée par les créateurs de The X-Files tient en partie dans le rôle assuré par le docteur Scully dans la recherche de la vérité : l’usage dans la narration des sciences médico-légales, et plus largement de connaissances propres aux techniques scientifiques policières. En dehors de Quincy (NBC, 1976-1983), qui fait des sciences légistes le cœur de l’action et le facteur de résolution de l’enquête policière, rares sont les épisodes qui usent des scènes d’autopsie. Les connaissances scientifiques de Scully étant elles-mêmes larges (de la physique à la biologie), le panel d’éléments convoqués pour résoudre les enquêtes l’est aussi, ouvrant la voie pour les séries du début des années 2000 qui, à l’exemple de CSI : Crime Scene Investigation (CBS, 2000-2015), feront des analyses scientifiques une approche spécifique des enquêtes policières, tout autant que le déclencheur de la narration27. Dans ce contexte, la série policière sert la reconstruction de la « bonne » histoire, et les jeux entre hypothèses et résolutions mettent en abyme la fabrication de la diégèse, pour laquelle des pistes sont ouvertes, avant d’être abandonnées ou d’être validées. Les séries policières, en faisant entrer les connaissances médicales et scientifiques dans leurs procédures, ont alors questionné le corps, dans une vision à la fois normée et rassurante28, tout en proposant un ton beaucoup plus ludique, traitant ainsi l’enquête comme un jeu de résolution.

    22The X-Files n’est pas allé aussi loin dans l’utilisation des sciences médico-légales et n’en a pas fait le vecteur essentiel de sa narration. La série s’est toutefois permis, comme dans d’autres situations, de tourner l’acte en dérision, l’autopsie réalisée par Scully dans Bad Blood (5.12) étant même entrée dans la légende de la série, notamment parce qu’elle s’appuie sur ses propres codes en affichant de manière ostensible les organes étudiés (fig. 35). Justement, cet épisode « caricatural » montre à quel point The X-Files a fait entrer la scène d’autopsie dans son univers, faisant alors de cette étape un moment incontournable du fonctionnement de l’enquête policière. Dès le pilote (The X-Files : Pilot, 1.01), Scully est chargée d’autopsier le corps d’une des victimes de la promotion 89 (fig. 36), dont l’aspect lors de l’exhumation se rapproche dangereusement d’une entité biologique extraterrestre, avant de confirmer la pratique dans l’intégralité des saisons suivantes.

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    23L’arrivée de la scène d’autopsie, et plus largement encore du corps mort, place une nouvelle fois The X-Files dans un moment charnière des séries télévisées. Si ce choix de faire entrer le corps comme expression d’un crime, mais aussi comme preuve d’un pourrissement, peut s’expliquer par des évolutions notables dans les médias américains à l’orée des années 9029, elle place la série entre une expression policière réaliste et une représentation plus macabre, qui continuera de se développer au cours des années 90 et 2000, avec comme point d’orgue l’esthétisation du corps réalisée dans Dexter (Sowtime, 2006-2013), dont certaines scènes sont clairement inspirées du body art30. The X-Files ne propose que très rarement des visions esthétiques du cadavre, tout en affichant une certaine audace sur une présence corporelle, où la chair cohabite clairement avec son pourrissement. Dans l’oscillation entre macabre et policier, The X-Files s’affirme clairement du côté de l’enquête, tout en faisant de la figure de la dépouille une expression réaliste de ses orientations paranormales. Cet entremêlement des causes, dont l’écho réaliste est volontaire, se retrouve dans Home Again (10.04), le meurtrier étant lui-même un amoncellement de déchets qui tue de manière particulièrement violente pour mieux dire la dureté de la vie urbaine dans quelques espaces décimés par la crise de 2008. Le corps, comme lieu de preuves, met aussi en scène la réalité dans toute sa violence, tout en ramenant dans une sorte d’angle mort fertile les expressions morbides. Dans ce contexte aussi, la monstration du corps en putréfaction participe du questionnement général de la série sur la vie et la mort. Ainsi, le corps de Mulder, vu une première fois dans le clair-obscur de la scène de crime (This Is Not Happening, 8.14), est-il présenté de face lors de son exhumation, affichant ainsi un rapport anti-médical, affectif et personnel (Deadalive, 8.15 – fig. 37). Cette exposition, qui veut alors brutaliser le téléspectateur, ramène surtout le corps mort dans une approche plus directe où la pratique de la thanatopraxie vient s’inscrire dans une tradition nord-américaine de la mise en scène des morts (masque mortuaire, photographie post-mortem, veillées funèbres…), qui marque en quelque sorte une posture relativement rétrograde de la série. Mais de cette approche ressort une volonté réaliste, le programme télévisé, qui participe d’une sorte « d’engouement pour l’art macabre contemporain »31, venant en quelque sorte compenser le retrait des repères cognitifs traditionnels sur la mort assurés auparavant par les discours sur l’éthique ou la religion. En somme, la série s’évertue à ramener la mort du côté de la réalité.

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    24La portée réaliste de The X-Files est une des conséquences les plus directes de l’intégration du genre policier dans sa narration. Comme l’explique Luc Boltanski, le développement conjoint, au xxe siècle, du policier et de la sociologie s’explique par le recours à un même outil d’analyse, l’enquête, à partir duquel la volonté est de « mettre en question la réalité apparente, pour atteindre une réalité qui serait à la fois cachée, plus profonde et plus réelle »32. Au-delà de chercher à mettre en évidence un principe organisationnel général, une totalité s’appuyant sur une logique spécifique qui apparaît au travers d’un travail de description et d’observation « de terrain », l’enquête policière interroge les évidences pour en expliquer les conditions d’émergence. Elle révèle justement une volonté d’ordonnancement et, surtout, un des fondements de l’État-nation : « résorber l’écart entre la réalité vécue et la réalité instituée, entre les subjectivités et les dispositifs objectifs qui leur servent de cadre »33.

    25Suivant une tradition du genre, aussi bien littéraire que cinématographique, The X-Files propose une sorte de dédoublement de ses deux personnages centraux, et notamment de Mulder. Représentant de l’administration policière de l’État, il tombe ainsi régulièrement le costume officiel pour prôner un discours volontiers anarchiste où l’agent se rapproche un peu plus de la société civile, mais aussi de la figure ambiguë du justicier. Sans les atours liés à ses fonctions, avec un badge remisé au placard, Mulder se pose alors, comme c’est souvent le cas dans les épisodes de la mythologie, comme un détective indépendant devant révéler la face cachée de la société américaine de son temps. Le caractère de l’enquêteur, désabusé, cynique et pince-sans-rire, offre alors à la série un nouvel écart critique : les lois générales d’ordonnancement sont, au travers de l’humour, traitées en dehors de toute approche naïve. The X-Files mêle, en fin de compte, deux approches face à la réalité, qui sont elles-mêmes issues de deux traditions du genre du polar. D’un côté, l’enquête policière tend à restaurer, dans une démarche « classique », un ordre perturbé par un crime, notamment au travers du jeu dialectique entre hypothèses paranormales et rationalisation scientifique. De l’autre, l’enquête, cette fois héritée du roman noir, marque une volonté d’exploration de l’envers de la société, d’une sorte d’ordre caché qui implique alors les fonctions policières, économiques et politiques. Cette distinction peut, de manière générale, se retrouver dans la répartition entre épisodes « fermés » et arc mythologique. Dans le détail, toutefois, les propositions sont bien évidemment plus poreuses, ce qui permet la mise en place d’une autre dialectique, elle aussi fertile, entre une vision « traumatique », représentée notamment par le crime et la violence qu’il exprime, et une vision « rassurante » où l’ordre présent, questionné et transformé, est à la fois entendu comme une réalité et un horizon d’attente, fictif et fantasmé.

    26Récits noir et policier s’inscrivent dans une vision relativement apolitique de la société. Si Mulder peut être considéré comme un anarchiste au sens plein du terme, sans toutefois prendre parti, Scully n’affiche quant à elle aucune orientation politique. De la même manière, si la série a largement été récupérée par des mouvements situés à l’extrême droite de l’échiquier politique, en s’appuyant notamment sur la dimension complotiste du programme, les créateurs de la série ont toujours cherché à se départir de cet ancrage. La dimension politique apparaît toutefois progressivement, en filigrane des données historiques convoquées et de la mise en scène du complot. Dans cette partie centrale de la série, les enquêteurs interrogent le « locus du pouvoir » et les « fondements de la démocratie »34, le but n’étant pas uniquement de confondre ceux qui possèdent le pouvoir, même si une des fonctions des enquêtes est de mieux définir les contours du Syndicat, mais bien de déceler les entités pertinentes capables de donner du sens aux évènements historiques et sociaux. Dans ce contexte, The X-Files s’inscrit aussi dans la tradition du roman d’espionnage, comme en atteste d’ailleurs l’usage des protagonistes des deux « blocs » dans une forme réitérée de guerre froide, mais aussi les différentes immersions dans les milieux terroristes, des groupuscules anarchistes aux musulmans radicaux. Selon Luc Boltanski, cette approche retourne l’enquête sociologique, qui devient alors l’expérience de révélation de la conspiration comme une forme de « malédiction popérienne »35. En participant de l’émergence de la paranoïa et des théories du complot, la série assume une fonction spéculaire dans le transfert d’une pathologie individuelle vers une pathologie sociale36. Elle dévoile ainsi, au travers d’une sorte d’enquête sociale, la fragilité de la construction démocratique moderne, en même temps que son caractère factice, l’État-nation étant lui-même porteur de valeurs antagonistes, qui vont d’une forme de souveraineté territoriale à la fuite en avant mondialisée qui définirait le capitalisme. La capacité oscillatoire et critique de la série amène donc à une réflexion sur la véracité de la réalité, en cherchant à débusquer ce qu’il y a d’illusoire, voire d’officieux dans les éléments qui soutiennent le pouvoir. En somme, le programme élabore une ontologie politique.

    27Le paranormal vient donc servir cette enquête sociale en ce sens qu’il exprime de manière ostentatoire un décalage, un défaut d’alignement entre les différentes réalités, en mettant en avant un événement énigmatique, le but étant alors de l’attribuer à une entité afin de mettre en évidence un réseau de sens et, plus largement encore, une origine intentionnelle. C’est justement le rôle général de la démarche policière, qui infuse l’intégralité de la série : mettre en place des relations causales qui viennent, au travers d’une itération propre à la forme sérielle, effeuiller les différentes strates de la réalité pour mieux en faire émerger le substrat et tenter, en définitive, une apocalypse, un dévoilement, qui ferait alors figure de basculement. Mais dans ce jeu complexe entre réalité, apparences, fiction et dissimilation, la pratique s’interroge elle-même au cours de son élaboration, engageant une reprise permanente, l’incertitude et le soupçon n’étant jamais totalement délimités, y compris lorsque l’enquête fait appel à la pléiade de savoirs scientifiques et, donc, à une minutie extrême.

    28La traversée « générique » de The X-Files ne relève pas tant d’une analyse poétique pour constater que la série, longue et riche, a agrégé différentes traditions, littéraires, cinématographiques et télévisuelles, se plaçant tout autant comme une convergence culturelle que comme production originale. Elle instaure surtout un jeu dialectique et critique entre les raisons d’être de la fiction et leur restitution historique. Entre fiction et réalité, entre discours poétique et portée naturaliste, la série adopte la position de l’expectative, où promesses, probabilités, prudence et attente d’une solution – d’un sens historique – cohabitent dans un équilibre instable. Le paranormal, l’enquête et l’énigme sont autant d’éléments qui soulignent une forme d’incompréhension, en même temps que le fondement d’une approche critique. Cette incompréhension est née d’une situation historique particulière de la série : face à une peur « millénariste », face à une société en perpétuel mouvement, elle aura existé au cœur de deux chutes aussi déstabilisatrices, violentes que profondément improbables, en dehors de l’entendement. La chute du Mur de Berlin, tout d’abord, déplace les équilibres géopolitiques mondiaux et interroge les positions impérialistes américaines, d’autant plus que cette confrontation donnait du sens et légitimait jusqu’alors les crises historiques (Vietnam, Watergate, débarquement de la baie des Cochons, assassinat de JFK, crise pétrolière de 1973…) et les choix politiques (conquête spatiale, guerre des étoiles…). La seconde chute, sensible dans l’angle mort de la « première » série (mais annoncée de différentes façons) et de manière plus ostensible dans les saisons 10 et 11, est bien celle des deux tours du World Trade Center, qui a alors été interprétée comme le signe d’une nouvelle guerre civilisationnelle. De ces deux chutes ressort surtout un mouvement vers le bas et l’idée d’un délitement face à ce qui apparaissait encore comme un tout : le système américain37. Source de paix et de stabilité, les États-Unis s’avèrent alors comme le principal facteur de désordre et d’iniquité. Plus loin encore, la constatation de ces chutes serait le symbole d’un déclin qui annonce, dans des accents théologiques, une fin où l’Homme, descendu de l’Eden, serait définitivement passé d’un état non-fautif à un état fautif. Les deux chutes sont autant de signes historiques marquants qui réduiraient potentiellement à néant les discours établis précédents. Là est peut-être l’ancrage « réaliste » le plus volontaire de The X-Files, qui donne à son implication fictionnelle dans le monde une valeur critique : elle porte une réflexion sur l’historiographie, à savoir sur les problématiques conjointes et, finalement, irréductibles, de l’écriture la plus juste de l’Histoire.

    Notes de bas de page

    1  Cette définition du récit de science-fiction pourrait paraître réductrice ou bien trop archétypale pour un genre marqué par sa complexité et qui se prête mal, finalement, à une quelconque exégèse historique. Sur ce sujet, voir Irène Langlet, La Science-fiction. Lecture et poétique d’un genre littéraire, Armand Colin, 2006, p. 134 sq.

    2  « C’est notre monde, explique Philip K. Dick, disloqué par un certain genre d’effort mental de l’auteur, c’est notre monde transformé en ce qu’il n’est pas ou pas encore. Ce monde doit se distinguer au moins d’une façon de celui qui nous est donné, et cette façon doit être suffisante pour permettre des événements qui ne peuvent se produire dans notre société – ou dans aucune société connue présente ou passée. Il doit y avoir une idée cohérente impliquée dans cette dislocation ; c’est-à-dire que la dislocation doit être conceptuelle, et non simplement triviale ou étrange – c’est là l’essence de la science-fiction, une dislocation conceptuelle dans la société en sorte qu’une nouvelle société est produite dans l’esprit de l’auteur, couchée sur le papier, et à partir du papier elle produit un choc convulsif dans l’esprit du lecteur, le choc produit par un trouble de la reconnaissance. Il sait qu’il ne lit pas un texte sur le monde véritable. » « Lettre du 14 mai 1981 » citée par Irène Langlet, Ibid., p. 142.

    3  Dans Founder’s Mutation (10.02), Mulder imagine sa vie de père et regarde auprès de William 2001, odyssée de l’espace de Stanley Kubrick. Dans le même épisode, la télévision d’Agnès (Kacey Rohl) diffuse Les évadés de la planète des singes (Don Taylor, 1971). Ces références permettent d’affirmer une certaine culture cinématographique, en même temps que de mettre en abyme la question centrale de la pérennité de l’espèce humaine.

    4  Ce personnage, qui fait son apparition dans la dernière saison du reboot, est le représentant d’une « autre » conspiration, où la conquête de l’espace, déjà réalisée, permettra le transfert d’une partie de l’humanité vers des plateformes, lui donnant ainsi la possibilité de s’exiler en dehors de la Terre. Si elle s’oppose à la volonté de l’Homme à la cigarette de détruire l’humanité et ses dérives, elle partage avec elle un même sentiment de résignation. Enfin, si les neuf premières saisons de la série se placent en parallèle de films catastrophes, cette nouvelle conspiration installe dans son horizon des productions traitant du départ de l’Homme de la Terre afin de se sauver, à l’instar d’Interstellar de Christopher Nolan (2014).

    5  Très centré sur la conquête spatiale, Space (1.09) met en scène une « entité » qui aurait profité de la présence des astronautes pour investir la Terre. Le sujet est l’occasion pour le programme de traiter de la conquête spatiale, si importante pour l’Amérique des années 60 aux années 80, ainsi que de la position de la NASA dans la politique du pays. Véritable star, notamment aux yeux de Mulder, Marcus Belt (Ed Lauter) apparaît comme une personnalité déchue, touchée par la nostalgie et le traumatisme de l’explorateur. La médaille est, quant à elle, présentée comme le totem d’un patrimoine national essentiel à transmettre. Mulder l’offre d’abord à Scully (Tempus Fugit, 4.17), avant qu’elle n’arrive dans les mains de Doggett (Alone, 8.19), puis de l’agent Leyla Harrison (Jolie Jenkins) (Scary Monsters, 9.14). En adéquation avec cet héritage transmis à la jeunesse, Mulder s’imagine construire et faire décoller une fusée avec William (Founder’s Mutation, 10.02). Notons finalement que la conquête spatiale est assez peu visée par la série, qui y voit un vecteur de l’imaginaire américain, et ce même si les doutes sur l’alunissage de juillet 1969 sont traités comme des éléments de la culture populaire contemporaine, notamment dans les récentes saisons.

    6  L’existence d’un monde parallèle, qui viendrait donner une autre représentation de l’évolution de l’Histoire, est toutefois mise en scène avec l’épisode Triangle (6.03). Alors qu’il cherche à expliquer le mystère du Triangle des Bermudes, Mulder est accidenté en mer des Caraïbes, pénétrant alors une réalité alternative, au cours de laquelle un tournant de la Seconde Guerre mondiale va se jouer. Bien que la série explore ce schéma de la science-fiction, elle laisse planer le doute sur la véracité de l’expérience vécue par l’agent qui pourrait être limitée aux effets d’un choc traumatique. Ce nouveau « décalage », qui permet au programme de prendre une certaine distance avec les éléments archétypaux du genre, est adopté à chaque fois que les personnages pénètrent un monde parallèle, faisant alors entrer la problématique du rêve ou de la fantasmagorie dans le traitement du sujet, et exacerbant l’importance de la fiction.

    7  La perte de neuf minutes, constatées régulièrement dès le pilote, marque avant tout le déplacement d’une donnée physique essentielle où se situeraient les éléments de résolution de l’enquête.

    8  La série choisit ainsi un symptôme qui relie le physique au psychique. Dans la tradition philosophique et artistique, le regard porte les signes de l’humanité. Qu’il soit le lieu d’une perception phénoménologique spéculaire (Sartre) ou comme l’espace de jonction entre le réel, l’imaginaire et le symbolique (Lacan), il indique le rapport de l’être à son environnement (le monde, autrui, soi comme éthos) et la connexion extérieure d’une intentionnalité.

    9  Apparu à la fin de la saison 5 (The End, 5.20), Gibson Praise est un jeune génie des échecs doué de facultés parapsychiques. Mulder et Scully décelant une anomalie génétique chez lui, il est alors considéré comme la clé des Affaires non-classées, marquant alors une évolution naturelle de l’homme en relation avec son histoire.

    10  Cette expression hémorragique est reprise dans la saison 10 (Founder’s Mutation, 10.02), sans pour autant qu’elle soit directement intégrée à la mythologie extraterrestre. Rattachée cette fois à une enquête sur les manipulations génétiques qui amènent des adolescents à développer des facultés parapsychiques, elle s’expose finalement comme un morphème spécifique de la série.

    11  Lors des saisons 2 à 8, certains extraterrestres sont en capacité de changer de visage. À l’inverse, à la saison 11, William est quant à lui capable d’implémenter une autre image de lui-même dans l’esprit des gens.

    12  Au sujet de David Vincent comme « proto-Mulder », voir Doug Mann, « Truth, The X-Files and the Postmodern Condition », The Mid-Atlantic Almanack, no 7, 1998, p. 17-27, p. 19.

    13  Voir Jean-Bruno Renard, « Extraterrestres », in Philippe Brunel (dir.), Dictionnaire des mythes d’aujourd’hui, Monaco, Éditions du Rocher, 1999, p. 267-275.

    14  Voir Jean-Bruno Renard, « L’homme sauvage et l’extraterrestre », Diogène, no 127, juillet-septembre 1984, p. 70-88.

    15  Ce thème est développé par Josepho (Providence, 9.10), un gourou de secte ufologique qui fait enlever William. Son expérience pendant l’opération « Tempête du Désert », au cours de laquelle il fut blessé puis témoin de l’intervention des super-soldats, est interprétée comme l’arrivée sur Terre des cavaliers de l’Apocalypse.

    16  Le mouvement transhumaniste revendiquant sa filiation avec les Lumières considère qu’en entrant dans une ère post-darwinnienne, l’Homme ne sera plus dépendant des aléas de la nature, et pourra ainsi imposer une évolution et une amélioration fondée sur la raison, la morale et l’éthique. Voir Bruce Benderson, Transhumain, Paris, Payot, 2010.

    17  Dans son célèbre essai, La Condition postmoderne. Rapport sur le savoir (Paris, Minuit, 1979), Jean-François Lyotard décrit la fin du progrès moderne, qui s’inscrivait dans une quête de justice et de progrès social, et s’appuyait sur un développement des sciences. Avec les grands faits de l’Histoire du xxe siècle, les « métarécits » (notamment l’émancipation de l’individu rationnel) sont remis en cause, faisant de l’Homme un errant dans une vaste marchandise informationnelle qui rend obsolète tout accès à la connaissance. Ajoutons que pour la pensée anglo-saxonne, mais aussi pour tous les domaines de la fiction, le postmodernisme est une « attitude » face au fonctionnement logique du monde et à l’essor des technologies. En somme, et comme nous le remarquons pour The X-Files, il existe une réversibilité dans la définition même du terme « postmoderne », entre une condition qui définirait une réalité épistémologique et sociale, et un jeu littéraire, installé du côté de la fiction, qui permet un regard critique.

    18  La question de la métamorphose (en l’occurrence de genre), mais aussi de l’immortalité est traitée en regard du contexte « sectaire » dans Gender Bender (1.14). Dans cet épisode, Mulder et Scully, enquêtant sur une série de crimes au cours desquels le meurtrier semble être en mesure de changer de sexe, sont amenés dans une communauté Amish du Massachussetts qui décide de vivre déconnectée du monde moderne. D’étranges cérémonies religieuses redonnent une seconde jeunesse à des personnes pourtant au bord de la mort.

    19  « Avec le transhumanisme, explique Laurent Alexandre, un nouveau paradigme religieux émerge : ce n’est plus le renoncement de l’athée qui se voit seul dans l’Univers, c’est désormais l’affirmation fière de ce que l’homme peut tout faire, y compris créer du vivant et se recréer lui-même », La guerre des intelligences, Paris, J. C. Lattès, 2017, p. 269.

    20  « Un peu partout, explique Jean-Claude Guillebaud, le corps est ainsi présenté comme une vieillerie encombrante, symbole de finitude, de fragilité et de mort ». « La pudibonderie scientiste », Études, vol. 414, no 4, avril 2011, p. 463-474, p. 463, en ligne : www.cairn.info/revue-etudes-2011-4-page-463.htm, dernière consultation le 20 juillet 2018.

    21  L’immortalité, perçue comme une sorte de malédiction, est le sujet de Tithonus (6.10). Dans cet épisode, Alfred Fellig (Geoffrey Lewis), connu pour photographier des scènes de meurtres, ne peut mourir depuis qu’il a refusé de regarder la mort en face lors d’une épidémie de fièvre jaune, survenue 149 ans plus tôt. Il tente alors chaque jour de prendre un cliché de la mort afin de s’offrir à elle.

    22  Ce rapport aux images et aux émotions qu’elles génèrent, au point de porter une dimension psychique des personnes, est le sujet même de Unruhe (4.04).

    23  Voir Claire Cornillon, « L’art du teaser : les séquences prégénériques dans quelques séries fantastiques américaines des années 1990 et 2000 », TV/Series, no 6, en ligne : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/tvseries/314.

    24  Dans IWant to Believe et dans les deux épisodes de la mythologie de la saison 10, Scully, alors employée dans un hôpital médical catholique, travaille sur des protocoles expérimentaux pour soigner des enfants atteints de maladies génétiques rares.

    25  S’intéressant au paranormal comme objet d’étude et phénomène social, la zététique cherche avant tout à construire une approche raisonnable aux expressions paranormales, notamment en pointant du doigt la faible robustesse épistémologique de certains discours qui les portent. Dans la continuité des courants sceptiques, ses actions, menée notamment par Henri Broch, fondateur du Laboratoire de zététique (Université Sophia-Antipolis de Nice), tendent à démystifier ces discours, mais aussi à soutenir le développement de la culture scientifique, notamment dans le cadre des observations et du traitement de l’information. Renvoyant à son étymologie (du grec ζητητικός, zētētikós, « qui aime chercher »), elle promeut ainsi le goût de la recherche dynamique et critique, notamment en ce qui concerne le rôle des médias et son rapport à l’immédiateté (qui s’opposerait ainsi à l’élaboration d’une raison construite dans la durée). Voir Henri Broch, Le Paranormal, ses documents, ses hommes, ses méthodes, Le Seuil, « Points Sciences », Paris, 2001.

    26  Après les succès de Carrie au bal du diable de Brian Palma (1976) et Shining de Stanley Kubrick (1980), Stephen King va être adapté, sur la période, par David Cronenberg (Dead Zone, 1983), John Carpenter (Christine, 1983) ou George Romero, avec qui il collabore sur Creepshow (1982) et La Part des ténèbres (1993).

    27  Voir Hélène Monnet-Cantagrel, « La science des Experts », Télévision, no 2 (2011/1), p. 119-127.

    28  Voir Maud Desmet, Confessions du cadavre. Autopsie et figures du mort dans les séries et films policiers, Paris, Rouge Profond, 2016.

    29  Dans la typologie des séries américaines proposées par Marjolaine Boutet, la déferlante des séries macabres s’inscrit dans la période postérieure à 1990, qu’elle intitule « réalisme » et « politically incorrectness ». Si jusqu’alors, les séries servaient largement l’idéologie dominante, elles s’en écartent en 1990 quand surviennent dans le paysage télévisuel américain les chaînes câblées. Parce qu’elles ne sont pas hertziennes, les chaînes câblées n’ont pas à se soumettre aux directives de la FCC (Federal Communications Commission). La mission première de la FCC, créée en 1934 par le Congrès américain, était de réguler les télécommunications, mission qui s’est doublée en 1960 d’un rôle de censure, toujours en vigueur : les médias ne doivent contenir aucun propos indécent, obscène ou blasphématoire et l’on ne doit pas y montrer la nudité. Le progrès aidant, ses prérogatives se sont étendues à d’autres canaux (radio, télévision, Internet) et les interdits s’en sont trouvés d’autant plus diffusés. La première des chaînes à profiter de la brèche ouverte par le câble et à transgresser les interdits de la FCC a été HBO. Dès lors en perte d’audience, les chaînes hertziennes se sont vues contraintes de lui emboîter le pas alors qu’elles ne disposaient ni des mêmes moyens ni de la même liberté. Voir Marjolaine Boutet, « Soixante ans d’histoire des séries télévisées américaines », Revue de recherche en civilisation américaine, en ligne : http://rrca.revues.org/248, dernière consultation le 23 mai 2018.

    30  « L’expertise scientifique de Dexter, affirme Jacqueline Guittard, renvoie à bien des courants d’expression plastique : il ne s’agit plus de cadavre montré de façon esthétisante, mais plus radicalement d’un détournement esthétique du cadavre. Il est loisible de songer à la fois aux références plastiques du Body art et aux travaux de plastination de Gunther van Hagens », « Autopsies en séries : la transparence et l’ombre », Itinéraires, 2015 (1), en ligne : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/2781;DOI:10.4000/itineraires.2781, dernière consultation le 27 octobre 2018.

    31  Voir Fabienne Soldini, La mort charnelle et le cadavre dans la production artistique contemporaine : représentations, utilisations et limites du corps humain, CNRS Lames, 2010, en ligne : http://www.upmf-grenoble.fr/fabienne-soldini-172205.htm.

    32  Énigmes et Complots. Une enquête à propos d’enquêtes, Paris, Gallimard, coll. « NRF Essais », 2012, p. 61. Les italiques sont dans le texte.

    33  Ibid., p. 39.

    34  Ibid., p. 197.

    35  Ibid., p. 329.

    36  « Ensuite, explique Luc Boltanski, en développant la thématique de l’énigme et de l’enquête – au cœur du roman policier – et celle du complot – sujet principal des romans d’espionnage –, je me suis orienté vers des questions intéressant non plus seulement la représentation de la réalité dans les littératures populaires mais, aussi, des façons nouvelles de problématiser la réalité qui ont accompagné le développement des sciences humaines : mes intérêts se sont tournés, particulièrement, vers la psychiatrie avec la constitution d’une nouvelle entité nosologique, la paranoïa ; puis vers la science politique, qui, en développant l’idée de “théorie du complot”, transfère la paranoïa de la pathologie individuelle vers la pathologie sociale. »« Les conditions d’apparition du roman policier. Énigmes et complots dans les métaphysiques politiques du XXe siècle », Communications, no 99 (2016/2), paragraphe 2, en ligne :https://www-cairn-info.faraway.parisnanterre.fr/revue-communications-2016-2-page-19.htm, dernière consultation le 30 octobre 2018.

    37  Voir Emmanuel Todd, Après l’empire. Essai sur la décomposition du système américain, Paris, Gallimard, « Connaissance », 2002.

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    1  Cette définition du récit de science-fiction pourrait paraître réductrice ou bien trop archétypale pour un genre marqué par sa complexité et qui se prête mal, finalement, à une quelconque exégèse historique. Sur ce sujet, voir Irène Langlet, La Science-fiction. Lecture et poétique d’un genre littéraire, Armand Colin, 2006, p. 134 sq.

    2  « C’est notre monde, explique Philip K. Dick, disloqué par un certain genre d’effort mental de l’auteur, c’est notre monde transformé en ce qu’il n’est pas ou pas encore. Ce monde doit se distinguer au moins d’une façon de celui qui nous est donné, et cette façon doit être suffisante pour permettre des événements qui ne peuvent se produire dans notre société – ou dans aucune société connue présente ou passée. Il doit y avoir une idée cohérente impliquée dans cette dislocation ; c’est-à-dire que la dislocation doit être conceptuelle, et non simplement triviale ou étrange – c’est là l’essence de la science-fiction, une dislocation conceptuelle dans la société en sorte qu’une nouvelle société est produite dans l’esprit de l’auteur, couchée sur le papier, et à partir du papier elle produit un choc convulsif dans l’esprit du lecteur, le choc produit par un trouble de la reconnaissance. Il sait qu’il ne lit pas un texte sur le monde véritable. » « Lettre du 14 mai 1981 » citée par Irène Langlet, Ibid., p. 142.

    3  Dans Founder’s Mutation (10.02), Mulder imagine sa vie de père et regarde auprès de William 2001, odyssée de l’espace de Stanley Kubrick. Dans le même épisode, la télévision d’Agnès (Kacey Rohl) diffuse Les évadés de la planète des singes (Don Taylor, 1971). Ces références permettent d’affirmer une certaine culture cinématographique, en même temps que de mettre en abyme la question centrale de la pérennité de l’espèce humaine.

    4  Ce personnage, qui fait son apparition dans la dernière saison du reboot, est le représentant d’une « autre » conspiration, où la conquête de l’espace, déjà réalisée, permettra le transfert d’une partie de l’humanité vers des plateformes, lui donnant ainsi la possibilité de s’exiler en dehors de la Terre. Si elle s’oppose à la volonté de l’Homme à la cigarette de détruire l’humanité et ses dérives, elle partage avec elle un même sentiment de résignation. Enfin, si les neuf premières saisons de la série se placent en parallèle de films catastrophes, cette nouvelle conspiration installe dans son horizon des productions traitant du départ de l’Homme de la Terre afin de se sauver, à l’instar d’Interstellar de Christopher Nolan (2014).

    5  Très centré sur la conquête spatiale, Space (1.09) met en scène une « entité » qui aurait profité de la présence des astronautes pour investir la Terre. Le sujet est l’occasion pour le programme de traiter de la conquête spatiale, si importante pour l’Amérique des années 60 aux années 80, ainsi que de la position de la NASA dans la politique du pays. Véritable star, notamment aux yeux de Mulder, Marcus Belt (Ed Lauter) apparaît comme une personnalité déchue, touchée par la nostalgie et le traumatisme de l’explorateur. La médaille est, quant à elle, présentée comme le totem d’un patrimoine national essentiel à transmettre. Mulder l’offre d’abord à Scully (Tempus Fugit, 4.17), avant qu’elle n’arrive dans les mains de Doggett (Alone, 8.19), puis de l’agent Leyla Harrison (Jolie Jenkins) (Scary Monsters, 9.14). En adéquation avec cet héritage transmis à la jeunesse, Mulder s’imagine construire et faire décoller une fusée avec William (Founder’s Mutation, 10.02). Notons finalement que la conquête spatiale est assez peu visée par la série, qui y voit un vecteur de l’imaginaire américain, et ce même si les doutes sur l’alunissage de juillet 1969 sont traités comme des éléments de la culture populaire contemporaine, notamment dans les récentes saisons.

    6  L’existence d’un monde parallèle, qui viendrait donner une autre représentation de l’évolution de l’Histoire, est toutefois mise en scène avec l’épisode Triangle (6.03). Alors qu’il cherche à expliquer le mystère du Triangle des Bermudes, Mulder est accidenté en mer des Caraïbes, pénétrant alors une réalité alternative, au cours de laquelle un tournant de la Seconde Guerre mondiale va se jouer. Bien que la série explore ce schéma de la science-fiction, elle laisse planer le doute sur la véracité de l’expérience vécue par l’agent qui pourrait être limitée aux effets d’un choc traumatique. Ce nouveau « décalage », qui permet au programme de prendre une certaine distance avec les éléments archétypaux du genre, est adopté à chaque fois que les personnages pénètrent un monde parallèle, faisant alors entrer la problématique du rêve ou de la fantasmagorie dans le traitement du sujet, et exacerbant l’importance de la fiction.

    7  La perte de neuf minutes, constatées régulièrement dès le pilote, marque avant tout le déplacement d’une donnée physique essentielle où se situeraient les éléments de résolution de l’enquête.

    8  La série choisit ainsi un symptôme qui relie le physique au psychique. Dans la tradition philosophique et artistique, le regard porte les signes de l’humanité. Qu’il soit le lieu d’une perception phénoménologique spéculaire (Sartre) ou comme l’espace de jonction entre le réel, l’imaginaire et le symbolique (Lacan), il indique le rapport de l’être à son environnement (le monde, autrui, soi comme éthos) et la connexion extérieure d’une intentionnalité.

    9  Apparu à la fin de la saison 5 (The End, 5.20), Gibson Praise est un jeune génie des échecs doué de facultés parapsychiques. Mulder et Scully décelant une anomalie génétique chez lui, il est alors considéré comme la clé des Affaires non-classées, marquant alors une évolution naturelle de l’homme en relation avec son histoire.

    10  Cette expression hémorragique est reprise dans la saison 10 (Founder’s Mutation, 10.02), sans pour autant qu’elle soit directement intégrée à la mythologie extraterrestre. Rattachée cette fois à une enquête sur les manipulations génétiques qui amènent des adolescents à développer des facultés parapsychiques, elle s’expose finalement comme un morphème spécifique de la série.

    11  Lors des saisons 2 à 8, certains extraterrestres sont en capacité de changer de visage. À l’inverse, à la saison 11, William est quant à lui capable d’implémenter une autre image de lui-même dans l’esprit des gens.

    12  Au sujet de David Vincent comme « proto-Mulder », voir Doug Mann, « Truth, The X-Files and the Postmodern Condition », The Mid-Atlantic Almanack, no 7, 1998, p. 17-27, p. 19.

    13  Voir Jean-Bruno Renard, « Extraterrestres », in Philippe Brunel (dir.), Dictionnaire des mythes d’aujourd’hui, Monaco, Éditions du Rocher, 1999, p. 267-275.

    14  Voir Jean-Bruno Renard, « L’homme sauvage et l’extraterrestre », Diogène, no 127, juillet-septembre 1984, p. 70-88.

    15  Ce thème est développé par Josepho (Providence, 9.10), un gourou de secte ufologique qui fait enlever William. Son expérience pendant l’opération « Tempête du Désert », au cours de laquelle il fut blessé puis témoin de l’intervention des super-soldats, est interprétée comme l’arrivée sur Terre des cavaliers de l’Apocalypse.

    16  Le mouvement transhumaniste revendiquant sa filiation avec les Lumières considère qu’en entrant dans une ère post-darwinnienne, l’Homme ne sera plus dépendant des aléas de la nature, et pourra ainsi imposer une évolution et une amélioration fondée sur la raison, la morale et l’éthique. Voir Bruce Benderson, Transhumain, Paris, Payot, 2010.

    17  Dans son célèbre essai, La Condition postmoderne. Rapport sur le savoir (Paris, Minuit, 1979), Jean-François Lyotard décrit la fin du progrès moderne, qui s’inscrivait dans une quête de justice et de progrès social, et s’appuyait sur un développement des sciences. Avec les grands faits de l’Histoire du xxe siècle, les « métarécits » (notamment l’émancipation de l’individu rationnel) sont remis en cause, faisant de l’Homme un errant dans une vaste marchandise informationnelle qui rend obsolète tout accès à la connaissance. Ajoutons que pour la pensée anglo-saxonne, mais aussi pour tous les domaines de la fiction, le postmodernisme est une « attitude » face au fonctionnement logique du monde et à l’essor des technologies. En somme, et comme nous le remarquons pour The X-Files, il existe une réversibilité dans la définition même du terme « postmoderne », entre une condition qui définirait une réalité épistémologique et sociale, et un jeu littéraire, installé du côté de la fiction, qui permet un regard critique.

    18  La question de la métamorphose (en l’occurrence de genre), mais aussi de l’immortalité est traitée en regard du contexte « sectaire » dans Gender Bender (1.14). Dans cet épisode, Mulder et Scully, enquêtant sur une série de crimes au cours desquels le meurtrier semble être en mesure de changer de sexe, sont amenés dans une communauté Amish du Massachussetts qui décide de vivre déconnectée du monde moderne. D’étranges cérémonies religieuses redonnent une seconde jeunesse à des personnes pourtant au bord de la mort.

    19  « Avec le transhumanisme, explique Laurent Alexandre, un nouveau paradigme religieux émerge : ce n’est plus le renoncement de l’athée qui se voit seul dans l’Univers, c’est désormais l’affirmation fière de ce que l’homme peut tout faire, y compris créer du vivant et se recréer lui-même », La guerre des intelligences, Paris, J. C. Lattès, 2017, p. 269.

    20  « Un peu partout, explique Jean-Claude Guillebaud, le corps est ainsi présenté comme une vieillerie encombrante, symbole de finitude, de fragilité et de mort ». « La pudibonderie scientiste », Études, vol. 414, no 4, avril 2011, p. 463-474, p. 463, en ligne : www.cairn.info/revue-etudes-2011-4-page-463.htm, dernière consultation le 20 juillet 2018.

    21  L’immortalité, perçue comme une sorte de malédiction, est le sujet de Tithonus (6.10). Dans cet épisode, Alfred Fellig (Geoffrey Lewis), connu pour photographier des scènes de meurtres, ne peut mourir depuis qu’il a refusé de regarder la mort en face lors d’une épidémie de fièvre jaune, survenue 149 ans plus tôt. Il tente alors chaque jour de prendre un cliché de la mort afin de s’offrir à elle.

    22  Ce rapport aux images et aux émotions qu’elles génèrent, au point de porter une dimension psychique des personnes, est le sujet même de Unruhe (4.04).

    23  Voir Claire Cornillon, « L’art du teaser : les séquences prégénériques dans quelques séries fantastiques américaines des années 1990 et 2000 », TV/Series, no 6, en ligne : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/tvseries/314.

    24  Dans IWant to Believe et dans les deux épisodes de la mythologie de la saison 10, Scully, alors employée dans un hôpital médical catholique, travaille sur des protocoles expérimentaux pour soigner des enfants atteints de maladies génétiques rares.

    25  S’intéressant au paranormal comme objet d’étude et phénomène social, la zététique cherche avant tout à construire une approche raisonnable aux expressions paranormales, notamment en pointant du doigt la faible robustesse épistémologique de certains discours qui les portent. Dans la continuité des courants sceptiques, ses actions, menée notamment par Henri Broch, fondateur du Laboratoire de zététique (Université Sophia-Antipolis de Nice), tendent à démystifier ces discours, mais aussi à soutenir le développement de la culture scientifique, notamment dans le cadre des observations et du traitement de l’information. Renvoyant à son étymologie (du grec ζητητικός, zētētikós, « qui aime chercher »), elle promeut ainsi le goût de la recherche dynamique et critique, notamment en ce qui concerne le rôle des médias et son rapport à l’immédiateté (qui s’opposerait ainsi à l’élaboration d’une raison construite dans la durée). Voir Henri Broch, Le Paranormal, ses documents, ses hommes, ses méthodes, Le Seuil, « Points Sciences », Paris, 2001.

    26  Après les succès de Carrie au bal du diable de Brian Palma (1976) et Shining de Stanley Kubrick (1980), Stephen King va être adapté, sur la période, par David Cronenberg (Dead Zone, 1983), John Carpenter (Christine, 1983) ou George Romero, avec qui il collabore sur Creepshow (1982) et La Part des ténèbres (1993).

    27  Voir Hélène Monnet-Cantagrel, « La science des Experts », Télévision, no 2 (2011/1), p. 119-127.

    28  Voir Maud Desmet, Confessions du cadavre. Autopsie et figures du mort dans les séries et films policiers, Paris, Rouge Profond, 2016.

    29  Dans la typologie des séries américaines proposées par Marjolaine Boutet, la déferlante des séries macabres s’inscrit dans la période postérieure à 1990, qu’elle intitule « réalisme » et « politically incorrectness ». Si jusqu’alors, les séries servaient largement l’idéologie dominante, elles s’en écartent en 1990 quand surviennent dans le paysage télévisuel américain les chaînes câblées. Parce qu’elles ne sont pas hertziennes, les chaînes câblées n’ont pas à se soumettre aux directives de la FCC (Federal Communications Commission). La mission première de la FCC, créée en 1934 par le Congrès américain, était de réguler les télécommunications, mission qui s’est doublée en 1960 d’un rôle de censure, toujours en vigueur : les médias ne doivent contenir aucun propos indécent, obscène ou blasphématoire et l’on ne doit pas y montrer la nudité. Le progrès aidant, ses prérogatives se sont étendues à d’autres canaux (radio, télévision, Internet) et les interdits s’en sont trouvés d’autant plus diffusés. La première des chaînes à profiter de la brèche ouverte par le câble et à transgresser les interdits de la FCC a été HBO. Dès lors en perte d’audience, les chaînes hertziennes se sont vues contraintes de lui emboîter le pas alors qu’elles ne disposaient ni des mêmes moyens ni de la même liberté. Voir Marjolaine Boutet, « Soixante ans d’histoire des séries télévisées américaines », Revue de recherche en civilisation américaine, en ligne : http://rrca.revues.org/248, dernière consultation le 23 mai 2018.

    30  « L’expertise scientifique de Dexter, affirme Jacqueline Guittard, renvoie à bien des courants d’expression plastique : il ne s’agit plus de cadavre montré de façon esthétisante, mais plus radicalement d’un détournement esthétique du cadavre. Il est loisible de songer à la fois aux références plastiques du Body art et aux travaux de plastination de Gunther van Hagens », « Autopsies en séries : la transparence et l’ombre », Itinéraires, 2015 (1), en ligne : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/2781;DOI:10.4000/itineraires.2781, dernière consultation le 27 octobre 2018.

    31  Voir Fabienne Soldini, La mort charnelle et le cadavre dans la production artistique contemporaine : représentations, utilisations et limites du corps humain, CNRS Lames, 2010, en ligne : http://www.upmf-grenoble.fr/fabienne-soldini-172205.htm.

    32  Énigmes et Complots. Une enquête à propos d’enquêtes, Paris, Gallimard, coll. « NRF Essais », 2012, p. 61. Les italiques sont dans le texte.

    33  Ibid., p. 39.

    34  Ibid., p. 197.

    35  Ibid., p. 329.

    36  « Ensuite, explique Luc Boltanski, en développant la thématique de l’énigme et de l’enquête – au cœur du roman policier – et celle du complot – sujet principal des romans d’espionnage –, je me suis orienté vers des questions intéressant non plus seulement la représentation de la réalité dans les littératures populaires mais, aussi, des façons nouvelles de problématiser la réalité qui ont accompagné le développement des sciences humaines : mes intérêts se sont tournés, particulièrement, vers la psychiatrie avec la constitution d’une nouvelle entité nosologique, la paranoïa ; puis vers la science politique, qui, en développant l’idée de “théorie du complot”, transfère la paranoïa de la pathologie individuelle vers la pathologie sociale. »« Les conditions d’apparition du roman policier. Énigmes et complots dans les métaphysiques politiques du XXe siècle », Communications, no 99 (2016/2), paragraphe 2, en ligne :https://www-cairn-info.faraway.parisnanterre.fr/revue-communications-2016-2-page-19.htm, dernière consultation le 30 octobre 2018.

    37  Voir Emmanuel Todd, Après l’empire. Essai sur la décomposition du système américain, Paris, Gallimard, « Connaissance », 2002.

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