Rythmes et rituels alimentaires saisonniers XVIIIe-XXIe siècles
p. 125-140
Texte intégral
« Nous aurons l’hiver Avec une cigale Dans ses cheveux blancs1 ».
Voilà un jardin potager comme il n’en fut jamais, si ce n’est dans l’île des plaisirs, trouvée par Fénelon2. […] Ici croissent comme dans une serre le raisin d’automne et la cerise du printemps ; la pêche de Montreuil y contraste avec l’orange de Portugal, et l’orgueilleux panier de fraises élève sa pyramide à côté du cédrat ultramontain. […] Depuis Christophe Colomb, il y a plus d’une page à rajouter au chapitre des métamorphoses. […] Ici je vois la Pomone des deux hémisphères, en nature ou non, peu m’importe : pourvu qu’elle aille à mon estomac, je n’en cherche pas davantage3.
1Dans les sociétés occidentales, le respect du cycle des saisons dans les pratiques alimentaires fait aujourd’hui partie des crédos gastronomiques portés par des stars internationales de la haute cuisine comme par la communication de la grande distribution, mais également par les mouvements biologiques, locavores ou végétariens. Certains discours évoquent le retour à une « sagesse ancienne ». Or, le désir d’affranchissement par rapport aux contraintes saisonnières de la croissance et de la maturation des plantes alimentaires remonte à des temps fort lointains.
2Depuis l’Antiquité, toutes sortes de techniques furent utilisées à cette fin. Certes sa réalisation fut surtout le fruit des progrès induits par les révolutions industrielles et l’augmentation du niveau de vie moyen dans les pays occidentaux. De nos jours en France, si l’on met en parallèle les études d’opinion et analyses sociologiques, le retour à l’observation des saisons en alimentation est davantage constaté dans le discours que dans les pratiques. Néanmoins, afin de mesurer véritablement l’ampleur de ce phénomène et comme la question de la saisonnalité alimentaire est très liée au rapport des sociétés occidentales à la nature4, il convient de prendre également en compte le surgissement, l’hiver notamment, de certains rites qui ne sont pas sans rappeler d’ancestrales fêtes païennes et chrétiennes5.
3L’étude du respect ou non du cycle des saisons en France depuis un peu plus de deux siècles, soit à partir de la Première Révolution industrielle et du développement d’un puissant discours gastronomique moderne6, dégage-t-elle une périodisation nettement marquée ou laisse-t-elle apparaître un enchevêtrement de pratiques alimentaires ?
S’émanciper des saisons (1750-1830) ?
4Il ne peut être entrepris ici une étude exhaustive des livres de cuisine. D’autre part, quelle représentativité culinaire et sociologique doit-on leur attribuer ? Cette double interrogation est bien connue des historiens7, mais malgré ses imperfections cette source paraît fort précieuse pour estimer quelle place l’on accordait aux saisons dans l’alimentation de telle ou telle période.
5Au milieu du xviiie siècle, avant la révolution industrielle et à une époque où les plantations des continents lointains fournissent essentiellement des produits tropicaux difficilement cultivables à grande échelle en France, les saisons peuvent servir de matrice aux livres de cuisine et éviter à leur auteur de suivre l’habituel ordre des mets dans un repas. Les titres, du moins dans certaines de leurs éditions8, des deux ouvrages les plus célèbres de Menon, Les soupers de la Cour et La cuisinière bourgeoise, l’annoncent on ne peut plus clairement. Grimod de la Reynière, l’un des fondateurs du discours gastronomique moderne français, en choisissant la forme séculaire de l’almanach pour prodiguer ses conseils au nouveau public gastronome de la capitale, se conforme lui aussi au rythme du temps et se montre attentif aux rituels alimentaires saisonniers ainsi qu’à leur évolution. Son Almanach des gourmands comprend, dès la première livraison en 1803, un « calendrier nutritif » annoncé en sous-titre :
Janvier. Tout le monde est d’accord qu’il est peu de mois en France plus favorables à la bonne chère que celui de janvier, qui, en dépit du calendrier républicain, commence toujours l’année gourmande, depuis Charles IX. Sans parler de la fête des Rois, qui est également celle des pâtissiers et l’occasion d’un grand nombre d’indigestions, le temps des étrennes est constamment celui des rassemblements nutritifs. Cette époque de l’année, regardée comme celle de l’extinction des haines, du rapprochement des familles, des visites de devoir, etc. est un véritable temps d’amnistie et de jubilation ; car presque tous ces nombreux rapprochements sont signalés par de grands repas9.
6Pourtant, Grimod évoque aussi en termes admiratifs la « révolution » des conserves opérée par Nicolas Appert. Il rappelle les tentatives de conserves passées, mais aucune méthode avant l’appertisation n’était satisfaisante, les serres chaudes par exemple ne produisant que de faibles quantités pour un coût astronomique :
Les serres chaudes qui n’enfantent qu’à force d’art et à grands frais des légumes et des fruits sans saveur, en fournissaient aux tables splendides de nos Lucullus. Ces productions artificielles pouvaient bien satisfaire la vanité, mais ne contentèrent jamais la gourmandise10.
7Et Grimod de s’émerveiller de la consommation de produits des saisons chaudes à Carnaval et de cette inversion du temps, « la plus aimable et la plus douce des révolutions dans nos palais et sur nos tables11 ». Selon lui, si la méthode Appert fonctionne particulièrement bien pour les petits pois, elle peut s’appliquer à de nombreux fruits et légumes ainsi qu’au lait et au bouillon :
Son industrie va bien plus loin encore, puisqu’il est parvenu à conserver par le même procédé certains fruits, tels que les groseilles, les cerises, les framboises, les prunes de reine-claude et de mirabelle, les abricots, les alberges, les brugnons, et même les pêches. […] Voilà donc un grand nombre de plats de dessert d’une nouvelle espèce, et très dignes de figurer au milieu de l’hiver dans un dîner somptueux.12.
8On se prend donc à rêver que la conserve fournisse un nouveau moyen pour s’affranchir des contraintes de la saisonnalité et peut-être définitivement éliminer la relative pénurie des productions alimentaires pendant les mois d’hiver. Cependant, il est patent dans les descriptions des conserves d’Appert par Grimod que l’inventeur pense que ses productions serviront surtout dans un premier temps au ravitaillement des armées et des navires au long cours. Les travaux de Martin Bruegel13 démontrent qu’en réalité, malgré la vogue de cette nouveauté à Paris dans les premières décennies du siècle, la diffusion en France des conserves est lente et inégale, tout comme le sera, plus tard, celle de la réfrigération14. Ainsi le texte du Gastronome cité plus haut en exergue reste-t-il avant tout l’expression d’une utopie, d’un désir qu’il est rarement possible d’assouvir encore. Il décrit bien un potager où « le raisin d’automne » voisine avec la « cerise du printemps ». Mais il s’agit d’une construction en sucre réalisée par un habile confiseur. Antonin Carême, qui s’évertue à édicter des normes culinaires intangibles, fait preuve dans son Maître d’hôtel français, paru en 1822 puis réédité plusieurs fois après sa mort, notamment en 1842, d’un grand attachement pour les saisons. Le sous-titre, une fois encore, est suffisamment éloquent : Parallèle de la cuisine ancienne et moderne considérée sous le rapport de l’ordonnance des menus selon les quatre saisons.
Résistance des modes de consommation saisonniers et des primeurs (1830-1945)
9Si Carême ordonne ses menus en distinguant les saisons, il n’accorde bien entendu pas exactement le même sens à cette notion que les locavores du xxie siècle et de nombreux produits sur ses tables constitueraient de sérieuses entorses aux règles de la saisonnalité alimentaire actuelle15. Néanmoins cet ouvrage possède bel et bien un rythme saisonnier. Or, son influence sur toute la haute cuisine du xixe siècle fut importante16. L’analyse des pratiques en vogue chez les gastronomes parisiens révèle, comme Jean-Paul Aron l’avait pressenti17, que l’intérêt pour les produits de saison ne se dément pas. Le même bihebdomadaire qui aspire à un potager intemporel passe des publicités vantant les primeurs au restaurant :
Il est assez généralement reçu dans le monde gastronomique, que les mets servis dans un restaurant à prix fixe, sont moins bons et moins copieux que ceux des dîners à la carte. [Mais] M. Richefeu, Palais Royal, no 160, sert d’excellents dîners à 2 francs par tête. […] Nous pourrions ajouter qu’il n’est point [d’établissements] où l’on serve sitôt ce que chaque nouvelle saison fournit à la gastronomie ; et cela sans supplément de prix. Ainsi l’on voit déjà chez lui les primeurs qui ne se trouvent ordinairement que dans les restaurants à la carte18.
10Si Paul Lacroix, ou l’un de ses rédacteurs, exprime sans ambages son doute sur la qualité des primeurs19, il n’en reste pas moins que, même dans les milieux gastronomes où les possibilités de s’affranchir du cycle naturel s’accroissent avec les années, l’attention pour les produits saisonniers constitue l’une des premières préoccupations : « Ne serait-il pas convenable de faire mention de l’apparition des primeurs en légumes, fruits, etc., et de leurs prix ? Lorsque vous donnez le Menu d’un dîner, ne devriez-vous pas annoncer pour quelle saison ? » Un débat entre « anciens » et « modernes » a certainement existé comme le suggère cet article d’un périodique provincial :
Dernièrement à Bayonne, Je me trouvais à table d’hôte à côté d’un Monsieur pansu, bouffi, haut-en-couleur, croulant de santé, gras à lard, que je reconnus aussitôt pour appartenir à ces honorables classes d’industriels qui, le matin, prennent leurs ébats aux marchés de primeurs, et le soir plongent leurs gros nez rouges dans l’orifice d’une casserole ou d’un vaisseau quelconque.
Après le repas mon homme m’entraîna dans les cuisines qu’il inspecta en connaisseur émérite. « J’ai ce qu’il me faut », dit-il. Toute la science consiste dans la cuisine, non à se baser sur les appétits, mais sur les saisons. Et il avait raison, Monsieur X… Combien de chefs-d’œuvre culinaires avortés ? Combien de personnes contrariées, de clientèles perdues faute d’irréflexion ? Dieu a donné à chaque saison ce qui lui convient. Ainsi, un bon cuisinier devra, avec soin, choisir les primeurs, les choses ordinaires et l’assaisonnement qui leur est propre, sans chercher, cupitor, impossibilium, à faire des innovations qui ne se trouvent que dans des journaux dits gastronomiques rédigés par des gens qui ne savent où donner de la plume. Ces jours-ci, manger des canards, du melon, du lait, des sucreries, des viandes légères, mais des excitants aussi : des sauces aromatisées avec soin, des jus d’herbes. Nos marchés sont approvisionnés, et, comme vous le dira mon compagnon, il faut voir pour étudier, et suivre les bayonnais en ceci : aller simplement, naturellement20.
11La revue gastronomique parisienne La salle à manger, à qui par ailleurs il arrive d’intégrer des conserves dans ses « menus de saison21 », emboîte le pas à son confrère bordelais :
Plus nous avançons vers l’été, et plus le cercle de nos plaisirs alimentaires se rétrécit ; nous entendons parler des jouissances solides, de celles que procurent la grosse boucherie, la basse-cour, les plaines et les forêts ; car les jouissances végétales sont au contraire fort multipliées dans cette saison. Heureuse et sage combinaison de la Providence, qui a pensé dans son immense sagesse que les aliments légers convenaient mieux en été à l’estomac de l’homme que les viandes succulentes ! Si nous voulions bien ne pas forcer la nature, et nous contenter de ce qu’elle produit dans chaque saison, notre santé s’en trouverait mieux, et notre goût aussi ; mais les indigestions sont la suite naturelle de l’espèce d’orgueil qu’on met à braver l’intempérance et l’ordre des saisons, qu’on n’intervertit jamais impunément22.
12Une autre source, le livre de recettes, peut nous donner de précieuses informations. L’étude des « formules » mises en avant par les chefs cuisiniers français de la seconde moitié du xixe siècle permet de connaître la composition des menus et leur structuration, et pas seulement pour ceux qui relèvent de la haute cuisine. Ce type de recettes paraît d’abord, au cours des années 1880, dans les premières revues culinaires professionnelles, au premier rang desquelles figure L’Art culinaire, publication de la Société des cuisiniers de Paris. La primauté accordée aux produits de saison dans les recettes peut d’ailleurs trouver écho dans des chroniques portant sur les produits disponibles aux Halles de Paris23, et également dans des textes appartenant à la littérature gastronomique, comme « Le coup du potager. Souvenirs de saison », paru en 189924. Dès les années 1890 d’ailleurs paraissent des livres de cuisine entièrement construits selon le rythme des saisons. La saisonnalité constitue même l’un des arguments de vente de ces ouvrages, y compris lors de leurs rééditions de l’entre-deux-guerres ; il en va ainsi pour La Cuisine de tous les mois (1893) de Philéas Gilbert pour sa troisième édition en 1927 :
[La cuisine de tous les mois] a été écrit à la demande des lectrices de journaux de modes où, sous le pseudonyme Le « Chef ». [… L’édition] qui vient de paraître, revue et augmentée, conserve son caractère original, c’est-à-dire sa distribution par mois, avec menus de déjeuners, dîners et grands menus combinés selon les productions alimentaires du moment, et en faisant suivre chaque menu de recettes des plats qui le composent. Cuisine, pâtisserie, glaces, conserves usuelles s’y trouvent réunies dans l’ordre même de l’ouvrage. L’auteur ne s’adresse pas spécialement aux grands praticiens, il est resté dans les limites rigoureuses d’un travail de restauration courante et de maison bourgeoise25.
13En 1899, « La cuisine de saison », rubrique de recettes de Salles et Montagné, figure dans chaque numéro de L’Art culinaire. Les deux chefs les réunissent l’année suivante dans La Grande Cuisine, ouvrage pour lequel ils avaient envisagé, semble-t-il, de conserver le titre de leur rubrique bimensuelle26. Prosper Montagné, qui débute dans le métier dans les cuisines de l’Hôtel des Quatre-Saisons à Toulouse, propriété de son père, fait paraître en 1931 Les Délices de la table, ou les Quatre saisons gourmandes, petit traité de cuisine transcendante à l’usage des gens de bon goût et des amateurs du bien manger. Il n’y a pas jusqu’à Édouard Nignon, l’un des chefs les plus huppés de la Belle Époque, pour sacrifier au rythme des saisons. Si L’Heptaméron des gourmets, ouvrage de luxe tiré à seulement 150 exemplaires en 1919, ne porte que sur des menus fastueux ses Éloges de la cuisine française, en 193327, toujours positionnés dans la (très) haute cuisine, font la part belle aux saisons. Une section de cet ouvrage s’intitule « Les quatre saisons du bien manger » où Nignon, grand amateur de littérature, multiplie les énumérations poétiques et enjouées :
Le printemps encadre délicieusement la cuisine ; une aube se lève sur la divine enchanteresse, la dotant d’une foison de fleurs parfumées, de primeurs aux vêtures chatoyantes, aux sucs émouvants, précieux dons de cette glèbe maternelle, qui viennent régénérer l’organisme des hommes déprimés par les rigueurs de l’hiver…
Il est sage, il est agréable et salutaire à la fois de profiter de cette délicieuse saison pour savourer les artichauts de Laon, de Niort, de Provence, les asperges d’Argenteuil, les carottes de Billot, les laitues, les choux-fleurs hâtifs, les navets demi-longs, les pois Sainte-Catherine, les pommes de terre Victor, les épinards, et tant d’autres denrées de premier choix nourries de sucs délectables et qui donneront matière à des mets recherchés, rivalisant entre eux de finesse et d’exquise saveur.
[…] L’Été, c’est la puissance unie à la majesté. La magnificence estivale éclate avec les premiers fruits aux jus délicatement sucrés, à la saveur exquise, source virgilienne où l’homme est heureux de se rafraîchir. La cerise, avec l’incomparable douceur de son épiderme et la finesse de sa liqueur, nous offre un régal du plus haut goût. La pêche, duvetée, veloutée, à la chair tendre et odorante, porte à la rêverie le gourmet qui la déguste [… ]28.
14L’hiver constitue également une saison magnifique à ses yeux et c’est surtout dans les pages qui lui sont consacrées que le lecteur peut se rendre compte que l’ancien chef du tsar et de l’empereur d’Autriche-Hongrie s’adresse en priorité aux mangeurs fortunés des grandes villes bien approvisionnées. Cette partie sur les quatre saisons est immédiatement suivie par « La gastronomie en vingt-quatre épreuves », mise en pratique détaillée des « quatre saisons du bien manger ». Elle représente les deux-tiers du livre ; chaque menu saisonnier, égrené comme s’il s’agissait de souvenirs des années 1870, est précédé de paragraphes détaillant à nouveau les avantages et attraits du moment ; ainsi dans « L’offrande à Pomone » (30 septembre 1876) :
Automne, saison des vendanges heureuses, saison des fruits lourds incurvant jusqu’au sol les branches fortunées, saison des rêveries grisâtres, voilées d’une mélancolie douce, mais infiniment précieuses au cœur épris du calme des campagnes et des spectacles inimitables qu’offre la nature… Ils sont si variés les fruits gonflés de sucs, mûris au soleil automnal, que leur seule énumération serait un travail fastidieux29.
15De surcroît, dans ses deux manuels de recettes conçus pour l’enseignement ménager, Nignon construit un plan strictement chronologique. Dans le Précis de cuisine familiale, publié en 1935, l’ancien chef du restaurant Larue détaille quatre menus par mois, précédés d’un lexique puis d’un « almanach culinaire ». À la lecture de ce dernier on se rend vite compte qu’il n’indique jamais l’usage de produits alimentaires hors saison ou importés ni de conserves, bien qu’il soit explicite que, chaque année, la ménagère doive en faire elle-même en été et en automne : « Août. […] Les tomates sont idéalement bonnes, c’est le moment d’en préparer des conserves pour l’hiver30 ». Voici quels sont les préceptes de Nignon pour le mois de novembre :
Nous allons entrer dans les jours les plus courts : la lumière et le chauffage vont grever le budget, il faut redoubler d’attention et savoir, plus que jamais, équilibrer sagement recettes et dépenses. Nous sommes à la saison des cardons, des endives, des salsifis, de l’oseille, des épinards, des navets, des poireaux. Le poisson, bon et frais, nous arrive en abondance. La viande de boucherie est délicieuse, la basse-cour semble inépuisable. Les œufs, toutefois, deviennent plus rares31.
16Pendant l’entre-deux-guerres la presse quotidienne comme la presse spécialisée, qu’elle soit gastronomique, régionale, féminine ou agricole, regorge de références aux produits alimentaires saisonniers. La publicité des restaurants continue fréquemment à les mettre en avant :
Le restaurant Ramponneau de l’avenue Marceau, en attendant de convier ses clients à de nouveaux déjeuners vinicoles, toujours si suivis, leur recommande sa cuisine saisonnière.
Voici la saison qui nous procure les mets les plus savoureux ; la nature en ce moment dispense, pour le bonheur de nos estomacs, tous les trésors gastronomiques. Poissons, volailles, gibiers, fruits, resplendissent sur nos tables, y composant aussi, pour le plaisir des yeux de magnifiques natures mortes32.
17La chronique féminine du quotidien socialiste Le Populaire, « La militante la femme », parle souvent de « cuisine de saison », comme le 10 novembre 1936 où sont détaillées deux recettes d’automne, le râble de lièvre aux marrons ainsi que la poule au riz. La Gazette du village, hebdomadaire agricole, se dote en janvier 1920 d’une chronique féminine tenue par L. Babet-Charton, inspectrice principale de l’Enseignement ménager agricole. La cuisine y tient une place majeure ; si le titre de la rubrique varie souvent et ne comprend que rarement le mot « saison33 », il en est souvent question dans les introductions d’article. La Revue limousine a, de même, ouvert une chronique culinaire :
Gourmande aussi. Alors vous voilà jalouse de la recette dont le dernier numéro de La Revue limousine a parlé et que votre petite amie a employée avant vous ? Pour vous consoler, voici une autre recette de saison : les beignets de fraises. Ces fruits peuvent servir de thème à un grand nombre de délicieuses variations34.
18Néanmoins La Gazette du village se montre logiquement plus diserte sur les plantes saisonnières, notamment dans les rubriques non féminines du travail dans le potager. En 1920, afin que les agriculteurs disposent toute l’année d’une salade sur leur table, elle passe en revue par saison tous les types de salades en indiquant des périodes de semis et de consommation.
3e automne. Les semis de variété de laitue et de scarole indiqués pour l’été, effectués tardivement, à la fin de juillet, permettent d’en approvisionner la table durant tout l’automne. […] Les choux rouges, semés en mars-avril, donnent leurs produits en automne. […] De même, ceux qui peuvent semer sur couche, en mars et avril, les diverses variétés de tomates et les mettre en pleine terre vers le 15 mai, auront la possibilité d’en récolter les fruits d’août à octobre pour les consommer en salade35.
19Il convient de ne pas sous-estimer le rôle pédagogique, prescripteur et même normatif de ces organes de presse professionnels et associatifs. Par exemple, les publications périodiques des milieux horticoles et maraîchers, qui n’échappent pas à la vogue des thèmes gastronomiques de l’entre-deux-guerres, détaillent à satiété le respect du calendrier pour les plantes alimentaires, y compris les moins répandues :
Aimez-vous le Cerfeuil tubéreux ??!! N’connaissez pas, bien entendu ; alors, tant pis pour vous. […] La racine, d’un intérêt gastronomique supérieur, est renflée. […] On sème en septembre, octobre, novembre, en planches étroites, à la volée. La levée n’a lieu qu’en avril.
[…] Cuisine : Se consomme à partir de fin novembre et pendant tout l’hiver. Les bulbes ont été conservés dans du sable de Saône sec, à l’abri de l’humidité et des rats, jusqu’au moment psychologique. Pour les préparer, on racle un peu la peau qui est très fine comme celle d’une pomme de terre nouvelle, après les avoir ébouillantés, si l’on veut on fait cuire une vingtaine de minutes, à l’eau salée, on égoutte convenablement et on fait sauter au beurre. Sel, poivre ad libitum. Ou bien on les fait cuire à l’étouffée au beurre comme les pommes de terre nouvelles, […].
Chair douce, jaune clair, extrêmement fine et homogène, farineuse et légèrement sucrée, rappelant un peu par sa consistance et son goût, celle de la châtaigne d’Auvergne cuite à l’eau, avec cela très nourrissante et substantielle, beaucoup plus que la pomme de terre ou n’importe quel autre légume féculent. […] C’est par excellence, le légume des amateurs de jardins potagers, qui cumulent cette douce passion avec celle de la bonne chère. C’est pour eux que nous avons écrit ce petit article36.
20D’autres organismes ou associations n’ayant à première vue que peu à voir avec l’agriculture ou la cuisine peuvent occasionnellement contribuer à la défense de la saisonnalité alimentaire. C’est le cas sous l’Occupation de la revue cynophile et cynégétique L’Éleveur qui annonce et commente les publications sur la cuisine en temps de pénurie37. Quelques mois après l’important succès de Cuisine et restrictions, le docteur Édouard de Pomiane, chercheur à l’Institut Pasteur et ancien animateur de Radio Cuisine fait paraître un supplément comprenant des « recettes printanières » car, selon le commentaire promotionnel, « un livre sur la cuisine et les restrictions doit continuellement se modifier afin de s’adapter aux variations de l’alimentation38 ». Pomiane semble avoir eu l’intention de publier des fascicules sur les autres saisons.
Quelle émancipation par rapport aux saisons ? (de 1945 à nos jours)
21Les nouveaux modes de production alimentaire, la diversification des approvisionnements facilitée par les spectaculaires progrès des transports, la poursuite constante de l’urbanisation ainsi que le bouleversement des modes de distribution commerciale influent de plus en plus sur le rapport des sociétés occidentales avec les saisons et plus généralement la nature. La modernisation de l’équipement des cuisines des foyers français, malgré le développement des salons d’art ménager, est relativement lente au cours de l’entre-deux-guerres, mais son rythme s’accélère nettement pendant les Trente Glorieuses. À partir des années soixante, supermarchés et hypermarchés maillent bientôt tout le territoire national, tandis que la constitution du Marché commun européen favorise le développement des cultures sous serres. Les mutations du mode de vie et des habitudes alimentaires sont telles que de nombreuses personnes au cours des années quatre-vingt-dix s’avouent surprises d’apprendre que naguère les tomates ne se consommaient pas en hiver en raison de la quasi-absence de production.
22La confusion sur les expressions « recette de saison » et « cuisine de saison », que nous avons déjà croisée auparavant, ne fait que s’amplifier. Ainsi le trente-sixième fascicule de la populaire collection des Carnets de cuisine dirigée par Miriam Cendrars chez Hachette en 1978 laisse songeur : « Congélation. 1 : Cuisine de saison pour toute l’année : 67 recettes pas à pas, par Germaine Cosiva ». Les revues horticoles elles-mêmes participent parfois à cette tendance. En plein printemps, période peu réputée pour la cueillette des champignons, le Bulletin de la Société centrale d’horticulture de Nancy d’avril 1969 donne une « recette de saison » de « Cèpes à la limousine » ; d’ailleurs l’auteur de cette recette ne semble pas tenir particulièrement à l’utilisation de cèpes fraîchement cueillis :
[…] Si l’on utilise des cèpes séchés, les laisser plusieurs heures dans l’eau tiède puis les rincer à plusieurs eaux avant de les utiliser. Si l’on utilise des cèpes en conserve, faire revenir d’abord les échalotes à feu doux pendant 10 minutes, puis ajouter les cèpes bien égouttés et laisser mijoter 7 à 8 minutes.
23Cependant, les productions hors saison, comme celle des tomates sous serres en Hollande sont vite montrées du doigt39, et l’expression d’une nostalgie du temps des saisons alimentaires pointe très tôt ; elle annonce déjà le discours contemporain sur la nécessité de la saisonnalité :
Ces produits frais arrivaient en leur temps, c’était déjà la cuisine de saison à laquelle on revient après les excès d’usage de fruits ou de légumes cultivés en serre ou importés de très loin, produits sans saveur et artificiellement mûris40.
24Au plus fort des modes alimentaires « désaisonnalisées » il existe maintes publications culinaires, dont force rééditions, ressemblant en tout point à celles des décennies précédentes, fidèles par conséquent au rythme naturel. En 1971, la collection « Mille menus. La cuisine des quatre saisons » de l’hebdomadaire Femmes d’aujourd’hui égrène mois après mois, sur 96 pages, des recettes qui suivent le calendrier des productions « naturelles » : « Cuisine de printemps, mars/Cuisine de printemps, avril/Cuisine de printemps, mai/Cuisine d’été, juin/etc. » De la même façon l’éditeur France Loisirs publie une série : « Les Saveurs des saisons » ; celles d’automne, qui mettent en avant des recettes de Catherine Leclère-Ferrière, paraissent en 1997, et deux ans plus tard l’écrivain gastronomique Bénédict Beaugé présente son Gourmand des quatre saisons.
25La progression depuis une quinzaine d’années d’un discours sur le respect de la saisonnalité crée une configuration inédite. Alignement sur les saisons et désir d’émancipation par rapport à leurs contraintes sont allés de pair depuis au moins la fin du Moyen Âge, le second se révélant de plus en plus réalisable avec l’amélioration des techniques de culture abritée et de conservation ainsi que la multiplication des possibilités d’approvisionnement lointain. Ce qui différencie le plus nettement le discours actuel du lien séculaire aux produits alimentaires de saison se situe dans la relation étroite qu’il établit avec le développement durable : manger local selon les saisons réduit considérablement le coût de transport et peut aussi par conséquent contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique planétaire. Le magazine 180°, dans sa Déclaration de l’hédoniste libre-mangeur résume assez bien cet enjeu, en dépit de la grandiloquence propre à la longue tradition française, depuis au moins La Physiologie du goût de Brillat-Savarin, d’aphorismes et de maximes gastronomiques : « Article 3 : La cuisine de saison est l’expression même du bon sens, cuisiner des produits hors saison est une des formes aiguës du dérèglement consumériste dont l’alimentation doit être épargnée ».
26Au-delà de cette causalité, aisément identifiable, n’en existe-t-il pas une autre plus profonde ? L’analyse de la question de la saisonnalité des produits alimentaires doit sans nul doute être reliée à celle de l’évolution des rituels alimentaires inscrits dans une temporalité. L’individualisme caractérisant de plus en plus les sociétés occidentales, nombre de nos contemporains ne seraient-ils pas à la recherche de sens collectif41 ? Le développement de nouvelles solidarités locales et la prise de conscience d’une trop forte distanciation par rapport à la nature42 répondraient alors aux préoccupations engendrées par la mondialisation économique contemporaine, la « fin des paysans » et le réchauffement planétaire. Or la civilisation agraire et le rythme des saisons ont structuré les sociétés occidentales43 sur une très longue durée44. Prenons l’exemple de la scansion du temps par les nombreuses fêtes rituelles des mois d’hiver, quand la lumière diminue en intensité comme en durée, lorsque le froid règne et qu’il existe une interrogation sur la prochaine récolte agricole45. De la Saint-Nicolas à Pâques, en passant par la Sainte-Lucie ou l’Épiphanie ou la Chandeleur, les fêtes chrétiennes – pour ne citer qu’elles, mais les rituels de la Grèce et de la Rome antiques46 ou de la religion juive qui les ont précédées et en partie inspirées, disposent de symboliques comparables – mettent presque toutes en scène la lumière et lui associent des nourritures, tels les Lussekatter suédois de la Sainte-Lucie, les crêpes de la Chandeleur ou les pains d’épices de la Saint-Nicolas et autrefois de Pâques :
Outre le pain d’épices présenté sous les formes les plus diverses, […] la foire de Pâques a un grand attrait pour les Parisiens, tant pour les plaisirs variés qu’elle leur offre, que pour les espérances qu’elle leur donne, car elle annonce à des gens d’autant plus fatigués de l’hiver qu’ils sont avides d’air et de lumière, le retour de la belle saison. C’est en quelque sorte la première du printemps, et cette considération seule suffirait à expliquer son succès47.
27Or, depuis quelques années des « Fêtes de la lumière » ont surgi en Europe. Les édiles locaux ont vite converti en attractions touristiques ces manifestations qui se déroulent en décembre ou à la fin novembre. Néanmoins la place centrale accordée à la lumière et parfois à des repas collectifs autour de nourritures (les cardons à Lyon) ou/et de boissons ne peut que nous faire penser aux fêtes d’hiver plus anciennes, d’autant qu’à Lyon la « Fête des lumières » reprend un rituel d’illuminations en l’honneur de la Vierge Marie datant de 185448. Au Danemark le rituel, relativement ancien, du hygge, s’est ravivé depuis deux décennies. Il s’agit d’un style de vie auquel on peut s’adonner toute l’année mais qui culmine l’hiver ; quand la lumière se fait plus rare on organise, souvent en famille ou avec des amis, une « célébration » de l’instant présent, autour de bougies ou d’un feu de cheminée, dans une ambiance confortable. La consommation de boissons chaudes et de pâtisseries, comme le kringle, est très fréquente ; prendre le temps de faire ensemble la cuisine peut d’ailleurs constituer le cœur d’une soirée hygge. Sa médiatisation a été telle que, depuis quelques années, la mode du hygge se diffuse dans tout le continent, au-delà d’ailleurs de ce qu’il est convenu d’appeler l’Europe septentrionale. En Serbie le hygge a pu être comparé au slava, repas festif sous la protection d’un saint patron familial (Saint Nicolas, Michel ou Jean) qui, renaissant depuis l’éclatement de la Yougoslavie, peut revêtir, lui, une signification nationaliste49. La France a été touchée assez tardivement par cette vogue, mais articles et reportages se sont dernièrement multipliés dans les médias et une bonne dizaine d’ouvrages sur le hygge, la plupart simples traductions de livres en danois ou en anglais, sont parus en 2016 et 201750.
28Le réchauffement climatique de la terre oblige à repenser l’approvisionnement alimentaire, mais il est difficile de deviner aujourd’hui quelle voie sera prioritairement empruntée en raison de l’ampleur des enjeux économiques ou géopolitiques51, et de la profusion de paradoxes dans l’équation à résoudre52. Par exemple, si l’on ne cultivait plus que pour une consommation locale, l’éventail des produits disponibles se replierait, ce qui irait à l’encontre de l’évolution globale de tous les siècles précédents ; de surcroît, le « libre-mangeur », dont l’avènement est souhaité par des courants gastronomiques à la mode, amputerait sa liberté. Comment concevoir que l’être humain se prive désormais de toute innovation scientifique et technique et abolisse son imaginaire ainsi que ses aspirations millénaires à l’abondance et à la diversification de sa nourriture ? Peut-il néanmoins tourner définitivement le dos à la nature ? Retracer l’histoire de la saisonnalité des pratiques alimentaires paraît une tâche indispensable afin de mieux appréhender ces interrogations fondamentales.
Notes de bas de page
1 Ferré L., L’âge d’or, 1959. Belleret R., Léo Ferré. Une vie d’artiste, Arles, Actes Sud, p. 398.
2 Référence aux fables qu’il écrivit pour l’éducation du jeune duc de Bourgogne, petit-fil de Louis XIV : Voyage dans l’île des plaisirs. Fables et histoires édifiantes, rééd. Gallimard coll. « Folio Sagesses », 2015.
3 Le Gastronome, 26 décembre 1830.
4 Chasingaud V., L’homme et la nature. Une histoire mouvementée, Paris, Delachaux et Niestlé, 1993.
5 Segalen M., Rites et rituels contemporains, Paris, Nathan, 1998. Francfort D., « Tradition », in Deporte C., Mollier J.-Y., Sirinelli J.-F. (dir.), Dictionnaire d’histoire culturelle de la France contemporaine, Paris, PUF, 2010, p. 801-805.
6 Ferguson P.-P., Accounting for Taste. The Triumph of French Cuisine, Chicago/London, The University of Chicago Press, 2004. Ory P., Le discours gastronomique français des origines jusqu’à nos jours, Paris, Gallimard/Julliard, coll. « Archives », 1998.
7 Cf. par exemple Hyman M. et P., « Imprimer la cuisine : les livres de cuisine en France entre le XVIe et le XIXe siècle », in Flandrin J.-L., Montanari M. (dir.), Histoire de l’alimentation, Paris, Fayard, 1996, p. 643-656.
8 Les soupers de la Cour, ou L’art de travailler toutes sortes d’aliments, pour servir les meilleures tables, suivant les quatre saisons, Paris, Guillyn, 1755. La Cuisinière bourgeoise, […] La façon de faire des Menus pour les quatre Saisons, & des ragoûts des plus nouveaux […], Neuchâtel, Fauche, 1785.
9 Almanach des gourmands ou Calendrier nutritif servant de guide dans les moyens de faire excellente chère, Paris, Chez Maradan libraire, 1re année, 1803, p. 9-10.
10 Almanach des gourmands, 3e année, 1805, rééd. Chartres, Menu Fretin, 2012, p. 313.
11 Almanach des gourmands, servant de guide dans les moyens de faire excellente chère, Paris, Chez Chaumerot libraire, 1810, p. 163.
12 Almanach des gourmands, 3e année, 1805, rééd. 2012, op. cit., p. 314.
13 Bruegel M., « Du temps annuel au temps quotidien : la conserve appertisée à la conquête du marché, 1810-1920 », in Revue d’histoire moderne et contemporaine, 1997/1, no 44-1, p. 40-67.
14 Capatti A., Le goût du nouveau. Origines de la modernité alimentaire, Paris, Albin Michel/Seuil, 1989, p. 111-134. Claflin K.W., « Les Halles and the Moral Market. Frigophobia Strikes in the Belly of Paris », Oxford Symposium on Food and Cookery 2007, « Food & Morality », Totnes, Prospect Books, 2008, p. 82-92.
15 Par exemple son menu du 12 janvier comprend de la purée d’oseille et des abricots. Ces derniers, qui servent ici à fourrer un gâteau, pourraient être de conserve comme plus haut les fraises en gelée, explicitement indiquées, elles, comme telles. Le Maître d’hôtel français, Traité des menus…, t. 1, Paris, Rue Thérèse, 1842, p. 102.
16 Ferguson P.-P., 2004, op. cit., p. 49-82.
17 Le Mangeur du xixe siècle, Paris, R. Laffont, 1973, p. 149-150. En revanche, comme l’a souligné Martin Bruegel, Aron surestime l’ampleur de la diffusion des conserves.
18 Le Gastronome, 4 avril 1830.
19 « Correspondance », ibid., 13 mai 1830.
20 H.C., « Courrier de la Halle », L’Industrie : journal littéraire, agricole et commercial (Bordeaux), 28 août 1858.
21 Par exemple, de la chicorée dans le menu du 1er décembre 1865.
22 « Juin », La Salle à manger, 1er juin 1865.
23 « L’hiver aux Halles de Paris », L’Art culinaire, 1893, p. 1-2.
24 La Belgique gourmande, supplément à L’Art culinaire, 1899, p. XXIV-XXV.
25 Page publicitaire parue dans Les Cahiers de la République des lettres, des sciences et des arts, Noël 1927.
26 L’Art culinaire, 1900, p. 229-230.
27 Prix Montyon de l’Académie française en 1934.
28 Nignon E., Éloges de la cuisine française, Paris, Piazza, 1933 ; rééd. Chartres, Menu Fretin, 2014, p. 165-170.
29 Ibidem, p. 419.
30 Nignon E., Précis de cuisine familiale, p. 54. Les chroniques culinaires dans la presse classent, elles aussi, la fabrication des conserves dans les « recettes de saison ». Cf. par exemple : « Prunes à l’eau-de-vie. Ce sont des reines-Claude qui se recommandent pour cette préparation. Il faut de belles prunes, pas très mûres, cueillies avant le soleil levé. […] (Comment faire ses conserves, Pellaprat) », « Les délices de la table. recettes de saison », Le Figaro, 18 août 1939.
31 Ibidem, p. 55.
32 La Semaine à Paris, 19 octobre 1928.
33 « Cuisine de saison. Le Potiron », La Gazette du village, 12 décembre 1920.
34 « Le Courrier de Limousinette », La Revue limousine, 15 août 1926.
35 Félix J., « Culture potagère. Pour ne pas manquer de salade en toute saison », La Gazette du village, 8 février 1920.
36 Société d’horticulture et de viticulture de la Côte-d’Or, janvier 1923, p. 132-136.
37 Notamment dans le no du 16 mars 1941. Sur le discours gastronomique produit dans le contexte du rationnement sous l’Occupation : cf. l’article pionnier de Gordon B. M., « Fascism, the neo-right and gastronomy. A case in the theory of the social engineering of taste », in Oxford symposium on food and cookery 1987, « Taste », London, Prospect Books, 1988, p. 82-97.
38 L’Éleveur, 13 avril 1941.
39 Par exemple par le critique gastronomique James de Coquet, Le Figaro littéraire, 1er octobre 1964, p. 23.
40 Pelletier A. (dir.), Grande encyclopédie de Lyon et des communes du Rhône, t. II, Roanne, Horvath, 1980, p. 408.
41 Cf. par exemple Viard. J., Lettre aux paysans et aux autres sur un monde durable, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, 2010. Il va de soi que toute la pensée socio-politique contemporaine n’oppose pas l’individualisme au souci des autres et à la responsabilité collective. Néanmoins les prises de position critiques face à la montée de l’individualisme (l’expression « individualisme matérialiste » est fréquente dans ce type de discours), sont tellement répandues, et pas seulement dans les milieux conservateurs voire réactionnaires, qu’il est difficile de considérer qu’elles n’ont aucune traduction sociale.
42 Chasingaud V., Les Français et la nature : pourquoi si peu d’amour ?, Arles, Actes Sud, 2017.
43 Le cinéma a souvent montré cette structuration cf. Farrebique et Biquefarre (Georges Rouquier, 1946 et 1983) ou encore L’Arbre aux sabots (Ermanno Olmi, 1978), où figurent la culture de légumes d’avant-saison et l’abattage traditionnel, à la fin de l’année, du cochon de la ferme.
44 Ferrières M., Histoire des peurs alimentaires. Du Moyen Âge à l’aube du xxe siècle, Paris, Le Seuil, 2002, ici le chap. 12, « Le danger des métaux imparfaits » ; Grieco A.J., Classes sociales, nourriture et imaginaire alimentaire en Italie : xive-xve siècles, Thèse de 3e cycle, Paris, EHESS, 1987 ; Laurioux B., Le règne de Taillevent. Livres et pratiques culinaires à la fin du Moyen Âge, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2019 ; Lebrun F., « Le calendrier agroliturgique dans la société traditionnelle de la France de l’Ouest (xviie-xviiie siècles) », in Lebrun F., Seguin N. (dir.), Sociétés villageoises et rapports villes-campagnes au Québec et dans la France de l’Ouest. xviie-xviiie siècles, Québec/Rennes, Trois Rivières, 1987, p. 347-351 ; Scully T., « Les saisons alimentaires du Ménagier de Paris », in Lambert C. (dir.), Du manuscrit à la table. Essais sur la cuisine au Moyen Âge…, Paris/Montréal, 1992, p. 205-213 ; Vigneron F., Les saisons dans la poésie française des xive et xve siècle, Paris, Champion, 2002, p. 83 sq.
45 La Soudière de M., L’hiver. À la recherche d’une morte-saison, Lyon, La Manufacture, 1987.
46 Les Saturnales, fêtes romaines durant la semaine précédant le solstice d’hiver, célèbrent le dieu des semailles.
47 « La foire aux pains d’épices », La Revue pour tous, 1er avril 1896.
48 Caviglia J., Histoire du 8 décembre. Des origines à la séparation de l’Église et de l’État, Lyon, Éditions de La Taillanderie, 2004.
49 Garcevic S., « Slava : Hygge, Serbian-Style », en ligne http://www.balkaninsight.com/en/blog/slava-hygge-serbian-style-11-19-2016
50 Par exemple Wiking M., Le livre du hygge. Mieux vivre la méthode danoise, Paris, First, 2016. Thomsen Brits L., Hygge : l’art du bonheur à la danoise, Paris, R. Laffont, 2016. Rost S., Boissons chaudes au coin du feu : inspiration Hygge, Paris, Larousse, 2017. Mac Guinness M., Le cahier hygge pour les nuls, Paris, First, 2017.
51 Lang T., Heasman M., Food Wars. The Global Battle for Mouths, Minds and Markets, London, Earthscan, 2004.
52 La science peut également venir bouleverser les données de cette problématique. Ainsi le projet californien que l’on a pris l’habitude de dénommer Food 2.0 n’ambitionne-t-il rien de moins que de complètement modifier l’alimentation mondiale ; Bradshaw T., « Food 2.0 : the future of what we eat », Financial Times Magazine, 31 octobre 2014, en ligne https://0-www-ft-com.catalogue.libraries.london.ac.uk/content/bfa6fca0-5fbb-11e4-8c27-00144feabdc0
Auteur
CHCSC, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (Université Paris-Saclay).
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