Construire sa frontière
La frontière performative de la fête : Lille et la frontière belge
p. 327-343
Texte intégral
1Note portant sur l’auteur1
2La frontière entre Lille et la Belgique est considérée comme très ouverte, pourtant elle se perpétue. Son étude répond à un double objectif : tout d’abord, la mise en valeur d’un système frontalier fonctionnant ici spécifiquement dans le champs des loisirs et de la consommation. Cela permet ensuite de proposer un outil d’analyse des identités territorialisées qui se construisent autour de la frontière. À travers les évolutions historiquement et donc idéologiquement datées des pratiques de la frontière, on voit en effet le besoin permanent d’introduire une rupture, une discontinuité instrumentée au service de la construction des identités des individus qui s’inscrivent ainsi dans des groupes mais aussi des identités des groupes eux-mêmes qui pour être attracteurs doivent se présenter comme entités socio-spatiales précises et donc délimitées.
1 - TROIS TYPES DE FRONTIÈRES
3Depuis trente ans, l’ouverture progressive de la frontière franco-belge se traduit paradoxalement par une diminution des échanges transfrontaliers (Vandermotten, 98). Les sorties populaires de fin de semaine deviennent la principale modalité de transgression de cette frontière et ainsi l’entretiennent. Ce faisant, on évolue d’une frontière linéaire à une région frontalière puis à une abstraction de la frontière : seule compte l’idée qu’elle existe. On peut retenir trois modalités principales2 de construction de la frontière selon les pratiques qui la sous-tendent : se dessine ainsi une spécialisation des sorties qui correspond à trois époques, trois états de la frontière3 :
- la frontière exotique : on va voir comment est l’Autre. La fluidité réelle des passages n’est pas complètement assimilée ; une éducation profondément intériorisée de frontière-barrière sépare deux nations aux cultures caractérisées.
- la frontière contractuelle : exploitation des différences de taxation ou de législation entre chacun des deux espaces, elle correspond à l’espace de compétition économique de l’Europe des années 1980. Frontière d’usage plus qu’identitaire, la recherche d’un dénominateur commun amène à refuser les clichés différencialistes dans l’affirmation d’un modèle international.
- la frontière identitaire : imaginée, patrimoniale, donc en construction permanente, c’est la frontière assumée comme élément constitutif de soi. Elle permet de se définir vis-à-vis de l’extérieur tout autant que de l’intérieur : les entités locales reprennent un discours sur l’individuation auparavant limité aux minorités. C’est l’Europe nouvelle des territoires qui se met en place : sans s’embarrasser des anciennes lignes de délimitation, très atténuées, la frontière redessine des partages de l’espace à une échelle régionale. On y reconstruit des différences circonscrites dans la sphère du culturel, de l’intangible, des représentations. La matérialité de la frontière devient secondaire ; elle est conséquence, produit, mais surtout pas causalité. Mais bien qu’hyper-réelle, elle n’en garde pas moins une existence : il n’est plus nécessaire d’avoir une contiguité spatiale pour créer une frontière.
LA FRONTIÈRE NATIONALE, FRONTIÈRE EXOTIQUE
4Passer la frontière, c’est d’abord un exotisme : on y recherche quelques clichés sur l’Autre, le voisin, l’étranger proche (Karnoouh) ; assez proche pour ne pas effrayer, assez différent pour permettre de mieux comprendre sa propre spécificité et lui donner un contenu symbolique, une représentation. C’est l’origine de l’installation partout dans le monde d’un espace touristique particulier dans les quelques premières centaines de mètres après la frontière. On le retrouve ici dès qu’on aborde la Belgique, particulièrement à Ménin (figures 2 et 3). Cette spécialisation frontalière donne un paysage très spécifique avec un contraste marqué entre la France et la Belgique qui matérialise mieux la frontière que les panneaux officiels : en quelques mètres, on passe d’une rareté, voire même souvent d’une absence de boutiques en France à une forte densité en Belgique.
5Cette activité commerciale à vocation touristique attire une clientèle importante mais très ciblée dans sa définition sociale (plutôt populaire et familiale, assez âgée), géographique (assez peu mobile) et temporelle (dans la journée, en fin de semaine). Cela se traduit par une organisation spatiale concentrée qui permet les déplacements à pied et une offre centrée sur des clichés traditionnellement attachés à la Belgique (tableau 1).
6Même si dans l’ensemble les dépenses des visiteurs restent limitées, son caractère consumériste explique une imbrication variable des activités locales : faible lorsque le poids du tourisme est important (surtout au Nord-Ouest, dans les Flandres), plus marquée au Nord-Est (Mouscron, figure 4), et lorsqu’on s’éloigne de la frontière (dès 200 à 300 mètres). À l’Est, ce type de structuration frontalière est marginal et en recul. Les restaurants dispersés dans la campagne wallone (figure 4) fonctionnent de même : ils attirent une population âgée mais plus aisée, plus mobile et plus masculine (lien avec les établissements à caractère sexuel).
LA FRONTIÈRE CONTRACTUELLE
7Malgré son essor récent au Nord-Ouest de l’agglomération, on trouve surtout cette structuration à l’Est, le long de la nationale 50, partiellement transformée en voie rapide, qui relie Tournai à Courtrai (figure 4) en longeant la frontière à une dizaine de kilomètres de la France. Cette “autoroute de la nuit” suscite une exceptionnelle concentration de discothèques construites pour la plupart selon un modèle unique : un cube de béton et de tôle entouré d’un vaste parking au milieu des champs. À l’intérieur, plusieurs salles et bars offrent des activités variées : la Bush à Esquelmes propose ainsi cinq salles et huit bars sur 3000 m2 susceptibles d’accueillir 5 000 personnes dans une nuit qui se termine à midi ! C’est vraiment l’industrialisation de la fête mais aussi l’ouverture vers l’espace-monde à travers la standarisation de la musique, de la décoration et de l’animation (gogo dancers, drag queens).
8Ces discothèques sont installées en Belgique car les conditions fiscales et légales (autorisation d’ouverture) n’y distinguent pas les établissements où l’on danse et les bars, alors qu’en France les premiers sont lourdement taxés. On a donc une apparente structuration à finalité économique. Mais on ne doit cependant pas l’exagérer : les établissements français se sont adaptés aussi leur nombre reste stable.
9On s’adresse aux jeunes français : lors de l’enquête, un comptage sur le parking de La mare aux diables (Templeuve) permit de dénombrer 78 immatriculations françaises contre une belge ! Le public reste populaire malgré les prétentions de quelques établissements. Du fait des distances, il s’agit nécessairement d’une clientèle motorisée. Aucun de ces établissements ne semble spécialisé dans la clientèle homosexuelle ; ceux-ci sont concentrés à Lille ou vers Peruwelz, à l’Est de Tournai.
10La plupart des discothèques n’ouvrent qu’en fin de semaine. L’affluence est maximale de 2 à 5 heures du matin. Certains se sont même spécialisés dans ce qu’on appelle les after hours (ouverture vers 7-8 heures du matin quand les autres ferment). Le contraste en matière de paysage se fait donc selon une logique chronologique : de jour et en semaine, le paysage est celui d’une riante campagne du Nord, alors que pendant les nuits du week-end il est jalonné de néons. Ces horaires révèlent une fête conçue dans un circuit qui joue des compléments de temporalité de part et d’autre de la frontière : elle commence en ville, à Lille, dans les bars que nous évoquerons ensuite. Elle se poursuit ici dans une première discothèque après la fermeture des bars français (2 heures). Dans la journée du dimanche, on termine enfin dans un after, toujours en Belgique. Ce type de parcours, très long (12 à 36 heures) et physiquement éprouvant s’accompagne souvent d’une consommation de psychotropes.
11Cette frontière se segmente en trois secteurs spécialisés : le Sud, en Wallonie, de Tournai jusqu’à Dottignies et les routes N 510 et N 512, concentre les discothèques techno qui visent une clientèle française, jeune et populaire. Plus au Nord, en Flandres, de Dottignies à Courtrai, les usines à danser techno sont remplacées par des clubs, petites discothèques classiques destinées à un public adulte et argenté. Ces établissements proposent les services de prostituées ou l’échangisme. Ce segment spécifique du marché du sexe est assez développé dans une large frange frontalière (une trentaine d’établissements sur une trentaine de kilomètres de profondeur) et s’adresse à la clientèle française par une abondante publicité dans les journaux gratuits de l’agglomération lilloise.
12À une dizaine de kilomètres de Courtrai, des bars à bière et des établissements de restauration rapide remplacent les discothèques. Ils proposent de la musique rock à une clientèle de jeunes flamands venus de l’université catholique, toute proche. Bien que la France soit toujours aussi proche (une dizaine de kilomètres), il s’agit d’une périphérie de Courtrai pas d’une zone de sorties transfrontalières. Les français pratiquent ces établissements à Lille.
L’INVENTION D’UN NOUVEAU QUARTIER FESTIF : LES HALLES
13Le quartier des Halles-Masséna prolongé, plus diffus, jusqu’à Wazemmes est dense (figure 5) : la nuit, sur environ 400 mètres, on y dénombre 36 bars, la plupart importants. À la fin des années 1980, seuls existaient quelques bars rue Solférino ; la rue Masséna n’en comprenait qu’un seul ouvert après 20 heure contre 17 aujourd’hui. Les élus lillois décidèrent alors de développer un espace festif nouveau : relativement proche du centre, ce quartier situé à proximité de l’université catholique ne souffrait pas des handicaps fonctionnels propres au Vieux Lille. Le petit commerce régressait vite devant les grandes surfaces. On voulait ainsi revitaliser le quartier tout en limitant les passages en Belgique des jeunes lillois.
14La coopération de l’État a permis d’assouplir, comme à proximité de la plupart des frontières, l’interdiction de danser dans les bars, toujours bien respectée dans le reste du pays : ici on danse dans un quart des bars. Par dérision, l’affiche du texte de la loi de 1885 (obligatoire dans le département du Nord) est parfois placée à l’entrée de la salle de danse... De même, la précarité voire l’absence de déclaration des employés sont mollement surveillés et nuancent le développement économique attendu du tourisme et des loisirs...
15Le quartier a un rythme de développement rapide : jusqu’à une douzaine d’ouvertures de bars et établissements de restauration rapide par an. Les pas de-porte vacants sont presque tous transformés en établissements de nuit. Cela génère des problèmes résidentiels (bruit, stationnement) et la grogne des propriétaires dont les appartements sont plus difficiles à vendre ou à louer. De plus, outre l’attraction d’une importante population étudiante résidente, ces bars ont structuré une offre commerciale complète liée à la fête : une douzaine d’établissements de restauration rapide, autant de restaurants, la plupart des magasins lillois de location de matériel de sonorisation (pourtant ouverts seulement le jour !), un salon de coiffure ouvert en nocturne et l’unique magasin de vêtement de la rue Masséna s’est même reconverti dans les dessous coquins... L’extension vers le Sud s’accompagne d’une spécialisation dans les restaurants, surtout chinois. Le paysage nocturne illuminé d’enseignes aux couleurs vives donne aux rues Solférino et Gambetta une allure exotique.
16La réussite est totale, même dans les représentations : la Schouwburg Plein à Courtrai, en recul aujourd’hui, fut pendant longtemps la rue de la Soif. Aujourd’hui, jusqu’au bassin minier et Arras, ce qualificatif est appliqué à la rue Masséna. La mise en spectacle de ces représentations est l’objectif de la Municipalité de Lille.
LILLE, “VILLE FESTIVE” POUR CRÉER UNE FRONTIÈRE IDENTITAIRE VIRTUELLE
17La politique touristique de Lille vise à faire de la ville “une belle destination de Tourisme Urbain”4 en mettant en spectacle une différence afin de recréer une frontière aux yeux d’une clientèle européenne potentielle importante à qui on veut vendre un nouvel exotisme très artificiel. Cette politique destinée à changer radicalement5 une image peu flatteuse s’appuie sur un certain nombre d’éléments : équipements, politiques d’organisation, de promotion, etc. cette dernière est destinée à renforcer le rayonnement (c’est-à-dire à “l’image à vendre”6) de la ville et sa région, entre autres en renforçant l’identité locale. On insiste sur le rôle fédérateur du tourisme, mais aussi des sorties, pour adopter une démarche globalisante et penser l’urbain autrement qu’en termes économiques. Ce concept de “ville festive” (Burgel) développé dans la plupart des métropoles contemporaines veut renforcer l’identité pour induire un développement du tourisme urbain. Ici, on utilise la bière comme image de marque. “Les touristes attendent qu’on leur parle de bière comme atout touristique. Tout comme les régions viticoles parlent de leurs vins. Finie la mauvaise image liée à une consommation excessive”.
18Complément à un tourisme plus classique (affaire, culturel...), cette offre de fêtes et sorties est surtout motivée par le désir d’attirer une clientèle nouvelle : européenne, jeune et plus populaire en jouant sur le différentiel de prix, bien connu des britanniques, parisiens, allemands et néerlandais. Les marchés prioritaires sont clairement définis :
- Marché anglais (Londres, Kent)
- Marché belge (Bruxelles, Anvers)
- Marché français (Ile-de-France, et la moitié Nord-est du pays jusqu’au bassin lyonnais)
- Marché allemand (Cologne et la Ruhr)
19En jouant sur une différence d’image, Lille se positionne ainsi par rapport à un espace accessible directement en moins de trois heures de train à grande vitesse, soit 300 à 700 kilomètres. La frontière n’est plus politique mais identitaire. Sa promotion comme idéologie territoriale ne nécessite plus un bornage précis le long d’une ligne qui la figurerait. Le hiatus spatial introduit par le trajet sans halte intermédiaire en tient lieu.
20Que devient la frontière avec la Belgique proche ? le renforcement du rôle de Lille comme métropole régionale en Nord-Pas de Calais est bien envisagé en collaborant avec Tournai mais en général on ignore la Belgique. En favorisant “la diversification des lieux de vie nocturne : lieux chics, péniches, bars jazz, bars ‘jeunes’... ”, les édiles visent à réduire les relations transfrontalières avec la Belgique proche. En effet, “intégrer la spécificité de la vie nocturne lilloise dans l’offre touristique” suppose l’existence de pratiques locales assez importantes, sous peine d’apparaître artificielle :
« L’exploitation de cette filière [la vie nocturne] n’existerait pas sans une évolution de la Ville elle même. La vie nocturne est une nouvelle réalité lilloise, pas forcément facile à maîtriser. Elle peut être un produit fabuleux pour les touristes, avides de flâneries nocturnes, d’ambiances originales et de convivialité (estaminets, Folies de Paris, caves, bars à thèmes,...). Elle existe dans le Vieux Lille, à Wazemmes, dans le quartier des Halles ».
21Il apparaît donc difficile d’imaginer le quartier des Halles comme construit par les seules pratiques des populations locales. Les politiques de promotion de la ville par les édiles jouent un rôle essentiel. En retour, le succès de ces dernières dépend totalement de leur adoption et leur mise en pratique par les populations.
2 - QU’EST-CE QU’UNE FRONTIÈRE ?
22L’étude de ces éléments conduit à distinguer trois niveaux d’analyse : tout d’abord, la spécificité de la frontière lilloise, ensuite une réflexion sur l’évolution de la construction de la frontière et enfin une approche plus générale pour s’intéresser aux modalités de structuration de l’espace.
LA FRONTIÈRE ENTRE LILLE ET LA BELGIQUE
23Indiscutablement, bien que réputée en voie de disparition, cette frontière se perpétue et fait évoluer la définition juridique et géométrique à laquelle on la limite : la frontière est d’abord expression d’une différence, en général héritée et imposée, mais assumée et cultivée ici.
24Plus que jamais, elle reste le fond de commerce des commerçants qui en vivent. Frontière nécessaire aussi pour la population, la foule des noceurs et fêtards à qui elle fournit un cadre identitaire et une touche exceptionnelle à des activités qu’on retrouve pourtant identiques chez soi. Mais derrière le terme univoque de frontière se cachent en fait des frontières. Elles répondent à des définitions variées qui tiennent autant et souvent plus à leur image qu’à des réalités légales plus objectives.
25On passe ici de la ligne-frontière à la zone-frontière, ce qui n’empêche pas cette dernière d’être limitée. La réalité nationale se fait moins prégnante. S’y substitue la logique régionale en Belgique ou locale à Lille, mais avec une frontière ouverte : on met toujours en avant l’accueil et l’accessibilité autant que la différence avec l’extérieur. Paradoxalement, les sorties révèlent ainsi que la mobilité accrue des populations ne signifie nullement un brassage plus important, une dilution dans une aire plus vaste ; au contraire, elle semble susciter un repli sur l’entre soi : si, dans un même contexte, d’autres études amènent à douter de l’apparition d’une culture mixte transfrontalière (Dorrenbacher et Bricher, 2000), on se gardera d’affirmer que “l’intégration économique rétracte les champs des communautés politiques” (Cohen, 97) : on voit bien que les communautés politiques sont parfaitement capables d’instrumentaliser les représentations afin d’articuler local et global (Santos, 97).
26Enfin, la frontière devient système de frontières en évolution permanente ; la frontière politique n’est que l’une d’elles ; elle ne partage pas les mêmes espaces ni les mêmes temporalités. Césure interne à l’agglomération lilloise avec une périodicité de franchissement régulière et fréquente, elle peut se transformer en interface entre deux modèles de civilisation, nordique d’une part, latine de l’autre. C’est ce que sous-tend l’affichage touristique nouveau où on valorise la bière et on réinvente l’estaminet. On s’adresse à des clientèles aux modes de vie très uniformisés selon les normes internationales des grandes métropoles pour leur proposer une image typée mais pas incompréhensible : il ne s’agit que d’un nouvel exotisme. À Anvers (cathédrale) ou Paris (Oberkampf), on retrouve des quartiers de bars, certes plus petits, mais semblables. La différence est construite par les discours de valorisation (Joye, Huissoud, 96), et leur action sur l’espace concret : la performativité évoquée plus loin.
27La frontière devient système qu’on peut mettre en valeur en tant que formation socio-spatiale (Di Méo, 98) dont la cohérence procède d’instances variées interférant entre elles. Le rôle relativement limité de l’infrastructure matérielle sur laquelle se construit le territoire, amène à privilégier sa superstructure abstraite :
- La réalité concrète des lieux (instance géographique) intervient ici à travers la localisation dans la grande mégalopolis européenne et la densité des systèmes de communication.
- l’instance économique peut apparaître comme la structuration majeure mais quand il ne s’agit pas d’un anachronisme dépassé (Ménin), les avantages réels des discothèques belges se révèlent moins importants que supposés.
- plus importante, l’instance de pouvoirs ne joue pas un rôle essentiel, même dans un tel contexte. Le rôle des élus dans la construction de la frontière est relativement marginal ; les politiques qui sont menées ici concernent une vaste région qui englobe au moins les rives méridionales de la Mer du Nord, le plus souvent toute l’Europe communautaire. Les ruptures sociales à l’intérieur même du territoire français (ségrégation de Roubaix ou Tourcoing par exemple) se révèlent plus marquées, mais il s’agit alors de clivages et plus de frontières.
- l’instance idéologique ou culturelle, dominante, donne leur sens profond à la plupart de ces définitions de la frontière en réinterprétant, en donnant sens à l’action initiée dans d’autres instances (Racine, 94).
28Surtout, la prise en compte des pratiques, des habitus, des modes individuels, etc., ancrés dans ces différentes instances mais relativement autonomes de la collectivité, se révèle essentielle. On peut donc parler d’un effet de formation socio-spatiale frontalière fonctionnant dans le temps des loisirs et de la consommation et imbriquée dans une structuration plus large qui implique l’ensemble des activités humaines. La frontière est signifiante, porteuse d’une part de l’identité locale.
29Remarquons également que les sorties sont probablement le flux transfrontalier qui mobilise la plus importante population. Or, aussi liées que puissent l’être les deux parties de la zone transfrontalière, cela en révèle la faiblesse : par définition, même fréquente, une sortie garde un caractère exceptionnel...
30Par ailleurs, cette organisation des sorties s’insère dans une quadruple évolution :
- -la constitution d’une véritable agglomération métropolitaine avec l’affaiblissement de Tourcoing et Roubaix face au renforcement de Lille ;
- la difficulté du Nord-Pas-de-Calais à s’insérer dans le jeu complexe des relations entre la Wallonie et les Flandres belges7 ;
- -après trente ans de repli, le retour comme acteur de la région Nord-Pasde-Calais dans l’énorme ensemble qui ceinture la Mer du Nord.
31Ces deux derniers aspects ne sont en général abordés que sous des angles économiques ou institutionnels qui ici se révèlent réducteurs.
32- L’affirmation identitaire : la frontière est discours sur l’autre pour se dire soi-même. Le fier retour du chtimi, devenu chti, est incontestable et très travaillé. Mais les Flandres restent étrangères : les sorties sont prépondérantes sur l’espace francophone. Rue Masséna, les voitures belges ne sont pas rares mais le flamand est exceptionnel. A contrario, c’est l’explication du moindre développement de la frontière exotique dans l’Est francophone. À Menin (Menen en fait), on recherche une différence de langue, même si les commerçants sont bilingues.
33Le terme de sortie justifie donc doublement son étymologie : on échappe aux lieux du quotidien, on quitte le territoire national qui les renferme. Mais la sortie n’est pas l’aventure ; on reste dans un étranger proche peu perturbant : on passe la frontière pour l’achat de quelques pralines, pour fréquenter une discothèque conçue selon un standard international qui passe des musiques internationales dans une langue internationale (Bouillin-Dartevelle et al., 91), on boit les mêmes bières belges, françaises et souvent irlandaises dans un type de bar que l’Europe de l’Ouest exporte dans le monde entier. Les limites nationales fournissent un cadre structurant utile8 quand se diluent les limites internes à l’agglomération. Par ailleurs, la globalisation que symbolise l’Union Européenne progresse ; aussi je passe la frontière pour m’assurer du dépaysement, c’est-à-dire que j’existe encore par rapport à un espace de référence, mon chez-moi.
34La frontière se maintient aussi comme atout de développement après avoir été un cul-de-sac. Paradoxalement, la France du Nord se présente à ses riches voisins comme un Sud, plus gai et en même temps plus pauvre et bon marché. Aux xixe et au début du xxe siècles, le Nord français était prospère et les Flandres misérables ; après la crise économique et identitaire de ces trente dernières années, cela revient ainsi à assumer un renversement complet de la représentation historique de la frontière.
DES FRONTIÈRES PERFORMATIVES
35En élargissant le propos, cela suscite un certain nombre de réflexions qui ont pour point commun de remettre en cause la conception traditionnelle de la frontière selon laquelle :
- Les discontinuités seraient produites par les seuls agents éminents, fabricants d’espace institutionnels (autorités politiques, scientifiques) et n’auraient d’existence qu’en tant que justificatrice de leurs systèmes de construction du monde. Les actions volontaristes sont nombreuses (Desbrosses, 2000) mais leur impact reste limité (Dorrenbacher et Brücher, 2000) car on ne tient souvent pas vraiment compte du rôle des populations. Mais on ne doit pas non plus supposer que cette action n’a pas de sens ni d’efficacité : elle interagit avec celle des populations (leurs pratiques) ; c’est la condition de son succès.
- Ces discontinuités seraient limitées à une ligne franche et absolue avec deux populations distinctes (Nous et les Autres) : ici, aller en Belgique, n’est pas synonyme d’aller voir les Belges ; la frontière est d’abord à usage français ; les clients, propriétaires et tenanciers des discothèques de Belgique sont français. Chaque groupe (tel qu’entendu au point 5) en propose une définition qui coïncide rarement avec celles des autres.
- On peut donc entendre la frontière comme performative, c’est-à-dire produit évolutif d’interactions permanentes entre pratiques et discours (Thrift, Lussault). En effet, au-delà de son apparente rigidité, elle apparaît très plastique : “Les délimitations officielles, contestations et conflits géopolitiques, les fermetures et ouvertures peuvent être considérés comme un spectacle mis en jeu par dessus un vaste théâtre de circulation matérielle et idéologique qui est profondément répétitif, citationnel et mimétique” (Price). Le résultat c’est que le substrat vivant où s’ancre la frontière dépasse largement les agitations tragi-comiques et les gesticulations géopolitiques et leur survit même lorsqu’elles ont disparues.
- Cette frontière d’usage se révèle donc intéressante par ce qu’elle révèle de la capacité des individus à construire des lieux : il ne faut surtout pas l’imaginer extérieure à l’homme ; du fait de l’ouverture européenne, elle ne s’impose plus à lui, ne détermine pas son action. Certes, la frontière reste structure avant l’action de l’individu, sa condition en tant qu’héritage profondément intériorisé (cf. point 3) et en même temps appareil institutionnel et idéologique réactualisé en permanence par les autorités politiques. Mais ici elle est surtout produit de son action, après l’action. Le lieu, le local, ici la frontière qui en signifie l’existence, est bien un espace expérimenté, comme “cadres dans lesquels s’effectuent l’interaction, (.) essentiels pour spécifier sa contextualité” (Giddens). A posteriori, les acteurs institutionnels ont à s’adapter, infléchir leur discours : ici, l’acteur majeur, c’est l’individu, agent conscient, compétent et en même temps fortement socialisé. Ses actions routinisées opèrent comme “des modèles régularisés de relations sociales conçues comme des pratiques reproduites” (Giddens). On voit ainsi à l’œuvre, un individu multiple et mimétique capable de contraindre l’espace collectif par une action dérisoire mais infiniement reproductible (Price). D’où l’importance du temps ; il est impossible d’imaginer l’espace frontière autrement qu’espace temps : par l’inégale durée des inscriptions dans l’espace, deux échelles de temporalité construisent un système mental frontalier plastique mais particulièrement solide.
- Cela débouche sur l’idée d’une identité spatialisée qui dépasse la simple inscription transfrontalière. En effet, on découvre une nouvelle rétroaction de l’individu au collectif : la frontière ainsi construite n’est pas seulement structure (commerciale surtout), elle porte en elle par la multiplicité des expériences individuelles la conscience d’une expérience collective forte partagée qui devient ainsi identitaire. À ce titre, Deleuze et Guattari (1980) ont proposé d’étendre au social et au spatial le modèle lacanien de la formation de l’identité. Dans le contexte d’activités festives fortement identifiées et choisies pour leur contenu identitaire (Yonnet), le corps lui-même devient territoire par les marques qu’il porte (tenues, maquillages, tatouages, ivresse.), toutes exceptionnelles, répétitives et spécifiques à l’événement : ces marques sont signes de reconnaissance entre membres d’un groupe à géométrie variable qui balise son espace de référence. La frontière est moins frontière linéaire et politique entre Lille et la Belgique que rupture entre les espaces ordinaires (espaces de l’ordre) et ces territoires festifs d’un peuple de la fête, excessif et donc dans un autre ordre (Consume without moderation9). Ces territoires festifs distinguent tout autant Lille de la Belgique, les wallons des flamands (même si ce n’est pas revendiqué comme tel) que les territoires des différents groupes qui arpentent ces nuits ; l’adoption de codes internationaux (langue, style de musique, d’habillement) répond à ce souci.
- La matérialité de la frontière devient secondaire ; elle est conséquence, produit, mais surtout pas causalité. Il n’est donc plus nécessaire d’avoir une contiguité spatiale pour créer une frontière (Price). C’est bien ce qu’ont compris les promoteurs touristiques de Lille (municipalité, agents économiques) : le hiatus introduit par le trajet en TGV (une à trois heures) constitue la véritable frontière entre la région lilloise qui met en spectacle la réinvention de ses traditions et un ailleurs de la post-modernité qui embrasse une grosse moitié de la mégalopole européenne. Le discours devient paradoxalement “venez ailleurs, sortez, nous sommes au centre”. La frontière est distance-temps ; certes, c’est ce qu’expriment les divers moyens de locomotion mis en œuvre, toujours spécifiques d’un type de frontière. Mais surtout, les différents groupes d’habitants de la métropole lilloise s’inscrivent tous dans un rapport spécifique à la distance (langue, type de musique, usage du corps.) pour construire chacun leur frontière. La mise en système de l’ensemble de ces frontières constitue la frontière mais sans que chacune n’ait grand chose à voir avec les autres, et -à une exception près - sans jamais approcher la frontière politique de plus de quelques kilomètres. Celle-ci devient donc ici une fiction, une abstraction : “ça manque de belges dans cette histoire”10 ; multiplicité des ailleurs qu’on retrouve pourtant à proximité, imbriqués les uns aux autres sur un espace qui est défini tout autrement par les populations qui l’habitent de manière permanente. La survivance du souvenir de l’existence de ce vague dénominateur commun devient patrimoine unificateur, dernier vestige d’une culture partagée par tous : la frontière n’a donc plus besoin d’être politiquement matérialisée pour survivre à sa quasi-disparition officielle. Mais cela n’amène pas pour autant une dématérialisation complète : la mise en place de ces territoires de la fête induit la construction de paysages nocturnes nettement caractérisés.
- Ces deux derniers points amènent à mettre en cause la vision d’une frontière défensive, réactivée quand l’identité des groupes semble menacée (Douglas) : ce n’est que, fortuitement, le cas d’un groupe (la frontière exotique) et sans qu’il s’agisse même d’un caractère vraiment constitutif. Les populations qui instrumentalisent cette frontière le font sans avoir le sentiment d’une dissolution de leur identité, ni éprouver le besoin de réactiver ainsi des constituants forts de leur culture commune.
UNE FRONTIÈRE HYFER-RÉELLE
36En conclusion, on peut identifier trois idées-clés caractéristiques des frontières ainsi construites :
- Elles sont sensuelles (Rodaway) car construites autour de l’individu et son corps, la satisfaction de plaisirs très personnels : dans un comportement de masse, la satisfaction de plaisirs élémentaires (manger, boire, danser, faire l’amour, se droguer) permet de donner sens à l’individu : il existe dans ces lieux puisque son corps l’en informe. En même temps, cette limite d’une expérience individuelle rend ces frontières identitaires : la diversité des choix sensuels permet de composer et d’afficher une identité au moyen du choix des pratiques. On peut trouver cela pauvre mais c’est une réalité, au demeurant moins violente que la frontière patriotique et surtout celle qui assimilait la frontière aux limites d’un espace vital. Cette pauvreté est volontaire : s’il y a choix indiscutable, il reste réduit à des traits saillants : la sensualité donne réalité à la frontière mais c’est une expérience hyper-réelle (Baudrillard) car simplifiée à l’extrême (une seule consommation sensuelle par type d’expérience) et amplifiée (abondance et même débauche, excès).
- Ces frontières sont hégémoniques dans le sens où le caractère d’expérience hyper-réelle de la frontière remplace la possibilité d’un test de confrontation de cette représentation à un original. En s’offrant elle-même comme standard, en renforçant son auto-référencement, elle supprime le besoin de référence à un original autre qu’elle-même, tout au plus peut-on instumentaliser une autre icône (la frontière du XIXe et des courses poursuites entre gabelous et contrebandiers). Cette caractéristique est peut-être moins marquée que dans d’autres contextes (les parcs d’attraction ou la construction de la ruralité) mais bien réelle : on ne peut plus comprendre et supporter d’autres situations de véritable frontière (Sangatte et les réfugiés). Mais les environnements dé-réalisés qu’on vient d’évoquer (ici surtout les parcs de loisirs) en viennent à influencer, et même dominer, la perception de toute autre expérience de l’espace et en particulier la frontière.
- Elles sont consuméristes. L’expérience géographique que les individus avaient des espaces en général et de la frontière en particulier était jusqu’alors décrite de manière adéquate avec des mots tels que “rencontre-contact”, “interaction”, “interdépendance”, “attraction”, “tropisme” et “participation”. Chacun d’entre eux identifie une relation structurelle (physico-biologique, écologique ou fonctionnelle.) comprenant l’acquisition d’un savoir géographique et le développement de comportements appropriés à l’environnement. Or, cette nouvelle expérience de la frontière est une relation économique et culturelle. Elle est construite d’images, de thèmes bien établis ; elle est enracinée dans une tradition culturelle, et située à l’intérieur d’une économie de l’offre et de la demande. Une telle expérience de la frontière est hyper-réelle car elle est présentée à l’individu comme un produit, une marchandise qui peut être achetée et consommée. La nature sensuelle de cette expérience et la réplicabilité des éléments qui composent la frontière (mêmes bars, mêmes discothèques, mêmes magasins Léonidas.) rend la définition du produit possible autant que nécessaire. Le projet des édiles lillois, assisté par la publicité, permet de former l’individu (c’est-à-dire le consommateur) à désirer des produits particuliers et vise à satisfaire et soutenir ces désirs (lancement de la rue Masséna). Mais les bars dits irlandais11 comme les discothèques techno fonctionnent dans la même logique, ce qui permet de définir un autre niveau de discontinuité, le quartier : quand on va de bar en bar dans la rue Masséna, on reste dans un intérieur ; la véritable frontière, c’est celle de la limite du quartier des bars. Idem à Ménin. Dans ce contexte, l’expérience de la frontière n’est pas esthétique, ni purement fonctionnelle ; elle est plutôt hédonistique et entraine d’abord la consommation pour elle-même et non comme complément à la transgression frontalière.
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Notes de bas de page
1 Équipe INTERMET, UFR de Géographie et Aménagement, Université Bordeaux 3.
2 Elles-mêmes diversifiées, essentiellement selon des critères sociaux-économiques et parfois l’âge des individus qui la pratiquent.
3 Pour une description plus détaillée voir Crozat, 2001.
4 Sauf mention contraire, toutes les citations qui suivent sont tirées du Plan Local d’Action Tourisme de 1999.
5 “Aussi beau qu’un conte de fées : Lille, la métamorphose”.
6 Lille est la première ville française à s’être adjointe les services d’un town manager sur le modèle de ce qui se fait déjà en Grande-Bretagne. Voir à ce sujet l’analyse, souvent très critique, de Deakin et Edwards (1993).
7 Ainsi la principale inflexion mise en valeur le long de la Nationale 50 correspond à la limite entre Flandres et Wallonie, avec pourtant la même législation de part et d’autre.
8 Utile mais pas nécessairement indispensable comme on va le voir plus loin au sujet du modèle de la frontière défensive proposé par Marie Douglas.
9 Slogan d’une des discothèques étudiées (H2O à Pecq, Belgique)
10 Remarque d’un des rares patrons belge de discothèque : en fait dans un tel processus de construction de frontière la présence de l’Autre, le voisin, n’est plus vraiment nécessaire ; seule compte la transgression de la limite.
11 Leur prolifération récente (liée au boom économique) a déclenché à Dublin une polémique car on leur reproche de hâter la disparition des bars irlandais traditionnels. On comprend mieux le caractère hyper-réel de ces représentations sans véritable original évoqué au point précédent.
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Quatre ans de recherche urbaine 2001-2004. Volume 2
Action concertée incitative Ville. Ministère de la Recherche
Émilie Bajolet, Marie-Flore Mattéi et Jean-Marc Rennes (dir.)
2006
Quatre ans de recherche urbaine 2001-2004. Volume I
Action concertée incitative Ville. Ministère de la Recherche
Émilie Bajolet, Marie-Flore Mattéi et Jean-Marc Rennes (dir.)
2006