Introduction de la troisième partie
p. 251
Texte intégral
1Que de choses se passent sur le terrain d’une Exposition universelle, quand des dizaines millions de corps traversent les sites. Ils circulent et consomment sur un espace qui vibre et qui tremble sous leurs pas, leurs touchers et leurs regards. Vivre une Exposition universelle est sans doute, en soi, une expérience exceptionnelle qui mérite qu’on y consacre articles, livres, croquis et autres publications destinées à immortaliser la grande fête éphémère. Mais à côté, ou peut-être plutôt en creux, de la grandiloquence des descriptions d’expositions que nous retrouvons à travers les innombrables sources sur les manifestations de 1889 et 1900, nous retrouvons toujours des considérations d’ordre pragmatique qui nous font descendre des symboles et représentations pour nous ramener sur le terrain granuleux de la vie quotidienne. La tour Eiffel est le grand phare de la civilisation moderne mais il est aussi un lieu de prédilection pour échapper au bruit et à la fureur des foules pour les Goncourt et Maupassant de ce monde. Les restaurants exotiques promettent une exploration gastronomique dans des contrées lointaines, mais ils offrent aussi des espaces ombragés aux visiteurs atterrés par le soleil de juillet. Les restaurateurs entendent bien profiter de l’affluence pour faire de bonnes affaires, mais les consommateurs qui en ont vu d’autres préfèrent les bonheurs du pique-nique en plein air à l’urgence arrogante des serveurs.
2Peut-être est-ce le phénomène qui nous a le plus frappé dans notre rencontre avec les divers documents abordant la question de l’alimentation à l’Exposition universelle. Alors qu’on s’attend à y retrouver essentiellement des témoignages sur les représentations du monde à travers les cultures culinaires, le Soi et l’Autre, l’ingestion de l’altérité ou la symbolique des aliments, on se voit plutôt confronté au problème beaucoup plus terre à terre du confort et de la fatigue des visiteurs, du mécontentement des consommateurs face aux abus des restaurateurs, de l’importance des cafés pour s’abriter quand la météo est peu clémente, et de toute une série de plaisirs et de tracas qui animent et égratignent le quotidien de l’événement.
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