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    Presses universitaires François-Rabelais
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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Une ode poétique aux femmes activistes Une vidéo d’agression de femmes sahraouies Corps souffrants dévoilés, souveraineté et nouveaux modes de communication Notes de bas de page Auteur

    Sahara Occidental

    Ce livre est recensé par

    • Maman Inoua Elhadji Mahamadou Amadou, Mahamane Lamine Salissou MoussaetMahamane Kané Mansour Basamassi, Lectures, mis en ligne le 12 juillet 2019. URL : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lectures/35903 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lectures.35903
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    Table des matières

    Corps, lutte pacifique et création sur le Web

    Sébastien Boulay

    p. 223-241

    Texte intégral Une ode poétique aux femmes activistes Une vidéo d’agression de femmes sahraouies Corps souffrants dévoilés, souveraineté et nouveaux modes de communication Le corps en mouvement, au-delà du symboliqueViolence, visibilité et transgressionLa question du pouvoir : déplacements et retournements Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1 Après une décennie 1990 marquée par un verrouillage médiatique sur la situation des populations vivant dans la zone du Sahara Occidental occupée par les autorités marocaines, la décennie 2000 a indéniablement été marquée par un début de libération de l’expression politique, sans doute largement permis par la diffusion de nouvelles technologies de communication que sont le téléphone mobile et l’internet, dans un contexte inédit de soulèvements dans le Monde arabe et ailleurs1. Si ces nouveaux outils que sont les sites web, les chat room et les réseaux sociaux sont d’abord utilisés dans l’anonymat et avec les plus grandes précautions, dans un contexte de terreur pesant sur les activistes sahraouis des territoires occupés par le Maroc, ils vont s’installer extrêmement rapidement dans les pratiques de communication et les répertoires d’action (Tilly 1984) au Sahara Occidental.

    2Nous pouvons identifier trois temps forts dans cette évolution des usages politiques de la communication numérique dans les territoires du Sahara Occidental sous contrôle marocain. Tout d’abord, l’intifada de mai 2005, dite « intifada de l’indépendance », conduite par de jeunes collégiens et lycéens, va se signaler par un recours important à ces nouvelles technologies et surtout par l’apparition d’une nouvelle génération d’activistes sahraouis, dont les modèles sont déjà à l’époque les militants des droits de l’homme Aminatou Haidar et Ali Salem Tamek. Puis, en 2009, la grève de la faim de 34 jours aux îles Canaries de Aminatou Haidar qui, en provenance des États-Unis, avait inscrit « Sahara Occidental » sur le formulaire de débarquement de l’aéroport de Laâyoune, ce qui lui avait valu une expulsion immédiate vers l’Espagne : cet événement sera abondamment médiatisé par la presse internationale, faisant encore davantage de cette activiste une icône de la résistance pacifique du peuple sahraoui (Solana 2011 ; Allan dans cet ouvrage). Le troisième temps fort de la visibilisation de la résistance sahraouie à l’occupation marocaine aura lieu un an plus tard en lieu et place du campement de Gdeim Izik2, au cours duquel photos, vidéos et enregistrements audio vont être produits et diffusés vers l’« extérieur » et notamment la RASD TV, chaîne de télévision mise en service en 2009 et diffusée par satellite (depuis le siège du gouvernement de la RASD, près de Tindouf en Algérie), créant un pont inédit entre les familles sahraouies des camps de Tindouf et celles des territoires occupés par le Maroc.

    3À partir de Gdeim Izik, les documents audiovisuels sur les violations des droits de l’homme vont commencer à se diffuser sur YouTube, les réseaux sociaux (Facebook) et les sites d’information sahraouis, les activistes des médias se débrouillant pour passer par des sites de téléchargement accessibles sur le net. Témoignant images à l’appui des pratiques de répression systématique des droits de l’homme, cette production médiatique montrant des manifestants se faisant tabasser par les forces de l’ordre marocaines va nourrir l’objectif et la stratégie de lutte pacifique des militants sahraouis vivant dans les territoires sous contrôle marocain, mettant au grand jour les violations quotidiennes par l’État marocain du droit international, recueillant des témoignages de la part de prisonniers politiques, de familles de disparus et de proches de jeunes martyrs. L’objectif de ces vidéos est de témoigner de la répression mais aussi de sensibiliser les Sahraouis et la communauté internationale à l’urgence de l’élargissement du mandat de la MINURSO à la surveillance des droits de l’homme.

    4De jeunes activistes3 se lancent, à visage découvert, dans la production de documents vidéo, s’improvisant reporters, pour certains d’entre eux, et proposant des directs audio depuis les manifestations. Les vidéos portent avant tout sur des scènes urbaines de répression de manifestations, souvent filmées depuis les toits des bâtiments des principales villes, et de Laâyoune en particulier, et de saccage de maisons habitées par des familles sahraouies. Elles portent également sur les libérations de détenus politiques, délivrent des témoignages de détenus ou de parents de victimes de la répression, commémorent les martyrs et disparus. Dans ces vidéos on note très vite une omniprésence des femmes, dont les images et témoignages à visage découvert racontent la brutalité des violences qu’elles ou des membres de leur famille ont subies.

    5C’est cette omniprésence féminine dans les productions web militantes sahraouies provenant des territoires occupés par le Maroc que je souhaiterais aborder dans ce texte afin d’interroger les expressions contemporaines de la résistance pacifique au Sahara Occidental, la place des femmes dans ce projet politique et ces nouveaux répertoires d’action dont les nouvelles technologies de communication auraient éventuellement4 permis l’émergence. Si la place singulière des femmes dans la vie politique ouest-saharienne a déjà été abordée par différents chercheurs (Caratini 2003 ; Bonte 2008 ; Allan 2010 ; Solana 2011 ; Rossetti 2012 ; Taine-Cheikh 2013), il semble que l’actualité du Sahara Occidental donne des formes inédites à cette présence des femmes dans la cité, suscite l’invention de nouveaux modes d’action à même d’ébranler un certain ordre politique autoritaire et colonial. En nous gardant de toute approche monofactorielle du changement sociopolitique par les techniques, il s’agira de voir en quoi le Web aurait, en rendant visible le corps féminin brutalisé et sa mise en mouvement, modifié les rapports de force et la donne politique au Sahara Occidental, poussant les acteurs à mobiliser de nouvelles « technologies de pouvoir » (Foucault 1994) et à inventer de nouvelles formes de lutte.

    6Car mon approche du politique est bien celle des objets, des techniques du corps et de la matière. J’essaye de questionner le politique dans sa texture, dans son épaisseur matérielle, ses technologies, m’inspirant notamment des travaux de Foucault (1994) et, plus récemment, de Bayart et Warnier (2004) qui ont mis en évidence le fait que les rapports de pouvoir s’expriment avant tout dans la culture matérielle et les conduites motrices des sujets, les uns au contact des autres (ce que Foucault appelait « gouvernementalités5 »). Il s’agit notamment d’étudier le contenu de ces images, de ces vidéos et de voir comment elles sont produites, avec quels outils et artifices, sur quels supports elles sont diffusées et quelles sont leur réception et leur efficacité politique, efficacité qui est, ne l’oublions pas, la finalité de toute action technique (Mauss 1997 [1936]).

    7À partir de données recueillies depuis 2014 dans le cadre du programme de recherche MINWEB6, soit sur le terrain auprès d’activistes sahraouis7, soit à partir d’une exploration du web et des productions militantes sahraouies, je proposerai ici une analyse croisée de deux productions web qui me semblent intéressantes à rapprocher : une ode poétique dédiée aux militantes des territoires occupés par le Maroc, composée par un poète de Tan-Tan, et une vidéo mettant en scène des femmes sahraouies aux prises avec les forces de l’ordre marocaines. Le rapprochement de ces deux productions – l’une mobilisant la parole d’un homme pour décrire cet engagement, l’autre s’abstenant au contraire de tout discours – me semble à même d’éclairer les formes et logiques de l’action politique actuelle des femmes sahraouies dans cette partie du territoire disputé.

    Une ode poétique aux femmes activistes

    8La première production web dont il va être question dans ce texte met en scène la performance de Ali Boujlal, l’un des poètes les plus en vue actuellement de la résistance sahraouie dans les territoires sous contrôle marocain. Ce poème aurait été performé à l’occasion du Ramadan 20138. Enlevé le 26 février 1981 à Tan-Tan, Ali Boujlal a passé plus de dix ans dans les bagnes d’Agdz et de Kelaat M’Gouna du temps de Hassan II, parfois aux côtés de certaines activistes auxquelles il rend hommage. Le poète est de tous les meetings de soutien aux prisonniers politiques et aux familles de martyrs ou de disparus sahraouis. Il lui arrive également de se rendre dans les camps de réfugiés de Tindouf.

    9Le titre du poème, « Ekrem bîha », expression hassaniyya par laquelle, dans la société ouest-saharienne, on exprime son affection pour une personne, généralement un petit enfant que l’on choie, expression qui a, durant les années de guerre au Sahara Occidental, été attribuée par les combattants sahraouis aux Land Rover automitrailleuses, prises à l’armée marocaine, instrument de combat particulièrement efficace et donc précieux qui est resté le symbole de nombreuses victoires militaires sahraouies9. Ici, Boujlal transpose l’importance stratégique de ces véhicules de combat avec le rôle politique crucial que jouent les femmes dans les territoires occupés. En une trentaine de vers, le poète décrit le mouvement des femmes sahraouies dans la cité, les violences auxquelles elles s’exposent et qu’elles subissent en allant manifester et proclamer des slogans, déployer des drapeaux… Il évoque leur courage et leur capacité à transmettre leur volonté collective aux plus jeunes. Il décrit enfin les effets de leur mouvement sur les forces d’occupation, dont le nombre et la brutalité semblent parfaitement disproportionnés par rapport à cette poignée de femmes pacifiques. La brutalité des forces d’occupation apparaît dès lors comme une faiblesse de la toute-puissance marocaine.

    10Le poème égrène les noms d’activistes connues aujourd’hui, qui ont toutes dû supporter la torture, la prison, la disparition : Fatimatou El Hairech, portée disparue entre 1980 et 1991 (même groupe que Ali Boujlal), sœur d’un disparu, Bachir El Hairech (1976), et épouse d’un martyr de l’Armée populaire de libération sahraouie (APLS) ; Mint Hmeydat, disparue entre 1976 et 1991 ; El-Ghalia Djimi, disparue entre 1987 et 1991 pendant trois ans et sept mois (même groupe que Aminatou Haidar), vice-présidente actuelle de l’Association sahraouie des victimes des violations graves des droits de l’homme commises par l’État du Maroc (ASVDH) créée en 2005, fille de Fatimatou Ahmed Salem Baad, disparue le 4 avril 1984 et dont le sort reste inconnu jusqu’à ce jour ; Degja Lachgar, disparue entre 1980 et 1991 (groupe Agdz/ Kelaat M’Gouna), prisonnière politique du 8 septembre 2009 jusqu’à janvier 2010, en liberté provisoire, épouse d’un martyr de l’APLS, membre actuel du bureau exécutif de l’ASVDH ; Aminatou Haidar, dont le père a disparu en 1975, emprisonnée secrètement avec 59 autres personnes, les yeux bandés et torturées, entre 1987 et 1992, à la « prison noire » de Laâyoune.

    […]
    3 Fi l-manâtîq ekrem bihât Mâhum raššâšât u wattât
    […]
    Dans les « territoires », les « Ekrem bîhât »
    Ne sont pas des mitrailleuses ni des voitures
    4 Ellâ ḥafna min lecleyât cand el-Maġreb igellebheCe sont seulement une poignée de femmes
    Au Maroc, on les maltraite
    5 Bi-dbâbîsu ya ġeyr esgât el-Maġreb gaṭrân ǝgrebheavec des bâtons mais elles ont réussi à faire boire au Maroc le goudron de leurs outres
    […]
    8 Râci Fâle min hûk ǝjbât
    Râci mejmûca tetlebhe
    […]
    Voici Vâle, de là-bas, qui apparaît [discrètement]
    Voici un autre groupe qui la suit
    […]
    11 Zeyna u l-Ḥeyreš we Ummât šuhâdâ’∂e sâlebhe
    […]
    Zeyna, El-Hairech et les mères
    Des martyrs adorent [participer aux manifestations]
    […]
    13 Zeynabou wa l-Ḥawâṣiyyât ∂e l-esm el-ġuzât arcabhe
    […]
    Zeynabou et el-Ḥawâṣiyyât
    Ces noms font paniquer les envahisseurs
    14 W Ameydân u Mint Eḥmoydât
    U Djîmi ∂âk inâsebhe
    Et Ameydân et mint Ḥmeydât
    Et Djîmi [aller à la manif] lui convient bien
    15 Bûtengîza fem u Ḥayât ∂îk ǝtgûm ǝb-wâjebheBoutenguîza s’y trouve [également] et Ḥayât
    Cette dernière fait bien son devoir
    16 Mint eš-šâhîd elli ḫallât
    Li l-Jebhe mâhu câgebhe
    Fille de martyr qui donne ses enfants au Front, qui ne resteront pas en retrait
    […]
    20 We ∂-∂ehba we Zeyna ṣaffât l-aḫlâg wa ḥaṭebet maḥṭabhe
    […]
    Et Dhehba, et Zeyna a su soulager sa conscience en s’engageant
    21 W amnât eš-šuhâda’w aḫwât
    El-mafqûdîn ši yaṭrabhe
    Et les filles des martyrs et les sœurs
    Des disparus sont enthousiastes [à l’idée]
    22 Yâkûn ervûd el-lâfitât
    We š-šicârâ’ ǝtrattebhe
    De soulever les banderoles
    Et de déclamer les slogans
    23 We Degje Lašger li tḥaddât
    Lecdu marrat šôr el-Jebhe
    Et Degja Lachgar qui défie l’ennemi en rejoignant le Front
    24 W Aminatu Ḥaydâr ǝsmât
    Mâ rayt ejleb kîf jlebhe
    Aminatou Haidar s’est élevée récompense sans pareil
    25 Solṭâna ḫayya ∂îk acṭât caynîha cazz min ∂hebheSultâna Khayya, celle-ci a donné
    Ses yeux, qui sont plus précieux que son or
    26 U mâ∂a min waḥada mâ nesmât
    Râyethe fôg emnâkabhe
    Et tant d’autres qui n’ont pas été citées
    Portant le drapeau sur leurs épaules
    27 Taġfa wa tḥâni laḥa∂ât eš-šems etbeyyin ḥâjebheQui s’assoupissent, attendant le moment
    Où le soleil se montre
    28 Temši šôr el-mu∂âharât es-selmiyye mâ tacgebhePartent manifester
    Pacifiquement, sans retard
    29 Tejbar quwwa fem ǝtganât
    Eyyâk en-nisâ’ tcaṭṭabhe
    Y trouvant une force rassemblée
    Pour maltraiter ces femmes
    30 Temši bîha li l-ḫalawât
    Teġtasebhe we tca∂∂ebhe
    Qui les conduit dans le désert
    Pour les violer et les brutaliser
    31 Yâ rabbî yelcan quwwât
    Wa ḫzîha megell ecjebhe
    We s-salâm wa šukrân
    Ô Dieu, maudis ces forces
    Châtie-les pour leur absence totale de dignité
    Que la paix soit sur vous et merci !

    11Dans ce poème, ces femmes côtoient des activistes plus jeunes qui se sont engagées à partir de l’intifada de 2005 et qui sont très présentes sur le Web. Sultana Khayya milite depuis 2005 ; elle a perdu un œil à la suite d’une intervention violente à l’université de Marrakech en mai 2007. Sâlha Boutenguiza, née en 1983, est une journaliste et activiste sahraouie de Laâyoune, collaborant activement avec la RASD TV ; elle est issue d’une famille militante particulièrement ciblée par la répression, dont un frère est en prison et un autre, condamné à quinze ans d’emprisonnement, a échappé à sa peine en partant dans les camps de réfugiés de Tindouf. Hayât Khattâli s’engage elle aussi dans la résistance au moment de l’« intifada de l’indépendance » de 2005, elle a alors quinze ans ; très présente aujourd’hui sur le Web, elle est elle aussi une collaboratrice très active de la RASD TV et constitue une cible privilégiée de la campagne de diffamation des autorités marocaines.

    12Dans le poème de Boujlal, c’est bien la femme sahraouie, qu’elle se nomme Vâle, Zeyna ou El-Ghâlia, des noms typiquement ouest-sahariens, qui est le symbole de cette résistance et d’une nation qui entend rester debout, à l’image de cette femme poursuivie dans les rues de Laâyoune et présente dans la vidéo que nous examinerons plus loin. C’est aussi un poème d’amour que Boujlal adresse aux femmes activistes, qu’elles soient connues ou non. Ces femmes « et tant d’autres qui n’ont pas été citées », précise le poète, semblent convertir, par leur seule présence en mouvement dans l’espace public, la toute-puissance marocaine en une grotesque et impuissante démonstration de force.

    13Le nom des producteurs de la vidéo de la performance d’Ali Boujlal n’est pas dissimulé, comme un défi lancé à la censure marocaine. Il s’agit d’Equipe Media, un « groupe médiatique10 » créé en 2009 et porté par de jeunes activistes sahraouis longtemps restés dans la clandestinité. L’objectif d’Equipe Media est de proposer une production locale d’informations fiables sur la situation des Sahraouis dans les territoires occupés, le public cible étant plutôt, affirment-ils11, la communauté internationale. Ces activistes des médias revendiquent un souci permanent de professionnalisation, tout en faisant cause commune avec les autres organisations de défense des droits de l’homme au Sahara Occidental. Regroupant une trentaine de bénévoles, Equipe Media fonctionne avec des moyens très limités et diffuse gratuitement ses productions auprès des médias étrangers. Largement dédiée à la production d’informations sur les violations des droits de l’homme, Equipe Media s’est également mise à produire des documents sur la culture sahraouie ou le pillage des ressources naturelles, sujets qui sont toujours en lien avec la cause politique principale, celle de la libération du territoire et de l’indépendance.

    14Formés sur le tas, notamment grâce aux supports de formation YouTube et à leur carnet d’adresses parmi les organisations internationales impliquées au Sahara Occidental, les membres d’Equipe Media travaillent en étroite collaboration avec la RASD TV, installée dans les camps de Tindouf, et ses correspondants dans les territoires, notamment des jeunes femmes comme Sâlha Boutenguiza ou Hayât Khattâli qu’Ali Boujlal cite dans son poème. Pour ces jeunes femmes reporters, n’hésitant pas à se qualifier de « militantes des médias », faire des directs à visage découvert depuis les villes des territoires occupés par le Maroc, parfois au cœur des manifestations, est devenu une forme de lutte politique. Il s’agit désormais de braver la peur pour défier les forces de l’ordre et remobiliser la population sahraouie qui parfois découvre de visu les réalités de la répression. Ces activistes des médias, femmes et hommes, sont devenus les cibles privilégiées des autorités marocaines : au-delà des violences et intimidations quotidiennes, ils n’échappent pas aux emprisonnements arbitraires : deux journalistes masculins d’Equipe Media font partie du groupe de prisonniers dit « de Gdeim Izîk » et ont été condamnés à des peines de vingt et trente ans de prison, un troisième, condamné par contumace à la perpétuité, est actuellement réfugié en Espagne.

    15L’enjeu ici semble bien de rendre visible la résistance sahraouie dans cette partie du Sahara Occidental, quand la stratégie des forces marocaines a précisément consisté à terroriser les militants sahraouis : « C’est très important la visibilité, partout. Parce que notre problème, et qui a fait que notre conflit est resté oublié, c’est la non visibilité, surtout de cette population qui vit sous occupation. Son refus n’est pas [assez] visible. Le Maroc oblige les gens à adopter une attitude de soumission soit en les menaçant d’emprisonnement soit en leur faisant du chantage économique par la privation de la carte de promotion nationale ou le licenciement. » (Une activiste des droits de l’homme, juillet 2014)

    Une vidéo d’agression de femmes sahraouies

    16Il est temps à présent de confronter ce poème d’Ali Boujlal avec une vidéo de six minutes donnant à voir l’agression de femmes sahraouies par un groupe d’hommes en civil, dans une grande artère d’une grande ville qui est sans doute Laâyoune, en plein jour et en plein cœur du trafic automobile quotidien. Cette vidéo, qui porte également la marque d’Equipe Media, est intitulée « La répression marocaine sur les femmes sahraouies et les sévices commis à leur encontre12 ». Elle a été mise en ligne le 24 mars 2013, juste avant la grande manifestation populaire d’avril qui avait fait suite à la demande des États-Unis d’élargissement du mandat de la MINURSO aux droits de l’homme. Je me suis intéressé à cette vidéo car elle semble avoir reçu un certain « succès » si l’on s’en tient au nombre de vues qu’elle a suscitées (plus de 200 00013) et parce qu’elle me semble assez emblématique de la quantité de documents du même type circulant sur le Web.

    17Cette vidéo14 suit une ligne narrative relativement claire. Une femme seule est poursuivie par une dizaine d’hommes en civil, les yeux rivés sur leur cible, le long d’un axe routier très fréquenté d’une grande ville. L’un des hommes du groupe jette de loin une pierre sur sa victime, qui est alors touchée à la tête. Des véhicules des forces de l’ordre sont présents (Sûreté nationale et police). Le « chef » du groupe, qui se distingue par le port d’un sweet-shirt jaune, désigne à la victime le toit de l’immeuble voisin pour lui signifier (ou signifier au caméraman dont il soupçonne la présence ?) que le projectile a été lancé du toit. Les hommes partent (sortent du champ de la caméra). Un attroupement se forme autour de la victime : des bras levés et des applaudissements en signe de victoire comme un défi lancé aux forces de l’ordre ; le rapport de force n’est plus le même. Les hommes reviennent au moment de l’arrivée des pompiers, voulant disperser le groupe (de crainte sans doute que l’attroupement ne se transforme en émeute). S’engage alors un corps à corps entre femmes et policiers : une femme est expédiée hors champ, sur la route ; une autre est poussée violemment à terre, puis se défend en jetant sa chaussure au visage de son agresseur.

    18La force de cette vidéo tient d’abord par ce que disent les images des brutalités et des violences physiques commises sur les civiles sahraouies en plein jour, en pleine rue. Le corps à corps, dans ces images de femmes se débattant contre leurs agresseurs, prend des allures d’agression sexuelle, d’atteinte à l’intégrité physique et morale de ces femmes que l’on caillasse, que l’on dévoile, que l’on moleste, dont on tire violemment les cheveux. Ces images constituent une trace, une preuve de la réalité de la répression dans la zone du Sahara Occidental occupée par le Maroc.

    19Bien plus qu’une simple succession d’images brutes, cette vidéo est le fruit d’un travail créatif. Les séquences, filmées depuis le même endroit (le balcon ou la fenêtre d’un immeuble), avec la même caméra et par la même personne, ont été montées et rehaussées de différents artifices. Tout d’abord, la musique est tonitruante, évoquant les productions hollywoodiennes à sensations fortes. La voix off étant absente, seule l’image et la musique doivent suffire à transmettre le sens. En outre, parmi les nombreux ralentis et arrêts sur image, on note deux scènes qui sont légendées en caractères arabes. La première de ces deux scènes décrit l’agression physique par ces mots : « Un policier marocain en civil caillasse une manifestante pacifique sahraouie avec une pierre. » (0 min 18 s) La seconde souligne le mensonge du chef du groupe : « Le “matraqueur” Mohamed el-Heysâoui fait croire à la victime que la pierre a été jetée des toits. » (0 min 50 s) Cet effort de décryptage de la scène au montage se manifeste également dans la mise en vis-à-vis d’une image montrant le visage de la victime ensanglantée gisant sur le sol et d’une autre dévoilant le portrait de son agresseur.

    20Lorsque l’on visionne ce document d’Equipe Media, on a effectivement le sentiment d’une scène préparée, à tout le moins attendue par le caméraman, comme si les forces de l’ordre marocaines étaient venues se jeter sciemment dans le champ de la caméra. Cette femme revient semble-t-il d’une manifestation où elle a été repérée. Le début de la vidéo suggère le déséquilibre numérique flagrant entre les agresseurs et leur victime. Et le fait que la scène se déroule en pleine rue, au vu et au su de tous, suggère que les agresseurs disposent d’une impunité et d’une liberté d’action totale dans la cité. Les effets spéciaux manifestent d’ailleurs une volonté de mettre l’accent sur les actes de violence commis sur les Sahraouis (plusieurs femmes et un homme matraqués) et sur les techniques punitives, semble-t-il bien rôdées, des forces de l’ordre marocaines. La scène sidère par sa violence et par le rapport de force disproportionné.

    21Puis, brutalement, une fois les hommes en blouson noir sortis du champ de la caméra, l’agression à distance se transforme en une victoire fêtée par des applaudissements, puis par un corps à corps entre les femmes sahraouies et leurs agresseurs, réapparus dans le champ de la caméra. Au-delà du rapport entre agresseurs et agressés, bourreaux et victimes, c’est ce corps à corps stupéfiant entre des hommes qui semblent détenir une légitimité pour exercer une violence sur des civils, et des femmes voilées refusant cette violence et défendant physiquement leur dignité et leur intégrité, qui manifeste, images à l’appui, un retournement du rapport de force au détriment de l’agresseur qui, outre sa brutalité sur des femmes en public, ne peut plus susciter chez le spectateur que mépris face à ces femmes qui incarnent à l’image la résistance physique à la violence des forces de l’ordre marocaine.

    22Mais cette compassion suppose que le spectateur de la vidéo ait une certaine représentation des femmes sahraouies, des femmes musulmanes et des relations de genre dans les sociétés musulmanes (Saliba 2002) car ces scènes de résistance pourraient tout aussi bien être perçues par certains internautes (attachés à la soumission féminine face à l’autorité masculine et/ou religieuse) comme une effronterie émanant de « mauvaises » musulmanes et une provocation éhontée à l’autorité masculine du commandeur des croyants, y compris au sein de la société sahraouie ?

    Corps souffrants dévoilés, souveraineté et nouveaux modes de communication

    23Essayons à présent de comprendre comment le corps féminin martyrisé et son image vs l’image du policier en civil qui exerce une violence d’État en pleine rue sont finalement devenus, dans le contexte politique actuel du Sahara Occidental, un élément central des « technologies de pouvoir » (au sens foucaldien de modalités d’action sur soi et sur les autres) et des grammaires de résistance.

    Le corps en mouvement, au-delà du symbolique

    24Cette irruption du corps féminin dans l’espace politique et médiatique sahraoui peut évidemment être rapprochée de ces nouvelles formes d’activisme visibles depuis quelques années en Europe (et ailleurs15 avec des groupes comme les Femen, qui mobilisent la nudité du corps féminin comme support de protestation et de sensibilisation du grand public aux causes qu’elles défendent. Mais elle renvoie aussi ici à une place singulière du corps féminin et de ses représentations dans cette société ouest-saharienne16. Rappelons tout d’abord que l’implication des femmes dans la vie politique ouest-saharienne n’est pas nouvelle. En Mauritanie, au cours des décennies de construction de l’État et dans les mouvements de contestation (mouvement des prolétaires « Kâdeḥîn » notamment), les femmes ont été très présentes17. Durant la colonisation espagnole puis à la naissance du Front Polisario et de son projet révolutionnaire, le rôle attribué aux femmes dans la construction nationale et dans l’administration des camps de réfugiés de Tindouf a pu être analysé par différents auteurs (Caratini 2003a ; Allan 2010 ; Rossetti 2012 ; Fiddian-Qasmiyeh 2014 ; et Solana Moreno 2017b).

    25Dans cette culture ouest-saharienne, le corps féminin renvoie à la famille, à l’alliance, à la tente et à la reproduction du groupe. Il renvoie au ḥarîm, domaine privé de l’intime, espace protégé, espace sacré de la famille, inviolable, à partir duquel les individus trouvent leur place dans la société : si le campement bouge en permanence et se recompose/décompose sans cesse au gré de la vie nomade, la tente offre au contraire aux individus un espace stable à partir duquel ils construisent leur rapport au monde. Le corps féminin renvoie au monde de la tente où se transmettent les valeurs collectives. Façonnée par les femmes, la tente façonne à son tour les sujets, leur éducation, leur comportement, leurs actions, leurs modes de penser, bref leur subjectivation, socle essentiel des rapports politiques (Boulay 2017b). Rappelons que le corps féminin, qui était façonné par une alimentation grasse des très jeunes filles, le-blûḥ (gavage), était déjà un enjeu politique, de lutte de prestige entre groupes sociaux. La tente, qui n’était obtenue par le jeune couple qu’après la naissance du second voire du troisième enfant, est d’ailleurs assimilée dans son vocabulaire architectural à une anatomie humaine féminisée par la présence à son sommet d’une parure féminine (Boulay 2003).

    26Il n’est donc pas bien étonnant que la tente soit devenue l’emblème de la nation sahraouie au sein de laquelle les femmes incarnent et transmettent la culture ainsi que les valeurs de la nation, quand la masculinité est construite en référence à un rôle de protection d’une nation féminisée comme l’a justement proposé Joanna Allan (2010). D’ailleurs, à bien y regarder, l’histoire de la résistance sahraouie à la colonisation (espagnole18 puis marocaine) est largement une affaire de tentes dressées et de campements installés dans l’espace public puis démantelés par la force et interdits. Le meilleur et plus récent exemple en est le campement de Gdeim Izik en octobre-novembre 2010, plus important événement de contestation des dernières années. Si les manifestations du pouvoir et l’expression de la parole politique sont traditionnellement le fait des hommes (Caratini 2003a), la visibilité du corps social sahraoui passe très souvent par ce symbole féminin de la tente dressée, interdite depuis lors dans les territoires occupés. Rappelons enfin que, dans cette société ouest-saharienne, le mouvement de la tente ou du campement dans l’espace est une manifestation matérielle essentielle de désaccord, voire de contestation politique19.

    27De la tente et du campement, on est passé au mouvement des femmes sahraouies, reconnaissables sur les vidéos à leur corps enveloppé de voiles de couleur (melḥafa), dans l’espace public. Des femmes qui se déplacent, font face et subissent les techniques policières, ces dernières incarnant la violence d’État. Dans ces vidéos, le rapport de force passe bien par des confrontations de corps en mouvement et de techniques (de tabassage, de protection ou de contestation pacifique). La rue et les quartiers d’habitation constituent le cadre matériel de ces confrontations filmées, espace public confisqué par les forces de l’ordre marocaines, disputé et réapproprié – ne serait-ce que ponctuellement – par les manifestantes sahraouies20.

    Violence, visibilité et transgression

    28Ce qui semble nouveau dans ces vidéos, c’est la visibilisation du corps féminin, un corps agressé, un corps souffrant. Dans les territoires occupés par le Maroc, dans les années 1980 et 1990, les femmes activistes des droits de l’homme ont été enlevées, emprisonnées au secret pendant de nombreuses années, torturées, violées et surtout dissimulées : nombreuses ont été et sont restées portées disparues. Aujourd’hui, au contraire, les femmes ont surgi dans l’espace politique, comme le montre bien le poème d’Ali Boujlal qui leur est dédié, comme si le pouvoir marocain n’osait plus emprisonner les femmes sahraouies du fait des pressions internationales21. Mais cette visibilité a un prix : le dévoilement forcé et en public de leur corps, les souffrances physiques infligées (sans parler des sévices psychologiques), les violences sexuelles qui visent la dignité de ces femmes et à travers elles celle de leurs familles et de leur peuple. C’est le fameux « double viol » de la colonisation mis au jour dans de nombreux autres exemples d’assimilation forcée : le viol de l’intimité de ces femmes par leurs bourreaux, c’est le viol de la dignité de la société colonisée tout entière par l’État.

    29Mais surtout ces images sidèrent, choquent, émeuvent car elles sont transgressives : violence des hommes sur les femmes, contact physique direct entre une femme et des étrangers, dévoilement du corps féminin normalement soigneusement enveloppé, chevelures et coiffures des femmes dévoilées, voire malmenées, sont autant d’interdits brisés par ces images qui bafouent les codes sahraouis de pudeur et d’honneur, les attitudes attendues des hommes vis-à-vis des femmes et réciproquement. C’est sans doute la dimension transgressive de ces vidéos qui fait leur succès sur la toile, et qui participerait de leur efficacité politique. Le recours au terme taḥarrush dans le titre de la seconde vidéo, qui donne une connotation sexuelle à l’agression, a sans doute contribué au « succès » de cette vidéo. La transgression n’est d’ailleurs pas absente du poème de Boujlal qui, contrairement aux convenances, rend hommage nommément et publiquement à ces femmes auxquelles il délivre un message où l’admiration frise la déclaration d’amour.

    30Toutefois, ce martyre en images des femmes sahraouies dessine une figure différente et complémentaire de la traditionnelle munâḍila (militante) des camps de Tindouf : figure de la nâshita activiste, comme l’a récemment montré Vivian Solana Moreno (2017b), qui n’hésite pas à affronter physiquement les forces d’occupation. On semble quitter l’image « classique » de la femme sahraouie, mère et bâtisseuse de la nation – image forgée dans les camps de réfugiés de Tindouf que les femmes ont bâtis et fait vivre jusqu’à présent (Allan 2010 ; Rossetti 2012) –, pour une image d’activistes vivant dans un espace très hostile, pouvant à tout moment être violentées, mais utilisant l’image de leur propre corps meurtri comme action politique contre l’État marocain et sa crédibilité internationale. Ce déplacement dans l’imaginaire de « la » femme sahraouie est aussi un déplacement spatial du conflit : de la ligne de front vers les territoires occupés, nouveau champ de bataille.

    La question du pouvoir : déplacements et retournements

    31Quelle est finalement l’efficacité politique de ces vidéos et leur éventuel impact dans la configuration des rapports de force ? Ces vidéos accablent les autorités marocaines en portant atteinte à l’image de bon élève du Maroc en matière de droits de l’homme22 et pourraient bien réduire à néant le discours des autorités marocaines tentant de faire passer ces activistes sahraouis pour des terroristes23, discours soutenu par la condamnation des prisonniers politiques à des peines très lourdes24, mais qui ne fonctionne plus lorsqu’il s’agit de femmes marchant tranquillement dans la rue et violentées par des hommes en supériorité numérique.

    32Dans cette vidéo, on voit donc progressivement un rapport de force se modifier : la supériorité numérique des forces de l’ordre marocaines sur les femmes, représentant une minorité opprimée, se transforme en un affrontement à l’issue incertaine. Comme si c’était cette violence masculine exercée collectivement sur des femmes en public qui donnait consistance à la lutte non violente des femmes sahraouies, répertoire d’action privilégié depuis le milieu des années 2000. Le fil narratif de la vidéo illustre clairement ce retournement. La vidéo est montée de telle sorte que l’agression devient un acte de résistance mobilisant la société indignée : ces images de corps brutalisés, de violences infligées, de corps souffrants25 façonnent les femmes sahraouies non seulement en victimes de la répression marocaine mais aussi en acteurs politiques de premier plan. Le corps féminin martyrisé devient physiquement et matériellement un rempart, une réponse à une terreur d’État érigée en système de gouvernement. Ces sujets victimes inventent de nouvelles formes de « gouvernementalité » et leur corps devient matière à souveraineté, comme l’a très bien analysé Vivian Solana Moreno (2011) au sujet de la grève de la faim d’Aminatou Haidar.

    33Cependant, si l’on suit encore Foucault dans Surveiller et punir (1975), on peut se demander si, du point de vue des autorités marocaines notamment, le rapport de force est si bouleversé que cela. Car on peut aussi considérer que le supplice public des Sahraouis permet aux autorités marocaines de restituer la souveraineté un instant blessée du monarque sur ses sujets. J’en veux pour preuve le fait que ces mêmes autorités n’ont pas peur d’agir en plein jour et sous les caméras des activistes, dont ils savent la présence sur les toits, pour réaffirmer la réalité de la toute-puissance de l’État marocain, y compris sous l’œil de la communauté internationale. Cette répression érigée en système apparaîtrait ainsi également comme un cérémonial de souveraineté royale et le corps (supplicié) des femmes sahraouies comme la figure symétrique du corps du roi tout-puissant26. La répression sur les militantes sahraouies ne viserait pas tant à rétablir un ordre qu’à rendre « infâmes » celles qui en sont les victimes – en les présentant comme des femmes sans pudeur, irrespectueuses de la figure du roi et de l’autorité des hommes – et à faire éclater ainsi la réalité du « surpouvoir » monarchique.

    34Il faudrait enfin analyser ces vidéos comme Duranti (1994) avait proposé de décrire les faits de langage, c’est-à-dire comme des ensembles d’interactions, ici entre les producteurs de la vidéo, ses protagonistes (qui parfois savent qu’ils sont filmés) et ses destinataires. La communication s’opère en effet entre ces différents acteurs et la connaissance du contexte sera évidemment cruciale dans l’appréciation de ce type de production. Ici, la scène filmée dit plus ou autre chose qu’un texte : cette forme d’écriture audiovisuelle provoque l’émotion, elle bouleverse, elle raconte une violence sidérante. Mais elle sera très diversement reçue selon l’identité de l’internaute et sa familiarité avec la situation des droits de l’homme dans cette partie du Sahara Occidental.

    35Certes, ces scènes de violence pratiquées par des hommes armés sur des femmes dans la rue en plein jour « parlent d’elles-mêmes » et sont à même de toucher leurs deux cibles : la communauté sahraouie et la communauté internationale, que l’on sait particulièrement sensible à la situation des femmes dans les situations de conflit et dans le monde musulman en particulier (Allan, dans cet ouvrage). Mais ces vidéos émeuvent plus qu’elles n’informent et, comme le rappelle bien Cécile Boëx au sujet des vidéos des activistes syriens, « le registre militant n’est pas soluble dans le registre médiatique » (2012 : 121). Si le spectateur sahraoui est à même de contextualiser ces documents, la dramaturgie de ces vidéos pose sans doute plus de problèmes de décodage à l’internaute occidental habitué à une information sourcée, vérifiée et commentée.

    36Il semble que l’on assiste donc, avec la multiplication de ce type de production audiovisuelle, à un renouvellement du langage politique. Tandis que, jadis, la poésie (quasi exclusivement masculine) était le principal canal d’expression des émotions et de critique politique, on assiste aujourd’hui à l’apparition de nouvelles formes de production et de diffusion de messages politiques. La poésie, certes, reste omniprésente sur le Web sahraoui où elle rencontre encore un franc succès, mais elle côtoie aujourd’hui des créations d’une tout autre nature qui recourent à de nouvelles compétences techniques, à de nouveaux outils et à de nouvelles grammaires qui, via les réseaux sociaux et les sites de partage de vidéos, mobilisent à leur tour.

    37Pour conclure, ce n’est pas un hasard si le poète sahraoui Ali Boujlal, très présent sur le Web, dédie un long poème d’amour au mouvement des femmes dans la ville car la lutte pour la souveraineté sur le territoire se joue aujourd’hui dans les rues des villes occupées par le Maroc, espaces très policés où s’affrontent les « gouvernementalités ». C’est par leur mouvement dans des cités sous contrôle que ces femmes donnent corps à l’action politique de résistance non violente. Par leur présence, ô combien périlleuse, et par la figuration de cette présence dans les vidéos et dans la production orale, elles instituent cette lutte pacifique qu’elles revendiquent comme leur technologie de pouvoir, leur « façon de faire » de la politique. Grâce à la vidéo et à la créativité des jeunes activistes sahraouis des médias, le corps des femmes devient une matière dont elles décident de faire un usage souverain (Fraisse 2014 : 73), sur le modèle subversif et héroïsé du corps souffrant de l’une d’elles, Aminatou Haidar. Il semble donc bien que les nouvelles technologies de communication et les nouveaux médias, en mettant sous l’« œil de la communauté internationale » à la fois la présence physique de ces femmes en mouvement dans un espace urbain sous haute surveillance masculine27, duquel elles étaient jusque-là largement exclues, et la violence dont elles sont les cibles, ont « créé » de nouveaux espaces et formes de lutte qui imposent un nouvel ordre des choses et de nouveaux rapports de force au Sahara Occidental.

    Notes de bas de page

    1 Pour une analyse de ce vent de contestation au Maghreb et ailleurs dans le monde, voir notamment Larzillière et al. 2013.

    2 Pour une analyse minutieuse de ces événements, voir en particulier Gómez Martín 2012b.

    3 Voir notamment sur le Web les productions des groupes Equipe Media et Radio Meyzirât, les deux plus actifs et visibles sur internet.

    4 Pour une discussion sur la question du déterminisme des nouvelles technologies dans les printemps arabes, voir notamment Gonzalez-Quijano 2012 et Larzillière et al. 2013.

    5 Pour aller plus loin sur ces approches du politique par les matérialités, voir les travaux de Jean-Pierre Warnier (2009b) sur la royauté au Cameroun et ceux de Delphine Gardey (2015) sur l’Assemblée nationale en France.

    6 « Minorités numériques et circulation de messages politiques sur le Web au Sahara » (financement « Émergence(s) », ville de Paris, 2014-2017), programme coordonné par Marina Lafay (CEPED).

    7 Avec la précieuse collaboration de Mohamed Dahmi, sociologue sahraoui vivant dans les territoires occupés.

    8 https://www.youtube.com/watch?v=N7s15gyYe88 (consulté le 4 mai 2016). Ce poème a été traduit avec la collaboration de cAbdeljelil Meyine et de Ndaye Iasid Mahamud, que je tiens à remercier chaleureusement ici.

    9 Voir sur ces aspects García 2001 : 199-200.

    10 Entendu ici au sens d’agrégation, à géométrie variable, d’activistes engagés dans le champ des médias, dont l’objectif est de produire des informations originales sur une situation sociopolitique particulière, à partir du terrain, en recourant notamment aux outils du web et en opérant dans un contexte de répression des libertés d’information et d’expression.

    11 Ces informations, sauf mention d’autres auteurs, sont le fruit d’entretiens réalisés en juillet 2014 à Laâyoune, dans les territoires sous occupation marocaine, en étroite collaboration avec Mohamed Dahmi, sociologue sahraoui.

    12 Le terme arabe taḥarrush (traduit par « sévices » ici) a une connotation sexuelle.

    13 Rappelons toutefois que ce comptage peut être artificiellement gonflé.

    14 https://www.youtube.com/watch?v=Nnr2VLFtxi4 (consulté le 4 mai 2016).

    15 Pour le monde arabe, voir notamment les figures militantes d’Aliaa Magda Elmahdi (Égypte) et d’Amina Sboui (Tunisie).

    16 Voir notamment sur ces aspects les travaux importants de Fortier (2000) et Tauzin (2001).

    17 Voir par exemple le travail de Zekeria Ould Ahmed Sâlem (1995) sur l’utilisation des berceuses comme support de critique politique du temps du régime de Moktar Ould Daddah.

    18 Le campement de Gdeim Izik n’est évidemment pas sans rappeler la première manifestation du mouvement nationaliste sahraoui qui avait eu lieu à El Ayoun (Laâyoune), le 17 juin 1970. Pour contrecarrer une manifestation convoquée par le gouverneur espagnol de la province, les nationalistes avaient dressé un camp dans le quartier de Zemla, qui avait été ensuite violemment démantelé par l’intervention de la Légion espagnole qui avait tiré sur les manifestants, faisant plusieurs morts et blessés. Pour plus de détails sur la journée du 17 juin 1970, voir notamment Bárbulo 2002 : 78-89.

    19 Sur ces aspects, voir en particulier les travaux de Pierre Bonte sur l’histoire de l’émirat de l’Adrar (Bonte 2008).

    20 Le « territoire » urbain disputé pouvant renvoyer, ici, au territoire du Sahara Occidental.

    21 Sur cette question, voir le texte de Joanna Allan dans cet ouvrage.

    22 Rappelons par exemple que le Maroc a organisé en 2014 la 2e édition du Forum mondial des droits de l’homme.

    23 Aujourd’hui, on trouve sur le Web des vidéos tournées par les forces de l’ordre marocaines tendant à montrer la violence des manifestants sahraouis à leur encontre, mais il est très difficile de savoir s’il ne s’agit pas de mises en scène orchestrées par ces mêmes forces de l’ordre.

    24 Je rappelle que parmi les 25 prisonniers dits « de Gdeim Izik », bon nombre ont été condamnés par un tribunal militaire à des peines très lourdes (perpétuité, 20 ans, 30 ans…), peines visant à en « faire » des terroristes.

    25 À cet égard, la célèbre photographie d’Aminatou Haidar le visage ensanglanté semble avoir agi tel un modèle iconographique particulièrement marquant.

    26 À propos de la guerre en Syrie, Cécile Boëx montre comment les activistes s’emploient à déformer, travestir, désintégrer la figure présidentielle de Bachar al Assad, « destitué de son corps glorieux, [lui-même] incarnation de sa fonction politique, pour être renvoyé à la corporéité d’un individu auquel on attribue la responsabilité des crimes commis […] » (2013 : 76).

    27 Voir les travaux remarquables de Fariba Adelkhah sur la portée politique du mouvement féminin dans l’espace public en Iran, et notamment Adelkhah 2003.

    Auteur

    Sébastien Boulay

    Université Paris Descartes, UMR CEPED

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    1 Pour une analyse de ce vent de contestation au Maghreb et ailleurs dans le monde, voir notamment Larzillière et al. 2013.

    2 Pour une analyse minutieuse de ces événements, voir en particulier Gómez Martín 2012b.

    3 Voir notamment sur le Web les productions des groupes Equipe Media et Radio Meyzirât, les deux plus actifs et visibles sur internet.

    4 Pour une discussion sur la question du déterminisme des nouvelles technologies dans les printemps arabes, voir notamment Gonzalez-Quijano 2012 et Larzillière et al. 2013.

    5 Pour aller plus loin sur ces approches du politique par les matérialités, voir les travaux de Jean-Pierre Warnier (2009b) sur la royauté au Cameroun et ceux de Delphine Gardey (2015) sur l’Assemblée nationale en France.

    6 « Minorités numériques et circulation de messages politiques sur le Web au Sahara » (financement « Émergence(s) », ville de Paris, 2014-2017), programme coordonné par Marina Lafay (CEPED).

    7 Avec la précieuse collaboration de Mohamed Dahmi, sociologue sahraoui vivant dans les territoires occupés.

    8 https://www.youtube.com/watch?v=N7s15gyYe88 (consulté le 4 mai 2016). Ce poème a été traduit avec la collaboration de cAbdeljelil Meyine et de Ndaye Iasid Mahamud, que je tiens à remercier chaleureusement ici.

    9 Voir sur ces aspects García 2001 : 199-200.

    10 Entendu ici au sens d’agrégation, à géométrie variable, d’activistes engagés dans le champ des médias, dont l’objectif est de produire des informations originales sur une situation sociopolitique particulière, à partir du terrain, en recourant notamment aux outils du web et en opérant dans un contexte de répression des libertés d’information et d’expression.

    11 Ces informations, sauf mention d’autres auteurs, sont le fruit d’entretiens réalisés en juillet 2014 à Laâyoune, dans les territoires sous occupation marocaine, en étroite collaboration avec Mohamed Dahmi, sociologue sahraoui.

    12 Le terme arabe taḥarrush (traduit par « sévices » ici) a une connotation sexuelle.

    13 Rappelons toutefois que ce comptage peut être artificiellement gonflé.

    14 https://www.youtube.com/watch?v=Nnr2VLFtxi4 (consulté le 4 mai 2016).

    15 Pour le monde arabe, voir notamment les figures militantes d’Aliaa Magda Elmahdi (Égypte) et d’Amina Sboui (Tunisie).

    16 Voir notamment sur ces aspects les travaux importants de Fortier (2000) et Tauzin (2001).

    17 Voir par exemple le travail de Zekeria Ould Ahmed Sâlem (1995) sur l’utilisation des berceuses comme support de critique politique du temps du régime de Moktar Ould Daddah.

    18 Le campement de Gdeim Izik n’est évidemment pas sans rappeler la première manifestation du mouvement nationaliste sahraoui qui avait eu lieu à El Ayoun (Laâyoune), le 17 juin 1970. Pour contrecarrer une manifestation convoquée par le gouverneur espagnol de la province, les nationalistes avaient dressé un camp dans le quartier de Zemla, qui avait été ensuite violemment démantelé par l’intervention de la Légion espagnole qui avait tiré sur les manifestants, faisant plusieurs morts et blessés. Pour plus de détails sur la journée du 17 juin 1970, voir notamment Bárbulo 2002 : 78-89.

    19 Sur ces aspects, voir en particulier les travaux de Pierre Bonte sur l’histoire de l’émirat de l’Adrar (Bonte 2008).

    20 Le « territoire » urbain disputé pouvant renvoyer, ici, au territoire du Sahara Occidental.

    21 Sur cette question, voir le texte de Joanna Allan dans cet ouvrage.

    22 Rappelons par exemple que le Maroc a organisé en 2014 la 2e édition du Forum mondial des droits de l’homme.

    23 Aujourd’hui, on trouve sur le Web des vidéos tournées par les forces de l’ordre marocaines tendant à montrer la violence des manifestants sahraouis à leur encontre, mais il est très difficile de savoir s’il ne s’agit pas de mises en scène orchestrées par ces mêmes forces de l’ordre.

    24 Je rappelle que parmi les 25 prisonniers dits « de Gdeim Izik », bon nombre ont été condamnés par un tribunal militaire à des peines très lourdes (perpétuité, 20 ans, 30 ans…), peines visant à en « faire » des terroristes.

    25 À cet égard, la célèbre photographie d’Aminatou Haidar le visage ensanglanté semble avoir agi tel un modèle iconographique particulièrement marquant.

    26 À propos de la guerre en Syrie, Cécile Boëx montre comment les activistes s’emploient à déformer, travestir, désintégrer la figure présidentielle de Bachar al Assad, « destitué de son corps glorieux, [lui-même] incarnation de sa fonction politique, pour être renvoyé à la corporéité d’un individu auquel on attribue la responsabilité des crimes commis […] » (2013 : 76).

    27 Voir les travaux remarquables de Fariba Adelkhah sur la portée politique du mouvement féminin dans l’espace public en Iran, et notamment Adelkhah 2003.

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    Ce livre est cité par

    • Bastide, Andréa. (2023) Enjeux géopolitiques multiscalaires de la déclaration de Pedro Sánchez (2022) relative au projet marocain d’autonomie du Sahara Occidental. L’Ouest Saharien, Vol. 17. DOI: 10.3917/ousa.222.0145

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    Boulay, S. (2018). Corps, lutte pacifique et création sur le Web. In F. Correale & S. Boulay (éds.), Sahara Occidental (1‑). Presses universitaires François-Rabelais. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufr.21380
    Boulay, Sébastien. « Corps, lutte pacifique et création sur le Web ». In Sahara Occidental, édité par Francesco Correale et Sébastien Boulay. Tours: Presses universitaires François-Rabelais, 2018. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufr.21380.
    Boulay, Sébastien. « Corps, lutte pacifique et création sur le Web ». Sahara Occidental, édité par Francesco Correale et Sébastien Boulay, Presses universitaires François-Rabelais, 2018, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufr.21380.

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    Correale, F., & Boulay, S. (éds.). (2018). Sahara Occidental (1‑). Presses universitaires François-Rabelais. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufr.21075
    Correale, Francesco, et Sébastien Boulay, éd. Sahara Occidental. Tours: Presses universitaires François-Rabelais, 2018. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufr.21075.
    Correale, Francesco, et Sébastien Boulay, éditeurs. Sahara Occidental. Presses universitaires François-Rabelais, 2018, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufr.21075.
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