Critique de l’anthropologie raciale : Anténor Firmin et les déshérités de l’histoire
p. 341-357
Texte intégral
1« Je suis noir », revendiqua Anténor Firmin face à l’idéologie raciale de l’anthropologie physique du xixe siècle, formule qui contenait un défi d’égalité et d’émancipation. Poussé par le besoin de l’histoire, Anténor Firmin publia, en 1885, De l’égalité des races humaines1, ouvrage qui s’opposait à la pensée raciale et raciste ambiante (l’usage du mot « raciste » possède ici un caractère anachronique car il n’apparaît qu’à partir des années 1920, c’est a posteriori que ces thèses seront qualifiées de racistes) entretenue et divulguée, entre autres, par le texte de Joseph Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines, paru en quatre volumes entre 1853 et 1855. Pour Firmin, Gobineau représentait l’une des cibles qui participait d’une « anthropologie mensongère2 ». Si l’ouvrage de Firmin apparaît d’emblée comme une réponse sans appel ou plus justement comme une contre-offensive à Gobineau dans un affrontement pour le savoir, le titre est également un hommage rendu au livre du diplomate Louis-Joseph Janvier, L’égalité des races humaines, publié un an avant. Le texte de Janvier étant lui-même une réponse aux Dialogues philosophiques d’Ernest Renan qui affirmait l’inégalité entre les individus catégorisés comme Blancs et Noirs.
2Dans un contexte favorable à la colonisation et où la classification et la hiérarchisation des prétendues races humaines déterminées par l’anthropologie physique européenne battait son plein, Firmin s’est fortement inscrit dans l’élaboration d’une tradition postcoloniale – qui ne se nommait pas encore comme telle –, ce qui plaça Haïti au cœur du discours sur les marges de la production du savoir3. L’anthropologie physique en France se voulait anatomique et descriptive afin de maintenir les sciences anthropologiques sur le terrain biologique (anthropométrie, craniologie) en excluant l’anthropologie sociale et culturelle. Les imageries raciales insistaient sur la différence entre les caractères visibles, c’est-à-dire la couleur de la peau, des yeux et la forme du crâne. Ces inventaires de caractères physiques déterminaient des taxinomies sociales visant à déceler des normes morales, intellectuelles et psychologiques des individus et groupes auxquels ils étaient assignés4.
3L’ouvrage de Firmin s’inscrit dans les traces de la discipline anthropologique tout en étant guidée par une démarche philosophique et historique. Conception à partir de laquelle il propose une vision de l’homme davantage portée sur les facteurs sociaux qui lui sont acquis ou transmis au cours de sa vie que sur l’aspect biologique, ce qui était à l’époque utilisé à des fins de propagande qualifiées aujourd’hui de racistes5. En intégrant la construction de nouveaux paradigmes dans la discipline de l’anthropologie, Firmin permettait de mettre en écho l’opposition problématique entre égalité et inégalité des différences. Au-delà du message humaniste de Firmin et de sa soif de vérité, son ouvrage est une contribution à la déconstruction des élaborations « pseudo-scientifiques » des médecins, naturalistes, géographes, voyageurs et anthropologues de l’époque (tels Pierre-Paul Broca, Paul Topinard, Johann Friedrich Blumenbach, Carl Gustav Carus, Jean Louis Armand de Quatrefarges de Bréau, héritiers de Buffon, Linné, Ampère, Darwin, Claude Bernard et Herbert Spencer). L’ouvrage de Firmin s’inscrit dans une contestation de la production de ce savoir européen qui établissait, à partir de mesures du corps (crânes, membres, etc.), une hiérarchie raciale où les femmes et les hommes perçus et définis comme noir.e.s étaient situés au plus bas d’une échelle de valeur humaine. Il faut déterminer ici l’idée que la perception de la couleur de peau en tant que noire ne peut se détacher de la construction sociale et historico-politique de la catégorie « noir » et donc des conditions d’existence qui en résulte. Venant d’Haïti, Firmin élabora une dénonciation de cet « entre-soi » du savoir qui perpétuait les logiques de domination du pouvoir colonial.
4Au même moment se tenait la conférence de Berlin (15 novembre 1884- 26 février 1885) au cours de laquelle l’Europe coloniale, constituée par la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et les Pays-Bas, établissait les règles du partage de l’Afrique et y traitait des modalités de la liberté de commerce. Le 28 juillet 1885, Jules Ferry prononça un discours qui justifiait la colonisation en soutenant que « les races supérieures [avaient] le devoir de civiliser les races inférieures ». C’est à partir de ce discours que son gouvernement mit en place la politique coloniale qui faisait suite à l’officialisation de l’impérialisme colonial de la IIIe République. En outre, en 1886 paraissait La France juive d’Édouard Drumont, ouvrage qui donna « une allure scientifique à l’antisémitisme ambiant6 ». Dans ce contexte, le livre de Firmin aurait pu devenir un essai fondamental car en faisant vaciller l’idéologie autour des races humaines, il ébranlait toute une pensée de l’humanité issue des représentations coloniales. Homme de son siècle, Firmin croyait toutefois en l’anthropologie physique : tout en contestant la hiérarchie des races, il ne remettait pas pour autant en question l’existence de ces mêmes races. S’il remettait en cause la hiérarchisation des groupes et des individus, il adhérait à la position polygéniste définit par Broca qui impliquait que chaque race d’hommes avait pris naissance dans une région déterminée. Depuis l’indépendance, les penseurs haïtiens ne cessaient de dénoncer les idées dominantes relatives à l’infériorité des Noirs7. Mais si ces textes trouvaient un certain écho en Haïti, ils ne réussirent pas à ébranler les scientifiques au-delà de l’Atlantique, en Europe et en France.
5Si Firmin n’était pas exclu de la vie politique haïtienne, comment expliquer une certaine mise à la marge intellectuelle au regard de sa controverse sur l’égalité des « races humaines » ? Ce chapitre proposera de revenir sur la réflexion d’Anténor Firmin face à l’idéologie raciale et à la prétendue différence ontologique entre les êtres humains. Tout d’abord en considérant sa rupture à partir d’une ré-historicisation du corps noir et d’une démonstration de l’égalitarisme racial depuis ses circulations transatlantiques. Puis en questionnant sa situation d’auteur à la marge du point de vue de la critique épistémologique de l’anthropologie.
Le problème de la race
6Au siècle de Firmin, la notion de race qualifie avant tout « une entité généalogique, une lignée dotée de qualités collectives héréditaires8 ». Sa valeur est généalogique avant d’être taxinomique, et « c’est au moment où l’on efface, ou propose d’effacer, le statut juridico-politique d’esclave civil […] qu’on va […] mobiliser les arguments raciaux, les discours naturalistes et anthropologiques (et la notion de race elle-même) pour refonder à un autre niveau des dispositifs de domination voire d’exclusion institutionnalisées9 ». Au xixe siècle, la race désigne une subdivision biologique de l’espèce humaine pour laquelle l’ascendance est une ou multiple selon les théories monogéniste et polygéniste. Il est commun de parler de race, notion qui se détermine principalement par des attributs physiques (couleur de peau, forme du crâne et du corps, texture et couleur des cheveux, forme des yeux, etc.) associés à la pureté du sang selon une lignée familiale et garante d’une nation. Elle devint une catégorie évidente pour penser les groupes humains et définir des types distincts qui permettaient d’être décrits à partir de certains caractères physiques et à partir desquels étaient établis des classifications. Toutefois, cet usage est accompagné d’une forte indétermination des classifications raciales, aussi bien à propos du nombre de races retenues que des critères utilisés. Antoine Leveque rappelle que « l’idée qu’il existe dans la nature une pluralité de races géographiques entendues au sens de types humains distincts s’est progressivement implantée dans la langue savante, philosophique et scientifique entre 1750 et 1840, avant d’acquérir un statut paradigmatique en anthropologie entre 1860 et 193010 ».
7La lecture du texte de Firmin permet de mettre en évidence l’émergence d’une histoire politique de la race, indissociable d’une critique épistémologique et problématisant un ensemble de pratiques de pouvoir, dont l’une des caractéristiques était de « (re)fonder des inégalités sur des caractères anthropologiques à l’intérieur d’un horizon général humain inclusif (en particulier […] celui de la citoyenneté et de l’égalité formelle11) ». Laudyce Retat indique que la race est une « sorte de topos, périlleux sans doute mais non conscient de ses prolongements possibles, non responsable (du moins directement) des redoutables dérives du futur12 ». L’élaboration du sens de la race devient un processus arbitraire de classification de l’humanité, ce qui rendra, dans la seconde moitié du xxe siècle, la catégorie obsolète.
8Firmin critiquait la hiérarchie des « races humaines » mais il croyait en l’idée polygéniste du concept pluriel de « races » humaines. Il conservait l’idée de distinction naturelle entre les individus mais dénonçait le maintien de la pluralité des « races humaines » en fonction des territoires et aux dépends d’une organisation topographique et juridique coloniale.
La rupture épistémologique d’Anténor Firmin : reconsidérer le corps noir
9Né au Cap-Haïtien en 1850, Anténor Firmin devient diplomate et avocat, proche du Parti libéral mulâtre. Suite à son désaccord avec le président Salomon, il décide de quitter le pays. À Paris, il est soutenu par son compatriote Louis-Joseph Janvier et par Ernest Simon Auburtin afin de devenir membre titulaire de la Société d’anthropologie au cours de la séance du 17 juillet 1884. Cette société savante fut fondée en 1859 par le médecin polygéniste13 Paul Broca. Le médecin et anthropologue français Paul Topinard en fut le secrétaire général de 1880 à 1885 et publia la même année que Firmin ses Éléments d’anthropologie générale. Dans l’article 1 des Bulletins qui en définissent les statuts, il était énoncé que la « Société d’anthropologie de Paris a[vait] pour but l’étude scientifique des races humaines ». La Société tentait de vérifier par la science et ses méthodes de mesure l’inégalité physique et défendait l’idée selon laquelle il existait une hiérarchie naturelle entre les aptitudes intellectuelles et les dispositions morales des prétendues différentes « races humaines ». Ses activités, proches des pratiques médicales, servaient l’anthropologie physique dont les enjeux idéologiques avaient des fins politiques : la justification de la colonisation et des pratiques esclavagistes dans les différents espaces des empires européens. La science anthropologique servait la politique coloniale et la Société fut le lieu de son institutionnalisation où étaient installés un laboratoire d’anthropologie biologique et un musée dans le but de collecter, de façon obsessionnelle, le plus grand nombre de crânes14. Elle fût l’un des plus grands musées anthropologiques du monde et l’École d’anthropologie, créée en 1875, avait ouvert des cours au public à partir de 1880.
10Dans sa préface, Firmin évoque le choc d’être le témoin de la persistance de « l’affirmation dogmatique de l’inégalité des races humaines et de l’infériorité des personnes à la peau noire ». Considérant ces « affirmations aussi louches que perverses15 », provenant d’une « aberration d’esprit16 », il s’érige contre cette pratique de la hiérarchisation et de la classification des êtres humains. Comment Firmin a-t-il pourtant pu assister à ces séances pendant plusieurs années17 ? Reconnaissant l’incongruité de sa présence, il s’étonnait lui-même de pouvoir siéger à cette assemblée d’élites qui établissait une échelle de l’intelligence humaine et dans laquelle il était lui-même considéré au plus bas. La présence de Firmin relevait d’une audace à tel point que l’un d’eux, Arthur Bordier, pour tenter de s’expliquer le degré d’intelligence avancé dont Firmin faisait preuve, lui demanda le 21 avril 1892 s’il n’avait pas un ancêtre blanc. Un autre savant, Léonce Manouvrier, contesta l’indice céphalique de Firmin et lui demanda de se soumettre à la mensuration de son crâne18. Tous ne pouvaient expliquer une telle intelligence dans un corps noir. Firmin répondit qu’il n’était pas impossible qu’il y ait eu « une parcelle de sang blanc » dans sa famille, ce qui entraîna la conclusion que ce sang blanc aurait modifié le crâne de Firmin, remettant en cause le développement de son intelligence19.
11À maintes reprises, Firmin se fit le témoin des conclusions obscures de la Société et de l’écart réel entre les hypothèses d’inégalité et les conclusions obtenues (qui contredisaient ces hypothèses). Il montra, par exemple, que la mesure de la boîte crânienne ne permettait pas le classement préalablement attendu. Firmin s’attachait à observer l’« irrégularité des résultats et l’incertitude où se trouve l’esprit quand il faut juger de la valeur relative20 ». Il contestait l’unicité de la voie scientifique afin que toutes les races puissent discuter leurs opinions en vue d’une universalité de la science21. Les expériences elles-mêmes mettaient en évidence le caractère curieux des mesures de classification, le désordre qui rapprochait des races prétendument diverses et éloignées. Cette construction du savoir était au cœur d’une Europe qui maintenait un pouvoir basé sur le présupposé de l’inégalité quel qu’en fut l’usage de la science. Être dominé, esclavagisé, c’était ne pas être dans l’histoire. Mais pour le besoin de l’histoire, pour rétablir la vérité de l’histoire, Firmin voulait mettre en lumière « l’impuissance des anthropologues à tirer de ces procédés [de classification] si compliqués la moindre règle qui ait une précision suffisante22 ». La domination intellectuelle, mais aussi sociale et politique, se mesurait à la capacité de son corps à faire histoire et donc à faire preuve d’être dans l’histoire. En contestant cette mise en ordre anthropologique du monde et en se réappropriant l’histoire du corps dominé, Firmin s’inscrivait dans une rupture épistémologique avec la pensée dominante de la science qui se disait universelle. La rupture de Firmin consistait alors à critiquer tout un imaginaire colonial du corps colonisé, du corps esclavagisé, notamment ce corps noir assimilé à la condition de servitude. Admettre l’inégalité des races humaines, c’était « légitimer la servitude de ceux qu’on prétend[ait] inférieurs23 ». Le colonialisme avait mis en place des mécanismes de représentation, défendus par la science et qui revendiquaient une hégémonie des individus à la peau claire, les classant au plus haut dans la hiérarchie sociale telle une aristocratie de l’épiderme24.
Penser depuis Haïti
12En renversant le présupposé historique, politique et anthropologique de l’inégalité, Firmin contribuait au renversement du mythe présupposé de la science comme une activité impartiale, pure et sans jugement de valeur. Sa thèse de l’égalitarisme racial recouvrait l’idée selon laquelle « les aptitudes intellectuelles et les dispositions morales natives d’un individu humain ne sont pas fonction de la catégorie raciale à laquelle il appartient », « les propriétés raciales distinctives […] n’influencent en rien les aptitudes intellectuelles et morales des individus25 ». Critique du racialisme scientifique, l’enjeu pour Firmin se situait dans cette assertion qu’une différence raciale n’induisait pas une inégalité d’aptitudes intellectuelles et morales.
13Depuis Paris et avant l’ouvrage de Firmin, Louis-Joseph Janvier avait rédigé une œuvre afin de réhabiliter l’image d’Haïti ; il participa à l’ouvrage collectif Les détracteurs de la race noire et de la république d’Haïti dans lequel les auteurs démontaient les déclarations discriminantes faites à l’égard des Haïtiens. Dans son introduction au texte de Firmin, Robert Bernasconi souligne la réaction de Janvier aux thèses des Dialogues philosophiques d’Ernest Renan qui sont comme « l’exercice maximal d’un paroxysme, le jeu d’une raison qui s’exaspère en délire », en condensant à la fois « l’idéologie romantique du spontané et les philosophies néo-hégéliennes du devenir » et en injectant un « darwinisme aussi approximatif que péremptoire26 ». Pour Renan, comme pour bien d’autres, « [l]es hommes ne sont pas égaux, les races ne sont pas égales. Le Nègre, par exemple, est fait pour servir aux grandes choses voulues et conçues par le Blanc27. » Et il rajoute : « Le principe le plus nié par l’école démocratique est l’inégalité des races et la légitimité des droits que confère la supériorité des races28. »
14La réhabilitation du « monde noir » et du corps noir, par le biais d’une pensée panafricaine, bien avant le mouvement de la négritude, était une porte d’entrée pour rétablir le rôle d’Haïti dans l’histoire du monde. Firmin voyait son combat pour l’égalité au-delà de la révolution haïtienne et de l’indépendance. La reconstruction du pays s’ancrait dans les célèbres paroles de Boisrond Tonnerre, auteur de la déclaration d’indépendance d’Haïti en 1804, prenant pour cible la race comme un élément fondamental de la constitution du pouvoir : « Pour dresser l’acte de l’indépendance, il nous faut la peau d’un Blanc pour parchemin, son crâne pour écritoire, son sang pour encre et une baïonnette pour plume29 ! » Mais Firmin reformulait l’histoire de France depuis la Révolution française en rétablissant la voix d’Haïti pour une « République universelle et la fraternité des races30 ». Il négocia et obtint gain de cause pour que dans l’article 4 de la Constitution haïtienne soit remplacé « Tout Africain » par « Tout étranger et ses descendants sont habiles à devenir Haïtien31 ». Il ne souhaitait pas qu’Haïti et les peuples anciennement dominés se replient sur eux-mêmes. En réfutant les arguments d’une supposée inégalité des races humaines, il contestait la conception racisante d’une prétendue loi naturelle qui influerait sur les rapports socio-économiques en Haïti et les oppositions politiques qui pénétraient les luttes de couleur entre Noirs et mulâtres. Firmin insistait sur le fait que les luttes de pouvoir ne pouvaient se réduire à la question de couleur32 sans pour autant nier la persistance des représentations raciales au sein même de la société haïtienne, elles-mêmes issues d’une conception plus large de l’humanité, de l’Europe jusqu’aux Amériques. La « question de couleur » a été réinterrogée depuis une pensée ethnologique qui aurait des spécificités haïtiennes face à une contestation de l’anthropologie physique européenne dominante.
15Dans la seconde moitié du xxe siècle, ce fut Jean Price-Mars qui se concentra sur la production d’un savoir national et sur les caractéristiques des conditions d’existence haïtienne : les producteurs du savoir devait changer de lunettes épistémiques. Emmanuel C. Paul, maître à penser de l’« école d’ethnologie haïtienne », prônait une « ethnologie engagée » dans la perspective de bâtir la nation haïtienne et surtout de rapprocher les élites et le peuple : « aux ethnologues noirs du monde entier », il propose l’exemple d’Haïti, pays où a eu lieu un « réveil de la conscience nationale sous l’influence de l’ethnologie ». « En contribuant au développement de leur discipline, [les ethnologues] doivent en faire une puissance de combat en sorte qu’elle remplisse ses fonctions sociales dans le sens de la revalorisation des cultures négro-africaines33. » Entre héritage culturel, émancipation des Noirs et construction démocratique, l’ethnologie haïtienne, dans une volonté de rupture avec les conceptions eurocentriques, se saisissait d’une forme de modernité, entre créolité et singularité historique d’une culture caribéenne.
16Dans la biographie qu’il fait de Firmin, Price-Mars évoque la « vigueur inaccoutumée » pour « la conquête de la haute culture » à laquelle se consacra Firmin et son attention particulière pour l’anthropologie « parce que cette science, jeune à l’époque dont il s’agit, s’était hâtée avec une exubérance impétueuse, de clamer le dogme de la hiérarchie des races humaines et avait assignée une place irréversible au dernier échelon de la classification à la race à laquelle il appartenait34 ». Firmin influença en partie Price-Mars sur une analyse de ce que la production du savoir « à l’origine d’un changement de paradigme à la fois politique et épistémologique » permet de comprendre de la construction de la nation haïtienne. La reconnaissance de l’imaginaire du peuple et des petites gens, en somme de la culture populaire, constitue le « point de départ de toute une entreprise de déconstruction de narration de la nation35 ». En reconstituant l’histoire de l’émergence de la discipline ethnologique en Haïti, Price-Mars a cherché des précurseurs dans la figure de Firmin36. « Alors que les intellectuels haïtiens de la fin du xixe siècle – Louis-Joseph Janvier, Anténor Firmin – s’inscrivaient dans une démarche universaliste en élaborant des théories générales sur l’Homme qui s’opposaient au racisme, désormais la balance pench[a] davantage en faveur de l’étude des spécificités culturelles haïtiennes37. » Position que nuance Edelyn Dorismond qui considère qu’« elle reproduit, selon la même intention, l’extériorisation propre de l’anthropologie européenne » en reproduisant « la même logique de différenciation38 », c’est-à-dire entre un Nous et les Autres.
17Le renversement du présupposé de l’inégalité ne devait pas conduire au retournement du présupposé de l’universel. Tout comme l’analyse Matthieu Renault à propos de l’écrivain trinidadien C.L.R. James39, la pensée de Louis-Joseph Janvier relevait de ce qui, au premier abord, apparaissait comme paradoxal lorsque, dans un effet de miroir, il qualifiait Haïti de France noire. James se caractérisait par son ambivalence entre, d’une part, la volonté de révolution ou encore d’émancipation des masses opprimées que sont les peuples colonisés, replaçant la Caraïbe dans l’histoire et même au centre de celle-ci, et, d’autre part, l’inscription forte dans la généalogie et la tradition intellectuelle et politique de l’Occident. À tel point qu’il imaginait les îles caribéennes devenir le nouveau centre d’une civilisation dite universelle telle que l’a été l’archipel des îles de la Grèce antique. Si, pour certains des intellectuels, Haïti est pensée depuis les canons français, elle n’en garde pas moins sa spécificité : sa responsabilité à l’égard d’une négritude – à venir – ou peut-être plus justement d’une actuelle condition noire. Firmin lui-même a été formé aux lettres classiques et aux humanités en Haïti, notamment par Jules Neff, ancien élève de l’Ecole normale supérieure de Paris. Il disposait à la fois d’une culture racialiste propre aux savoirs portés sur les mondes colonisés et d’une culture humaniste et républicaine influencée par sa formation française, basée sur un corpus gréco-latin40.
Marge, controverse et contre-discours
18Dans son introduction au texte de Firmin, Ghislaine Géloin constate que le nom de Firmin apparaît sur la liste des membres du Bulletin de la Société en 1885 et en 1886, puis disparaît, peut-être du fait de sa position de ministre des Finances et des Relations extérieures en Haïti sous le gouvernement du général Hyppolite. Son nom réapparaît par la suite mais il ne reçu aucune notice nécrologique dans le Bulletin comme le voulait la coutume de la Société41. Silencieux, selon le Bulletin, Firmin fait cependant deux interventions lors des séances des 7 et 21 avril 1892, c’est-à-dire huit ans après son arrivée à la Société et sept ans après la publication de son livre. Cette parole empêchée résonne en écho à la célèbre formule de Gayatri Chakravorty Spivak, « les subalternes peuvent-[ils] parler ? ». Le débat qu’aurait voulu avoir Firmin avec ses collègues n’a pas eu lieu malgré la dédicace qu’il fait à la Société d’anthropologie au début de son ouvrage : « Hommage respectueux à la Société d’anthropologie de Paris. » Ne recevant aucun commentaire ni compte rendu, il fait face à un silence éloquent. Seul Léonce Manouvrier, en 1886 et depuis l’étranger, publie dans la Revue philosophique de la France et de l’étranger un compte rendu de trois pages sur l’ouvrage qu’il qualifie de « tiède42 ». Alors que Firmin refuse d’adhérer à la thèse de l’inégalité, Manouvrier doute des preuves apportées par Firmin et de sa contestation des discussions de l’époque.
19L’ouvrage de Firmin adopte un « discours de rupture43 » éclairé d’une double dimension, politique et épistémologique. Pourquoi le livre de Firmin est-il tombé dans l’oubli ? Est-ce parce qu’il gênait ? Est-ce parce qu’il ne faisait pas consensus auprès de l’industrie du livre et auprès des courants dominants ? Firmin soutenait que les Blancs avaient tendance à ignorer et à marginaliser les productions des individus non blancs et son livre en fut un exemple car ignoré dans la pensée occidentale du xixe siècle44. « Anténor Firmin est le fondateur oublié de l’anthropologie dont la contribution à l’anthropologie française aurait pu être fructueuse mais a été ignorée45 », selon Carolyn Fluehr-Lobban. « On peut se demander pourquoi une œuvre, aussi importante dans la pensée raciale pour le xixe siècle et dans l’histoire du racisme de nos sociétés modernes, a été aussi peu commentée lors de sa parution et progressivement occultée, du moins en France. Pourquoi une chape de plomb a-t-elle enveloppé cette œuvre ? » interroge Ghislaine Géloin46. Alors que les œuvres de Gobineau ont fait leur entrée dans la célèbre collection française de la Pléiade en 1983 et que son Essai sur l’inégalité des races humaines est régulièrement réédité, Firmin reste relativement inconnu47 (la traduction de son ouvrage apparaît très tardivement en anglais, en 200048) : « Pour jouer la carte du défi, vaut-il mieux avoir tort avec Gobineau et être réédité ou avoir raison avec Firmin et sombrer dans l’oubli […] ? » La raison est-elle liée au contexte ? La cause des arguments racistes faisant partie du discours dominant, « cette théorie raciale, en 1885, avait imprégné tous les secteurs de l’opinion et était devenue un fait indiscutable sur lequel on ne revenait pas49 ». En s’engageant dans cette polémique, Firmin savait qu’il dérangeait : « Le but de son essai était de prouver scientifiquement que toute classification des hommes en races et divisions ethniques repose sur des principes arbitraires, des présupposés idéologiques qui, de toute façon, se contredisent50. » Firmin se moquait des croyances de son temps et des hommes qui les véhiculaient, il démontait la multiplicité des conceptions qui invalidaient leur fondement, qu’il soit monogénique ou polygénique. Leurs démonstrations « fu[yai]ent par la tangente51 » toute évidence pratique ou même démonstration rationnelle, ce qui en faisait des théories peu fiables, naïves et « capricieuses ». Par exemple, un des arguments les plus flagrants d’absurdité concernait la « couleur du Nègre52 » et la prétendue « peau huileuse des Noirs » : si la peau des Noirs produisait une telle « huile », le procédé chimique qui transformait la mélanine ne pouvait se produire dans un corps humain, ce qui rendait cette assertion totalement absurde. La plupart d’entre eux utilisaient ce que Claude Bernard appelait des « arguments de tendance53 » afin de servir leur cause.
20De cette histoire de l’ouvrage, il en ressort un discours à la marge, une « contre-écriture54 », ou encore une « anthropologie non hégémonique55 », c’est-à-dire une voix qui s’est affirmée non pas comme une alternative au point de vue dominant mais voulant injecter une nouvelle connaissance et donc de la reconnaissance sur la pluralité des expériences vécues. En repérant « dans la pensée ethnologique haïtienne, des prémices de théories postcoloniales56 », John Picard Byron constate un oubli ou un déni de l’écriture haïtienne lorsque la mouvance de la « contre-écriture » est identifiée à l’Orientalisme (1978) d’Edward Saïd. Elle prit son élan dans les années 1950 dans les pays du « tiers-monde » suite à la publication du Cahier du retour au pays natal de Césaire (1939) alors que Price-Mars avait déjà édité Ainsi parla l’oncle (1928) et Anténor Firmin, De l’égalité des races humaines (188557). Il souligna la difficulté des auteurs haïtiens qui n’étaient pas soutenus et diffusés par les intellectuels occidentaux reconnus, n’atteignant pas la bibliographie des études postcoloniales essentiellement constituées, du point de vue de la Caraïbe, à partir des ouvrages de Césaire et Fanon. Si Haïti restait à la marge, c’est parce que son histoire n’était connue que par son passé colonial fait d’esclaves, c’est-à-dire d’individus exclus des récits historiographiques fondateurs du récit national. Haïti a été confiné dans l’idée qu’il était un pays voué à être exclu des récits dominants ou des « grands récits ».
21Dans La condition postmoderne58, Jean-François Lyotard introduit l’idée de la nécessité de la « fin des grands récits ». Les grands récits sont ceux de la modernité dans laquelle la production intellectuelle d’une époque a été vue comme la matérialisation d’un esprit universel correspondant aux grandes histoires idéalisées de la modernité. La postmodernité, « qui désigne l’état de la culture après les transformations qui ont affecté les règles du jeu de la science, de la littérature et des arts à partir de la fin du xixe siècle59 », interroge justement ces conditions du savoir scientifique. Cette fin des grands récits est une crise du discours unique, unifié et qui se conçoit comme universel puisqu’ils peuvent être plurielles, fragmentés et contradictoires. Les critères de vérité deviennent disparates et la science réinterroge sa légitimité : « Qui décide ce qu’est un savoir, et qui sait ce qu’il convient de décider ? » Lorsqu’on déplace l’interrogation sur les moyens de la construction du savoir plutôt que sur sa fin, les grands récits perdent de leur crédibilité. En remettant en question ceux de la modernité, à savoir le récit dominant, les petites histoires sont revalorisées pour laisser place à d’autres types de discours, c’est-à-dire « la possibilité de récits multiples et de multiples manières de fabriquer ces récits60 ». L’ouvrage de Firmin interroge ainsi les frontières intellectuelles déterminées par la modernité européenne en insufflant l’idée d’une provincialisation de l’Europe, selon les mots de Dipesh Chakrabarty : la préoccupation tourne autour d’une réécriture des multiples histoires de la modernité. L’existence de la position minoritaire implique « une critique des récits de l’identité » dans le processus de subjectivation et dans la capacité d’agir. Dans le champ de l’historiographie, les passés dits « subalternes » sont des « mondes vécus qui ont été assujettis par les récits “majeurs” des institutions dominantes61 ».
22Firmin montrait ainsi les limites de la discipline pour saisir d’autres expériences et d’autres conditions d’existence. En remettant en question un discours communément accepté par des normes de pensées, il tentait une dénormalisation épistémologique dans le but de briser la continuité entre norme biologique et norme sociale, ce dont parlera largement Frantz Fanon un demi-siècle plus tard dans Peau noire, masques blancs, en 1952. Cet enjeu est fortement ancré dans la théorie décoloniale des intellectuels latino-américains qui consista à déconstruire l’imaginaire occidental d’une monopolisation du savoir et des outils de pensée en considérant d’autres espaces d’énonciation à la marge des grands empires coloniaux. Les normes de la connaissance ne peuvent être établies universellement par un sujet transcendant mais par des sujets historiques qui impliquent une multitude de centres, remettant ainsi en cause les notions de marge et de centre. À la manière d’Achille Mbembe et pour qualifier le geste fanonien, Firmin participa à la condition de possibilité d’une déclosion du monde qui, selon Jean-Luc Nancy, désigne l’ouverture d’un enclos, la levée d’une clôture, et donc la contestation d’un monde clos. « L’idée de déclosion inclut celle d’éclosion, de surgissement, d’avènement de quelque chose de nouveau, d’épanouissement. Déclore, c’est donc lever les clôtures de telle manière que puisse émerger et s’épanouir ce qui était enfermé62. » La déclosion du monde qui s’opère chez Firmin correspond au surgissement d’une montée en humanité en sortant de l’enclos de la race qui enferme le sujet63. Firmin contestait la hiérarchisation des « races » sans pour autant en invalider leur existence. Quelques décennies plus tard, Fanon souhaita une abolition de la race car « le Nègre n’est pas. Pas plus que le Blanc64. »
23En traitant de l’ (in) égalité, Firmin renoua avec le geste des esclaves qui, pour l’indépendance d’Haïti, avait donné chair au postulat de l’égalité pour tous les êtres humains. Reconnu comme homme politique en Haïti, Firmin est cependant apparu comme une figure intellectuelle subalterne au sein de la Société d’anthropologie à Paris. Si certains auteurs haïtiens reprirent ses combats politiques65 malgré l’ostracisme qu’il a vécu66, ce n’est que récemment que Firmin est étudié dans le reste du monde comme un visionnaire des réflexions postcoloniales et de la place du déterminisme racial et coloriste, encore problématique et polémique dans l’espace national haïtien, régional de la Caraïbe et mondial. Pris dans une histoire de la raison, Firmin s’est toutefois octroyé la capacité de pouvoir contester les évidences qui accompagnaient la croyance en un ordre des choses. De l’universalisme au positivisme, le pouvoir reste garantit par une fixation du mode d’organisation des représentations et de la construction de l’histoire. La rupture de cette répétition s’exerce par ce que Walter Mignolo nomme la « désobéissance épistémique », c’est-à-dire la « prise de distance avec le conditionnement matriciel d’un mode de pensée historiquement dominant, la production d’un écart avec la croyance qui l’accompagne67 ». S’il paraît anachronique de comparer la démarche de Firmin avec la rupture épistémique évoquée par Mignolo, les enjeux sont pourtant comparables. Et si Firmin utilise encore le langage et les codes représentationnels du xixe siècle, pour les « déshérités de l’histoire », il défie l’histoire d’une inégalité des prétendues races humaines.
Notes de bas de page
1 Firmin Anténor, De l’égalité des races humaines. Anthropologie positive, éd. Jean Métellus, Montréal, Mémoire d’encrier, 2005 (1re éd. 1885).
2 Ibid., p. 139.
3 Watson Denis, « De l’égalité des races humaines d’Anténor Firmin : un traité d’anthropologie contemporaine », in Cary Hector (dir.), L’actualité d’Anténor Firmin : hier, aujourd’hui et demain, actes du colloque international Anténor Firmin tenu à l’université Quisqueya, 14-16 décembre 2011, Port-au-Prince, Éditions de l’Université d’État d’Haïti, 2014, p. 73-74.
4 Voir Olender Maurice, « La race comme mythe. Entretien », Le Débat, no 162, 2010, p. 162-175, p. 11.
5 Watson D., « De l’égalité des races humaines… », op. cit., p. 78.
6 Géloin Ghislaine, « Introduction », in Firmin Anténor, De l’égalité des races humaines. Anthropologie positive, Paris, L’Harmattan, 2003 (1re éd. 1885), p. xiii.
7 Dans son article déjà cité, Denis Watson évoque deux auteurs des premières années de l’indépendance d’Haïti : le baron Pompée Valentin Vastey du Royaume du Nord (Réflexions sur une lettre de Mazères, ex-colon français, adressée à M. J.C.L. Sismonde de Sismondi, sur les Noirs et les Blancs, la civilisation de l’Afrique, le royaume d’Hayti, etc.) et Joseph Saint-Rémy (Pétion et Haïti).
8 Doron Claude-Olivier, L’homme altéré. Races et dégénérescence (xviie-xixe siècles), Ceyzérieu, Champ Vallon, 2016, p. 9.
9 Ibid., p. 39.
10 Leveque Antoine, L’égalitarisme racial d’Anténor Firmin en 1885, thèse de doctorat en histoire et philosophie des sciences sous la direction de Justin Smith, Université Paris Diderot, 27 janvier 2017, p. 5.
11 Doron C.-O., L’homme altéré…, op. cit., p. 20.
12 Retat Laudyce, « Introduction », in Renan Ernest, Dialogues philosophiques, Paris, CNRS Éditions, 1992 (1re éd. 1876), p. 18.
13 Cf. chapitre IV du livre de Firmin dans lequel il décrit les débats entre polygénistes et monogénistes.
14 Pour une mise en perspective de ces collections de crânes, voir l’article de Arndt Lotte, « Corps sans repos, voix en errance », Asylon(s), no 15 : Politique du corps (post) colonial. Perspectives croisées Europe-Afrique-Amérique, Ferdinand Malcom et Vermeren Pauline (dir.), 2018, en ligne : http://www.reseau-terra.eu/article1405.html.
15 Firmin A., De l’égalité des races humaines…, op. cit., 2005, p. 363.
16 Ibid., p. 394.
17 Il restera quatre ans à Paris puis y reviendra en 1900 en tant que « ministre haïtien ».
18 Bulletin de la Société d’anthropologie de Paris, t. III, 4e série, 1892, p. 329-330.
19 Géloin G., « Introduction », art. cit., p. xxi.
20 Firmin A., De l’égalité des races humaines…, op. cit., 2005, p. 84.
21 Ibid., p. 95.
22 Ibid., p. 96.
23 Ibid., p. 126.
24 Cf. Gauthier Florence, L’aristocratie de l’épiderme. Le combat de la société des citoyens de couleur. 1789-1791, Paris, CNRS Éditions, 2007.
25 Leveque A., L’égalitarisme racial d’Anténor Firmin en 1885, op. cit., p. 61.
26 Retat L., « Introduction », art. cit., p. 7.
27 Renan E., Dialogues philosophiques, op. cit., p. 78.
28 Ibid., p. 146.
29 Moïse Claude (dir.), Dictionnaire historique de la révolution haïtienne (1789-1804), Montréal, Éditions Images/CIDIHCA, 2003, cité par Péan Leslie, Comprendre Anténor Firmin. Une inspiration pour le xxie siècle, Port-au-Prince, Éditions de l’Université d’État d’Haïti, 2012, p. 35.
30 Firmin A., De l’égalité des races humaines…, op. cit., 2005, p. 17.
31 Péan L., Comprendre Anténor Firmin…, op. cit., p. 76.
32 Cf. Firmin Anténor, M. Roosevelt, président des États-Unis et la République d’Haïti, New York/Paris, Hamilton Bank Note Engraving and Printing Company/F. Pichon et Durand-Auzias, 1905, p. 427.
33 Charlier-Doucet Rachelle, « Anthropologie, politique et engagement social. L’expérience du Bureau d’ethnologie d’Haïti », Gradhiva, no 1, 2005, p. 109-125, en ligne : http://gradhiva.revues.org/313.
34 Price-Mars Jean, Joseph Anténor Firmin, Port-au-Prince, Imprimerie du séminaire adventiste, 1978, p. 88.
35 Byron John Picard, « Quelques propositions pour l’étude de la genèse du discours duvalérien d’après le rôle attribué à une de ses sources : l’ethnologie haïtienne », in Cenatus Bérard, Douailler Stéphane, Pierre-Louis Michèle Duvivier et Tassin Étienne (dir.), Haïti. De la dictature à la démocratie ?, Port-au-Prince, Mémoire d’encrier, 2016, p. 128.
36 Byron John Picard, « La pensée de Jean Price-Mars. Entre construction politique de la nation et affirmation de l’identité culturelle haïtienne », in Byron John Picard (dir.), Production du savoir et construction sociale. L’ethnologie en Haïti, Port-au-Prince/Quebéc, Éditions de l’université d’État d’Haïti/Presses de l’Université Laval, 2014, p. 60-61.
37 Ibid., p. 89.
38 Dorismond Edelyn, « L’ethnologie haïtienne : le vodou et la paysannerie », in Byron J.P. (dir.), Production du savoir et construction sociale…, op. cit., p. 249.
39 Renault Matthieu, C.L.R. James. La vie révolutionnaire d’un « Platon noir », Paris, La Découverte, 2016.
40 Leveque A., L’égalitarisme racial d’Anténor Firmin en 1885, op. cit., p. 8.
41 Cf. précisions de Géloin G., « Introduction », art. cit., p. xiv-xv.
42 Manouvrier Léonce dans Revue philosophique de la France et de l’étranger, t. 21, 11e année, janvier-juin 1886, p. 180-183, in Leveque A., L’égalitarisme racial d’Anténor Firmin en 1885, op. cit., p. 111.
43 Péan L., Comprendre Anténor Firmin…, op. cit., p. 24.
44 Watson D., « De l’égalité des races humaines… », op. cit., p. 87.
45 Fluehr-Lobban Carolyn, « Anténor Firmin and Haiti’s contribution to anthropology », Gradhiva. Revue d’anthropologie et d’histoire des arts, no 1, 2005, p. 95-108, p. 7.
46 Géloin G., « Introduction », art. cit., p. xi-xii.
47 Ibid., p. xii.
48 Le livre a été traduit en anglais et introduit par Asselin Charles, The Equality of the Human Races. Positivist Anthropology, Champaign, University of Illinois Press, 2002.
49 Géloin G., « Introduction », art. cit.
50 Ibid., p. xiii.
51 Ibid., p. 46.
52 Ibid., p. 48.
53 Ibid., p. 52.
54 Cf. Clifford James and Marcus George E. (éd.), Writing Culture. The Poetics and Politics of Ethnography, Berkeley, University of California Press, 2010 (1re éd. 1986).
55 Saillant Francine, Kilani Mondher et Graezer Bideau Florence (dir.), Manifeste de Lausanne. Pour une anthropologie non hégémonique, Montréal, Liber, 2011.
56 Byron J.P., « Quelques propositions… », art. cit., p. 129.
57 À propos de la question de couleur en Haïti, voir Demesvar Delorme, La démocratie et le préjugé de couleur aux États-Unis d’Amérique, Bruxelles, Impr. de H. Thiry-Van Buggenhoudt, 1866 ; Id., La misère au sein des richesses. Réflexions diverses sur Haïti, Paris, F. Dentu, 1873 ; Price Hannibal, De la réhabilitation de la race noire et de la République d’Haïti, Port-au-Prince, Éditions Fardin, 1893.
58 Lyotard Jean-François, La condition postmoderne. Rapport sur le savoir, Paris, Éditions de Minuit, 1979.
59 Ibid., p. 7.
60 Chakarbarty Dipesh, Provincialiser l’Europe, Paris, Éditions Amsterdam, 2009, p. 164.
61 Ibid., p. 167.
62 Mbembe Achille, Sortir de la grande nuit, Paris, La Découverte, 2013, p. 68.
63 Ibid., p. 69.
64 Fanon Frantz, Peau noire, masques blancs, Paris, Seuil, 1952, p. 54.
65 Péan L., Comprendre Anténor Firmin…, op. cit., p. 186.
66 Ibid., p. 223.
67 Mignolo Walter D., La désobéissance épistémique. Rhétorique de la modernité, logique de la colonialité et grammaire de la décolonialité, Berne, Peter Lang, coll. « Critique sociale et pensée juridique », no 2, en ligne : https://www.academia.edu/11799835/La_d%C3%A9sobeissance_%C3%A9pist%C3%A9mique.
Auteur
Chercheuse en philosophie et sciences politiques et docteure en philosophie et sciences politiques au Laboratoire de changement social et politique (LCSP) de l’université Paris Diderot. Docteure en philosophie, elle a été postdoctorante pour le projet Sorbonne Paris Cité « Écrire l’histoire depuis les marges » (EHDLM). Rattachée au Centre Marc Bloch à Berlin et à l’université européenne Viadrina, elle a bénéficié d’une bourse de recherche doctorale dans le cadre du projet européen Tolerace. Sa thèse est actuellement en cours de publication aux éditions du CNRS. Elle porte sur la « question noire » en France et sur une critique politique et phénoménologique des catégories de l’identité et de la race. Elle aborde également ces questions à partir d’une perspective transatlantique depuis Haïti. Elle a notamment publié « Être présent au monde. Prise de parole et “subjectivation politique noire” en France » (Raisons politiques, no 68, 2017) ; le numéro 15, Politique du corps (post) colonial. Perspectives croisées Europe-Afrique-Amérique, codirigé avec Malcom Ferdinand, de la revue Asylon(s) en 2018 ; « Migration et insularité haïtienne : les enjeux de L’autre face de la mer de Louis-Philippe Dalembert », dans un ouvrage dirigé par Buata Malela à paraître aux Éditions du Cerf.
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