Le sens de la vue et la vision intérieure d’après Charles de Bovelles
p. 233-245
Texte intégral
1Une tradition scientifique ou naturaliste, qui remonte à Aristote1, sinon aux "physiciens" du 6e siècle avant J.-C. – tout au moins en Occident – fait des organes des sens un équipement anatomo-physiologique permettant aux animaux, et singulièrement à l’espèce humaine, d’appréhender le monde extérieur en en recevant des impressions. Mais une autre tradition, que l’on pourrait appeler symbolique, allégorique et morale, s’est également établie dans la littérature religieuse, vétéro- ou néo-testamentaire, et plus généralement dans les écrits spirituels, et cela dans toutes les civilisations du monde, sous les formes les plus diverses de l’expression artistique ou philosophique. Même Aristote avait été illustré par des figures anthropomorphiques des cinq sens2, la vue étant associée à un jeune homme tenant un miroir, un instrument de musique figurant le son, une fleur l’odorat, un fruit le goût et le toucher étant lui-même représenté par une harpe (peut-être en raison du fait que le mot toucher, tout au moins en français, désigne la manière dont on pince ses cordes). Bientôt, sous l’influence d’un christianisme médiéval austère – mais ne suivait-il pas l’enseignement du sacrement d’extrême-onction ? – les cinq sens étaient appréhendés comme la porte ouverte aux vices et aux diverses formes de concupiscence. Un poème médiéval, que rappelle Cari Nordenfalk dans un article consacré à l’allégorie des sens3, nous met en garde contre leur danger :
Sensus sunt quinque quos custodire debemus
Visus et auditus, contactus, gustus odorque4
2On sait le rôle que l’emblématique du XVIe et XVIIe siècles joua sur ce qui était devenu à la fois un lieu commun moral (ou moralisateur) et un "topos" artistique. Les séries des "Cinq sens"5 ornèrent bientôt des tableaux d’intérieur, des tapisseries de palais, et bien entendu, d’un bout à l’autre de l’Europe, des recueils d’emblèmes. Il est piquant de constater que si la représentation des sens, avec tous les objets et les éléments décoratifs qui les mettent en évidence, est parfois "neutre", le plus souvent, comme dans la série des hollandais Martin de Vos ou Crispin de Passe6, ils illustrent une joie de vivre, qui peut aller jusqu’aux limites (franchies) de l’érotisme ou de la débauche. On comprend la méfiance des théologiens et des confesseurs à l’égard des sens, et surtout de l’usage qui peut en être fait.
3Parmi les cinq sens traditionnels, le Moyen-Age et la Renaissance ont généralement établi une hiérarchie, à la fois sur le plan cognitif et sur le plan moral. Généralement les sens les plus "charnels" sont le goût et l’odorat, les plus "incorporels" la vue et l’ouïe (avec, selon les auteurs, une compétition entre ces deux sens). Quant au toucher, il est parfois considéré comme le sens de toutes les concupiscences charnelles, parfois comme l’instrument de l’homme artisan ou artiste – homo artifex –, surtout quand il est rapporté à cet instrument ductile et intelligent, qui n’a pas son équivalent dans toute la gent animale : la main humaine.
4Bien entendu, les philosophes ont établi, dans les doctrines ou les systèmes les plus divers sur les rapports de l’âme et du corps (sans donner nécessairement au premier de ces termes une signification métaphysique ou religieuse) que le fonctionnement des sens externes (les cinq sens traditionnels) n’était pas autonome, mais dépendait du fonctionnement de la "machine" animale (ou humaine) toute entière. Mais la personnification ou l’allégorisation des sens – y compris la substitution de la figure féminine à la figure masculine, que l’on trouve par exemple dans la Nef des folles de Badius7 – conserve un caractère si prégnant que, pendant longtemps encore, chacun des cinq sens sera étudié comme s’il avait une certaine autonomie.
5C’est dans son Liber de sensu8, publié en 1510-11 à Paris, chez Henri Estienne, dans un vaste recueil de divers traités théologiques, philosophiques ou mathématiques, qui comprend, entre autres, un Liber de Sapiente9 et un Liber de Intellectu10, que Charles de Bovelles décrit chacun des cinq sens. Il ne recourt pas une allégorisation anthropomorphique ou animale, mais à une curieuse représentation de caractère géométrique. Il faut savoir avant tout que, dans le De Sensu, Bovelles définit très largement la relation entre l’homme et l’univers, ou entre le microcosme et le macrocosme11. Celui-ci est l’objet spécifique de la perception sensible de l’homme. D’autre part, l’homme complète et parachève la création divine de l’univers : il est le reflet du "grand monde" mais un reflet intelligent. L’univers a été construit par Dieu pour servir les intérêts de l’homme, et tout ce que l’univers contient est orienté vers le salut de l’homme. Telle est la conception optimiste ou finaliste de l’univers (c’est-à-dire de la création de Dieu ex nihilo) qui est sous-jacente aux analyses boviliennes relatives à l’équipement sensoriel de l’homme. Il y a plus : chaque élément du macrocosme a son correspondant précis dans un élément du microcosme, comme il l’a parfaitement décrit en illustrant son propos par un schéma très clair figurant les "ressemblances entre les planètes" et les "humanae cognitiones"12. Reportons-nous d’abord à ce schéma intitulé "Figura similitudinis planetarum et humanarum cognitionum"13.
6Sur une première ligne, les trois planètes Saturne, Jupiter et Mars. Elles gouvernent (voir la seconde ligne) respectivement l’imagination, l’ouïe et la vue. Une quatrième planète (qui occupe, sur la première ligne, une situation privilégiée) est le soleil, auquel correspond (2e ligne) la raison. Les planètes 5, 6 et 7 (Vénus, Mercure et la Lune) gouvernent respectivement l’odorat, le goût et le toucher. Sans aller plus loin, on constate que l’ouïe et la vue, et ce sens intérieur qu’est l’imagination, sont hiérarchiquement supérieurs à l’odorat, au goût et au toucher, comme les planètes "viriles" l’emportant sur les planètes "femelles", Mercure occupant une sorte de situation médiane entre ces deux catégories bien distinctes. D’ailleurs la troisième, ligne du tableau précise bien l’opposition entre les planètes "superiores" et les planètes "inferiores". Quant aux sens "supérieurs", ils sont qualifiés de "liberales" et d’"honesti", tandis que les trois sens "inférieurs" sont "illiberales" ou "serviles". Autrement dit, les uns sont du côté de la raison, de l’esprit ou de l’intellect, et sont surtout considérés dans leur fonction cognitive (ce que retiennent d’ailleurs dans la plupart des langues des verbes tels que "entendre" ou "voir" qui s’appliquent souvent à la connaissance ou à un savoir, sinon à un jugement), tandis que les autres sont relégués à leur rôle de serviteurs charnels, assez semblables, en somme, à ce qui se passe dans le monde animal, qu’il s’agisse du flair ou de l’odorat du chien ou des papilles gustatives du rat. Les premiers sont "alta petentes", ils visent les régions supérieures du monde ou de l’être (on se souvient de la remarque de Sénèque sur l’implantation des yeux et la mobilité de la tête humaine, permettant précisément de viser "altiora"), alors que les seconds sont considérés comme "inferiora petentes" (on songe, entre autres, au groin du porc tourné vers le bas et se complaisant dans les immondices). Rappelons-nous enfin ce passage du De Sapiente, finement commenté par Cesare Vasoli14 dans son étude sur les thèmes "solaires" de cet ouvrage, où il est écrit que Dieu, après avoir achevé la construction de l’univers, a voulu placer au centre de tout un "oeil de l’univers", irradié des feux célestes, une sorte de "spectateur" illuminé de la splendeur du monde intelligible supracéleste, qui fût tout à la fois l’image du monde et la paix et l’harmonie du tout. Cet "oeil" ou ce "spectateur" est bien entendu l’homme. Nous pouvons désormais examiner de près les paragraphes du De Sensu ou chacun des sens est décrit et représenté.
7Il faut rappeler que, pour Bovelles, et selon une tradition néo-platonicienne15 bien établie, l’homme, ou microcosme, est le reflet du monde, ou macrocosme. Et il fait du sens extérieur ou externe (sensus exterior) le lien ou la copule entre le grand et le petit monde (De Sensu, d2v°)16. De même que le corps naturel est le véhicule de l’âme, de même les sens servent en quelque sorte de tremplin à l’exercice de l’intellect : "hominis intellectus (quae est suprema et spiritalis pars animi) haud per se, sed per sensus et in ipsis sensibus invectus” (ibid.). Mais la présence de l’homme au monde diffère, selon qu’il lui est relié par les sens extérieurs ou que s’accomplissent en lui les opérations du sens interne (sensus interior). Alors que les opérations de sens externe sont inconsistantes et s’exercent dans l’instant, celles du sens interne sont fixes et permanentes (cap. 2, d2v°). Le sens interne est comme la mémoire du sens externe, et son siège est profond et caché ("profundam et abditam"). "Par les sens externes, précise encore Bovelles, s’introduisent des "espèces" (species) sensibles, qui sont conservées et retenues par le sens interne". Et il répartit ainsi le rôle de chacune de ces catégories en fonction des futures opérations de l’intellect : l’intelligence pratique dépend des sens externes, l’intelligence réflexive ou spéculative du sens interne (cap. 2,1, d3r°).
8C’est au chapitre 10 de son traité que Bovelles entame l’analyse de la fonction des cinq sens externes, auxquels correspondent cinq espèces de connaissances. Mieux connus et plus manifestes que les sens internes, ils sont les signes sensibles des sens internes, qui mettent en branle les "puissances de l’âme" (animae vires). Le toucher (tactus) a pour siège le corps tout entier, mais c’est particulièrement dans les mains que se concentrent sa puissance et son opérativité ; le goût a pour siège la langue, l’odorat le nez, la vue les yeux, et l’ouïe les oreilles. Bovelles établit ensuite sa gradation, qui va "ab ignobiliore ad praestantissimum" (disons de l’inférieur au supérieur). Mais cette "infériorité" ontologique du toucher, qui est le sens "le plus éloigné" ou "le plus extérieur" (extimus) ne l’empêche pas d’avoir un champ d’action universel, puisqu’il peut être en contact avec tous les éléments tangibles de l’univers : c’est pourquoi Bovelles l’appelle "sensus mundi", le sens du monde, et que dans le tableau ou il hiérarchise les connaissances, en partant de la connaissance sensible, et en s’élevant, par l’imagination (imaginatio), la raison (ratio), l’intellect (intellectus) jusqu’à l’esprit (mens), il situe, en dernière position la triade : sensus – tactus – manus. Le sens du toucher est comme le "prodromus omnium sensuum", c’est-à-dire une sorte d’éclaireur. Le goût, comme la langue, est plus caché, la langue ne se déployant que dans la cavité formée par la bouche et le palais, et dans "l’air interne", et Bovelles la fait assez curieusement correspondre à l’imagination, puisque, dans d’autres passages17, l’imagination est assimilée au sensus interior ou sensus communis, que la philosophie appelle traditionnellement des images mentales. Disons que les sensations gustatives ne pouvant pas être conceptualisées, elles ont plus d’affinités avec cette "puissance" toute réceptive. Le statut de l’odorat ne manque pas non plus de piquant : comme le nez est situé entre les yeux et la bouche, écrit Bovelles, occupant une position médiane sur le visage, le sens de l’odorat doit correspondre à la puissance cognitive médiane entre la sensibilité et l’esprit, c’est-à-dire à la raison. Etonnante justification qu’il donne de cette analogie : "De même que la raison, abandonnant le monde et le corps, se rassemble et se recueille dans l’âme ("sese intra animam colligit ac recipit"), de même l’odorat est plus étroitement attaché et lié plus intimement au corps que le goût..."18. Pétition de principe qu’une géométrisation ultérieure semblera (tout au moins à ses yeux) justifier.
9Enfin le sens de la vue, qui est lié à l’intellect (comme il a été démontré dans le Liber de Intellectu), lequel est défini comme "une saisie soudaine et passagère des espèces intelligibles", qui, après avoir séjourné un moment "in intellectu", sont déposées dans la mémoire : la vue est le sens et la perception de la lumière (luminis sensus et perceptio)19. "L’origine de la lumière, dit-il encore, est instantanée et soudaine ; quant aux rayons visuels, ils se propagent instantanément à partir des yeux, selon l’avis le plus général"20. Nous savons que cet avis général ("ut plerique sentiunt") d’une projection des rayons visuels en direction des objets dont ils capteraient les "espèces visibles" est parfaitement erroné, et qu’à l’époque de Bovelles, Léonard de Vinci était à peu près le seul à avoir inversé cette théorie et énoncé que la propagation de la lumière (ou des "espèces lumineuses") se faisait à partir de l’objet extérieur en venant frapper l’appareil optique, et plus précisément en projetant sur la rétine une image inversée de l’objet.
10Au sommet de cette hiérarchie se situe l’ouïe, correspondant à cette "suprema et praestantissima animae cognitio" qu’est l’esprit, suivant ici point par point la théorie ficinienne de l’intellect et de l’esprit21 : théorie qu’il a longuement exposée dans le De Sapiente et qu’il reprendra dans ses Conclusiones Theologicae22. Le nerf de l’analogie reste le même : de même que l’esprit est la connaissance la plus cachée ou la plus secrète, de même l’ouïe est de tous les sens le plus caché. Ce qui aboutit à une curieuse schématisation des quatre sens dont le siège se trouve sur le visage : une pyramide23 dont la pointe, vers le bas, est marquée par la langue ; plus haut, les deux narines, fort rapprochées l’une de l’autre ; plus haut, les yeux, encore davantage éloignés l’un de l’autre ; enfin, à la base de cette pyramide inversée, les oreilles, encore davantage éloignées l’une de l’autre ! Mais cette "pyramide des sens" se complique, par l’intervention d’angles obtus, droits ou aigus. Bovelles ne considère que les trois sens dont les organes vont deux par deux : les oreilles, les yeux, les narines du nez. L’angle le plus aigu est celui de l’odorat, entendons que le champ de perception olfactive est limité, réduit à un espace confiné (il est développé chez l’animal, par exemple le chien ou le porc, qui hument les odeurs près du sol) ; l’angle le plus obtus (obtusissimus) – que nous appellerions angle linéaire, est celui des oreilles (qui nous permettent d’entendre des sons ou des bruits de tous les points de l’espace) ; quant à la vue, elle correspond à un angulus rectus, ou angle droit : c’est ce que nous appelons le champ visuel. Inutile de souligner l’erreur consistant à limiter ce champ à un angle droit, alors que nous savons que, variable selon la disposition des yeux sur le visage, il est nettement supérieur à 90°.
11Bien entendu, Bovelles n’a aucune idée précise de l’organisation interne des appareils auditifs, optique ou olfactif, et il faut prendre avec une grande réserve des formules comme "le plus caché", "le plus secret". Ce qui est plus intéressant pour notre propos, c’est la liaison qu’il établit entre sens externes et sens internes et, puisque nous avons choisi la vue, les rapports entre la vision externe et la vision intérieure ou interne.
12Il faut d’abord rappeler la division tripartite des sens que Bovelles établit en fonction de critères éthiques : de même qu’il y a des biens utiles, des biens délectables et des biens honnêtes, de même le toucher et le goût sont des biens utiles ("précurseurs" ou "juges naturels" qui avertissent d’un obstacle ou d’un danger possible), l’odorat est un bien "délectable" – souvent lié à des passions ou à des désirs purement animaux – alors que l’ouïe et la vue sont élevés au rang de biens honnêtes, comme étant liées aux arts libéraux24, à la musique, aux belles-lettres, aux connaissances scientifiques. Ce sont des sens qui ne sont pas liés au corps et encore moins charnellement que l’odorat, le goût, voire le toucher. Au XXe siècle, le psychologue Pradines25 inventera à leur sujet l’expression de "sens à distance". Certes, Bovelles s’inscrit, ici encore, dans une tradition néo-platonicienne : il n’évite pourtant pas la pétition de principes car chacun comprend – et les confesseurs ne s’y trompaient pas – que l’oreille est aussi l’organe qui se prête aux confidences les plus choquantes ou aux chansons les plus obscènes, et que les yeux recherchent souvent et même dévorent dans une curiosité des plus malsaines, les spectacles les plus dégradants et les moins "honnêtes" ou "libéraux" qui soient26. Comme on le disait au début, tous les sens peuvent participer à des "délectations" malhonnêtes, pour la bonne raison que c’est l’esprit – l’esprit seul –, et non le corps ou les organes sensoriels, qui est responsable de l’usage – bon ou mauvais, inutile ou nuisible, humain ou purement animal – qu’il en fait.
13Sans avoir oublié, bien entendu, qu’il avait placé la vue en seconde position parmi les cinq sens externes, c’est de cet organe qu’il part dans le De Sapiente pour établir sa théorie de la vision intérieure. Elle est en fait profondément inspirée de saint Augustin, du pseudo-Denys27 et de la tradition néo-platonicienne, de Plotin à Ficin en passant par Nicolas de Cues.
14Que lisons-nous en effet chez saint Augustin ? Dans un chapitre des Confessions28, ou il oppose la concupiscence des yeux charnels à la lumière intérieure, il écrit :
15"O lumière, que voyait Tobie quand, privé de ces yeux du corps, il enseignait à son fils la route de la vie et l’y précédait... Lumière, que voyait Isaac, quand, malgré le voile pesant que la vieillesse avait abaissé sur ses yeux de chair, il mérita, non de bénir ses enfants en les connaissant, mais de les connaître en les bénissant. Lumière que voyait Jacob quand, pris par les yeux, lui aussi, à cause de son grand âge, il projeta les rayons de son coeur tout illuminés sur les générations du peuple futur, préfiguré dans son fils !... La vraie lumière, la voilà : elle est une, elle ne fait qu’un avec tous ceux qui la voient et qui l’aiment..."
16Dans les épîtres pseudo-dionysiennes, dans la Hiérarchie céleste et la Hiérarchie ecclésiastique29, on trouve de nombreux textes – que connaissait certainement Bovelles, et qui lui avaient été révélés par son maître du Collège du Cardinal Lemoine, Jacques Lefèvre d’Etaples – allant dans le même sens que le passage des Confessions. L’oeil le plus pénétrant, celui que l’on peut à bon droit assimiler à l’intellect, est l’oeil "intérieur". Intuition qu’avaient déjà les anciens grecs quand ils faisaient de leurs meilleurs et plus profonds devins – Calchas, Tirésias – des aveugles. On connaît le paradoxe de la tragédie d’Oedipe, que n’ignorait pas davantage Bovelles : Oedipe, le voyant (pourvu de ses yeux de chair), qui poursuit avec ardeur une enquête que son intelligence et ses yeux ne lui permettront pas de conclure30 ; et Tirésias, l’aveugle, mais surtout le clairvoyant, qui sait et qui prévoit. Toute la théologie mystique pourrait être invoquée ici, mais c’est au seul Bovelles que nous nous adresserons désormais.
17Au chapitre L du De Sapiente31, Bovelles opère une chasse spirituelle (ou plus exactement "une chasse au sage" – venatio sapientis – à partir d’une analogie avec l’oeil de chair, le soleil et la lune. Les yeux de chair ne voient qu’à moitié. Il écrit :
18"Les deux yeux sont en vérité deux sphères rigoureusement parfaites : pourtant ils ne voient pas totalement ni de toute leur sphère, mais ce n’est que selon la moitié de celle-ci qu’ils voient le monde par la lumière et la couleur. De l’autre moitié, qui les fixe en la tête et qui regarde à l’intérieur de l’homme, ils sont naturellement aveugles et ne sont point faits pour percevoir les rayons lumineux, ni pour être frappés par les espèces des couleurs. Nos yeux de chair ne sont donc par nature pas moins aveugles et lucides que sensibles à la lumière. Ils vivent autant dans les ténèbres que dans la lumière..."
19Arrêtons-nous un instant sur cette étrange description des organes de la vue, orientée vers une conclusion d’ordre métaphysique ou spirituel, et que renforce encore un petit dessin (à la page 299 de l’édition Magnard) : un carré, dont le côté supérieur, interrompu en son milieu par deux petits cercles concentriques avec un point noir au centre, correspond (côté inférieur) à un cercle noir intitulé "Humanus oculus". Les cercles et le point noir du haut représentent le "Mundanus oculus". Les côtés latéraux portent en leur milieu deux cercles concentriques dont la portion inférieure est noire et la portion supérieure blanche. La légende porte (dans la partie supérieure) "Videntes in mundo”, et (dans la partie inférieure) "Videntes in homine". Cette bipartition de l’oeil humain, mi-aveugle, mi-voyant, correspond à un réalisme naïf et simpliste, ou plutôt à une conception anatomique et physiologique de l’oeil qui ignorait tout du mécanisme de la vision (et qui ignorait notamment les travaux et la théorie de Léonard de Vinci32). Nous attendrions plutôt, de la part d’un philosophe ou d’un physiologiste développant l’idée d’une imperfection des sens, et notamment de celui de la vue, une remarque sur la portée ou les limites spatiales de la perception. C’est ainsi que, étant donné l’implantation des deux yeux sur le visage humain, le champ visuel de l’homme est limité à un espace compris dans un angle qui ne saurait dépasser 90 à 100 degrés33. L’oeil humain n’est pas doué de cette vision "panoptique" dont rêvait Leibniz34 et qu’il attribuait à Dieu, tandis que les humains étaient en quelque sorte réduits à cet "oeil-de-boeuf" ou à ce hublot ne voyant de l’univers qu’une portion limitée (un "point de vue"). Ce n’est pas non plus l’oeil circulaire de la prison du "Panopticon" analysé par Michel Foucault au début de Surveiller et punir35. Mais revenons à Bovelles et à sa description de l’oeil humain, "aussi aveugle que voyant", en dépit de son affinité avec l’intellect.
20"Des demi-sphères extérieures seulement, ils voient et reçoivent lumière et figures visibles ; des demi-sphères internes, en revanche, qui les rattachent à la tête de l’homme, ils n’ont nullement la faculté de voir, mais sont aveugles et revêtus de ténèbres..."36
21Aussi se livrait-il à une hypothèse purement spéculative, pour justifier sa distinction entre le "mundanus oculus" et l’"humanus oculus", que Pierre Magnard a raison de traduire par "l’oeil pour le monde" et "l’oeil pour l’homme", au lieu de la traduction habituelle d’oeil du monde et d’oeil de l’homme. Cette hypothèse est le raccordement des deux demi-sphères en une sphère complète translucide qui verrait de partout (unum oculum totum videntem). C’est précisément cet oeil qu’il appelle mundanum, ce terme étant l’équivalent de l’adjectif totum, le monde exprimant la totalité des choses visibles. Cette vision totale, c’est bien celle qui est le fait de l’oeil pour le monde. En revanche, et symétriquement, si les deux demi-sphères aveugles sont raccordées, nous avons une sphère entièrement aveugle. Et ce globe oculaire qui ne voit pas, ou qui ne voit rien, c’est ce qu’il appelle oculus humanus, c’est-à-dire l’oeil pour l’homme.
22On devine à quoi tend ce paradoxe, et comment le philosophe et observateur des données anthropologiques va se muer en un mystique, ou tout au moins en un penseur spiritualiste dans la lignée du pseudo-Denys, de Nicolas de Cues et des théologiens chrétiens et néo-platoniciens : malgré ses hautes qualités, l’oeil humain, qui ne perçoit que les réalités sensibles, ne voit en réalité rien du tout, ou rien qui vaille. C’est l’oeil des prisonniers de la caverne de Platon37 qui ne percevait que des ombres ou des images, alors que les prisonniers (qui ignoraient leur état) les prenaient pour des objets réels. Aveugles au monde avec nos yeux de chair, nous devons chercher, par une vision intérieure, à entrer en contact avec le monde réel. Et surtout il devra opérer une véritable conversion, un retournement sur lui-même pour se connaître véritablement. Mais écoutons encore Bovelles, dans ce passage capital du De Sapiente38 :
23"La nature assiste donc l’homme en donnant d’emblée clairvoyance (efficit illustrem) à son oeil tourné vers le dedans, le dehors et le monde, et en mettant en la présence de celui-ci et à sa portée la totalité du monde. Mais dans la mesure ou elle a laissé aveugle le regard intérieur (internam aciem), et postérieur de l’homme (posteriorem et humanam), elle a négligé celui-ci et l’a voulu pauvre, de telle sorte qu’il incombe à ses propres moyens et à ses efforts de transmettre au second oeil la lumière mendiée auprès du premier et d’y voir ainsi par les deux yeux... L’homme, à qui le monde est initialement offert en sa lumière (objicitur illucescitque mundus), fait ensuite retour du monde sur lui-même (ex mundo redeat in se ipsum) ; de la lumière et de la science première du monde, il apprend à tirer sa lumière et sa science propre".
24Ainsi nous avons affaire à la fois (et paradoxalement) à une conversion – n’allons pas jusqu’à dire un "arrachement", un raptus, comme celui de Paul de Tarse sur le chemin de Damas39 – et à un retour du monde sur soi, la lumière venant de l’extérieur vers l’intérieur, du sensible à l’intelligible, de la richesse à la pauvreté (puisqu’il est question d’une lumière "mendiée"), cette conversion ou ce retour (comme on voudra), ce repli sur soi, n’est pas sans nous rappeler la mise en pratique socratique du "Connais-toi toi-même" de l’oracle delphique, et le mot célèbre selon lequel Socrate aurait fait descendre la philosophie du ciel sur terre. Ici, le ciel, c’est le monde extérieur (totus mundus), et la terre, c’est le vaste domaine de l’homme intérieur.
25Parlant de l’homme en général, Bovelles a surtout en vue (si l’on peut dire !) l’homme pleinement homme, à savoir le sage. C’est lui dont l’oeil intérieur, c’est-à-dire le demi-globe oculaire qui est tourné vers le dedans, saura le mieux opérer la conversion (ou la transformation) d’une vision interne ou obscure (obtenue par l’"emprunt" de quelques rayons lumineux à l’oeil extérieur) en une vision intérieure, qui ne devra plus rien au sensible : le visus s’est converti en intellectus (nous serions tenté d’écrire, en anticipant sur le système cartésien, en intuition intellectuelle). La vision peut alors s’opérer, l’oeil ou les yeux fermés. Ecoutons encore Bovelles en sa conception singulière, qui ne recule devant aucune image audacieuse pour parvenir à ses fins métaphysiques :
26"Comprends donc que l’oeil charnel se libère de son insertion naturelle dans la tête, se détache du sujet et se rend libre comme s’il se soutenait lui-même dans l’atmosphère. Cet oeil est certainement une claire image de l’entendement contemplatif achevé (contemplativi consummatique intellectus). Celui-ci voit en effet toutes choses (omnia videns), lui qui peut regarder, non seulement par la moitié, mais aussi par la totalité de son globe les réalités externes et internes, qui se passe désormais du service des sens et qui comprend spontanément et de lui-même toutes choses en se portant et en se soutenant lui-même"40.
27Voilà donc ce qu’est pour Bovelles la vision panoptique : une vision purement intellectuelle, qui apparente l’esprit de l’homme à l’esprit de l’ange, à ceci près que la pesanteur charnelle peut obscurcir chez le premier cette vision, alors qu’elle n’existe pas chez le second. Remarquons toutefois que cet entendement, ou intuition intellectuelle, est capable de saisir aussi bien les réalités extérieures que les réalités intérieures (quae extra et quae intus sunt). Cela fait problème, car Bovelles ne s’exprime pas sur le statut ontologique et sur le mode d’appréhension de ces réalités externes. Nous avons dépassé le plan du sensible, puisque l’oeil charnel s’est libéré du corps et que l’entendement agit selon son propre dynamisme. Il ne s’agit donc pas d’objets sensibles – ce que l’on entend ordinairement par l’expression de monde extérieur –, mais bien de réalités intelligibles. Pourquoi dès lors ne pas invoquer, en une fidélité à la lettre et à l’esprit de Platon, les Idées, c’est-à-dire ces réalités purement intelligibles, éternelles, connaturelles à l’âme humaine, dont les objets sensibles que nous percevons avec et par notre oeil charnel, ne sont que les images éphémères, inconsistantes, évanescentes, fallacieuses ? On ne reviendrait, une fois de plus, au mythe de la caverne et à la théorie, longuement exposée dans la République, le Phédon ou le Phèdre, des Idées.
28Un dernier point, qui marque toujours l’attachement passionné, sinon obsessionnel, de Bovelles, au schéma du microcosme et du macrocosme : l’intervention dans le débat des deux grands luminaires. Nous lisons :
29"Les images, que nous avons données, du sage et de l’insensé, peuvent être trouvées clairement dans le soleil et dans la lune. La lune, en effet, est semblable à l’oeil fixé en la tête, qui ne voit qu’avec la moitié de son globe, tandis qu’il est obscur et aveugle de l’autre moitié ; elle est semblable aussi à l’entendement pratique (practico intellectu) et inachevé, qui n’est présent qu’au monde, non à l’homme. Le globe lunaire en vérité ne reçoit la clarté de Phébus jamais qu’en sa moitié ; il est impossible qu’il soit jamais illuminé en totalité, bien qu’il puisse parfois être privé de clarté en toute son orbe. Le soleil en revanche représente l’oeil libre et l’entendement contemplatif ; continuellement il brille de toute son orbe et jamais n’est privé de sa lumière originelle..."41
30La suite du développement consiste en un éloge du soleil, "oeil du monde" (on songe encore à l’allusion de Platon au Soleil, assimilé à l’idée du Bien et à un entendement divin) et à ses variations sur cet entendement contemplatif ou une vision intérieure, dans la pure tradition, plusieurs fois évoquée, des néo-platoniciens jusqu’à Marsile Ficin (et au-delà du philosophe de Florence). Que lisons-nous en effet au chapitre 3, Livre IX, de la Theologia platonica42 ?
31"Ergo quid Solis est lumen ? Umbra Dei ? Ergo qui Deus est ? Sol Solis est Deus. Solis lumen est Deus in corpore mundi. Deus est Sol super angelicos intellectus. Hic tuus est, o anima, his tuus est Deus. Hujus umbram tibi ostenderat phantasia. Talis umbra Dei est, ut sensibilium pulcherrima sit. Qualem esse Dei lucem existimas ? Si tantum Dei lucet umbra, quantum lux Dei fulget ? Amas lucem Solis ubique prae caeteris, immo solam. Ama Deum solum, solam, o anima, lucem"43.
32Le texte de Bovelles, en particulier le chapitre L (l’avant-dernier du Livre du Sage) ne dit pas autre chose, au point qu’il semble avoir transcrit certains paragraphes de Ficin, comme on peut trouver également chez Pic de la Mirandole, dans son Heptaplus44, la même et traditionnelle analogie entre les deux luminaires. C’est aussi à Pic de la Mirandole que Bovelles pourrait emprunter – ou emprunte, en vérité – cette idée que la nature ou Dieu a créé l’homme en le laissant imparfait et inachevé, en lui fournissant les capacités ou une potentialité d’amélioration de sa nature propre, ou de parachèvement de son être45. La nature a permis à l’homme de contempler les choses extérieures, en lui faisant ouvrir son oeil sur le monde, mais elle lui a dénié le pouvoir de se rechercher lui-même et de voir en son esprit. C’est donc à lui, et à lui seul, qu’il appartient de concentrer la totalité de ses forces vers ce but unique, qui consiste à faire dériver la lumière de l’oeil "externe" vers l’oeil "interne", autrement dit, de lui faire opérer cette conversion (au sens matériel mais surtout symbolique) : à partir de la connaissance et de la lumière du monde, l’homme doit se tourner vers sa propre lumière et vers sa propre science ou connaissance de soi.
33C’est Bovelles auquel nous accorderons les derniers mots, d’autant plus qu’après avoir invoqué saint Denys (entendons le pseudo-Denys l’Aréopagite) il prend congé du sage, qui a fait l’objet de toute sa quête, et termine ainsi son ouvrage :
34"L’homme de culture (studiosus Homo) est la lumière et l’éclat de l’homme de nature (naturalis Homo) ; par lui, l’esprit, qui, au commencement vit dans les ténèbres, nait à la lumière, à la clarté et à la science universelle. "Elève donc, homme, comme nous en convainc saint Denys, en les tournant vers le haut les coeurs ouverts à la connaissance et capables de voir. Reconnais le père des lumières, chez qui nait et prend sa source tout rayonnement". Et ne troque jamais, contre ce qui n’est pas, l’être véritable : de celui-ci la sagesse authentique, parfaite et achevée est la connaissance savoureuse et parfumée"46.
Notes de bas de page
1 Voir notamment ses Parva naturalia et le De sensu et sensato (voir G. LACOMBE, Aristoteles latinus, Rome, 1939).
2 A cet égard, et en dépit du caractère objectif et scientifique de ses descriptions et de ses analyses, il n’établit pas de continuité véritable entre les animaux – même les mammifères et les "gros” animaux – et l’homme.
3 "The Five Senses in late medieval and Renaissance Art", Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, London, vol. 48,1985, p. 1-22.
4 H. WALTER, Carmina medii aevi posterions latina, Gottingen, 1959 ff., I, n° 1752a, II, n° 30823a, 33819a.
5 Ce topos (dans tous les sens du terme, géographique, rhétorique, didactique) se rapporte à la veine emblématique issue des Emblemata d’Alciat, puis de l’Iconologia de Cesare Ripa.
6 Martin de Vos (1532-1603) fait aussi partie de la grande école de peintres et de graveurs hollandais, qui firent le voyage d’Italie, mais qui conservèrent leur génie flamand. Crispin de Passe (ou de Pas) né vers 1537 en Zélande, enseigne le dessin à l’Académie Pluvinel. La plupart de ses recueils de gravures furent publiés après sa mort. On pourrait citer encore Henri Goltzius, Théodore de Bry, Adrien Collaert, et bien d’autres.
7 Badius a écrit ce texte en latin (Stultiferae naves, Paris, Th. Kerver, 1500/1501), le laissant traduire en français par ses imprimeurs (voir Ph. RENOUARD, Bibliographie des impressions et des oeuvres de Joss Badius Ascensius, imprimeur et humaniste, 1482-1535, Paris, 1908, t. I, pp. 150 sqq. Voir aussi La Nef des folles – Stultiferae naves – de fosse Bade. Reproduction de l’édition princeps, intr. Charles BENE, éd. et trad. Odette SAUVAGE, Grenoble, 1979.
8 Voir J. M. VICTOR, Charles de Bovelles. An intellectual biography, Genève, Droz, 1978, THR CLXI, passim, notamment pp. 118-119.
9 Voir l’édition bilingue (latin et trad. française) de Pierre MAGNARD : Charles DE BOVELLES, Le Livre du Sage, Paris, Vrin ("De Pétrarque à Descartes" XLII), 1982.
10 Ce traité est le premier du recueil publié par Henri Estienne, le 1er février 1510/11.
11 Voir VICTOR, op. cit., p. 119. De Sensu, chap. 20. Il y a de la vie dans les éléments comme dans l’homme, les qualités de celui-ci sont référées aux différentes parties de l’univers. Autrement dit, chaque faculté de l’homme, qu’elle soit intellectuelle ou sensible, trouve son correspondant dans le macrocosme, et inversement chaque forme du monde sensible à sa contre-partie dans le microcosme (De Sensu, f. 41v).
12 Chap. XI (Comparaison entre le sage, le soleil et les planètes).
13 Ibid., p. LL5.
14 "Note sur les thèmes "solaires” dans le De Sapiente", Actes du colloque international de Noyon, Charles de Bovelles en son cinquième centenaire, 1479-1979, Paris, Ed. de la Maisnie, 1982, p. 116.
15 Voir par exemple Marsile Ficin ou – bien qu’il se défende de se rattacher à une quelconque tradition antique – Paracelse.
16 Cap. II Interioris et exterioris sensus differentie.
17 Voir le De Sapiente, le De Sensu, le De Intellectu, passim. Pour saint Augustin, l’imagination est aussi le sensus internus.
18 De Sensu, e 3r° (f. 31r°).
19 Ibid., f. 31r°.
20 Ibid., f. 31r°-v°
21 Voir, entre autres, sa Theologia Platonica, Livre IX.
22 Paris, Badius, 1515.
23 De Sensu, chap. XI, f. 32v° (voir le schéma).
24 BOVELLES, dans le chap. X, 6 du De Sensu, renvoie au Liber de Intellectu. Voir De Sensu, f. 31r° et v°.
25 Voir son Traité de Psychologie, Paris, PUF, 1953 (3e édition).
26 Sur ces péchés facilités ou provoqués par les sens, et notamment celui de la vue, voir H. C. LEA, A History of Auricular Confession, Philadelphie, 1896. Egalement, P. MICHAUD-QUANTIN, Somme de casuistique et manuels de confession au moyen-âge (Analecta Medievalia Namurcensia, XIII), Louvain 1962. Voir, d’une manière générale, les divers pénitentiaux du Moyen-Age.
27 Dit l’Aréopagite.
28 Confessions, X, 34, 51 et 52.
29 Voir P. G. THERY, Etudes dionysiennes II Hilduin, traducteur de Denys, édition de sa traduction, Paris, Vrin, 1937.
30 Dans l’Oedipe-Roi de Sophocle.
31 Edition Magnard, p. 298-307.
32 Le savant italien était d’ailleurs isolé dans sa conception du mécanisme de la vision, confirmée (en gros) par les connaissances scientifiques ultérieures.
33 Et généralement moins.
34 Voir sa Monadologie.
35 Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975.
36 Op. cit., p. 299 (p. 298 pour le texte latin).
37 République, fin du Livre VI.
38 Op. cit., p. 301 (p. 300 pour le texte latin).
39 BOVELLES est l’auteur d’un De raptu Pauli, Paris, Simon de Colines, 1531.
40 Op. cit., p. 303 (p. 302 pour le texte latin).
41 Ibid., p. 303-305 (p. 302-304 pour le texte latin).
42 Edition R. Marcel, Paris, les belles-lettres, t. II, 1964, p. 14.
43 Traduction de R. Marcel : "Qu’est-ce donc que la lumière du soleil ? – L’ombre de Dieu ? – Qu’est-ce donc que Dieu ? – Dieu est le Soleil du Soleil. Dieu est la lumière du soleil dans le corps du monde. Dieu est le soleil au-dessus des intelligences angéliques. Voilà ton Dieu, âme, le voilà, ton Dieu. C’est son ombre que la fantaisie t’avait montrée. L’ombre de Dieu est telle qu’elle est la plus belle des choses sensibles. Quelle est la lumière de Dieu, à ton idée ? Si l’ombre de Dieu est si lumineuse, combien resplendit la lumière de Dieu ! Partout tu aimes la lumière du soleil plus que tout le reste, et même tu n’aimes qu’elle. O âme, aime Dieu seul, seule lumière !" (p. 14).
44 Heptaplus, 4e exposition, chap. 4 (voir la traduction de LEFEVRE DE LA BODERIE, adaptée par Olivier BOULNOIS et Giuseppe TOGNON, in Jean PIC DE LA MIRANDOLE, Œuvres philosophiques, Paris, PUF ("Epiméthée"), 1993, p. 4. On peut y lire : "Les philosophes modernes comprenaient peut-être par le "soleil l’entendement qui est en acte, et par la "lune" celui qui est en puissance... La part de l’âme où elle est tournée vers les eaux supérieures qui sont l’Esprit du Seigneur, pour être lumineuse, est nommée soleil ; mais du côté où elle regarde les inférieures, c’est-à-dire les puissances sensibles..., elle est dite lune...". Voir tout le chapitre.
45 Hiérarchie céleste, I, 2, p. 71 (trad. M. DE GANDILLAC, éd. du Cerf).
46 Op. cit., p. 317. Texte latin, p. 316.
Auteur
Université de Tours, C.E.S.R.
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