Les paradoxes du travail dans la physiocratie
p. 111-126
Texte intégral
Introduction
1Karl Marx considérait William Petty comme le premier représentant de l’économie politique classique. Celui-ci aurait vu dans la création de la valeur l’action du travail. La théorie de la valeur-travail se serait alors perfectionnée au fil du temps. Pour Marx, la théorie de la valeur-travail caractérise les relations sociales essentielles entre les hommes1, et ainsi le travail est le concept fondateur de l’économie politique permettant de décrire la loi de la valeur. Dans ce sens, il existerait un lien de parenté de Petty à Marx en passant par François Quesnay. Figurant parmi ce grand dessein de l’évolution scientifique de l’économie politique, les physiocrates auraient joué une fausse note en n’aboutissant qu’à une théorie partielle du produit net, et n’auraient pas vu le caractère général de la théorie de la valeur-travail. Trop ancrés dans leur époque, ils n’auraient pris en compte que le travail particulier de l’activité agricole. Cette interprétation teintée de complaisance sous-estime le rapport complexe et parfois paradoxal que les physiocrates entretiennent avec le travail. Celui-ci ne trouve pas seulement son utilité comme concept économique, il a aussi une fonction opératoire du droit. Le travail comme activité productive ne déplace pas l’homme par rapport à une nature qui lui serait désormais extérieure, au contraire, il le place dans une chaîne de causalité qui établit une continuité avec elle.
2L’objet de cet article est de faire ressortir les paradoxes de la place du travail dans la pensée physiocratique. Il est à la fois un dispositif de première importance mais secondaire par rapport à la nature. Cette spécificité, dont Quesnay s’est ingénié à maintenir le caractère subtil et quelquefois paradoxal, a pu susciter des difficultés d’interprétation et des confusions. La première partie expose la formation de la notion de travail dans la pensée physiocratique. Le concept de travail s’exprime de manière très différente de celui que l’on peut trouver chez John Locke. Toutefois, il s’articule avec le droit naturel et structure la société par une théorie des droits de propriété. La seconde partie souligne l’importance du travail dans l’orientation du capital productif et son rôle de second plan dans la formation de la valeur économique. La distinction entre travail productif et improductif repose sur des bases naturalistes avant d’être ordonnée par un système de répartition.
Le travail et la propriété
3Avant d’être un concept économique, le travail est une catégorie juridique et morale. Chez les physiocrates, le travail opère d’une manière particulière avec la théorie de la propriété, et influence par ce truchement la structure sociale.
Le travail et la théorie du droit naturel
4La théorie du droit naturel intéresse Quesnay au moins depuis 1 747. La notion de droit naturel apparaît dès le t. III de l’Essai physique sur l’œconomie animale :
Les hommes ne peuvent donc, sans agir contre l’ordre naturel et leurs propres lumières, se refuser réciproquement cette portion, qui de droit naturel, appartient à chacun d’eux.2
5Le droit naturel permet d’établir un lien entre les lois physiques et la société.
6La théorie du droit naturel des physiocrates est fondée sur une théorie des droits de propriété. La dimension économique qui s’adjoint à la suite des principes juridiques opère le glissement du droit à l’économie. Il existe trois formes de propriété : la propriété personnelle, la propriété mobilière, et la propriété foncière. La première forme de propriété, qui consiste en la préservation de sa propre personne, est une obligation, un devoir envers soi-même et envers Dieu. Le principe d’auto-conservation est l’origine du droit naturel. Ce premier droit implique logiquement la deuxième forme de propriété, car pour se préserver il faut acquérir des biens de subsistance. Enfin, la propriété foncière est le stade ultime de la propriété, car elle permet d’assurer efficacement la conservation des propriétés personnelles. Il y a un emboîtement logique entre ces différentes formes de propriété, elles sont consécutivement soumises au premier principe d’auto-conservation ; ainsi la propriété foncière « n’est que le développement de la propriété personnelle, le dernier degré d’extension dont celle-ci soit susceptible »3. L’acquisition des biens et leurs productions sont directement concernées par les principes du droit.
7La propriété mobilière nécessite une dépense de travail pour acquérir un bien, de même, la propriété foncière implique une dépense de travail nécessaire au défrichement d’un terrain, et le mettre en bonne disposition afin d’être cultivé. La propriété foncière apparaît par la nécessité de mieux assurer les propriétés personnelles et le confort :
Supposons que les mortels réduits à l’état de simple multitude, sans conventions sociales, veuillent se livrer à la culture pour étendre leur Droit naturel, en multipliant au-delà les bornes ordinaires de la production spontanée, les objets propres à satisfaire leurs besoins ou leurs désirs. Là commence à naître, par degrés, la propriété foncière.4
8Comme la propriété foncière est constitutive de la société civile, elle génère dans le même temps les institutions permettant la protection des propriétés et les classes sociales.
9Au niveau de la théorie du droit naturel, le travail joue un rôle important car si l’on considère un « état de pure nature ou d’entière indépendance, les hommes ne jouissent de leur droit naturel aux choses dont ils ont besoin que par le travail »5. Le travail est un médiateur entre la nature et la propriété, et il acquiert une dimension morale en répondant à la satisfaction des premiers besoins6. Le travail est la conséquence de la volonté des hommes, il « leur faut les facultés du corps et de l’esprit, et les moyens ou les instruments nécessaires pour agir et pour parvenir à satisfaire à leurs besoins »7. Jusqu’ici la pensée s’apparente à celle Locke où la propriété désigne un droit sur ce qui a été produit par le travail :
Avant l’appropriation des terres […] ; quiconque employait ses peines à transformer les produits spontanés de la nature, et les modifiait d’une manière ou d’une autre en les tirant de l’état où la nature les avait mis et en y annexant son travail, celui-là acquérait par là même une propriété de toutes choses.8
10Et logiquement le travail est à la source de la valeur économique : « C’est bien le travail qui met de la différence de valeur entre les choses […] »9. La nature, et la terre en particulier, n’est que des éléments secondaires et très minoritaires de la valeur. On comprend pourquoi les économistes classiques trouveront avec l’industrie la quintessence de l’action du travail et de la valeur économique. Cette approche lockienne provient essentiellement de ce que James Tully appelle le « Workmanship model ». Locke relie le maker (le créateur) à son ouvrage ; le processus de création revêt alors un acte conscient (making), puisque la création est le fruit d’une volonté10. Locke transpose alors cette relation théologique aux relations humaines et en fait la source de la propriété. La connaissance que l’ouvrier a de sa production caractérise la propriété. Sur le même modèle où Dieu créa la nature et les lois qui sont sous sa dépendance, l’ouvrier crée son ouvrage par son travail. Le travail, acte de création conscient, produit une forme nouvelle et justifie alors la propriété.
11La proximité avec la pensée de Quesnay n’est pourtant ici qu’apparente. Quesnay ne va jamais aussi loin en ce qui concerne le travail, car « les physiocrates ne considèrent pas le travail comme une caractéristique anthropologique »11, dans le sens où il ne permet pas d’identifier à lui seul le processus de production. Le travail est un moyen, c’est un intermédiaire entre l’ordre naturel et la propriété. C’est en fonction de leur constitution naturelle que les hommes sont poussés à acquérir des biens afin de satisfaire des besoins naturels et vitaux, et c’est cette même constitution naturelle qui les pousse à améliorer leur confort en acquérant d’autres biens. Cette conception du travail, comme moyen et non comme création, doit être mise en relation avec la théorie de la connaissance de Quesnay, et de manière plus précise, avec la théorie des causes occasionnelles qu’il emprunte à Malebranche.
12La relation entre deux événements n’est qu’une cause occasionnelle. C’est une cause visible et déterminable par la raison, mais en réalité qui s’explique par la véritable cause :
Il est nécessaire d’établir clairement les vérités qui sont opposées aux erreurs des anciens philosophes, et de prouver en peu de mots qu’il n’y a qu’une véritable cause parce qu’il n’y a qu’un vrai Dieu : que la nature ou la force de chaque chose n’est que la volonté de Dieu : que toutes les choses naturelles ne sont point de véritables causes, mais seulement des causes occasionnelles : et quelques autres vérités qui seront des suites de celles-ci.12
13La succession des mouvements et de chocs entre les corps est l’effet d’un ensemble de causalités dont l’origine, Dieu, est la vraie cause. Le schéma des causes occasionnelles opère tant au niveau de la physique expérimentale (mouvement des corps et effet sur les sens) que de la vie intellectuelle par l’apparition de la raison universelle13, et ne se limite pas à la distribution des grâces. D’ailleurs, sur ce dernier point, Quesnay est peu expansif et se contente de se référer à l’ordre naturel. Il conserve la théologie naturelle de Malebranche, où la nature est l’œuvre de la main divine, mais laisse de côté la théologie morale ; la morale n’est pas plus à rechercher dans la grâce et l’immortalité de l’âme, mais dans l’étude des lois physiques qui régissent l’ordre naturel14.
14Réintégré dans le schéma des causes occasionnelles, le travail devient un élément de causalité physique, « c’est une composante nécessaire du rapport de l’homme à la nature »15. Philippe Steiner n’y voit qu’une dérive langagière, et un retour assez classique à la causalité cartésienne16, il nous semble pourtant que Quesnay propose un retour au malebranchisme17. La relation entre des objets et les sens s’articule par des causes occasionnelles :
Que les corps ou les objets qui occasionnent nos sensations par le mouvement, n’étant eux-mêmes ni le mouvement ni la cause du mouvement, ils ne sont pas la cause primitive de nos sensations ; car ce n’est que par le mouvement qu’ils (les corps ou les objets) sont la cause conditionnelle de nos sensations.18
15C’est le mouvement des corps qui est cause occasionnelle des sensations. Autrement dit, les objets sont perçus par la médiation du mouvement, cause occasionnelle sur le corps. C’est à cette occasion que l’ordre naturel peut apparaître, par les sensations, à notre raison. De manière analogique, le travail correspond à un mouvement plutôt qu’à une cause créatrice de la valeur. Le travail est l’occasion de l’expression de la loi naturelle, d’où émergent la propriété et l’ordre social. Le travail ne produit rien en lui-même, il est un maillon d’une chaîne de causalité. Le travail n’est pas créateur, il modèle, oriente, accompagne, met en disposition une nature existante. L’approche malebranchienne de Quesnay permet de comprendre pourquoi le travail est incorporé au discours juridique alors qu’il est très absent comme concept économique créateur de valeur. Le travail n’a pas de force créatrice, la vraie cause de la création est l’ordre naturel, transcription tangible de la main divine. Le travail n’est que la cause occasionnelle qui permet d’acquérir des propriétés.
16Dans le cadre de l’état de pure nature, la jouissance du droit naturel est inégale selon les aptitudes physiques et intellectuelles de chacun :
Mais en considérant les facultés corporelles et intellectuelles, et les autres moyens de chaque homme en particulier, nous y trouverons encore une grande inégalité relativement à la jouissance du droit naturel des hommes.19
17Les capacités naturelles des individus sont naturellement inégales et déterminées selon l’ordre naturel, si bien que la force de travail dépensée pour l’acquisition des biens est très différente selon la constitution physique des individus. La propriété est définie par l’ordre naturel et le travail joue un rôle de médiation, cause occasionnelle, entre l’ordre naturel et la propriété.
Travail et hiérarchie sociale
18La théorie du droit naturel des physiocrates tente d’expliquer la formation de la société, et s’inscrit dans la tradition des jurisconsultes. On peut déceler deux raisons à l’apparition de la société : la première résulte, comme chez Pufendorf, de la sociabilité naturelle des hommes qui sont
[attirés entre eux] par des sentiments de satisfaction, de tendresse, de pitié, etc., qui sont autant d’indices des intentions de l’Auteur de la nature, sur l’observation des règles qu’il prescrit aux hommes pour les obliger par devoir à s’entre-secourir mutuellement.20
19Toutefois cette sociabilité naturelle n’explique pas entièrement l’apparition de la société civile et d’une institution tutélaire qui la régule.
20La seconde raison tient d’abord au développement des propriétés privées, mais surtout à l’apparition de la propriété foncière qui structure la société. Le propriétaire foncier est placé en haut de la hiérarchie sociale parce qu’il permet de mieux garantir l’approvisionnement des biens de subsistance et en conséquence d’augmenter la jouissance du droit naturel de l’ensemble des membres de la société. La propriété foncière engendre la formation d’une institution protectrice des propriétés et l’organisation sociale :
La perfection de la culture, qui suit la garantie des propriétés, fait bientôt naître assez de fruits, pour que les Hommes vivant sous la confédération puissent être distingués en deux classes, dont la première travaille à la production, et la seconde peut s’occuper de tout autre emploi de son intelligence et de ses forces.21
21La société est divisée entre ceux dont la tâche est de travailler à la production des terres et ceux qui s’occupent à d’autres fonctions. Toutefois comme l’indique Baudeau cette distinction des tâches est progressive, et implique une double division entre ceux qui travaillent la terre et ceux qui ne la travaillent pas, puis entre le travail de direction de l’entreprise agricole (le cultivateur) et le propriétaire foncier ; même si dans les premiers moments de la société civile les fonctions de propriétaire foncier et de cultivateur se confondent. La théorie de la propriété établit le lien entre économie et politique22, elle légitime la situation sociale et politique des propriétaires fonciers, car c’est à partir de la propriété foncière que la puissance de l’État peut se développer.
22La position sociale est aussi fonction de l’utilité du travail. Dans les premiers âges de la société civile il n’existe pas de distinction entre propriétaire foncier et fermier. Le propriétaire foncier se détache de sa fonction de direction par souci de compétence :
[…] comme il ne suffit pas d’avoir fait les premières dépenses préparatoires à la culture pour que les productions renaissent annuellement, & qu’il peut se faire que les propriétaires de ces premières dépenses manquent de facultés nécessaires pour subvenir à tous les frais que la culture exige encore chaque année, il est dans l’ordre de la propriété que quiconque se chargera de ces frais, partage dans les productions avec ceux par qui les premières dépenses ont été faites.23
23Le propriétaire foncier devient uniquement un rentier et laisse, à cause de ses faibles compétences d’entrepreneur, la charge de direction de l’exploitation agricole au fermier. S’opère ici un détachement entre la propriété foncière et le travail.
24Pour autant cela ne signifie pas que le fermier soit un salarié du propriétaire foncier, il est au contraire un propriétaire et indépendant de lui24. La division du travail entre propriétaires fonciers et fermiers se fonde sur l’efficacité économique. Les premiers sont légitimés par un travail des origines, celui du premier défrichement, alors que les seconds sont légitimés par leurs compétences de gestionnaire. Le travail de direction permet d’obtenir la propriété des productions. Le fermier rémunère le propriétaire pour la location de la terre ce qui forme le produit net. La fixation des baux, autrement dit du produit net, est le résultat d’un rapport de force entre deux propriétaires.
25Du point de vue du développement de l’économie agricole le travail du fermier apparaît en conséquence tout aussi important que le travail des origines du propriétaire foncier. La logique juridique laisse place à la logique économique. Ainsi est-on passé du travail comme justification de la propriété au travail comme justification de l’efficacité économique. Ce double aspect du travail fixe les rôles sociaux dans le dispositif économique, mais le travail reste un moyen et se définit surtout en fonction de son aspect utilitaire ce qui permet à Mirabeau de souligner l’importance du fermier :
Le Fermier alors est, dans l’ordre économique, égal au Propriétaire du fonds. Ils font ensemble un traité mutuel d’association aux produits de la cultivation ; l’un fournit le champ, l’autre ses richesses, qui seules peuvent féconder ; et ils conviennent ensemble des articles de l’association, dans lesquels le propriétaire, qui veut disposer de sa personne et de son temps, cède, pour un revenu fixe et prescrit, la totalité de la production au Fermier, qui prend, à ses risques et fortunes, les hasards, soit en bien soit en mal.25
26Mais ce qui est mis en avant ce n’est pas la force de travail de l’ouvrier agricole, mais l’intelligence de direction du capital productif. Le fermier assume le risque de l’entreprise agricole et dirige au mieux le capital productif investi. Cette approche du travail s’oppose radicalement à une conception largement développée par l’économie politique classique naissante. Ainsi pour Adam Smith, le travail d’inspection et de direction ne compte pas réellement dans la détermination du profit, il n’est que la rémunération du capital engagé26. La valeur économique des biens dépend de la quantité de travail déployée ou « commandée » dans la production, en conséquence, le travail de direction est considéré comme secondaire. C’est là un propos tout à fait contraire à la position physiocratique qui voit dans ce travail de direction l’archétype même du travail efficace et utile à la production. Il correspond parfaitement bien à une perception du travail comme mouvement ou élément de causalité. De manière un peu paradoxale, cette spécificité du travail de direction est peu évoquée à propos des artisans, sans doute parce que les physiocrates voient dans l’agriculture l’unique gisement de la productivité. La logique inhérente à leur système persiste, et ils ne retiennent pas la force de travail de l’artisan comme un élément décisif de l’activité sociale et économique, mais mettent en avant la fonction utilitaire de son travail, son habileté à transformer la matière première en objet utile et commerçable.
27La conception physiocratique du travail se distingue largement de celle de Locke. Le travail joue un rôle essentiel dans le dispositif de la théorie de la propriété, mais il n’a aucune force créatrice et n’est qu’un mouvement. Le travail le plus utile à l’ordre naturel et social est le travail de direction, d’orientation du capital du fermier.
Travail et mécanisme économique
L’ambiguïté de la théorie du produit net chez les physiocrates
28La thèse physiocratique du produit net, on le sait, est fondée sur la productivité exclusive de l’agriculture. Elle constitue l’ossature de la thèse économique des physiocrates où Quesnay s’insurge contre l’abandon de l’agriculture opposant Sully à Colbert. Pourtant deux thèses coexistent dans les textes physiocratiques.
29La première thèse affirme que le produit net résulte de l’écart entre la valeur vénale, déterminée par les prix de marché du blé, et la valeur fondamentale, le coût de production. Cette affirmation permet à Quesnay de défendre la thèse de la liberté d’exportation et du haut prix des grains : la liberté d’exportation provoque une hausse des prix des blés favorisant alors l’accroissement du produit net et des reprises (dépenses avancées pour la production) des fermiers. Cette situation accroît les investissements dans l’agriculture et favorise la production des blés assurant ainsi l’approvisionnement des denrées de subsistance. Quesnay analyse les effets bénéfiques de l’ouverture du marché des grains et ses effets en termes de croissance et de dynamique économique, et ce dès ses premiers écrits économiques27. Cette définition du produit net ne permet pourtant pas de démontrer la productivité exclusive de l’agriculture et conduit nécessairement à une deuxième thèse où la richesse provient uniquement de la terre. Les productions de la terre se font elles-mêmes sans interventions d’aucune sorte, et peuvent produire plus qu’elles ne reçoivent. Il y a donc une spécificité naturelle de l’activité agricole. La nature a un pouvoir de création, elle produit par son propre mécanisme. Le travail de l’homme, du fermier ou du paysan ne vient qu’optimiser un processus déjà existant.
30Cependant, l’idée d’une théorie de la valeur fondée sur la terre et le travail est en réalité plus ancienne puisqu’on la retrouve d’abord avec Petty : « le travail est le père et le principe actif de la richesse, de même que la terre en est la mère »28. La valeur des objets est une combinaison de terre et de travail. Petty estime ainsi qu’il serait bon de trouver une commune mesure de la terre et du travail. Mais Petty, et Cantillon après lui, ne se proposera jamais d’aller aussi loin que les Physiocrates. Il s’établit pourtant l’idée suivante : le salaire est la rémunération du travail, cette rémunération pouvant être assimilée à une dépense en biens agricoles. Il est donc possible de mesurer le travail en quantité de biens agricoles dépensée. Quesnay définit la valeur de la production brute de la manière suivante :
31PB = AN + AP + PN
32où AN sont les avances annuelles29 mises en jeu pour la production, AP est la quantité de capital fixe annuellement dépensée ou intérêts des avances primitives30, PN est le produit net dégagé, et PB est la production brute appelée aussi reproduction totale. Si les avances annuelles et primitives sont les dépenses faites par le fermier pour la production, le produit net revient au propriétaire foncier, rémunération légitime de son droit de propriété.
33Si le travail est un principe actif qui accroît les productions, il reste une pure dépense. La notion d’avances annuelles ne constitue pas un bloc homogène, et il faut distinguer deux types de dépenses : les avances annuelles productives et les avances annuelles stériles31. Les dépenses stériles annuelles sont essentiellement des salaires (ANsal), et les dépenses productives annuelles sont composées de semences (ANsem) qui ont un pouvoir de régénération – terme utilisé pour désigner le processus productif et la dimension naturaliste de l’activité agricole. On peut écrire :
34AN = ANsal + Ansem
35ce qui donne l’équation de la reproduction totale :
36PB = ANsal + ANsem + AP + PN
37La raison de la productivité exclusive de l’agriculture provient de la combinaison terre/travail, c’est-à-dire de ANsem et ANsal. Cette différenciation entre les avances annuelles saisit tout à la fois la spécificité du secteur agricole et l’improductivité de l’industrie :
Ainsi l’origine, le principe de toute dépense, et de toute richesse, est la fertilité de la terre, dont on ne peut multiplier les produits que par ses produits mêmes. C’est elle qui fournit les avances au cultivateur qui la fertilise, pour la faire produire davantage. L’artisan n’y peut contribuer que par la formation de quelques instruments nécessaires pour remuer la terre, et qu’au défaut d’artisan, le cultivateur formerait lui-même. Qu’importe qui en soit l’ouvrier, il faut que la terre ait produit d’avance ce qu’il a consommé pour sa subsistance : ce n’est donc pas son travail qui a produit cette subsistance. La consommation de la subsistance n’a rien produit non plus, puisque cette consommation n’est qu’un anéantissement de richesses produites d’avance par la terre.32
38Le travail de l’ouvrier est une consommation de subsistance qui ne produit rien en elle-même, car elle « n’est qu’un anéantissement de richesses produites ». Mais dans l’agriculture l’action combinée du travail et de la nature permet à chaque période de production de reconstituer l’ensemble des avances. Le travail et les dépenses de capitaux fixes ne viennent que décupler un processus naturel, au contraire de l’industrie dont la dépense est une pure consommation (salaires et matières premières), et si cette dépense satisfait des besoins utiles, elle grève tout de même la richesse créée par l’agriculture33. La production industrielle ne renouvelle pas les subsistances et les matières premières et par conséquent ne dégage pas de produit net. Les avances annuelles de l’industrie sont telles que ANsem = 0. L’industrie est stérile car elle ne peut engendrer par elle-même le renouvellement des avances et faire apparaître un surplus.
Travail productif et improductif
39Le travail agit sur la nature mais ne produit rien en lui-même car il n’est qu’un mouvement. Le travail assiste le processus de création de valeur plutôt qu’il ne le forme :
L’homme peut donc à bon droit appeler son travail productif, lorsqu’il l’emploie à obtenir la multiplication des biens. En lui-même son travail n’est qu’une action, un mouvement, une manière d’être dirigée par l’intelligence. Il est productif ou stérile, suivant la nature de son objet et du fonds sur lequel il s’exerce ; mais quoiqu’il soit stérile, lorsqu’il n’est pas appliqué à la terre, il peut être très utile et très nécessaire.34
40Le travail étant une consommation de richesses produites, la combinaison entre le « travail » de la nature et le travail humain différencie les travailleurs productifs des travailleurs improductifs. C’est sur ce point que les physiocrates se séparent de l’économie politique classique.
41Smith définit le travail productif comme quelque chose « qui ajoute à la valeur de l’objet sur lequel il s’exerce »35. Le travail productif est essentiellement le travail de l’industrie où la matière première est transformée. Le travail crée des biens et la valeur se fixe sur l’objet pour être amené sur le marché. Le travail est dit improductif lorsqu’il échappe à cette définition, par exemple les emplois de service. Smith souligne que les physiocrates n’auraient pas compris l’idée essentielle du travail comme facteur créateur de la valeur ajoutée. Finalement Smith a une conception très lockienne du travail, et par là incompatible avec celle des physiocrates. Cette différence introduit un biais interprétatif que l’on retrouve chez Marx. L’auteur du Capital fait subir un certain nombre de torsions importantes à la pensée physiocratique36. Marx souligne le lien fondamental entre travail productif et plus-value, mais il reproche aux physiocrates la non généralisation de ce lien analytique décisif :
[…] dans la manufacture, d’une manière générale, on ne voit pas l’ouvrier produire directement, ni ses moyens de subsistance, ni l’excédent par rapport à ces moyens de subsistance […] dans l’agriculture, au contraire, le processus se manifeste immédiatement dans l’excédent de valeurs d’usage que produit l’ouvrier par rapport à celles qu’il consomme ; il peut donc être compris sans procéder à une analyse de la valeur en général, sans avoir une claire compréhension de la nature de la valeur. Donc même alors que la valeur est ramenée à la valeur d’usage et celle-ci à la matière produite. C’est pourquoi le travail agricole est pour les Physiocrates le seul travail productif car c’est le seul travail qui crée une plus-value et la rente foncière est la seule forme de plus-value qu’ils connaissent.37
42Le travail productif s’associe directement à la formation d’un surplus, mais le travail agricole ne jouit d’aucune spécificité par rapport au travail de l’industrie. Atteints de cécité, les physiocrates n’auraient perçu que la valeur d’usage des subsistances et non le caractère général de la théorie de la valeur fondée sur la quantité de travail incorporée dans la production. Il en aurait été ainsi, si pour les physiocrates, le travail avait été interprété comme une dépense effective mettant en marche le processus de création d’une plus-value, différence selon Marx, entre la valeur de la force de travail et la valeur produite par son usage. Or il n’en est rien, les travailleurs de l’industrie et du commerce sont stériles car ils ne font pas renaître la matière qu’ils utilisent pour la production. La production est un phénomène antérieur à l’activité de travail puisqu’elle se situe dans la nature. Seule la nature produit et le travail qui s’y applique ne fait que décupler ce processus naturel, et ce, autant dans l’industrie que dans l’agriculture. En conséquence, le travail n’ajoute réellement et objectivement rien en valeur. Le problème n’est pas celui de la reconnaissance d’une théorie partielle de la valeur-travail, qui donnerait aux physiocrates le statut respectable de précurseurs. La distinction qu’ils opèrent a une portée considérable, puisque la différence entre travail productif et improductif s’établit seulement sur la matière à laquelle s’applique le travail. On peut affirmer que les physiocrates n’ont pas de théorie de la valeur-travail.
43Le texte de Quesnay, Sur les travaux des artisans, anticipe les critiques de Marx. La première remarque de Quesnay peut apparaître dans un premier temps ambiguë puisqu’il admet que le travail de l’industrie correspond à une « production réelle de richesse » :
je dis réelle, car je ne veux pas nier qu’il n’y ait addition de richesses à la matière première des ouvrages formés par des artisans, puisque leur travail augmente en effet la valeur de la matière première de leurs ouvrages.38
44Les termes « addition de richesses » indiquent que la production a bien exigé des dépenses, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il y ait eu formation d’un surplus. La deuxième partie de la phrase est en apparence plus problématique. En effet, si le travail augmente la valeur des matières premières, c’est qu’il y a eu création de valeur et donc que le travail de l’industrie est productif. Non répond Quesnay, car l’artisan n’a fait qu’augmenter la valeur d’usage de la matière première :
Le travail dispendieux de l’ouvrier en dentelle, ajoute une augmentation de valeur vénale au fil qui est la matière première de la dentelle. Donc conclut-on, le travail de la dentelle produit une augmentation de la richesse. On pense de même du travail des peintres qui font des tableaux de grand prix ; car plus le travail des artistes et des artisans se paye chèrement, plus il paraît productif.39
45La production industrielle correspond davantage à une transformation et une addition de matière plutôt qu’en une création de valeur.
46Si l’on constate que la valeur du travail du peintre est plus élevée que celle du dentellier, cette différence dépend de la rareté et de l’utilité qu’elle représente sur le marché. Quesnay estime alors que ce n’est pas la quantité de travail qui mesure objectivement la valeur des biens de l’industrie, car elle s’établit à leur valeur d’usage. Quesnay donne enfin un dernier argument qui rend problématique l’évaluation de la valeur en termes de quantité de travail incorporée dans la production : « vous nous diriez aussi, dit-il, qu’il serait fort désavantageux que l’on inventât une machine qui fît, sans frais, de belles dentelles et d’excellents tableaux »40. En effet, si la valeur des biens dépend de la quantité de travail incorporée dans la production, alors logiquement l’utilisation massive de capital fixe devrait diminuer la valeur des biens et réduire les profits. Les artisans, les industriels, et les fermiers n’auraient donc aucun intérêt à investir davantage dans du capital technique. Quesnay anticipe ici le problème auquel sera confronté Marx sur l’augmentation de la composition organique du capital et la baisse tendancielle du taux de profit. Pour Quesnay, l’inadéquation entre l’intérêt de l’artisan, qui dans sa recherche de profit augmente l’investissement en capital fixe, et l’évaluation de la valeur en termes de travail montre que le travail n’est pas un étalon de valeur objectif.
47Cette critique du travail comme étalon de valeur explique pourquoi le travail agricole est seul productif, mais aussi pourquoi l’ouvrier agricole est le grand absent du système physiocratique. Les physiocrates évoquent davantage les vertus des fermiers-entrepreneurs que celles des ouvriers, et mettent en avant la fonctionnalité du travail et non sa force productive, car le travail en lui-même ne produit rien. Le travail de l’ouvrier est un travail physique et mécanique identique à celui des animaux ou des machines. Le travail du fermier traduit quant à lui une capacité d’orientation de cette force. Tout l’art du fermier consiste à diriger le travail de l’ouvrier de la manière la plus efficace possible.
48Le travail de l’ouvrier peut alors être remplacé par celui des animaux et des outils plus performants. Il suffit alors d’accroître la quantité de capital fixe (avances primitives) :
Les avances annuelles augmentent au préjudice du produit à proportion que les avances primitives diminuent, parce qu’on y supplée autant qu’on le peut par des travaux fort dispendieux aux dépens de la reproduction annuelle, qui en fait les frais faute d’avances primitives suffisantes par lesquelles on peut exécuter annuellement avec le moins de frais possible la culture la plus fructueuse. Les intérêts de ces avances primitives diminuent à proportion que ces avances elles-mêmes dépérissent.41
49L’accroît de capitaux fixes augmente le produit net des entreprises agricoles en économisant des avances annuelles, c’est-à-dire des dépenses en salaire. La productivité des facteurs de production, au sens moderne du terme, a progressé et amélioré la rentabilité de l’entreprise agricole. Le progrès technique est une variable clef du processus du développement économique42.
Conclusion
50Pour les physiocrates, le travail ne déplace pas l’homme en dehors de la nature, au contraire, il s’y redéploie à travers la question du droit. Si le travail est nécessaire au droit il n’en est pas la cause première. Le travail est un moyen, c’est une cause occasionnelle par laquelle l’action humaine se trouve en adéquation avec la loi naturelle. Le rapport social est légitimé et structure par la théorie du droit naturel. La conséquence de la logique juridique des physiocrates est de mettre au centre du système social et économique, le premier travail de défrichement, la propriété foncière, mieux à même, selon eux, de garantir la subsistance et la jouissance de leur droit naturel aux autres membres de la société. Mais l’application d’un tel schéma aboutit au premier paradoxe où ceux qui ne travaillent pas sont « naturellement » en haut de la hiérarchie sociale.
51Les physiocrates n’ayant pas une conception lockienne du travail, c’est l’utilité du travail qui est mise en avant et non sa puissance créatrice. Le deuxième paradoxe n’en est pas moins déroutant : si le travail peut avoir une utilité économique réelle et déterminante il n’est pas créateur de valeur économique. C’est la nature qui crée des richesses en dehors de toutes actions humaines, et le travail de l’homme ne fait qu’accompagner un processus naturel déjà existant. Il s’agit bien d’une analyse en terme physique, car lorsque l’industrie ajoute en valeur ce n’est que l’utilité du travail et des productions qui est prise en compte et non ce qu’elle a réellement créé. La différence entre travail productif et improductif tient à la différence de l’objet auquel il s’applique, c’est-à-dire au processus naturel qu’il est censé accompagner. Le travail n’est pas l’étalon de valeur pour Quesnay, c’est une cause occasionnelle de la valeur. La distinction travail productif/travail improductif est à l’origine d’un malentendu historique avec Marx, qui réinterprète la pensée physiocratique à l’aune de son propre système de pensée. Si l’approche de Marx a pu être féconde en soulignant la contribution importante des physiocrates à la pensée économique, elle est aussi à l’origine de confusions. Les physiocrates n’ont pas de théorie de la valeur-travail, leur théorie du produit net repose sur une mécanique différente. En ce sens, la physiocratie constitue un courant de pensée différent de l’économie politique classique, accordant au travail une fonction qui doit épouser une approche biophysique de l’économie.
Notes de bas de page
1 Dumont (1977), p. 183.
2 Quesnay (1 747), p. 49.
3 Mercier de la Rivière (1767), p. 446.
4 Baudeau (1767), p. 14.
5 Quesnay (1767), p. 115.
6 Steiner (1998), p. 98.
7 Quesnay (1767), p. 115.
8 Locke (1689), p. 29.
9 Ibid., p. 31.
10 Tully (1992), p. 66-68.
11 Larrère (1992), p. 200.
12 Malebranche (1712), p. 646.
13 Cf. sur ce point Moreau (2004), p. 172.
14 Larrère (1994), p. 121-122.
15 Ibid., p. 130.
16 Steiner (1998), p. 40-41.
17 Si Quesnay avait tourné le dos à Malebranche aussi franchement, on saisit mal le recours à une longue citation du Traité de morale figurant en avant-propos d’un ouvrage comme la Philosophie rurale. Quesnay n’a jamais contesté l’idée maîtresse de Locke suivant laquelle toutes les idées proviennent des sensations, mais il minore largement l’importance du philosophe anglais, et met en avant la pensée de Malebranche [Quesnay (1 747), p. 250]. Enfin, Schøsler note dans l’article Évidence un retour au malebranchisme malgré l’affirmation des thèses sensualistes [Schøsler (1997), p. 83].
18 Quesnay (1756), p. 82.
19 Quesnay (1767), p. 115.
20 Ibid., p. 119.
21 Baudeau (1767), p. 21.
22 Steiner (1987).
23 Mercier de la Rivière (1767), p. 447.
24 Baudeau (1776), p. 138.
25 Mirabeau (1763), p. 10.
26 Smith (1776), p. 118.
27 Charles (2000), p. 5-8.
28 Petty (1662), p. 77. Cantillon rappelle aussi cette phrase dès la première page de son Essai sur le commerce en général.
29 On peut considérer qu’elles sont essentiellement constituées de salaires en nourriture et de semences nécessaires à la production.
30 Cette quantité de capital fixe se nomme avances primitives pour les physiocrates. Le fermier investit sur 10 ans 5 fois plus de capital fixe que d’avances annuelles. Ainsi en référence à la Formule de 1766, lorsque le fermier dispose de 2 milliards d’avances annuelles, il a investi 10 milliards d’avances primitives. Pour Quesnay l’amortissement étant de 10 %, la quantité d’avances primitives dépensée annuellement (AP) est de 1 milliard.
31 Mirabeau (1760), p. 136.
32 Quesnay (1766), p. 973.
33 Il s’agit d’une opposition entre la fécondité de la terre et la stérilité de l’industrie. Baudeau résume cette argumentation de la manière suivante : « On appelle cet art stérile, infécond ou non productif par opposition à l’art fécond ou productif, parce qu’en effet il s’exerce sur les productions naturelles, non pour aider et pour augmenter leur fécondité ; non pour qu’elles se reproduisent et se multiplient, mais au contraire pour les rendre elles-mêmes prochainement et immédiatement utiles aux jouissances des hommes, aux dépens de cette même fécondité, qui périt sous la main de l’art stérile. » [Baudeau (1771), p. 4].
34 Le Trosne (1777), p. 495.
35 Smith (1776), p. 417.
36 Cartelier (1976), p. 76-81.
37 Marx (1861), p. 34.
38 Quesnay (1766), p. 975.
39 Ibid., p. 977.
40 Ibid.
41 Quesnay (1766), p. 601.
42 Vaggi (2002), p. 76-77.
Auteur
Université de Poitiers,
CEDES (Centre d’études sur le développement économique et social).
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